principes generaux d`application de l`article l

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principes generaux d`application de l`article l
21/06/2007
PRINCIPES GENERAUX ET CRITERES ORDINAUX D’APPLICATION DE
L’ARTICLE L.4113-6 DU CODE DE LA SANTE PUBLIQUE
I – PRINCIPES GENERAUX
L’article L 4113-6 du CSP pose le principe d’une interdiction pour le médecin de percevoir
des avantages, directs ou indirects, de la part des entreprises biomédicales, sauf
dérogations strictement limitées et soumises à un formalisme rigoureux.
Le Conseil National rappelle ci dessous son interprétation des termes de cet article du CSP :
les personnes concernées, la notion d’avantage, les dérogations possibles, le rôle de l’Ordre
et les sanctions prévues.
1 - LES PERSONNES CONCERNEES
les médecins
L’article L.4113-6 du code de la santé publique concerne les médecins mais aussi d’autres
professions de santé. Parmi les médecins, seuls ceux inscrits au tableau de l’Ordre sont
visés par la loi. Sont également visées les associations ou tout autre forme de groupement,
agissant pour le compte de médecins, dès lors que ces derniers y trouvent un avantage
individuel.
les entreprises
La loi vise les entreprises assurant des prestations produisant ou commercialisant des
produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale. Cette disposition
concerne principalement les laboratoires pharmaceutiques et les entreprises fabriquant ou
distribuant des matériels biomédicaux.
Dans la mesure où la loi prohibe autant les avantages directs qu’indirects, sont également
visés les entreprises ou autres organismes agissant pour le compte d’entreprises
biomédicales.
2 - LES AVANTAGES
Il s’agit d’avantages en nature ou en espèce, sous quelque forme que ce soit, accordés de
façon directe ou indirecte aux médecins.
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L’attribution d’avantages de valeur négligeable n’a pas à faire l’objet de déclaration auprès
des instances ordinales, mais d’un point de vue éthique et légal, ces avantages de valeur
négligeable doivent rester en rapport avec l’exercice de la Médecine. Par ailleurs, il
appartient à chaque médecin de répondre comme il l’entend à la politique des petits
cadeaux, dont le CNOM estime cependant qu’elle ne grandit pas l’image de la profession.
En tout état de cause, ces cadeaux ne sauraient avoir une valeur supérieure à 30 €, au
regard de la notion de « valeur négligeable ».
3 - LES DEROGATIONS AU PRINCIPE GENERAL D’INTERDICTION
L’article L.4113-6 du CSP prévoit, sous conditions, deux types de dérogations au principe
d’interdiction des avantages :
-
les activités de recherche ou d’évaluation scientifique ;
l’hospitalité offerte lors de manifestation de promotion ou lors de manifestation à
caractère exclusivement professionnel et scientifique.
Ces dérogations supposent l’établissement de conventions écrites et communiquées à
l’Ordre des médecins pour avis, préalablement à leur date d’entrée en vigueur. Ces
conventions ne peuvent concerner que les deux seules hypothèses mentionnées ci-dessus.
La loi dispose expressément qu’elle ne saurait avoir pour effet d’interdire le financement des
actions de formation médicale continue ; en l’absence de précisions et de jurisprudence,
cette notion autorise, selon le CNOM, le LEEM et le SNITEM, les dons d’ouvrage et les
abonnements dans les conditions fixées par le « Document d’orientation, d’interprétation et
d’application de l’article L.4113-6 du code de la santé publique » du 21 juin 2007.
4 - ROLE DE L’ORDRE DES MEDECINS
La mission de l’Ordre est consultative et a une finalité préventive. Le rôle de l’Ordre (Conseil
National et Conseils Départementaux) est d’étudier la conformité de la convention soumise
aux dispositions de l’article L.4113-6. A cette occasion l’Ordre doit aussi s’assurer du respect
des autres dispositions légales auxquelles sont soumis les médecins et plus particulièrement
le Code de déontologie médicale.
