Un si Proche-Orient - Festival International du Film d`Histoire de

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Un si Proche-Orient - Festival International du Film d`Histoire de
CATALOGUE 2015 DU FESTIVAL
DU FILM D’HISTOIRE
SOMMAIRE
3
ÉDITOS
5
LES SÉANCES SPÉCIALES
11
LES INVITÉS, LES JURYS
21
UN SI PROCHE ORIENT – LES DÉBATS
67
UN SI PROCHE ORIENT – LES FILMS
125
LE PRIX DU FILM D’HISTOIRE – CATÉGORIE « FICTION »
137
LE PRIX DU FILM D’HISTOIRE – CATÉGORIE « DOCUMENTAIRES INÉDITS »
152
PANORAMA 2015 DU DOCUMENTAIRE D’HISTOIRE
156
LE PROGRAMME PÉDAGOGIQUE
160
REMERCIEMENTS, GÉNÉRIQUE
163
INDEX DES FILMS
© MJ2R
Jean-Noël Jeanneney
Président d’honneur du Festival
Alain Rousset
Président du Festival
Il n’est guère, sur notre planète, de territoires où se soient
concentrée, au long des âges, en dépit de leurs dimensions
limitées au regard de toutes les terres émergées, une telle intensité
de passions et d’intérêts, de mythes et de religions, de générosités
et de haines. Par quoi l’évidence a surgi pour nous qu’il faudrait
en faire quelque jour le thème et l’enjeu d’une édition
de ce festival. La voici.
Plus l’actualité est pesante (et rarement le fut-elle autant qu’à
l’heure de Daech et des djihadistes), plus s’imposent le recul
des réflexions et la fécondation des émotions. Dans leur dialogue,
le Festival de Pessac est passé maître.
D’Alexandre à Saladin, de Bérénice à Lawrence d’Arabie,
de Ponce Pilate à Ben Gourion, de Zénobie à Khomeyni (libre
à chacun de compléter à son gré…) les personnalités les plus
diverses scandent cette histoire, dans les livres et sur les écrans,
en puissantes couleurs et en contrastes violents. Souvent, c’est
du dehors que sont venues se déployer les affrontements les plus
brutaux : le Liban en sait quelque chose… Et les croisades ont
laissé des marques indélébiles. Cette portion de la terre s’est
affirmée comme un enjeu sans pareil, parmi le tourbillon des
langues, pour toutes les rivalités des croyances. À Moïse,
à Jésus répond Mahomet. Le Grand Pan une fois mort, hélas !
et le Panthéon grec et romain rejeté dans la séduction des belles
aventures disparues, les monothéismes ont chacun tâché
d’imposer leur Dieu, avant que ne les divisent à leur tour,
souvent, des allégeances hostiles : du côté de l’Islam,
spécialement, notre temps en sait quelque chose, pour
un malheur partagé. De tout cela le cinéma rend compte à foison.
Lorsque du sable a jailli le pétrole, une telle pluie de dollars est
tombée sur une partie de ces lieux que le choc de deux univers,
l’un enraciné loin en arrière dans le temps, l’autre enivré de
modernité, s’en est trouvé stupéfiant par la brutalité de ses effets.
Et sur les écrans, de toutes les manières possibles, les talents
s’en sont, de longue main, inspirés.
Nous séparerons-nous, à l’issue de cette semaine d’amitié, avec
le sentiment d’avoir éclairé le mystère de cette exceptionnalité ?
Ce n’est pas sûr, tant il se défend bien. Mais gageons, sans risque
de nous tromper, que nous serons riches d’une familiarité
nouvelle avec cette partie du monde dont sont venus et viennent
encore vers notre Europe (à moins qu’elle ne soit allée
les y chercher) tant de forces neuves et tant de périls belligènes.
Nous n’aurons pas la prétention d’être exhaustifs : tellement sont
ici profus les thèmes, les parcours, les rencontres. Qu’il suffise
donc que, cette année encore, nous repartions, comme toujours,
gorgés d’images et de mots ; de certitudes, probablement
pas, mais avec des questions aiguisées et des souvenirs forts,
c’est-à-dire (pourquoi pas ?), un peu plus de lucidité.
Pour cette 26e édition du Festival International du film d’histoire
de Pessac, son co-créateur Jean Lacouture n’est plus parmi nous.
Je tiens à saluer la mémoire de ce grand journaliste, historien
et biographe, à ce témoin du XXe siècle qu’il a décrit avec un talent
remarquable au fil de plus de soixante-dix ouvrages. La création
du Festival international du Film d’Histoire en 1990 est pour moi
un souvenir merveilleux. Nous avions conçu ce festival avec
Jean Lacouture et Jean-Noël Jeanneney sur la base d’un mariage
entre l’Histoire, une passion commune, et l’image.
Nous avions l’intuition qu’un large public pouvait trouver
un intérêt à participer à des débats, avec des écrivains, gens
de cinéma, journalistes et universitaires, autour d’une sélection
de films d’Histoire. Le succès ne s’est jamais démenti depuis
la première édition. Merci à vous tous d’être chaque année plus
nombreux.
Le thème du Festival international du Film d’Histoire 2015,
« Un si Proche-Orient », n’aurait pas déplu à son cofondateur,
qui débuta sa carrière de reporter au Caire. Je me félicite cette année
encore de la qualité et de la richesse d’une manifestation qui va
vous offrir, à travers 98 longs-métrages, une semaine de débats
passionnants autour d’une trentaine de spécialistes du Proche et
du Moyen-Orient. Le pétrole a-t-il fait le malheur du ProcheOrient ? Pourquoi cette région est-elle devenue la poudrière du
monde ? La démocratie se décrète-t-elle ? Autant de questions
complexes, passionnantes, qui seront abordées tout au long
du Festival pour mieux comprendre ce Proche-Orient si beau,
mystérieux et imprévisible. Bon festival à toutes et à tous !
ÉDITOS 3
LES SÉANCES SPÉCIALES avec FRANCE TÉLÉVISIONS - PREMIÈRES FRANÇAISES
Vendredi 20 novembre à 19H45 – cinéma Jean Eustache
Elizabeth II, la révolution d’une reine
Pierre Hurel – France – 2015 – 90 mn
AUTEUR-RÉALISATEUR Pierre Hurel NARRATEUR Denis Podalydès
IMAGE Damien Vercaemer MONTAGE Raphaël Peaud CONSEILLER
HISTORIQUE Robert Lacey PRODUIT PAR Fabrice Frank, Gaël Leiblang,
Emmanuel Chain, Thierry Bizot PRODUCTION Elephant Doc
AVEC LA PARTICIPATION DE France Télévisions
Au milieu des années 90, Elizabeth II, Reine d’Angleterre, a connu
la plus forte crise de son règne. Attaquée sur sa fortune et ses
privilèges par des contribuables britanniques secoués par la crise
économique, choquée par les règlements de compte entre son
fils le Prince Charles, héritier du trône, et son épouse la Princesse
Diana qui souillent à jamais l’image de la royauté, Elizabeth
perd pied. La jeune reine mystique, prête à tous les sacrifices pour
la Couronne, est devenue une monarque austère et dépassée.
Dans les jours qui ont suivi la mort de la Princesse, la monarchie
elle-même était en danger. Mais Elizabeth II a su réagir. À 70 ans,
la reine d’Angleterre va enfin s’adapter à son époque, fendre
l’armure, sortir de sa réserve, pour devenir, au début des années
2000, la royale grand-mère de toute la nation britannique.
Aujourd’hui véritable icône vivante, elle prépare le futur de la
Couronne en coachant son petit-fils, le jeune prince William.
Ce film veut lever un coin du voile de l’histoire intime d’Elizabeth
II. Découvrir un peu la femme derrière la reine. Raconter ses
choix, ses doutes, ses émotions, et comprendre ainsi comment
cette souveraine sortie d’un autre siècle a pu survivre malgré
les sacrifices, les scandales et les années. Survivante imperturbable devenue une icône mondiale, Elizabeth II se jure de régner
jusqu’à sa mort.
Vendredi 20 novembre à 17H15 – cinéma Jean Eustache
Protestants de France
Valérie Manns – France – 2015 – 2 x 52 mn
Épisode 1 : Une blessure française – Épisode 2 : Au nom de la République
PRODUCTION Compagnie des Phares et Balises, France Télévisions PRODUCTEURS Fanny Glissant, Jean Labib
RÉALISATION-SCÉNARIO Valérie Manns IMAGE Nicolas Le Gal MONTAGE Philippe Baillon MUSIQUE Jérôme Rebotier
COMMENTAIRE DIT PAR Irène Jacob
Les protestants fascinent et dérangent. Ils ont nourri mythes et
fantasmes pendant des siècles. Ils ont suscité haine et rejet. Cette
minorité, la plus ancienne sur le sol français, la plus secrète
et jusqu’en 1940 la plus persécutée, reste méconnue du grand
public. Elle a pourtant contribué à inventer la France d’aujourd’hui.
Leur histoire, c’est la nôtre. C’est celle d’une blessure française,
marquée par l’intolérance et la répression. Mais c’est aussi celle
d’une intégration. Les Protestants de France ont participé à l’essor
du capitalisme. Au nom de la République, ils ont adhéré aux
grands combats chers aux Français : la démocratie, l’école, la
laïcité.
Malgré l’essor du mouvement évangélique, les protestants
représentent désormais une infime minorité. Est-ce là le prix à
payer pour leur goût de la laïcité ? Quel est l’avenir de cette communauté ? Qui sont les protestants d’aujourd’hui ? Pour la première fois, ils s’expriment sur cette histoire intime et collective :
Michel Rocard, Pierre Joxe, Coline Serreau et Eric Ruf, l’industriel
Thierry Peugeot, l’ancien président du Comité Consultatif d’Ethique Didier Sicard, côtoient des protestants anonymes : pasteurs,
proviseur, ancien résistant. Le récit de leurs expériences croise
la parole des plus grands historiens et spécialistes du protestan-
tisme, de la Réforme à la Saint-Barthélemy en passant par la Révolution industrielle, de la Seconde Guerre mondiale jusqu’au
renouveau des Eglises évangéliques.
5
LES SÉANCES SPÉCIALES avec ARTE
LES RENDEZ-VOUS PARTICULIERS D’ARTE
Jeudi 19 novembre à 16H45 en présence des auteures
La Fin des Ottomans
Mathilde Damoisel, Sylvie Jézéquel – France – 2015 – 2 x 52 mn
AUTEURES
Sylvie Jézéquel et Mathilde Damoisel RÉALISATION Mathilde Damoisel
ARTE France et Seconde Vague Productions
PRODUCTION
Paul Saadoun
COPRODUCTION
Six siècles durant, l’Empire ottoman a imposé sa puissance sur
trois continents et sept mers. Un empire immense, terre des
lieux saints, des trois monothéismes, mosaïque de langues,
de cultures et de religions sans comparaison dans l’histoire
des hommes. La Fin des Ottomans retrace l’histoire de l’effondrement de cet Empire d’une puissance exceptionnelle sur les
ruines duquel s’est dessiné le monde moderne.
LA FIN DES OTTOMANS
Les Nations contre l’Empire – 1ère partie – 53 mn
Depuis l’indépendance de la Grèce en 1830, premier État Nation
à s’émanciper de l’Empire, jusqu’à l’avènement de la République
de Turquie en 1923, dernier État Nation à naître de ses ruines, le
film met à jour la mécanique politique, économique et sociale qui
a conduit l’Empire ottoman à sa perte. Miné par le nationalisme
naissant, convoité par l’impérialisme des grandes puissances
européennes, ruiné par ses efforts vains pour s’adapter à la
modernité, l’Empire ottoman mettra près d’un siècle à se retirer
totalement d’Europe, perdant en 1913 ses dernières provinces balkaniques. Il ne faudra ensuite que quatre années pour
qu’il s’effondre définitivement, emporté par la Première Guerre
mondiale.
LA FIN DES OTTOMANS
Le Moyen-Orient en éclat – 2e partie – 53 mn
Des Balkans au Moyen-Orient, l’effondrement et le démembrement de l’Empire ottoman ont donné naissance à des États,
à des frontières et à des fractures, autant ethniques que religieuses, qui marquent aujourd’hui encore profondément ses
anciens territoires.
En s’attachant à identifier ces fractures qui ont perduré, le film
rappelle combien le passé ottoman est un passé qui compte.
Faute de le connaître et de le comprendre, nul ne peut envisager
les défis politiques, religieux et identitaires qui agitent notre
présent – en Bosnie, au Kosovo, en Turquie, au Liban, en Syrie,
en Israël, en Palestine, en Irak…
EN AVANT-PREMIÈRE
Jeudi 19 novembre à 19H30 en présence du réalisateur
François Mitterrand.
Que reste-t-il de nos amours ?
William Karel – France – 2015 – 90 mn
Film en compétition pour le Prix du Film d’Histoire – Catégorie documentaire (voir p. 147)
7
LES SÉANCES SPÉCIALES
Avec la DMPA (Direction de la Mémoire, du Patrimoine et des Archives
au Ministère de la Défense) et l’ECPAD (Établissement de communication
et de production audiovisuelle de la Défense)
Mercredi 18 novembre à 19H30 – cinéma Jean Eustache
Les Yeux brûlés
Laurent Roth – France – 1986 – 58 mn — couleurs/noir et blanc
ECPAD – DISTRIBUTION Shellac – Film restauré par les Archives Françaises du film du CNC RÉALISATION-SCÉNARIO
Laurent Roth AVEC Mireille Perrier, l’Adjudant-chef Patrice George ET LA PARTICIPATION DE Raoul Coutard, Marc Flament, Pierre
Schoendoerffer, Raymond Depardon IMAGE Bernard Miale SON Jean-Paul Bigorgne MONTAGE Marie-Christine Dijon MUSIQUE
Chœur de l’Armée française
PRODUCTION
Une jeune femme vient chercher à l’aéroport de Roissy une cantine militaire qui lui est retournée. Il s’agit des effets et clichés de
Jean Péraud, reporter photographe disparu à Diên Biên Phu le 8
mai 1954. Bientôt, la discussion s’engage entre la jeune femme
et les anciens compagnons de Péraud. À travers les souvenirs
et récits qu’elle suscite, ressurgissent les questions toujours
actuelles sur ce qui fait l’image de guerre : le reporter est-il
témoin ou combattant ? Se protège-t-il des effets de la guerre
en la filmant ou bien au contraire prend-il plus de risques pour
rendre son témoignage ? Peut-on parler d’art devant cette image
faite face à la mort ?
En 1986, à l’occasion du quarantième anniversaire de la création
du service cinématographique des armées, son ancêtre, l’ECPA
(établissement cinématographique et photographique des armées)
lance un concours de scénario. Laurent Roth, jeune appelé, est
ainsi chargé de réaliser un film en hommage aux « soldats de
l’image » dont la mission est de témoigner de l’engagement de
l’armée française en guerre.
Dans les années 1980, les missions de l’ECPA sont de produire tous
les films pour les armées, de réaliser les reportages intéressant
le ministère, de conserver et de diffuser films et photographies,
pour filmer la guerre et documenter la vie de l’armée française
dans tous ses aspects. Trente ans après, l’ECPAD a conservé et
développé ces attributions : formation, réalisation, production,
constitution d’archives, diffusion, exploitation.
À l’occasion du centenaire du cinéma et de la photographie des
armées dont l’ECPAD est l’héritier, les archives françaises du film
du CNC ont restauré Les Yeux brûlés.
En 1ère partie : sélection d’images d’archives de l’ECPAD
consacrées au Proche-Orient.
Mêlant documents d’archives conservés à l’ECPAD et images
tournées à l’aéroport de Roissy avec l’actrice Mireille Perrier, Les
Yeux brûlés est un film entre fiction et documentaire qui donne
la parole à des grands noms du cinéma et de la photographie
de conflit. À travers ce film, Laurent Roth tente d’exprimer ce
que les clichés de guerre racontent de la vie et de l’état d’esprit
des hommes envoyés au front. Il questionne la mission des
reporters militaires et propose « une réflexion sur la fascination
des hommes pour la guerre et la mort. » (Max Guérout).
Jeudi 19 novembre à 21H10 – cinéma Jean Eustache
Clemenceau
Jérôme Diamant-Berger – France – 2015 - 83 mn
Jérôme Diamant-Berger AVEC LA PARTICIPATION de Michel Bouquet,
Jean-Noël Jeanneney et Michel Winock MUSIQUE ORIGINALE ET INTERPRÉTATION Béatrice
Thiriet IMAGE Jean-Marie Boulet SON Thomas Perlmutter PRODUCTION Mélisande Films
COPRODUCTION Le Film d’Art AVEC LA PARTICIPATION de Histoire, du Centre National du
Cinéma et de l’Image animée
AUTEUR
Au printemps 2014, Jérôme Diamant-Berger se retrouve sur la
route vendéenne qu’emprunta en 1928 Henri Diamant-Berger,
son grand-père, pour tourner le seul film jamais réalisé sur et avec
Georges Clemenceau. Grâce à la magie des images anciennes
intimement mêlées au tournage actuel, grâce à l’interprétation
de Michel Bouquet qui se glisse avec génie dans la peau du « Tigre »
et à celle de Béatrice Thiriet qui incarne poétiquement et musicalement Marguerite Balspenberger auquel il voua une passion
dévorante, grâce enfin aux récits des historiens Michel Winock
et Jean-Noël Jeanneney, ce film met en scène l’universalité et
l’intemporalité des messages politiques et profondément humains
de Clemenceau. Présenté dans une version longue, le film permet
de découvrir l’essai cinégraphique intégral et totalement inédit
tourné par Henri Diamant-Berger, que Georges Clemenceau avait
choisi de son vivant comme « testament intemporel ».
Séance en présence de Jérôme Diamant-Berger,
Béatrice Thiriet, Jean-Noël Jeanneney et Michel Winock.
9
HOMMAGE À JEAN LACOUTURE
Dimanche 22 novembre à 16H30
Cinéma Jean Eustache – En présence du réalisateur
Jean Lacouture ou
la position du biographe
Hugues Le Paige – France – 2000 – 57 mn
AUTEUR-RÉALISATEUR
Hugues Le Paige IMAGE Vincent Fooij SON Thierry Ferret
Guy Dussart MONTAGE Anne De Jaer MIXAGE Bertrand Leroy
DIRECTION DE PRODUCTION Véronique Marit PRODUCTEUR DÉLÉGUÉ Luc Dardenne
PRODUCTION Dérives COPRODUCTION RTBF Bruxelles, ARTE Belgique, TSR AVEC
LA PARTICIPATION DE Télé-distributeurs Wallons, Centre du cinéma et de l’audiovisuel de la Communauté française de Belgique, Région Wallonne
MUSIQUE ORIGINALE
Une carrière équitablement partagée entre le journalisme et la
biographie : Jean Lacouture a accompagné le demi-siècle écoulé
d’un regard singulier. Journaliste de la décolonisation, il a rencontré et portraituré tous les grands dirigeants du tiers-monde
(Ho Chi Minh, Nasser, Sékou Touré, etc.). Biographe, il a choisi de
raconter des hommes dont les vies mêlaient toujours intimment dessein politique et préoccupation esthétique (Malraux,
Blum, Mauriac, Mendès-France, de Gaulle, Mitterrand).
Témoin engagé, il a tout à la fois cultivé le concept de « l’histoire
immédiate » et développé une conception « héroïque » du monde.
Le film propose un portrait de Jean Lacouture qui s’attache aussi
bien à ses certitudes qu’à ses doutes, à ses engagements qu’à
ses contradictions.
10
Jean, vous nous manquez. Vous dont la présence a tant marqué
la création et le déroulement des festivals d’histoire et cinéma
de Pessac ainsi que des Vendanges de Malagar, sans oublier les
fréquentes occasions, amicales et familiales, de revenir à Bordeaux,
la ville de votre naissance, de votre enfance et adolescence dans
une période qui a marqué à jamais votre génération. C’était celle
d’un Entre-deux-guerres marqué par le retour de la paix après le
plus meurtrier des conflits, puis par la grande crise de 1929, enfin
par la menace de la toile dévorante de “l’araignée gammée”, image
empruntée au bestiaire de François Mauriac que vous admiriez déjà
pour ses romans, reflets sans concession d’une bourgeoisie provinciale qui vous était familière à tous deux, et pour son engagement
dans la Résistance avec pour chef d’œuvre Le Cahier Noir. Est-ce en
référence à lui que vous avez exprimé souvent le regret de n’avoir
été qu’un combattant tardif de la guerre terrifiante qui s’achevait
en Europe : vous avez intégré en 1944 la deuxième DB du général
Leclerc qui vous a mené dans l’Allemagne de 1945 puis en Indochine, la même année. Vous veniez de brûler les étapes et vous n’alliez plus cesser de le faire avec cette boulimie de curiosité qui était
la vôtre. Très vite, très tôt, à moins de trente ans, en qualité d’agent
de renseignements, de grand reporter et de témoin placé au cœur
des événements vous avez découvert les territoires brûlants des
États qui se battaient pour leur indépendance : immense champ
d’action et de réflexion pour l’historien que vous étiez en train de
devenir en profitant de la chance inespérée de pouvoir rencontrer
les protagonistes d’une actualité faite de rebondissements dramatiques vécus sur le terrain : en Indochine, au Maroc, en Égypte, en
Algérie... On comprend mieux comment, en portant sur les fonts
baptismaux avec Alain Rousset le Festival d’histoire de Pessac,
vous avez préconisé avec force un sujet que vous connaissiez sur
le bout des doigts, au passé et au présent : le temps des colonies.
Dans l’un de vos ouvrages, intitulé Une vie de rencontres, vous
avez fait les portraits de toutes celles et ceux qui ont jalonné votre
existence en les replaçant dans le cadre qui était le leur : depuis les
premiers pilotes de votre engagement et l’initiation indochinoise,
suivie de la transhumance arabe, elle-même prélude au long séjour
au bord du Nil avec la chance exaltante de pouvoir vous réserver,
en compagnie de Simonne, votre épouse, des entractes parisiens
auprès des patrons de journaux qui vous employaient et des éditeurs attirés par vos talents d’écrivains.
Toutes vos biographies portent votre marque, indélébile, agrémentée pour de très nombreux lecteurs-auditeurs de votre signature
à grands traits de lettres et de figures élancées faites de soleils et
d’astres à la Cocteau. Comme si vous vouliez nous communiquer
votre bonne étoile dans un monde fascinant et effrayant... Pour
vous en convaincre et nous en persuader, vous avez plongé dans
le passé pour interroger de grands écrivains, en particulier ces trois
M. (Montaigne, Montesquieu, Mauriac) qui vous doivent d’être unis
à travers siècles et auxquels vous devez beaucoup... Dommage
que votre nom ne commence pas comme le leur, mais grâce à
vous, ils nous sont devenus plus familiers et vous avez bien des
traits communs avec eux, de la viticulture à l’écriture en passant
par la lecture. Et comme eux, vous avez un sens de la répartie qui
conduit à l’humour ou à une dérision salutaire quand le poids du
présent se fait trop lourd ou quand l’avenir voue au néant vos espérances et les enterre au plus profond de l’enfer. Ceci vous l’avez
douloureusement vécu à propos du Cambodge et vous avez eu le
courage de le dire et de l’écrire.
Pour terminer, vous souvenez-vous de votre avant-propos pour
le Festival de Pessac, consacré à “la femme au pouvoir” ? Vous
écriviez alors : “Il est bien possible que l’opéra soit la défaite des
femmes, qui y attrapent la phtisie ou s’y empalent sur le couteau de
Don José. Mais le cinéma, c’est leur victoire... Et quel rendez-vous
en perspective : avec nous, à Pessac, entre chien et loup, la reine
Christine, en son pourpoint de cuir, saluera d’un grand geste de
feutre la galopade à travers les escaliers de Petersbourg de l’impératrice rouge. Quand le pouvoir prend ces formes-là, quel avenir a
l’anarchie ? ” Jean, vous seriez sûrement d’accord pour donner le
nom d’Aliénor à la future grande région qui s’apprête à naître sans
vous. Mais on vous en parlera. Anne-Marie Cocula
INVITÉS ET INTERVENANTS
MARTIN BLANCHARD
MICHEL CABANNES
ÉRIC BONHOMME
LAURENT CAPDETREY
YANN BOUYRAT
MOUNIRA CHATTI
SALEM BRAHIMI
CÉDRIC CONDON
FRÉDÉRIQUE BREDIN
CLÉMENCE COPPEY
PATRICK BÉZIER
FRANÇOISE
BRIQUEL-CHATONNET
ANTOINE COPPOLANI
PIERRE BLANC
FRÉDÉRIC BRUNNQUELL
TANGUY CORTIER
MYRIAM ACHARI
CAROLINE BÉHAR
MOHAMMAD ALI
AMIR-MOEZZI
AKRAM BELKAÏD
JEAN-CHRISTOPHE ATTIAS
FERIEL BEN MAHMOUD
CLAUDE AZIZA
STÉPHANE BENTURA
ASAL BAGHERI
STÉPHANIE BEUCHER
GEORGI BALABANOV
ELIE BARNAVI
Directrice DMPA
Historien
Historien
Historien
Universitaire
Réalisateur
Historien
Directrice unité
documentaire France 5
Journaliste
Réalisatrice
Réalisateur
Professeure de géographie
Directeur général Audiens
Universitaire
Réalisateur
Professeur d’histoire
Professeur d’histoire
Réalisateur
Présidente CNC
Historienne
Réalisateur
Universitaire
Historien
Professeure de littérature
Réalisateur
Directrice unité
documentaire France 3
Historien
Réalisateur
INVITÉS 11
INVITÉS ET INTERVENANTS
YOUSSEF COURBAGE
CHAHDORTT DJAVANN
SOPHIE FAUDEL
FRANÇOIS GEORGEON
THIERRY COVILLE
ANTONIN DUBUISSON
JEAN-FRANÇOIS FECHINO
FRANCIS GILLERY
CHRISTOPHE DABITCH
HERVÉ DUMONT
JEAN-PIERRE FILIU
FANNY GLISSANT
LEYLA DAKHLI
DELPHINE
DUSSERT-GALINAT
FABRICE FRANK
ALLAIN GLYKOS
JÉRÔME FRITEL
PHILIP GOLUB
JÉRÔME GAUTHERET
ALICE GORISSEN
BERNARD GEORGE
VÉRONIQUE GRANDPIERRE
Démographe
Historien
Écrivain
Historienne
ANCA DAMIAN
Réalisatrice
MATHILDE DAMOISEL
Réalisatrice
Auteure
Dessinateur
Historien du cinéma
Professeure d’histoire
CHARLES ENDERLIN
Journaliste
DANIÈLE
ENDERLIN-KRIEGEL
Productrice
Institutionnel
Historien
Producteur
Réalisateur
Journaliste
Historien
Réalisateur
Productrice
Écrivain
Universitaire
Réalisatrice
Auteure
JÉRÔME DIAMANT-BERGER
Réalisateur
MATHILDE FASSIN
Réalisatrice
12 INVITÉS
Réalisateur
Historienne
INVITÉS ET INTERVENANTS
BULENT GUNDUZ
MEMONA HINTERMANN
PATRICK JEUDY
BURGHART KLAUSSNER
MAMAD HAGHIGHAT
BARBARA HUREL
YVES JEULAND
HÉLOÏSE KOLEBKA
SYLVIE JÉZÉQUEL
LARS KRAUME
WILLIAM KAREL
JEAN LABIB
ANDRÉ KASPI
ANNE LABRO
NICOLAS JALLOT
CLAUDE-CATHERINE
KIEJMAN
VÉRONIQUE
LAGOARDE-SÉGOT
JEAN-NOËL JEANNENEY
ANAÏS KIEN
HENRY LAURENS
Réalisateur
Réalisateur
VALERIE HANNIN
Historienne et journaliste
YVES HARTE
Journaliste
MICHÈLE HÉDIN
Administratrice du festival
BERNARD HEYBERGER
Historien
LAURENT HEYNEMANN
Réalisateur
Journaliste
Directrice adjointe unité
documentaire France 2
PIERRE HUREL
Réalisateur
GENEVIÈVE JACQUES
Présidente La Cimade
CHRISTOPHE JACQUOT
Directeur Ecpad
Réalisateur
Président d’honneur du
festival
Réalisateur
Réalisateur
Auteure
Réalisateur
Historien
Écrivaine
Journaliste
Acteur
Historienne et journaliste
Réalisateur
Producteur
Productrice
Réalisatrice
Historien
INVITÉS 13
INVITÉS ET INTERVENANTS
JEAN-YVES LE NAOUR
CHRISTOPHE LUCET
DARIUSH MEHRJUI
PHILIPPE POUCHAIN
HUGUES LE PAIGE
YURI MALDAVSKY
HALA MOHAMMAD
MICHAËL PRAZAN
GAËL LEIBLANG
HAYTHAM MANNA
OSSAMA MOHAMMED
KAREL PROKOP
VINCENT LEMIRE
VALÉRIE MANNS
RENÉ OTAYEK
GÉRARD PUECHMOREL
JEAN-FRANÇOIS LEPETIT
MICHEL MARIAN
ANGÉLIQUE OUSSEDIK
MICHÈLE RAY-GAVRAS
VINCENT LINDON
GABRIEL MARTINEZ-GROS
Réalisateur
Journaliste et réalisateur
Producteur
Historien
Producteur
Acteur
NEDIM LONCAREVIC
Réalisateur
14 INVITÉS
Journaliste
Réalisateur
Opposant syrien
Réalisatrice
Historien
Historien
ADHAM MAWED
Témoin syrien
Réalisateur
Réalisatrice
Réalisateur
Historien
Responsable développement
culturel Arte France
JEAN PETAUX
Universitaire
JEAN-CLAUDE POIRSON
Réalisateur
Réalisateur
Réalisateur
Réalisateur
Réalisateur
Productrice
ISABELLE RIGONI
Historienne
YVES RIOU
Réalisateur
INVITÉS ET INTERVENANTS
LORRAINE ROBINSON
Productrice
LAURENT ROTH
Réalisateur
DANIEL ROUSSEL
Réalisateur
JULIEN ROUSSET
Journaliste
PAUL SAADOUN
Producteur
PHILIPPE SAINTENY
Journaliste, documentariste
HINER SALEEM
Réalisateur
AXEL SALVATORI-SINZ
Réalisateur
MAURICE SARTRE
Historien
ANNIE SARTRE-FAURIAT
Historienne
GUY SELIGMANN
Producteur
YOUSSEF SHOUFAN
Photographe
ÉMILE SHOUFANI
Curé de Nazareth
ROBERT SOLÉ
Historien
OMAR YOUSSEF
SOULEIMANE
Poète
DOMINIQUE TIBI
Productrice
BÉNÉDICTE THOMAS
Productrice
GARIP TURUNC
Historien
XAVIER VILLETARD
Réalisateur
THOMAS WIEDER
Journaliste
MICHEL WINOCK
Historien
LAURENCE
ZAKSAS-LALANDE
Directrice adjointe
communication France
Télévisions
URBS
Dessinateur de presse
AUDREY VALTILLE
Réalisatrice
THOMAS VERCLYTTE
Professeur d’histoire
INVITÉS 15
LES JURYS - CATÉGORIE FICTION
PRIX DU JURY
Parrainé par la CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS
et le DOMAINE CLARENCE DILLON : Château Haut-Brion, 1er Grand Cru Classé en 1855, appellation Pessac
Léognan et Château La Mission Haut-Brion, Cru Classé de Graves, appellation Pessac Léognan
LE JURY PROFESSIONNEL
PRÉSIDENTE : CHAHDORTT DJAVANN, romancière et essayiste
© MJ2R.
Née en Iran, elle s’installe en Turquie en 1991, puis arrive à Paris en 1993, où elle intègre l’École des hautes études
en sciences sociales (EHESS). En 2002, elle publie un premier roman, Je viens d’ailleurs, dans lequel elle témoigne
de la tragédie vécue au quotidien par les Iraniens, et plus particulièrement les femmes. En 2003 elle publie Bas les voiles !,
essai sur le port du voile islamique. Se consacrant désormais entièrement à l’écriture, elle alterne romans et essais,
traduits dans plusieurs langues. En 2003, elle reçoit le Prix de la Laïcité et est faite Chevalier des arts et des lettres en 2006.
Son dernier livre, Big Daddy, est paru aux éditions Grasset en 2015.
MICHÈLE HÉDIN
Membre du Conseil
d’administration du Festival
du film d’histoire
CHRISTOPHE LUCET
Journaliste à Sud Ouest
OSSAMA MOHAMMED
Réalisateur
MAURICE SARTRE
Professeur émérite d’Histoire
ancienne à l’Université
François-Rabelais (Tours)
Administratrice du Festival du
film d’histoire et du Cinéma
Jean-Eustache, Michèle Hédin
participe depuis de nombreuses
années à l’élaboration du
programme scolaire du Festival,
avec notamment la conception
de dossiers documentaires
destinés aux enseignants.
Intervenante régulière de
l’Université Populaire Cinéma
organisée au Cinéma JeanEustache, elle anime également
en compagnie de Claude Aziza
des journées de sensibilisation,
destinées aux enseignants,
autour des thématiques
proposées par le Festival du
film d’histoire.
Journaliste et éditorialiste à
Sud Ouest depuis 1986 et à Sud
Ouest Dimanche depuis 1999.
Christophe Lucet couvre aussi
bien les faits de société
que les sujets de politique
étrangère. Il est également
l’auteur de nombreux
reportages à l’étranger.
Passionné d’histoire et des
débats d’idées, il arpente
la région Aquitaine depuis vingt
ans et il est un familier du fait
religieux. Christophe Lucet
anime régulièrement depuis
plusieurs années certaines
rencontres du Festival du Film
d’Histoire.
Né en 1954, Ossama Mohammed
est un réalisateur et scénariste
syrien. Après avoir étudié le
cinéma à l’Institut national de
la cinématographie (VGIK) à
Moscou, il réalise longs
métrages et documentaires
avec parcimonie (un tous les
vingt ans !). Des films lyriques
et poétiques, politiques aussi.
Il signe son premier film,
Étoiles du jour, découvert en
1988 en France à la Quinzaine
des réalisateurs. Le film recevra
plusieurs prix mais ne sera
jamais présenté en Syrie.
En 2002, il crie son écoeurement
face au conflit syrien avec
son second film, Sacrifices,
présenté à Cannes dans
la sélection Un certain regard.
En exil forcé et réfugié en
France depuis 2011, il suit
la révolution, puis la répression
qui ensanglante son pays,
signant le film Eau Argentée,
Syrie autoportrait, coréalisé
à distance avec Wiam Simav
Bedirxan, jeune enseignante
kurde restée dans la ville
de Homs. Il présente le film,
accompagné de cette dernière,
en sélection officielle au Festival
de Cannes en 2014.
Maurice Sartre est professeur
émérite d’Histoire Ancienne
à l’Université François-Rabelais
(Tours). C’est l’un des plus
éminents spécialistes de
l’histoire du Proche-Orient
gréco-romain – et plus
généralement de la
Méditerranée orientale, entre
la conquête d’Alexandre et
l’Antiquité tardive. Ses travaux
accordent une attention toute
particulière aux phénomènes
culturels et religieux.
Il est l’auteur de plusieurs
ouvrages de synthèse parmi
lesquels L’Orient romain,
L’Asie Mineure d’Alexandre à
Dioclétien, et L’Anatolie
hellénistique. Mais la Syrie
antique est au cœur de ses
travaux les plus récents, avec
notamment D’Alexandre à
Zénobie. Histoire du Levant
antique (4 av.-3 ap. J.-C.),
un Gallimard-Découvertes sur
La Syrie antique, et, avec Annie
Sartre-Fauriat, un autre volume
de la même collection sur
Palmyre, la cité des caravanes
et Zénobie, de Palmyre à
Rome. Il a par ailleurs signé
un ouvrage destiné à un public
plus large, où le Proche-Orient
hellénisé tient une large place,
Histoires grecques.
16
LES JURYS - CATÉGORIE FICTION
PRIX DU JURY ÉTUDIANT — Parrainé par le Crédit Mutuel du Sud-Ouest
LE JURY ÉTUDIANT
PRÉSIDENT : LAURENT HEYNEMANN, réalisateur
Né en 1948, Laurent Heynemann commence comme assistant de Bertrand Tavernier avant de se lancer à 28 ans dans
la réalisation. La Question (1976), son premier long métrage, aborde le thème tabou de la torture pendant la guerre
d’Algérie et marque le début d’une série de films aux sujets politiques et sociaux qu’il aimera traiter pour en démonter
les rouages sous-jacents, notamment Il faut tuer Birgit Haas (1981) qui l’amène à explorer le militantisme gauchiste
allemand dans les années 1970, ou encore trois ans plus tard, Stella dans lequel la Collaboration sous le régime de Vichy
est au cœur du propos. Réalisateur de téléfilms depuis les années 1980, il a réalisé dernièrement une série historique
intitulée Le Roi, l’Ecureuil et la Couleuvre qui met en scène la rivalité entre Fouquet et Colbert dans les premières années
du règne de Louis XIV. On lui doit plus récemment Accusé Mendès France.
LAURENT BUSCAIL
Licence Culture
Humaniste & Scientifique,
Université Bordeaux
Montaigne
EMMANUELLE DAVID
Master Sciences-Po
Bordeaux
ELSA FEKETE
Licence Histoire,
Université Bordeaux
Montaigne
PIERRE MARTIAL
Licence Cinéma,
Université Bordeaux
Montaigne
YVONNE PAMBO
Master Sciences-Po
Bordeaux
PRIX DU PUBLIC — Parrainé par la revue L’Histoire
PRIX PAPE CLÉMENT
Indépendamment des deux compétitions, le Festival décerne le Prix du Château Pape Clément à une personnalité de l’histoire ou du
cinéma, en hommage à son parcours professionnel.
17
LES JURYS - CATÉGORIE DOCUMENTAIRES INÉDITS
PRIX DU JURY
Parrainé par le Syndicat viticole de Pessac-Léognan
LE JURY PROFESSIONNEL
PRÉSIDENT : YURI MALDAVSKY, documentariste
© RVH.
Yuri Maldavsky est un réalisateur spécialisé dans la couverture des conflits à travers le monde. Après avoir travaillé comme
journaliste et cameraman pour les magazines d’Arte, Canal+ et France 2, son premier documentaire La Section White
Bagdad 2004 (avec Timothy Grucza, 2005) est une immersion aux côtés des forces américaines à Bagdad. Le film remporte
le prix Banff World Television Awards Best Feature Length Documentary. En 2010, son documentaire Ultime avant-poste
partage le quotidien des soldats afghans dans leur lutte contre les Talibans. Il a également réalisé Mexique pays au bord de
l’overdose (2011) et Syrie - Enfants en guerre (2014).
BERNARD GEORGE
Cinéaste
VÉRONIQUE GRANDPIERRE
Historienne
JEAN PETAUX
Docteur en sciences politiques
DANIEL ROUSSEL
Cinéaste
Né à Arles dans une famille de
l’image, Bernard George fait ses
premiers pas dans le cinéma
documentaire à l’occasion de
son service militaire effectué à
l’Etablissement Cinématographique
et Photographique des Armées.
Il y réalise son premier
documentaire historique, Verdun
Année 1916, primé et diffusé
aux États-Unis. Depuis 1987,
il réalise de nombreux
documentaires historiques pour
la télévision, comme la récente
série « Les Combattants de
l’Ombre » consacrée à la
résistance française et diffusée
sur ARTE. Bernard George a
également réalisé : La Vengeance
des Arméniens. Le procès
Tehlirian (2014), Daniel Cordier,
la résistance comme un roman
(2010), L’Affaire Kravchenko,
la guerre froide à Paris (2009),
B comme Babylone (2008).
Agrégée d’histoire, Docteur en
Histoire, auteure d’une thèse
consacrée à l’antique
Shaduppum, petite ville du
XVIIIe av. J–C située près de
Bagdad en Irak, Véronique
Grandpierre a enseigné à
l’université de Paris VIII-Saint
Denis et celle de VersaillesSaint Quentin. Elle est membre
associée au laboratoire
Identités Cultures et Territoires
de l’Université de Paris 7
Diderot. Ses recherches portent
sur les paysages, le patrimoine,
les sociétés et le fait religieux
au Proche- Orient ancien de
l’Antiquité à nos jours mettant
en exergue les continuités et
les ruptures. Elle est l’auteure,
entre autres, d’une Histoire de
la Mésopotamie parue chez
Gallimard.
Jean Petaux enseigne la
culture générale et les sciences
politiques à Sciences Po
Bordeaux, établissement dans
lequel il est chargé de mission
auprès du directeur, pour
la communication, les relations
extérieures et institutionnelles.
Docteur habilité à diriger
des recherches en sciences
politiques, il se consacre à
l’analyse localisée des faits
politiques. Il est notamment
l’auteur de Visages et portraits
politiques de Gironde (Le Bord
de l’Eau, 2012), Figures et
institutions de la vie politique
française (Biotop, 2010) et
L’Europe de la démocratie
et des droits de l’homme –
L’action du Conseil de l’Europe
(2009).
Journaliste français, auteur
et réalisateur de films
documentaires, spécialiste
des pays de l’ex-Indochine
(Vietnam, Laos, Cambodge).
De 1980 à 1986, il est
correspondant à Hanoï pour
un quotidien français. À partir
de 1989, il réalise des reportages
et films documentaires diffusés
en France et à l’étranger.
Il crée l’agence de presse
«Daniel Roussel Production»
(1989-1995) et arpente l’Asie,
les États-Unis, l’Amérique du
Sud. En 2014 à Pessac, il reçoit
le Prix du Jury du film
d’histoire - catégorie
Documentaire pour Guerre
du Vietnam, au cœur des
négociations secrètes.
Parmi ses autres réalisations
documentaires : Seul celui
qui veille sait que la nuit est
longue (2014), Plus loin que
le soleil (2013), McCain,
la grande illusion (2008),
La Bataille du tigre et
de l’éléphant (2004), Portés
disparus Missing in Action
(1993, nominé au FIPA),
Prisonniers au Hanoï-Hilton
(1992, nominé au FIPA).
18
LES JURYS - CATÉGORIE DOCUMENTAIRES INÉDITS
PRIX BERNARD-LANDIER DU JURY LYCÉEN (en hommage à l’ancien conseiller cinéma du Rectorat
de Bordeaux). Les lycéens sont accompagnés par Frédéric Fièvre, membre du groupe pédagogique
du Festival.
LE JURY LYCÉEN
PRÉSIDENT : GUY SELIGMANN, auteur, réalisateur, producteur
Auteur-réalisateur, né à Paris en 1939, Guy Seligmann est également producteur, metteur en scène et scénariste de
cinéma, télévision et théâtre. Il a notamment réalisé deux documentaires pour le cinéma (Vivre à Bonneuil en 1975 et
Secrète enfance en 1978). Membre fondateur de la Scam, il en a été le président de 1991 à 1995, puis de 1999 à 2003
et également de 2007 à 2009. Gérant de la société Sodaperaga créée en 1970, il a produit plusieurs longs métrages :
L’année du Chien de S. Aronovitch (Ours d’argent au festival de Berlin, 1995), Sartre par lui-même d’Alexandre Astruc
et Michel Contat, Khroustaliov ma voiture d’Alexei Guerman (sélection officielle au festival de Cannes, 1998),
Les Faux monnayeurs de Benoît Jacquot en 2009.
AGATHE ARNAUD
Lycée Pape Clément,
Pessac
PAULINE BILLON
Lycée Jacques Monod,
Lescar
ILLAN BOUTENET
Lycée Pape Clément,
Pessac
MARGAUX BRUNG
Lycée Philippe Cousteau,
St André de Cubzac
KENZA HAMACHE
Lycée François Magendie,
Bordeaux
MOHAMED HARROUZ
Lycée Pape Clément,
Pessac
GABY MICHEL
Lycée Montesquieu,
Bordeaux
LAURE-MARINE VIOUJARD
Lycée François Magendie,
Bordeaux
LAURA COURTY
Lycée Vaclav Havel,
Bègles
LE JURY DES JEUNES JOURNALISTES IJBA (INSTITUT DE JOURNALISME BORDEAUX AQUITAINE)
PRÉSIDENT : HUGUES LE PAIGE, journaliste.
Né en 1946 à Bruxelles, Hugues Le Paige, diplômé en Lettres et Philosophie, devient journaliste à la RTBF et se tourne vers
le documentaire. Il est auteur-producteur au département documentaire à la RTBF, puis auteur-réalisateur indépendant.
Depuis 1990, il a ainsi écrit et réalisé une quinzaine de films, dont Il fare politica, chronique de la Toscane rouge (19822004) et Le Prince et son image (2011) sur François Mitterrand et le rapport entre image et pouvoir. Il est également
l’auteur d’une dizaine de livres – son dernier : La Vérité s’écrit avec un v minuscule, Chroniques 1996-2006 (La Mesure
du possible, Bruxelles, 2007) et directeur de la revue de débats Politique. Il préside depuis 2012 ÉCLA, l’agence de
l’écrit, du cinéma, du livre et de l’audiovisuel de la Région Aquitaine. Il est l’auteur de Jean Lacouture ou la position du
biographe qui sera projeté dimanche 22 novembre en hommage à Jean Lacouture
5 ÉTUDIANTS
DE L’IJBA :
ALICE
FIMBEL-BAUER
GARO
KEVORKIAN
MARIA
LAFORCADE
YANN LAGERDE
JUAN PALENCIA
PRIX DU PUBLIC Parrainé par la revue L’Histoire
19
LES JURYS - CATÉGORIE PANORAMA DOCUMENTAIRES
PRIX DU JURY DE LA VILLE DE PESSAC
LE JURY OFFICIEL
PRÉSIDENT : KAREL PROKOP, réalisateur
Né en Tchécoslovaquie, Karel Prokop a fait ses études à l’Académie du cinéma de Prague. Dissident, prisonnier politique,
puis camionneur, il réussit à s’évader de son pays et à gagner la France où il deviendra réalisateur de nombreux
documentaires (Alerte au pillage des royaumes de Saba ; Yemen, la république des tribus). Sa passion pour les contrés
peu connues mais aussi pour la mer et l’univers sous-marin, ainsi que son intérêt pour l’archéologie, l’histoire et
la géopolitique le conduiront à réaliser sur tous les continents des films dans lesquels il s’efforce de réunir l’aventure,
le savoir et le rêve.
5 HABITANTS DE PESSSAC :
NATHALIE ALFONSO
ELISABETH
GUIGNAUD-LE BERRE
ALAIN MAYER
CLÉMENT MENEZO
CHRISTIAN MILLIER
PRIX DU LIVRE D’HISTOIRE DU CINÉMA – 2015
Compétition créée en 2010, le Prix du livre d’histoire est un prix décerné par des représentants du conseil d’administration
du Festival du film d’histoire visant à récompenser le meilleur livre d’histoire du cinéma paru dans l’année.
Il sera remis au lauréat lors de la cérémonie de clôture.
JURY : François Aymé, commissaire général du Festival, Claude Aziza, secrétaire général du Festival,
Michèle Hedin, administratrice du Jean Eustache
NOMINÉS :
– Arnaud Balvay et Nicolas Cabos, John Ford et les Indiens, Seguier, mars 2015.
– David Da Silva Le populisme américain au cinéma de D. W. Griffith à Clint Eastwood : un héros populiste pour unir
ou diviser le peuple ?, Lett Motif, mai 2015.
– Hervé Dumont, Napoléon. L’épopée en 1000 films : cinéma et télévision de 1897 à 2015, Éd. Ides et Calendes/
Cinémathèque suisse, septembre 2015.
