ARCHITECTURE RÉGIONALE LA TRADITION RÉSISTE

Transcription

ARCHITECTURE RÉGIONALE LA TRADITION RÉSISTE
Enquête
par Maïlys Honoré
C’est à la diversité
du territoire français,
que l’on doit
la grande richesse
de l’architecture
régionale.
Et la tradition a
du bon ! Elle est
encore une véritable
source d’inspiration
pour les maisons
d’aujourd’hui.
Q
uand on pense à la Bretagne,
on rêve d’une maison en granit
couverte d’ardoise. Quand on
pense à la Normandie, on imagine une jolie demeure à colombage.
Quand on pense au sud de la France, on
voit la bastide provençale et sa génoise.
En France, chaque région possède son
propre code architectural. Mais pourquoi les constructions sont-elles si différentes ? Nos ancêtres, responsables
de cette pagaille, ont en réalité bien
fait les choses. Ils se sont attachés à
bâtir des maisons capables de surmonter les conditions climatiques, et
de transformer les contraintes du relief
en atouts ! Et même si aujourd’hui
les maisons tendent à se ressembler,
que l’on construise à Saint-Malo, à
Deauville ou à Avignon, force est de
constater que certains professionnels
déclinent leurs modèles en fonction de
la localisation géographique du projet. Vous pourrez ainsi vous offrir une
maison neuve qui respecte la tradition
architecturale de la ville dans laquelle
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ARCHITECTURE
LA TRADITION
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La région Centre porte bien son nom.
L’architecture de cette région est soumise à
des influences diverses, à cause de
sa localisation géographique. Au nord,
dans la Beauce, les maisons sont basses afin
de se protéger des vents qui balaient
le secteur. À l’ouest, elles peuvent reprendre
certains détails normands. Et dans le sud,
les constructions affichent parfois
de belles pierres blanches, et quelques
caractéristiques des demeures dressées
le long de la Loire. Ici, réalisations
Maisons Sercpi (n° 1 www.sercpi.com),
Concept Habitat (n° 2 www.concept-habitat.fr)
et Eurobat (n° 3 www.eurobat.fr).
vous avez décidé de vous installer. Tour
de France de ces constructions qui
conservent leur style !
RÉGIONALE :
RÉSISTE
Tradition
millénaire ?
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Sur la route des vacances, on sait, sans
même lire les panneaux, que l’on quitte la
région parisienne pour entrer en territoire
normand, ou que l’on sort de la vallée du
Rhône pour arriver en Provence... Comment ? En constatant que l’architecture
change. Mais pourquoi les maisons ne se
ressemblent-elles pas ? Simplement parce
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Enquête
En Normandie, les maisons neuves
n’hésitent pas à reproduire le traditionnel
colombage ! Un élément architectural qui
permet d’intégrer facilement
la construction au paysage local. Mais
ce n’est pas une obligation ! Les modèles
déclinés s’inspirent aussi des toitures
à forte pente et abritant des combles
aménagés pour se fondre à l’existant.
Ici, réalisations Maisons France Confort
(n° 1 www.maisons-france-confort.fr),
et Maisons Serge Gautier
(n° 3 www.serge-gautier.fr).
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Marc Loiseau
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qu’elles ont été façonnées par le temps et
les hommes pour s’adapter à leur environnement. Si les constructions réalisées dans
la Beauce, par exemple, sont basses, c’est
pour offrir le moins de prises possibles aux
vents qui balaient la région et protéger ainsi
les habitants du froid et des sifflements.
