SYNTHÈSE : Proposition des États-Unis de transférer l`ours polaire

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SYNTHÈSE : Proposition des États-Unis de transférer l`ours polaire
Bulletin politique
SYNTHÈSE : Proposition des
États-Unis de transférer l’ours
polaire de l’Annexe II à l’Annexe I
PROPOSITION : CoP15 Prop. 3
Transférer Ursus maritimus de l’Annexe II à l’Annexe I,
conformément au paragraphe C) ii) de l’Annexe 1 de
la résolution Conf. 9.24 (Rev. CoP15) : déclin marqué
de la taille de la population dans la nature, déduit ou
prévu sur la base d’une diminution de la superficie
de l’habitat et d’une détérioration de la qualité de cet
habitat.
POSITION : SOUTENIR
ANALYSE :
• On dénombre cinq États de l’aire de répartition de
l’ours polaire : les États-Unis, la Norvège, la Russie,
le Groenland/Danemark et le Canada. Parmi eux, les
États-Unis, la Russie et la Norvège ont d’ores et déjà
interdit le commerce national et international de l’ours
polaire. Le Groenland n’autorise quant à lui que le
commerce national d’ours abattus dans le cadre de
la chasse de subsistance. Ainsi, le commerce international qui oppose les Parties de la CITES est avant tout
celui dont font l’objet les ours polaires du Canada, où
vivent 13 des 19 populations d’ours blancs du monde1.
• Plusieurs Parties, organisations intergouvernementales et non-gouvernementales ainsi que de nombreux
scientifiques de premier plan reconnaissent que l’ours
polaire est menacé d’extinction en raison de la fonte
des glaces et d’autres facteurs. Parmi ces facteurs
figure le commerce international, une activité contraire
aux principes de développement durable et préjudiciable à la survie de cette espèce sur le long terme.
Aussi, il ne fait aucun doute que l’ours polaire remplit
les critères d’inscription à l’Annexe I de la CITES tels
que décrits dans la Res. Conf. 9.24 (Rev. CoP15), et en
particulier au paragraphe C) ii) de l’Annexe I.
• Les ours polaires du Canada se répartissent en
13 populations gérées de manière distincte. Selon le
groupe de spécialistes des ours polaires (PBSG) de
l’Union internationale pour la conservation de la nature
(UICN), qui rassemble les plus grands scientifiques du
monde en la matière, plus de la moitié de ces populations subit un déclin. Seulement trois d’entre elles sont
stables, et deux sont inclassables du fait de l’absence
de données les concernant. Seule une population, qui
ne représente toutefois que 2 pour cent des ours polaires du Canada, croît, en raison principalement de la
réduction des quotas rendue nécessaire par les excès
de la chasse2.
• Outre les données relatives à la biologie et au commerce fournies par les auteurs de la proposition CoP15
Prop. 3, IFAW met à disposition les informations suivantes pour soutenir cette proposition.
• Le Canada reconnaît autoriser l’abattage de 3,75%
de ses ours chaque année, sachant que le taux de
croissance maximal des ours polaires oscille entre 4
et 6% par an3. Aussi, même chez une population au
1
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spécialiste de l’ours polaire, a déclaré : « Comme il y
a de l’argent facile à gagner, les gens tuent quantité
d’ours sans se préoccuper de l’avenir, du développement durable ou du sort de cette espèce animale. C’est
très inquiétant. 6» En conséquence de cette nouvelle
demande, le nombre de peaux d’ours polaires vendues
aux enchères de fourrure au Canada a doublé entre
2007 et 20117.
développement normal, un quota de chasse de 3,75%
ralentirait, voire stopperait ce développement.
• Au Canada, de tels quotas sont fixés par les conseils
de gestion de la faune à l’échelle provinciale et territoriale. Si ces conseils tiennent compte de l’avis des
scientifiques, les quotas qu’ils fixent ne sont en rien
limités par ces avis et sont susceptibles d’être modifiés
en fonction d’autres facteurs. En conséquence, les
quotas définis pour chaque population d’ours polaires
excèdent souvent largement les recommandations des
scientifiques.
• À titre d’exemple, le gouvernement du Territoire du
Nunavut, au Canada, a récemment triplé son quota de
chasse applicable à la population d’ours polaires de
l’ouest dans la baie d’Hudson en dépit de l’opposition du
PBSG, qui avait déclaré : « Même la RTA [récolte totale
autorisée] actuelle fait échec aux principes de développement durable. Une augmentation des quotas ne ferait
qu’en aggraver le caractère non durable. 4 »
• En outre, il est largement admis que les quotas sont
influencés par les prix de vente record des peaux d’ours
polaires. Même certains chasseurs autochtones le
reconnaissent. Selon Frank Pokiak, président du Conseil inuvialuit de gestion du gibier dans le nord-ouest
du Canada : « Il y a quatre ans, on pouvait s’estimer
heureux si l’on obtenait mille dollars pour un ours
polaire de 2,15 mètres. Aujourd’hui, un ours blanc de
cette taille rapporte entre 3 500 et 4 000 dollars CA 5».