– Jean-Christophe Fouquet, Faites-le plus grand ! Le cinéma selon Merian C. Cooper, Festival international du film
d’Amiens/La mémoire vivante, 4e trimestre 2014.
– Franck Lafond, Le Dictionnaire du cinéma fantastique et de science-fiction, Éd. Vendémiaire, octobre 2014.
– Maxime Lachaud, Red Neck Movies. Ruralité et dégénérescence dans le cinéma américain, Rouge profond, septembre 2014.
– Mathi Sabourdain, Dictionnaire du cinéma italien de 1943 à nos jours, Nouveau Monde éditions, septembre 2014.
OUVRAGE PRIMÉ :
Hervé Dumont, Napoléon. L’épopée en 1000 films : cinéma et télévision de 1897 à 2015,
Éd. Ides et Calendes / Cinémathèque suisse, septembre 2015.
« Le Bénédictin » de l’Histoire au cinéma. Hervé Dumont est un monomaniaque fou. Il a décidé de faire
le répertoire commenté de toutes les périodes de l’Histoire illustrées par le cinéma. Champs immense
dont il est l’explorateur intrépide. Après l’Antiquité au cinéma (2009), il aurait dû, en bonne logique,
s’attaquer au Moyen-Âge. Mais la logique n’a que faire de la chronologie, l’actualité était impériale et
Hervé Dumont a écrit et publié un colossal Napoléon : l’épopée en 1000 films, dont le poids défie tout
lecteur qui n’est pas haltérophile ! Oubliés les essais de P. Mattei et de J. Tulard, oubliée la filmographie
du CinémAction consacré à L’Histoire de France au cinéma, on a trouvé avec Hervé Dumont le chantre
de l’épopée napoléonienne, qu’on y soit ou non sensible. Tout sur le grand homme, ses épouses et
les autres, ses frères et sœurs, la mamma (« pourvou que ça doure »), l’histoire et la légende. À quand
une rue Hervé Dumont à Ajaccio ? Claude Aziza
NB : En 2014, Hervé Dumont avait déjà été récompensé par le Prix Pape Clément du Festival, pour son extraordinaire travail de recensement
de 15 000 films et téléfilms, en quatre parties, de l’Antiquité au XIXe siècle, véritable encyclopédie historique électronique à la disposition
de tous !
20 JURY
FESTIVAL DU FILM D’HISTOIRE DE PESSAC
LES CONFÉRENCES
LES RENCONTRES D’HISTOIRE
LES DÉBATS
INTRODUCTION
l’orient, si loin, si proche
23
LUNDI 16 NOVEMBRE
CONFÉRENCE INAUGURALE DE MAURICE SARTRE
un si proche orient 27
LES RENCONTRES AVEC LA REVUE L'HISTOIRE
MARDI 17 NOVEMBRE
écriture, agriculture, religions.
le proche-orient, berceau des civilisations
MERCREDI 18 NOVEMBRE
turcs et arabes, de l’empire ottoman
à erdogan 31
JEUDI 19 NOVEMBRE
islamisme : le coup de tonnerre de 1979
33
VENDREDI 20 NOVEMBRE
israël-palestine
35
SAMEDI 21 NOVEMBRE
les chrétiens d’orient 37
DIMANCHE 22 NOVEMBRE
les racines historiques du djihadisme 39
LE DÉBAT DU MONDE
DIMANCHE 22 NOVEMBRE
qu’est-ce que les américains sont allés faire
au proche-orient ? 41
29
L’ORIENT, SI LOIN,
SI PROCHE
Le Proche-Orient est en plein chaos. Guerre civile en Syrie, expansion de Daech, exactions contre les minorités, déplacements de
populations, destruction de patrimoines millénaires. L’horreur, le
désastre et la ruine font désormais l’actualité d’une région qui fut
pourtant le berceau de nos civilisations. L’écriture, l’agriculture,
l’irrigation, la ville, l’État, le monothéisme… le legs est immense.
« Notre civilisation et notre culture sont redevables aux habitants
du Proche-Orient, et à toutes les innovations qu’ils ont introduites
au cours des millénaires, bien avant toute autre région du monde »,
écrit Françoise Briquel-Chatonnet dans Les Collections de L’Histoire
n° 69.
Sous le titre « Un si Proche-Orient », le Festival international du
film d’histoire de Pessac a choisi cette année de s’intéresser à une
région à haute tension historique, cet « arc fertile correspondant
à la côte orientale de la mer Méditerranée, au piémont du plateau
anatolien et à la vallée des deux fleuves, le Tigre et l’Euphrate ».
Grâce à la variété des tables rondes proposées et à la diversité des
intervenants invités, le festival évoquera ce Proche-Orient, à la
fois creuset de civilisation et zone d’extrême tension religieuse et
communautaire. Du premier empire d’Akkad au choc des impérialismes, de la malédiction du pétrole au sort des chrétiens d’Orient,
de l’interminable duel Israël-Palestine aux racines historiques du
djihadisme, tous les sujets seront abordés. Et les meilleurs spécialistes
sont convoqués : Françoise Briquel-Chatonnet, Véronique Grandpierre, Leyla Dakhli, François Georgeon, Vincent Lemire, Henry
Laurens, Élie Barnavi, Youssef Courbage, Jean-Pierre Filiu, Gabriel
Martinez-Gros…
Cette édition sera aussi l’occasion pour nous, Européens, de nous
confronter à nous-mêmes. Car, comme l’explique Maurice Sartre
qui prononcera la conférence inaugurale le 16 novembre à 18 heures,
« le Proche-Orient et l’Europe appartiennent au même monde.
Deux espaces solidaires qui sortent de la même matrice. Dans nos
réflexions, il s’agira donc de comprendre le riche héritage que nous
ont légué les civilisations qui se sont succédé sur ce territoire, mais
aussi d’avoir pleinement conscience que nous sommes en partie
responsables de l’organisation moderne du Proche-Orient. Cet
espace, depuis l’expédition d’Égypte conduite par Bonaparte et
l’entrée du monde arabe dans le monde colonial occidental, a été
façonné par nos choix et nos décisions. Même si, bien sûr, il ne faut
pas minimiser l’importance du rôle des religions. »
NE PAS DISTRAIRE, MAIS TÉMOIGNER
Ce thème offre aussi sa part d’exotisme que l’on retrouve dans
l’orientalisme du cinéma occidental qui prend pour cadre le ProcheOrient. Mais qui demeure très éloigné de la vision des réalisateurs
régionaux. « À la différence du cinéma occidental qui traite bien
souvent d’un Proche-Orient mythologique à la sauce hollywoodienne, explique le délégué général du Festival, Pierre-Henri Deleau,
qui sélectionne la centaine de films consacrés au thème, les cinémas
turc, égyptien, iranien, israélien ou même syrien sont ancrés dans la
réalité quotidienne. Bien souvent engagés, ils laissent peu de place
à l’imaginaire et cherchent avant tout à être en prise directe avec
les problèmes de société ou politiques. » S’il existe bien un cinéma
de divertissement en Égypte ou en Iran, les œuvres des cinéastes
UN SI PROCHE-ORIENT
-
DÉBATS 23
Wadjda de Haïfaa Al Mansour.
de renommée et de diffusion internationales (Abbas Kiarostami,
Elia Suleiman, Asghar Farhadi) ont pour objectif de témoigner.
Ainsi l’Égyptien Youssef Chahine dépeint la vie au Caire dans Gare
centrale en 1958. L’Iranien Dariush Mehrjui décrit la misère et le
trafic de sang dans Le Cycle en 1975. Pierre-Henri Deleau explique
sa démarche de sélection : « Je veux que les spectateurs sortent
troublés de la projection. Que les idées reçues – quelles qu’elles
soient – s’effacent devant une certaine forme de réalité locale qui
nous est encore trop méconnue. »
Un seul exemple : le film saoudien Wadjda (2012) réalisé par une
femme, Haifaa al-Mansour, en Arabie saoudite, pays qui interdit les
salles de cinéma. Cette 26e édition sera l’occasion de s’instruire et
de confronter les points de vue. Pour rêver (un peu), pour pleurer
(pas trop), et pour sortir de nos préjugés.
Olivier Thomas
Chef de rubrique à la revue L’Histoire
Page précédente : Et maintenant, on va où ? de Nadine Labaki.
24 DÉBATS
-
UN SI PROCHE-ORIENT
BIBLIOGRAPHIE DE LA REVUE L’HISTOIRE
ÉCRITURE, AGRICULTURE, CIVILISATIONS… LE PROCHEORIENT, BERCEAU DES CIVILISATIONS – cf. p. 29
– Jean Bottéro, « Morale et sagesse des Mésopotamiens »,
L’Histoire n°225, octobre 1998.
– Françoise Briquel-Chatonnet, « Tout commence à Edesse »,
L’Histoire n°337, décembre 2008.
– Maurice Sartre, « La splendeur oubliée de Gaza », L’Histoire
n°340, mars 2009.
– Ernest Will, « Palmyre : la Venise des sables », L’Histoire n°137,
octobre 1990.
TURCS ET ARABES, DE L’EMPIRE OTTOMAN À ERDOGAN
– cf. p. 31
– Vincent Lemire, « Naissance d’une ville moderne », L’Histoire
n°375, juillet 2012.
– Robert Mantran, « L’âge d’or de l’empire ottoman »,
Les Collections de L’Histoire n°45, octobre 2009.
– Lucette Valensi, « Empire ottoman : le choc de la modernité »,
Les Collections de L’Histoire n°30, janvier 2006.
QU’EST-CE QUE LES AMÉRICAINS SONT ALLÉS FAIRE
AU PROCHE-ORIENT ? – cf. p. 41
– Hosham Dawod, « Saddam Hussein : la chute d’un dictateur »,
L’Histoire n°308, janvier 2006.
– Philip Golub, « 2003 : la faute américaine », Les Collections
de L’Histoire n°69, octobre 2015.
– André Kaspi, « Guerre du Golfe : une victoire pour quoi faire ? »,
L’Histoire n°220, avril 1998.
– André Kaspi « Les Américains au Proche-Orient », L’Histoire
n° 273, février 2003.
– Pierre Milza, « La relève des impérialismes au Proche-Orient »,
L’Histoire n°38, octobre 1981.
– Hubert Védrine, « “On ne pouvait pas soutenir cette guerre” »,
L’Histoire n°308, avril 2006.
ISLAMISME, LE COUP DE TONNERRE DE 1979 – cf. p. 33
– Gilles Kepel, « Les batailles de l’islamisme », L’Histoire n°220,
avril 1998.
– Gabriel Martinez-Gros, « Religion et politique, de Mahomet
à Ben Laden », L’Histoire n°281, novembre 2003.
– Xavier Raufer, « De Bagdad à Téhéran : comment est née
la révolution islamique », L’Histoire n°131, mars 1990.
– Olivier Roy, « Les trois âges de la révolution islamiste »,
Les Collections de L’Histoire n°30, janvier 2006.
ISRAËL-PALESTINE – cf. p. 35
– Elie Barnavi, « Israël, 1948 : naissance d’un Etat »,
Les Collections de L’Histoire, n°39, avril 2008.
– Alain Dieckhoff, « Géopolitique de l’Etat palestinien », L’Histoire
n°298, mai 2005.
– Catherine Nicault, « Bataille pour Jérusalem », Les Collections
de L’Histoire n°39, avril 2008.
– Michel Winock, « Israël-Palestine », Les Collections de L’Histoire n°39, avril 2008.
LES CHRÉTIENS D’ORIENT – cf. p. 37
– Françoise Briquel-Chatonnet, « 1915-1919 : Le massacre des
chrétiens d’Orient », L’Histoire n°405, novembre 2014.
– Bernard Heyberger, « Le bon temps des Ottomans », L’Histoire
n°337, décembre 2008.
– Catherine Mayeur-Jaouen, « Dans la tourmente », L’Histoire
n°337, décembre 2008.
LES RACINES HISTORIQUES DU DJIHADISME – cf. p. 39
– Christian Décobert, « Au nom de Dieu : la conquête arabe »,
Les Collections de L’Histoire, n°4, septembre 1978.
– Gilles Kepel, « Qu’est-ce que le jihad ? », Les Collections
de L’Histoire n°30, janvier 2006.
– Gabriel Martinez-Gros, « Religion et politique, de Mahomet à
Ben Laden », L’Histoire n°281, novembre 2003.
– Gabriel Martinez-Gros, « L’Islam a inventé le droit de la guerre »,
Les Collections de L’Histoire n°38, janvier 2008.
– Françoise Micheau, « “Jihad” : l’islam relève le défi », L’Histoire
n°47, juillet 1982.
– Olivier Roy, « Enquête sur le nouveau jihad », Les Collections
de L’Histoire n°38, janvier 2008.
– John Tolan, « La guerre sainte, l’islam et la croisade »,
Les Collections de L’Histoire n°38, janvier 2008.
UN SI PROCHE-ORIENT
-
DÉBATS 25
UN SI PROCHE ORIENT
CONFÉRENCE INAUGURALE DE MAURICE SARTRE
Lundi 16 novembre – Cinéma Jean-Eustache, salle Federico Fellini – 18H30
« L’histoire en général, disons-le d’emblée, ça ne sert à rien ; mais
essayons sans, et nous verrons bien. » Maurice Sartre
En choisissant pour thème « Un si Proche-Orient », la 26e édition
du Festival International du Film d’Histoire s’inscrit plus que
jamais dans une actualité que l’on dit brûlante, épineuse,
enflammée, ardue. Comme si l’évocation d’une région du monde
induisait les mêmes sensations qu’une blessure, ou qu’un effort
non consenti. Les déplacements de populations auxquels nous
assistons ces dernières années et plus intensément encore ces
derniers mois, ont cristallisé ces sensations, les ont matérialisés,
plus particulièrement chez les citoyens européens : la blessure,
de se sentir impuissant face à une crise humanitaire, l’effort,
de devoir questionner ses convictions et ses acquis.
Le Proche-Orient, et plus largement le monde arabe, bien au-delà
de l’instrumentalisation et la surmédiatisation des évènements
qui s’y déroulent, est devenu le lieu des grands antagonismes,
des conflits, des ruptures et des révolutions. C’est sans nul doute
l’une des régions du globe qui interroge le plus, qui pousse chacun
et chacune à se positionner, pour se repositionner, à réfléchir
et à nuancer. Les questions sociales, économiques, culturelles et
politiques qui animent ces pays sont plurielles et ne peuvent plus
être réduites à une sorte d’histoire commune qui autoriserait
à faire rentrer tout un morceau de mappemonde dans le même
sac. D’autant que ces questions, à y regarder de plus près, nous
concernent tous.
En invitant Maurice Sartre à mener la conférence inaugurale de
cette 26e édition, nous faisons le choix de la lucidité, de l’érudition,
de la créativité et de la transmission. Historien du monde grec au
sens large, Maurice Sartre n’a eu de cesse d’explorer de nouveaux
horizons avec un objectif en tête : communiquer. Spécialiste de
l’Antiquité et plus spécifiquement de la Syrie, auteur de plus
d’une quinzaine d’ouvrages de référence, rédacteur en chef de
la prestigieuse revue Syria. Archéologie, Art et Histoire, professeur à
l’Université de Tours, co-fondateur des Rendez-Vous de l’Histoire
de Blois et membre du comité de rédaction de L’Histoire, l’homme
originaire de Lyon œuvre largement à la diffusion de la culture
historique. La diversité de ses activités témoigne d’un désir
profond de se tourner vers le grand public, d’éveiller le désir,
la curiosité autant que la contestation et l’incertitude.
En remontant le temps, jusqu’à l’Antiquité, et en actionnant
les leviers du passé, Maurice Sartre propose d’initier les festivaliers
à sa passion, qui comme il le dit lui-même, est née d’une image :
celle d’une Arabie de contes, fantasmée mais aussi inaccessible et
par conséquent fascinante. Depuis, il n’a eu de cesse de remettre
en question cette image, de l’analyser et d’en déchiffrer les codes...
tout en gardant en tête le rêve de se transporter sur un tapis volant.
Entre les lignes, dans les ouvrages de Maurice Sartre, c’est tout
un songe qui s’engouffre.
Clairvoyant, l’historien est un homme qui n’hésite pas à éveiller les
consciences sur les dangers d’une récupération de l’histoire notamment
dans un contexte d’hyper-nationalisme et un climat de guerre tout
en questionnant sa propre discipline, en admettant que tout
historien travaille sous influence. Selon lui, l’historien n’aboutit pas
à la vérité, mais tente de s’en approcher le plus possible… Ainsi,
le Festival s’est donné pour mission de ne pas être au service
d’une idéologie, de ne prétendre à aucune vérité mais il est de son
devoir d’être au cœur de la société, de son temps, d’ouvrir un
espace où les questions d’identité sont à envisager dans le dialogue,
au sein d’une démarche citoyenne et humaine. Nous ne pouvions
donc envisager meilleur interlocuteur que Monsieur Maurice
Sartre pour entamer cette grande conversation à plusieurs voix qui
édifie notre Festival.
L’étude du passé nous éclaire au présent, c’est une évidence, et
Maurice Sartre sera à nos côtés pour transmettre les premières clés
de compréhension de ce qui constitue l’essence du Proche-Orient,
permettant à tous d’appréhender au mieux cette belle semaine de
projections, de débats et de rencontres. En rendant hommage à
la production cinématographique de ces pays, le Festival souhaite
participer à l’ouverture de fenêtres sur le Proche-Orient et permet
à la fois de déployer de nouveaux discours, de mieux appréhender
les frontières, les distances et de comprendre ce qui se joue dans
des régions trop souvent montrées à travers le prisme déformant
du sensationnalisme et de la brutalité. « Si proche ».
Kevin Dutot
Page de gauche : (d.r.).
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 27
ÉCRITURE, AGRICULTURE, RELIGIONS…
LE PROCHE-ORIENT,
BERCEAU DES CIVILISATIONS
Vingt ans avant le Précis du système hiéroglyphique de Champollion,
l’Allemand Grotefend pose en 1803 les bases du déchiffrement des
« inscriptions persépolitaines dites cunéiformes ». Ces diaboliques
tablettes d’argile ornées de clous et de poinçons révèlent
l’importance de la Mésopotamie, jusqu’alors banlieue de la Bible
ou des guerres médiques. Une bibliothèque monstre s’ouvrait
ainsi sous nos pieds entre le Tigre et l’Euphrate, qui changea
singulièrement notre vision des choses.
S’il n’y a jamais, en histoire, de commencement avec un grand
« C », l’écriture, inventée vers l’an 3000 avant notre ère, est pourtant
un élément capital dans le destin de l’humanité : plus qu’une
technique d’enregistrement et de déchiffrement, elle constitue une
révolution de l’esprit humain. L’homme a dû « isoler » sa pensée,
en faire une sorte d’objet reproductible par des pictogrammes,
des images aide-mémoire – lui permettant désormais d’avoir sa
pensée devant lui.
Puis, avec l’alphabet « phénicien », le système graphique devient
une écriture de mots. L’homme peut non seulement conserver
la pensée, mais aussi la parole et la langue. On ne se contente plus
d’aide-mémoire : on peut informer et instruire. Une certaine
conception de la science et une certaine conception du divin se
trouvent également bouleversées.
À la différence de l’Égypte qui plonge vers l’Afrique et s’ouvre sur
la Méditerranée, la Mésopotamie, plate-forme ouverte sur deux
immensités, Orient et Occident, est soumise à tous les flux de
circulation. La région, quoique riche et fertile (c’est là, aussi, que
naît l’agriculture), ne dispose pas de matières premières : du
limon, du bitume, des roseaux – rien d’autre. Le peuple doit donc
circuler, commercer, voyager, et il supplée ses carences naturelles
par des trouvailles techniques et intellectuelles.
Parmi tous les peuples de la région, dont nous ne savons rien, mais
qui nous ont légué de nombreux noms propres, Lagash, Uruk,
Ur, etc., deux se distinguent : les Sumériens, venus peut-être par
la mer du golfe Arabo-Persique, semblent avoir coupé les ponts
avec leur patrie d’origine. Et les Sémites qui, en revanche,
s’enracinent dans un puissant arrière-monde, remontant jusqu’à
la Syrie. Plus dynamiques, plus nombreux, ils « décollent » grâce
à leur contact avec les Sumériens. Réciproquement, les Sumériens
profitent de l’extraordinaire vitalité des Sémites.
Cette civilisation dynamique, composite, va être précipitée – au
sens chimique du terme – dans un double mouvement :
l’organisation d’une mythologie et celle, complémentaire, d’un
certain esprit « scientifique », les deux se liant. On peut en suivre
l’avance au fil de l’abondante littérature qui nous est parvenue.
La très ancienne cosmogonie babylonienne a laissé de nombreuses
traces dans la Bible, de la Genèse (récit de la Création, géographie
du Paradis, Déluge) au plus tardif Livre de Job, le grand livre sur
le Mal et le sens même de la vie.
Chez Hésiode et les philosophes ioniens – substrat de la pensée de
la Grèce classique – aussi on retrouve bien des thèmes nés entre
le Tigre et l’Euphrate. Ce qui n’a rien de surprenant : la Grèce n’est
encore qu’en périphérie de cette grande puissance. Les Ioniens lui
empruntent une large part de cosmogonie, en particulier l’idée
d’une matière qui se développe constamment. Mais une différence
apparaît : alors que la mythologie sumérienne explique les choses
par le vraisemblable, la philosophie, elle, cherche le vrai.
Enfin, si l’on trouve une très riche vie politique et juridique en
Mésopotamie, elle n’a jamais, contrairement aux Grecs puis aux
Romains, enfanté de projet universel. Elle se contente, comme
la plupart des cultures de l’époque, d’être au centre de son monde,
sans se poser la question de l’humanité en général. Cette question
sera celle du monde gréco-romain, d’une part, et du monothéisme
juif, d’autre part. Mais je voudrais avoir montré comment ces deux
grands piliers de l’Occident moderne avaient de solides bases entre
les deux fleuves.
© Jean Bottéro, « Au commencement, les Sumériens », L’Histoire
n° 123, juin 1989, pp. 50-54.
Avec
Mardi 17 novembre – Cinéma Jean Eustache/Salle Fellini – 17H00
Débat animé par Maurice Sartre, historien spécialiste du Proche-Orient hellénisé, professeur émérite d’histoire ancienne à l’Université de Tours.
Les participants : Françoise Briquel-Chatonnet, historienne, directrice de recherche au CNRS, et Véronique Grandpierre, historienne
spécialiste de la Mésopotamie.
Dans le cadre de l’Université populaire d’Histoire et en écho au débat, projection à 14H15 du film Pharaon (1966) de Jerzy Kawalerowicz.
Page de gauche : décor de frise provenant du palais de Darius Ier à Suse. Il est aujourd’hui exposé au Pergamonmuseum de Berlin (d.r.).
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 29
TURCS ET ARABES,
DE L’EMPIRE OTTOMAN
À ERDOGAN
C’est au XVIe siècle que l’Empire ottoman, d’abord développé en
Anatolie centrale et orientale et dans les Balkans majoritairement
chrétiens, prend une dimension arabe.
Selim Ier mène en 1516-1517 une série de campagnes triomphales
au cours desquelles il conquiert la Syrie, la Palestine et l’Égypte, qui
constituaient l’Empire mamelouk. Après sa mort, son fils Soliman
le Magnifique soumet l’Irak, le Yémen (conquis en 1538, perdu en
1636) et une partie du Maghreb, d’Alger à Tripoli. Le monde arabe
est dès lors dans une large mesure réunifié comme au temps des
califes omeyyades (661-750) et abbassides (750-1258).
Mais avec une différence notable : les maîtres de ce nouvel empire
sont des Turcs. Et pour les Arabes, les Ottomans sont de complets
étrangers : parce qu’ils viennent de l’étranger et parce qu’ils parlent
le turc. Le sultan est vu non comme le padichah de l’islam, mais
comme le sultan de « Roum », c’est-à-dire du pays des Byzantins.
Il introduit une législation profane, le Kanoun, dont certaines
prescriptions ne figurent pas dans la charia, voire lui sont contraires,
par exemple tolérer le prêt à intérêt. D’où, dans les premières
décennies de la domination ottomane, de très sérieuses révoltes
en Égypte et en Syrie. Par la suite, l’évolution des provinces arabes
varie : pour certaines, la Syrie du Nord ou la Palestine, intégrées
au système administratif, militaire, judiciaire, on peut parler
d’« ottomanisation ». À l’inverse, l’Égypte, bien que gouvernée par
un pacha ou wali envoyé par Istanbul, garde sa propre organisation
administrative et sociale. Mais partout l’ottomanisation a ses limites,
et les régions arabes conservent leurs spécificités. Aujourd’hui
encore c’est une évidence que Le Caire et Istanbul, par exemple,
appartiennent à des mondes largement différents. L’Empire favorise
un certain brassage ethnique. Des éléments originaires d’Anatolie
ou de Roumélie, islamisés ou non, s’établissent dans les provinces
arabes. Certains deviennent gouverneurs tel le Bosniaque Ahmad
al-Djazzar en Syrie et en Palestine à la fin du XVIIIe siècle ou
Mehmet Ali, d’origine albanaise, souverain quasi-indépendant en
Égypte au début du XIXe siècle. Les sphères du pouvoir restent le
domaine réservé des « minorités » d’origine chrétienne : ce sont des
Grecs, des Slaves, des Albanais, qui, une fois islamisés, deviennent
grand vizirs ou occupent les autres grands emplois de l’État.
Pour autant, les Arabes ne sont pas des sujets de seconde zone car ils
représentent le peuple « noble » entre tous, qui a reçu la Révélation,
et leur langue est la langue sainte. Les sultans ottomans clament leur
fierté de régner sur ces pays arabes si glorieux – notamment l’Égypte
qui jouit, dans la tradition musulmane, d’une renommée
extraordinaire – et, plus que tout, les Villes saintes, La Mecque,
Médine et Jérusalem.
Avec les siècles, l’idée s’impose que le seul successeur possible des
grands califes d’autrefois est le sultan ottoman – même s’il n’est pas
arabe. D’autant que les Ottomans ont remporté de grands succès
contre les infidèles, qu’ils assurent le bon déroulement du pèlerinage,
qu’ils ornent La Mecque et Médine de monuments magnifiques,
qu’ils font des donations très généreuses aux notables et aux pauvres
des Lieux saints. Pourtant, la période ottomane a été longtemps
perçue de manière très négative, marquant un déclin de la grande
civilisation arabe. La domination turque aurait maintenu le sousdéveloppement des provinces arabes, les aurait empêchées d’évoluer
vers le progrès et la modernité. Aujourd’hui, les historiens sont plus
nuancés. D’abord, parce que, quand les Ottomans ont conquis ces
régions, la belle époque des Mille et Une Nuits n’était plus qu’un
lointain et nostalgique souvenir.
D’autre part, l’insertion dans le cadre ottoman a formidablement
stimulé les grandes cités arabes. Le commerce s’est fortement accru
par rapport à ce que le cadre national plus étroit aurait permis.
Des villes comme Le Caire ou Damas se sont développées, leur
population a augmenté, elles se sont couvertes de constructions,
de caravansérails, de marchés, de mosquées, etc. Et quand l’empire
finira par être distancé par les progrès de l’Occident, qu’il connaîtra
des revers militaires, il apparaîtra quand même, aussi affaibli
soit-il, comme le dernier espoir contre l’offensive irrésistible des
« Infidèles ».
© Gilles Veinstein, « Sous le joug des sultans ottomans », L’Histoire
n° 272, janvier 2003, pp. 56-59.
Avec
Mercredi 18 novembre – Cinéma Jean Eustache/Salle Fellini – 17H00
Débat animé par Héloïse Kolebka, rédactrice en chef adjointe à L’Histoire.
Les participants : Leyla Dakhli, historienne, chercheure au CNRS, François Georgeon, historien spécialiste de l’Empire ottoman
et de la Turquie, et Vincent Lemire, historien rattaché au Centre de recherche français de Jérusalem.
Dans le cadre de l’Université populaire d’Histoire et en écho au débat, projection à 15H30 du film Génocide arménien. Le Spectre de 1915
(2014) de Nicolas Jallot.
Projection également du film La Fin des Ottomans, jeudi 19 novembre à 16H45.
Page de gauche : miniature consacrée à la bataille de Szigetvár : ici l’avant-garde des troupes ottomanes et tatares (d.r.).
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 31
ISLAM,
LE COUP DE TONNERRE DE 1979
À la fin de son règne, Mohammad Reza Shah n’est plus qu’un
dictateur impopulaire et corrompu, qui apparaît inféodé aux
États-Unis. À l’opposition des nationalistes libéraux s’ajoute celle
d’une fraction du clergé, dirigée par l’ayatollah Khomeyni, exilé
en Irak depuis 1964.
À partir de 1978, ces clercs prennent la tête des mouvements
contestataires. Dans les défilés religieux, qui constituent une forme
d’expression populaire traditionnelle, on conspue le tyran inique,
le calife omeyyade Yazid, mort en 683, coupable d’opprimer les
compagnons de l’imam Hussein, dont le martyre a eu lieu en 680
et on célèbre l’héroïsme de l’imam qui témoigna jusqu’à la mort
de son amour de la justice. À l’été 1978, la mobilisation se renforce
et le 3 septembre, à la fin du ramadan, la tension monte avec une
grande prière en plein air, suivie d’une immense manifestation,
où l’on scande le nom de Khomeyni.
Après la proclamation de la loi martiale, le 8 septembre, et une
répression qui fait des centaines de morts, grèves et fermetures de
bazars se généralisent ; en octobre, elles gagnent l’administration,
la presse et le secteur pétrolier. Les pénuries gênent la population,
mais créent des solidarités : les mosquées deviennent des lieux
d’entraide et de distribution.
L’arrivée à Paris de l’ayatollah Khomeyni, le 6 octobre, donne
une résonance internationale à la direction religieuse du mouvement,
amplifiée par les médias et les intellectuels occidentaux, qui voient
en lui un nouveau Gandhi. Ses messages sont diffusés dans
le monde entier, habilement traduits dans des termes proches de
ceux des droits de l’homme. Le 5 novembre, la plupart des prisonniers
politiques sont libérés, mais les manifestations continuent.
Le changement de régime est inéluctable.
Pour éviter un coup d’État militaire, le 6 janvier 1979, le souverain
nomme Premier ministre un libéral laïc, Chapour Bakhtiar, et part
« en vacances » le 16. Le 1er février, Khomeyni rentre à Téhéran
par un vol spécial d’Air France et dénonce l’illégitimité du régime
impérial.
Le « retour de l’Imam », c’est, pour les Iraniens, le retour de la
justice et de la vérité, après des siècles d’oppression, de corruption
et de mensonge. La foule accueille son sauveur en état de pureté
rituelle, comme pour le retour du Douzième Imam, attendu par
les chiites, lors de la Résurrection et du Jugement dernier.
Le 1er avril, la « République islamique » naît par référendum et
la Constitution adoptée en décembre systématise l’autorité
cléricale en prenant comme clef de voûte le principe du velâyate faqih, le « gouvernorat du juriste-théologien ». Khomeyni est
le guide suprême, le vali-e faqih et, après la cléricalisation de la
République islamique et la victoire des radicaux, l’élimination
progressive des Moudjahidin du peuple puis de la gauche marxiste
achèvent la consolidation durable du régime, acquise en 1981.
Quant à l’insistance sur la morale sexuelle et les convenances
imposées aux femmes, elles permettent d’esquiver les questions
économiques, de faire passer les réquisitions de biens d’émigrés,
les nationalisations, le chômage...
Le clergé n’avait pas, en effet, de pensée politique bien définie.
Au début, il se contente de transformer des symboles en slogans.
L’ancien régime est le Tâqut, l’Antéchrist et l’Amérique,
le Grand Satan ! Le 4 novembre 1979, les « Étudiants musulmans
qui suivent la ligne de l’imam » prennent ainsi en otages
une cinquantaine de diplomates à l’ambassade des États-Unis qui
devient l’un des centres symboliques (et médiatiques) de
la révolution. Mais les dirigeants cléricaux forment une nouvelle
aristocratie, conforme à la conception chiite ancienne du rôle
du clergé comme avant-garde : de par leur formation,
les ulémas savent parler au peuple dans sa propre langue,
alors que les intellectuels occidentalisés ne parviennent pas à se
défaire des concepts ramenés de l’étranger. Surtout, en faisant des
concessions aux principes démocratiques, tel le recours au suffrage
universel, au parlementarisme et à la séparation des pouvoirs,
ils montrent un islam capable de s’adapter politiquement.
© Yann Richard, « La prise de pouvoir par l’ayatollah Khomeyni »,
Les Collections de L’Histoire n° 42, janvier 2009, pp. 74-85.
Avec
Jeudi 19 novembre – Cinéma Jean Eustache/Salle Fellini – 15H00
Débat animé par Héloïse Kolebka, rédactrice en chef adjointe à L’Histoire.
Avec Henry Laurens, historien spécialiste du monde arabo-musulman, professeur au Collège de France.
Dans le cadre de l’Université populaire d’Histoire et en écho au débat, projection à 19H20 du film Persepolis (2014) de Marjane Satrapi
et Vincent Paronnaud.
Page de gauche : L’ayatollah Khomeyni s’adresse à la foule depuis une fenêtre de l’école Alavi de Téhéran en février 1979 (d.r.).
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 33
ISRAËL-PALESTINE
C’est au XIXe siècle que se constitue une réalité palestinienne
individualisée : à partir des années 1830-1840, en effet, l’Europe
industrialisée met l’Empire ottoman sous sa tutelle et l’Europe
chrétienne redécouvre la « Terre sainte ». Le sionisme, après 1880,
s’inscrit dans cette logique européenne de redécouverte.
La Première Guerre mondiale modifie ces données. Les Britanniques
considèrent que la protection du canal de Suez, vital pour leurs
communications, nécessite le contrôle de la Palestine. Or l’accord
Sykes-Picot de 1915-1916, qui divise le Proche-Orient en zones
d’influence françaises et anglaises, entérine le principe
d’internationalisation de la Palestine. Pour le remettre en cause,
tout en se conformant au principe américain du droit des peuples à
disposer d’eux-mêmes, certains dirigeants britanniques proposent
alors d’offrir au « peuple juif » la possibilité d’établir en Palestine
un foyer national : c’est la déclaration Balfour de 1917.
À San Remo – peu après les émeutes du 4 avril 1920 qui opposent
pour la première fois de façon sanglante Arabes et Juifs à Jérusalem
–, la Société des Nations délivre aux Français et aux Britanniques
des mandats sur l’Orient arabe. C’est la fin du projet unitaire arabe
qui faisait de la Palestine la « Syrie du Sud ». Le 24 juillet 1922,
la SDN ratifie la Charte du mandat qui prévoit en Palestine
l’édification d’une vie nationale juive ; celle-ci ne doit faire aucun
tort aux habitants arabes. Si l’immigration reste faible, ces années
voient le mouvement sioniste se doter de son cadre institutionnel et
d’une organisation qui seront au fondement de sa puissance.
À partir de l’été 1928, la tension resurgit. Juifs et Arabes formulent
leur idéologie nationale en recourant aux symboles religieux.
Le mur des Lamentations, inclus dans le sanctuaire musulman du
Haram al-Sharif, site de l’ancien temple de Jérusalem, troisième
Lieu saint de l’islam, devient l’enjeu d’une lutte passionnelle.
Les progrès du nazisme en Allemagne relancent l’émigration juive
et l’envoi de capitaux. D’où un cycle vertueux où l’arrivée massive
d’hommes et de capitaux permet une croissance économique
rapide. Les Arabes s’inquiètent. Ils comprennent que la progression
juive est indissociable de la tutelle britannique et s’en prennent pour
la première fois à la puissance mandataire. La proposition, en juillet
1937, de partager la Palestine grâce au « transfert » de la population
arabe hors de la zone juive, contre compensations financières,
tactiquement acceptée par les sionistes, est rejetée par les Arabes.
Les Anglais engagent une épreuve de force mais sont submergés par
l’insurrection arabe d’octobre 1937 qui s’étend à l’ensemble
de la Palestine, la plus importante révolte anticoloniale de l’Empire
dans l’entre-deux-guerres. De plus, ces affaires mobilisent trop de
forces militaires, alors qu’on craint une nouvelle guerre mondiale.
La Grande Bretagne doit se concilier les Arabes pour avoir les mains
libres en Europe. Le livre blanc de mai 1939 annonce donc
une limitation drastique de l’immigration juive et des transferts
fonciers. C’est au nom d’une politique de fermeté face au nazisme
que les adversaires les plus résolus de l’Allemagne interdiront
paradoxalement aux Juifs de chercher refuge en Palestine ou en
Amérique.
En 1945, la Grande-Bretagne exsangue hésite une fois de plus.
Le territoire du mandat est le pivot de tout son système militaire et
politique au Proche-Orient. Or la nouvelle série de conférences et
de commissions d’enquête lancée en 1946-1947 montre l’absence de
solution satisfaisante pour toutes les parties. D’autant que
l’indépendance de l’Inde rend l’engagement britannique en Palestine
encore plus dérisoire. En février 1947, Londres renvoie le dossier
devant l’ONU. L’Assemblée générale vote un plan de partage,
le 29 novembre 1947. Dès lors, c’est hors d’une Palestine en feu que
les Britanniques se retirent méthodiquement afin qu’il n’y ait plus
un officiel britannique au 15 mai 1948... La veille, Israël a proclamé
son indépendance et la guerre avec les pays arabes a débuté.
Le mandat britannique constitue un échec flagrant. Il se solde par
l’effondrement de tout le dispositif britannique au Proche-Orient et
met en place les données du conflit israélo-arabe. En inscrivant
dans la Charte du mandat de 1920 l’instauration d’un foyer national
juif et le respect des droits de la population arabe, elle a mené
une politique fondamentalement contradictoire. Contradiction que
la tragédie de la Seconde Guerre mondiale a rendue insurmontable.
© Henry Laurens, « La faillite du mandat anglais », Les Collections
de L’Histoire n° 39, avril 2008, pp. 40-47.
Avec
Vendredi 20 novembre – Cinéma Jean Eustache/Salle Fellini – 18H00
Débat animé par Valérie Hannin, directrice de la rédaction de L’Histoire.
Les participants : Elie Barnavi, historien, essayiste, ex-ambassadeur d’Israël en France, Youssef Courbage, directeur de recherche en
démographie, Charles Enderlin, ex-correspondant de France 2 en Israël, Jean-Pierre Filiu, professeur des universités en histoire du MoyenOrient, et Henry Laurens, historien spécialiste du monde arabo-musulman.
Dans le cadre de l’Université populaire d’Histoire et en écho au débat, projection à 15H20 du film Le Dernier jour de Yitzhak Rabin d’Amos
Gitaï et à 19H45 du film The Gatekeepers (2014) de Dror Moreh.
Page de gauche : un colon israélien face à un manifestant palestinien (d.r.).
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 35
LES CHRÉTIENS D’ORIENT
Au sens le plus large, on appelle « chrétiens d’Orient » les chrétiens
non latins, avant tout les orthodoxes d’Europe de l’Est et du Sud-Est
qui, en 1054, refusèrent l’autorité du pape. Mais, dans le langage
courant, l’expression désigne les chrétiens du Proche-Orient et
d’Égypte – dont la terre d’origine correspond aux actuels pays
arabes –, les Arméniens, dont beaucoup vivent depuis longtemps au
Levant, ceux d’Iran, de Turquie et d’Éthiopie.
L’évangélisation de la côte phénicienne est mentionnée par les Actes
des Apôtres qui relatent également la fondation, quelques années
après la mort du Christ, d’une communauté chrétienne à Antioche,
alors capitale de la Syrie romaine. C’est là qu’apparaît le nom de
« chrétiens ». Et c’est à Édesse (actuelle Urfa en Turquie) que s’est
constitué le cœur de la chrétienté de langue araméenne avec,
dès le IIe siècle, la version de la Bible qui a irrigué la vie religieuse et
liturgique de tout l’Orient. Rien n’a arrêté vers l’orient le mouvement
de christianisation jusqu’aux confins du monde connu à l’époque.
Le long du golfe Arabo-Persique, de Koweït jusqu’en Oman en
passant par Bahreïn, des restes d’églises ou de monastères datés du
Ve au VIIe siècle signalent cette progression.
Au IIIe siècle, l’Église était organisée en trois patriarcats : Alexandrie
pour l’Égypte, Rome pour l’Occident, Antioche pour l’Orient.
En 395, lorsqu’elle est devenue la capitale de l’Empire romain
d’Orient, Constantinople est aussi devenue le patriarcat pour l’Asie
Mineure et la Grèce. Jérusalem, quant à elle, en raison de son rôle
historique et symbolique, était considérée comme un patriarcat,
dont l’autorité était limitée à la Palestine.
Mais, très tôt, les chrétiens de Mésopotamie se sont trouvés dans
une situation délicate. D’abord à cause des conflits incessants entre
l’Empire romain puis byzantin et les empires parthe puis sassanide.
Puis lorsque Théodose, en 391-392, imposant le christianisme
comme religion officielle dans l’Empire romain, se posa en protecteur
de tous les chrétiens. De ce fait, ceux de l’Empire sassanide pouvaient
être considérés comme une sorte de « cinquième colonne ».
C’est dans ce contexte, et pour des raisons essentiellement politiques,
qu’est née l’Église apostolique de l’Orient, ainsi qu’elle se dénomme
elle-même, mais que l’on appelle souvent improprement
« nestorienne ». Elle s’est développée comme une Église autocéphale
ne dépendant ni de Rome ni des patriarcats. On ne peut donc parler
de « séparation », et surtout pas sur des bases théologiques,
Avec
mais de l’affirmation théorique d’une indépendance ecclésiale qui
existait dans la réalité, du fait des circonstances géopolitiques.
Ce qui distingue les chrétiens d’Orient des chrétiens de rite latin,
c’est avant tout certaines pratiques liturgiques (déroulement un peu
différent de la messe, moindre rôle des images que dans le monde
grec) et la langue, selon les régions le syriaque, c’est-à-dire l’araméen
diffusé d’Édesse par les missionnaires, le copte en Égypte, l’arménien
classique.
Ils ont aussi inventé le monachisme. À l’exemple d’Antoine (né en
251 et qui se retire du monde à 18 ans), des chrétiens forment des
communautés d’anachorètes vivant dans le désert ou se regroupent
pour une véritable vie en commun, le cénobitisme. En Syrie,
le monachisme existe dès le IVe siècle, avec parfois des formes
extrêmes : les stylites, perchés sur une colonne dont ils ne descendaient
jamais, tel Syméon vers 390-459, les reclus murés dans une tour où
une petite ouverture permettait de les ravitailler frugalement...
La conquête musulmane n’a guère modifié, au moins dans les
premiers temps, la situation. Longtemps, et peut-être jusqu’à la fin
du Moyen Âge, les chrétiens sont restés majoritaires dans la région.
Moyennant quelques conditions, ils étaient libres de pratiquer leur
foi, plus que sous le pouvoir byzantin. Ainsi se mit en place un
système qui allait durer jusqu’à la fin de l’Empire ottoman.
Les chrétiens avaient un statut inférieur dans la société et subirent
même parfois de réelles persécutions. Mais, à d’autres périodes,
on en vit acquérir une position d’influence auprès du pouvoir,
notamment comme médecins officiels de la Cour. Peu à peu,
cependant, la pression, notamment fiscale, se fit plus forte et
le pouvoir sut utiliser habilement les divisions entre eux.
Les conversions à l’islam se firent du coup plus nombreuses.
© Françoise Briquel-Chatonnet, L’Histoire n° 337, décembre 2008,
pp. 42-51.
et
Samedi 21 novembre – Cinéma Jean Eustache/Café Beyrouth 3ème étage – 14H00
Débat animé par Valérie Hannin, directrice de la rédaction de L’Histoire.
Les participants : Françoise Briquel-Chatonnet, historienne, directrice de recherche au CNRS, et Bernard Heyberger, historien,
spécialiste des chrétiens d’Orient.
Page de gauche : 7 déccembre 2014, un groupe de femmes et d’hommes récitent le chapelet dans la cathédrale Saint-Joseph d’Erbil. Ankawa (Ainkawa),
banlieue assyrienne d’Erbil, Région autonome du Kurdistan, Irak (d.r.).
UN SI PROCHE-ORIENT
-
DÉBATS 37
LES RACINES HISTORIQUES DU
DJIHADISME
Le terme djihad vient de la racine arabe jhd qui désigne l’effort. Dans
son sens originel, le « grand djihad », tel que le définit le Prophète,
tel qu’il est codifié dans le droit musulman ou que les grands
mystiques soufis l’ont pratiqué, est avant tout une soumission de
l’âme à Dieu, un effort sur soi pour devenir le meilleur musulman
possible. Par extension, cet effort vise à tout mettre en œuvre pour
favoriser la propagation de l’islam à travers le monde, au besoin
par les armes : c’est la guerre sainte.
Certains théologiens ont considéré le djihad comme le sixième pilier
de l’islam doté, par ailleurs, de la particularité de relativiser certaines
règles de dogme ou de rite. Le président Bourguiba, qui avait fait de
la croissance économique un djihad, a ainsi cherché à convaincre
les Tunisiens que la stricte observation du ramadan entraînait
une baisse de la production. Aussi apparut-il, à la télévision, en train
de boire, en pleine journée, un verre de limonade.
Seul un uléma, un théologien versé dans l’exégèse des textes sacrés à
la compétence reconnue par ses pairs peut, en principe, proclamer
le djihad. Mais il n’est pas toujours simple d’user de ce privilège.
Quand lancer le djihad contre un mauvais gouvernement ?
Les ulémas égyptiens s’y étaient refusés contre Anouar el-Sadate qui,
en 1979, avait signé la paix avec Israël. Ils furent alors débordés par
les militants radicaux de l’Organisation du djihad, qui finirent par
assassiner le chef de l’État. Farag, leur idéologue, avait accusé les
docteurs de la Loi islamique d’avoir trahi leur devoir le plus sacré,
celui de prononcer le djihad contre le président « impie ».
Il considérait donc qu’il lui revenait, avec son modeste brevet
d’électricien, de reprendre le flambeau abandonné par les gardiens
du dogme.
Mais, parce qu’il bouleverse les règles de l’organisation sociale, on ne
sait pas quand et où s’arrête le djihad. L’islam n’ayant pas d’appareil
hiérarchique, un djihad lancé par une autorité religieuse peut être
contredit par une autre. A priori, le djihad défensif, prononcé
lorsque l’islam est menacé de l’extérieur, paraît susceptible d’être
suivi sans réserve. Mais pendant la Première Guerre mondiale,
le sultan-calife ottoman, allié aux Puissances centrales, l’avait
proclamé contre la France et l’Angleterre en misant sur un soulèvement
des musulmans colonisés par ces deux États. Il n’en fut rien,
les spahis et les tirailleurs ne bronchèrent pas dans les tranchées.
C’est d’ailleurs en « remerciement » de cette loyauté que fut édifiée en
1926 la mosquée de Paris.
Aujourd’hui, le djihad a été réactivé par les différents courants
radicaux de l’Algérie à l’Afghanistan. Dans tous les cas, il mobilise
les énergies et met tous les moyens au service d’une même fin,
qu’il s’agisse du renversement du pouvoir « apostat » d’Alger ou du
Caire, de l’éradication de la présence « sioniste » en Palestine ou
de l’élimination du régime « athée » à Kaboul lors de l’occupation
soviétique.