Dans le Perche, les maisons sont à demienterrées, afin de se fondre dans la terre. Il
s’agit d’un excellent moyen de se protéger
des hivers rigoureux. En montagne, on évite
de construire sur les sommets et les crêtes
pour se « cacher » sur le versant sud afin
de se protéger des vents et bénéficier d’un
maximum d’ensoleillement. Chaque région
est différente. Et chaque architecture raconte
cette différence. Afin de conserver ces particularités régionales, les constructeurs de
maisons individuelles s’organisent. « Nous
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avons un bureau d’études centralisé qui
donne les grandes lignes sur les méthodes
de construction », explique Valérie Da Costa,
responsable marketing et communication
de Maisons Clair Logis, « mais ce sont
les directions régionales qui développent
les modèles afin d’être au plus près des
demandes des clients, et de la réalité de
chaque secteur. » Un mode de fonctionnement que l’on retrouve également chez
Maisons France Confort : « depuis toujours,
nous nous sommes attachés à concevoir
des catalogues régionaux », confirme Loïc
Vandromme, directeur de la communication
du groupe, « et même si les modèles présentent un aménagement intérieur similaire
d’un secteur à l’autre, l’extérieur est décliné
avec des éléments traditionnels ». Et si
la tendance au contemporain n’est pas à
négliger, la tradition résiste : « il y a un réel
attachement des acquéreurs à la région
dans laquelle ils font construire, constate
Valérie Da Costa, et c’est aussi ça qui donne
du charme à nos terroirs ». De son côté, Loïc
Vandromme nuance : « les jeunes veulent du
contemporain. Ce sont surtout les secondoaccédants, plus traditionnels dans leurs
demandes, qui se tournent vers les modèles
régionaux ».
Le choix
des matériaux
Traditionnellement, les matériaux utilisés
pour construire les maisons étaient ceux
disponibles sur place. « L’architecture traditionnelle dépend d’abord de la géologie
locale car on ne peut s’affranchir de son
Enquête
En Bretagne, l’ardoise est privilégiée pour
la couverture, la cheminée est construite
dans l’axe du pignon pour respecter
la tradition, et la forte pente du toit
cache des combles aménagés.
Ici, réalisations Maisons Demeurance
(n° 1 www.maisons-demeurance.com)
et Mikit (n° 2 www.mikit.fr).
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de calcaire », complète-t-il. Un choix des
matériaux qui reste d’actualité pour les
constructeurs : « on garde les tuiles ou les
ardoises en fonction des régions, précise
Valérie Da Costa. On conserve également
les teintes d’enduits traditionnelles, même
si on ajoute une touche de modernité en
optant pour la bicoloration ». Choisir des
produits locaux est aussi une question
économique : moins de main-d’œuvre et
une minimisation des coûts de transports.
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de climat
Pourquoi les maisons bretonnes Question
traditionnelle dépend égaleont-elles deux cheminées ? « L’architecture
ment du climat local, qui influence notam-
Forme rectangulaire, toiture à deux pentes, une cloison pour délimiter deux pièces...
En Bretagne, les maisons ont toujours offert une architecture simple. Sur chacun
des murs pignons se dressait autrefois une cheminée en pierre (une par pièce),
maçonnée dans l’épaisseur du mur, et dont la souche sortait dans la continuité du
toit. Cheminées qui jouaient également un rôle porteur. Aujourd’hui, même si elles
ne servent plus (ou si l’une des deux seulement est mise en service), les maisons
bretonnes conservent cette particularité architecturale.
sous-sol », explique Michel Astier, architecte et directeur du CAUE (Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement)
du Puy-de-Dôme, « et dans le département,
on distingue trois zones différentes : la partie orientale (à l’est) qui est un grand massif
granitique, la partie occidentale (à l’ouest)
qui était à l’origine un plateau granitique,
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mais recouvert depuis de pierres volcaniques, et enfin le bassin d’effondrement,
situé entre les deux secteurs précédents,
qui est une zone sédimentaire ». Une étude
poussée du sous-sol permet alors aisément de comprendre que : « les murs des
maisons sont principalement constitués de
granit, de basalte volcanique ou de blocs
ment les toitures, détaille Michel Astier, et
c’est pourquoi dans la partie occidentale
du Puy-de-Dôme, où les vents d’ouest
sont forts et les précipitations importantes,
ainsi que les chutes de neige fréquentes,
elles sont couvertes de lauzes volcaniques
ou d’ardoises épaisses et les pentes sont
fortes. Tandis qu’à l’inverse dans la partie
centrale, qui est l’une des zones les plus
sèches de France, les toitures sont plates
ou à très faibles pentes, et recouvertes
de tuiles canal. » Seule la partie orientale
du département n’illustre pas vraiment
cette adéquation entre architecture et climat. « En effet, alors que l’est du départe-
Marc Loiseau
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Marc Loiseau
En Île-de-France, l’architecture est riche et
diversifiée. Elle s’inspire des régions voisines
pour un joli mélange des genres. Style
Mansart, lucarne, œil-de-bœuf...