Par ailleurs, le Dr. Ian Stirling, éminent scientifique
2
• Bien que le Canada ait signé l’Accord sur la conservation des ours blancs de 1973, sa gestion des quotas
de chasse à l’ours polaire conduit à des niveaux de
récolte supérieurs à ceux préconisés par les scientifiques et constitue une violation de cet accord. Celui-ci
stipule que « chaque Partie contractante est tenue de
gérer ses populations d’ours polaires conformément
aux bonnes pratiques de conservation, en se fondant
sur les données scientifiques les plus fiables en la
matière 8». Par ailleurs, du fait de la structure fédérale
unique du Canada et des revendications territoriales
des Premières nations, ce sont les conseils locaux de
gestion de la faune qui, en dernier ressort, décident
des quotas. En d’autres termes, le gouvernement fédéral ne dispose d’aucun droit de véto sur les quotas fixés
à des niveaux écologiquement non viables.
• Par le passé, le Canada et d’autres Parties ont
affirmé que les ours polaires étaient menacés
d’extinction en raison de la modification de leur habitat,
elle-même imputable au changement climatique, et
que par conséquent la CITES n’était pas en mesure de
protéger cette espèce. S’il est vrai que le dérèglement
climatique constitue la principale menace à laquelle
sont confrontés les ours polaires, le commerce international de leurs parties entraîne la mort de quelque
600 ours par an et représente ainsi la deuxième menace la plus grave pesant sur cette espèce. La biologie
de la conservation repose sur le principe fondamental
selon lequel une population animale en proie au dérèglement climatique et à la détérioration de son habitat
ne peut survivre que si l’importance d’autres facteurs
pénalisants, notamment le commerce international ou
la chasse aux trophées, diminue. Une réalité dont fait fi
la gestion actuelle de cette espèce.
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• De surcroît, bon nombre des espèces les plus
vulnérables de l’Annexe I sont menacées d’extinction
en partie à cause de la perte de leur habitat résultant
du changement climatique et d’un ensemble d’autres
facteurs environnementaux. Dans le cas de l’ours polaire, le commerce constitue un facteur supplémentaire
de déclin qui pourrait bien sonner le glas de certaines
populations. n
1. Illegal killing of polar bears and trade and their parts has also been
reported, primarily by Russia.
2. See Chuchki/Bering Sea Stock Assessment Report at 3, available at
http://alaska.fws.gov/fisheries/mmm/stock/final_cbs_polar_bear_sar.pdf.
3. See Chuchki/Bering Sea Stock Assessment Report at 3, available at
http://alaska.fws.gov/fisheries/mmm/stock/final_cbs_polar_bear_sar.pdf.
L’abattage illégal d’ours polaires et le commerce de leurs parties ont
également été dénoncés, principalement par la Russie.
Voir Chuchki/Bering Sea Stock Assessment Report at 3, consultable à
l’adresse suivante : http://alaska.fws.gov/fisheries/mmm/stock/final_cbs_
polar_bear_sar.pdf.
Voir Chuchki/Bering Sea Stock Assessment Report at 3, consultable à
l’adresse suivante : http://alaska.fws.gov/fisheries/mmm/stock/final_cbs_
polar_bear_sar.pdf.
4. Letter from Dag Vongraven, Chair, IUCN/Polar Bear Specialist Group to
Nunavut Wildlife Management Board.
5. Kim Murphy, Canada‘s Inuit roar in protest over move to protect polar
bears, LA Times, July 8, 2012, available at http://articles.latimes.
com/2012/jul/08/nation/la-na-polar-bears-20120708.
6. Que. polar bear hunt not sustainable: Nunavut, CBC News, April 4, 2011,
available at http://www.cbc.ca/news/canada/north/story/2011/04/04/
nunavik-polar-bears.html.
7. http://www.unep-wcmc-apps.org/citestrade/trade.cfm.
Lettre de Dag VOngraven, prés., UICN/Membre du groupe de specialistes
des ours polaires du Conseil de gestion de la faune du Nunavut.
Kim Murphy, Canada‘s Inuit roar in protest over move to protect polar bears,
LA Times, 8 juillet 2012, disponible à l’adresse suivante : http://articles.
latimes.com/2012/jul/08/nation/la-na-polar-bears-20120708.
Que. polar bear hunt not sustainable: Nunavut, CBC News, 4 avril 2011,
disponible à l’adresse suivante : http://www.cbc.ca/news/canada/north/
story/2011/04/04/nunavik-polar-bears.html.
http://www.unep-wcmc-apps.org/citestrade/trade.cfm.
8. Agreement on the Conservation of Polar Bears, Article II.
3
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