Mais, depuis les années 1980, un bouleversement s’est produit : grâce
à la modernisation des moyens de communication – télévision par
satellite, Internet –, le djihad est proclamé par des individus qui sont
de moins en moins des ulémas. Tout est parti d’Afghanistan, où s’est
formée, à la faveur du combat contre l’invasion soviétique, une légion
djihadiste internationale, sans emploi après le départ de l’Armée
rouge en 1989 et qui a donné naissance au mouvement
ben-ladeniste. Après les guérillas-djihad des années 1990, qui ont
essayé, en vain, d’imiter le modèle afghan pour faire tomber les
régimes en place en Égypte, Algérie, Bosnie, Tchétchénie, le djihad
s’est retourné vers l’ennemi lointain, dans la perspective de mobiliser
les masses par des opérations spectaculaires, et ce sont les attentats du
11 septembre 2001.
Or, dans la doctrine islamique, la notion de djihad, positive, va de
pair avec son antonyme négatif, la fitna, la guerre qui brise l’islam de
l’intérieur, ce que les masses musulmanes pourraient reprocher aux
radicaux : la population irakienne fut ainsi la première victime
des attentats. Et si Bagdad fut occupée par des soldats impies,
la catastrophe a été rendue possible par les terroristes du 11 septembre.
© Gilles Kepel « Qu’est-ce que le djihad ? », Les Collections de
L’Histoire n° 30, janvier 2006, pp. 22-23.
Avec
Samedi 21 novembre – Cinéma Jean Eustache/Salle Fellini – 16H00
Débat animé par Valérie Hannin, directrice de la rédaction de L’Histoire, et Thomas Verclytte, président de l’APHG d’Aquitaine.
Les participants : Jean-Pierre Filiu, professeur des universités en histoire du Moyen-Orient, et Gabriel Martinez-Gros, professeur d’histoire
médiéval du monde musulman à l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense.
Dans le cadre de l’Université populaire d’Histoire et en écho au débat, projection à 14H00 du film Maintenant, ils peuvent venir de Salem
Brahimi et à 18H00 du film Daech, naissance d’un état terroriste (2014) de Jérôme Fritel et Stéphane Villeneuve.
Page de gauche : combattant de Daech participant à une parade militaire au nord de la province de Raqqa (Syrie), le 30 juin 2014 (d.r.).
UN SI PROCHE-ORIENT
-
DÉBATS 39
QU’EST-CE QUE LES
AMÉRICAINS
SONT ALLÉS FAIRE AU PROCHE-ORIENT ?
Le 12 mars 1947, le président Truman annonce au Congrès son
désir d’aider la Grèce et la Turquie à hauteur de 400 millions
de dollars. En effet, le 21 février 1947, les Britanniques,
traditionnellement influents en Méditerranée orientale, ont fait
savoir à Washington qu’ils ne détenaient plus la force suffisante
pour aider les Grecs et les Turcs.
Truman n’a aucune raison de faire la sourde oreille. Si l’Union
soviétique devenait la puissance tutélaire de la Grèce et de
la Turquie, elle pourrait établir, puis conforter son influence sur
le Proche et le Moyen-Orient. Peut-être même tenterait-elle
de réaliser le rêve des tsars, c’est-à-dire l’accès aux mers chaudes,
à l’océan Indien. Les Soviétiques mettraient alors la main sur
les ressources en pétrole de la région. L’Europe occidentale
tomberait sous leur coupe. L’Afrique subirait un sort identique.
La décision de Truman repose sur deux motivations. D’abord,
la guerre qui vient de prendre fin a montré que le pétrole est
une arme déterminante. En 1945, les États-Unis extraient
les deux tiers du pétrole mondial. Mais de nouvelles sources
produisent à plus bas coût. De 1938 à 1947, l’Arabie Saoudite
accroît sa production quotidienne de 1400 à 246 000 barils.
Le Koweït et les autres émirats, l’Irak et l’Iran suivent.
Les sociétés américaines, la Standard Oil ou Socony, exploitent
moins les réserves américaines et beaucoup plus les réserves
du Moyen-Orient.
Ensuite, il ne faut pas sous-estimer l’impact de la guerre froide.
Dans cette perspective, le Proche-Orient est devenu un théâtre
d’opérations.
C’est dans ce contexte que le 14 mai 1948 naît l’État d’Israël
immédiatement reconnu par les États-Unis malgré les réticences
de conseillers tels George Marshall, le secrétaire d’État,
qui auraient préféré, pour ne pas heurter leurs alliés arabes,
donner aux Nations unies le mandat d’administrer la Palestine.
Truman tranche, conscient de la Shoah et de la quasi-inaction
des États-Unis de 1941 à 1944, mais aussi parce que l’Union
soviétique milite alors pour la création d’un État d’Israël
qui pourrait devenir une démocratie populaire.
Au Proche-Orient, les Américains ne manquent pas de rivaux,
voire d’ennemis. Les Britanniques conservent leur influence sur
la Jordanie, l’Irak, l’Égypte, l’océan Indien.
Les Français perdent leurs positions au Liban et en Syrie, mais
deviennent, dans les années 1950, les principaux alliés d’Israël
et, du fait de la guerre d’Algérie, les adversaires du nationalisme
arabe. À l’inverse, l’Union soviétique cesse son appui à Israël
et soutient les partis communistes dans les États arabes et
les mouvements nationalistes anti-occidentaux. Mais désormais,
les américains sont particulièrement présents.
Ils rétablissent le shah d’Iran en 1953, rassemblent en 1955 leurs
partisans – Royaume-Uni, Irak, Iran, Turquie, Pakistan – dans
le pacte de Bagdad, exigent de leurs alliés français et britanniques
qu’ils mettent un terme à l’expédition de Suez en 1956,
soutiennent le roi Hussein de Jordanie, puis Camille Chamoun,
le président libanais, en 1958.
Le fond de leur pensée n’a pas changé. Les nationalismes mettent
en danger l’accès au pétrole et favorisent la pénétration soviétique.
L’impérialisme européen déclenche des réactions nationalistes.
Les États-Unis sont persuadés de leur mission : ils ouvrent la voie
vers la modernité, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes,
le progrès économique et social.
Les décennies suivantes, émaillées de succès (accords de Camp
David en 1978) et de revers (la révolution iranienne de 1979),
de négociations et d’interventions militaires ont vu les États-Unis
de plus en plus présents dans la région. De plus, après les attentats
du 11 septembre 2001, la guerre au terrorisme devient la priorité.
En 2003, la guerre en Irak, la chute de Saddam Hussein et
l’occupation américaine provoquent un chaos dans la région
dont les répercussions se font encore sentir aujourd’hui.
Mais plus ils montrent leur puissance, plus les États-Unis sont
contraints de prendre appui sur des alliés de porcelaine. Reste
une certitude : ils ont autant besoin du Moyen-Orient que
le Moyen-Orient d’eux. Décidément, de 1945 à nos jours,
l’« Orient » n’a rien perdu de sa complexité.
© André Kaspi « Les Américains au Proche-Orient », L’Histoire
n° 273, février 2003, pp. 68-73.
Avec
Dimanche 22 novembre – Cinéma Jean Eustache/Charles Chaplin – 11H15
Débat animé par Valérie Hannin, directrice de la rédaction de L’Histoire, et Éric Bonhomme, professeur d’histoire, membre de l’APHG.
Les participants : Antoine Coppolani, professeur d’histoire contemporaine à l’université Paul-Valéry Montpellier III, Philip Golub, professeur
de relations internationales à l’Université américaine de Paris, et André Kaspi, historien spécialiste des États-Unis.
Page de gauche : Gaza, 2013, un Palestinien piétine un drapeau américain pour protester contre la visite de Barack Obama (d.r.).
UN SI PROCHE-ORIENT
-
DÉBATS 41
QUELLE
POLITIQUE INTERNATIONALE DE
LA FRANCE AU PROCHE-ORIENT ?
Un article de Benjamin Barthe intitulé « Israël-Palestine :
le renoncement diplomatique français » (Le Monde du 23 juillet) a
retenu mon attention, tellement il me semble représentatif d’une
certaine nostalgie française pour une « politique arabe »
de la France censée avoir été un gage d’indépendance à l’égard des
États-Unis et, partant, d’efficacité diplomatique. J’ai entendu ce
discours cent fois dans la bouche de diplomates, de politiciens
et de journalistes français. Il a été usé jusqu’à la corde au moment
où Nicolas Sarkozy a annoncé, en novembre 2007, le retour de
la France au sein du commandement intégré de l’OTAN, mais
refait surface à chaque crise internationale, quel que soit le président
américain ou français. Voyez, se lamente l’auteur, Laurent Fabius
s’est rendu au Proche-Orient les 18 et 19 juillet, et « les deux
protagonistes de la guerre de Gaza » l’ont superbement ignoré.
Comment pourrait-il en être autrement ? Non seulement
les « affinités personnelles » de François Hollande le rangent-elles
du côté des Israéliens, mais, tout en restant fidèle aux principes
directeurs de Paris sur le conflit, toute la politique étrangère
française est marquée par une « forme de résignation » qui
l’empêche de contribuer à les traduire dans les faits. C’était
différent « avant ». Sans même remonter à De Gaulle,
Valéry Giscard d’Estaing et la déclaration européenne de Venise
de 1980, proclamant pour la première fois le droit des Palestiniens
à l’autodétermination, le discours de François Mitterrand à
la Knesset appelant à la création d’un Etat palestinien en 1982,
le sauvetage, la même année, de Yasser Arafat à Beyrouth, et
jusqu’à Jacques Chirac, dont il convient de louer « le coup de sang
à Jérusalem, en 1996, contre les troupes d’occupation israéliennes »
comme « son refus de boycotter Yasser Arafat pendant la deuxième
Intifada » — voilà autant de gestes forts qui auraient fait la preuve
de l’« autonomie » de la politique étrangère française. Tout cela
est parti à vau-l’eau sous Sarkozy, puis sous Hollande, tous deux
prisonniers de leur tropisme israélien et, surtout, de s’être alignés
sans barguigner sur les positions de Washington. Ah ! J’oubliais,
le « changement de ton » est dû aussi à la regrettable disparition
des « diplomates arabisants » du Quai d’Orsay, partis exercer leurs
talents dans diverses ambassades. Qui reste-t-il ? Des blancs-becs
inexpérimentés qui n’entendent rien aux subtilités du Levant.
Je passe rapidement sur les initiatives que, selon Benjamin
Barthe, une diplomatie française autonome et audacieuse pourrait
entreprendre afin de « redonner de la voix à la France au ProcheOrient » : soutenir l’accession de la Palestine à la Cour pénale
internationale (CPI), ce qui ferait pendre une épée de Damoclès
salutaire sur la coalition au pouvoir à Jérusalem – une affaire à
double tranchant, soit dit en passant, puisque prendre délibérément
pour cible des populations civiles, comme le fait le Hamas, est
un crime de guerre, reconnu comme tel par le droit international
et les grandes ONG, Amnesty International et Human Rights
Watch en tête. Ou encore, « entamer un dialogue sous conditions »
avec le Hamas – mais on voit mal quelles pourraient être ces
conditions, outre celles qui font consensus depuis des lustres :
reconnaissance d’Israël, renonciation à la violence, admission des
traités internationaux passés.
Tout cela relève du vœu pieux. Benjamin Barthe garde la nostalgie
de la « politique arabe » de la France de naguère. La vérité est que
cette politique arabe a toujours été une illusion, entretenue par
la « rue arabe » du Quai d’Orsay et des gesticulations politiques
comme celles de Jacques Chirac, mais dont l’influence sur le cours
de la paix et de la guerre au Proche-Orient a toujours été nulle.
La France seule ne peut rien ; c’était déjà vrai au temps du général
de Gaulle, où les Arabes cherchaient des armes et de la consolation à Paris, mais allaient à Moscou, puis, de plus en plus souvent,
à Washington pour y faire de la politique. C’est encore plus vrai
aujourd’hui que le « monde arabe » n’existe plus, s’il a jamais
existé autrement que dans la propagande de la Ligue arabe et
le cerveau romantique des « diplomates arabisants » du Quai.
La vérité est que ce sont les Américains qui ont les cartes en main,
mais que malheureusement ils ne veulent ou ne peuvent s’en
servir. La vérité est que l’Europe unie pourrait jouer un rôle
déterminant si elle parvenait à exister autrement que comme
tiroir-caisse et mur de Lamentations. Si la France est coupable de
quelque chose, c’est de n’avoir pas su créer avec ses partenaires
cette entité puissante, seule capable de provoquer à Jérusalem
autre chose qu’un haussement d’épaules à peine poli. Étonnezvous après cela que Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères
de la France, se soit rendu dans la région et que personne ne s’en
soit aperçu.
© Elie Barnavi, 28 juillet 2014.
Avec
Dimanche 22 novembre – Cinéma Jean Eustache/Salle Fellini – 14H30
Avec Elie Barnavi, historien, essayiste, ex-ambassadeur d’Israël en France et Jean-Paul Chagnollaud, professeur émérite des universités,
directeur de l’Institut de Recherche et d’études Méditerranée Moyen-Orient.
Animé par Jérôme Gautheret, journaliste au Monde, chef adjoint du service international. Autres intervenants en attente.
Page de gauche : Le président israélien Shimon Peres et le Premier ministre Benjamin Netanyahu accueillent le président français François Hollande à l’aéroport Ben Gurion de Tel
Aviv, le 17 novembre 2013. La première prise de parole de François Hollande, lors de ce voyage essentiellement consacré au nucléaire iranien, exprimera le refus par la France de toute
prolifération nucléaire. (d.r.).
UN SI PROCHE-ORIENT
-
DÉBATS 43
LUNDI 16 NOVEMBRE
CAFÉ HISTORIQUE
dans les pas d’alexandre,
les grecs en orient
lundi 16 novembre – cinéma jean eustache, café berlin 3ème étage – 16h30
Par Laurent Capdetrey, maître de
conférences à l’Université
Bordeaux Montaigne.
La bataille d’Alexandre, mosaïque,
IIe siècle av. J.-C., Naples, Museo
Archelogico Nazionale.
Dans le dernier tiers du IVe siècle, la conquête de l’Empire perse par Alexandre ouvrit l’essentiel des
mondes proche-orientaux à des populations venues du monde égéen. La multiplication des implantations permit ainsi la mise en place de véritables diasporas grecques et macédoniennes sur des territoires très étendus, de la Syrie à l’Asie Centrale et du golfe Persique à l’Anatolie. Si cet effort aboutit
à la mise en place d’une sorte d’archipel hellénisé, jamais il ne fut question de faire de ces régions des
pays majoritairement grecs et, de fait, les populations d’origine égéenne y furent toujours extrêmement
minoritaires. Il reste que ce processus de colonisation retient d’abord l’attention de l’historien par ce
qu’il révèle de la capacité d’Alexandre et de ses successeurs à créer de nouveaux types d’espaces urbains
et à redéfinir les équilibres régionaux, notamment en Syrie et au cœur de l’Asie. L’invention de villes
nouvelles, conçues comme des actes de pouvoir, marquait ainsi avec une emphase spectaculaire l’appropriation de ces nouveaux territoires. Il faut bien sûr s’interroger aussi sur la nature des rapports établis
entre les Grecs d’Asie et les populations locales dont les structures d’encadrement politique et religieux
(en Phénicie, en Babylonie, en Iran, etc.) étaient aussi puissantes qu’anciennes. On a depuis longtemps
renoncé à toute idée de diffusion naturelle d’un hellénisme conçu comme culturellement supérieur.
Les recherches les plus récentes soulignent au contraire la complexité de ces rapports politiques et culturels,
faits de violence, à coup sûr, mais aussi de formes complexes de collaboration et de transferts culturels
(linguistiques, religieux, juridiques). Mais la capacité de cette diaspora à afficher durablement une identité
grecque – masquant des situations souvent plus complexes – conduit à s’interroger sur les ressorts et la
plasticité de cette identité dans ces contextes régionaux si différents et si éloignés du monde égéen.
MARDI 17 NOVEMBRE
CAFÉ HISTORIQUE
BONAPARTE À LA CONQUÊTE DE L’ÉGYPTE
mardi 17 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 10h15
Par Robert Solé, écrivain et
journaliste.
Napoléon et ses généraux en
Égypte, peinture de Jean-Léon
Gérôme, 1863.
44 DÉBATS
-
UN SI PROCHE-ORIENT
En juillet 1798, à la tête de 50 000 hommes, Napoléon Bonaparte, le général le plus glorieux de la République, part à la conquête du pays des pharaons. Il faut empêcher les Anglais de s’en emparer et leur couper
la route des Indes. Une Égypte assoupie depuis des siècles voit débarquer une armée suréquipée, sans
bien comprendre ses objectifs. Et, à Constantinople, le sultan est furieux de cette invasion de l’une de ses
provinces. C’est le premier choc de l’époque moderne entre l’Occident et l’Orient musulman. Mais Bonaparte ne vient pas avec l’esprit des Croisades : il se déclare ami des musulmans, et même admirateur de
leur religion. Nouvel Alexandre, il entend donner un certain statut à son expédition : plus de cent soixante
« savants et artistes » de toutes disciplines — ingénieurs, astronomes, chimistes,
naturalistes, dessinateurs ou imprimeurs – l’accompagnent. Parmi eux, quelques
grandes figures, comme Monge, Berthollet, Vivant Denon ou Dolomieu, et de
jeunes inconnus, comme Geoffroy Saint-Hilaire, qui se feront un nom dans la
vallée du Nil. Un Institut d’Égypte est créé au Caire, sur le modèle de l’Institut
national. Une petite cité scientifique se met en place, dans un décor somptueux.
Grâce au travail minutieux de ces « savants et artistes », le pays des pharaons
sera révélé au reste du monde. La publication de la monumentale Description
de l’Égypte donnera toute sa dimension à cette aventure scientifique sans égale.
Sur le plan militaire, en revanche, après plusieurs victoires, les Français perdront
leur flotte à Aboukir et finiront par devoir évacuer la vallée du Nil. Bonaparte,
lui, a fait son expérience de chef d’État en Égypte. Il est maintenant en mesure de
prendre le pouvoir à Paris. – Robert Solé
MARDI 17 NOVEMBRE
CAFÉ HISTORIQUE
zénobie,
de palmyre à rome
mardi 17 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 11h30
L’imaginaire occidental a placé Zénobie parmi les rares femmes de pouvoir qu’a engendré l’Antiquité, avec
Didon, Sémiramis ou Cléopâtre. Au fil du temps, elle fut d’abord la « forte femme », vertueuse et ambitieuse,
avant de devenir une héroïne sortie du désert, reine d’un royaume de fiction, initiatrice d’une révolte qui aurait
dû délivrer la Syrie de la présence romaine. Entre les fantasmes d’un Occident succombant aux charmes de
l’Orient et les exigences du nationalisme contemporain, Zénobie peine à trouver sa place. Longtemps prisonniers d’une source quasi unique et de fiabilité largement douteuse, l’Histoire Auguste, poètes, romanciers,
auteurs de tragédies ou de livrets d’opéra, pour ne rien dire des historiens, n’ont pas tardé à s’en affranchir pour
laisser libre cours à leur imagination. Pourtant, il existe une Zénobie de l’histoire, documentée par
des sources plus nombreuses qu’on ne le croit, et que l’on peut essayer de cerner par un examen
minutieux de l’ensemble de la documentation, littéraire mais aussi épigraphique, archéologique
et numismatique. Certes, bien des aspects essentiels nous échappent, mais quelques certitudes
émergent. Issue d’une grande famille hellénisée de Palmyre, épouse d’un homme, Odainath,
qui - fait rare chez les Syriens - parvint au rang de sénateur de Rome, elle doit son titre de reine
au seul fait que son époux se proclama « roi des rois » après avoir vaincu à la guerre le roi des
rois perse Shapur Ier. S’évanouit donc définitivement le titre de « reine de Palmyre » dont
l’affuble presque tous les auteurs, puisque Palmyre, ville de l’Empire romain et décorée même
du titre de colonie romaine (qui l’assimile au sol de l’Italie), n’a jamais été un royaume ni avant
Zénobie, ni pendant sa courte aventure. Veuve après l’assassinat (inexpliqué) d’Odainath, elle
pousse alors sur le devant de la scène son jeune fils, Wahballath, et tente de le faire associer
au pouvoir impérial, comme cela s’est si souvent pratiqué au IIIe siècle. Malgré de brillantes
réussites militaires (elle contrôle toutes les provinces syriennes et l’Égypte), Zénobie ne parvient
pas à faire admettre ce partage du pouvoir par le nouvel homme fort de l’Occident, Aurélien.
La rupture devient inévitable ! Si la trame d’ensemble ne pose guère problème désormais, les
incertitudes restent nombreuses, ce qui devrait nourrir la discussion lors du café historique que
l’on consacrera à Zénobie. – Annie Sartre-Fauriat et Maurice Sartre
Par Maurice Sartre et Annie
Sartre-Fauriat, professeurs émérites
d’histoire ancienne.
Hebert Schmalz, La Reine Zénobie.
Dernier regard sur Palmyre (1890).
UNIVERSITÉ POPULAIRE DU CINÉMA
histoire du cinéma iranien
mardi 17 novembre – cinéma jean eustache, salle Fellini – 15h00
Le cinéma iranien, surtout depuis la révolution de 1979, s’inspire de
la vie quotidienne et de la poésie persane, afin d’encourager l’amitié
et la solidarité entre les gens. Cela concerne le cinéma d’auteur qui
représente environ 20% de la production annuelle d’une centaine
de films. Ce cinéma connu sur la scène internationale est l’un des
trois courants du cinéma iranien. Les deux autres comprennent
d’une part des films religieux, relevant de la propagande, et d’autre
part des films grand public : comédies, mélodrames et films sociaux, interprétés par les stars iraniennes.
Par Mamad Haghighat, réalisateur
et historien du cinéma.
Photo : Où est la maison de mon
ami ? d’Abbas Kiarostami.
ENTRETIEN avec LE MASTER PRO DOCUMENTAIRE UNIVERSITÉ MONTAIGNE - BORDEAUX
bernard george, un documentariste
face à l’histoire
mardi 17 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3 étage – 14h00
ème
Entretien avec Bernard George par des étudiants du master pro en public. Voir page 18 : notice biographique. Voir page 155 : présentation du film La Vengeance des Arméniens. le Procès Tehlirian.
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 45
MARDI 17 NOVEMBRE
CAFÉ HISTORIQUE
JÉRUSALEM AUJOURD’HUI
mardi 17 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 15h30
Par Vincent Lemire, historien au
Centre de recherche français de
Jérusalem.
Comment parler de « Jérusalem aujourd’hui » alors que cette sainte ville est tout sauf une « ville d’aujourd’hui » ?
Pour l’historien que je suis, ce n’est d’ailleurs même pas une « ville d’hier » : comment en effet (co)produire l’histoire d’une ville écrasée de mémoires millénaires, fourbue d’identités bricolées, comprimée sous la pression des
projections religieuses et des projets politiques, broyée par les discours et les stratégies, démembrée par les revendications et les appropriations ? Jérusalem échappe toujours à l’observateur et à elle-même. Berceau partagé des
trois récits monothéistes, Jérusalem est observée par le monde entier comme le laboratoire du vivre-ensemble
ou de la guerre civile, de la citadinité ou de la haine de l’autre. Depuis quelques années, au gré des combats et des
affrontements qui traversent périodiquement la ville, Jérusalem est devenu le théâtre privilégié sur lequel se projettent les dangereux fantasmes des malfaisants forgerons du choc des civilisations. Jérusalem s’épuise elle-même
à conserver le passé le plus ancien et à augurer l’avenir le plus lointain, elle et ses habitants sont pris
en tension dans un arc chronologique presque infini, de la Genèse à l’Apocalypse, des origines à
la fin des temps, du paradis originel au jugement dernier : tout est là, compacté, réuni sur quelques
kilomètres carrés de pierres et de ravins, entre la source originelle du Gihon et le sommet du
Mont des Oliviers. Dans cet hallucinant court-circuit historique, le présent disparaît, la ville
contemporaine peine à exister, l’essence précède toujours l’existence. Pour essayer d’évoquer
malgré tout la Jérusalem d’aujourd’hui, il faut donc patiemment situer la ville, décrire sa topographie, raconter son histoire, localiser ses quartiers, dénombrer ses habitants, décrypter les récits qui
l’enserrent, en prenant garde d’éviter les innombrables chausse-trapes des pièges identitaires. –
Vincent Lemire
GRAND ENTRETIEN avec LA SEMAINE DE LA SOLIDARITÉ INTERNATIONALE
LE RAPPROCHEMENT JUDÉO-ARABE PAR LE PÈRE
SHOUFANI
mardi 17 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 20h30
Pour l’édition 2015, le Collectif répond au thème « d’un si Proche Orient » tout en illustrant l’un des droits à
l’essentiel, celui de « Vivre dignement dans son pays », en ayant l’honneur d’accueillir le Père Emile Shoufani, Curé
de Nazareth. Prophète infatigable de la paix auprès des jeunes générations notamment, impliqué au quotidien
pour un rapprochement pacifique judéo-arabe, nous le sollicitons en qualité de Grand Témoin de notre Temps
sur ces questions et sur les actions qu’il mène en ce sens. Palestinien à part entière, mais israélien de nationalité,
chrétien dans une société arabe en majorité musulmane, il croit aux vertus de la démocratie et de la non-violence
et œuvre pour une intégration véritable de la jeunesse arabe dans un État juif. Homme de paix, il incarne la complexité de cette terre, où les guerres israélo-palestiniennes ont emporté une partie de sa famille En 2003, il a reçu
le prix Unesco de l’éducation pour la paix, pour son action en faveur du rapprochement des populations arabes
et juives. Il venait alors d’organiser le voyage « Mémoire pour la Paix », un voyage à Auschwitz rassemblant des
Juifs, des chrétiens et des musulmans, auxquels il dira : « Ce détour par les abîmes les plus sombres de la mémoire
de l’humanité ne peut que nous renvoyer chacun à nos responsabilités du présent, et à notre vocation d’êtres humains
en marche vers un Vivre ensemble. » Qui pourrait croire qu’à Nazareth, dans cette ville de Galilée essentiellement
peuplée d’Arabes israéliens, l’expérience d’un humble curé palestinien puisse ressusciter l’espoir malgré toutes
les haines prétendument héréditaires ? Par ce temps qu’il nous consacre, nous aurons le privilège d’accueillir ses
réponses en direct et de dialoguer avec lui.
ENTRETIEN-DÉGUSTATION avec LE MONDE et LES VIGNOBLES MICHEL GONET
CHAHDORTT DJAVANN
mardi 17 novembre – cinéma jean eustache, café berlin 3ème étage – 18h45
Animée par Thomas Wieder,
rédacteur en chef du Monde.
46 DÉBATS
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UN SI PROCHE-ORIENT
Chahdortt Djavann est romancière et essayiste. Portrait en page 18.
MERCREDI 18 NOVEMBRE
CAFÉ POÉTIQUE
syrie. miroir d’une guerre cachée
mercredi 18 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 10h15
Omar Youssef Souleimane est né en 1987 à Quoteifé, sur les plateaux du Kalamoune à une quarantaine de
kilomètres au nord de Damas. Après avoir obtenu un baccalauréat scientifique en 2005, il étudie la littérature
arabe à l’université de Homs. Entre 2006 et 2010, il a été correspondant de la presse syrienne, et a collaboré
avec de nombreux journaux arabes. Il est l’auteur de livres de poésie (Chansons de saison en 2006, Je ferme
les yeux et j’y vais, prix koweitien Saad Al Sabbah en 2010). Ayant participé aux manifestations pacifiques
dès mars 2011 à Damas puis à Homs, il a été recherché par les services de renseignements syriens. Afin
d’éviter la prison, il est entré dans la clandestinité et est parvenu à quitter son pays. La France, où il vit depuis
2012, lui a accordé l’asile politique en 2012. Il a publié Il ne faut pas qu’ils meurent en 2013 aux éditions Al
Ghaoune – Liban, La mort ne séduit pas les ivrognes en 2014, bilingue, français/arabe, aux éditions L’oreille
du loup – Paris. Un film a été réalisé sur son poème Je ne suis plus personne.
Avec Omar Youssef Souleimane,
poète.
« […] Quand je grandirai, je serai une étoile
Ainsi parle la trace de la balle laissée dans la chair
Il ne vous servira à rien d’ouvrir mes brouillons
et de veiller tard en compagnie des nuages
jusqu’à mon retour
Qu’un seul exilé appelle ses frères
et le soir se blesse »
Extrait du poème Dès que le soir se blesse.
CAFÉ HISTORIQUE avec L’APHG
la révolution des femmes
mercredi 18 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 11h30
La femme musulmane/arabe/orientale fut longuement désignée comme une entité au singulier, du fantasme précolonial nourri par les imaginaires européens à l’instrumentalisation de la question du voile, elle
se retrouve aujourd’hui au centre de toutes les attentions et de toutes les peurs. L’étude des mouvements
féministes en Méditerranée qui se sont déployés tout au long du XXe siècle permet aujourd’hui de redonner un pluriel aux engagements féminins dans les pays arabes et d’envisager les luttes pour l’émancipation
comme un entrelacs complexe et moins binaire qu’un simple antagonisme entre soumission et libération.
La « question féminine » possède une histoire et s’élabore par le moyen d’un jeu de miroirs, à travers des
productions de discours savants, militants et artistiques qui
jalonnent le siècle passé. Ainsi, la révolution des femmes est
avant tout une reconnaissance des conditions féminines
dans leur pluralité. Les oppositions entre mondes colonisés
et colonisateurs, entre musulmans et chrétiens, entre Orientaux et Occidentaux ont fabriqué une « question féminine »
simplifiée, rapidement prise en défaut dès qu’on s’approche
un peu plus près de l’objet. Il n’y a jamais eu de voie unique
pour les combats féministes, partout ailleurs comme dans
le monde arabe : en somme, les questions débattues par
les femmes musulmanes ne sont pas données d’évidence,
spécifiques à une condition singulière de la femme en ces
régions. En revisitant les grands mouvements féminins et
féministes du XXe siècle, en questionnant le corps et la difficulté de faire preuve de courage dans une société patriarcale,
c’est toute une histoire des femmes arabes qui se dessine. Et
par la reconnaissance de cette histoire, un meilleur éclairage
sur le désir de liberté des femmes, sur leurs droits, sur la
violence qu’elles subissent, mais aussi celle dont elles veulent
se saisir. – Leyla Dakhli
Par Leyla Dakhli, historienne,
chercheure au CNRS.
Conférence animée par Mounira
Chatti, maître de conférences.
Photographie de l’artiste Shirin
Neshat.
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 47
MERCREDI 18 NOVEMBRE
CONFÉRENCE avec L’IJBA
CHARLES ENDERLIN, GRAND
REPORTER EN ISRAËL-PALESTINE
mercredi 18 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 14h00
Rencontre animée par Sonia
Hamdi et Garo Kevorkian de
l’IJBA.
Après des études de médecine rapidement interrompues, Charles Enderlin quitte la France en 1968 pour
rejoindre un kibboutz en Israël et observer les évolutions d’un pays en voie de développement. Trois ans plus tard,
il rejoint la rédaction de la radio israélienne et devient correspondant pour RMC en 1973. C’est en 1981 qu’il
commence à travailler pour Antenne 2 en tant que pigiste avant d’acquérir le titre de grand reporter en 1988 et
d’être titularisé en 1990 pour devenir le correspondant permanent de la chaîne publique à Jérusalem. En aout
2015, le journaliste prend sa retraite et quitte le bureau de Jérusalem. Durant 34 ans, Charles Enderlin aura couvert
une région du monde sensible, surveillée, traquée par la presse internationale et où les moindres variations sont
épiées par tous les grands dirigeants du monde. De la première intifada en 1987 à la situation d’occupation des
terres palestiniennes que nous connaissons aujourd’hui, Israël et la Palestine, terres morcelées, ont été le théâtre
de violents conflits, de pressions et de soulèvements qui ont interpellé l’opinion publique. Son rôle de journaliste,
Charles Enderlin l’a tenu avec une rigueur exemplaire et une objectivité toujours plus complexe à maintenir.
Reporter de l’entre deux mondes, pour qui la « schizophrénie » devient une nécessité et la neutralisation des
sentiments personnels, essentielle, Charles Enderlin a assisté à deux intifadas, aux bombardements israéliens
comme aux attentats palestiniens… Son travail : essayer de voir au-delà de l’horreur du quotidien, tout en la
couvrant. C’est ainsi que pour développer son argumentaire et s’extirper du journalisme de l’instant, Charles
Enderlin s’est attelé à la rédaction de plusieurs ouvrages et à la réalisation de documentaires, dont le film Au nom
du temple, sélectionné et projeté dans le cadre du Panorama Documentaires du Festival. À travers le prisme de
l’information, il s’agit aussi de comprendre les relations qu’entretiennent les Français avec Israël et la Palestine :
qu’est-ce qui intéresse les médias ? Que demandait-on, concrètement, à un grand reporter travaillant pour le
service public sur un sujet aussi sensible ? Sur le Festival, il viendra notamment à la rencontre des étudiants de
l’IJBA pour partager son expérience et revenir sur ce qui constitue l’essence de son métier.
CAFÉ HISTORIQUE
LES INTERVENTIONS DE LA FRANCE AU MONT-LIBAN
(1860-1861 ET 1916-1919)
mercredi 18 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 15h30
Par Yann Bouyrat, historien.
1860. Troupes envoyées par
Napoléon III pour restaurer la paix
entre deux communautés, les Druzes
et les chrétiens maronites.
48 DÉBATS
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UN SI PROCHE-ORIENT
Les relations entre la France et les populations du Mont-Liban sont anciennes. Commencées sous les rois Bourbons, elles se sont considérablement renforcées au cours des siècles suivants. Plusieurs facteurs l’expliquent :
la position éminente obtenue, grâce aux Capitulations, par la France dans l’Empire ottoman ; l’action de ses
consuls en faveur des minorités chrétiennes ; l’essor des échanges commerciaux, notamment du négoce de la
soie ; l’implantation, surtout, des missions catholiques au Liban, missions dont les membres, souvent français,
n’ont pas peu contribué à diffuser largement la langue de Molière parmi les Libanais. Deux événements ont
cependant, plus que tout autre, contribué à rapprocher les populations des deux rives de la Méditerranée :
la décision, prise par Napoléon III, d’intervenir au Liban à la suite des massacres confessionnels de juin 1860 ;
l’action menée pendant la Grande Guerre par la France au Liban pour secourir les populations, frappées par
une terrible famine. Ces deux opérations n’ont, en apparence, pas grand-chose à voir. Distantes de plus d’un
demi-siècle, elles se sont d’abord produites dans des contextes bien différents : l’expédition napoléonienne,
acceptée et soutenue (non sans arrière-pensées !) par le concert européen, s’est effectuée en temps de paix,
avec l’accord de l’Empire ottoman. L’aide apportée en 1916-1919 intervient dans une période de guerre dans
un État hostile. Les buts de ces deux interventions divergent tout autant : dans un cas, il s’agissait de mettre
un terme à des massacres confessionnels, dans l’autre, d’éviter la mort lente des populations par la faim. Elles
n’en présentent pas moins aussi de troublantes similitudes. Ce sont avant tout deux opérations humanitaires.
Ce caractère transparaît nettement à plusieurs niveaux : la mobilisation de l’opinion publique, l’implication des
dirigeants, l’action concrète, surtout, non seulement de l’armée française, mais aussi d’autres acteurs de terrain,
comme les ordres missionnaires en faveur des victimes. Cette générosité se double cependant, dans les deux cas,
d’une visée stratégique claire : la consolidation de la présence française non seulement au Liban, mais aussi
dans la Syrie voisine. L’action de la France en 1860-1861 et en 1916-1919 apparaît ainsi intéressante à double
titre : elle montre d’abord l’épaisseur acquise par ses relations avec les chrétiens du Liban. Elle confirme surtout
que, même lors des actions humanitaires en apparence les plus spontanées, l’intérêt national n’est jamais loin.
MERCREDI 18 NOVEMBRE
UNIPOP CINÉMA
LES CINÉASTES FACE À L’HISTOIRE
DE LA SYRIE
mercredi 18 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 20h30
Hala Mohammad est une poétesse et réalisatrice de films documentaires syrienne. Elle trouve l’exil à Paris en 2011.
Ses films brisent le tabou de la prison en Syrie. Elle a également créé le ciné-club syrien en 2014 pour la promotion d’échanges culturels entre la Syrie et l’Europe. Elle est l’auteur de Voyage dans la mémoire (voir p-113).
Ossama Mohammed est un réalisateur et scénariste syrien. Après avoir étudié le cinéma à Moscou, il signe son
premier film, Étoiles du jour (voir p-112), découvert en 1988 en France à la Quinzaine des réalisateurs. En 2002,
son second film, Sacrifices, est présenté à Cannes dans la sélection Un certain regard. En exil forcé et réfugié en
France depuis 2011, il suit la révolution, puis la répression qui ensanglante son pays, signant le film Eau Argentée
(voir p-114), coréalisé à distance avec Wiam Simav Bedirxan.
Yuri Maldavsky s’est spécialisé dans la couverture des conflits à travers le monde. Après avoir été journaliste et
cameraman pour Arte, Canal+ et France 2, son premier documentaire La Section White (voir p-81) est une
immersion aux côtés des forces américaines à Bagdad. En 2010, Ultime avant-poste partage le quotidien des
soldats afghans dans leur lutte contre les Talibans. Il a également réalisé Mexique pays au bord de l’overdose
(2011) et Syrie, enfants en guerre (2014, voir p-115).
Par Yuri Maldavsky, réalisateur,
Hala Mohammad, poétesse,
réalisatrice et Ossama Mohammed,
réalisateur.
Rencontre animée par
Philippe Sainteny, journaliste,
documentariste.
Syrie, enfants en guerre de Yuri Maldavsky.
Voyage dans la mémoire de Hala Mohammad.
ENTRETIEN-DÉGUSTATION avec LE MONDE et LES VIGNOBLES MICHEL GONET
DANIÈLE KRIEGEL POUR SON LIVRE
la moustache de staline
mercredi 18 novembre – cinéma jean eustache, café berlin 3ème étage – 18h45
« En plus de trente ans de vie d’Israélienne, je n’ai pas rencontré Dieu. Je n’ai pas non plus désiré le Messie.
Je suis restée effrayée par le désert et je n’ai jamais pu m’habituer à la guerre. Quant aux idéologies, je n’en ai
partagé aucune. La moustache de Staline m’avait suffi, même quand elle s’est transformée en habits de Mao
pour les uns, ou en apologie de nos patriarches et de leur descendance pour les autres. » C’est sur ce ton, et
à ce rythme, que Danièle Kriegel, aujourd’hui journaliste, mène son récit dans son livre La Moustache
de Staline, édité au Seuil. Fille de la célèbre Annie Kriegel, elle raconte son enfance, « ma mère et moi, on
s’est raté », une jeunesse en décalage, la découverte d’un pays, Israël, dont elle refuse certains codes tout
en l’aimant éperdument, et sur lequel elle exerce son regard acéré de commentateur politique.
Avec Danièle Kriegel, journaliste
et écrivain (La Moustache de
Staline).
Entretien animé par Thomas
Wieder, rédacteur en chef
du Monde.
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 49
JEUDI 19 NOVEMBRE
CAFÉ HISTORIQUE
MOÏSE
mercredi 19 novembre – chapiteau festival – 10h15
Par Jean-Christophe Attias,
chercheur et universitaire,
spécialiste de la pensée juive.
Photo : Moïse brise les tables de
la loi. Dessin de Gustave Doré,
gravure sur bois, 1866.
Moïse est de ces figures bibliques majeures qui ont transcendé les frontières religieuses. Il y a un Moïse
chrétien et un Moïse musulman. Il y a même un Moïse des laïcs, des athées, des révolutionnaires, qui
ont pu voir en lui un modèle d’émancipateur. Il y a aussi le Moïse des créateurs, des sculpteurs, des
peintres, des romanciers et des musiciens. Et il y a enfin, bien sûr, celui du cinéma, de Cecil B. DeMille
à Ridley Scott... Aux yeux de ses panégyristes anciens, médiévaux et modernes, Moïse cumule à peu
près tous les talents : ceux du prophète, bien sûr, mais aussi ceux du roi, du philosophe, du législateur,
du grand prêtre, voire du général ! Au point que l’on peut presque affirmer que de Moïse à peu près
tout a été dit. Tout et le contraire de tout. Dans le judaïsme, significativement, sa place est à la fois
centrale et marginale. La tradition juive post-biblique
en a maintes fois redessiné la silhouette, tantôt précisant, tantôt brouillant l’idée que nous pourrions en
avoir. Le retour à ces sources – scripturaires ou rabbiniques –, s’il ne permet assurément pas de retrouver
un improbable Moïse « historique », nous oblige à
une salutaire conversion du regard. Incarnation par
excellence du Juif de l’Exil, mais n’ayant jamais cessé
de rêver d’une Terre qu’il ne foulera pas, tiraillé entre
les colères de son Dieu et les infidélités de son peuple,
transmetteur d’une Loi divine qui, en dernier recours,
lui échappe, Moïse se révèle au travers de ce prisme-là
d’abord comme un maître. Et comme un maître de
liberté. Nous dominant de sa haute stature, et pourtant proche de nous, fragile comme nous, humain,
donc, avant tout, Moïse alors nous parle vraiment.
À nous, aujourd’hui, qui que nous soyons et d’où
que nous venions.
ENTRETIEN avec SUD OUEST et L’IJBA
PREMIÈRE GUERRE DU GOLFE :
LE TÉMOIGNAGE D’YVES HARTÉ
jeudi 19 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 11h30
Avec Yves Harté, rédacteur en chef
de Sud Ouest, Prix Albert Londres.
Conférence animée par Antoine
Janon, étudiant à l’IJBA.
50 DÉBATS
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UN SI PROCHE-ORIENT
Au mois d’août 1990 les troupes Irakiennes de Saddam Hussein envahirent sans coup férir le Koweït,
petit voisin au sous-sol et aux fonds maritime riches en pétrole au prétexte que ce dernier ne respectait
pas les fluctuantes frontières des champs pétrolifères. Saddam Hussein comptait sur la passivité de
la communauté internationale voire de sa secrète compréhension pour gages de sa guerre épuisante
menée pendant cinq longues années contre l’Iran qui faisait alors figure de démon et d’ennemi de
l’Occident. Saddam Hussein se trompait. Cette violation du droit international ne pouvait être tolérée par les Nations Unies. C’est ainsi que débuta
la « première guerre du Golfe ». De ce mois d’août 1990, au mois d’avril
de l’année qui suivit, Sud Ouest m’envoya couvrir ce conflit, en Irak, en
Jordanie, en Syrie, à Bagdad la veille et les premiers jours des frappes
américaines moment où nous avons été expulsés puis au Kurdistan jusqu’à
Kirkouk jusqu’à la fuite des civils et la retraite des peshmergas de Massoud
Barzani dans les montagnes après la contre-attaque des troupes de Saddam
Hussein « tolérée » par Bush père et Mitterrand. C’est cette période
cruciale et qui explique en creux la situation dans laquelle nous nous
trouvons aujourd’hui que je me propose de raconter sous l’angle du
témoignage et à la lumière de ce que nous avons pu apprendre ensuite.
– Yves Harté
JEUDI 19 NOVEMBRE
CAFÉ HISTORIQUE
JÉRUSALEM, CŒUR DU MONDE
jeudi 20 novembre – chapiteau festival – 14h00
Prise et reprise, conquise et détruite, depuis sa lointaine fondation, Jérusalem est une ville où sans cesse,
avec foi et ardeur, avec une obstination têtue, malgré risques et obstacles, Jérusalem donc, est une ville
où l’on va. Elle a su défier Assyriens et Égyptiens, Grecs et Romains, cœur du monde juif au temps du
royaume de David, symbole de la douleur de l’exil, elle est devenue le centre religieux du monde chrétien, avant qu’à son tour la foi musulmane s’en réclame. Pourtant, malgré les vicissitudes de l’Histoire,
pèlerins et voyageurs, solitaires ou en groupe, vont se lancer tout au long des siècles, dans des périples
dangereux, insensés, sur des chemins périlleux. Mais poussés par une foi inébranlable. C’est à tous ces
voyageurs, anonymes ou connus, obscurs ou célèbres que cette conférence est dédiée. – Claude Aziza
Par Claude Aziza, professeur
honoraire à la Sorbonne Nouvelle.
Jerusalem, dans le film éponyme
de Daniel Ferguson projeté en juin
2014 à La Géode. Une plongée
au cœur de « la plus fascinante et
symbolique des cités »
GRAND ORAL, avec SCIENCES PO et SUD OUEST
MÉMONA HINTERMANN
jeudi 19 novembre – cinéma jean eustache, salle fellini – 17h00
Dans leur premier ouvrage écrit à quatre mains, Mémona Hintermann et Lutz Krusche, (« Quand nous
étions innocents », JC Lattes, 2009), Mémona rapporte qu’en feuilletant les cahiers de notes de son mari,
grand reporter comme elle, une phrase d’un théologien allemand du XVIIIe siècle, F.C. Oetinger, retient
son attention : « Dieu, donne-moi la sérénité d’accepter les choses que je ne peux pas changer, le courage de
changer les choses que je peux changer et la sagesse de faire la différence ». Née dans une famille très modeste
résidente au Tampon à la Réunion, d’un père indien musulman, Cassim Ismaël Afféjee et d’une mère
créole d’origine bretonne, Mémona Hintermann qui n’a jamais fait mystère de sa foi catholique profonde,
encore aujourd’hui, grandit au milieu de dix frères et sœurs. Lauréate d’un prix de l’ORTF en 1971, elle
entame une carrière de grand reporter qui va la conduire dans le monde entier, sur les terrains de guerre
mais aussi à la rencontre de tous les visages de l’humanité, des plus pauvres aux plus puissants. Sa route
croise celle du dictateur libyen Khadafi. Elle dénoncera lors de la réception officielle de ce dernier en
France, en 2007, la tentative de viol sur sa personne. Mémona Hintermann, membre du Conseil supérieur
de l’audiovisuel (CSA) depuis janvier 2013, est non seulement une grande dame du journalisme, c’est
aussi une témoin passionnée des soubresauts des 40 dernières années du monde.
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 51
JEUDI 19 NOVEMBRE
CAFÉ HISTORIQUE en avant-programme des AOC DE L’ÉGALITÉ
les déplacements des populations
suite à la crise syrienne
suivi du film les chebabs de yarmouk
jeudi 19 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 20h30
Par Pierre Blanc, enseignant
chercheur, Geneviève Jacques,
présidente de la Cimade,
Adham Mawed, réfugié du camp
de Yarmouk, René Otayek,
politologue, directeur de recherche
au CNRS, Axel Salvatori-Sinz,
réalisateur.
Rencontre animée par Christophe
Dabitch, journaliste.
L’actualité politique du Moyen-Orient véhiculée par les médias français et la présence d’un nombre important de personnes issues de cette région en France ne nous laissent pas indifférents et nous incitent à
lancer le débat. Les crises se multiplient chaque jour. La misère qui gagne les populations les poussent à
se déplacer ailleurs ; vers un monde plus paisible et sûr. Dans ce contexte, les pistes, permettant au public
de saisir les évènements, sont brouillées.