La tradition francilienne résiste,
même s’il n’est pas rare que l’influence
normande gagne du terrain dans le nord
et l’ouest ! Ici réalisations Maisons Écureuil
(n° 1 www.maisonsecureuil.com),
GD Constructions (n° 2 www.gdconstruction.fr)
et Maisons Serge Gautier
(n° 3 www.serge-gautier.fr).
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ment est un secteur relativement humide,
nuance Michel Astier, les toits n’offrent pas
de fortes pentes, comme si l’effet de mode
de la plaine s’était déporté dans les montagnes ». Preuve que tout évolue ! C’est
également pour cette raison que certaines
architectures ont depuis bien longtemps
passé les frontières de leurs secteurs : la
maison provençale (ou d’inspiration provençale) se retrouve jusqu’en Aquitaine ou
dans le sud de la région Rhône-Alpes, et la
longère normande talonne les limites de
l’Île-de-France, par exemple.
Témoin
des activités d’antan
« Le paysage, dans la partie occidentale
du Puy-de-Dôme, est principalement
rythmé par les toitures que l’on voit,
plus que par les façades des maisons,
explique Michel Astier, alors que dans
le centre et la partie orientale, c’est
l’inverse : on voit plus le bâti et très peu
les toits. » Pourquoi une telle différence ?
Parce qu’à l’origine, les activités pratiquées étaient différentes et elles ont
influencé l’architecture. « L’ouest était
une terre de grand élevage, tandis que le
centre a longtemps eu une tradition viti-
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Enquête
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Dans le Nord la brique est toujours très
prisée des acquéreurs ! Ce matériau,
intemporel, s’accorde à la perfection avec
l’existant, et permet une grande liberté
d’architecture, de la plus traditionnelle
à la plus contemporaine. Ici réalisations
Maisons France Confort
(n° 1 www.maisons-france-confort.fr)
et Maisons d’en France
(n° 2 www.maisonsdenfrance.com).
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cole, poursuit-il, et dans ce dernier cas,
le rez-de-chaussée abritait les cuves,
tandis que l’habitation se retrouvait au
dessus. » Autre exemple, dans les Alpes,
les maisons étaient traditionnellement
constituées de deux secteurs : une partie
basse enterrée en pierre qui servait à
l’origine à abriter les animaux, et une
partie haute en pisé ou en bois, généralement sous les combles aménagés qui
servait d’habitation. En s’inspirant de
cette tradition, les constructeurs réalisent
aujourd’hui des maisons avec un soussol enterré, une partie haute en bois et
des combles aménageables. Adaptée à
la pente du terrain, la maison se protège
ainsi du climat rigoureux et s’inscrit dans
la continuité architecturale de la région.
Principe
d’intégration
Si les vieilles bâtisses ne font qu’un avec
la nature et s’intègrent parfaitement au
village, réaliser une maison neuve respectant environnement et architecture est un
exercice plus délicat. « Dans les villages
où le cachet est important, il faut imposer
aux nouvelles constructions des règles
de volumétrie et des choix de matériaux
afin qu’elles s’intègrent au mieux dans le
cadre existant », rappelle Michel Astier. La
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cohérence de l’ensemble est primordiale.
« Ce qui n’empêche pas les gens de bâtir
une maison compatible avec leur façon de
vivre, notamment avec de grandes ouvertures. » Grands volumes et luminosité sont
effectivement prisés depuis plusieurs
années, et les acquéreurs réclament des
espaces de vie ouverts et de larges baies
vitrées. « Il ne faut pas oublier qu’autrefois, les fenêtres étaient petites, parce que
les propriétaires payaient un impôt sur les
ouvertures ! », sourit Michel Astier. Dès
lors que la maison ne dénote pas dans
le paysage de par son aspect extérieur
avec l’ancien, l’agencement intérieur doit
rester libre, puisqu’il ne dérange en rien la
cohérence architecturale d’un village. « Il
n’est pas question de “singer” l’architecture existante, conclut Michel Astier, il faut
laisser de la souplesse aux acquéreurs. »
Dans ce contexte, l’architecture que l’on
appelle « traditionnel revisité » prend tout
son sens ! Et l’on comprend aisément
son succès.