Cet avis ne constitue ni une autorisation ni un refus d’application et les signataires de la
convention (médecins et entreprises) prennent leurs responsabilités en décidant de mettre
en œuvre les conventions qu’ils ont conclues et soumises à l’Ordre.
Compte tenu de la responsabilité, que les médecins engagent en mettant en œuvre les
conventions, la loi oblige les entreprises à leur faire connaître l’avis défavorable émis, avant
toute mise en application.
En dehors de toute obligation légale, il serait naturel que les entreprises fassent connaître
aux médecins les avis favorables, fussent-ils implicites.
Les médecins et les entreprises sont également responsables de la conformité des
engagements contenus dans la convention transmise à l’Ordre, avec leur réalisation
effective.
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5 - SANCTIONS
La DGCCRF, Direction Générale de la Concurrence et de la Répression des Fraudes est
chargée du contrôle de l’application de l’article L 4113-6 du CSP. Cette loi a des
conséquences pénales pour les médecins et les entreprises, qui peuvent être poursuivis
devant les tribunaux correctionnels sur plainte déposée par la DGCCRF.
Les sanctions prévues sont très lourdes pour les médecins, puisque les peines prévues
peuvent atteindre au maximum de 2 ans d’emprisonnement, 75 000 € d’amende et une
interdiction temporaire d’exercice jusqu’à 10 ans.
Depuis la Loi du 4 mars 2002, rappelons que les entreprises et leurs dirigeants peuvent
également faire l’objet de poursuites pénales en cas d’infraction à l’article L 4113-6 du CSP.
Les sanctions pénales portées à notre connaissance ont été prononcées dans des situations
diverses : extension de l'hospitalité aux conjoints des praticiens invités à un congrès
organisé à Fort de France, durée dune hospitalité prise en charge à Marbella sans rapport
avec la durée de la réunion scientifique, rémunération proposée en contrepartie d'étude
fictive ou d'un montant sans rapport avec la réalité du travail effectué.
Deux points méritent d'être relevés : tout d'abord, des médecins ont été condamnés en
raison d'avantages reçus non pas directement d'une entreprise biomédicale, mais par
l'intermédiaire d'une association à laquelle cette entreprise avait versé des fonds ; ensuite,
les autorités judiciaires prennent en considération dans leurs décisions l'avis qu'a pu émettre
l'Ordre et le fait que l'avantage perçu par le médecin n'ait pas été déclaré à l'Ordre.
6 - CONCLUSIONS
Le formalisme de l’article L. 4113-6 du code de la santé publique peut paraître lourd et
complexe pour les Médecins ; pourtant, la déclaration préalable des conventions et l’avis
ordinal, sont des éléments de transparence qui ne peuvent que faciliter le choix du médecin
à s’engager dans une convention.
Cet article du CSP conforte pleinement la mission de Conseil que l’Ordre doit assurer
auprès des Médecins, dans la défense de leur indépendance professionnelle.
II – CRITERES ORDINAUX D’APPRECIATION
1. Conventions d’hospitalité
L'hospitalité offerte doit être «raisonnable et limitée» à l'objectif principal de la
manifestation, qui doit rester professionnel. Ce caractère raisonnable et limité ne peut
être ni quantifié ni chiffré. Son appréciation étant multifactorielle, elle est confiée à un
conseiller ordinal qui compare l’intérêt médical de la manifestation, la qualification des
médecins invités et l’hospitalité proposée. L’avis repose sur l’analyse du programme
scientifique détaillé (thème, durée du programme médical par rapport à la durée totale
de la manifestation, lieu de son déroulement) et de l’hospitalité offerte (durée de prise
en charge, montant, prise en charge totale ou partielle des frais, et évidemment absence
de prise en charge de toutes activités de loisirs, sportives ou culturelles...).
Pour les manifestations départementales ou de proximité, la prise en charge des
frais de transport des médecins n’est pas justifiée ( exceptions possibles pour
intervenants). Il en est de même pour les manifestations régionales ou inter-régionales
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lorsque le lieu de la manifestation ne répond à aucun impératif médical ni à l’origine
géographique des médecins invités (exceptions possibles pour intervenants).