Cette « table ronde – projection » a pour but d’offrir des clés de compréhension de la situation du MoyenOrient actuel et du déplacement de ses populations en France. L’intention de ce projet est guidée par l’envie
de ses organisateurs de permettre au grand public d’y avoir accès. La thématique du premier rendez-vous
culturel est « un si Proche-Orient ». Celle du deuxième est « La fraternité : Comment faire fraternité/
humanité ensemble ? Que souhaitons-nous transmettre aux générations futures ? » Une fusion entre
ces deux manifestations nous semble cohérente : le Moyen-Orient s’invite à l’affiche du Festival du Film
d’Histoire et la « Fraternité » rayonne dans les AOC de l’égalité. Alors, peut-on, en France, parler de
fraternité sans saisir la réalité amère qui bouleverse l’autre côté de la rive et ses populations ?
Les Chebabs de Yarmouk
de Axel Salvatori-Sinz .
ENTRETIEN-DÉGUSTATION avec LE MONDE et LES VIGNOBLES MICHEL GONET
DARIUSH MEHRJUI, réalisateur
jeudi 19 novembre – cinéma jean eustache, café berlin 3ème étage – 18h45
Avec Dariush Mehrjui, réalisateur.
Entretien animé par Jérôme
Gautheret, journaliste au Monde.
52 DÉBATS
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UN SI PROCHE-ORIENT
Diplômé en philosophie de UCLA en 1964, Dariush Mehrjui réalise son premier film, Diamant 33 en
1966. Son film suivant, La Vache, avec Ezzatollah Entezami dans le rôle principal, est une œuvre majeure
de sa filmographie et de l’histoire du cinéma iranien.
Il est considéré comme un créateur exigeant et l’un des grands intellectuels du cinéma iranien contemporain. La plupart de ses films s’inspirent du théâtre et de la littérature, reprenant souvent le canevas d’un
roman ou d’une pièce du domaine persan ou étranger. Sara, récompensé par la Coquille d’or au Festival de
Saint-Sébastien, se conçoit par exemple comme une relecture d’Une maison de poupée d’Henrik Ibsen.
VENDREDI 20 NOVEMBRE
CONFÉRENCE
les petits-déjeuners de
france culture
vendredi 20 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 10h15
Anaïs Kien reçoit un(e) réalisateur (trice) de documentaires invité(e) du Festival pour une rencontre
consacrée à son dernier film.
CONFÉRENCE
famille, amour et sexualité :
que dit le cinéma de la société iranienne ?
vendredi 20 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 11h15
Avec Asal Bagheri, spécialiste du
cinéma iranien.
Une séparation de Asghar Farhadi.
Le cinéma iranien est un exemple parfait des limites floues entre le privé et le public et son évolution illustre
celle de la société. La relation ambiguë qu’entretenait le public avec le cinéma avant la révolution montre bien
le malaise et la culpabilité des Iraniens qui, d’un côté voulaient suivre le clergé et, de l’autre, leur goût pour
le divertissement. C’est ainsi que dans les années 70 les films les plus appréciés étaient ceux qui contenaient
le plus de scènes dénudées et sexuelles. Mais ce sont ces mêmes scènes qui ont été critiquées et boycottées
à la veille de la révolution. La République islamique au lendemain de sa victoire a fait de la culture et particulièrement du cinéma son cheval de bataille, d’une part pour mettre en valeur une culture « islamisée »
à l’intérieur et à l’extérieur du pays et, d’autre part, pour « purifier » un cinéma qu’elle jugeait décadent et
occidental. À l’instar de la poésie iranienne classique, le cinéma a alors décidé de s’emparer des figures de
style pour parler pudiquement de l’amour. Il a aussi emprunté au théâtre l’art d’insister sur les mouvements :
ces jeux de regards et ses musiques accompagnateurs qui durent assez longtemps en sont l’exemple parfait.
Enfin, en construisant son espace comme l’architecture iranienne traditionnelle entre l’externe (espace réservé
aux invités et aux étrangers à la famille) et l’interne (espace privé) le cinéma iranien a créé sa propre iranité
concernant les relations homme/femme. Et à travers cette relation complexe à l’écran c’est un portrait de la
famille, de l’amour et de la sexualité en Iran que le cinéma iranien nous propose…
CONFÉRENCE avec SCIENCES PO
qu’est-ce que le sionisme ?
vendredi 20 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3 étage – 11h30
ème
Avec Elie Barnavi, historien,
essayiste, ex-ambassadeur d’Israël
en France.
54 DÉBATS
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UN SI PROCHE-ORIENT
Dans son acception la plus large, le sionisme, apparu en Europe dans le dernier quart du XIXe siècle, est la
doctrine qui vise à doter le peuple juif d’un État-nation. À ce titre, il emprunte l’essentiel de ses traits de
caractère aux mouvements nationaux des autres peuples qui aspirent à l’autodétermination au sein des
deux empires multinationaux, la Russie et l’Empire austro-hongrois. À ce titre, encore, il présente toute
la gamme des idéologies socio-politiques de l’époque, depuis la gauche marxiste ou libertaire jusqu’à
l’extrême-droite nationaliste en passant par le libéralisme de toute nuance. Cependant, le sionisme a aussi
des traits propres, qu’il doit à l’histoire spécifique des communautés juives en diaspora. Mentionnons-en
trois, essentiels. Nationalisme par défaut, élaboré en réaction à l’antisémitisme pogromiste sévissant dans
la Russie des tsars, il vise à réaliser son projet non pas sur place, à l’instar des autres peuples opprimés,
mais ailleurs, sur une terre lointaine où il trouve ses racines nationales et spirituelles. Mouvement émancipateur qui tourne délibérément le dos à la religion et à la tradition rabbinique, il n’en est pas moins
tributaire d’une très longue histoire, où religion et nation sont inextricablement entremêlées. Enfin, le
sionisme a trouvé sa réalisation tardive après l’annihilation des masses juives d’Europe orientale pour
lesquelles il a été créé, et au moment précis où le nationalisme saisissait les peuples au milieu desquels il
implantait son État-nation. Ces trois traits spécifiques du nationalisme juif ont largement déterminé son
devenir. Abouti dans des conditions très différentes de celles auxquelles songeaient ses pères fondateurs
et épuisé par son succès même, leur sionisme séculier et socialisant s’est rétréci comme une peau de
chagrin au profit d’un néo-sionisme d’essence messianique qui prétend lui emboîter le pas, mais qu’il
métamorphose en son contraire. – Elie Barnavi
VENDREDI 20 NOVEMBRE
CAFÉ HISTORIQUE avec L’APHG
le pétrole a-t-il fait le malheur
du
proche-orient ?
vendredi 20 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3 étage – 14h00
ème
Depuis 1939, comme le montrent Les Aventures de Tintin, le monde arabe est assimilé « au pays de l’or noir ». Par
séquences successives, l’exploitation du pétrole s’est étendue de l’Irak aux émirats du Golfe, puis à l’Arabie saoudite
et enfin à l’Afrique du Nord. L’influence économique ne s’en est fait sentir qu’à partir de la fin des années 1950
avec le développement de l’industrie automobile. L’économie de la rente pétrolière s’est généralisée dans les
années 1970, définissant les structures économiques, sociales et politiques. L’existence d’une manne pétrolière a
rendu les États du Moyen-Orient et leurs voisins, dépendants des fluctuations du marché, et ne les a que peu incités
à la diversification de leurs activités, à l’innovation et à l’entreprenariat. Souvent mal répartie entre les citoyens, elle
a creusé les tensions et les inégalités sociales. La rente est accaparée par les gouvernements, renforçant le poids de
l’État, mais affaiblissant les institutions publiques, nourrissant ainsi la convoitise, la corruption et le laxisme au sein
des administrations. Ces effets négatifs ont entraîné des
mouvements politiques et sociaux déstabilisateurs. Néanmoins, elle présente de très fortes variantes locales qui limitent les trop grandes généralisations. On peut ainsi opposer
la faiblesse des économies productives comme celles de la
Libye et de l’Algérie à l’aventure triomphante de certains
pays du Golfe qui sont en train de prendre une place
majeure dans certains secteurs de l’économie mondiale
comme le transport aérien.
Par Henry Laurens, historien
spécialiste du monde arabomusulman, professeur au Collège
de France.
Conférence animée par Stéphanie
Beucher, professeur de géographie.
Photo : 2013. Autour d’un puits de
pétrole en Syrie. À cette date, plus
de 17 milliards de dollars de pertes
avaient été enregistrés depuis
le début du conflit
CAFÉ HISTORIQUE
le génocide arménien :
histoire
et mémoire
vendredi 20 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3
ème
étage – 15h30
À l’occasion de son centenaire, le génocide arménien de 1915 a fait l’objet de commémorations remarquées aussi
bien pour la longévité d’une souffrance toujours à vif et son écho dans des déclarations internationales que pour
la fin de non-recevoir réitérée par le gouvernement turc. L’abondance des travaux historiques a permis de faire
le point sur ses conditions de possibilité et ses résultats. La recherche d’une nouvelle formule de pouvoir par les
élites modernisées de l’Empire ottoman, dans un contexte de pertes de territoires, les a amenées à un nationalisme
ethnique, qui faisait des Arméniens un peuple gênant là où il était. Le passage à l’acte de la destruction totale est
le fruit d’une radicalisation politique, d’un retournement contre les Arméniens après la fraternisation de 1908,
et la révolte traditionaliste de 1909 que les Jeunes-Turcs ont interprétée comme une demande populaire de rupture
avec leurs alliés chrétiens. Les Arméniens n’étaient plus en état de se défendre après les saignées des massacres de
la fin du XIXe siècle, des islamisations et émigrations, et dans le huis clos de la guerre qui éloignait les puissances.
Le résultat : le cycle, balkanique, des révoltes à l’indépendance en passant par répression et intervention extérieure,
n’a pas joué pour les Arméniens. Car, si « l’Empire ottoman a perdu la guerre, les Turcs l’ont gagnée » (Annette
Becker). Envisagée comme indépendante par le traité de Sèvres, l’Arménie occidentale disparaît avec le traité
de Lausanne. Un des plus vieux peuples d’Orient disparaît, en un an, de la plus
grande partie des terres où il avait survécu entre deux empires depuis vingt siècles.
Cette survie, sans souveraineté politique, s’était appuyée sur le choix religieux
opéré il y a douze siècles, de se reconnaître dans une Église indépendante. Après
1920 il ne demeure plus qu’une petite Arménie au-delà du rideau de fer. Pas de
souveraineté chrétienne au Moyen-Orient, et en Anatolie un face-à-face de plus
en plus conflictuel entre Turcs et Kurdes. L’histoire qui suit est celle d’un retour
de la mémoire. D’abord de l’extérieur, des pays de la diaspora des réfugiés, puis,
malgré la résistance officielle en Turquie, au sein d’une fraction croissante de
sa société. La lumière jetée par l’entreprise nazie a à la fois encouragé ce réveil
et suscité des débats. Mais aujourd’hui les questions les plus vives concernent
les regards turcs sur la disparition des Arméniens et les formes possibles de leur
réapparition et d’une réconciliation.
Par Michel Marian, maître de
conférences de philosophie
politique à Sciences-Po Paris.
Conférence animée par Christophe
Lucet, journaliste à Sud Ouest.
Photo extraite des Mémoires de
l’Ambassadeur Morgenthau,
considéré par beaucoup comme
l’une des premières sources
d’information sur le génocide
arméniens
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 55
VENDREDI 20 NOVEMBRE
CAFÉ HISTORIQUE avec LES AMIS DU MONDE DIPLOMATIQUE
LE PROCHE-ORIENT : POUDRIÈRE DU MONDE ?
vendredi 20 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 20h45
Avec Akram Belkaïd, journaliste
et essayiste, spécialiste du monde
arabe.
Animé par Christophe Lucet,
journaliste à Sud Ouest.
Vers un conflit généralisé ? Guerre civile en Syrie, dislocation de l’État en Irak, retour de la guerre entre
Turquie et PKK dans le sud-est de l’Anatolie, intervention militaire de l’Arabie saoudite et de ses alliés au
Yémen, expansion de l’Organisation de l’État islamique (OEI), exode ininterrompu de réfugiés syriens
et irakiens vers les pays voisins et l’Europe, panne du processus de paix israélo-palestinien, aggravation
du cycle terrorisme-répression en Égypte le tout sur fond de rivalité sourde entre les pays du Golfe et
l’Iran : jamais, depuis l’invasion du Koweït par les troupes de Saddam Hussein, le Moyen-Orient n’a
paru aussi instable, aussi éloigné de la paix. Dans un contexte d’alliances régionales et internationales en
perpétuelle recomposition, mais aussi d’aggravation de l’antagonisme entre mondes sunnite et chiite,
les pays occidentaux semblent incapables de définir une stratégie cohérente à moyen terme. Le retour
de la Russie dans le grand jeu proche-oriental, l’incapacité de la coalition à contenir l’OEI et à forcer le
président Assad au départ sont autant d’éléments qui compliquent la sortie de crise. La diplomatie a-t-elle
une chance de stopper l’engrenage fatal ou doit-on s’attendre au pire, autrement dit un conflit de plus
grande envergure dont l’onde de choc bouleversera les équilibres régionaux tout en menaçant la paix et
la stabilité en Europe ? – Akram Belkaïd
La guerre Iran-Irak. Photo prise
le 25 septembre 1980, à la région
frontalière avec l’Irak du Chatt
al-Arab, Iran.
ENTRETIEN-DÉGUSTATION avec LE MONDE et LES VIGNOBLES MICHEL GONET
HINER SALEEM, RÉALISATEUR
vendredi 20 novembre – cinéma jean eustache, café berlin 3ème étage – 19h45
Avec Hiner Saleem, cinéaste.
Entretien animé par Jérôme
Gautheret, journaliste au Monde.
56 DÉBATS
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UN SI PROCHE-ORIENT
Réalisateur, Hiner Saleem est né en 1964 à Acrê (Kurdistan irakien). À 17 ans, il fuit le régime de Saddam
Hussein et se réfugie en Italie puis en France. Scénariste, réalisateur et producteur, Hiner Saleem n’a de
cesse de réaliser des œuvres engagées pour la reconnaissance des droits du peuple kurde.
C’est ainsi que plusieurs de ses films exposent l’oppression, la misère, le combat et l’espérance du peuple
kurde sous toutes ses formes. Réaliste, mais pas pessimiste, Saleem excelle aussi dans la comédie et le
burlesque, comme en témoigne son dernier film Si tu meurs, je te tue ! , déjà tourné avec la prometteuse
Golshifteh Farahani. En 2005, son film Kilomètre Zéro a été sélectionné en compétition à Cannes.
SAMEDI 21 NOVEMBRE
CONFÉRENCE
les petits-déjeuners de
france culture
vendredi 20 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 10h15
Anaïs Kien reçoit un(e) réalisateur (trice) de documentaires invité(e) du Festival pour une rencontre
consacrée à son dernier film.
CAFÉ HISTORIQUE avec L’APHG
CHIITES ET SUNNITES
samedi 21 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 11h30
Par Mohammad Ali Amir-Moezzi,
islamologue, spécialiste du chiisme,
et Gabriel Martinez-Gros,
professeur d’histoire médiévale du
monde musulman à l’Université
Paris Ouest Nanterre La Défense.
Rencontre animée par Delphine
Dussert-Galinat, historienne.
Il y a quelques dizaines d’années, les spécialistes renvoyaient le couple chiite/sunnite aux conflits oubliés
du Moyen Âge. Aujourd’hui, l’opposition entre les deux versions majeures de l’Islam est redevenue
la grille de lecture la plus pertinente, ou la plus commode, des bouleversements en cours au Moyen-Orient.
Certes la balance n’est pas égale : les Chiites, même si on inclut toutes les branches de la famille (ismaéliens,
alaouites de Syrie et alévis de Turquie, zaydites du Yémen…) ne représentent pas plus de 14 à 15 % des
musulmans du monde – et les sunnites presque tout le reste, 84 à 85 %. Mais les chiites sont concentrés
dans le cœur du vieil Islam, entre Liban à l’ouest et Deccan indien à l’est. Ils y constituent plus 25 % de
la population musulmane de la région, alors qu’ils sont presque absents aux périphéries, Bangladesh,
Indonésie, Afrique subsaharienne, Maghreb. La défaite historique du chiisme aux XIIe-XIIIe siècles
explique son absence dans des territoires souvent acquis à l’Islam après cette date. Au contraire le chiisme
fut une force considérable, voire hégémonique, à l’apogée médiévale de l’Islam. Au départ, le parti chiite
prétend défendre les droits au califat – et donc au pouvoir suprême — de la famille du Prophète et surtout
de son cousin et gendre Ali, père des deux petits-fils de Muhammad. L’ennemi est l’aristocratie mecquoise
qui n’a accepté l’islam que du bout des lèvres avant de confisquer le pouvoir. Mais l’échec de cette prétention politique chiite, le massacre en 680 du petit-fils du Prophète, al-Husayn, à Karbala, transforme peu à
peu le chiisme, aux VIIIe-IXe siècles, en un mouvement messianique, voire révolutionnaire, appuyé sur la
conviction de l’infinité des sens cachés du Coran comme de l’univers, dont Muhammad n’aurait révélé que
la part la plus évidente. Pour les chiites, si le message est déjà là, son sens reste à révéler. Le chiisme médiéval,
souvent en symbiose avec l’héritage philosophique grec, séduit nombre d’intellectuels ou de savants.
Au contraire le parti opposé, sunnite, exalte à l’extrême la figure du Prophète – par opposition à Ali et à
sa descendance –, affirme l’unicité et la clarté du sens du Coran, et refuse toute interprétation qui n’ait pas
pour source la parole ou l’exemple du Prophète. Le message divin et son interprétation sont clos
Le sunnisme triomphe aux XIIe-XIIIe siècle grâce à l’appui des confins guerriers de l’Islam, et en particulier des Turcs.
Juin 2014, à Nadjaf (Irak) : des
chiites prêts à rejoindre les forces
de sécurité irakienne pour combattre les djihadistes.
58 DÉBATS
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UN SI PROCHE-ORIENT
SAMEDI 21 NOVEMBRE
REGARDS CROISÉS avec LA VILLE DE PESSAC
LA DÉMOCRATIE SE DÉCRÈTE-T-ELLE ?
samedi 21 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 17h30
En Europe et en France en particulier, la démocratie est notre quotidien. Mais la démocratie se décrète-t-elle ?
Existe-t-il des conditions préalables à l’établissement de la démocratie ? Si oui, lesquelles ? La démocratie,
depuis les Grecs de l’Antiquité, a été érigée en modèle de système politique, un idéal à atteindre et dans lequel l’homme et la société peuvent harmonieusement s’organiser, s’épanouir. Depuis, quelques nations ont
adopté ce système de gouvernance et plus nombreux sont les peuples qui y aspirent, souhaitent vivre sous son
régime ou voudraient qu’elle soit mieux appliquée quotidiennement. Le principe de démocratie fait appel à
des concepts qui rencontrent de nombreux freins. Les concepts de citoyenneté, d’égalité entre les citoyens, de
prises de décisions communes dans une optique d’intérêt général, de partage politique, de justice, de droit,
de représentativité… Peut-on déclarer la démocratie, de but en blanc ou demande-t-elle un apprentissage,
une longue et lente marche fondée sur l’éducation des peuples ? Et qui doit décréter la démocratie : le peuple
lui-même ou un groupe dirigeant, pour le peuple ?
À ces questions, le Dr Haytham Manna apportera son éclairage et sa sagesse d’activiste des Droits de l’Homme,
président de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme à Genève, coordinateur adjoint du CCNCD (opposition syrienne non armée). Opposant syrien notoire, en exil en France depuis 35 ans, il prône un règlement
politique dans son pays et l’instauration d’un régime démocratique librement consenti par le peuple syrien.
Cofondateur de la Commission Arabe des Droits de l’Homme, président du Bureau International des ONG
Humanitaires.
Jean-François Fechino est directeur de l’Institut International pour la paix, la justice et les droits de l’Homme
(Genève), et observateur international de processus électoraux. Il rentre d’Égypte et évoquera le rôle délicat des
observateurs dans l’accompagnement des démocraties naissantes, après avoir été observateur en Algérie (présidentielles 2014), en Égypte (présidentielles 2014) et en Tunisie (présidentielles 2014. Législatives 2015).
Par Jean-François Fechino,
directeur de l’Institut International
pour la Paix, la Justice et les Droits
de l’Homme, et Haytham Manna,
opposant syrien, créateur et
porte-parole du Comité de
Coordination nationale pour le
changement démocratique.
CAFÉ BD & HISTOIRE avec LES ÉDITIONS CAMBOURAKIS
«
ERNEST ET MANOLIS, DEUX DESTINS EN
ASIE MINEURE DANS LES ANNÉES 1920 »
samedi 21 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 19h15
Deux bandes dessinées récentes, parues aux éditions Cambourakis, offrent un regard original sur un pan
méconnu de l’histoire de l’Asie Mineure au début du XXe siècle. Les récits de deux destins bien réels, celui
d’un jeune garçon grec – Manolis – pris en 1922 dans la tourmente de « La Grande Catastrophe », le massacre
et l’exil des Grecs d’Asie Mineure ; celui, à peu près à la même époque, d’un soldat français, Ernest, engagé en
1919 dans un contingent chargé de maintenir la présence française en Cilicie et de résister aux troupes turques.
Deux bandes dessinées qui mêlent également Histoire et histoire personnelle, où les auteurs, Allain Glykos et
Antonin Dubuisson, livrent tour à tour le récit du destin d’un père et celui d’un arrière-grand-père.
Dans Manolis, adaptation du roman Manolis de Vourla d’Allain Glykos, on découvre l’itinéraire de ce jeune
garçon, chassé de son village de Vourla, dans la région de Smyrne (Izmir aujourd’hui), réfugié dans une famille
d’accueil à Nauplie, retrouvant sa famille en Crète pour finalement émigrer en France. Ce roman graphique
évoque l’un des épisodes les plus sombres de l’histoire grecque du XXe siècle, connu sous le nom de « Grande
catastrophe ». Le conflit gréco-turc, qui fait suite à la Première Guerre mondiale, débouche à l’automne 1922
sur la défaite des troupes grecques face à l’armée conduite par Mustafa Kemal. Les conséquences humaines de
cet événement - massacre et expulsion des populations chrétiennes d’Anatolie - vont faire basculer le destin
du père d’Allain Glykos. Cette mémoire douloureuse est au cœur de ce roman graphique, qui montre les
souffrances endurées par les populations sans jamais s’y appesantir.
Dans Ernest, Souvenirs de Cilicie, le dessinateur Antonin Dubuisson retranscrit le récit de la campagne militaire
et de la captivité de son arrière-grand-père, Ernest, engagé en 1919 dans une nouvelle guerre lointaine, bientôt
prisonnier en Turquie. Jeune homme de 21 ans, rêvant d’Orient après avoir été prisonnier des Allemands durant
la Grande Guerre, Ernest décide de tenir le journal de ses années passées en Turquie jusqu’à son retour en
France. Alors que les grandes puissances de l’époque se disputent les restes de l’Empire ottoman, et que Mustafa
Kemal refuse le démantèlement de son pays, Ernest se retrouve bientôt piégé, prisonnier des Turcs durant plus
d’une année, subissant les privations, la maladie, les coups, avant d’être finalement libéré.
Par Antonin Dubuisson, auteur de
bandes dessinées (Manolis ; Ernest,
souvenirs de Cilicie), et Allain
Glykos, écrivain.
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 59
SAMEDI 21 NOVEMBRE
CAFÉ ÉCONOMIQUE DE PESSAC
iran et turquie : empires d’hier,
émergents de demain ?
samedi 21 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 20h30
Par Thierry Coville, chercheur à
l’Institut de Relations
Internationales et Stratégiques
(IRIS), spécialiste de l’Iran,
et Garip Turunç, maître de
conférences à l’Université
de Bordeaux.
Poignée de mains entre le président
iranien Hassan Rohani et le président
turc Recep Tayyip Erdogan à
Téhéran en janvier 2014.
60 DÉBATS
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UN SI PROCHE-ORIENT
L’Iran et la Turquie ont été dans le passé des empires puissants à des périodes différentes de l’histoire. Ils ont
en commun d’avoir aujourd’hui une taille démographique, une position stratégique et des capacités
de développement pouvant leur permettre de jouer un rôle significatif dans le concert des nations.
Ces pays relèvent de branches distinctes de l’Islam (le chiisme pour le premier, le sunnisme pour le
second), de modèles économiques, sociaux et politiques différents, et de modes d’insertion divergents
dans la géopolitique internationale. L’Iran, qui dispose d’importantes ressources pétrolières, avait
d’abord tenté une voie vers l’occidentalisation et l’industrialisation à l’époque du Shah. La Révolution
islamique, avec l’arrivée de l’ayatollah Khomeyni au pouvoir, a impliqué le primat de la loi islamique
sur le plan intérieur et une opposition frontale aux États-Unis sur le plan international. La guerre
avec l’Irak de Saddam Hussein, qui bénéficiait du soutien occidental, n’a pas mis en cause le régime.
Par la suite, la politique iranienne a reflété les rapports de force variables entre les « conservateurs » et
les « réformateurs ». Au cours des dernières années, les sanctions liées au conflit sur le nucléaire iranien ont ralenti la croissance et la modernisation de ce pays. La Turquie, qui ne dispose pas du même
atout pétrolier, avait d’abord emprunté une voie de développement économique sur une base nationale dans un cadre politique d’inspiration laïque sous Mustapha Kemal durant l’entre-deux-guerres.
Par la suite, ce pays s’est intégré dans les relations économiques et dans l’alliance militaire du monde
occidental (OTAN). Depuis la victoire du parti de Recep Erdogan, l’Islam a de nouveau exercé une
forte influence sur la vie politique et sur l’organisation de la société. Même si l’entrée de la Turquie
dans l’Union européenne a été refusée, il n’y a pas eu de mise en cause de son insertion dans le monde
occidental. Les derniers évènements relativisent l’opposition entre les deux modèles. D’une part,
la levée des sanctions liée à l’accord sur le nucléaire peut permettre une reprise de la croissance et des
avancées des « réformateurs » en Iran. D’autre part, le durcissement du régime d’Erdogan crée des
risques pour la cohésion sociale et le devenir économique de la Turquie. Une détente de la situation
au Proche-Orient pourrait augmenter les chances de ces deux pays de figurer parmi les émergents qui
comptent à l’échelle mondiale.
DIMANCHE 22 NOVEMBRE
CAFÉ EXPO
SYRIAN EYES OF THE WORLD
dimanche 22 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 14h00
Depuis le début de la crise syrienne en 2011, ce qu’on voit par rapport à la Syrie n’est pas toujours reluisant. C’est une triste réalité, mais dans un effort de ne pas oublier les humains derrière le conflit, nous
avons décidé de présenter au monde d’autres réalités. Comme nous voulons élargir le spectre de ce qui
est montré par rapport au pays, nos objectifs sont de changer les perspectives et de donner une voix, sans
discrimination, à ces diverses communautés qui constituent une nation diversifiée. « Syrian Eyes of the
World », projet photographique international chapeauté par l’organisme sans but lucratif La maison de la
Syrie, est aussi un effort d’archivage de ce moment de l’Histoire dont nous faisons partie, l’histoire d’une
nation mosaïque qui a vécu en harmonie depuis des millénaires, mais qui vit maintenant des moments
difficiles. Nous sommes aussi fiers que ce projet n’ait aucune affiliation, sauf celles esthétiques, de respect
et de qualité. – Youssef Shoufan, fondateur du projet.
Par Youssef Shoufan, cofondateur
de la maison de la Syrie.
Animé par Kevin Dutot, membre
de l’équipe du Festival.
ENTRETIEN
GOLDA MEIR, UNE VIE POUR ISRAËL
dimanche 22 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 15h15
Qui aurait pu imaginer un tel destin ? Née à Kiev en 1898, Golda Meir fuit avec sa
famille la terreur des pogroms et trouve refuge aux États-Unis en 1906. À 23 ans,
elle émigre en Palestine avec son mari et s’installe dans un kibboutz. Militante
infatigable de la cause sioniste, elle signe la déclaration d’indépendance d’Israël
le 14 mai 1948. Ministre du Travail, ministre des Affaires étrangères, secrétaire
générale du Parti travailliste, elle est nommée Premier ministre en 1969, à l’âge
de 71 ans. Femme de caractère, Golda Meir a toute sa vie répugné à se livrer. Près
de quarante ans après sa mort, Claude-Catherine Kiejman enquête avec finesse
sur les ressorts de cette personnalité hors du commun. On découvre alors une
grande figure de l’histoire du XXe siècle.
Claude-Catherine Kiejman est
journaliste, spécialiste des pays
de l’Est. Elle a longtemps travaillé
à France-Culture et collaboré
à de nombreux journaux, dont
L’Évènement du jeudi, Le Monde
et l’Express. Elle est l’auteure des
biographies de Clara Malraux,
qu’elle a personnellement connue,
et d’Eléonor Roosevelt.
Entretien animé par Yves Jeuland,
cinéaste.
CAFÉ HISTORIQUE
LES KURDES ET LES ENJEUX RÉGIONAUX
dimanche 22 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 16h30
Depuis l’offensive de l’Organisation de l’État islamique (OEI) dans le nord de l’Irak et en Syrie, la question
kurde est revenue sur les devants de la scène médiatique. Les peshmergas (soldats du Kurdistan d’Irak) mais
aussi les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) sont en première ligne depuis plus d’un an face
aux djihadistes et sont parvenus à reconquérir des territoires perdus. Pour autant, la question kurde est depuis
longtemps une affaire politico-militaire très sensible dans les quatre États (Turquie, Syrie, Irak, Iran) où environ
35 millions d’entre eux résident depuis le partage du Proche-Orient par les accords Sykes-Picot signés en 1916
et le découpage des frontières avalisé par le Traité de Lausanne en 1923. Des conditions de vie difficiles associées
à une non-reconnaissance politique voire à un harcèlement de la part des autorités ont
poussé des centaines de milliers d’entre eux sur les routes de l’exil. Plusieurs millions ont
rejoint les grandes métropoles régionales comme Istanbul, Bagdad, Téhéran ou Tabriz.
Nous retracerons synthétiquement leur histoire pour mieux comprendre les enjeux
socio-politiques qui se jouent aujourd’hui sur leurs territoires au Proche-Orient ainsi
qu’en terre d’immigration. Qui sont les Kurdes, leurs langues, leurs religions ? Quels
sont les rapports de force entre les groupes tribaux et le pouvoir politique central ?
Comment comprendre leurs luttes pour l’autonomie ou l’indépendance ? Quelles sont
les implications régionales de l’offensive de l’OEI sur leur avenir ? La place des femmes
dans la société et dans la vie politique et militaire kurde a-t-elle évolué ? Comment les
créations artistiques parlent-elles des Kurdes et du Kurdistan ?
Par Isabelle Rigoni, chercheuse
à l’Université de Bordeaux et au
Centre Émile Durkheim.
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 63
EXPOSITIONS
EXPOSITION BD ET HISTOIRE
Conçue par LE FESTIVAL INTERNATIONAL DU FILM D’HISTOIRE, avec l’aide des ÉDITIONS CAMBOURAKIS
manolis & ernest, souvenirs de
cilicie : deux romans graphiques
sur l’histoire de l’asie mineure
du lundi 16 au lundi 23 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage
Autour d’une sélection de planches originales et de fac-similés des bandes dessinées Manolis (A. Glykos,
A. Dubuisson) et Ernest, souvenirs de Cilicie (A. Dubuisson), parues toutes deux aux éditions Cambourakis,
se dessine la mémoire d’histoires méconnues, qui se sont déroulées en Asie mineure au début du XXe siècle.
De la présence de soldats français en Cilicie au lendemain de la Première Guerre mondiale, opposés aux
armées turques (Ernest), à la « Grande catastrophe » ayant vu le massacre par les Turcs puis l’exil de Grecs
d’Anatolie (Manolis), deux bandes dessinées offrant un regard original sur l’histoire.
Une exposition qui mêle dessins, photographies et repères historiques, permettant de comprendre la genèse
de ces romans graphiques, où la mémoire personnelle des événements s’accompagne d’une recherche
historique.
EXPOSITION
ali ghotbi. voyage sur
les ailes du poète
à partir du 20 octobre – galerie arts & regards
Artiste complet, Ali Ghotbi laisse entrevoir par ses dessins toute l’étendue
de sa maîtrise des arts plastiques. D’une sensibilité extrême, l’homme
nous dévoile son œuvre empreinte de poésie, de questionnement et
de délicatesse.
Par son geste assuré, Ali Ghotbi rend limpide la lecture de son œuvre,
ses dessins sont exécutés à main levée, d’un trait, le crayon ne quitte pas
la feuille. Les courbes sont gracieuses, derrière les portraits sombres la
lumière est sous-jacente, les femmes dansent et transmettent la flamme
de l’espérance. Car c’est bien d’espoir et de transmission dont il faut
parler devant le merveilleux travail de cet artiste. – Sylvie Ghayem
Renseignements : 05 56 39 46 12 / [email protected]
64 DÉBATS
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UN SI PROCHE-ORIENT
EXPOSITIONS
EXPOSITION PHOTOGRAPHIQUE avec LA MAISON DE LA SYRIE et LA VILLE DE PESSAC
Tirages réalisés par CENTRAL DUPON IMAGES
syrian eyes of the world
du lundi 16 au lundi 23 novembre – place de la ve république à pessac
« Syrian Eyes of the World » est une exposition sensible, qui donne une voix et un visage à ceux qui constituent la mosaïque de l’identité syrienne, à travers le monde. De Montréal à Istanbul, en passant par New
York, Beyrouth, Alep et Chatila, les portraits en noir et blanc de Syriens de la diaspora et de Syrie, leurs
regards, captés par des photographes syriens. Des femmes, des hommes, des enfants, anonymes ou célèbres, de confessions et de milieux différents, tous liés de manière indéfectible à leur pays natal, livrent leurs
souvenirs, leurs espoirs, leurs idéaux…
Cette belle initiative, imaginée par Youssef Shoufan pour la maison de la Syrie, fait le pari de « changer
les perspectives », d’« élargir le spectre des représentations » – de donner à voir un autre visage de la Syrie
que celui de la guerre civile. Pour que les humains derrière le conflit ne soient pas oubliés et pour raviver
l’espoir d’une paix stable.
CAFÉ EXPO
rencontre avec youssef shoufan
autour de l’exposition « syrian
eyes of the world »
dimanche 22 novembre – cinéma jean eustache, beyrouth café 3ème étage – 14h00
Le descriptif de la rencontre est à lire en page 63.
UN SI PROCHE-ORIENT
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DÉBATS 65
UN SI PROCHE-ORIENT
LES FILMS
SÉLECTION : Pierre-Henri DELEAU
Une réalité plus forte que l’imagination
Autant l’Égypte ancienne, l’Iran des mille et une nuits et tout le MoyenOrient en général ont largement alimenté l’Imaginaire du cinéma
occidental (Cléopâtre, Pharaon, L’Égyptien, Salomon et la Reine de
Saba), autant la réalité d’aujourd’hui a singulièrement réduit la vision
qu’on peut en avoir. Régimes autoritaires, dictatures, coups d’États,
intégrismes fanatiques, peuples sans État et sans frontières, guerres
diverses, révolutions avortées ou réussies laissent en effet peu de place
aux rêves et au plaisir. Plus de comédies ou de vaudevilles destinés à faire
rire le public. Ce qu’on appelle le cinéma de divertissement n’est plus
qu’un lointain souvenir. Désormais les films rendent compte de la réalité.
Comment pourrait-il en être autrement ?
Comme un miroir posé le long de la route, le cinéma finit toujours par
nous renvoyer les événements qui se déroulent devant lui. Témoins
partisans ou se voulant objectifs, mais toujours passionnés, les cinéastes
d’aujourd’hui nous dressent donc le tableau impitoyable d’un monde
malade, qui n’aspire pourtant qu’à trouver la paix. Déchirés, révoltés,
engagés mais impuissants, ils nous brossent ainsi le portrait sauvage et
cruel de peuples en souffrance, qui sonne comme un terrible réquisitoire.
Impossible de rester de marbre devant ces histoires effrayantes ou ces
témoignages accablants. Le cinéma actuel du Proche-Orient n’est bien
souvent qu’un long cri désespéré : son urgence fait sa noblesse. Faisant
suite aux grands ainés du passé, Youssef Chahine ou Yilmaz Güney par
exemple, les réalisateurs d’aujourd’hui sont devenus les peintres à charge
de leur société.
Bahman Ghobadi (Irak), Nuri Bilge Ceylan (Turquie), Cherien Dabis
(Jordanie), Ronit et Shlomi Elkabetz, Amos Gitaï, Igaal Nidam (Israël),
Asghar Farhadi, Abbas Kiarostami, Dariush Mehrjui, Jafar Panahi (Iran),
Nadine Labaki, Jocelyne Saab (Liban), Ossama Mohammed (Syrie),
Haifaa al-Mansour (Arabie Saoudite), Mohamed Diab, Yousry Nasrallah
(Égypte), Hiner Saleem (Kurdistan) Elia Suleiman (Palestine), tous,
à leur manière, filment l’Histoire en marche et nous la donnent à
comprendre. Rude leçon !
Pierre-Henri Deleau
Délégué général du Festival
Arabie Saoudite 69
Égypte 70
Irak 78
Iran 82
Israël-Palestine 94
Jordanie 107
Liban 108
Syrie 112
Turquie 116
D’Hier et d’aujourd’hui
123
Wadjda
Haïfaa Al Mansour – Arabie Saoudite, 2012, 97 mn, coul
Arabie
Saoudite
Wadjda
Wadjda, 12 ans, habite la banlieue de Riyad. Bien qu’elle
grandisse dans un milieu conservateur, elle porte jeans
et baskets, écoute du rock et ne rêve que d’une chose :
s’acheter un vélo pour faire la course avec son ami Abdallah. Mais les bicyclettes sont réservées aux hommes…
Légalement, il n’existe pas de cinémas en Arabie Saoudite puisque
la projection publique de films y est hors-la-loi. C’est dans le cadre
familial que les Saoudiens ont la possibilité d’être des (télé)spectateurs. Ajoutez à l’inexistante production cinématographique
nationale l’interdiction faite aux hommes et aux femmes de travailler ensemble et vous commencerez à mesurer la prouesse
réalisée par la cinéaste Haifaa Al-Mansour sur son propre territoire ! Il semble qu’un changement infinitésimal dans la société
saoudienne ait permis le financement de cette production. Et la
qualité cinématographique est là, comme si la seule authenticité
du tournage – dont certaines séquences de rue furent dirigées par
la réalisatrice de l’intérieur d’une voiture ! – avait contaminé le
film tout entier. Par petites touches, Haifaa Al-Mansour donne
à voir la ségrégation qui touche les femmes de son pays, à tous
les âges. Mais aussi à quel point cette ségrégation est souvent
auto-immune. Véritable ode à la persévérance, le film donne plus
qu’une vision « de l’intérieur » du royaume wahhabite : il délivre
un espoir et un optimisme proportionnels à l’audace qui l’a fait
naître. – Nicolas Milési
Sortie française 6 février 2013 Distributeur Pretty Pictures
Format DCP – 1.78 : 1 Production Highlook Communications
Group/Razor Film/Rotana Studios Producteurs Roman Paul,
Gerhard Meixner Coproducteur Amr Alkhatani Producteurs
exécutifs Christian Granderath, Louise Nemschoff, Bettina
Ricklefs, Rena Ronson, Hala Sarhan Scénario Haïfaa Al Mansour
Image Lutz Reitemeier Direction artistique Tarik Saeed
Décors Maram Algohani Costumes Peter Pohl Son Andreas
Mücke Montage Andreas Wodraschke Musique Max Richter
– Avec Waad Mohammed (Wadjda), Reem Abdullah (la mère),
Abdullrahman Al Gohani (Abdallah), Sultan Al Assaf (le père)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 69
Gare
centrale
[BAB EL HADID]
Youssef Chahine – Égypte, 1958, 90 mn, NB
Égypte
Gare centrale
Cléopâtre
Pharaon / Le Pharaon
La Terre
Le Moineau
Adieu Bonaparte
Le Destin
L’Autre
Les Portes fermées
Dunia
L’immeuble Yacoubian
Le Chaos
Femmes du Caire
18 Jours
Les Femmes du bus 678
Qinawi, boiteux et simple d’esprit, travaille comme vendeur
de journaux à la criée. Il voue un amour fou à Hanouna,
une vendeuse clandestine. Mais lorsque la jeune femme
repousse ses avances, il bascule dans la folie meurtrière…
« Youssef Chahine développe le portrait d’un véritable microcosme, lequel doit se voir comme un précipité de la société égyptienne à l’aube des années 60. Le cinéaste construit un véritable
film choral, avec multiplicité des intrigues parallèles. Chahine affirme également un goût prononcé pour l’étrangeté et les laissés
pour compte, ainsi qu’une tendance claire à s’approprier la narration hollywoodienne tout en la déconstruisant quelque peu.
Ce qui étonne, c’est l’énergie qui se dégage de la mise en scène.
Dans un noir et blanc majestueux, Chahine développe une grammaire très élaborée, faite de mouvements aussi élégants qu’inattendus, laissant vivre ses cadres comme autant d’instantanés.
Ainsi, il contemple ses personnages frontalement, mais parfois à
travers un miroir ou une surface de verre déformante, proposant
un jeu étudié sur les reflets. » – Filmosphère
Sortie française 13 mars 1974 Distributeur Pyramide Format
Beta Num. – 1.66 : 1 Producteur Gabriel Talhami Scénario
Abdel Hay Adib, Mohamad Abou Youssef Image Alevise
Orfanelli Direction artistique Gabriel Karraze Décors Abbas
Helmy Costumes Dina Nadeem Son Aziz Fadel Montage
Kamal Abul Ela Musique Fouad El-Zahry – Avec Farid Shawki
(Abu Siri), Hind Rostom (Hanuma), Youssef Chahine (Qinawi),
Hassan el Baroudi (lui-même), Abdel Aziz Khalil…
EN PREMIÈRE PARTIE :
Le Caire raconté par Youssef Chahine
Youssef Chahine – Égypte/France, 1991, 23 mn, coul
Un portrait en forme d’essai poétique du Caire, la ville
de cœur du cinéaste Youssef Chahine…
70 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
ÉGYPTE
Cléopâtre
Pharaon [FARAON]
/ Le Pharaon
Joseph L. Mankiewicz – États-Unis, 1963, 243 mn, coul
Jerzy Kawalerowicz – Pologne, 1966, 152 mn, coul
En 48 av. J.C., Cléopâtre, écartée du trône par son frère
le roi d’Égypte, veut reprendre le pouvoir. Usant de sa
beauté pour séduire et épouser successivement Jules
César et Marc-Antoine, elle changera le cours de l’histoire
et deviendra une souveraine au destin tragique...
Évocation de la vie de Ramsès XIII, qui prend le pouvoir à
la mort de son père dans une époque difficile, avec
une population appauvrie, un système administratif en
décadence, une armée en révolte et une caste de grands
prêtres aussi puissante qu’hostile…
« L’histoire de la production de Cléopâtre appartient à la légende.
Revoir le film aujourd’hui, c’est mieux mesurer combien la réussite
de l’œuvre tient à l’équilibre miraculeux qu’elle trouve magistralement entre des tensions opposées. Un film à grand spectacle,
sans doute, mais un film où, si l’on excepte l’ahurissante entrée
triomphale de Cléopâtre dans Rome, tous les morceaux de bravoure semblent réduits au strict minimum. Un film de batailles
et de conquêtes où les scènes de combat ne durent probablement
pas plus de cinq minutes au total. Un film aux décors démesurés
(certainement les plus spectaculaires de l’époque avec ceux, postérieurs, de La Chute de l’Empire romain), mais qui ne trouve à y
inscrire que de longues scènes dialoguées à peu de personnages.
Un film qui se pose en héritier des Dix Commandements ou de
Ben Hur, mais cherche son inspiration du côté de Shakespeare
ou de George Bernard Shaw. Un film tour à tour drôle, émouvant et grave. Le film d’un studio qui devient celui d’un auteur
véritable. » – Positif
« Le huitième film de Jerzy Kawalerowicz (Mère Jeanne des anges)
présente toutes les caractéristiques d’un péplum : reconstitution
fastueuse de l’Antiquité, multitude de figurants en pagnes et toges,
tournage en scope mettant en valeur de magnifiques paysages, exotisme et érotisme. Difficile pourtant de résumer Pharaon à ce genre
ou à un autre, tant il apparaît sans équivalent – ni, hélas, descendance – dans l’histoire du cinéma. La richesse du film vient en effet
de ce que Kawalerowicz se garde de prendre parti pour ou contre
ses personnages. Les usuriers phéniciens sont caricaturés et rendus
bouffons, mais leurs manigances se justifient par les périls qu’encourt leur pays, et leur comportement outrancier par l’ostracisme
et le mépris dont ils font l’objet. Les prêtres s’agrippent à leurs
richesses, mais représentent l’âme de l’Égypte, et si certains sont
retors et corruptibles, d’autres s’avèrent sages et avisés. Quant au
jeune et impétueux Pharaon aux velléités réformatrices, il n’est
pas montré sous un jour particulièrement flatteur : par son obsession de la grandeur, il met en péril l’équilibre de son pays. Son
orgueil constitue sa principale faiblesse, ce que le film suggère
avec subtilité lorsqu’il affronte son propre reflet, à travers son
sosie. » – Critikat
Sortie française 25 octobre 1963 Distributeur Flash Pictures
Format Blu-Ray – 2.35 : 1 Production 20th Century Fox
Producteur Walter Wanger Scénario Joseph L. Mankiewicz,
Ranald MacDougall, Sidney Buchman, Ben Hecht Image Leon
Shamroy Direction artistique John DeCuir, Jack Martin Smith,
Herman A. Blumenthal, Elven Webb, Maurice Pelling,
Boris Juraga Décors Walter M. Scott, Paul S. Fox, Ray Moyer
Costumes Irène Sharaff, Vittorio Nino Novarese, Renié Son
Bernard Freericks, Murray Spivack Montage Dorothy Spencer,
Elmo Williams Musique Alex North – Avec Elizabeth Taylor
(Cleopâtre), Richard Burton (Marc Antoine), Rex Harrison
(Jules César), Pamela Brown (la grande prêtresse), George
Cole (Flavius)...
Sortie française 15 mai 1966 Distributeur Zespól Filmowy « Kadr »
Format DCP – 2.35 : 1 Production Zespól Filmowy « Kadr »
Scénario Tadeusz Konwicki, Jerzy Kawalerowicz, d’après le roman
de Boleslaw Prus Image Jerzy Wójcik Direction artistique Jerzy
Skrzepinski Décors Romuald Korczak, Franciszek Trzaskowski,
Albin Wejman Costumes Maria Czekalska, Andrzej Majewski,
Barbara Ptak, Lidia Rzeszewska Son Stanislaw Piotrowski Montage
Wieslawa Otocka Musique Adam Walacinski – Avec Jerzy Zelnik
(Ramsès XIII), Wieslawa Mazurkiewicz (Nikotris), Barbara Bryl
(Kama), Krystyna Mikolajewska (Sara)...
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 71
ÉGYPTE
La
Terre
[AL-ARD]
Le
Moineau
[AL-OUSFOUR]
Youssef Chahine – Égypte, 1968, 130 mn, coul
Youssef Chahine – Égypte/Algérie, 1972, 105 mn, coul
Dans les années trente, la réduction de la durée d’irrigation,
déjà insuffisante, provoque la rébellion d’un village de
paysans…
Juin 1967. À la veille de la guerre des Six Jours,
un journaliste enquête sur une sombre affaire de
détournement d’équipement, concernant une usine
en perpétuelle construction…
« C’est avec La Terre que l’Europe a découvert le cinéma égyptien
lors de sa présentation au Festival de Cannes 1969. Chahine
lui-même parlait d’ailleurs de son film comme d’un tournant
dans sa filmographie, un changement radical dans sa conception
du cinéma : “Mettre en lumière la force de vivre d’un peuple.”
