Le nettoyage des trayons (2 e partie)

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Le nettoyage des trayons (2 e partie)
QUALITÉ
Le mois dernier, il a été question des principes
à respecter lors du nettoyage des trayons
avant la traite. Plusieurs méthodes permettent
La méthode de traite passée en revue
d’observer ces règles de base. Elles font
Le nettoyage des trayonspartie
l’objet de cet article.
2e
PA R P I E R R E L É V E S Q U E *
C
Chaque méthode de nettoyage a ses
adeptes; néanmoins, l’une ou l’autre peut
présenter des inconvénients. En comparant
les avantages et les désavantages de chacune, vous en trouverez peut-être une qui
mériterait d’être essayée chez vous.
LA DOUCHETTE
À BASSE PRESSION
En salle de traite, une méthode courante consiste à arroser les trayons avec une
douchette. On utilise souvent de l’eau tiède
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ou chaude à laquelle on ajoute parfois un
désinfectant. Une douchette à basse pression est recommandée afin de limiter l’arrosage aux trayons pendant qu’on les frotte
avec ses doigts.
Trop souvent, malheureusement, le pis
est arrosé. De l’eau sale peut alors dégouliner sur les trayons et les contaminer juste
avant la pose du manchon trayeur ou encore
y entrer pendant la traite, ce qui a pour effet
de diminuer la qualité du lait et d’augmenter
les risques de mammite. C’est pourquoi
cette méthode est de moins en moins utilisée. On continue à la suivre dans les cas
où, à cause de mauvaises conditions de
logement, plusieurs vaches arrivent à la salle
de traite avec des trayons très sales.
L’essuyage des trayons est évidemment
essentiel; on utilise le plus souvent une serviette de papier individuelle.
LES SERVIETTES DE PAPIER
INDIVIDUELLES
Le lavage des trayons à l’aide de serviettes de papier individuelles est la technique
traditionnellement utilisée au Québec. Elle
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est plus populaire pour la traite en étable
qu’en salle de traite. En ajoutant un savon
« lave-pis » à l’eau de lavage, on améliore la
désinfection des trayons, mais aussi la désinfection des mains du trayeur, diminuant
ainsi le risque de transmission de la mammite d’une vache à l’autre. Il faut suivre les
recommandations du fabricant concernant
le dosage du désinfectant et la température
de l’eau. Si l’eau refroidit ou se salit trop pendant la traite, c’est une bonne idée de la
changer.
Il est essentiel d’essuyer les trayons
avec une deuxième serviette de papier afin
d’éliminer l’eau contaminée. Cette technique n’est ni la plus rapide, ni la moins
chère. Elle peut cependant s’appliquer dans
tous les cas, peu importe la propreté des
vaches.
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LES LAVETTES INDIVIDUELLES
Le lavage des trayons à l’aide d’une
lavette est une méthode très répandue en
Europe. Elle a été introduite chez nous il y
a quelques années par une compagnie française. Des lavettes de tissu, une par vache,
remplacent les serviettes de papier. Ses
tenants trouvent que le tissu fait un meilleur
nettoyage et une meilleure stimulation que
le papier.
La lavette idéale est assez rugueuse
pour bien laver et assez spongieuse pour
bien essuyer. Le fabricant français propose
aux éleveurs québécois des lavettes bleues
non tissées et un savon particulièrement
adoucissant. D’autres types de lavettes et de
savons désinfectants sont aussi utilisés en
Europe.
Le plus souvent, la lavette est essorée
et l’autre face est utilisée pour essuyer les
trayons. Des éleveurs plus prudents choisissent plutôt d’utiliser un papier pour mieux
essuyer les trayons.
Pour éviter la transmission de bactéries,
l’entretien des lavettes entre les traites doit
être rigoureux; c’est le point faible dans plusieurs troupeaux. Ce lavage des lavettes se
fait souvent manuellement. Les lavettes,
qu’on a mises dans un seau d’eau chaude
tout de suite après usage, sont rincées, frottées et essorées après la traite. Elles doivent
ensuite tremper dans une solution d’eau
chaude (50 °C) et de détergent jusqu’à la
traite suivante.
Avant la traite, les lavettes sont rincées
(si on utilise un détergent chloré qui irriterait les trayons) et elles sont remises dans
de l’eau chaude (40 °C) additionnée de
savon désinfectant. Souvent, les lavettes sont
en plus lavées à la machine une fois par
semaine. Dans les plus grosses fermes, on
les lave à la machine après chaque traite.
Dans tous les cas, le travail ou l’investissement requis est compensé par l’économie
de papier.
Par prudence, il est préférable d’utiliser
un papier pour mieux essuyer les
trayons.