La tradition remise
au goût du jour
« On se nourrit de la richesse régionale
pour proposer des modèles originaux,
explique Valérie Da Costa, ce qui donne
des maisons modernes à l’aspect traditionnel conservé. » Si la construction
affiche des lignes générales similaires
à ce qui se faisait par le passé, c’est
à une multitude de petits détails que
l’on voit la différence. « Pentes de toit
coupées, intégration de toiture-terrasse, ou volets roulants, cite-t-elle en
exemple, on s’inspire des goûts des
clients qui veulent une maison de qualité, mais pas forcément celle de leurs
parents ou grands-parents. » Pourquoi ? « Aujourd’hui, les gens ont des
attentes différentes, complète-t-elle.
Ils veulent de grands volumes, plus
de lumière, des placards intégrés, tout
en conservant une structure traditionnelle. » Le but est alors de construire
une maison d’aujourd’hui, dans l’esprit
d’hier. « En Rhône-Alpes, on peut bâtir
une maison neuve qui présente toutes
les caractéristiques d’un chalet traditionnel (allure générale et forme),
continue Valérie Da Costa, alors qu’il
est en réalité tout ce qu’il y a de plus
contemporain avec, par exemple, une
immense ouverture sous le faîtage
afin de profiter au mieux de la vue sur
la vallée. » Prouesse technique qui
n’était pas à la portée des anciens. « Il
n’y a pas de transgression, puisqu’il
s’agit en fait d’une évolution normale
rendue possible par les progrès de la
construction », conclut-elle.
Trop de contraintes...
ou pas assez ?
« Aujourd’hui, les règles d’urbanisme
ne sont pas assez strictes dans les secteurs protégés, résume Michel Astier. Par
exemple, on laisse faire des vérandas,
tandis qu’on pose trop de contraintes
dans les nouveaux quartiers. » La vraie
priorité ? « Faire attention aux zones que
l’on passe constructibles, martèle-t-il,
car le réel problème finalement n’est pas
l’architecture même de la maison, mais
bel et bien l’intégration du lotissement
dans son ensemble. » En effet, si les
constructions respectent quelques prescriptions, le résultat est satisfaisant. Mais
si les éléments communs au lotissement
ne sont pas codifiés, comment obtenir un
ensemble harmonieux ? « Les clôtures
ou les portails, par exemple, sont les
éléments que l’on voit en premier, poursuit-il. Ce sont eux qui devraient faire
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Enquête
Alsace, Lorraine, ou Franche-Comté.
À l’est de la France, l’influence de
l’architecture allemande n’est jamais très
loin... Le chalet est remis au goût du jour.
Sa forme s’intègre parfaitement à l’existant
et permet de s’adapter facilement au relief
dans les zones montagneuses.
Ici réalisations Haut Doubs Créer Bâtir
(n° 1 www.hautdoubscreerbatir.fr) et Olry
Bois (n° 2 www.olry-bois.com).
1
l’objet de prescriptions drastiques, et non
les maisons qui sont plus en retrait sur
les parcelles. »
Aligné ou
en retrait ?
Pour la petite histoire, Michel Astier
rappelle : « autrefois, l’habitat faisait
front et dessinait les rues, avant que
la bourgeoisie terrienne, à la moitié du
xix e siècle, ne décide de montrer son
statut social en faisant construire ses
demeures légèrement en retrait ». De nos
jours, de nombreux acquéreurs rêvent
d’implanter leur maison au beau milieu
de leur terrain nouvellement acquis.