Quoi qu’il en soit, il réalise là une épopée paysanne puissante
qui nous plonge au cœur d’un petit village agricole pauvre : il
met en relief sa vie sociale, les rapports de force avec les autorités
et la place de l’individu dans cette société. À la brutalité des
autorités répondent la rudesse et même la cruauté du monde
des paysans. L’individualisme s’oppose à la nécessaire solidarité
pour assurer la survie. Un film très authentique, empreint d’une
force et d’un humanisme qui sait laisser naître l’émotion. » –
L’Œil sur l’écran
« Al-Ard est parfois considéré comme le meilleur film égyptien de
tous les temps, adapté d’un roman écrit par l’écrivain et dramaturge
Abderrahman Charkawi. Au moment du tournage, la situation
politique égyptienne était à un tournant historique, la santé du
président Nasser était déjà déclinante. Pour contourner la censure,
Chahine plaça son film dans les années trente, mais ce sont bien
la bourgeoisie et l’administration contemporaines qui étaient
visées par La Terre, où le réalisateur réunit les meilleurs acteurs
du moment dans une épopée haletante. » – Trigon Films
Un peu plus de quinze ans après Gare centrale, en 1974, Youssef
Chahine réalise Al Ousfour (Le Moineau). Il y pousse à l’extrême
une mise en scène éclatée qui semble partir dans tous les sens, où
de multiples histoires débutent chaque fois qu’un nouveau personnage apparaît, où la compréhension de l’ensemble semble n’apparaître qu’à la fin. Pour autant, Chahine n’abandonne pas son regard
affectueux vis-à-vis des petites gens. Le Moineau bénéficie d’une
intrigue foisonnante, où les développements multiples donnent
un aperçu presque documentaire, au-delà de la fiction, de l’atmosphère qui régnait à ce moment-là dans la population égyptienne,
fière de son armée, sûre de pouvoir se défendre victorieusement
contre l’ennemi israélien. Et c’est dans cette atmosphère et celle
qui a frappé le peuple à l’annonce de la défaite de 1967 qu’on peut
lire le véritable sujet du film. Dans un très beau texte, le critique de
cinéma tunisien Tahar Chikhaoui, évoque, à propos d’Al Ousfour,
une « esthétique de la défaite ». Une esthétique qui permet de
rendre compte, et de porter à l’écran, les sentiments et la réalité
de ce revers qui a consterné les populations du monde arabe, sans
parler de la démission de Nasser – à laquelle ce dernier renoncera
finalement devant les manifestations de la rue. En raison de sa mise
en cause directe du pouvoir dans la responsabilité de la défaite,
le film fut interdit et ne put être présenté qu’après la fin de la guerre
d’octobre 1973. » – Martial Knaebel
Distributeur Pyramide Format Beta Num. – 1.37 : 1 Scénario
Hassan Fuad, d’après le roman d’Abderrahman Charkawi
Image Abdelhalim Nasr Son John Knight Montage Rashida
Abdel Salam Musique Ali Ismail – Avec Hamdy Ahmed
(Mohammad Effendi), Yehia Chahine (Hassuna), Ezzat El Alaili
(Abd El-Hadi), Tewfik El Dekn (Khedr), Ali El Scherif (Diab)…
72 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
Distributeur Pyramide Format Beta Num. – 1.37 : 1 Production MH Films/Misr International Films Producteur Youssef
Chahine Scénario Youssef Chahine, Lotfi Kholi Image Mustapha Imam Musique A. Ismail, S. Imam, N. Bahgat – Avec
Mahmoud
El-Meligui (Johny), Mohsena Tawfiq (Bahiya), Salah Kabil
(Yussif Fath el-Bab), Habiba (Fatma), Sayf Ad-Din (Rawf)…
ÉGYPTE
Adieu Bonaparte
Le
Destin
[AL MASSIR]
Youssef Chahine – Égypte/France, 1985, 90 mn, coul
Youssef Chahine – Égypte, 1996, 135 mn, coul
Avide de puissance et de gloire, Bonaparte entame la
campagne d’Égypte. Loin de ces préoccupations guerrières,
Caffarelli, l’un de ses généraux, part à la découverte de ce
pays et de son âme. Il va s’opposer à l’action destructrice
de Bonaparte…
Pour amadouer les intégristes, le calife el-Mansou ordonne
l’autodafé de toutes les œuvres du philosophe andalou
Averroes. Les disciples d’Averroes et ses proches
décident d’en faire des copies et de leur faire traverser
les frontières…
« Le pire contresens à propos de Adieu Bonaparte serait de reprocher à Chahine d’avoir privilégié Caffarelli pour mieux se dérober
à la commande (une super coproduction) et à ses implications
idéologiques (un épisode d’histoire coloniale et d’insurrection
nationaliste). Là où le film est fort, c’est qu’il traite vraiment son
sujet (la campagne d’Égypte) avec une acuité qui s’accroît paradoxalement à mesure que l’intrigue, partie sur des scènes de foule,
se resserre autour des relations entre un individu et une famille
d’Alexandrins. En plaçant Caffarelli au centre d’un tissu double
de relations – le conflit politique qui l’oppose en permanence à
Bonaparte sur la question des urgences à mener, lourd d’un nondit affectif ; et le lien qui l’attache à Yehia puis à Aly – Chahine
peut, avec une rare aisance, passer de la scène historique à grosse
figuration à la scène intimiste sans jamais casser le fil majeur qui
arrime le sens de l’histoire. Les différences entre Bonaparte et
Caffarelli (ce dernier ironisant sur sa mission civilisatrice) passent
par le comportement, l’attitude. Pour Chahine, de toute évidence,
le champ de la perception recoupe le champ du politique. » –
Charles Tesson, Cahiers du Cinéma.
Après L’Émigré (1994), pour lequel il avait connu les menaces et
la censure des fondamentalistes musulmans, Youssef Chahine a
pensé à ce sujet sur le philosophe Averroès (1126-1198). L’Andalousie islamique et tolérante du XIIe siècle – en particulier la ville
de Cordoue, capitale des Almohades et lieu d’affrontements entre
extrémistes musulmans et savants soucieux de la diffusion des
connaissances – comme réponse à ses détracteurs et à l’extrémisme
politique ou religieux. On y retrouve la manière du cinéaste égyptien : un rythme endiablé, des aventures délirantes, un hymne
à la jeunesse et aux jolies femmes, des danses, des chansons.
Le personnage d’Abdallah fut inspiré à Chahine par Mohsen
Mohiedine, son acteur fétiche, qui s’était converti à l’intégrisme.
Le barde est interprété par Mohamed Mounir, chanteur très
connu dans son pays. Et le cinéaste cite, parmi ses inspirateurs,
Alexandre Dumas, Julien Duvivier, Stanley Donen et Busby
Berkeley ! Le tournage eut lieu en Syrie, au Liban et en Égypte.
Le Festival de Cannes 1997 attribua le Prix du 50e anniversaire
à Youssef Chahine pour Le Destin et l’ensemble de son œuvre.
Le film, par ailleurs, fut reçu sans problème de censure dans la
majorité des pays arabes, où il connut le succès.
Distributeur Tamasa Distribution Sortie française 13 mars
1974 Format DVD – 1.85 : 1 Production Renn Productions/TF1
Films/Lyric International/Misr International Films Producteurs
délégués Humbert Balsan, Marianne Khoury, Jean-Pierre Mahot
Scénario Youssef Chahine, avec la collaboration de Jean-Michel
Comet, Mohsen Mohiedine, Yousry Nasrallah Image Mohsen
Nasr Décors Onsi Abou Seif Costumes Yvonne Sassinot de
Nesle Son Michel Brethez Montage Luc Barnier Musique
Gabriel Yared – Avec Michel Piccoli (Cafarelli), Mohsen
Mohieddin (Ali), Patrice Chéreau (Napoléon Bonaparte),
Mohsena Tewfik (la mère), Christian Patey (Horace)…
Sortie française 15 octobre 1997 Distributeur Pyramide Format 35 mm – 1.85 : 1 Production Ognon Pictures/France 2 Cinéma/Canal+/Fonds Sud/ACCT/CNC/Misr International Films
Producteurs Humbert Balsan, Gabriel Khoury Scénario Youssef
Chahine, Khaled Youssef Image Mohsen Nasr Décors Hamed
Hemdane Costumes Nahed Nasrallah Son Annette Dutertre
Montage Rachida Abdel Salam Musique Kamal El Tawil,
Yohia El Mougy – Avec Nour El Cherif (Averroes), Laila Eloui
(La Gitane), Mahmoud Hémeida (le calife), Safia Emary
(la femme d’Averroes), Mohamed Mounir (le barde)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 73
ÉGYPTE
L’Autre
[EL AKHAR]
Les Portes fermées
Youssef Chahine – France/Égypte, 1999, 105 mn, coul
Atef Hetata – France/Égypte, 1999, 107 mn, coul
Hanane, une jeune journaliste d’origine modeste, rencontre
Adam, appartenant à l’élite arrogante et corrompue qui
s’enrichit aux dépens du peuple. C’est le coup de foudre.
Ils se marient. Le couple est l’objet de complots qui vont
amener Adam à modifier sa vision du monde…
Le Caire, en 1990. Mohammed, quinze ans, vit seul avec
sa mère, une femme indépendante. Il hésite entre
l’adhésion à un islam au visage tour à tour débonnaire et
sévère, l’assouvissement de ses premiers désirs et de
sa liberté, et les tentations du consumérisme…
« L’Autre réussit une synthèse entre le film populaire sentimental
et chanté auquel Chahine s’adonna dans les années 50 et le film
politique auquel il consacra ses dernières années. Le film bénéficie à la fois des raccourcis dramatiques permis par la comédie
et du travail plus sombre, souvent psychanalytique, sur lequel
il fait reposer ses films politiques. En ce sens le choix d’un extrait
de La Grande Valse pour marquer son attachement au naturalisme de Julien Duvivier, auquel le film est dédié, est tout à fait
bienvenu. Film mineur de Duvivier, La Grande Valse n’a été réalisé que pour honorer le contrat américain auquel il était tenu.
Chahine en utilise un extrait, que la mère découvre derrière
un rideau telle une projection mentale, pour signifier à son fils
ce qu’il manque en épousant une fille du peuple… en fait pas
grand-chose. Le coup de foudre immédiat, les yeux dans les yeux
avec chansons, le mariage secret dans le désert puis le mariage
officiel pris en charge par les amis de Hanane constituent les
moments sentimentaux les plus intenses du film. L’analyse politique porte sur les méfaits de la mondialisation et l’avidité des
financiers internationaux. Chahine montre la complicité objective entre la grande bourgeoisie et les groupes intégristes les plus
fanatiques. » – Ciné-club de Caen
« Un des grands plaisirs de ce film est la certitude de comprendre
quelque chose qui pour nous est un point obscur. Pourquoi un
jeune homme choisit-il le pire : l’intégrisme ? Le pire qui le mène
à la transgression absolue, le meurtre de la mère. La force du film,
c’est de nous donner à voir la situation sociale en Égypte, non pas
d’une manière didactique, mais à travers des personnages. Et quel
personnage : un adolescent face à deux femmes, des femmes seules,
indépendantes, magnifiques, rendant sensibles, lisibles par tous,
les réalités de l’intégrisme. Jamais Les Portes fermées n’est simplificateur ; le personnage de Mohamed est complexe, il traverse
toutes les expériences d’un jeune homme vivant dans une grande
métropole arabe. Quand les événements le pousseront vers l’intégrisme, alors seulement là, il avance vers la seule issue possible :
la mort. Il y a dans Les Portes fermées des moments de cinéma
jubilatoires, par exemple la découverte guidée par le personnage du
lycée. Comme il y a une force narrative incroyable qui arrive à faire
rentrer sur cette terrasse, où sont les deux petits appartements des
deux femmes, l’ensemble de la réalité du dehors. Réalité incarnée
par des personnages qui eux sont universels ; il y a du Rossellini
chez Atef Hetata. » – Jean-Henri Roger, lacid.org
Sortie française 26 mai 1999 Distributeur Pyramide Format
35 mm – 1.85 : 1 Production Ognon Pictures Coproduction
France 2 Cinéma Producteurs délégués Humbert Balsan,
Marianne Khoury, Gabriel Khoury Scénario Youssef Chahine,
Khaled Youssef Image Mohsen Nasr Décors Hamed Hemdane
Costumes Nahed Nasrallah Son Emmanuel Croset Montage
Rachida Abdel Salam Musique Yéhia El Mouguy – Avec Nebila
Ebeid (Margaret), Mahmoud Hemeida (Khalil), Hanane Tork
(Hanane), Hani Salama (Adam), Lébléba (Baheyya)…
Sortie française 29 novembre 2000 Distributeur Tadrart
Films/3 B Productions Format 35 mm – 1.85 : 1 Production
Médiane Production Coproduction Misr International, Arte
France Cinéma Productrices déléguées Marie-Françoise
Mascaro, Gaby Khoury, Marianne Khoury Scénario Atef Hetata
Image Samir Bahzan Décors Hamed Hemdane Son Gasser
Korshed Montage Dalia El Nasser, Catherine Poitevin – Avec
Ahmed Azmi (Mohammed), Sawsan Badr (Fatma), Mahmoud
Hemeida (Mansour), Manal Afifi (Zinab)…
74 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
[AL ABWAB AL MOGHLAKA]
ÉGYPTE
Dunia
[ID.]
L’immeuble
Yacoubian
[OMARET YACOUBIAN]
Jocelyne Saab – France/Égypte/Liban, 2006, 110 mn, coul
Marwan Hamed – Égypte, 2006, 172 mn, coul
Étudiante en poésie soufie et danse orientale au Caire,
Dunia est à la recherche d’elle-même et aspire à devenir
danseuse professionnelle. Lors d’un concours, elle rencontre
le séduisant Dr Beshir, illustre penseur soufi et homme de
lettres. Elle goûtera avec lui au plaisir des mots et des sens…
L’immeuble Yacoubian : un lieu mythique du Caire qui
témoigne à lui seul de l’évolution de la société égyptienne
du dernier demi-siècle, entre la fin du règne du roi Farouk
et l’arrivée des Frères musulmans au pouvoir…
« Le scénario de Dunia s’est heurté dès le début à la censure. Il a
été refusé une première fois, accusé de porter “atteinte à l’Égypte
et à l’islam”, d’“inciter à la débauche” et d’“approcher le thème
de l’excision”. Puis la Commission d’appel a finalement donné
son feu vert et Jocelyne Saab a réussi à convaincre les acteurs,
notamment la magnifique Hanan Turk qui donne corps à Dunia.
Ce qui n’a pas empêché le film de susciter de violentes réactions
à sa sortie. Jocelyne Saab, quant à elle, voit Dunia comme “un
film sur la recherche de soi et le droit d’une jeune fille, dans une
société arabe, de se réaliser. Dans le wahhabisme ou le salafisme,
de plus en plus présents en Égypte, la femme existe pour obéir.
Moi je la montre bien habillée, avec beaucoup de couleurs, de
la musique… L’excision est le point d’orgue de mon sujet dans
cette recherche de soi, mais ce n’est pas un film pathologique. J’ai
mis en valeur la sensualité, car c’est un sujet pénible. […] Après
le choc de la guerre d’Irak, il y a eu un repli incroyable des pays
arabes sur eux-mêmes. Le fondamentalisme a pris la place. Pour
moi, le corps dévitalisé de Dunia, c’est le corps dévitalisé de la
société arabe aujourd’hui, qui se plie au conformisme, ne réfléchit
plus, ne pense plus.” » – Jocelyne Saab, interviewée par RFI
« L’Immeuble Yacoubian est d’emblée un film rare. Adapté d’un
best-seller égyptien édité en 2002, le film bénéficie d’un budget
colossal. Résultat : une superproduction ambitieuse et bien faite,
une adaptation en bonne et due forme, avec moult mouvements
de caméra, fluides et virtuoses, des panoramiques et des prises de
vues au grand angle, une image léchée, une musique très orchestrée, des acteurs de haut vol. Une impression d’amplitude et de
maîtrise transpire de l’écran et se déploie, au-delà de l’exhibition
des moyens mis en œuvre, sur la narration, chorale et limpide,
entremêlant des histoires individuelles avec la grande histoire.
Chaque personnage file son destin sans en avoir conscience, sous
le regard omniscient du spectateur, qui décèle les potentiels liens
de cause à effet dans le pourquoi des parcours. Au départ, on s’attend à une grande fresque historique traversant les générations,
à des trajectoires sur la durée. Mais non : la saga se resserre sur
quelques années, et observe à la loupe une société complexe, en
mutation, par le biais d’une poignée de personnages. Elle aborde
ainsi la montée des extrémismes religieux, la fracture sociale,
l’absence de liberté sexuelle… À travers l’évolution de chacun, se
dessine en creux un portrait de l’Égypte moderne, cruel, frontal,
mais vif et palpitant. » – Fiches du cinéma
Sortie française 6 septembre 2006 Provenance de la copie
Jocelyne Saab Format 35 mm – 1.85 : 1 Production Catherine
Dussart Productions Coproduction Collection d’Artistes/Le
Cinématographe Productrice Jocelyne Saab Producteur
exécutif Ismail Mourad Scénario Jocelyne Saab Image
Jacques Bouquin Décors Jocelyne Saab Costumes Rabih
Kayrouz Son Fawzi Thabet Montage Claude Reznik Musique
Jean-Pierre Mas, Patrick Legonie – Avec Hanan Turk (Dunia),
Mohamed Mounir (Bechir), Aïda Riad (Inayate), Fathi
Abdelwahab (Mamdouh), Sawsan Badr (Arwa)…
Sortie française 23 août 2006 Distributeur Bac Films Format
35 mm – 1.85 : 1 Production Good News Group Coproduction
Good News 4 Films & Music Producteurs Sameh Gobran,
Adel Adeeb Producteur exécutif Nabil Sobhy Scénario Waheed
Hamed, d’après le roman d’Alaa El Aswani Image Sameh Selim
Décors Fawzy El Awamry Costumes Nahed Nassrallah Montage
Khaled Marei Musique Khaled Hammad – Avec Adel Imam
(Zaki El Dessouki), Nour El Sherif (Haj Azzam), Yousra (Christine),
Issad Younis (Dawlat El Dessouky), Ahmed Bedeir (Malak)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 75
ÉGYPTE
Le
Chaos
[HEYA FAWDA]
Femmes du Caire
[EHKY YA SCHEHERAZADE]
Youssef Chahine et Khaled Youssef – France/Égypte, 2007,
122 mn, coul
Yousry Nasrallah – Égypte, 2009, 135 mn, coul
Choubra, quartier cosmopolite du Caire. Hatem, un policier
véreux tient le quartier d’une main de fer. Tous les habitants
le craignent et le détestent. Seule Nour, une jeune femme
dont il convoite les faveurs, ose lui tenir tête. Mais elle
en aime un autre…
Hebba et Karim forment un couple de journalistes à succès,
jeunes, riches et beaux. Hebba anime un talk-show politique,
mais sa pugnacité dans la dénonciation de la misogynie et
de la violence conjugale met en danger la promotion
espérée par son mari…
« Dès les premières images du dernier film de Youssef Chahine,
le chaos dont les cinéastes égyptiens entendent entretenir le spectateur prend corps. Une scène d’émeute, durement réprimée,
ouvre ce long-métrage qui s’inscrit dans la plus pure tradition
du cinéma égyptien. Dénoncer les dérives de cette Égypte qu’il
aime tant, c’est l’un des exercices préférés de Youssef Chahine.
Le Chaos est l’allégorie d’un État miné par la corruption. Un
mal incarné par Hatem, policier véreux qui règne en maître
absolu sur le quartier populaire de Choubra, au Caire. L’homme
personnifie une Égypte rongée par l’impunité, où une minorité,
guidée par ses propres intérêts, décide pour une majorité brimée,
violentée et qui vit dans une pauvreté grandissante. Au milieu
de ce chaos, des femmes et des hommes se battent, mettent leur
jeunesse et leur fougue au service de l’avènement d’une Égypte
nouvelle. Youssef Chahine et Khaled Youssef dépeignent dans
leur œuvre toutes les facettes de la société égyptienne. Du parti
au pouvoir, qui en impose aux citoyens, aux islamistes qui sont
devenus pour les plus démunis la solution à tous leurs problèmes,
en passant par la jeunesse dorée égyptienne et les militants des
droits de l’homme. » – Afrik.com
« Illustrant à la fois les richesses et les ambiguïtés du cinéma populaire, le dernier film de Yousry Nasrallah reprend ouvertement les
articulations formelles et scénaristiques du mélo égyptien, mais en
l’emboîtant dans un propos réflexif complexe. Dans ce récit d’une
présentatrice de télévision, à qui son arriviste de mari demande de
modérer le ton politiquement critique de ses émissions, et dont le
plateau se transforme peu à peu en théâtre réaliste de la condition
des femmes en Égypte, le réalisateur adopte la posture irréaliste de
ce dont il va dénoncer les mécanismes : les couleurs télévisuelles,
l’utilisation prosaïque de clichés sur les rapports sociaux, un sens
du kitsch que les décors et les mouvements d’appareil soulignent
encore. Duplication des images entre écran et réalité, idéologie et
sincérité, cette ligne almodovarienne se teinte pourtant d’une tout
autre teneur, puisant aux Mille et Une Nuits l’enchâssement d’histoires et d’identifications qui, en dessinant un portrait de femme,
décline à chaque fois l’idée de l’amour comme échange marchand,
usufruit et possession. Si la légèreté du trait n’est pas l’objectif
du film, la logique du miroir et de l’inversion que sa mise en
scène exploite permet, dans un univers qui hésite entre soap opera
et tragédie nationale, de pointer combien la vie publique, dans
sa tendance à produire des histoires, est un fondamental moteur
d’aliénation, dont les femmes restent les objets et les victimes. » –
Positif
Sortie française 5 décembre 2007 Distributeur Tadrart Films
Format 35 mm – 1.85 : 1 Production 3B Productions/Misr
International Films Coproduction France 2 Cinéma
Producteurs Gabriel Khoury, Jean Bréhat Scénario Nasser
Abdel-Rahman Image Ramsis Marzouk Décors Hamed Hemdan
Costumes Monia Fath El Bab Son Mostafa Aly, Dominique
Hennequin Montage Ghada Ezzdine Musique Yasser AbdelRahman – Avec Khaled Saleh (Hatem), Menna Shalaby (Nour),
Youssef El Sherif (Cherif), Hala Sedky (Wedad), Hala Fakher
(Bahia)…
76 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
Sortie française 5 mai 2010 Distributeur Pyramide Format
35 mm – 1.85 : 1 Production Misr Cinéma Producteur Kamel
Abou Ali Scénario Wahid Hamed Image Samir Bahsan
Direction artistique Mohamed Atteya Costumes Dina Nadeem
Son Ahmed Gaber Montage Mona Rabi Musique Tamer
Karawan – Avec Mona Zakki (Hebba), Mahmoud Hemeida
(Adham), Hassan El Raddad (Karim), Sawsan Badr (Amany),
Rihab Al-Gamal (Safaa)…
ÉGYPTE
18 Jours [ETAMANTASHAR YOM]
Les Femmes [CAIRO 678]
du bus 678
Film collectif (10 courts métrages) – Égypte, 2011, 125 mn, coul
Mohamed Diab – Égypte, 2011, 100 mn, coul
Le Caire, du 25 janvier au 11 février 2011. Histoires de
citoyens ordinaires pris dans des événements extraordinaires.
Tous ces personnages, plus vrais que nature, ni bons, ni
méchants, vivent dans l’instant des événements qui paraissaient inimaginables et changeront leurs vies pour toujours…
Le Caire, fin des années 2000. Trois jeunes femmes en butte
au harcèlement sexuel finissent par se rejoindre : Fayza, qui
endure quotidiennement les attouchements masculins lors
de ses trajets en bus ; Nelly, révoltée par la phallocratie
ambiante ; Seba, bourgeoise prise dans la cohue surexcitée
d’un stade…
« Pendant le tournage des films qui composent ces18 jours, “la
foule était accueillante, il y avait une ambiance bon enfant”, se
souvient Yousry Nasrallah, “malgré des casseurs de Moubarak
venus parfois corser les choses, et tabasser. On craignait surtout
que la garde présidentielle, fidèle au Président, ne provoque une
tuerie”. Sortant d’une “dictature où la culture est surtout là pour
vous faire peur et pour que vous restiez petit”, 18 jours montre les
échos d’une gigantesque révolution sur des micro-destins égyptiens. Le collectif de cinéastes n’est pas spécialement représentatif
d’une quelconque nouvelle génération de réalisateurs égyptiens.
Certains avaient commencé la révolution il y a longtemps, en
rénovant des formes. Ils ont louvoyé depuis belle lurette entre
les feux croisés des censures qui modèlent une grande partie du
cinéma égyptien aujourd’hui. Au final, “je ne sais pas vraiment
ce que ça veut dire, ‘cinéma révolutionnaire’, s’interroge-t-il à
voix haute. J’ai tendance à penser que tout bon film l’est forcément.” » – Rue 89
« En 2008, a eu lieu en Égypte le tout premier procès pour harcèlement sexuel. Le harcèlement sexuel est l’un des fléaux du pays,
et c’est aussi un tabou dont personne ne parle. Il prospère sur
trois facteurs : la foule et la promiscuité dans les espaces publics ;
la pauvreté, qui empêche les jeunes couples d’acheter un logement et crée une grande frustration sexuelle ; enfin, la honte qui
pèse sur les victimes. Elles craignent de dénoncer leur agresseur
et le harcèlement est nié. À l’époque une enquête avait montré
que deux tiers des hommes s’en étaient rendus coupables d’une
manière ou d’une autre et que 98 % des femmes étrangères de
passage en Égypte et 83 % des femmes égyptiennes en avaient
été victimes. L’une d’entre elles, Noha Rushdi a osé affronter son
agresseur et l’a d’ailleurs fait condamner à 11 ans de prison. J’ai
suivi le procès, j’ai entendu les quolibets dont elle était victime à
l’audience et j’ai ensuite conduit des interviews dans mon entourage auprès de femmes qui généralement gardaient le silence.
J’ai été stupéfait de ce que je découvrais ! J’en ai tiré le scénario
d’un court-métrage, qui est à peu près l’histoire de Fayza, telle
qu’on la voit dans le film terminé. Je l’ai proposé à Boushra, une
chanteuse très populaire, et c’est elle qui m’a proposé d’en faire
un long-métrage et de le produire. » – Mohamed Diab
Sortie française 7 septembre 2011 Distributeur Eurozoom
Format DCP – 1.85 : 1 Production Lighthouse Films
Producteurs Ehab El Koury, Amin El Masry, Fedi Fahim,
Mohamed Hefzy, Salma Osman Scénario Sherif Arafa, Yousri
Nasrallah, Mariam Abou Ouf, Marwan Hamed, Mohamed Ali,
Kamla Abu Zikry, Sherif El Bendary, Ahmad Abdallah, Khaled
Marei, Ahmed Alaa Image Ahmed Morsi, Ahmed Yussef, Victor
Credi, Islam Abd El Samei, Ayman Abu El Makarem, Youssef
Labib, Ahmed Mostafa, Tarek Hefny Montage Dina Farouk,
Mona Rabie, Salma Osman, Hassan El Touny, Hisham Saqr,
Ahmed Hafez, Dalia El Nasser, Khaled Marei – Avec Ronit
Elkabetz (Vivianne), Albert Illiouz (Meir), Yaël Abecassis (Lili),
Simon Abkarian (Eliahou), Hana Laszlo (Ita)…
Sortie française 30 mai 2012 Distributeur Pyramide Format
DCP – 1.85 : 1 Production Dollar Film/New Century Production
Productrice Sarah Goher Production exécutive Boushra Rozza
Scénario Mohamed Diab Image et son Ahmed Gabr Direction
artistique Nihal Farouk Montage Amr Salah El Din Musique
Hany Adel – Avec Nahed El Sebaï (Nelly), Boushra Rozza
(Fayza), Nelly Karim (Seba), Omar El Saeed (Omar), Bassem
Samra (Adel)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 77
Les
Tortues volent aussi
[LAKPOSHTHA HÂM PARVAZ MIKONAND]
Irak
Bahman Ghobadi – Iran/Irak, 2004, 95 mn, coul
Les Tortues volent aussi
Kilomètre zéro
Dol ou la vallée des tambours
Les Murmures du vent
My Sweet Pepper Land
Daech : naissance d’un État terroriste
La Section « White »
Dans un village du Kurdistan irakien, les habitants cherchent
une antenne pour capter des nouvelles, à la veille de
l’attaque des Américains en Irak… Un garçon mutilé, venu
d’un autre village et accompagné de sa sœur, le prédit :
la guerre approche…
« Un film fort, dur, en forme de cri, dédié à tous les enfants,
victimes des guerres et des dictatures. “Ce film est l’expression
d’une souffrance personnelle, explique le réalisateur. Quand je
regarde la situation du Kurdistan, un sentiment de colère m’envahit. Ce pays est, depuis toujours, une des zones de prédilection
des poseurs de mines. Elles font partie du décor. Et il y en a tant
que, pour les enfants, c’est devenu un terrain de jeu. Les blessures
et les handicaps sont tellement courants que les enfants y sont
insensibles. Actuellement, trois personnes par jour sautent sur
des mines datant de la guerre irano-irakienne. Pendant le tournage,
un des gamins a ramené chez lui une mine pour en faire un
vase. En tentant de la désamorcer, elle a explosé…” Bahman
Ghobadi a été l’assistant d’Abbas Kiarostami sur Le Vent nous
emportera, avant de passer lui-même à la réalisation (Un temps
pour l’ivresse des chevaux, Les Chants du pays de ma mère).
À la différence des cinéastes iraniens qui usent de symboles et
de sous-entendus, Bahman Ghobadi, le Kurde, ne suggère pas, il
montre et ose aborder de façon explicite des sujets tabous tels que
le suicide, le viol – ce dernier étant “un fléau créé par le régime
dictatorial de Saddam Hussein. Il y a eu 60 000 cas répertoriés,
un chiffre bien inférieur à la réalité.” » – Le Figaro
Sortie française 23 février 2005 Distributeur Bac Films Format
35 mm – 1.85 : 1 Production MIJ Films Producteurs Hamid
Karim Batin, Bahman Ghobadi, Babak Amini, Hamid Ghavami
Producteur exécutif Abbas Ghazali Scénario Bahman Ghobadi
Image Shahriar Assadi Décors Bahman Ghobadi Son Bahman
Ardalan Montage Moustafa Khergheposh, Hayedeh Safiyari
Musique Housein Alizadeh – Avec Soran Ebrahim (Kak Satellite),
Avaz Latif (Agrin), Saddam Hossein Feysal (Pashow), Hiresh
Feysal Rahman (Hengov), Abdol Rahman Karim (Riga)…
78 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
IRAK
Kilomètre zéro
Dol ou la vallée [DOL]
des tambours
Hiner Saleem – France/Kurdistan, 2005, 89 mn, coul
Hiner Saleem – France/Irak, 2006, 90 mn, coul
Février 1988, en pleine guerre Iran-Irak. Ako, un jeune
Kurde, rêve de fuir le pays. Enrôlé de force dans l’armée de
Saddam Hussein, il est envoyé au front où il reçoit l’ordre
de ramener la dépouille d’un martyr de guerre à sa famille…
Azad est revenu au village pour voir sa fiancée. Obligé
de fuir après avoir blessé un militaire turc, il traverse
le Kurdistan irakien, puis iranien, partageant ainsi le destin
d’autres Kurdes...
« En présentant le parcours d’un jeune soldat kurde à travers
l’Irak, le réalisateur Hiner Saleem, lui-même d’origine kurde,
exilé en France durant la dictature de Saddam Hussein, construit
un film aux accents autobiographiques, qui, s’il se veut apolitique, n’en est pas moins une vive dénonciation de l’absurdité
du conflit Iran-Irak à la fin des années 1980, et plus particulièrement du racisme et des massacres perpétrés par les Arabes
irakiens contre les Kurdes durant la guerre. Alors même que
cette guerre n’a aucun sens pour le peuple kurde, comme le
souligne le personnage d’Ako à plusieurs reprises, embrigadé de
force par l’armée irakienne, Hiner Saleem joue avec les symboles
officiels du pouvoir de Saddam Hussein pour les ridiculiser et
les désacraliser. C’est particulièrement flagrant avec le leitmotiv
de la statue de Saddam, transportée sur un camion, dont les
apparitions récurrentes et intempestives semblent représenter
l’emprise idéologique permanente que le dictateur exerce sur son
pays. Figure obsessionnelle qui imprègne le paysage et suit les
personnages tout au long de leur périple, l’utilisation ponctuelle
de la statue comme élément discordant et signifiant dans la trame
du récit fait écho au burlesque développé par le réalisateur tout
au long du film. » – Critikat
« Pour tenter d’expliquer le titre du film, il n’est pas inutile de
savoir qu’en kurde “Dol” veut dire à la fois “vallée” et “tambour”
(d’où le sous-titre français). Mais, il signifie aussi “manœuvre
frauduleuse pour s’approprier illégalement le bien d’autrui”.
Le rapprochement de ces deux significations nous éclaire bien
sur le sujet de Dol : le vol de la vallée, le destin tragique d’un
peuple spolié de sa terre. Le film s’ouvre ainsi sur un magnifique
panoramique montrant la terre aride et ocre de la vallée de Balliova ; lequel, avec une forme de noire ironie, s’achève sur un
drapeau turc, sous lequel est inscrit “Heureux celui qui se dit
Turc”. Depuis son premier film (Vive la mariée... et la libération
du Kurdistan, 1998), Hiner Saleem s’est fait le porte-parole de
son peuple, en compensant parfois la gravité de son propos par
un style haut en couleur, proche de celui de Kusturica. Ici, le
propos est beaucoup plus ouvertement politique et revendicatif.
En effet, depuis la chute de Saddam Hussein (qu’il avait évoquée
dans le récent Kilomètre zéro), le peuple kurde vivant en Irak est
enfin représenté à l’Assemblée. Ce qui est loin d’être le cas, par
exemple, en Turquie, où la langue kurde est toujours interdite,
et son usage passible de prison. » – Fiches du Cinéma
Sortie française 14 septembre 2005 Distributeur Memento
Films Distribution Format 35 mm – 1.85 : 1 Production
Memento Films Production/Hiner Saleem Production/La
Cinéfacture Producteurs Hiner Saleem, Alexandre Mallet-Guy,
Émilie Georges Producteur associé Fabrice Guez Scénario
Hiner Saleem Image Robert Alazraki Décors Fakher Sherwani
Son Fredi Loth Montage Anna Ruiz Musique Nikos Kipourgos,
Yan Axin – Avec Nazmî Kirik (Ako), Eyam Ekrem (le chauffeur),
Belcim Bilgin (Selma), Ehmed Qeladizeyi (Sami), Nezar
Selami (Adnan)…
Sortie française 24 janvier 2007 Provenance de la copie
Hiner Saleem Format DVD – 1.85 : 1 Production Hiner Saleem
Production/Mitosfilm Coproduction NovoCiné Producteur
Hiner Saleem Producteur associé Michel Loro Scénario Hiner
Saleem Image Andreas Sinaros Décors Saman Sabunci
Costumes Belçim Bilgin Son Behmen Erdelani, Stéphane
Derocquigny Montage Dora Mantzoros, Bonita Papastathi
Musique Ösgür Akgül, Mehmet Erdem, Vedat Yildrim – Avec
Nazmî Kirik (Azad), Belçim Bilgin, Omer Çiaw Sin, Rojîn
Ulker, Tarik Akreyî, Ciwan Haco…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 79
IRAK
Les Murmures [SIRTA LA GAL BA]
du vent
My Sweet Pepper Land
Shahram Alidi – Irak, 2009, 77 mn, coul
Hiner Saleem – Irak/Allemagne/France, 2013, 100 mn, coul
Mam Baldar exerce le métier de postier dans différents
villages de montagne du Kurdistan irakien. Un postier pas
comme les autres : il transmet des sons et des paroles
enregistrés sur cassettes…
Dans un village perdu, Baran, officier de police fraîchement
débarqué, va tenter de faire respecter la loi. Cet ancien
combattant kurde doit désormais lutter contre Aziz Aga,
le caïd local. Il fait la rencontre de Govend, l’institutrice, une
jeune femme belle et insoumise...
Le film de Shahram Alidi, récompensé au Festival du film d’Histoire 2009, laisse des traces : des paysages au charme désertique et
lunaire de bout du monde, une opiniâtreté chevillée au corps de
nombreux personnages, la barbarie sans nom d’une guerre volontairement ignorée en Occident, et puis la résistance qui emprunte
les ondes hertziennes via les radios clandestines et les messages
sur K7 qui peuvent se résumer au cri d’un nouveau-né résonnant
entre les montagnes… Il y a effectivement une forme de poésie
humaniste qui se dégage de ce film irakien qui dénonce avec sévérité les crimes de guerre de Saddam Hussein. Si vous voulez
changer d’univers, de paysages, d’époque, de culture, mais aussi
de style cinématographique, alors venez écouter Les murmures
du vent… – François Aymé
« Cinq années se sont écoulées depuis l’idée première de mon film,
au cours desquelles j’ai commencé à écrire le script, et réfléchi souvent sur la brièveté de la vie humaine, de l’extrême injustice qu’est le
fait de la raccourcir, très spécialement pour ce qui concerne l’enfant.
Lorsque l’équipe du film arriva dans l’immense champ de tombes,
dans le désert où Saddam Hussein fit enterrer ses victimes, j’ai pensé
à tous ces rêves d’enfants ensevelis sous nos pieds et archivés pour
toujours sous le soleil torride du désert. » – Shahram Alidi
Hiner Saleem, cinéaste d’origine kurde, révélé notamment au
début des années 2000 avec une comédie sociale réjouissante (Vodka
Lemon) nous surprend avec bonheur avec My Sweet Pepper Land.
Il a pris le parti de tourner un… western, considérant avec justesse
que le Kurdistan d’aujourd’hui a un rapport avec la loi qui n’est
pas sans rappeler celui du Far West américain. Cette idée, il la
décline à l’envi tout au long du film : la trame scénaristique héroïque est connue mais efficace. Il va sans dire que Golshifteh Farahani n’a strictement rien à envier aux stars hollywoodiennes des
années 1950. Et grâce à ses judicieux choix de mise en scène,
Hiner Saleem réussit à nous intéresser à une région en proie aux
trafics de médicaments, d’armes, aux perpétuels abus de pouvoir
ainsi qu’au ravageur machisme traditionnel. Le réalisateur alterne habilement le premier et le second degré, notamment dans
une « savoureuse » scène kafkaïenne d’exécution capitale qui
ouvre le film. Ce singulier mélange d’humour et de gravité donne
au film un charme entêtant redoublé par un scénario bien huilé.
Plus qu’une curiosité, My Sweet Pepper Land allie savamment
plaisir du spectateur et parabole politique. – François Aymé
Sortie française 31 mars 2010 Distributeur Les Acacias Format 35 mm – 2.35 : 1 Production Le Gouvernement régional
du Kurdistan Coproduction TAW Films Producteur Shahram
Alidi Scénario Shahram Alidi Image Touraj Aslani Décors
Shahram Alidi Son Asghar Abgoun Montage Hayedeh Safiyari
– Avec Omer Chawshin (Jalil, dit Mam Baldar), Maryam Boubani (l’épouse de Mam Baldar), Fakher Mohammad Barzani
(Kaka Shamal), Valid Marouf Jarou (l’invité de la radio), Moharam Hossein Ghader (l’employé de la radio)…
80 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
Sortie française 9 avril 2014 Distributeur Memento Films
Format DCP – 1.85 : 1 Production Agat Films & Cie/Rohfilm/
Chaocorp /Arte France Cinéma Producteurs Marc Bordure,
Robert Guédiguian Coproducteurs Benny Drechsel, Karsten
Stöter, Hiner Saleem, Arnaud Bertrand, Dominique Boutonnat,
Hubert Caillard Scénario Hiner Saleem Image Pascal Auffray
Son Miroslav Babic Décors Fehmi Salim Costumes Ceylan
Remezan Montage Juliette Haubois Musique Setrak Bakirel,
Ozan Garip Sahin – Avec Golshifteh Farahani (Govend),
Korkmaz Arslan (Baran), Suat Usta (Reber), Feyyaz Duman
(Jaffar), Tarik Akreyî (Aziz Aga)…
IRAK
Daech : naissance d’un
État terroriste
La Section « White »
Jérôme Fritel – France, 2014, 85 mn, coul, doc
Yuri Maldavsky et Timothy Grucza – France, 2014, 85 mn, coul,
doc
Après un mois d’investigations en Irak, cette enquête
révèle, pour la première fois, le visage global et effroyable
de Daech : une organisation djihadiste aussi riche qu’un État
africain, devenue une multinationale de la terreur…
Une analyse de la guerre en Irak à travers le quotidien
de la section du lieutenant Anderson : au départ de jeunes
soldats enthousiastes, rapidement devenus des vétérans
de guerre endurcis et cyniques…
« L’État islamique en Irak et au Levant, Daech en arabe, contrôle
aujourd’hui un territoire grand comme la moitié de la France, à
cheval sur deux pays, la Syrie et l’Irak. Sa fortune est comparable à
celle d’un pays africain. L’organisation est devenue une sorte d’État
hors la loi qui attire militants et combattants du monde entier.
Inconnue il y a un an, cette start-up du terrorisme, née en Irak
sous l’occupation américaine, est devenue une multinationale de
la terreur. Comment est apparue Daech et quel est son modèle
économique ? Peut-elle encore étendre son territoire ? Ce film
donne la parole à ceux qui, de gré ou de force, travaillent sous la domination de cette organisation et décrit le fonctionnement de cet
État autoproclamé. Les responsables actuels et passés du gouvernement irakien expliquent comment Daech dépouille l’Irak d’une
partie de ses recettes. Par l’intermédiaire des établissements situés
sur son territoire, l’organisation accède également aux réseaux bancaires internationaux. Cette enquête montre que derrière ses succès
militaires et sa puissance de feu, Daech affiche le visage d’une vaste
entreprise commerciale, fonctionnant un peu à l’image des cartels
du crime. Enfin, plusieurs experts – Hubert Védrine, ancien ministre
des Affaires étrangères, Romain Caillet, chercheur au Centre français du Proche-Orient de Beyrouth, spécialiste reconnu des mouvements islamistes, et Jean-Charles Brisard, enquêteur économique
auteur d’un rapport complet sur l’argent de Daech – analysent
les conséquences géopolitiques de l’apparition de ce nouvel État
terroriste. » – ARTE
« Yuri Maldavsky s’est spécialisé dans la couverture des conflits
à travers le monde. Après avoir travaillé comme journaliste et
cameraman pour les magazines d’ARTE, Canal Plus ou France 2,
son premier documentaire Section White se présente comme une
immersion aux côtés des forces américaines à Bagdad. Centré
sur quatre soldats de la section du lieutenant Anderson, le film
va bien au-delà de leur histoire individuelle. Il va remporter
le prix “Banff World Television Awards – Best Feature Length
Documentary”. » – Huffington Post
« Nous avons passé plusieurs mois dans le sud de Bagdad en
compagnie de la section “White” de la 17e division de cavalerie de
l’armée américaine. Avec deux caméras, nous les avons filmés tout
au long de leur mission, jusqu’à leur retour dans leurs familles
au Texas. Nous livrons ici un portrait intime de la guerre en
Irak et des hommes derrière les soldats. Les quatre soldats de la
section Anderson sont les personnages principaux de ce film.
C’est leur histoire que l’on raconte ici, mais ce pourrait être celle
des 140 000 autres soldats actuellement en poste en Irak. Depuis
le transfert symbolique du pouvoir au peuple irakien jusqu’au
jour sanglant de l’élection et aux retrouvailles des soldats en
Amérique avec leurs familles, nous avons suivi ces hommes.
De jeunes soldats enthousiastes, ils sont devenus vétérans de
guerre, endurcis et cyniques : ces hommes ne seront plus jamais
comme avant. » – Yuri Maldavsky
Première diffusion française 10 février 2015 [Arte] Distributeur Pac Presse Format DVD – 1.85 : 1 Production Pac Presse/
Arte/Troisième Œil Productions Producteurs Pierre-Antoine
Capton, Patricia Chaira Auteur Jérôme Fritel Image Stephan Villeneuve Son Franck Rupolo Montage Seamus Haley Musique
BAM Library
Première diffusion française 26 janvier 2006 [France 2]
Distributeur Compagnie des Phares & Balises Format DVD –
1.37 : 1 Production Compagnie des Phares & Balises
Avec la participation de France 2, du Centre national de la
Cinématographie, de la RTBF Bruxelles Auteurs Yuri Maldavsky,
Timothy Grucza, Lizi Gelber
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 81
La
Vache
[DER LETZTE MANN]
Dariush Mehrjui – Iran, 1969, 105 mn, NB
Iran
La Vache
Le Facteur
Le Cycle
Où est la maison de mon ami ?
Le Ballon blanc
Le Goût de la cerise
Le Miroir
Le Cercle
Deux Anges
Sang et or
Les Enfants de Belle Ville
Hors jeu
Une nuit
La Fête du feu
Persépolis
À propos d’Elly
Les Chats persans
Au revoir
Une séparation
Les 112 Jours de Khomeiny en France
Nahid
Taxi Téhéran
La vache de Masht Hassan représente tout pour lui et pour
son village. Mais un jour, elle disparaît. Pour Masht Hassan,
c’est le monde qui s’effondre…
« Pour les Européens, Dariush Mehrjui pourrait être au cinéma
iranien ce qu’Arturo Ripstein a longtemps été au cinéma mexicain : d’abord un nom familier des festivaliers qui, après la sensation produite par La Vache en 1971, n’ont guère prêté attention à
ce cinéaste abonné autant aux festivals qu’aux interdictions sous
les différents régimes de son pays. Mais c’est un nom qui n’arrête
pas de revenir sur les lèvres des Iraniens quand ils parlent cinéma.
Or, à voir la ferveur, il se pourrait que Mehrjui soit en Iran plus
populaire encore que les deux autres piliers, Kiarostami et Makhmalbaf. Ses débuts en Iran furent pareillement tiraillés : ne pouvant monter un projet personnel, une histoire d’amour basée
sur un vieux conte persan, il tourna Diamond 53, une parodie
de James Bond ! Son deuxième film fut l’un des premiers à être
subventionnés par le gouvernement iranien, ce qui ne l’empêcha
pas d’être interdit. On se demande pourquoi. Peut-être le Shah
ne tenait-il pas à ce que son pays passe pour rétrograde. La Vache
se passe entièrement dans un village de boue séchée ; l’histoire
pourrait être tournée par Glauber Rocha ou Idrissa Ouédraogo,
tellement le monde extérieur reste invisible. Cette fable atroce,
mais aussi très drôle, est une réussite totale : la vie de village,
l’interaction entre les habitants, le vacher qui préfère jouer la
vache plutôt que de reconnaître sa mort… » – Libération
Ressortie française 4 juin 2014 Distributeur Splendor Films
Format DCP – 1.87 : 1 Producteur Dariush Mehrjui Scénario
Dariush Mehrjui, Gholam Hossein Saedi Image Fereydon
Ghovanlou Son Hormouz Farhat Montage Dariush Mehrjui
Musique Hormouz Farhat – Avec Ezzatolah Entezami
(Masht Hassan), Mahin Shahabi (la femme d’Hassan),
Ali Nassirian (Islam), Jamshid Mashayekhi (Habbas), Jafar
Vali (Kadkhoda)…
82 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
IRAN
Le Facteur [POSTCHI]
Le Cycle [DAYEREH MINA]
Dariush Mehrjui – Iran, 1973, 115 mn, NB
Dariush Mehrjui – Iran, 1975, 101 mn, NB
Dans un village du nord de l’Iran, Taghi, marié à une belle
femme, est impuissant. Pour pouvoir payer ses dettes,
il travaille comme facteur, comme serveur chez un grand
propriétaire de la région et il joue également au loto
national. Un jeune ingénieur séduit la femme de Taghi...