Pour les manifestations nationales, la prise en charge totale des frais d’inscription,
de restauration, d’hébergement et de transport ne semble pas respecter le caractère
raisonnable et accessoire de l’hospitalité admise par la loi (exceptions possibles pour
intervenants), notamment si le programme médical ménage des plages de temps libre
permettant des activités sociales, culturelles ou de loisirs en un lieu attractif ou
touristique. Il appartient à l’entreprise organisatrice de fixer le taux de participation
financière des médecins invités, par exemple au prorata de la charge de travail et des
autres paramètres.
Pour les manifestations internationales, dont les programmes prévoient assez
souvent des plages de repos ou de temps libre, par ailleurs justifiées, il semble normal,
pour les raisons déjà exposées ci-dessus, que les entreprises ne prennent pas en charge
la totalité des frais d'inscription, de transport, d'hébergement, de restauration, ...
(exceptions possibles pour intervenants et les médecins ayant une convention de
rapporteur du congrès). Il appartient à l'entreprise de fixer le taux de la participation
financière des médecins invités au prorata du temps libre et du principe d'une hospitalité
raisonnable et limitée. Par souci de transparence, le Conseil de l’Ordre demande que les
frais d’inscription (s’ils sont pris en charge) précisent les droits ouverts. Si des activités
socio-culturelles sont prévues par les organisateurs avec un montant individualisé dans
les frais d’inscription, il appartient au médecin invité de régler directement ces frais, s’il
entend participer à ces activités ; si leur coût n’est pas individualisé dans les droits
d’inscription (cas fréquent aux Etats Unis), il appartient aux entreprises de ne pas
prendre en charge la totalité des frais d’inscription.
Il va sans dire que l’hospitalité prise en charge par les industriels de santé ne
s’applique qu’aux médecins et ne peut en aucun cas être étendue à des
personnes autres que les professionnels directement concernés. En d’autres
termes, aucune prise en charge n’est possible pour les accompagnants.
NOTA : pour toutes les manifestations évoquées ci-dessus, un système d’attestation de
présence du médecin à chaque session du programme doit être mis en place, en général
sous la forme de liste émargée par les médecins présents ; il s’agit d’une exigence normale
qui par ailleurs s’est révélée très utile aux médecins dans la cadre des contrôles de la
DGCCRF.
2. Conventions d’honoraires (investigateur, orateur, rédacteur, consultant, études de
marché) conclues en application de l’article L.4113-6 du CSP
L'adéquation de la rémunération proposée au travail effectué par le praticien
s'applique aussi bien aux études qu'aux conventions d'intervenants, d’orateur, de
rédacteur ou aux contrats de consultants. Elle sera d’autant plus facile à apprécier que la
charge de travail prévisionnelle est quantifiée (évaluation horaire) et les modalités de
calcul de la rémunération précisées (temps de recherche, bibliographies, temps
d'intervention dans un programme, durée des réunions….). Si une hospitalité est justifiée
par l’exécution de la mission (orateurs notamment), sa prise en charge éventuelle doit
être mentionnée sur la convention et doit respecter le caractère raisonnable et
accessoire.
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La rémunération d’une activité par du matériel peut s’envisager si ce dernier est en
rapport avec l'exercice de la médecine mais elle ne peut pas être imposée au médecin
qui doit garder le choix de son mode de rémunération. Dans le cas d’une rémunération
sous forme de matériel médical, la valeur à déclarer est la valeur commerciale (prix TTC)
au moment de la signature de la convention.
Compte tenu des termes de la loi qui exige, pour les médecins exerçant en
établissement, la notification des conventions au directeur et compte tenu des obligations
statutaires des médecins hospitaliers qui les obligent, sauf dérogations particulières et
ponctuelles, à consacrer la totalité de leur activité au service public hospitalier, on doit
rappeler à ceux-ci l’importance de cette notification des conventions au directeur de
l'hôpital.
NOTA : On doit également s'interroger au plan de l'indépendance professionnelle et de la
déontologie médicale sur des situations, certes isolées, où des praticiens hospitaliers
recevraient au travers de tels contrats des rémunérations concurrençant celle que leur
procure leur activité hospitalière.