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LES SERVIETTES
COMMERCIALES IMBIBÉES
DE DÉSINFECTANT
Des serviettes
jetables, préimbibées d’un désinfectant, permettent de simplifier
le travail. Elles
contiennent
généralement un
alcool, de sorte
que le trayon
s’assèche rapidement après le lavage. Une seule serviette
est donc généralement suffisante. L’autre
côté de la serviette peut être utilisé pour nettoyer le bout des trayons. Cette technique
est simple et facile à appliquer de façon
uniforme.
Pour bien des trayeurs, elle est parfois
trop facile. En travaillant trop vite, les trayons
ne sont ni bien lavés, ni assez stimulés.
Ces serviettes sont plutôt chères et,
pour qu’elles soient abordables, elles sont
assez petites. Si elles permettent de bien laver
les trayons déjà presque propres, ce n’est
pas le cas des trayons plus sales. On doit
utiliser plusieurs serviettes ou, pour limiter
les coûts, recourir à une autre technique pour
ces trayons sales. Dans certaines conditions,
comme par temps plus froid, on reproche
l’effet asséchant de l’alcool sur la peau des
trayons.
LE PRÉTREMPAGE
(BAIN DE TRAYON PRÉTRAITE)
Le prétrempage
des trayons
dans un désinfectant est
une technique très
populaire
aux ÉtatsUnis et qui
s’est répandue chez nous, d’abord en salle de traite,
mais aussi pour la traite en étable. C’est la
technique considérée comme la plus efficace pour prévenir la mammite.
Pour donner de bons résultats, son application doit être rigoureuse. Premièrement,
tout le trayon doit être recouvert de désinfectant. C’est pourquoi le trempage est préférable
à la pulvérisation. Pour obtenir une bonne couverture en pulvérisant, il faut deux fois plus de
produit, qui sera ensuite plus difficile à enlever
complètement.
Il est aussi recommandé de laisser le désinfectant agir de 15 à 30 secondes avant de
l’essuyer. En salle de traite, il est facile d’obtenir
un temps de contact suffisant et une procédure uniforme en trempant les trayons de deux
à quatre vaches lors d’une première étape,
idéalement en prenant également les premiers jets. Puis on revient à la première vache
pour essuyer et poser le faisceau trayeur.
En étable, on peut tremper les trayons
dès que la traite d’une vache est terminée,
mieux, dès que le faisceau est décroché
automatiquement. Aller chercher le faisceau
trayeur, avant d’essuyer les trayons, permet
un temps de contact suffisant, mais ne
garantit pas une procédure uniforme.
On peut obtenir un temps de contact
suffisant et une procédure uniforme si, après
avoir approché le faisceau trayeur, le trempage des trayons est suivi de la cueillette des
premiers jets et du frottage des trayons avec
les doigts. Le contact et la stimulation sont
améliorés à la fois. Cette technique est plus
facile à utiliser en portant des gants jetables.
Finalement, il faut comprendre qu’il est
impossible de désinfecter des trayons souillés
de fumier. Dans certaines fermes, les trayons
vraiment sales sont d’abord lavés avec une
douchette ou un papier mouillé. Dans d’autres
fermes, les trayons sales sont trempés une
première fois et essuyés pour enlever la saleté.
On recommence ensuite la procédure normale
de désinfection. Le contenant doit être nettoyé dès qu’il devient sale.
Il est possible d’utiliser le même désinfectant en prétrempage et en posttrempage s’il a été approuvé pour le prétrempage. Dans certaines fermes, on
utilise un désinfectant contenant moins
d’iode et moins d’émollient en prétrempage et on garde le désinfectant haut de
gamme pour le posttrempage où il sera
plus profitable.
Dans tous les cas, il faut prendre le
temps de bien essuyer les trayons afin de
stimuler l’éjection du lait et pour éviter les
résidus d’iode dans le lait. On peut essuyer
avec des serviettes individuelles de papier
ou, de plus en plus souvent, avec des serviettes de tissu (genre débarbouillette). Les
serviettes de tissu doivent alors être soigneusement lavées et séchées à la machine
entre les traites.
UNE NOUVELLE TECHNIQUE
VOUS TENTE?
Aucune technique n’est miraculeuse
en soi. Elle donnera de bons résultats en
respectant les principes énoncés le mois
dernier. La meilleure technique pour votre
entreprise est souvent celle qui est la plus
facile à appliquer rigoureusement sur toutes
vos vaches, à chaque traite. ❂
* Pierre Lévesque, ingénieur agricole, professeur,
ITA de La Pocatière
Le producteur de lait québécois Novembre 2003
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