Ali et son père déménagent dans l’espoir de trouver un
hôpital qui puisse soigner le vieil homme. Mais Ali n’a pas
d’argent. Il est contraint de travailler pour un médecin
impliqué dans un trafic de sang…
« Dariush Mehrjui a obtenu le Prix de la critique internationale
à Venise en 1968 avec La Vache. Le Facteur est son troisième long
métrage et c’est une œuvre très intéressante. Le héros, Taghi est
une sorte de Fernandel iranien. Il en a la douceur abrutie, les éclats
de gaieté et de colère. Il est endetté jusqu’au cou, mais poursuit
tenacement le rêve de gagner à la loterie. Tous, autour de lui,
rêvent aussi d’argent – d’argent facile. Mehrjui filme un monde
délirant, perverti par ses propres tares, bouleversé par les modes
occidentales mal assimilées, le capitalisme et le néo-colonialisme. Un monde grotesque et pourtant profondément humain,
parfois bouleversant, souvent très drôle. Mehrjui sait allier le
grotesque, le réalisme, le comique et le lyrisme. Le courage du
réalisateur est aussi évident que son talent. Certaines séquences
sont admirables. Celle du repas de cérémonie qui commence
dans un extrême raffinement et se termine en ripaille. Celle où
Taghi, exaspéré de douleur, vient au chantier dans l’intention de
tuer son patron, hurlant au milieu des machines. Celle où, réfugié
dans les champs immenses, il trouve, enfin, une paix précaire. » –
La Revue du cinéma/Image & Son, La Saison cinéma 1972.
« En Iran Le Cycle fut radicalement interdit par le censure et on
comprend pourquoi : jamais Téhéran n’a été montré de façon si
horrible, un champ d’épandage industriel et humain indescriptible, avec une noirceur de regard digne de Buñuel, Ripstein, ou
des premiers films de Kieslowski. Le film est étonnant et laid
comme ce qu’il montre : l’hôpital est une métaphore évidente
pour la corruption d’un régime qui n’en a plus pour longtemps,
mais le film marche complètement grâce au jeune acteur, extraordinaire Terence Stamp persan, dont l’angélisme initial ne rend
que plus frappante la façon dont il “s’adapte”, devenant une sorte
de lieutenant/protégé d’un mafioso du sang. Il faut voir cette
séquence extraordinaire quand il s’en va revendre des restes de
soupe de l’hosto dans les bidonvilles, pour finalement ramener
junkies et clodos à la banque du sang. Tout dans ce film est étonnant, des infirmières à minijupes jusqu’à la façon de conduire
suicidaire des habitants de Téhéran. La métaphore est bien sûr
en béton armé, le vampirisme de la prise de sang revenant fréquemment chez Mehrjui ; et il y a déjà la stridence de ses films
à venir. Mais si Le Cycle est difficile à aimer, il est encore plus
difficile à ignorer. C’est la Promesse à l’aube de la Révolution
islamiste. À laquelle Mehrjui participera initialement. Mais on le
trouve bientôt à Paris, réalisant un documentaire sur Rimbaud
pour la télé française. » – Libération
Distributeur Mamad Haghighat Format Blu-Ray Production
Studio Missaghien Producteur Mehdi Maysaghieh Scénario
Dariush Mehrjui Image Houshang Baharlou Son et musique
Hormoz Farhat Montage Talat Mirfendereski – Avec Ali
Nassirian (Taghi), Ezat Entezami (Niyatollah), Jaleh Sam
(Mounir), Ahmad Reza Ahmadi (le neveu de Niyatollah),
Bahman Fersi...
Première diffusion française avril 1982 [FR3] Provenance de
la copie Mamad Haghighat Format Blu-Ray – 1.66 : 1 Production
Telfilm Scénario Gholam-Hossein Saedi, Dariush Mehrjui Image
Houshang Baharlou Son Robert Grigorians Montage Talat
Mirfendereski – Avec Saeed Kangarani (Ali), Ezzatollah Entezami (le docteur Sameri), Fourouzan (Zahra), Bahman Fersi (le
docteur Davoudzadeh), Esmaïl Mohammadi (le père)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 83
IRAN
Où est [KHANEH-YE DOOST KOJAST ?]
la maison de mon ami ?
Le Ballon blanc
Abbas Kiarostami – Iran, 1987, 85 mn, coul
Jafar Panahi – Iran, 1995, 85 mn, coul
En sortant de l’école, Ahmad, petit Iranien de huit ans,
a emporté par mégarde le cahier de son ami Nématzadé.
Il doit à tout prix le lui rendre. Bravant l’interdiction de sa
mère, Ahmad s’enfuit pour le retrouver, mais il cherche
en vain la maison de son ami…
Razieh veut un poisson rouge pour la nouvelle année.
Réticente à lui donner l’argent, sa mère finit par céder et lui
confie un billet dont elle devra ramener la monnaie. Mais en
allant acheter son poisson, la petite fille perd le billet…
« C’est bel et bien de suspense qu’il s’agit ici, parfois aux limites
du cauchemar. Le très grand charme de ce petit film au budget
aussi ténu que son récit réside dans son obstination à ne jamais
perdre de vue la gravité de cet enjeu et à se tenir constamment
à hauteur du regard de l’enfant. Le temps (compté) et l’espace
(frénétiquement arpenté) ont ici une épaisseur rare, exacerbée.
Les va-et-vient incessants du gosse, son essoufflement, ses peurs,
son agacement, son désarroi perplexe face à l’incompréhension
et l’apathie pachydermique des “grands”, composent la matière
du film, tout autant que les épreuves et fausses pistes qui jalonnent sadiquement son parcours » – La Revue du Cinéma
« Les femmes accablées de besognes ménagères, les hommes imbus
de leur autorité, n’écoutent pas ce que disent, ce que demandent les
enfants. Cette “surdité” des adultes, la solitude qui en résulte pour
les gamins, c’est le véritable sujet du film. L’errance de l’écolier
prend un caractère initiatique. De bizarres personnages sortent
de la nuit, puis s’effacent. L’affaire du cahier devient un suspense
(avec de l’humour) et se termine, discrètement, sur une note
sensible. C’est beau, attachant » – Le Monde
« Dès la découverte du Ballon blanc, son premier long métrage
aussitôt consacré par la prestigieuse Caméra d’or à Cannes, deux
évidences s’imposent à propos de Jafar Panahi. D’une part, on
a enfin trouvé un réalisateur capable de reprendre le flambeau,
non pas à la place, mais aux côtés d’un des plus grands cinéastes
vivants, Abbas Kiarostami. Panahi a été son élève et son assistant,
c’est Kiarostami qui lui met le pied à l’étrier, cela serait anecdotique s’il ne se jouait là une belle et singulière aventure de cinéma
(qui ne concerne pas seulement, tant s’en faut, le seul cinéma
iranien). Avec pour personnages principaux les interprètes les
plus difficiles à bien filmer, des enfants, Panahi démontre sa sensibilité, sa précision, son humour, sa totale absence de mièvrerie
ou de complaisance. Au plus près de la réalité d’une situation
quotidienne, il sait à la fois en respecter l’authenticité et en faire
un conte fantastique et une fable morale. En cela il est bien le jeune
alter ego de Kiarostami. Mais d’autre part, on perçoit d’emblée
la personnalité originale du cinéaste, qui ne se contente pas de
briller à la suite de son mentor. Le rapport aux lieux de la ville, un
goût pour l’abstraction ou le côté extrême de certaines situations
commencent de dessiner l’identité propre de Panahi, identité qui
s’affirmera avec les films suivants. » – Cahiers du Cinéma
Sortie française 21 mars 1990 Distributeur Les Films du
Paradoxe Format DCP – 1.66 : 1 Production Institut pour le
développement intellectuel des enfants et des jeunes adultes
Producteur Ali Reza Zarin Scénario Abbas Kiarostami Image
Farhad Saba Décors Reza Nami Costumes Hassan Zahidi
Son Jahangir Mirshekari, Behrouz Moavenian, Asghar Shahverdi Montage Abbas Kiarostami Musique Amine Allah Hessine –
Avec Babak Ahmadpoor (Ahmad), Ahmad Ahmadpoor
(Mohamed), Kheda Barech Defai (l’instituteur), Iran Otari
(la mère), Ait Ansari (le père)…
84 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
[BADKONAKE SEFID]
Sortie française 6 décembre 1995 Format DVD – 1.66 : 1
Production Ferdos Films Producteur Kurosh Mazkouri
Producteur exécutif Foad Nour Scénario Abbas Kiarostami sur
une idée de Jafar Panahi et Parviz Shahbazi Image et décors
Farzad Jadat Montage Jafar Panahi – Avec Aida Mohammadkhani (Razieh), Mohsen Kafili (Ali), Fereshteh Sadr Orfani
(la mère), Anna Bourkowska (la vieille dame), Mohammad
Shahani (le soldat)…
IRAN
Le
Goût de la cerise
[TAM E GUILASS]
Le
Miroir
[AYNEH]
Abbas Kiarostami – Iran, 1997, 99 mn, coul
Jafar Panahi – Iran, 1997, 95 mn, coul
Baadi recherche un individu dans le besoin pour une mission
très spéciale. Au cours de sa quête, il rencontre un soldat,
un étudiant en théologie et un gardien de musée, vivant tous
à la limite de la marginalité. Chacun va réagir différemment
à sa proposition…
Parce que sa mère n’est pas venue la chercher à la sortie
de l’école, Mina, une petite fille, décide de faire seule le
chemin du retour, sans pourtant connaître précisément son
adresse. Commence pour elle un long périple…
« Kiarostami inscrit sa démarche dans un mouvement cinématographique plus large dont il redéfinit moralement les contours :
le cinéma sert à raconter les souffrances des classes pauvres, à
montrer des violences invisibles, des beautés cachées de la vie.
En 1997, Le Goût de la cerise obtient la Palme d’or au Festival de Cannes, qui distingue ainsi une œuvre plus sobre, plus
dépouillée, plus libre, et toujours plus masquée derrière le minimalisme de l’intrigue et du découpage. L’inquiétude du personnage principal traduit le désarroi de beaucoup de gens en Iran, où
les actes de suicide augmentent depuis quelques années, sans que
pour autant les raisons de son geste soient jamais évoquées précisément. La fièvre monte à Téhéran et à Paris pendant les mois
d’avril et de mai 1997 car le film doit arriver à Cannes, mais les
autorités ne veulent pas le lâcher. Cannes insiste et finalement
obtient gain de cause : le premier jour du festival, une copie arrive
en France et, comme dans un film de Kiarostami, tout se termine
pour le mieux. Le film obtient la Palme d’or, plus grand succès de
tous les temps pour le cinéma iranien. Kiarostami est ainsi sacré
porte-drapeau du cinéma iranien dans le monde, mais c’est en
France qu’il obtient la plus grande reconnaissance. À l’occasion
de la sortie du Goût de la cerise le 26 novembre 1997, une salle
de cinéma de Paris, Le Quartier Latin, est baptisée à son nom. »
– Mamad Haghighat, Histoire du cinéma iranien. 1900-1990
« Dans Ceci n’est pas un film, filmé dans l’appartement de Téhéran
où il était alors assigné à résidence, Jafar Panahi revenait sur quelques images de sa carrière qu’il regardait sur son magnétoscope.
L’une d’elles, sensationnelle, donnait très envie de voir Le Miroir,
une œuvre jusqu’alors invisible. La scène d’ouverture de ce film
est une petite merveille. Dans un magnifique mouvement panoramique, la caméra de Jafar Panahi enregistre la vie qui s’engouffre
dans un carrefour : volée de mouettes, trafic monstrueux, piétons
et voitures qui se disputent le passage et retour sur Mina, esseulée.
Poupée à la voix haut perchée, stupéfiante d’aisance et de naturel,
elle agit comme un aimant qui attire à elle tous les personnages croisés dans Téhéran. Son angoisse d’enfant perdue serre le
cœur comme sa détermination à parvenir au but, malgré des
embûches qui rendent sa tâche, en apparence, perdue d’avance.
Puis son mouvement de révolte impose à Jafar Panahi de tout
changer, de s’adapter au caractère de son “actrice” sans que le
spectateur sache, jusqu’au bout, s’il assiste à du cinéma-vérité ou
à l’artifice suprême d’un réalisateur habile à nous égarer. Film
drôle et subtil, poignant et intelligent, qui permet de voir, et
surtout d’entendre, la société iranienne en direct. Jafar Panahi :
le cinéaste que les autorités de son pays ont décidé de réduire au
silence… » – Jean-Claude Raspiengeas, La Croix
Sortie française 26 novembre 1997 Format 35mm – 1.66 : 1
Production Ciby 2000 Producteurs Abbas Kiarostami, Alain
Depardieu Scénario Abbas Kiarostami Image Homayon Payvar
Son Jahangir Mirshekari Montage Abbas Kiarostami – Avec
Homayoun Ershadi (Mr Baadi), Ahdolhossein Bagheri (le
gardien du musée), Afsin Khorshidbakhtari (l’ouvrier), Safar
Ali Moradi (le jeune soldat), Mir Hossein Noori (l’étudiant)…
Sortie française 21 décembre 2011 Distributeur Tamasa
Distribution Format DCP – 1.66 : 1 Production Rooz Films
Producteurs Jafar Panahi, Vahid Nikkhah-Azzad Producteur
exécutif Morteza Motevali Scénario Jafar Panahi Image Farzad
Jadat Son Yadollah Najafi, Mohammad Reza Delpak Montage
Jafar Panahi – Avec Aida Mohammadkhani (Mina),
Mina Mohammadkhani (Mina enfant), Kazem Mojdehi,
Naser Omuni, Tahereh Samadpour…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 85
IRAN
Le
Cercle
[DAYEREH]
Deux
Anges
[DEUX FERESHTÉ]
Jafar Panahi – Iran/Italie, 2000, 89 mn, coul
Mamad Haghighat – Iran, 2003, 80 mn, coul
Surveillées en permanence, soumises à une pesante
bureaucratie et à des discriminations incessantes, des
femmes voient leurs itinéraires se croiser dans une ambiance
de plus en plus tendue. Mais ces pressions n’entament en
rien le courage de leur cercle…
À la suite d’une dispute avec son père, un homme très pieux,
Ali, 15 ans, s’enfuit dans le désert. C’est là qu’il entend pour
la première fois le son de la musique : celle d’un berger
qui joue du nêy. La vie d’Ali va en être bouleversée…
« Si Le Cercle est d’ores et déjà un tournant dans le cinéma iranien, et si ce qu’il montre est stupéfiant d’audace et de courage,
le réduire à la force de son constat sociétal serait aussi absurde
qu’injuste. Qu’un tel film existe, ait pu être tourné et montré à
l’étranger, est bien sûr un signal important quant aux mutations
de la société et du régime iraniens. Mais Panahi ajoute aussitôt que son film n’a toujours pas obtenu de visa d’exploitation
pour une sortie en Iran. Ce qui est navrant, mais guère étonnant
quand on songe à ce que Le Cercle ose montrer : des femmes qui
sortent de prison et errent dans Téhéran à la recherche de leurs
anciennes compagnes de détention, un monde mouvant, fait de
trafics et d’arrangements, à des années-lumière de l’idée qu’on
se fait de la République islamique. Tout le film sera construit
sur ce système de relais, de passage de témoin entre des femmes
aux abois, unies dans un même désarroi face à une société qui
nie leur existence. À mesure que le film avance, ce mouvement
incessant tend à l’immobilité, à un retour au calme synonyme de
défaite et de nouvel enfermement. Panahi confère à son film une
tension constante. Si toutes ces femmes luttent bec et ongles pour
s’échapper, la société des hommes les fera bientôt rentrer dans le
rang de ses victimes toutes désignées. » – Les Inrockuptibles
« Ange tutélaire des cinéastes iraniens, dont il a longtemps fait
découvrir les films en France, Mamad Haghighat vole aujourd’hui
de ses propres ailes. Comment prendre son essor quand on a
toujours vécu sous la coupe des autres ? C’est justement le thème
de son premier film à fleur de peau, sur la révolte naïve et entêtée
d’un adolescent en guerre contre son père. La naïveté n’a pas
droit de cité chez le cinéaste. Amer et désabusé, il dissèque simplement une tentative de prise de pouvoir. Celle de l’innocence
et de la liberté. » – Télérama
« Le film de Mamad Haghighat est un hommage, simple et émouvant, à la musique et à toutes les formes de création artistique.
“Quand mon père a appris que j’allais au cinéma, il m’a battu.
Dans mon film, le petit garçon que son père bat parce qu’il joue
d’un instrument de musique est un peu moi.” (Mamad Haghighat). Dans sa mise en accusation de l’intégrisme religieux, il
n’accable cependant pas le père, mais donne une double image
de la paternité en faisant interpréter par le même acteur le père
d’Ali et le berger. Si le premier bat son fils “pour son bien spirituel”, le berger a des paroles de paix : “Ton père t’aime. Essaie de
l’aimer.” Le film bénéficie par ailleurs de la présence lumineuse
de Golshifteh Farahani, qui tient là un de ses tout premiers rôles
au cinéma. » – Atmosphères 53
Sortie française 31 janvier 2001 Distributeur Sagittaire Films
Format 35 mm – 1.66 : 1 Production Jafar Panahi Productions /
Lumière & Company / Mikado Producteur Jafar Panahi
Producteur délégué Morteza Motevali Producteur associé
Mohammad Atebbai Scénario Kambozia Partovi, Jafar Panahi
Image Bahram Badakshani Direction artistique Iraj Raminfar
Son Mehdi Dejbodi Montage Jafar Panahi – Avec Maryam
Parvin Almani (Arezou), Nargess Mamizadeh (Nargess),
Fereshteh Sadr Orafai (Pari), Monire Arab (Monire), Elham
Saboktakin (Elham)…
86 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
Sortie française 19 novembre 2003 Distributeur Bac Films
Format 35 mm – 1.85 : 1 Production Mamad Haghighat
Coproduction Wild Bunch Producteur exécutif Mohamad
Ahmadi Scénario Mamad Haghighat Image Amir Assadi
Son Nezami Kiaie, Maziar Sheykhmahbobi Montage Mamad
Haghighat Musique Mohamad Reza Darvishi – Avec Siavoush
Lashgari (Ali/Sohrab), Mehran Rajabi (le père d’Ali/le berger),
Golshifteh Farahani (Azar), Hassan Nahid (le Maître du Néy),
Sharaheh Dolatabadi (la mère d’Azar)…
IRAN
Sang et or [TALAYE SORGH]
Les Enfants [SHAH-RE ZIBA]
de Belle Ville
Jafar Panahi – Iran, 2003, 97 mn, coul
Asghar Farhadi – Iran, 2004, 101 mn, coul
Hussein, un modeste livreur de pizza, tue le gérant d’une
bijouterie qui l’avait humilié et se donne la mort. Quelles
peuvent être les causes de ce tragique fait divers ?
Akbar, 18 ans à peine, est condamné à mort. Alors qu’il attend son exécution dans une prison de Téhéran, un de ses
amis et sa sœur vont tenter d’obtenir le pardon du père de
sa victime, seul moyen pour lui d’échapper à la sentence…
« Le trajet de Hussein parcourt les plus hautes sphères de l’aisance
bourgeoise, mais avec l’énergie d’un désespoir qui porte sa corpulence vers un épuisement total et nihiliste. Malgré les nombreux
déplacements, il est retenu par l’inertie de sa condition asservissante de livreur de pizzas. Sang et Or se résout dans l’immobilisme,
par un suicide exécuté hors champ, présence d’un monde invisible
que la caméra tente de percer tout le long du film. Le dispositif
qu’installe Jafar Panahi est d’emblée théâtral. Le hold-up s’offre
à deux points de vue : à celui du spectateur, ainsi qu’à celui
du complice et des passants. Disparaissant du cadre, au sens
propre comme au sens figuré, Hussein rejoint par son suicide
les ombres des nouveaux riches qu’il servait sur le pas de leur
porte, ou qu’il devinait de la rue à travers les rideaux des fenêtres.
Jusqu’à cet acte fatal, il a tenté à maintes reprises d’occuper le
devant de la scène. À chaque fois, les rencontres se sont soldées
par des humiliations. Ainsi que le prédit le film, Téhéran ne
connaîtra pas la modernité d’une remise en cause de la religion
au profit d’un progrès économique et social. La mondialisation
et sa postmodernité confirment que les passerelles sont déjà
jetées vers le mercantilisme consacrant l’argent comme valeur
suprême. » – Positif
« Asghar Farhadi, avec son chef-d’œuvre Une séparation, a marqué
l’année 2011 de son empreinte. Pourtant le cinéaste était loin
d’être un nouveau venu : Une séparation était déjà son cinquième
long métrage. Auparavant, il s’était fait remarquer avec À propos
d’Elly ; et le distributeur Memento Films, après avoir ressorti La
Fête du Feu, a permis au public français de découvrir ces Enfants
de Belle Ville, film alors inédit réalisé en 2004. Le récit ne se
déroule pas dans un quartier de Paris comme le titre pourrait le
laisser penser, mais dans une prison. Les thématiques, la méthode
et le savoir-faire d’Asghar Farhadi sont déjà à l’œuvre ici : la
justice, la culpabilité, le pardon sont au cœur de ce drame et sont
toujours traités avec beaucoup de finesse. Et surtout, nous avons
la énième confirmation que Farhadi est un orfèvre ès scénario :
plus le chemin du spectateur semble balisé plus il nous réserve
des surprises, des chemins empruntés non pas pour la beauté
du geste, mais en raison d’une impérieuse nécessité humaniste.
Les relations entre les personnages sont mouvantes, complexes.
Une victime peut en cacher une autre et le spectateur pétri de certitudes se voit obligé, séquence après séquence, de les remettre en
cause. Quand l’habileté scénaristique est au service d’un propos
aussi intelligent, moderne et humaniste, on en redemande. » –
François Aymé
Sortie française 25 février 2004 Distributeur Tamasa
Distribution Format 35 mm – 1.66 : 1 Production Jafar Panahi
Film Production Coproduction Lumen Films/Mikado Films
Producteur Jafar Panahi Producteur exécutif Jahangir Kosari
Scénario Abbas Kiarostami Image Hossain Jafarian Décors
Iraj Raminfar Son Dana Farzanehpour, Laurent Bailly Montage
Jafar Panahi Musique Peyman Yazdanian – Avec Hussein
Emadeddin (Hussein), Kamyar Sheissi (Ali), Azita Rayeji (la
fiancée), Shahram Vaziri (le bijoutier), Ehsan Amani (l’inconnu
du café)…
Sortie française 11 juillet 2012 Distributeur Memento Films
Format DCP – 1.85 : 1 Production Neshane Producteur
Iraj Taghipoor Producteur exécutif Bahram Jalali Scénario
Asghar Farhadi Image Ali Loghmani Décors et costumes
Keyvan Moghadam Son Hassan Zahedi Montage Shahrzad
Pooya Musique Hamid Reza Sadri – Avec Taraneh Alidoosti
(Firouzeh), Babak Ansari (A’la), Faramarz Gharibian (Rahmati Abolghassem), Ahu Kheradmand (Mme Abolghassem),
Farhad Ghaiemian (Ghafouri)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 87
IRAN
Hors jeu
[OFFSIDE]
Une
nuit
[YEK SHAB]
Jafar Panahi – Iran, 2005, 88 mn, coul
Niki Karimi – Iran, 2005, 90 mn, coul
Le 8 juin 2005, à Téhéran, l’équipe iranienne de football
affronte celle de Bahreïn, dans un match crucial pour
sa qualification en Coupe du monde. Dans le bus de
supporters,une fille s’est déguisée en garçon pour assister
à la rencontre…
Une jeune employée de bureau habite seule avec sa mère
dans un appartement exigu à Téhéran. Un soir, lorsqu’elle
rentre du travail, sa mère la renvoie. La jeune femme erre
toute la nuit dans la ville et rencontre trois hommes, chacun
avec une histoire différente…
« Bien qu’elle ne figure dans aucun texte voté par le Parlement iranien, l’interdiction des femmes dans les stades iraniens est devenue
une habitude établie par les forces de sécurité, qui aujourd’hui
a force de loi. Aussi, quand l’Iran se qualifie pour la Coupe du
monde 1998 et que quelque 5000 femmes s’introduisent dans le
stade lors de la présentation de l’équipe victorieuse, l’affaire fait
grand bruit. Jafar Panahi s’intéresse alors de près au sujet. Et, en
2005, quand l’Iran est sur le point de se qualifier à nouveau pour
la Coupe du monde 2006, et qu’il aperçoit un jour sa propre fille
déguisée en garçon dans les tribunes d’un stade, le cinéaste se lance
aussitôt dans l’écriture de Hors jeu. Le film sera pour lui le moyen
d’aborder les interdits imposés aux femmes dans son pays.
Cependant, quand il s’agit de présenter le scénario au Ministère de
la Culture et de l’orientation islamique, Panahi, dont la réputation
n’est plus à faire, doit user de prudence. Le projet est alors falsifié et
ne parle que du foot, pas de la présence des femmes ; un membre
de l’équipe de tournage sert de prête-nom au réalisateur ; le numérique, moins surveillé par les autorités, est préféré au 35 mm.
Au total, le tournage va durer neuf jours : les scènes de l’autobus ou
celles de la prison à ciel ouvert à côté de la porte d’accès au stade
ont bien sûr été tournées après le match. » – Collège au Cinéma
« Ce film, signé Niki Karimi, rappelle étrangement Ten (10) de
Kiarostami, parce qu’il est presque entièrement filmé en voiture,
mais aussi parce qu’il est constitué d’incessantes discussions qui
en disent long sur la condition de la femme dans la société iranienne. En choisissant de nous conter trois prises en stop successives,
la réalisatrice dresse aussi un portrait de la gent masculine de son
pays, traduisant quelques espoirs d’évolution dans les mœurs
et dans l’éducation. L’héroïne croise donc un mari insistant,
un médecin séparé et respectueux et un mari déçu. Ces trois
rencontres instruisent sur les tendances de la société, où la polygamie serait consacrée par les textes du Prophète. L’utilisation
de la caméra vidéo permet de rendre l’aspect inquiétant des
rues, et le vague harcèlement exercé par des véhicules anonymes,
envers cette femme exposée et vulnérable. Le danger est palpable
comme le dénouement est attendu. » – Abus de ciné
« Je voulais laisser au loin la perspective de la ville, avec tout son
chaos, se rappelle la réalisatrice. Nous avons pris de la distance
pour mieux apprécier la complication des situations tordues
et difficiles qui existent entre les gens de cette ville. » – Nikki
Karimi
Sortie française 6 décembre 2006 Distributeur Ad Vitam
Format DCP – 1.85 : 1 Production Jafar Panahi Film
Productions Producteur Jafar Panahi Scénario Shadmehr
Rastin Image Mahmood Kalari, Rami Agami Décors Iraj Raminfar
Son Nezamoddin Kiaie, Reza Delpak Montage Jafar Panahi
Musique Korosh Bozorgpour, Yuval Barazani – Avec Sima
Mobarak Shahi (la première fille), Safar Samandar (le soldat
Azari), Shayesteh Irani (la fumeuse), M. Kheyrabadi
(le soldat Mashadi), Ida Sadghi (la footballeuse)…
88 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
Sortie française 4 janvier 2006 Distributeur Diaphana Format
35 mm – 1.85 : 1 Production Sazeman Cinmai 79-Jahan
Producteurs Hassan Rajbali Bana, Jahan Kosari Producteur
exécutif Jahangir Kosari Scénario Niki Karimi, avec la collaboration
de Kamboziar Partovi, d’après une idée de Mahmoud Aydin
Image Houssein Jafarian Direction artistique et costumes Iraj
Ramin Far Son Karim Kashani, Houssein Mahdavi Montage
Mastaneh Mohajer Musique Peyman Yazdanian – Avec Hanieh
Tavassoli (Negar), Saeed Ebrahimifar, Nader Torkaman,
Abdolreza Fakhar…
IRAN
La
Fête du feu
[CHAHAR SHANBEH SOURI]R]
Asghar Farhadi – Iran, 2006, 104 mn, coul
Persépolis
Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud – France/États-Unis,
2007, 95 mn, NB
Rouhi, une jeune aide-ménagère qui vit un bonheur complet
et va bientôt se marier, est employée pour la journée
chez un jeune couple. Elle découvre un foyer en crise, dont
la femme soupçonne son mari de la tromper avec une
voisine...
Téhéran, 1978. Choyée par des parents modernes et
cultivés, Marjane, huit ans, songe à l’avenir avec confiance.
Mais la situation politique bascule soudainement et va tout
bouleverser pour la petite fille et les siens…
« Troisième film d’Asghar Farhadi, La Fête du feu est le premier à
être sorti en France. Le scénario commence comme celui d’Une
séparation – l’interaction entre un couple de la classe moyenne
en crise et une femme de ménage d’un milieu modeste. Au fil
d’une éprouvante journée, les grands yeux bruns de Mojdeh,
qui découvre la place et le pouvoir du mensonge – un thème
récurrent chez Farhadi –, perdront beaucoup de leur candeur.
En un jour, elle apprendra les petites libertés et les souffrances
de la condition de femme mariée. Tradition persane interdite
avec l’arrivée des islamistes au pouvoir, la fête du Nouvel An
a subsisté, sous un jour plus violent, en signe de protestation.
Des images documentaires de feux, de tirs et d’explosions de
pétards, tournées pendant ces festivités en Iran, ponctuent le
film et alimentent le sentiment d’insécurité qui le hante. Elles
font écho au doute qui ronge Mojdeh et à la vulnérabilité de tous
les personnages féminins, dans une société qui ne les épargne
guère. C’est flagrant quand Rouhi, bien malgré elle, se retrouve
dehors sans tchador. Tout le talent de scénariste d’Asghar Farhadi
apparaît déjà à travers des séquences ambiguës et des vérités savamment distillées tout au long du film. Grâce aussi à la finesse
de l’interprétation, on suit ardemment ce roman d’initiation
aussi vivant qu’inquiet. » – ARTE
« La liberté de ton de ce film a dérangé une partie des musulmans.
En 2011, le film fait polémique à sa projection en Tunisie à cause
de la représentation d’Allah. Mais Persépolis a aussi dérangé
certains lecteurs chrétiens. Aux États-Unis, en 2014, il a été classé
parmi les 10 livres qui ont fait le plus polémique selon l’American
Library Association qui recueille les plaintes et récriminations des
lecteurs. Les points évoqués comme étant sensibles sont les suivants : le film a été perçu comme offensant sur le plan politique,
sur le plan du langage et de la représentation graphique (“vulgarité” de certaines scènes), sur le plan moral (la nature des
thèmes abordés : sexe, violence et autres tabous). Marjane Satrapi
a ainsi peut-être atteint son but : parler de l’adolescence irréductible, de la résistance à l’embrigadement idéologique, au-delà du
témoignage sur la société iranienne de la révolution islamique.
De ce point de vue, le choix de l’animation a été déterminant,
dès qu’il a été question d’adapter la bande dessinée. » – Édith
Yildizoglu
Sortie française 26 décembre 2007 Distributeur Les Films
du Paradoxe Format DCP – 1.85 : 1 Production Boshra Films
Producteur Jamal Sadatian Scénario Asghar Farhadi, Mani
Haghighi Image Hossein Jafarian Décors & costumes Asghar
Farhadi Son Hassan Zahedi, Hossein Abousedgh, Massoud
Behnam Montage Hayedeh Safiyari Musique Peyman Yazdanian – Avec Hedieh Tehrani (Mojdeh), Taraneh Alidousti (Rouhi), Hamid Farokh-Nejad (Morteza), Pantea Bahram (Simin),
Matin Heydarnia (Amir Ali)…
Sortie française 27 juin 2007 Distributeur Diaphana
Distribution Format DCP – 1.85 : 1 Production 2.4.7. Films
Coproduction France 3 Cinéma/The Kennedy-Marshall co. /
French Connection Animations/Diaphana Distribution
Producteurs Marc-Antoine Robert, Xavier Rigault Coproductrice
Tara Grace Producteurs exécutifs Marc Jousset, Kathleen
Kennedy Scénario Marjane Satrapi, Vincent Paronnaud, d’après
les bandes dessinées de Marjane Satrapi Direction de
l’animation Christian Desmares Décors Marisa Musy Son
Thierry Lebon Montage Stéphane Roche Musique Olivier
Bernet – Avec les voix de Chiara Mastroianni (Marjane
adolescente et adulte), Catherine Deneuve (Tadji, la mère),
Danielle Darrieux (la grand-mère), Simon Abkarian (Ebi,
le père), Gabrielle Lopes (Marjane enfant)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 89
IRAN
À propos
d’Elly [DARBAREYE ELLY]
Les
Chats persans [KASI AZ GORBEHAYE
IRANI KHABAR NADAREH]
Asghar Farhadi – Iran, 2009, 116 mn, coul
Bahman Ghobadi – Iran, 2009, 101 mn, coul
Un groupe d’étudiants passe des vacances au bord de
la mer Caspienne. Sepideh, en charge de l’organisation, a
décidé d’inviter Elly, en espérant que celle-ci ne soit pas
indifférente au charme de son ami Ahmad. Les vacances
se passent dans la bonne humeur, jusqu’à la soudaine
disparition d’Elly...
À leur sortie de prison, deux jeunes musiciens iraniens
montent un groupe underground. Lassés de ne pas pouvoir
s’exprimer librement, ils tentent de se procurer des papiers
pour rejoindre l’Europe. Pour financer leur fuite, ils ont l’idée
de donner un grand concert clandestin…
« Le scénario d’Asghar Farhadi repose sur un mécanisme familier : arrivé en villégiature, le groupe est frappé par un événement
imprévu qui le fait voler en éclats. Le cinéaste filme son héroïne
Sepideh de près, comme il le fait de tous les personnages. Il les
suit de pièce en pièce dans la grande villa délabrée. Cette façon de
faire est un peu prévisible, comme le sont certaines péripéties du
scénario. Mais elle permet au réalisateur de coller au plus près de
la vérité des personnages. C’est d’ailleurs dans les métamorphoses
que subissent ces personnages que se trouve le vrai enjeu, le vrai
suspense d’À propos d’Elly. Le temps de prendre en compte quelques particularités – les foulards qui couvrent la tête des femmes,
les chansons populaires en farsi qui remplacent les tubes pop – et
l’on est pris au piège de ce film troublant, qui met la trame d’un divertissement classique à l’épreuve des dures contraintes du monde,
tel qu’il s’est construit en Iran ces trente dernières années. Le film
d’Asghar Farhadi donne une autre idée des obstacles que ces insurgés avaient à renverser, ces façons de faire et de penser reçues en
héritage de trente années de guerre et de révolution islamique. Nés
en même temps qu’elle, les jeunes gens d’À propos d’Elly en sont
les prisonniers plutôt que les gardiens. » – Le Monde
« En Iran les interdits sur la musique sont nombreux. On ne peut
montrer un instrument à la télévision. Ils sont interdits de vente.
Les musiciens jouent avec des instruments d’occasion, datant
souvent des années 1970. La musique non religieuse est soumise
à un contrôle sévère. Le chant traditionnel est autorisé, mais avec
des restrictions. Une femme seule ne peut chanter, il faut être trois
voire quatre. Dans ce film la révolte s’exprime dans le choix de
la forme : la majeure partie de ce qu’on entend est d’inspiration
occidentale, metal, blues, rock, rap… Ce qui unit ces différents
interprètes, c’est l’interdit qui pèse sur leur pratique, le fait de
devoir exercer leur art dans la clandestinité. » – Edith Yildizoglu
« Ce qui ressort immédiatement de la projection des Chats Persans,
c’est une bonne claque sur notre vision de l’Iran formatée par les
sujets télévisés. Bahman Ghobadi nous offre un vent de liberté
et de créativité musicale que l’on ne soupçonnait pas et qui ne
demandait qu’à crever l’écran par sa spontanéité. L’auteur emporte
notre adhésion grâce à des personnages pittoresques ou attachants,
à des morceaux de musique variés et enchanteurs. Une ode à la
liberté, à la culture qui annonçait les courageuses manifestations
de rues de la jeunesse. Un film musical brûlant et réconfortant. » –
François Aymé
Sortie française 9 septembre 2009 Distributeur Memento
Films Format DCP – 1.85 : 1 Production Simaye Mehr Producteurs Asghar Farhadi, Mahmoud Razavi Scénario Asghar
Farhadi, d’après une histoire d’Azad Jafarian et Asghar Farhadi
Image Hossein Jafarian Décors et costumes Asghar Farhadi
Son Hassan Zahedi, Mohammad-Reza Delpak Montage
Hayedeh Farhadi Musique Andrea Bauer – Avec Golshifteh
Farahani (Sepideh), Taraneh Alidousti (Elly), Sharab Hosseini
(Ahmad), Merila Zarei (Shohreh), Mani Haghighi (Amir)…
Sortie française 23 décembre 2009 Distributeur Mars
Distribution Format 35 mm – 2.35 : 1 Production Mij Film Co.
Producteur Bahman Ghobadi Coproducteur Mehmet Aktas
Scénario Bahman Ghobadi, Roxana Saberi Image Turaj Aslani
Son Nezamodin Kiaie, Michael Kaczmarek, Bahman Ardalan
Montage Hayedeh Safiyari Musique Khaled Mouzanar – Avec
Negar Shaghaghi (Negar), Ashkan Koshanejad (Ashkan),
Hamed Behdad (Nader), Hichkas (lui-même), Hamed Seyyed
Javadi (lui-même)…
90 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
IRAN
Au
revoir
[BÉ OMID É DIDAR]
Une
séparation [JODAEIYE NADER
AZ SIMIN]
Mohammad Rasoulof – Iran, 2011, 104 mn, coul
Asghar Farhadi – Iran, 2011, 123 mn, coul
Aujourd’hui, en Iran. Une jeune avocate privée de licence
est enceinte de plusieurs mois. Elle vit seule, car son mari,
un journaliste, s’est réfugié dans la clandestinité. Traquée
par les autorités, et se sentant étrangère dans son propre
pays, elle décide de fuir...
Lorsque sa femme le quitte, Nader engage une aidesoignante pour s’occuper de son père malade. Il ignore alors
que la jeune femme est enceinte et a accepté ce travail
sans l’accord de son mari, un homme psychologiquement
instable…
« Tourné en semi-clandestinité par un cinéaste lui-même réduit au
silence par la justice de son pays, arrivé au Festival de Cannes 2011
au nez et à la barbe des douanes iraniennes, Au revoir décrit avec
une grâce austère le combat d’une avocate contre les rouages kafkaïens de la bureaucratie des mollahs. Construite avec une précision de trait digne d’une approche entomologique et soumise à une
parfaite rigueur picturale, la démonstration de Mohammad Rasoulof est implacable. Et si, à l’instar d’un claustrophobe coincé dans
un ascenseur, le spectateur suffoque parfois autant que l’héroïne du
film, c’est précisément ce qui lui permet de saisir avec authenticité
la violence sourde d’une administration qui se plaît à écraser toute
velléité d’autonomie de ses sujets. Plus proche donc de l’univers
neurasthénique de cinéastes autrichiens tels que Haneke ou Seidl
que de la poésie éthérée d’un Kiarostami, le cinéma de Rasoulof est
un cinéma de résistance, qui ose monter au front sans se protéger
derrière le paravent de la métaphore. Et cette entrée en guerre est
d’autant plus puissante qu’elle est conduite par une actrice dont le
jeu est à ce point parfait que chaque plan habité de sa présence – et
rares sont ceux que le visage de l’actrice déserte – prend la force
d’un tableau de Vermeer. Au revoir, par sa description pointilleuse
et sa grande rigueur, apporte un témoignage sec et percutant sur ce
qu’est aujourd’hui la vie en Iran. » – Fiches du Cinéma
« Combien de films possèdent cette cohérence, cette justesse, cette
force, cette puissance ? Sur la forme, Une séparation est une sorte
de thriller juridique dont le suspense est tendu comme un arc,
du deuxième tiers au dénouement. Monté avec une intelligence
diabolique, le scénario relève d’une mécanique d’horlogerie.
L’interprétation est tout simplement haut de gamme, un sansfaute. Et sur le fond, quand de nombreux films n’arrivent même
pas à dérouler un propos clair, Une séparation se paie le luxe de
ne pas jouer à merveille sur un ou deux tableaux, mais sur tous
les tableaux. Ce chef d’œuvre apparaît à la fois comme un film
profondément iranien et impose en même temps un discours à
portée universelle. Une séparation est également une formidable
leçon de morale consacrée aux différences de classes sociales. Ainsi
le film n’est jamais là où on l’attend, il débusque sans cesse l’inanité
des préjugés, dans un sens (envers les pauvres) comme dans l’autre
(envers les riches). Le film décrit avec beaucoup de nuances la place
de la religion dans la société iranienne. Il propose également une
radioscopie honnête et rigoureuse des déchirements familiaux.
Il pointe les efforts, les liens, les mensonges sans en rajouter et cerne
avec une grande délicatesse le point de vue des enfants. Enfin, Une
séparation s’impose comme une parabole lumineuse consacrée à
la justice et à la vérité. » – François Aymé
Sortie française 7 septembre 2011 Distributeur Pretty Pictures Format DCP – 1.77 : 1 Producteur Mohammad Rasoulof
Producteurs exécutifs Rozita Hendijanian, Dariuosh Ebadi
Scénario Mohammad Rasoulof Image Arastoo Givi Décors
Saeid Asadi Son Mohammad Habibi Montage Mohammad
Reza Moini – Avec Leyla Zareh (Noura), Hassan Pourshirazi,
Behname Tashakor, Sima Tirandaz, Roya Teymorian…
Sortie française 8 juin 2011 Distributeur Memento Films
Format DCP – 1.85 : 1 Producteur Asghar Farhadi Producteur
exécutif Negar Eskandarfar Scénario Asghar Farhadi Image
Mahmoud Kalari Décors et costumes Keyvan Moghadam Son
Mahmoud Sammakbashi, Mohammad Reza Delpak Montage
Hayedeh Safiyari Musique Sattar Oraki – Avec Leila Hatami
(Simin), Peyman Moadi (Nader), Sareh Bayat (Razieh), Shahab
Hosseini (Hodjat), Sarina Farhadi —
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 91
IRAN
Les 112 Jours de
Khomeiny en France
Nahid
Gérard Puechmorel – France, 2012, 56 mn, coul, doc
Ida Panahandeh – Iran, 2014, 105 mn, coul
Les 112 jours de Khomeyni en France, entre le 6 octobre
1978 et le 1er février 1979 durant lesquels le religieux
iranien réside à Neauphle-le-Château, d’où il prépare sa
conquête d’une partie du monde musulman, fascinant une
partie de l’intelligentsia et de la presse française…
Nahid, jeune divorcée, vit seule avec son fils de 10 ans dans
une petite ville au bord de la mer Caspienne – une situation
inhabituelle pour une femme iranienne. Sa rencontre avec
un homme qui l’aime passionnément et veut l’épouser va
bouleverser sa vie de femme et de mère…
« Juste avant le succès de la révolution iranienne de 1979, l’ayatollah Khomeini avait poursuivi son exil, entamé en Irak quatorze
ans plus tôt, à Neauphle-le-Chateau, en France. Son arrivée dans
l’Hexagone fait grand bruit. C’est à partir de cette arrière-base
que Khomeyni va préparer le renversement du Shah Mohammad
Reza Pahlavi. Régulièrement, il envoie des missives dans son pays
natal. Ses soutiens, notamment dans les milieux étudiants, enflent.
Rapidement, la presse et les intellectuels français sont séduits par ce
personnage drapé dans son costume d’opposant farouche. L’opinion publique tomba dans le panneau de ses discours appelant à
la démocratisation de l’Iran. Les 112 jours de Khomeini en France
racontent l’accueil à bras ouverts réservé par l’Élysée au patriarche
religieux. Des relations qui se dégraderont aussi vite qu’elles se sont
bâties après l’instauration d’un régime autoritaire et théocratique
à Téhéran. » – Moustique
« Entrer dans l’histoire de cet exil de Khomeyni en France, c’est
entrer dans l’histoire de l’une des grandes mystifications de notre
histoire contemporaine : faire d’un ayatollah exilé en Irak, isolé,
encore sans grand rayonnement dans son pays et totalement inconnu sur la scène mondiale, le chef emblématique d’une révolution qui allait prendre le pouvoir en Iran. » – La Chaîne parlementaire
« Le cinéma iranien n’en finit pas de faire parler de lui, en bien…
Alors que Taxi Téhéran, le chef-d’œuvre de Jafar Panahi, réalisateur
dans la ligne de mire des autorités de Téhéran depuis des lustres,
triomphait dans les salles, le Festival de Cannes, dans la section “Un
Certain Regard”, accueillait une nouvelle venue dans le paysage
local. Son nom : Ida Panahandeh, une réalisatrice de 36 ans dont
le prometteur premier film, Nahid, est consacré à la rude condition
des femmes en Iran. Passionnant et audacieux, le film témoigne du
courage de la réalisatrice néophyte qui ne caresse pas les mœurs
de son pays natal dans le sens du poil. Nahid, remarquablement
interprété par Sareh Bayat, l’actrice d’Une séparation – signale la
naissance d’une cinéaste à surveiller de près. » – Les Échos
« Contrairement à ce que veulent croire les Européens, les femmes
ont toujours été très respectées en Iran, cela fait partie d’une tradition nationale. Je ne dis pas que les femmes ne sont pas du tout
discriminées, comme dans tous les pays du monde. Mais dans le
milieu du cinéma, comme il y avait peu de femmes, on les a plutôt
encouragées à tenter leur chance. C’est même un atout d’être une
femme pour faire des films en Iran. Il y a d’ailleurs beaucoup de
femmes cinéastes. Plus largement, être une femme en Iran n’est pas
particulièrement difficile. Mais vivre est difficile, partout et à toutes
les époques. » – Ida Panahandeh
Première diffusion française 15 octobre 2012 [France 3]
Distributeur France télévisions Distribution Format DVD –
1.85 : 1 & 1.37 : 1 Production Et la suite productions Avec la
participation de France Télévisions/CNC Productrice déléguée
Rachel Kahn Auteur Gérard Puechmorel Image Marc Thomas
Son Thierry Ducos, Lucas Frish Montage Fanny Levavasseur,
Mohamed Trabelsi, Maud Anquetil – Commentaire dit par
Hervé Lacroix
Sortie française 16 mai 2015 Distributeur Memento Films
Format DCP – 1.78 : 1 Producteur Bijan Emkanian Scénario
Ida Panahandeh, Arsalan Amiri Image Morteza Gheidi Décors
et costumes Medhi Moussavi Son Jahangir Mirshekari, Medhi
Ebrahimzadeh Montage Arsalan Amiri Musique Majid Pousti –
Avec Sareh Bayat (Nahid), Pejman Bazeghi (Masoud), Navid
Mohammad Zadeh (Ahamd), Milad Hossein Pour (Amir Reza),
Pouria Rahimi (Naser)…
92 FILMS
-
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
IRAN
Taxi
Téhéran
[TAXI]
Jafar Panahi – Iran, 2014, 82 mn, coul
Installé au volant de son taxi, Jafar Panahi sillonne les rues
animées de Téhéran. Au gré des passagers qui se succèdent et se confient à lui, le réalisateur dresse le portrait
de la société iranienne, entre rires et émotion....