Un problème. « On construit deux fois
En région Rhône-Alpes, le chalet,
très revisité, a la cote. Réalisation Maisons
Clair Logis. www.maisonsclairlogis.fr
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Pourquoi le colombage alsacien
n’est-il pas droit ?
Alors que le colombage des maisons normandes est droit, dans l’est de la France
il est majoritairement composé de croix et de losanges, et utilise la technique de la
triangulation des pans. Si cette particularité était, à l’origine, surtout esthétique et
symbolique, l’Histoire lui a donné une raison supplémentaire de perdurer. En effet,
au xive siècle, après le tremblement de terre de Bâle, seules les maisons à colombage sont restées debout, tandis que les constructions de pierre se sont écroulées.
Pourquoi ? Parce que la structure du colombage des demeures alsaciennes, dotées
de ces renforts obliques, offre la souplesse et la solidité nécessaires au maintien de
la maison en cas de secousses sismiques. Preuve que la tradition a du bon.
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plus grand que par le passé, et on grignote toujours plus d’espaces agricoles,
l’équivalent d’un département tous les
sept ans, explique-t-il, alors lorsque l’on
réfléchit à la meilleure implantation pour
sa maison, il est plus judicieux, même
si elle est en retrait de la rue, de la faire
sortir de terre dans l’un des angles de
la parcelle. » Ainsi, si vous êtes amené,
un jour, à revendre une partie de votre
terrain, vous pourrez le faire car votre
maison ne monopolisera pas l’intégralité
de votre bien. « Ce cas de figure survient
lorsque les gens vieillissent et qu’ils ne
peuvent plus entretenir l’ensemble de
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Enduits ensoleillés, teintes pastel, génoise...
Le charme provençal est toujours plébiscité
en Paca ! Il a même tendance à
repousser sans cesse les frontières de
sa région d’origine. Ici réalisations
Provence Architecture
(n° 1 www.provence-architecture.fr) et
Mas Provence (n° 2 www.masprovence.com).
2
Pourquoi parle-t-on de génoise
dans le sud de la France ?
L’avant-toit que l’on trouve partout dans le sud de la France doit son nom aux
Italiens, et a priori aux maçons venus de Gênes, qui avaient une technique de pose
bien à eux, rapidement baptisée « à la génoise ». À l’époque, le nombre de rangs
déterminait déjà le statut social du propriétaire. Les plus modestes se contentaient
d’un ou deux rangs. Les plus aisés pouvaient se permettent d’aller jusqu’à cinq !
Aujourd’hui encore, c’est le budget des acquéreurs qui conditionne la complexité
de l’architecture.
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Enquête
En se promenant le long du littoral
atlantique, le promeneur averti sait dans
quelle région il se trouve... Les constructions
se suivent mais ne se ressemblent pas !
De la Vendée au Pays basque, seules les
couleurs peuvent être similaires.
Ici réalisations Maisons d’en France
(n° 1 www.maisonsdenfrance.com) et
Maisons Pascal Laurent
(n° 2 www.lesmaisonspascallaurent.fr).
1
leur patrimoine », donne en exemple
Michel Astier. Un bon moyen de ne pas
gaspiller du foncier inutilement, puisque
le nouvel acquéreur n’ira pas à son tour
piocher dans les réserves agricoles.
Un budget
qui freine
« C’est malheureusement le budget des
acquéreurs, en baisse, qui nuit à l’architecture des maisons neuves », constate Valérie
Da Costa. Par exemple, en Normandie, les
longères traditionnelles ont besoin de place
pour s’étaler de plain-pied, mais avec l’augmentation du prix du foncier, force est de
remarquer que la superficie des terrains a
tendance à diminuer. « Qu’à cela ne tienne,
on s’adapte, explique-t-elle, en réduisant
l’emprise au sol de la maison, et en augmentant la pente de la toiture qui cache
un véritable deuxième étage en terme de
volume sous les combles, sans pour autant
dénaturer l’architecture traditionnelle. »
BBC : un risque
d’uniformisation ?