3. Conventions relatives aux essais soumis à un Comité de Protection des
Personnes (Loi HURIET-SERUSCLAT)
La pertinence de la recherche médicale, l’évaluation du rapport bénéfice/risque et
l’adéquation entre les objectifs et les moyens de cette recherche étant soumis à l’avis du
Comité de Protection des Personnes (ex CCPPRB), l’examen ordinal de ces conventions
porte sur leur conformité à la déontologie médicale et sur la charge de travail de tous les
médecins participants .
Concernant la charge de travail, la commission examine le travail nécessaire à la réalisation
des essais cliniques sur la base des documents transmis et tient compte du nombre prévu
de consultations et d’examens induits par l’essai, de la complexité des cahiers d’observation
à remplir et de l’adéquation de la rémunération proposée à cette charge de travail.
Concernant la conformité à la déontologie, la commission ordinale vérifie l’absence de
clause contraire à la déontologie médicale, et tout particulièrement les clauses de
confidentialité sur les résultats obtenus : ces clauses doivent être conformes à l’article
R.5120 du code de la santé publique, qu’il convient de citer dans son intégralité, notamment
les dérogations prévues vis à vis des autorités que représentent le ministre de la santé, les
inspecteurs de la pharmacie, le directeur général de la santé et les inspecteurs de l’Agence
française de sécurité sanitaire des produits de santé.
NOTA : rappelons que la mise en œuvre d’un fichier de données est soumise à l’avis du
CCTIRS.
Par ailleurs, même remarque que précédemment pour une éventuelle rémunération par du
matériel médical.
4. Conventions relatives à des études n’entrant PAS dans le cadre de la Loi Huriet.
Ces études, lorsqu’elles mettent en œuvre un fichier de données, nécessitent l’avis du
Comité Consultatif sur le Traitement d’Information en matière de Recherche dans le domaine
de la Santé. Le CCTIRS se prononce sur la pertinence et la méthodologie de la recherche
ainsi que sur la nécessité de données nominatives
En cas d’avis rendu par le CCTIRS: la situation est superposable aux conventions
entrant dans le cadre de la loi HURIET. L’examen ordinal porte sur la conformité des
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conventions à la déontologie médicale et sur l’adéquation de la rémunération proposée à
la charge de travail décrite pour tous les médecins participants.
Dans les autres cas : avis défavorable du CCTIRS ou conventions relatives à des
études n’ayant pas à être soumises à l’avis du CCTIRS, il revient à l’Ordre d'apprécier
l’intérêt médical du travail envisagé, la méthodologie, la finalité réelle, et les critères déjà
énumérés dans le cas précédent ; pour rendre son avis la commission ordinale examine
également la conformité de ces conventions à la déontologie.
NOTA : D’éventuelles clauses de confidentialité ne doivent pas entacher l’indépendance
professionnelle du médecin ni ses responsabilités vis à vis de la santé publique.
Même remarque que précédemment sur l’éventuelle rémunération par du matériel médical.
5. Les Relations normales de travail
Il est prévu que les relations normales de travail ne donnent pas lieu à
l’établissement d’une convention mais elles n’ont été définies ni par la loi ni par la
jurisprudence. Le Conseil National de l'Ordre des médecins estime qu’il s’agit de
situations particulières qui ne sont ni programmées ni répétitives et qui restent dans le
domaine du raisonnable et de l’accessoire. (A titre d’exemple : invitation à déjeuner par
concours de circonstance). Compte tenu du risque pénal, les médecins doivent rester
vigilants et ne pas accepter sous le terme de relation normale de travail un avantage que
l’industriel ne souhaiterait pas déclarer au titre de l’article L 4113-6 du CSP.
NOTA :
Rappelons que toute convention établie avec un médecin doit préciser au minimum sa
spécialité, son numéro d’inscription au conseil départemental de l’Ordre, et son adresse
d’exercice professionnel ; les entreprises peuvent imposer d’autres renseignements,
notamment l’adresse fiscale en cas de versement d’honoraires.
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