« Qu’est-ce que le réel ? Où débutent la fiction et le cinéma ?
Quel est le rôle du cinéaste dans un monde où nous sommes
abreuvés d’images, qu’elles soient prises d’une caméra de surveillance, d’une GoPro posée sur le tableau de bord ou d’un appareil
photo ? Jafar Panahi, béret sur la tête, mais immédiatement reconnu, tente de répondre à ces questions. Il ne faut pas négliger son
courage dans l’acte de se filmer lui-même, lui à qui l’on interdit
toujours officiellement d’exercer son métier de cinéaste. Brièvement emprisonné pour avoir apporté son soutien au mouvement
de la révolution verte en 2009 le cinéaste ne peut ni se déplacer
à l’étranger pour présenter son travail ni présenter des crédits
complets au générique de ses œuvres clandestines. Taxi Téhéran
n’a pas la forme sentencieuse redoutée, bien au contraire. On
sourit tout d’abord devant les tribulations de ce chauffeur de taxi
qui ne connaît pas bien le plan de la ville et devient l’associé, bien
malgré lui, d’un receleur de DVD pirate. On est touché, par la
suite, quand s’installe sur le siège avant passager sa nièce, petite
fille qui rêve de cinéma et de frappuccino, mais ne comprend
pas très bien ce que signifie ce “réalisme sordide” interdit par les
Mollahs. Démêler le vrai du faux est impossible tant le cinéaste
est passé maître dans le vrai-faux documentaire, ajoutant à son
propos une mise en abyme personnelle. Bref, tout ceci est du
cinéma, du grand, du beau, du fort. » – Paris Match
Sortie française 15 avril 2015 Distributeur Memento Films
Format DCP – 1.85 : 1 Production Jafar Panahi Film
Productions Producteur Jafar Panahi Scénario Jafar Panahi
Image, son et montage Jafar Panahi – Avec Jafar Panahi
(le chauffeur de taxi), Nasrin Sotoudeh (la militante des Droits
de l’Homme), Hana Saeidi (Hana)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 93
Noce
en Galilée
[URS AL-JALIL]
Michel Khleifi – Belgique/France/Grande-Bretagne/Allemagne, 1987,
113 mn, coul
Israël /
Palestine
Noce en Galilée
Intervention divine
La Porte du soleil
Mon trésor
Prendre femme
Terre promise
Beaufort
Les Citronniers
Désengagement
Les Méduses
My Father, My Lord
Une jeunesse israélienne
Valse avec Bachir
La Visite de la fanfare
Dan et Aaron
Jaffa
Les Sept Jours
Z32
Ajami
Le Temps qu’il reste
Le Vagabond
Le Policier
The Gatekeepers
Omar
Le Procès de Viviane Amsalem
94 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
Le Moukhtar, chef d’un village arabe palestinien, vient
demander au gouverneur israélien de lever le couvre-feu pour
pouvoir marier son fils. Après une longue négociation,
le gouverneur accepte à condition que lui et ses hommes
soient les invités d’honneur de la noce…
« Un film qu’il faut voir et revoir ; plus encore qu’un témoignage
sur l’impossibilité de communiquer entre occupants et occupés
sur la terre de Palestine, qui jette la lumière sur les événements
récents, il s’agit d’une sorte de poème riche de significations
multiples. Comme le dit Michel Khleifi, c’est le désespoir qui
s’y exprime à propos d’une situation bloquée, à laquelle, à vues
humaines, il n’y a pas d’issues. Et pourtant dans le “désespoir” il
y a l’espoir. Il faut se laisser aller à la beauté des images ; pour moi
le souvenir qui est le cœur du film, c’est le vagabondage périlleux
du cheval échappé qui erre au milieu d’un champ de mines. C’est
le moment où, entre soldats israéliens et paysans palestiniens,
se noue une angoisse partagée. La conscience que la beauté est
fragile et peut être détruite et meurtrie : il faut sauver à tout prix
le pur-sang. Les soldats ne réussissent pas à faire revenir le cheval
en l’effrayant, mais seul son maître peut le ramener sain et sauf en
terrain sûr, en l’appelant avec douceur, du geste et de la voix. Au
final, Noce en Galilée nous montre précisément ce que peuvent
être les rapports entre occupants et occupés dans les territoires
conquis par Israël en 1967. » – Anne-Marie Goguel, Les cahiers
du christianisme social.
Première projection française mai 1987 Distributeur Les Films
du paradoxe Format DVD – 1.66 : 1 Production Marisa Films/
Les Productions Audiovisuelles/ZDF Producteurs exécutifs
Bernard Lorain, Jacqueline Louis Scénario Michel Khleifi Image
Walther Van den Ende Décors Yves Brover-Rabinovici, Rachid
Michrawi Costumes Anne Verhoeven Son Dirk Bombey, Ricardo
Castro Montage Marie Castro-Vasquez Musique Jean-Marie
Sénia – Avec Mohamad Ali El Akili (Mukhtar), Bushra Karaman
(la mère), Makram Khoury (le gouverneur), Youssef Abou
Warda (Bacem), Anna Achdian (la mariée)…
ISRAËL / PALESTINE
Intervention divine.
Une chronique d’amour et de couleur
La
Porte du soleil
[BAB EL CHAMS]
[YADON ILAHEYYA]
Elia Suleiman – France/Palestine/Maroc/Allemagne, 2002, 92 mn, coul
Yousry Nasrallah – Égypte, 2003, 278 mn, coul
Es, un Palestinien vivant à Jérusalem, est amoureux
d’une Palestinienne de Ramallah. En raison de la situation
politique, celle-ci ne peut aller plus loin que le checkpoint
situé entre les deux villes : les rendez-vous du couple
ont donc lieu dans un parking…
Cinquante ans d’histoire, de souffrance, d’espoir et d’amour.
Une épopée au Proche-Orient, à travers le parcours de
quatre individus, quatre histoires de lutte…
« La rêverie n’était jamais loin dans Chronique d’une disparition
(1996), premier long métrage d’Elia Suleiman. Il lâche ici les rênes
à quelques fantasmagories galopantes, dont la facture même
tranche avec son style habituel, pince-sans-rire et quotidien. Petit
signe du cinéaste : chacune de ses allégories se rattache au réel, et
le plus absurde n’est pas à chercher dans l’imaginaire. Que peut le
cinéma face à la guerre ? Quel genre de film attendre d’un Palestinien devenu par choix citoyen du monde, vivant à New York ou
à Paris ? Politique, il le sera de toute façon. Cette terre meurtrie
est sa douleur. Il a si mal qu’il ne trouve que le moyen de s’en
amuser, et pourquoi pas d’amuser la galerie, à défaut de plaire
à tout le monde. Sur ce champ limité à trois, quatre maisons
d’aspect paisible, on peut ainsi conter la guerre dans toute sa mesquine humanité. Suleiman le fait à la manière d’un Tati rageur.
Son acuité d’observateur entretient un “suspense” très particulier,
perplexe et jouissif. L’intervention divine que son titre réclame
est de fait un cri déchirant, mais glacé par un humour qui mieux
que jamais peut être ici appelé par son autre nom la politesse
du désespoir. » – Télérama
De l’épais roman de l’écrivain libanais Elias Khoury, Yousry
Nasrallah s’est attaqué à ce qui est considéré, depuis sa parution,
comme « le roman de l’exode palestinien par excellence » : « Tout
a commencé lorsque le producteur Humbert Balsan et Pierre
Chevalier m’ont approché pour que je réalise un film sur les
Palestiniens. J’ai d’abord dit non : il y a tant de cinéastes palestiniens doués qui peuvent le faire… Pour autant, le livre est si riche
en situations dramatiques que j’ai été très tenté de l’adapter au
cinéma. Je voulais avant tout parler de l’énorme injustice qui a
été faite au peuple palestinien tout entier, et aussi de mon rapport
à la Palestine en tant que cinéaste arabe non palestinien. Depuis
Les Mille et Une nuits, les Arabes ont du mal à raconter des histoires. Les Juifs aussi depuis la création d’Israël. L’Histoire est trop
pesante.Du coup, on doit répondre à une attente qui veut qu’on
soit ambassadeurs, politiciens, juges… Tout sauf conteur. C’est
une forme de répression, de peur de la vie, car rien ne déroute
et ne trouble autant que la fiction. Raconter une histoire, c’est justement ce que nous avons voulu faire, Elias [Khoury], Mohamed
[Soueid] et moi, en écrivant le scénario, et c’est ce que j’ai essayé
de respecter en tournant ce film. »
Sortie française 2 octobre 2002 Distributeur Pyramide Format
DCP – 1.85 : 1 Production Ognon Pictures Coproduction Arte
France Cinéma/Gimages Films/Soread 2M/ Lichtblick
Filmstifung NRW Producteur Humbert Balsan Coproducteurs
Elia Suleiman, Joachim Ortmanns Productrice associée
Babette Schröder Scénario Elia Suleiman Image MarcAndré Batigne Décors Miguel Markin, Denis Renault Son Éric
Tisserand, Williams Schmit, Bruno Tarrière Montage Véronique
Lange – Avec Elia Suleiman (E. S.), Manal Khader (la femme),
Nayef Fahoum Daher (le père), Emma Boltanski (la touriste
française), Amer Daher (Auni)…
Sortie française 9 octobre 2004 Distributeur Pyramide Format
35 mm – 1.85 : 1 Production Ognon Pictures Coproduction
ARTE France Cinéma/Soread 2M/Gimages Films/Misr
International Films Producteur Humbert Balsan Scénario
Yousry Nasrallah, Elias Khoury, Mohamed Soueid, d’après
le roman d’Elia Khoury Image Samir Bahsan Décors Adel
El-Maghrabi Costumes Nahed Nasrallah Son Jérôme Ayasse,
Guillaume Le Braz Montage Luc Barnier Musique Tamer
Karawan – Avec Rim Turki (Nahila), Orwa Nyrabeya (Younès),
Hiam Abbass (Om-Younès), Bassel Khayyat (Khalil), Nadira
Omran (Om-Hassan)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 95
ISRAËL / PALESTINE
Mon trésor [OR]
Prendre
femme
[VE’LAKHTA LEHE ISHA]
Keren Yedaya – Israël/France, 2004, 100 mn, coul
Ronit et Shlomi Elkabetz – Israël/France, 2004, 97 mn, coul
Ruthie et Or, une mère et sa fille de 17 ans, vivent dans
un petit appartement à Tel-Aviv. Ruthie se prostitue depuis
une vingtaine d’années. Sa fille a déjà essayé plusieurs fois,
mais sans succès, de lui faire quitter la rue. Mais lorsqu’elle
tombe malade, elle doit radicalement changer de vie…
Haïfa, juin 1979, durant les 3 jours qui précèdent le Shabbat.
Viviane est sur le point de quitter son mari Eliahou. Mais
persuadée par sa famille, elle renonce une nouvelle fois.
Jusqu’à ce qu’elle retrouve Albert, un amour de jeunesse…
« Quand j’étais en train d’écrire Mon trésor, je m’intéressais beaucoup à la photographie. J’éprouvais aussi un sentiment de rejet
vis-à-vis des films “trop beaux”, trop bien éclairés, des films trop
léchés, trop “branchés”. J’ai eu envie alors d’aller vers quelque chose
de plus brut, moins formaté, d’un retour aux sources. J’ai l’impression que la “professionnalisation” du langage cinématographique
est de fait une forme de régression et que le cinéma d’aujourd’hui
est bien trop influencé par les vidéo-clips et la publicité. Pour moi,
la période du tournage est une sorte d’aventure dans laquelle le
hasard joue un rôle important. L’idée d’une esthétique de plansséquences fixes était très stimulante pour moi et pour mon chefopérateur, Laurent Brunet, tout comme le sentiment de prise de
risque qui a accompagné tout le tournage. » – Keren Yedaya
« Impossible de ne pas penser à la Rosetta des frères Dardenne
lorsqu’on découvre Or, l’héroïne de cet impressionnant premier
film. On se dit qu’il y a des Or sur cette terre, des trésors dilapidés.
La jeune Dana Ivgy est dure, entière, toute en refus et en candeur
inattendue. Oui, de l’or pur au milieu de la boue. » – Elle
« La puissance de Prendre femme est d’abord dans la façon dont
Ronit Elkabetz prend le pouvoir de l’image. Récompensée dans
plusieurs festivals pour son rôle dans Mariage tardif, étonnante
dans Alila d’Amos Gitaï, époustouflante en prostituée à la dérive
dans Mon trésor, elle fait ici un numéro grandiose, telle une
Callas (à laquelle elle ressemble) ou une Anna Magnani. » –
Le Monde
« Ronit Elkabetz, qui interprète Viviane, a co-écrit et réalisé
le film avec son frère Shlomi, comme une façon d’enregistrer
leurs blessures autobiographiques, l’aliénation mutuelle de leurs
parents. Elle s’offre tout entière à son personnage, corps altier,
beauté fatiguée, mais impérieuse. Elle réussit ce tour de force de
jouer en finesse et en nuances un rôle dans un rôle : Viviane
étouffe, et ses seules armes sont l’excès, la crise de nerfs, la théâtralité. Face à elle, Eliahou (Simon Abkarian, magnifique) redouble
de bigoterie. En marge de cet exceptionnel duo d’acteurs, Gilbert
Melki compose avec subtilité l’amant de Viviane, sa promesse
d’ailleurs, d’une autre vie. Le frère et la sœur ne proposent aucune
issue, ne ferment aucune piste. Ils captent seulement, avec une
étonnante maîtrise du récit, les émotions, les déchirements et les
fêlures intimes, un enfer ordinaire et universel. » – Télérama
Sortie française 1er décembre 2004 Distributeur Rezo Films
Format 35 mm – 1.66 : 1 Production Bizibi /Transfax Film
Production Producteurs Emmanuel Agneray, Jérôme Bleitrach,
Marek Rozenbaum, Itai Tamir Scénario Keren Yedaya, Sari
Ezouz Image Laurent Brunet Décors Avi Fahima Costumes Lee
Alembik Son Tully Chen Montage Sari Ezouz – Avec Ronit
Elkabetz (Ruthie), Dana Ivgy (Or), Meshar Cohen (Ido), Katia
Zimbris (Rachel), Shmuel Edelman (Shmuel)…
96 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
Sortie française 26 janvier 2005 Distributeur Sophie Dulac
Distribution Format 35 mm – 1.85 : 1 Production Transfax
Film Production/Zanagar Films Producteurs Marek Rozenbaum,
Jean-Philippe Reza, Itai Tamir, Éric Cohen Scénario Ronit
Elkabetz, Shlomi Elkabetz Image Yaron Scharf Décors Avi
Fahima Son Yochai Moshe Montage Joelle Alexis Musique
Michel Korb – Avec Ronit Elkabetz (Vivianne), Simon Abkarian
(Eliahou), Gilbert Melki (Albert), Sulika Kadosh (Mémé),
Dalia Malka Beger (Dona)…
ISRAËL / PALESTINE
Terre promise [PROMISED LAND]
Beaufort
Amos Gitai – France/Israël, 2004, 90 mn, coul
Joseph Cedar – Israël, 2007, 130 mn, coul
Dans le désert du Sinaï, au clair de lune, un groupe d’hommes,
des bédouins, et de femmes d’Europe de l’Est discutent
autour d’un feu de camp. La raison de leur rencontre :
un réseau de prostitution…
Dans l’ancienne forteresse croisée de Beaufort, au Liban,
l’armée israélienne maintient un avant-poste, symbole de
l’une de ses guerres les plus contestées. Chaque jour est
imprévisible et la vie s’écoule jusqu’à la nuit du 24 mai
2000, lorsqu’une gigantesque explosion illumine le ciel...
« Très documenté, le film est conçu comme une succession de
scènes-chocs : le choix des prostituées en pleine nuit par les différents marchands d’esclaves, une horrible douche collective, le
maquillage minutieux opéré par la maquerelle en chef ou encore
la première nuit de travail dans un obscur tripot en bord de mer.
Amos Gitaï accompagne un temps quelques femmes pour finalement se concentrer sur deux d’entre elles : Diana, une jeune
Russe perdue loin de sa terre natale et Rose au passé énigmatique,
ange blond entiché d’un voyou, témoin fasciné par cette traite des
blanches. Amos Gitaï nous plonge dans un enfer parfois à la limite
du soutenable. Dans ce chaos frénétique, les moments de répit
sont rares et poétiques : Diana et Rose attendant leur bourreau,
un chat dans la neige, une chorale dans une église orthodoxe, des
sourires partagés. Et sans prononcer un mot, les deux jeunes filles
scellent leur destin futur dans cette évocation d’un passé lointain et heureux. Si Terre promise n’a pas la maîtrise de Kadosh
ou de Kippour, les deux sommets de la riche filmographie d’Amos
Gitaï, ces instants de grâce suspendue confirment la présence
d’un grand réalisateur derrière la caméra. » – Yannick Vély,
filmdeculte
« Beaufort fait partie des meilleurs films de guerre, de ceux qui la
montrent comme une chose haïssable et inepte. La réussite tient
au principe du film : raconter l’histoire du point de vue israélien,
le seul que le réalisateur, soldat de Tsahal durant la guerre du
Liban, connaisse de l’intérieur. Mais cette réussite s’explique
surtout par la mise en scène : lumière d’aquarium, ciel laiteux,
réseau de boyaux pour décor, description du comportement des
soldats terrés dans leur trou comme des rats, inquiétant et omniprésent nappage musical, absence de figuration de l’ennemi, dont
les coups, redoutables tant ils semblent venir de nulle part, pleuvent à intervalles réguliers et déciment une garnison qui a ordre de
tenir mais pas d’attaquer. Tout concourt à instiller un climat de
peur diffuse. Ce beau film associe deux talents : le journaliste et
écrivain Ron Leshem, qui a rapporté dans la presse en 2001 le récit
d’un officier israélien qui a inspiré à la fois le livre qu’il en a tiré et
son adaptation à l’écran. Et le réalisateur Joseph Cedar, né à New
York en 1968, installé en Israël avec sa famille depuis l’âge de 6 ans.
Son troisième long métrage a été primé en Israël et a obtenu
l’Ours d’argent au Festival de Berlin 2007. » – Le Monde
Sortie française 12 janvier 2005 Distributeur Ad Vitam Format
35 mm – 1.85 : 1 Production Recorded Picture Company /
MP Productions/Agav Films/ARTE France Cinéma Producteurs
Amos Gitai, Michaël Tapuach, Laurent Truchot Coproducteurs
Alain
Manou-Mani, Peter Watson, Agav Hafakot, Hamon Hafakot
Scénario Amos Gitai, Marie-José Sanselme Image Caroline
Champetier Décors Eli Zion Costumes Laura Dinulescu Son
Daniel Ollivier, Oleg Kaiserman Montage Isabelle Ingold – Avec
Rosamund Pike (Rose), Diana Bespechny (Diana), Hanna
Schygulla (Hanna), Anne Parillaud (Anne), Alla An (Alla)…
Sortie française 26 mars 2008 Distributeur Metropolitan Filmexport Format 35 mm – 2.35 : 1 Production Movie Plus/Kershet Broadcasting /Cinema Factory/Yes-DBD Satellite Service/
Metro Communications Producteurs David Silber, David Mandil
Producteurs exécutifs Moshe Edery, Leon Edery Scénario
Ron Leshem, Joseph Cedar, d’après le roman de Ron Leshem
Image Ofer Inov Direction artistique Miguel Merkin Costumes Maya More Son Alex Claude, Ashi Milo Montage Zohar
M. Sela Musique Ishai Adar – Avec Oshri Cohen (Liraz Liberti),
Itay Tiran (Koris), Eli Eltonyo (Oshri), Ohad Knoller (Ziv), Itay
Turgeman (Zitlawi)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 97
ISRAËL / PALESTINE
Les Citronniers
Désengagement
Eran Riklis – Israël/France/Allemagne, 2007, 106 mn, coul
Amos Gitaï – France/Israël/Allemagne/Italie, 2007, 115 mn, coul
Salma cultive des citronniers dans un petit village palestinien
de Cisjordanie, situé sur la « ligne verte » qui sépare Israël
des territoires occupés. Mais lorsque le ministre israélien
de la Défense devient son nouveau voisin, elle va devoir
défendre sa plantation...
Avignon, été 2005. Ana retrouve Uli, son demi-frère israélien,
à l’occasion de la mort de leur père. Elle décide de retourner
en Israël à la recherche de sa fille qu’elle a abandonnée à
la naissance vingt ans plus tôt. À leur arrivée, Ana et Uli sont
pris dans la tourmente du retrait des colons de Gaza…
« Au milieu de la situation absurde décrite par le film, des tours et
détours de la Cour suprême pour rendre des avis tout aussi absurdes, on vit. Salma revit, par la rencontre avec un jeune avocat qui
lui apporte l’espoir pour sa terre, et l’espoir d’un nouvel amour.
La scène du baiser entre eux deux, un écrin de lumière entourant
leurs deux visages, est probablement la plus belle des Citronniers.
Scène magnifique, mais déchirante, puisqu’elle parle, elle aussi, de
séparation. Les Citronniers… Il ne pouvait sans doute pas exister
de titre plus juste pour un tel film. Un arbre de vie, filmé dans
son lumineux reflet et sa couleur explosive, avec ses fruits jaunes
gorgés de soleil : une promesse de plénitude et de bonheur coupée
en plein vol. “Le citronnier est un très bel arbre, mais on ne peut
pas manger ses fruits”, dit la chanson du film. Le plan final, très
rude, porte à lui seul tout le sens chargé de cette phrase : le ministre et Salma, chacun d’un côté de mur, seuls, l’un dans son jardin
aseptisé, l’autre au milieu de sa plantation meurtrie, rasée. Deux
êtres, peut-être deux peuples, irrémédiablement isolés l’un de
l’autre. » – Critikat
« Il me semble que le film respecte tous les points de vue, mais
j’envisageais avant tout un film narratif, pas un documentaire.
Je pensais qu’il était plus intéressant d’articuler des liens avec l’Europe et plus facile de structurer l’ensemble par le biais de la fiction.
On a fait beaucoup de recherches et visionné beaucoup d’images
et ça s’est révélé très profitable. Une fiction, ce n’est pas un docufiction. Ce n’est pas une recréation du réel, mais le réel qui agit
comme source d’inspiration. Le film traduit toujours un point de
vue – une reformulation poétique des événements. Très vite, j’ai
songé à filmer des obstacles. Ça commence avec la grande clôture
aux abords de la gare d’Avignon. Uli l’enjambe pour accéder à la
maison de son père. Dans le film, on traverse des pièces, on longe
des cages d’escaliers et on franchit des barrages de police pour
pénétrer dans des endroits interdits d’accès. Une clôture sépare le
rabbin et ses disciples d’Uli, de la police et des militaires. Il y a aussi
une barrière entre les Palestiniens et les Israéliens. Durant tout
le film, la caméra franchit ces barrières, et le spectateur chemine
sans qu’elles puissent l’arrêter. » – Amos Gitaï
Sortie française 23 avril 2008 Distributeur Paradis Films
Format DCP – 1.85 : 1 Production MACT Productions/ Eran
Riklis Productions /Riva Film/Heimatfilm Coproduction ZDFARTE/ARTE France Cinéma/Citrus Films Investors/United King
Films/Metro Communications Producteurs Eran Riklis, Antoine
de Clermont-Tonnerre, Bettina Brokemper, Michael Eckelt
Coproductrice Ira Riklis Scénario Suha Arraf, Eran Riklis Image
Rainer Klausmann Décors Miguel Merkin Costumes Rona Doron
Son Gil Toren, Ashi Milo, Hervé Buirette Montage Tova Ascher
Musique Habib Shehadeh Hanna – Avec Hiam Abbas (Salma
Zidane), Ali Suliman (Ziad Daud), Rona Lipaz-Michael (Mira
Navon), Doron Tavory (Israel Navon), Tarik Copti (Abu Hussam)…
Sortie française 9 avril 2008 Distributeur Ad Vitam Format
35 mm – 1.85 : 1 Production Agav Films Coproduction
Pandora Film/Agat Films/Hamon Hafakot/R & C Productions/
ARTE France Producteurs Amos Gitaï, Laurent Truchot, Michel
Tapuach Coproducteurs Christoph Friedel, Claudia Steffen,
Patrick Sobelman, Tilde Corsy Scénario Amos Gitaï, Marie-José
Sanselme Image Christian Berger Direction artistique Sari
Turgeman Décors Manu de Chauvignon, Eli Zion, Tim Pannen
Costumes Moïra Douguet Montage Isabelle Ingold Son Michel
Kharat, Pascal Villard Musique Simon Stockhausen – Avec
Juliette Binoche (Ana), Liron Levo (Uli), Jeanne Moreau
(Françoise), Barbara Hendricks (Barbara), Dana Ivgy (Dana)…
[ETZ LIMON]
98 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
[DISENGAGEMENT]
ISRAËL / PALESTINE
Les
Méduses
[MEDUZOT]
My Father, [HOFSHAT KAITS]
My Lord
Shira Geffen et Etgar Keret – Israël/France, 2007, 78 mn, coul
David Volach – Israël, 2007, 76 mn, coul
Chassé-croisé des parcours de Keren, Batya et Joy :
bouteilles jetées à la mer, fragments d’humanités qui flirtent
avec l’absurde… Dans un joyeux désordre, chacun cherche
sa place, l’amour, l’oubli ou sa mémoire, car telle est la vie
à Tel-Aviv...
Membre d’une communauté ultra-orthodoxe à Jérusalem,
Rabbi Abraham voue sa vie à l’étude de la Torah. Son fils
Menahem suit sans conviction son père sur le chemin de
la foi. Mais pendant leurs vacances d’été au bord de la mer
Morte, cette foi est mise à l’épreuve…
Le couple de réalisateurs israéliens nous invite à partager les destins entrecroisés de trois femmes dans un Tel-Aviv onirique. Des
méduses, elles ont la même apparente passivité et surtout la nonmaîtrise de leur chemin. Pourtant, les récits de leurs errances nous
tiennent en haleine. Très maîtrisés, ils s’imbriquent entre eux avec
étrangeté. Incarnés par des acteurs extrêmement touchants, les
personnages sont portés au gré du reflux des situations, comme
en attente d’un sens plus profond. – Nicolas Milési
« La Caméra d’or obtenue à Cannes par Les Méduses en 2007 ne
fut pas une si grande surprise pour ceux qui y avaient découvert
ce film israélien, sa structure chorale et fragmentée, son puzzle
existentiel, ses points de suspension, son mélange d’humour et
de dépression, sa petite musique incertaine. On ne savait pas
grand-chose de ses auteurs, Etgar Keret et Shira Geffen, couple
star de la scène culturelle israélienne, mais on a succombé au
charme de ce film corrosif. Les Méduses procède d’un vrai talent
à dépeindre les choses les plus lourdes de la façon la plus légère, à
poser des questions sans apporter de réponses fermes, une façon
comme une autre de rester fidèle à ce qu’il y a de meilleur et de
plus universel dans l’éthique juive. » – Les Inrockuptibles
Ce premier et magnifique film de David Volach a été conçu comme
un dialogue thématique avec le premier épisode du Décalogue de
Krzysztof Kieslowski, exploration et variation autour du sacrifice
d’Isaac. Isaac, ici, a pour nom Menahem, mais son père reste bien
Abraham, conscience talmudique de sa communauté orthodoxe,
de par sa foi inébranlable. Sous l’autorité totale du Créateur, tout
fait sens pour lui : ce que Dieu donne, mais ausi ce qu’il reprend.
Comme Amos Gitaï dans Kadosh, David Volach, lui-même issu
d’un milieu orthodoxe, nous immerge dans le quotidien ultracodifié de ce couple aimant, harmonieux à sa façon, dont on explore
les fondements de la foi, dans le calme puis dans l’épreuve. Tout
comme l’enfant, qui souffre du désenchantement du monde que
son père lui impose, en assujettissant tout à la rude volonté divine.
Ainsi, au nom d’un commandement de la Torah, Abraham décide
de détruire un nid plein d’oisillons qui fait l’émerveillement de
Menahem, car l’obéissance à Dieu est plus importante que la joie
naturelle que porte l’enfance. La scène finale, quant à elle, est bouleversante : du haut du balcon de la synagogue, Esther fait choir un
à un les livres de prières, désormais vains à ses yeux, sur la table où
Abraham prie sans relâche. » – Fiches du Cinéma
Sortie française 5 septembre 2007 Distributeur Pyramide
Format 35 mm – 1.85 : 1 Production Lama Productions/Les
Films du Poisson Coproduction Arte France Cinéma Producteurs Yaël Fogiel, Lætitia Gonzalez, Amir Harel, Ayelet Kait Scénario Shira Geffen Image Antoine Heberle Décors Avi Fahima
Costumes Li Alembik Son Olivier Dô Hùu, Gil Toren, Aviv
Aldema Montage Sasha Franklin, François Gédigier Musique
Grégoire Hetzel, Christopher Bowen – Avec Sarah Adler
(Batya), Nicole Leidman (la petite fille), Gera Sandler (Michael), Noa Knoller (Keren), Manenita De Latorre (Joy)…
Sortie française 23 avril 2008 Distributeur Sophie Dulac
Distribution Format 35 mm – 1.85 : 1 Production Golden Cinema
Coproduction The New Israeli Foundation Producteur Eyal
Shiray Scénario David Volach Image Boaz Yehonatan Yaacov
Direction artistique Yoav Sinai Costumes Meli Horowitz Son
Carl Goetgheluck, Eyal Liebman, Israel David Montage Haïm
Tabeckman Musique Michael Hope, Martin Tillman – Avec
Assi Dayan (Rabbi Abraham Eidelmann), Sharon Hacohen-Bar
(Esther Eidelmann), Ilan Grif (Menahem Eidelmann), Michal
Rubin, Nitsam Bar…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 99
ISRAËL / PALESTINE
Une jeunesse israélienne Valse avec Bachir
[VASERMIL]
[WALTZ WITH BASHIR]]
Mushon Salmona – Israël, 2007, 93 mn, coul
Ari Folman – Israël/France/Allemagne, 2007, 87 mn, coul
Beer Sheva, au sud d’Israël. Shlomi, Adiel et Dima, trois
adolescents d’origines et de confessions différentes, sont
recrutés pour participer à la coupe de foot des jeunes. Ils
vont se rencontrer pour la première fois autour de Vasermil,
le mythique stade de la ville…
Ari s’aperçoit qu’il n’a plus de souvenirs de son expérience
dans l’armée israélienne lors de la première guerre du Liban,
au début des années 1980. Il part à la rencontre d’anciens
camarades afin de découvrir la vérité sur cette période et sur
lui-même…
« Le film prend ses racines dans mon enfance, passée aux abords
du stade de foot de Beer Sheva, le stade Vasermil : des après-midis
entiers à regarder les matches et les entraînements avec leurs lots de
personnages fantasmés sur le terrain, les bons et les méchants, les
favoris et les laissés pour compte. J’ai commencé à écrire le scénario
après avoir tourné un documentaire sur les jeunes de Beer Sheva.
Ma découverte du quotidien de ces adolescents marginaux, à la
fois en termes géographiques et socio-économiques, m’a ouvert les
yeux sur les différences, mais aussi les similitudes avec ma propre
adolescence dans le même quartier, dans les années 70. Le même
environnement multiculturel, la précocité forcée, la dure réalité
économique et un certain désespoir. » – Mushon Salmona
« Comme Mathieu Kassovitz dans La Haine (1995), Mushon Salmona
centre son récit autour d’un trio improbable d’ados. À travers ces
trois jeunes, il évoque, avec justesse, le racisme entre les différentes
communautés israéliennes. Comme Larry Clark dans Ken Park
(2002), Mushon Salmona tend au réalisme-choc pour dépeindre
le quotidien de ces mômes pataugeant dans la petite criminalité,
les embrouilles et le mal-être. Et il vise juste lorsqu’il montre un
pays gangrené par la pauvreté ambiante. » – L’Express
« Pourquoi une mémoire si friable ? Qu’avons-nous désiré à ce
point ne pas voir ? La grande force (esthétique et politique) de
Valse avec Bachir tient dans cette double question que Folman
se pose à lui-même et pose à son pays. Sorte de psychanalyse
historique, le film, en à peine une heure trente, tend un miroir
dérangeant à Israël et à ses enfants. Et ose même avancer – ce
que seul un Israélien peut faire – que la mauvaise conscience
nationale face à ce passé éminemment trouble s’explique peutêtre par un refus collectif de se voir dans la peau du tortionnaire.
Audace sur le fond et, bien sûr, audace sur la forme. Valse avec
Bachir demeure une œuvre atypique et, surtout, historiquement
marquante. À la fin du film, le cinéaste renonce à son procédé.
Des images documentaires (cadavres de Palestiniens, désolation dans les camps, errance des survivants hagards) succèdent
à celles d’animation. Comme si en ayant renoué les fils de sa
propre mémoire, il était temps désormais pour Ari Folman de
montrer ce qu’il était vraiment advenu et qu’il convient de ne
jamais oublier. Un finale exemplaire, impressionnant, pour un
film qui ne peut pas laisser indifférent. » – Rue 89
Sortie française 26 août 2009 Distributeur Sophie Dulac
Distribution Format 35 mm – 1.85 : 1 Production Transfax
Films Productions Producteurs Marek Rosembaum, Michael
Rosembaum, Itaï Tamir Scénario Mushon Salmona Image
Ram Shweky Direction artistique Beni Affer Costumes Sharon
Antebi, Keren Shtark Son Israel David Montage Reut Hahn
Musique Franck Ilfman – Avec David Teplitzsy (Dima), Adiel
Zamro (Adiel), Nadir Eldad (Shlomi), Avinoam Blumenkrantz
(Matan), Benni Adega (Yonatan)…
100 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
Sortie française 25 juin 2008 Distributeur Le Pacte Format
DCP – 1.85 : 1 Production Bridgit Folman /Film Gang/Les Films
d’Ici/Razor Film Coproduction Arte France/ITVS International
Producteurs Ari Folman, Serge Lalou, Yaël Nahlieli, Gerhard
Meixner, Roman Paul Coproducteurs Thierry Garel, Pierrette
Ominetti Scénario Ari Folman Direction de l’animation Yoni
Goodman Responsables d’animation Tal Gadon, Gali Edelbaum
Direction artistique David Polonsky Son Meir Alfassi, Oded
Ringel Montage Nini Feller Musique Max Richter – Avec, dans
leurs propres rôles, les voix de Ari Folman, Ori Sivan, Ronny
Dayag, Shmuel Frenkel, Zahava Solomon…
ISRAËL / PALESTINE
La
Visite de la fanfare
[BIKUR HA-TIZMORET]
Dan
et Aaron
[BROTHERS]
Eran Kolirin – Israël/France/États-Unis, 2007, 87 mn, coul
Igaal Niddam – Suisse, 2008, 116 mn, coul
Une petite fanfare de la police égyptienne arrive en Israël
pour jouer lors de la cérémonie d’inauguration d’un centre
culturel arabe. Par un concours de circonstances, les
musiciens se retrouvent finalement au fin fond du désert
israélien, dans une petite ville oubliée du monde…
Israël. Deux frères que tout sépare se retrouvent après des
années de silence. Dan vit un kibboutz. Aaron arrive des
États-Unis à Jérusalem pour défendre les droits des étudiants
de la Torah. À l’image de leur pays, ils s’aiment avec pudeur,
et vont s’affronter avec passion…
« Quand j’étais enfant, je regardais souvent des films égyptiens
en famille. C’était très courant chez les familles israéliennes, au
début des années 80. Parfois, après le film arabe, ils diffusaient un
concert de l’orchestre de l’Israël Broadcasting Authority. C’était
un orchestre arabe classique, constitué surtout d’Arabes juifs
originaires d’Irak et d’Égypte. Les films arabes ont disparu de
nos écrans depuis longtemps. La chaîne a été privatisée et s’est
noyée dans le flot de chaînes dont on nous a inondés. Et puis,
l’orchestre de l’IBA a été dissous. Israël a construit un nouvel
aéroport, oubliant de traduire les noms des routes en arabe. Parmi
les milliers de boutiques construites là-bas, ils n’ont pas trouvé de
place pour cette étrange écriture incurvée qui représente la langue
maternelle de la moitié de notre population. De nombreux films
ont abordé la question de la paix que nous n’arrivons pas à obtenir, mais très peu de films posent la question de savoir pourquoi
nous avons besoin de cette paix. Ce qui est certain, c’est que nous
avons perdu quelque chose en route. Nous avons échangé l’amour
vrai contre des rencontres d’une nuit, l’art contre le commerce et
les rapports humains contre l’obsession de mettre la main sur la
plus grosse part de gâteau possible. » – Eran Kolirin
« Traitée pour la première fois au cinéma, la question cruciale de la
séparation de l’État et de la religion en Israël est abordée de façon
admirable dans le film d’Igaal Niddam Dan et Aaron. Un sujet explosif et essentiel – la confrontation actuelle entre religieux et laïcs
risquant, selon le réalisateur, de conduire le pays vers une guerre
civile. Ce constat d’un extrême pessimisme est présenté avec une
réelle sensibilité, Igaal Niddam ayant eu l’intelligence d’offrir aux
spectateurs tous les éléments didactiques permettant d’ouvrir
une réflexion objective sur ce problème majeur. Ovationné par le
public parisien du Festival du film israélien en 2009, Dan et Aaron
a été récompensé par deux FIPA d’Or (meilleures interprétations
féminines et masculines) décernés à l’actrice Orna Fitoussi, pour
son interprétation magistrale de l’avocate adversaire d’Aaron, et à
Baruch Brenner, qui joue ce dernier. Acteur incroyable de justesse,
Brenner, pour son premier rôle à l’écran, est la révélation du film.
Une œuvre marquante, qui dénonce l’inquiétante fracture qui
traverse Israël. Le film d’Igaal Niddam ouvre un débat nécessaire
sur le concept d’État juif face à l’intolérance grandissante des
extrémismes religieux, sur les conséquences du poids des partis
religieux dans la vie politique de l’État, particulièrement sur le
processus de paix, et plus généralement sur l’impérieuse nécessité
de dialoguer pour mieux vivre ensemble. » – Jewpop
Sortie française 19 décembre 2007 Distributeur Sophie Dulac
Distribution Format DCP – 1.85 : 1 Production July August
Productions/Bleiberg Entertainment Coproduction Sophie Dulac
Productions Producteurs Eilon Ratzkovsky, Ehud Bleiberg, Yossi
Uzrad, Koby Gal-Raday, Guy Jacoel Coproducteurs Sophie Dulac,
Michael Zana Scénario Eran Kolirin Image Shai Goldman Décors
Eitan Levi Costumes Doron Ashkenazi Son Itai Eloav Montage
Arik Lahav Leibovitz Musique Habib Shehadeh Hanna – Avec
Sasson Gabai (Tewfiq), Ronit Elkabetz (Dina), Saleh Bakri
(Khaled), Khalifa Natour (Simon), Imad Jabarin (Camal)…
Sortie française 21 avril 2010 Distributeur Les Acacias Format
35 mm – 2.35 : 1 Production Troubadour Films Producteur
Nasser Bakhti Coproducteur Philippe Berthet Producteur
exécutif Gil RoehScénario Igaal Niddam, David Belhassen, Roy
Katsiri Image Claudio Steinberg Son Moti Hefetz Montage
Maya Schmid, Kobi Natanael – Avec Baruch Brener (Aaron),
Orna Fitoussi (Shelly), Micha Selectar (Dan), Sharon MalkiSchemech (Yael), Itaï Ganot (Schmuel)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
-
FILMS 101
ISRAËL / PALESTINE
Jaffa [KALAT HAYAM]
Les
Sept Jours
[SHIVA]
Keren Yedaya – France/Israël/Allemagne, 2008, 106 mn, coul
Ronit et Shlomi Elkabetz – Israël/France, 2008, 115 mn, coul
Dans un garage de Jaffa, Reuven emploie sa fille Mali et son
fils Meir, ainsi que Toufik et Hassan, un jeune Palestinien
et son père. Mali et Toufik vivent une idylle secrète. Alors
que les deux amants sont sur le point de partir ensemble,
la tension monte entre Meir et Toufik…
Israël, 1991. Toute la famille Ohaion pleure la disparition de
l’un des siens. Fidèles à la tradition, les proches se réunissent
dans la maison du défunt et s’y recueillent pendant sept
jours. Mais la cohabitation n’est pas si aisée…
« Jaffa repose, dans l’esprit de Karen Yedaya, sur un parti pris esthétique, un refus des conventions du modèle dominant du cinéma “à
l’occidentale”. Il s’agit d’ancrer le cinéma israélien dans une culture
populaire propre, en utilisant des moyens et un langage correspondant aux pratiques et aux goûts familiers d’un public que l’on
veut gagner à sa cause – pas un public de militants, trop souvent
européen, et souvent élitiste, mais le public des petites gens, celui
qui peut se regarder dans le miroir que lui tendent les cinéastes.
Karen Yedaya ne cache d’ailleurs pas qu’elle cherche à retrouver ce
cinéma égyptien qui a nourri son enfance. Aussi, par exemple, pas
de budget pharaonique pour un tournage spectaculaire dans Jaffa,
pas de grue ou de “dolly” – typiques de ces normes occidentales
dont elle veut s’affranchir, de travellings savants et de cadrages étudiés, mais le zoom, plus populaire ; et le choix de réaliser un mélo
populaire, une variation sur le mythe universel, éternel, de Roméo
et Juliette : “une friandise au goût étrange” dit-elle. Et ajoute qu’il
est possible “d’apprécier la culture de l’autre et pas uniquement la
culture européenne, qui reste le paradigme de ce que l’on considère
comme ‘artistique’ ” ». – Jean-Michel Gaillard
« Longtemps le cinéma israélien s’est résumé à un nom : Amos
Gitaï, auquel on pouvait éventuellement ajouter celui d’Assi Dayan
(La Vie selon Agfa). Depuis quelques années, une politique culturelle volontariste – grâce aux lois de 2001 et 2004, cinq fois plus de
films produits chaque année, un excellent accueil du public local
(autrefois exclusivement intéressé par les films américains) et la
reconnaissance dans les grands festivals internationaux ont imposé
de nouveaux cinéastes. Autre exemple qui vient à l’esprit, Ari Folman
et son impressionnant film d’animation Valse avec Bachir. Alors,
nouvelle vague ? Pas sûr. Eran Riklis, l’auteur des Citronniers, le
reconnaît : il serait vain de vouloir rassembler, sous une même
bannière esthétique, tous les cinéastes locaux. La famille Elkabetz
confirme. Shlomi explique : “Un nouveau cinéma, oui. Une nouvelle vague, non. Il n’y a aucun point de comparaison formel entre
les films récents. En revanche, ils adoptent tous un point de vue
personnel et critique sur notre pays. Et Ronit de surenchérir : “La
nouvelle génération de cinéastes partage une conviction : pour
évoquer Israël et ses contradictions, il faut s’éloigner de la prétendue
objectivité des reportages télévisés et raconter des histoires à la
première personne du singulier.” » – Rue 89
Sortie française 10 juin 2009 Distributeur Rezo Films Format
35 mm – 1.85 : 1 Production Bizibi /Transfax Film Production/
Rohfilm Coproduction Arte France Cinéma Producteurs
Jérôme Bleitrach, Emmanuel Agneray, Marek Rozenbaum,
Benny Drechsel, Karsten Stöter Scénario Keren Yedaya, Ila
Ben Porat Image Pierre Aim Décors Avi Fahima Costumes Lee
Alembik Son Dominique Delguste, Jörg Theil Montage Assaf
Korman Musique Shushan – Avec Dana Ivgy (Mali Wolf),
Moni Moshonov (Reuven Wolf), Ronit Elkabetz (Ossi Wolf),
Mahmoud Shalaby (Toufik), Roy Assaf (Meir)…
Sortie française 2 juillet 2008 Distributeur Les Films du Losange
Format 35 mm – 2.35 : 1 Production Thaleia Productions/Zanagar
Films/Eliqa /EZ Films/ July August Productions Producteurs
Jean-Philippe Reza, Eilon Ratzkovsky, Yochanan Kredo, Yossif Uzard,
Guy Jacoel, Éric Cohen, Elie Meirovitz Scénario Ronit Elkabetz,
Shlomi Elkabetz Image Yaron Scharf Direction artistique Benny
Arbitman Costumes Laura Sheim Son Itay Elohev, Hervé Buirette,
Aviv Aldema Montage Joelle Alexis Musique Michel Korb, Sergio
Leonardi – Avec Ronit Elkabetz (Vivianne), Albert Illiouz (Meir), Yaël
Abecassis (Lili), Simon Abkarian (Eliahou), Hana Laszlo (Ita)…
102 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
ISRAËL / PALESTINE
Z32
Ajami
Avi Mograbi – Israël, 2008, 81 mn, coul
Scandar Copti et Yaron Shani – Israël/Allemagne, 2009, 124 mn, coul
Un ex-soldat israélien a participé à une mission de représailles
dans laquelle deux policiers palestiniens ont été tués.
Le soldat témoigne volontairement devant la caméra.
Le cinéaste, tout en cherchant la solution adéquate pour
préserver l’identité du militaire, s’interroge sur sa propre
démarche…
Le quartier d’Ajami, à Jaffa, lieu cosmopolite où cohabitent
juifs, musulmans et chrétiens. C’est au cœur d’une ville
déchirée que vont se croiser les destins de Nasri, Malek,
Binj et Dando…
« Avi Moghrabi accompagne le soldat Z32 sur les lieux de ses plus
rudes combats, mais il le laisse seul face à la caméra, avec sa compagne pour unique interlocuteur, comme seul face à sa propre
conscience. La jeune femme incarne, sans le vouloir, la réaction de
la communauté humaine, effroyablement choquée malgré toute la
bienveillance qu’elle s’efforce d’exprimer. Elle contraint, dans un
premier temps, le jeune homme à verbaliser ses actes, puis à en affronter la réalité. Une autre trouvaille inspirée donne une étoffe formelle
à l’ensemble du film : le témoin, qui souhaite rester anonyme, est
masqué. Mais son masque numérique épouse les traits de son visage,
au point de recréer d’autres visages. Ils matérialisent, au premier sens
du terme, un masque social ; celui derrière lequel le jeune homme
s’est réfugié pour ne pas succomber au poids de la culpabilité.
Il raconte comment il a, logiquement obéi à des ordres sans chercher
à les remettre en cause. Parce qu’il était formé au combat, habitué à
tirer sur des cibles virtuelles, il a tiré et tué des êtres humains comme
s’il s’agissait d’un jeu – avant de finalement prendre conscience de la
portée de ses actes. Les trucages numériques provoquent un sentiment de malaise, quand une cigarette vient traverser un visage et
nous rappelle que nous sommes victimes d’une illusion d’optique,
que la vérité est ailleurs. » – Fiches du Cinéma
« L’Israélien Yaron Shani et le Palestinien Scandar Copti se sont
rencontrés lors d’un festival il y a sept ans. Ils se sont notamment
associés pour la réalisation d’Ajami, leur premier long-métrage.