Les différentes réglementations thermiques sont directement montrées
du doigt : elles seraient, pour certains, responsables d’une simplification à outrance de l’architecture. Les
constructeurs, eux, se défendent et se
montrent confiants. « On travaille sur
le BBC depuis longtemps et on maîtrise
donc les techniques à mettre en œuvre,
assure Valérie Da Costa, et l’on sait
désormais les appliquer sur des structures complexes. » Et heureusement !
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Pourquoi les maisons basques
sont-elles blanc et rouge ?
À l’origine, la maison basque était en bois. Lorsque les constructions ont privilégié la pierre, elles ont néanmoins conservé les colombages de bois et l’enduit à
la chaux. Les volets et autres pièces de la charpente étaient alors peints de sang
de bœuf, afin de faire fuir les insectes. C’est pourquoi le rouge basque, utilisé en
peinture de nos jours, est un rouge profond, sombre. L’architecture basque actuelle,
même si elle s’est modernisée et opte parfois pour d’autres couleurs, traduit encore
l’histoire de la région.
« Les gens veulent une maison personnalisée, et différente de celle de leurs
voisins, poursuit-elle, et il faut, même si
la réglementation thermique devient de
plus en plus contraignante, être capable
de leur proposer cette possibilité. » Loïc
Vandromme va même plus loin : « Le
BBC et les différentes réglementations
thermiques ont, au contraire, permis
de faire évoluer les choses, notamment
les PLU qui étaient, avant, bien trop
restrictifs. La conception bioclimatique
a permis d’agrandir les baies vitrées, et
les lotissements de type éco-quartier ont
même carrément libéré l’architecture ».
Autre critique : difficile pour certains
de trouver une âme à la maison neuve.
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Là encore Valérie Da Costa se défend :
« Nous travaillons avec des matériaux
traditionnels, et pas en préfabriqué, et
c’est cette qualité du bâti qui va faire que
la maison va évoluer dans le temps et
prendre du cachet, mais sans se détériorer ». Dernière attaque contre le BBC : les
constructions vont-elles toutes ressembler à des cubes ? Pour Loïc Vandromme
la réponse est évidemment négative. Et
quand bien même : « une maison constituée de différents modules cubiques peut
donner quelque chose d’intéressant, et
l’intégration d’une toiture végétalisée
ou de panneaux photovoltaïques peut
accentuer une architecture originale ».
Pour Michel Astier, l’uniformisation de
l’architecture est visible et passe surtout
par la perte des savoir-faire : « pour
certains éléments, il existait à l’époque
de nombreuses façons de faire alors
qu’aujourd’hui il n’y a plus qu’un système, comme pour les linteaux cintrés
ou encore les débords de toit avec gouttière ». Une perte qui limite les différences architecturales, et qui « stérilise
davantage l’architecture », complète-t-il.
CAUE,
à votre service
Les Conseils d’architecture, d’urbanisme
et de l’environnement sont présents
dans tous les départements. Parmi leurs
nombreuses missions : aider les particuliers qui ont un projet de construction
à comprendre les règles d’urbanisme, et
à penser leur future maison en fonction
de leur mode de vie et des particularités
du site sur lequel elle va s’implanter.
Sur simple rendez-vous, l’acquéreur
rencontrera, gratuitement, un architecte
qui l’aiguillera dans ses démarches.
« Plus l’acquéreur a réfléchi avant de
venir, et mieux c’est, précise Michel
Astier, sans oublier de se présenter avec
un maximum de documents : photos du
site, cadastre, règlement d’urbanisme
applicable au terrain... » Les photos
doivent permettent d’identifier votre parcelle et ses particularités : en pente,
très arborée, bénéficiant d’une jolie vue,
l’orientation... « Il faut également penser
à faire des photos de la parcelle dans
son environnement, complète-t-il, afin de
déterminer son emplacement par rapport
à l’existant : la voit-on depuis le village
ou de la route ? » Il ne restera plus qu’à
réfléchir à la façon dont vous voulez
vivre. « Ce n’est qu’à partir de cela que
l’on peut commencer à imaginer la future
maison », conclut Michel Astier. N’hésitez
donc pas à prendre rendez-vous. Vous
trouverez toutes les coordonnées sur
le site de la Fédération nationale des
CAUE : www.fncaue.fr n
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