Ajami rappelle dans sa construction le film qui révéla Alejandro
Gonzáles Iñaritu, Amours Chiennes. La guerre des gangs qu’orchestre le duo de réalisateurs israélo-palestiniens est nettement
moins spectaculaire du simple point de vue de la maîtrise cinématographique. Reste que le film est louable pour la solidité
de son scénario (plutôt complexe) et l’efficacité de son rythme.
La maîtrise des deux cinéastes est réelle, tant le film mélange de
manière intelligente non seulement les différentes sous-intrigues,
mais aussi les divers registres émotionnels. Ajami est un film
dense, captivant et qui ne nous abandonne qu’au moment de
l’orchestration finale. Très classiquement, les trajectoires se rejoignent, ou plutôt se confrontent. Mais il faut un certain talent pour
que tout finisse par coïncider. Ajami est en plus un premier film.
La maîtrise du duo de cinéaste n’en est que plus éloquente. » –
Laterna Magica
Sortie française 18 février 2009 Distributeur Les Films du
Losange Format 35 mm – 1.85 : 1 Production Les Films d’Ici
Coproduction Le Fresnoy – Studio national des arts contemporains Producteurs Avi Mograbi, Serge Lalou Scénario Avi
Mograbi, Noam Enbar Image Philippe Bellaïche Effets spéciaux
Eran Feller Effets visuels Avi Mussel Son Dominique Vieillard
Montage Avi Mograbi Musique Noam Enbar – Avec les
interventions d’Avi Mograbi et du soldat Z32.
Sortie française 7 avril 2010 Distributeur Ad Vitam Format
35 mm – 1.85 : 1 Production Inosan Coproduction ZDF/ARTE
Producteurs Mosh Danon, Thanassis Karathanos Producteur
délégué Zehava Shekel Coproductrice Talia Kleinhendler
Producteurs exécutifs Rupert Preston, Allan Niblo, James
Richardson Scénario Scandar Copti et Yaron Shani Image
Boaz Yehonatan-Yacov Direction artistique Yoav Sinai Son Kei
Tebbel Montage Scandar Copti, Yaron Shani, Burkhard Althoff,
Doris Hepp Musique Rabiah Buchari – Avec Shahir Kabaha
(Omar), Ibrahim Frege (Malek), Fouad Habash (Nasri), Youssef
Sahwani (Abu Elias), Ranin Karim (Hadir)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 103
ISRAËL / PALESTINE
Le Temps qu’il reste
Le Vagabond
Elia Suleiman – France/Palestine/Belgique/Italie, 2009, 105 mn, coul
Avishai Sivan – Israël, 2010, 86 mn, coul
De la création de l’État d’Israël en 1948 à nos jours, l’histoire
d’une famille palestinienne à Nazareth : Fuad, membre de
la résistance palestinienne ; sa femme ; leur fils E.S., en
quête d’identité, et qui grandira entre les manifestations et
la répression…
Jeune étudiant en Yeshiva, Isaac est fils unique de parents
juifs orthodoxes. Pris en étau entre une famille névrotique et
son corps qui le trahit, il trouve refuge dans l’errance.
Perturbé par la découverte de sa stérilité, Isaac voudrait
trouver des explications dans l’obscur passé de son père…
Sans élan patriotique ni démesure nationaliste, Elia Suleiman
croise l’expérience cocasse de sa famille avec l’histoire dramatique
de la Palestine. Plus que de valoriser l’éternel motif de l’entremêlement des niveaux d’histoire, il formule les évènements de la communauté palestinienne à sa dimension. Dans le champ aride des
Palestiniens aux yeux bandés, tenu par le joug des armes israéliennes en plein soleil, résonne l’asservissement absolu de la Palestine
au diktat d’Israël. Le point de vue est partial, acerbe, laisse s’ouvrir
des instants d’absurde, mais contente un regard subjectif. Distinct
des volontés égalitaires d’Amos Gitaï (avec lequel Suleiman a coréalisé Guerre et paix à Vesoul), Le Temps qu’il reste ne s’encombre
pas des sagesses de l’âge pour recouvrer, alors que le cinéaste
avoisine les 50 ans, les fougues de la jeunesse. La résurrection de
Suleiman en jeune homme par lui-même permet, plus encore que
de redonner une vigueur à ses idées, de retrouver la jeunesse de
son corps. La recherche d’un temps perdu à travers “le temps qu’il
reste” est la quête menée par le film. Et la grande réussite cinématographique de Suleiman réside bien là : enregistrer la mobilité
des frontières de la Palestine à travers l’évolution intime de ceux
qui l’habitent. » – Flavien Poncet
« Avishai Sivan décrit le quotidien de Itzhak adolescent fils unique
élevé par ses parents dans les plus strictes traditions religieuses.
Prières, étude de la Torah, repas frugaux constituent son quotidien grisâtre. Alors Itzhak somatise : il souffre de calculs rénaux,
et d’un problème aux testicules ! Avec un humour très pince-sans
rire, Sivan invente des scènes où ce jeune religieux doit fournir un
échantillon de son sperme aux médecins. Grâce aux tourments
de son corps et à la médecine, Itzhak s’échappe de son quotidien
morose et part à la découverte de la ville. La mise en scène de
Sivan est épurée, minimale, consistant en plans fixes très cadrés et
très sobres, des dialogues ténus et pas de musique. C’est à la fois
beau, rigoureux, et un peu spartiate. Si Sivan brocarde subtilement la foi extrême, son esthétique est paradoxalement très monastique. » – Les Inrockuptibles
« L’austérité toute contemplative (plans fixes, lumière blafarde)
de ce premier film colle au quotidien morose et répétitif du
héros. Seule soupape dans cette charge contre l’extrémisme religieux : un humour à froid et des fulgurances burlesques dignes de
Tati. Comme ce plan sur un frigo immaculé rempli de douzaines
d’œufs à coquille blanche, à l’exception de tout autre aliment. Ou
comment rendre le trivial anxiogène. » – Télérama
[THE TIME THAT REMAINS]
Sortie française 12 août 2009 Distributeur Le Pacte Format
35 mm – 1.85 : 1 Production The Film Coproduction Nazira
Films/France 3 Cinéma/Artemis Productions/RTBF/Belgacom/Bim
Distribuzione Producteurs Michael Gentile, Elia Suleiman
Coproducteur Hani Farsi Producteurs associés Maya Sambar,
Avi Kleinberger Scénario Elia Suleiman Image Marc-André
Batigne Décors Sharif Waked Son Pierre Mertens, Christian
Monheim Montage Véronique Lange – Avec Elia Suleiman (E.S.),
Saleh Bakri (Fuad), Samar Qudha Tanus (la mère, en 1970-80),
Shafika Bajjali (la mère, aujourd’hui), Tarek Qubti (le voisin)…
104 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
[HA’ MESHOTET]
Sortie française 30 mars 2011 Distributeur Sophie Dulac
Distribution Format 35 mm – 1.85 : 1 Production The Mouth
Agape Producteurs Keren Michael, Shai Goldman, Avishai &
Redi Sivan Coproducteurs Shmulik Avtalion, Oren Arzoni, Eitan
Mansuri Scénario Avishai Sivan Image Shai Goldman Décors
Yang Yuval Gilad, Lin Baru Costumes Noa Yallon Son Alex
Claude Montage Nili Feller, Avishai Sivan – Avec Omi Fuhrer
(Isaac), Ali Nassar (le père), Ronit Peled (la mère), Shani
Ben-Haim (Dafna), Tami Barak…
ISRAËL / PALESTINE
Le
Policier
[HA-SHOTER]
The
Gatekeepers [ISRAËL CONFIDENTIAL/
SHOMREI HASAF]
Nadav Lapid – Israël, 2011, 107 mn, coul
Dror Moreh – France/Israël/Belgique/Allemagne, 2012, 95 mn, coul,
doc
Yaron intègre un groupe de policiers d’élite, au sein d’une
unité antiterroriste israélienne, alors que sa femme est sur
le point d’accoucher. Sa rencontre avec un groupe violent et
radical le confrontera à la guerre des classes israélienne et
à celle qu’il livre contre lui-même…
Six anciens chefs du Shin Beth, le service de la sécurité
intérieure d’Israël, racontent 30 ans de lutte antiterroriste
et d’errements face à la question palestinienne, mais aussi
contre l’extrême droite religieuse juive. Une histoire secrète
qui débute en 1967 et court jusqu’à fin 2011……
« C’est l’histoire de l’Israël des clivages, des paradoxes, à cheval
entre Occident et Proche-Orient, d’une société martelée et paralysée par la peur de ses voisins. Ce film retrace en parallèle deux
fragments de vie, d’un côté la police, cette camaraderie, cette
force, cette masculinité, cet esprit de corps incarné par Yaron.
De l’autre une jeunesse aux visages d’anges, mais révoltée, radicale, prête à tout pour ses idées. Nadav Lapid livre ici sa vision
d’Israël, d’un conflit oublié, intrinsèque au pays. Ici, pas de noir,
pas de blanc, que du gris, chacun de nous est face à ses contradictions. Les plans-séquences sont longs, bruts, la caméra tourne
autour des personnages, les artifices musicaux, effets spéciaux
inexistants, les décors austères. Et les personnages, chacun à leur
tour, se torturant, se questionnant pour au final se retrouver et se
déchirer dans une cave, en somme l’histoire sombre d’Israël. » –
J. Volpilhac
« Cela faisait longtemps qu’un premier long métrage n’avait
démontré une telle maîtrise dans la mise en scène, capable de
dialoguer immédiatement avec les films de Godard, Bresson,
Fassbinder, Kubrick ou Haneke, et de susciter chez les spectateurs
les plus clairvoyants la certitude d’assister à la naissance d’un
excellent cinéaste, mais aussi de découvrir un film important,
aussi brillant dans sa forme qu’intelligent dans son propos. »
– Olivier Père
« Dans The Gatekeepers, j’ai réussi à interroger des hommes qui
ont le pouvoir de façonner l’histoire depuis ses coulisses. Vivant
dans l’ombre, c’est la première fois qu’ils s’expriment devant une
caméra. L’idée de ce film m’est venue lors du tournage de mon
précédent documentaire, Sharon. En discutant avec le cercle des
conseillers du Premier ministre, j’ai appris que les critiques émanant de certains de ces Gatekeepers avaient beaucoup influencé
Sharon dans sa décision d’évacuer Gaza. Je suis allé trouver chacun
d’eux et je leur ai demandé de me raconter leur histoire. Je voulais
qu’ils témoignent sur leur vision unique du conflit israélo-palestinien. J’ai été tout autant stupéfait que ravi quand ils ont accepté.
Cela me donnait une occasion unique, d’entrer dans le cercle
intime des hommes qui ont conduit le processus de décision
israélien depuis près d’un demi-siècle. Ils ont été présents durant
toutes les périodes charnières de l’État d’Israël depuis la guerre
des Six Jours. Jour après jour, quand je menais ces entretiens, je
me voyais poser un regard incrédule sur ces soldats anonymes.
Leurs histoires et leurs témoignages étaient souvent accablants.
Je ne pouvais m’empêcher de me demander jusqu’à quel point
je serais allé moi-même si j’avais été confronté aux dilemmes
cruciaux qui constituaient leur quotidien. Je me le demande
encore. » – Dror Moreh
Sortie française 28 mars 2012 Distributeur Bodega Films Format
DCP – 1.85 : 1 Production HOT/Laïla Films/Rabinovich Film Fund
Cinema Project Producteur Itai Tamir Scénario Nadav Lapid
Image Shai Goldman Direction artistique Avi Fahima Costumes
Amit Berlowitz Son Israel David Montage Era Lapid – Avec
Yiftach Klein (Yaron), Yaara Pelzig (Shira), Michael Moshonov
(Oded), Menashe Noy (Michaël), Michael Aloni (Nathanaël)…
Première diffusion française 5 mars 2013 [Arte] Distributeur
Les Films du Poisson Format DVD – 1.85 : 1 Production
Les Films du Poisson/Dror Moreh productions/Cinephil/Wild
Heart Productions/Arte France/NDR /IBA /RTBF Producteurs
Dror Moreh, Estelle Fialon, Philippa Kowarsky Image Avner
Shahaf Direction artistique et décors Doron Koren Son Alex
Claude Montage Oron Adar Musique Régis Baillet, Jerôme
Chassagnard
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 105
ISRAËL / PALESTINE
Omar
Le Procès [GETT]
de Viviane Amsalem
Hany Abu-Assad – Palestine, 2013, 96 mn, coul
Ronit et Shlomi Elkabetz – Israël/France/Allemagne, 2014,115 mn,
coul
Omar vit en Cisjordanie. Il franchit quotidiennement le mur
qui le sépare de Nadia, la fille de ses rêves et de ses deux
amis d’enfance, Tarek et Amjad. Les trois garçons ont décidé
de créer leur propre cellule de résistance, mais Omar est
capturé. Il est relâché contre une promesse de trahison…
Viviane Amsalem demande le divorce depuis trois ans, et
son mari Elisha le lui refuse. Or en Israël, seuls les rabbins
peuvent prononcer le divorce, avec le plein consentement
du mari. Se dessinent les contours d’une procédure absurde
et tragique où l’on juge de tout, sauf de la requête initiale…
« L’objectif de Hany Abu-Assad n’est pas de faire l’apologie des
attentats-suicides. Il ne les juge pas non plus. Il essaye de comprendre et d’expliquer le processus à partir de documents fouillés, de
dossiers réels sur les mécanismes qui peuvent conduire un homme
à se transformer en bombe humaine. Un homme qui vit en Palestine, dans l’injustice extrême de l’occupation et d’une politique de
colonisation que la communauté internationale laisse se perpétuer
dans une totale impunité. Avec Omar, prix du jury Un certain
regard à Cannes en 2013 et récent lauréat des prix du meilleur long
métrage et du meilleur réalisateur au Festival du film de Dubaï
(décembre 2013), Hany Abu-Assad nous laisse pénétrer au plus
profond du mécanisme psychologique des personnages avec une
grande maîtrise. Hany Abu-Asaad arrive à tenir tous les fils. Il nous
montre une fois de plus comment l’oppression de la société traditionnelle palestinienne finit aussi par piéger les personnages. Car
si les Palestiniens endurent collectivement l’oppression de l’occupant, ce qui crée un mouvement solidaire, ils subissent en parallèle
le poids du groupe social, de la famille, de la communauté qui
empêchent leur individualité de s’émanciper. L’interdit, amoureux
autant que politique, brouille les pistes. » – Orient XXI
« On retrouve dans Le Procès de Viviane Amsalem les thèmes de
prédilection de Ronit et Shlomi Elkabetz, à savoir : la vie en couple
face aux traditions religieuses, la pression de la famille, la difficile
émancipation féminine dans la société israélienne. Le dispositif
dramaturgique est à nouveau resserré et tendu : à savoir un inlassable face à face contraint dans l’espace, dilué dans le temps. Inspiré
de faits réels, Le Procès de Viviane Amsalem met sur la place publique des règles concernant le divorce religieux en Israël qui semblent
être d’un autre temps et qui, pourtant, s’appliquent. On assiste à
un film de procès et à une œuvre de combat. On suit, d’abord avec
surprise, puis avec perplexité, et enfin avec un mélange de révolte
et de tension, un match judiciaire à armes inégales interprété avec
force par Ronit Elkabetz elle-même et l’excellent Simon Abkarian,
bien calé dans son rôle de “méchant” inexpugnable dans sa position
de mari tout-puissant, indifférent aux sentiments de son épouse.
Particulièrement bien écrit, concentré sur l’essentiel, sachant ménager des surprises et quelques pointes d’humour inattendues, le film
a, in fine, la force d’un bulldozer. Au fur et à mesure qu’il avance, il
balaye toutes les éventuelles contradictions. » – François Aymé
Sortie française 16 octobre 2013 Distributeur Pretty Pictures
Format DCP – 2.35 : 1 Production ZBROS Producteurs
Waleed Zuaiter, David Gerson Producteur exécutif Baher
Agbariya Producteurs délégués Abbas Zuaiter, Ahmad Zuaiter,
Waleed Al-Ghafari, Zahi Khouri, Farouq Zuaiter, Suhail Sikhtian
Scénario Hany Abu-Assad Image Ehab Assal Décors Nael Kanj
Costumes Hamada Atallah Son Christian Conrad Montage Martin Brinkler, Eyas Salman – Avec Adam Bakri (Omar), Waleed
Zuaiter (l’agent Rami), Leem Lubany (Nadia), Samer Bisharat
(Amjad), Eyad Hourani (Tarek)…
106 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
Sortie française 26 janvier 2005 Distributeur Les Films du
Losange Format DCP – 1.85 : 1 Production Elzévir Films/DBG
Films/Riva Filmproduktion Producteurs Marie Masmonteil,
Sandrine Brauer, Shlomi Elkabetz Coproducteurs Denis Carot,
Michael Eckelt Producteurs exécutifs Efrat Bigger, Annette Unger
Scénario Ronit Elkabetz, Shlomi Elkabetz Image Jeanne Lapoirie
Décors Ehud Gutterman Costumes Li Alembik Son Tully Chen
Montage Joelle Alexis Musique Michel Korb – Avec Ronit
Elkabetz (Viviane Amsalem), Simon Abkarian (Eliahou),
Menashe Noy (Carmel), Sasson Gabay (Shimon), Eli Gorstein
(le juge principal)…
May in the Summer
Cherien Dabis – Jordanie/Qatar/États-Unis, 2013, 100 mn, coul
Jordanie
May in the Summer
May, une jeune jordanienne installée à New York, vient passer l’été en famille à Amman. De confession chrétienne, elle
s’apprête à épouser un musulman, au grand dam de sa mère
pratiquante. May peut néanmoins compter sur le soutien de
ses deux sœurs cadettes, aux mœurs plus libérées…
« Cherien Dabis livre une œuvre ambitieuse avec, en toile de fond,
une ville méconnue : Amman. May in the Summer a en effet pour
lui une fluidité narrative impressionnante. Car Cherien Dabis brasse
large, menant de front un scénario qui aborde le métissage, la religion, le couple, la sexualité, la tolérance. Elle slalome entre les écueils
en évitant une certaine complaisance. La seule coquetterie qu’elle
s’accorde est un plaisir de cinéma : un format Scope qui lui permet
de filmer avec ampleur une ville rarement montrée sur grand
écran. » – L’Express
« Les dialogues rythmés et délicieusement incisifs rendent les personnages à la fois crédibles, drôles et attachants. On croit à leurs
histoires, on sourit à leurs maladresses, et on partage leurs souffrances. Bill Pullman est touchant en père indigne face à une Hiam
Abbass sublime dans son austérité de mère rigide et de femme
blessée. Dans le rôle principal, Cherien Dabis livre une performance
saisissante par sa retenue quasi olympienne et pleine de grâce. » –
Lioumness Magazine
Sortie française 7 mai 2014 Distributeur Memento Films Format
DCP – 2.35 : 1 Production Displaced Pictures / Anonymous
Content / Durga Entertainment / Whitewater Films Producteurs
Cherien Dabis, Alix Madigan, Christopher Tricarico Coproducteurs Beau J. Genot, Joy Goodwin, Sabine Sidawi-Hamdan
Producteur exécutif Nick Morton Producteurs associés Tara
Moross, Kishori Rajan, Michael J. Urann Scénario Cherien Dabis
Image Brian Rigney Hubbard Direction artistique Ola Maslik,
Rand Abdel Nour Décors Abed Jarekji Costumes Beatrice Harb
Montage Sabine Hoffmann Son Tom Efinger Musique Kareem
Roustom – Avec Cherien Dabis (May), Alia Shawkat (Dalia),
Nadine Malouf (Yasmine), Hiam Abbass (Nadine), Bill Pullman
(Edward Brennan)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 107
Terra Incognita
Ghassan Salhab – France/Liban, 2002, 120 mn, coul
Liban
Terra Incognita
Le Cerf-Volant
A Perfect Day
Caramel
Et maintenant on va où ?
A World Not Ours
Cinq destins perdus dans un Beyrouth en pleine reconstruction.
Laminé par dix-sept ans de guerre, la ville et ses habitants
tentent de se réinventer, à l’image de Soraya, Leyla, Tarek,
Nadim et Haïder...
« Dans une ville marquée par la guerre, écartelée entre un passé
qui ne passe pas et un futur incertain, Ghassan Salhab dresse le
portrait d’une jeunesse aussi fracassée que son environnement.
Comment, en effet, se situer dans une ville qui a connu dix-sept
ans de guerre ? Comment s’envisager dans un champ d’habitation
tant de fois détruit et reconstruit ? Beyrouth demeure difficile à
identifier, car peu préhensible comme point de repère. Les personnages que Ghassan Salhab fait se croiser sur ce terrain mouvant
sont tous révélateurs de la difficulté de se positionner sur ce sol
libanais existant avant tout comme point de détachement plus
que comme port d’attache. Plusieurs fois durant le film, le personnage de Soraya observe les dessins des livres de médecine de son
frère. L’anatomie d’un corps et celle, impossible, d’une ville éclatée,
meurtrie. C’est principalement dans la rue que Ghassan Salhab
filme ses personnages. Physique, charnelle, Soraya (Carole Abboud,
magnifique) marche, incroyablement là et totalement ailleurs.
Peut-on savoir où elle va quand, le visage recouvert de bleus,
tabassée par un amant parce qu’elle l’a ignoré dans la rue, elle
avance dans Beyrouth, le regard fixe, déterminée ? On ne sait pas,
mais on est tenté de voir dans ce visage marqué un mur qui, au
milieu de tant d’autres qui se sont écroulés, a décidé coûte que
coûte de rester droit. » – Les Inrockuptibles
Sortie française 12 février 2003 Distributeur Ad Vitam Format
35 mm – 1.85 : 1 Production Agat Films & Cie/GH Films
Producteur Nicolas Blanc Scénario Ghassan Salhab Image
Jacques Bouquin Décors Rouba Asmar Son Patrick Allex
Montage Gladys Joujou Musique Toufic Farroukh – Avec
Carole Abboud (Soraya), Abla Khoury (Leyla), Rabih Mroueh
(Tarek), Walid Sadek (Nadim), Carlos Chahine (Haïdar)…
108 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
LIBAN
Le
Cerf-Volant
[THE KITE]
Randal Chahal Sabbag – France/Liban, 2003, 80 mn, coul
A Perfect Day
Joana Hadjithomas et Khalil Joreige – France/Liban/Allemagne,
2006, 92 mn, coul
Lamia, 16 ans, vit au Liban, juste à côté de la frontière avec
Israël. Là, aux bords des barbelés et des terrains minés, elle
joue avec son petit frère. Elle apprend qu’elle va être mariée
avec son cousin. Mais pour cela, il faut qu’elle franchisse la
frontière...
Quatre heures de la vie de Malek dans le Beyrouth
d’aujourd’hui. Et si aujourd’hui était « le jour parfait » pour
échapper à ses fantômes et retrouver ceux que l’on a
perdus ?
« Troisième long métrage de la réalisatrice libanaise Randal Chahal
Sabbag, cette fable attachante et cruelle rend compte avec poésie
de la douleur des séparations imposées par la politique des armes.
En partant du particulier qu’est la situation de ce village du
Golan, coupé à vif par l’annexion israélienne, le récit tend à
l’universel des déchirures entre les peuples par un traitement
onirique et symbolique de l’amour impossible qui unit Lamia
et Youssef. La mise en scène allie délicatesse et subtilité, mais
n’exclut pas la cocasserie. En témoignent les séquences où les
femmes des deux familles, hurlant dans des mégaphones de part
et d’autre de la frontière, vantent les mérites respectifs des futurs
mariés dans une langue aussi verte qu’imagée. Le scénario, en
adéquation avec la réalisation, joue sur des registres variés : émotions aussi impalpables que violentes, drôlerie d’une chronique
familiale, amertume d’un amour saccagé. Lion d’Argent au festival
de Venise 2003, ce film, qui n’est pas sans évoquer par instant
Intervention divine d’Elia Suleiman (en moins combattant),
bénéficie de plus d’une splendide photographie et d’une belle distribution. Le beau visage de la jeune Flavia Béchara, sa présence douce
et obstinée, tout comme la prestation magnifiquement désabusée
de Tamin El Chahal sont inoubliables. » – Fiches du Cinéma
« Au-delà de la nationalité de la coproduction et sous un titre anglophone, A Perfect Day est un film profondément libanais dans sa
manière d’aborder une situation contemporaine marquée par un
passé douloureux. Face à une femme qui n’a jamais touché un seul
objet dans la chambre de son mari disparu et qui, contre toute
attente, cherche encore à retarder la démarche auprès de l’homme
de loi, le fils essaie de vivre, alors même que ses crises de narcolepsie
provoquent un endormissement, plus symbolique que somatique,
face à la réalité. Dans une ville bruyante qui se projette dans la
modernité pour mieux oublier (ou mieux nier) les traumatismes
du passé et les menaces du présent, les gens s’agitent dans le chaos
automobile, les messages publicitaires de la journée et la cacophonie
des boîtes de nuit. Déchiré entre le souvenir du père, les attentes de
la mère, les déceptions amoureuses, le protagoniste, Malek, avance
à tâtons; il cherche même à brouiller sa perception du monde en
glissant des lentilles de contact sur des yeux qui n’en ont pas besoin.
Assoupi sur un banc, en bordure de mer, il se lance au petit matin
dans une course libératoire. » – Positif
Sortie française 18 février 2004 Distributeur Pyramide Format
35 mm – 2.35 : 1 Production Ognon Pictures Coproduction
Leil Films / Ulysse Productions / Gimages Films / Soread 2M
/ Arte France Cinéma Producteur Humbert Balsan Scénario
Randal Chahal Sabbag Image Alain Levent Décors Sylvain
Chauvelot Son Jérôme Ayasse, Fawzi Tabet, Joël Rangon
Montage Marie-Pierre Renaud Musique Ziad Rahbani – Avec
Flavia Béchara (Lamia), Maher Bsaibes (Youssef), Randa
Asmar (Amira), Renée Dick (Mabrouke), Ziad Rahbani (Ziad)...
Sortie française 1er mars 2006 Distributeur Celluloid Dreams
Format 35 mm – 1.85 : 1 Production Mille et Une Productions
Coproduction Abbout Productions/Twenty Twenty Vision
Producteurs Anne-Cécile Berthomeau, Édouard Mauriat
Coproducteurs Georges Schoucair, Thanassis Karathanos
Scénario Joana Hadjithomas, Khalil Joreige Image Jeanne
Lapoirie Décors et costumes Sophie Khayat Son Guillaume
Le Braz, Sylvain Malbrant, Olivier Goinard Montage Tina
Baz-Le Gal Musique Scrambled Eggs, Soap Kills – Avec
Ziad Saad (Malek), Julia Kassar (Claudia), Alexandra Kahwagi
(Zeina), Rabih Mroué (l’homme au téléphone), Carole Schoucair
(le médecin)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 109
LIBAN
Caramel
Et maintenant
on va où ?
Nadine Labaki – France/Liban, 2007, 96 mn, coul
Nadine Labaki – France/Liban/Italie/Égypte, 2011, 100 mn, coul
À Beyrouth, cinq femmes se croisent régulièrement dans
un institut de beauté, microcosme coloré où plusieurs
générations se rencontrent, se parlent et se confient.
Au salon, les hommes, le sexe et la maternité sont au cœur
de leurs conversations intimes et libérées…
En route pour le cimetière du village, une procession de
femmes en noir affronte la chaleur. Elles portent le voile ou
une croix, mais toutes partagent le même deuil, conséquence
d’une guerre funeste. Arrivé à l’entrée du cimetière, le
cortège se sépare en deux : l’un musulman, l’autre chrétien.
« Aujourd’hui, dans cette partie (orientale) du monde, le Liban
apparaît comme un exemple d’ouverture, de libération et d’émancipation. Mais ce n’est pas toujours vrai. Derrière cette façade, nous
subissons encore beaucoup de contraintes, la crainte permanente du
regard des autres et la hantise de leur jugement. Dans ce contexte,
la femme libanaise est minée par les remords et la culpabilité. Dans
ce salon de coiffure et d’esthétique, mes héroïnes se sentent en
confiance. C’est un lieu où, même si l’on est regardé dans ce qu’on
a de plus intime, on n’est jamais jugé. » – Nadine Labaki
« D’un film venu du Liban ces jours-ci, on imagine, a priori, une
part d’engagement politique. Caramel, premier long métrage
d’une cinéaste prometteuse, semble d’abord tout autre chose :
une galerie de portraits de femmes, dans un salon de beauté
de Beyrouth. Pourtant, cette comédie pleine de charme et de
finesse esquisse aussi le dessin d’un Liban en pleine mutation,
où le rôle et la place des femmes changent. Les portraits sonnent
juste et livrent, comme un écho, toute la tendresse et l’agacement
qu’éprouve Nadine Labaki pour son pays. Caramel est une chronique chaleureuse et optimiste, qui respire la vie et l’espoir, la
cire et le henné. » – Télérama
« Tourner en dérision le malheur qui nous arrive est une manière
de survivre et de trouver de l’énergie pour rebondir. En tout cas,
pour moi, c’est une nécessité. J’ai voulu que le film soit autant une
comédie qu’un drame et qu’il suscite autant le rire que l’émotion.
Ce n’est pas une histoire sur la guerre mais, au contraire, sur
comment éviter la guerre. On ne peut pas vivre au Liban sans
ressentir cette menace qui, finalement, déteint sur ce que l’on fait
et sur notre manière de s’exprimer. » – Nadine Labaki
En 2007, Nadine Labaki avait enchanté le public avec son film
Caramel. Enfin, le Proche-Orient était représenté à l’écran à
travers une vision féminine, moderne et chaleureuse. Avec Et
maintenant, on va où ? , la cinéaste libanaise continue dans la
même voie. Sur le mode de la fable, Nadine Labaki défend avec
vigueur et humour la réconciliation, le vivre ensemble. Elle fait
sauter les tabous, met les sujets qui fâchent sur la table et transforme les femmes de son village en héroïnes rusées, courageuses
et déterminées. Au final, l’auteur nous délivre un opportun message humaniste sans oublier, à aucun moment, de réjouir le
spectateur. – François Aymé
Sortie française 15 août 2007 Distributeur Bac Films Format
35 mm – 1.85 : 1 Production Les Films des Tournelles Coproduction Les Films de Beyrouth/ Roissy Films/Sunnyland /ARTE France
Cinéma Productrice Anne-Dominique Toussaint Producteur associé Raphaël Berdugo Scénario Nadine Labaki, Jihad Hojeily, Rodney
Al Haddad Image Yves Sehnaoui Décors Cynthia Zahar Costumes
Caroline Labaki Son Pierre-Yves Lavoué, Emmanuel Croset Montage Laure Gardette Musique Khaled Mouzanar – Avec
Nadine Labaki (Layale), Yasmine Al Masri (Nisrine), Gisèle Aouad
(Jamale), Joanna Moukarzel (Rima), Adel Karam (Youssef)…
110 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
Sortie française 14 septembre 2011 Distributeur Pathé Distribution Format DCP – 2.35 : 1 Production Les Films des Tournelles/
Pathé/Les Films de Beyrouth/ United Artistic Group/Chaocorp/
France 2Cinéma/Prima TV Productrice Anne-Dominique Toussaint Production exécutive Ginger Beirut Productions Scénario
Nadine Labaki, Jihad Hojeily, Rodney Al Haddad Image Christophe
Offenstein Décors Cynthia Zahar Costumes Caroline Labaki
Son Michel Casang, Gwennolé Le Borgne, Dominique Gaborieau
Montage Véronique Lange Musique Khaled Mouzanar – Avec
Claude Baz Moussawbaa (Takla), Layla Hakim (Ataf), Nadine
Labaki (Amale), Yvonne Maalouf (Yvonne)…
LIBAN
A
World Not Ours
[ALAM LAYSA LANA]
Mahdi Fleifel – Grande-Bretagne/Liban/Danemark/Émirats Arabes
Unis, 2012, 93 mn, coul, doc
Le portrait de trois générations d’exilés dans le camp de
réfugiés d’Ein el-Helweh, dans le sud du Liban...
« Les premiers courts métrages de Mahdi Fleifel ont été projetés
et primés dans de nombreux festivals à travers le monde, avant
qu’il ne passe à la réalisation de son premier long métrage, A World
Not Ours. Dans ce journal en images, Mahdi Fleifel dresse avec
sensibilité et humour le portrait intimiste de trois générations
d’exilés dans le camp d’Ain el-Helweh, dans le sud du Liban, où
il a lui-même grandi. Par un kaléidoscope d’enregistrements
personnels, d’archives familiales en 8 mm et de séquences historiques, il illustre la vie quotidienne de trois générations palestiniennes, tenues hors du monde. Pour la plupart d’entre nous,
l’identité est un acquis : qui nous sommes, d’où l’on vient et ce
que nous sommes est rarement remis en question. Mais pas pour
les Palestiniens, constamment priés d’apporter la preuve de leur
identité, ballottés entre un territoire perdu, la réalité des camps
et un avenir contesté. » – Festival des Droits de l’homme
« Dans le flux ininterrompu des images tournées en Palestine, dans
l’intarissable production des documentaires sur les Palestiniens,
voici un film qui sort du lot. A World Not Ours imbrique son
histoire, qu’il raconte de sa voix off chantante, avec celle du peuple
palestinien, et celle de son clan, les réfugiés d’Ain el-Helweh, lesquels, après avoir longtemps cultivé des espoirs de retour au pays,
sont aujourd’hui rongés par une bile noire. » – Le Monde
Sortie française 4 décembre 2013 Distributeur Eurozoom
Format DCP – 1.85 : 1 et 1.33 : 1 Production Nakba Filmworks
/Screen Institute Beirut Producteurs Patrick Campbell, Mahdi
Fleifel Producteur associé Ça lar Kimyoncu Scénario Mahdi
Fleifel Image Mahdi Fleifel Son Zhe Wu Montage Michael
Aaglund Musique Jon Opstad – Avec dans leurs propres rôles
Ahmad Mufleh Alaeddine, Said Mufleh Alaeddine, Bassam
Taha, Hoda Fleifel, Taleb Fleifel…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
-
FILMS 111
Étoiles [NOUJOUM AL NAHAR/STARS IN BROAD DAYLIGHT]
de jour
Syrie
Ossama Mohammed – Syrie, 1988, 105 mn, coul
Étoiles de jour
La Fiancée syrienne
Voyage dans la mémoire
Les Chebabs de Yarmouk
Eau argentée, Syrie autoportrait
Syrie, enfants en guerre
Syrie, le crépuscule des Assad
Ossama Mohammad aborde la question du patriarcat, et
notamment de l’exode rural, phénomène grandissant en
Syrie, à travers les péripéties de la célébration d’un double
mariage dans une famille rurale alaouite…
Avant Eau argentée, le film qui l’a fait mieux connaître au public
français, Ossama Mohamed avait réalisé deux longs-métrages :
Étoiles de jour, sélectionné et primé à la Quinzaine des réalisateurs
en 1990, et Sacrifices, présenté en sélection officielle à Cannes en
2003. Il avait également réalisé un court-métrage, Step by step,
sélectionné au festival de Berlin en 2012. Ces films ont été censurés
par les autorités syriennes et de fait n’ont jamais été montrés en
Syrie. Le réalisateur s’est fait connaître du grand public lors du
Festival de Cannes 2011, où il participait à une table ronde sur
le thème : « Cinéma et dictature ». Depuis cette intervention
fracassante, il n’est jamais rentré en Syrie.
« En 1988, Ossama Mohammed réalise un autre film, Noujoum
Al Nahar (Étoiles de jour). L’histoire fait froid dans le dos : dans un
douar perdu du littoral syrien, une famille alaouite subit le dictat
d’un enfant gâté, un jeune despotique qui plonge le clan dans un
profond désarroi. Le jeune acteur, qui incarne le rôle du détestable dictateur, ressemble comme deux gouttes d’eau au président
Hafez Al-Assad. Les mêmes yeux brillants, le même menton carré,
la même coupe de cheveux, la même gestuelle. Les Étoiles du jour
ne verront jamais le jour. » – Sept infos
Inédit en France – Provenance de la copie Cinéma du Réel
Format 35 mm – 1.66 : 1 Production Organisme National du
Cinéma (Syrie) Scénario Ossama Mohammed Image Abdulqader
Sharbaji Direction artistique Rida Hus-hos Montage Antoinette
Azarieh Son Emile Saade, H. Salem, A. Kaook – Avec Zuhair
Ramadan (Towfiq), Zuhair Abdulkarim (Kasser), Maha Al
Saleh (la femme de Khalil), Saba Al Salem (Sana), Saddin
Bakdounes (le grand-père)…
112 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
SYRIE
La
Fiancée syrienne
[HA-KALA HA-SURIT]]
Voyage dans la mémoire
Eran Riklis – France/Allemagne/Israël, 2004, 96 mn, coul
Hala Mohammad – Syrie, 2006, 50 mn, coul
C’est aujourd’hui que Mona, jeune fille d’origine druze, doit
épouser une vedette de la télévision syrienne. Elle devrait
être heureuse, mais elle sait qu’une fois entrée en Syrie,
où l’attend son futur mari, elle ne pourra plus jamais revenir
chez elle, en Israël. Et qu’elle ne pourra plus revoir sa
famille...
2006, avant la révolution syrienne. Trois amis, des prisonniers
d’opinion, ont croupi pendant des années dans la prison
de Palmyre. Pour la première fois depuis leur libération, ils
reviennent vers cette prison où ils ont tant souffert…
« Le film, qui évoque tout d’abord la situation des femmes orientales (doublement oppressées) et l’absurdité du tracé des frontières
prend progressivement une tournure extravagante, mais hélas
bien réelle. D’une situation dramatique, Eran Riklis a su tirer un
film bouleversant. Plein de subtilité et mélangeant habilement
drame et comédie, La Fiancée syrienne s’inscrit dans la lignée
d’Intervention divine, du Cerf-volant ou encore de No man’s
land. Sans jamais juger ni accuser, le cinéaste signe une chronique
dramatique porteuse d’espoir : qu’un réalisateur israélien et une
scénariste palestinienne soient parvenus à faire un film ensemble
est déjà, en soi, un grand pas. » – À voir/À lire
« Le réalisateur israélien Eran Riklis et la coscénariste Suha Arraf,
Palestinienne d’Israël, mettent finement en scène les conséquences
humaines de l’absurdité bureaucratique en vigueur sur ce coin de
terre magnifique et déchiré. L’officier israélien, les représentants
inopérants des organisations internationales ou les douaniers
syriens tiennent tous un rôle dans l’entrelacs d’émotions tissé
autour de la jeune fiancée. Ils ne sont pas les seuls à incarner l’arbitraire du pouvoir puisque dans cette journée de noces se joue aussi
un combat inégal contre la domination masculine. » – ARTE
« Le peuple syrien fait cohabiter en son sein les religions et les ethnies dans la confiance et la prospérité depuis des millénaires, les cinéastes, les écrivains, les artistes, les ingénieurs, les femmes au foyer,
les garçons, les jeunes filles, les bébés, les sourires, les cordes à linge,
les papillons, les fenêtres, les arbres, les seuils des maisons, les tombes des morts. Tous souhaitent que la Syrie sorte de sa prison. Je suis
fière de mon peuple, fière de son courage. Il est descendu dans la rue
pour réclamer plus de dignité, plus de justice sociale, plus de liberté
pendant des jours et des jours. On a quand même le droit de dire à
quelqu’un qui règne sur son pays depuis 11 ans qu’on ne veut plus
de lui. Le pays appartient à son peuple, c’est à lui de décider. Mais
le régime ne l’a pas supporté. Au début, il a mis des snipers en place
pour tuer les manifestants, puis quelques mois plus tard, on a vu
apparaître des chars, des hélicoptères, etc. Le régime a utilisé toutes
les armes possibles contre la population, même des armes chimiques. Jamais, je n’aurais imaginé que Bachar Al-Assad puisse aller
aussi loin. Jamais. Lorsque je me suis rendue en France 4 mois
après le début de la révolution, je ne m’attendais pas à cela. Pendant
une année, tous les jours, j’allais de surprise en surprise, à la fois à
cause du courage de mon peuple, mais aussi à cause des réactions
violentes du régime. J’étais bouleversée. Aujourd’hui, je ne sais
même plus comment je dois réagir. Mon pays a sombré dans une
violence inimaginable. » – Hala Mohammad
Sortie française 1926 Provenance de la copie Goethe Institut
Format 35 mm – 1.33 : 1 Cies de production Gerhard Lamprecht
Filmproduktion/National-Film Producteur Gerhard Lamprecht
Scénario Luise Heilborn-Körbitz, Gerhard Lamprecht, Eduard
Rothauser Image Karl Hasselmann Musique originale
Giuseppe Becce – Avec Alfred Abel (Helmuth Köhler),
Aud Egede-Nissen (Gertrud Köhler), Eduard Rothauser
(Rudloff), Renate Brausewetter (Brigitte Rudloff)…
Provenance de la copie Ossama Mohammed Format DVD –
1.85 : 1 Production Hot Spot Films Image Hani Al-Aqrabawi
Montage Mohammed Raouf Zaza Musique Musique traditionnelle
arménienne – Avec Yassin Haj Saleh (l’écrivain), Ghassan Jbai
(l’auteur et metteur en scène), Faraj Beraqdar (le poète)
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 113
SYRIE
Les Chebabs
de Yarmouk
Eau argentée, [MA’A AL-FIDDA]
Syrie autoportrait
Axel Salvatori-Sinz – France, 2013, 78 mn, coul
Ossama Mohammed et Wiam Simav Bedirxan – France/Syrie/
États-Unis/Liban, 2014, 92 mn, coul, doc
Dans le plus grand camp de réfugiés palestiniens du
Moyen-Orient, créé en Syrie en 1957, des jeunes gens
se cherchent un avenir dans un quotidien incertain. Exilés
de la troisième génération, ils ne rêvent plus du retour en
Palestine. Mais leur désir de révolte se heurte aux murs du
camp…
« Nés dans ce camp, ces jeunes gens n’ont jamais vu la Palestine.
C’est leur origine, leur culture, leur langue, leur idéal peut-être,
mais leur fiction aussi. Comment rêvent-ils de ce fantôme ? Comment vivent-ils avec ? De quelle manière les hante-t-il ? Pays fantôme,
citoyenneté fantôme, avenir fantôme… C’est ce qu’Axel SalvatoriSinz tente de capter dans un jeu subtil d’alternance entre intérieurs
et extérieurs. Pour quiconque n’a jamais vu un camp palestinien,
Yarmouk ressemble plus à une cité pauvre dans un pays chaud
qu’à des kilomètres de tentes. Du provisoire qui s’est installé et
grimpe d’étage en étage. Un quartier de Damas, où ces jeunes ont
grandi. Ces garçons, torse nu ou en tee-shirt de sport, ces filles –
très belles – discutent cinéma, théâtre, mise en scène et diplômes
sans que l’on sache ce qu’il en est de leurs parcours ni de quoi ils
vivent. Le documentariste les saisit à un moment de leur existence
où ils ne sont pas lancés dans leur vie professionnelle. Étudiants
dirait-on, si l’on n’ignorait tout des conditions dans lesquelles ils
peuvent faire des études, et s’ils ne les prolongeaient pas indéfiniment pour s’éviter les 18 mois de service. Mais ils repoussent
jusqu’à la dernière limite, discutant des heures de la meilleure
combine. De l’armée, ils ne parlent pas. Mais plutôt de ce que ce
service cristallise de non-sens dans leur vie. Et ils sont là, à lire
devant la caméra des poèmes qu’ils ont écrits sur ce que signifie
Yarmouk, cet endroit qu’ils ont tant voulu fuir et auquel ils restent
tant attachés. » – Politis
Distributeur DOCKS 66 Format DCP Production Adalios
Coproduction Taswir Films & Maritima TV Productrice Magali
Chirouze Auteur Axel Salvatori-Sinz Image Axel Salvatori-Sinz
Son Axel Salvatori-Sinz Montage Aurélie Jourdan Musique
Reem Kelani & Stormtrap
114 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
La guerre civile syrienne vue à travers des dizaines de
vidéos amateurs diffusées sur YouTube. Elles filment via des
téléphones mobiles les atrocités commises lors de la guerre.
Des séquences combinées avec des plans tournés par Wiam
Bedirxan durant le siège de Homs, de 2011 à 2014…
« La première partie d’Eau argentée est, comme disent les AngloSaxons, un found footage, un pur film de montage collecté dans
les archives aléatoires de YouTube, qui retrace les débuts fervents
de la protestation puis le durcissement d’un conflit qui tourne
rapidement à la barbarie. Le cinéaste ne s’interdit pas d’y montrer
le pire : des images de torture prises par les sbires du pouvoir pour
terroriser l’ennemi. Il y a cette pensée profondément enracinée
chez Ossama Mohammed que le cinéma peut tout montrer et,
partant, tout sauver, jusqu’aux images de l’abjection. Le deuxième
temps du film se fixe dans Homs assiégée. Fin de la guerre de mouvement, début de l’enlisement, isolement de la résistance, faim et
massacre organisés, bombardements quotidiens, préfiguration du
tableau final d’apocalypse. Ici éclate un autre film, nourri des seules
images de Wiam Simav Bedirxan. Elle qui “en tant que femme,
en tant que non voilée et en tant que Kurde” n’a jamais trouvé
sa place dans la société syrienne, n’a cherché qu’à se rendre utile
aux victimes. Filmer lui est ainsi devenu essentiel : “Je suis partie
à Alep acheter une caméra que j’ai fait entrer clandestinement à
Homs, j’ai contacté Ossama, et je me suis mise à filmer sans pouvoir
m’arrêter. Même en dormant, je tenais la caméra. Je crois que si j’ai
survécu, c’est grâce à cette caméra : elle était comme un cœur qui
battait, et Ossama à Paris était le cordon ombilical qui me reliait à
la vie.” » – Le Monde
Sortie française 17 décembre 2014 Distributeur Potemkine
Format DCP – 1.37 : 1 et 1.85 : 1 Production Les Films d’Ici/
Proaction Film Producteur Ossama Mohammed Producteurs
éxécutifs Diana El Jeiroudi, Camille Laemlé, Serge Lalou, Orwa
Nyrabia Scénario et image Ossama Mohammed, Wiam Simav
Bedirxan Montage Maisoun Asaad, Dani Abouloh Son Raphaël
Girardot, Jean-Marc Schick Musique Noma Omran
SYRIE
Syrie,
enfants en guerre
Syrie, le crépuscule
des Assad
Yuri Maldavsky – France, 2014, 52 mn, coul, doc
Christophe Ayad et Vincent de Cointet – France, 2015, 52 mn, coul,
doc
À Alep en Syrie, Moatez, treize ans, se prépare à devenir
combattant comme son frère Hussein, seize ans. Ce dernier,
déjà moudjahidin, a rejoint avec leur père les rebelles du
FSA, l’armée libre de Syrie, en lutte contre les forces de
Bachar Al-Assad...
Lorsqu’il accède au pouvoir en juin 2000, Bachar al-Assad
apparaît comme un homme gauche et sans charisme.
Nombreux sont ceux qui le jugent inapte à succéder à son
père. Mais par une série de manœuvres et d’alliances, il
va finir par s’imposer dans son pays comme sur la scène
internationale…
À travers le regard de ces ados, c’est toute une génération brisée
à qui on donne enfin la parole. « La Syrie est détruite mais personne ne s’en soucie. Qu’ils regardent les morceaux de chair humaine
sur le sol ! Ils n’ont pas honte en voyant ça ? Qu’ils soient un peu
sensibles. Nous continuerons jusqu’à la mort, grâce à Dieu ». À 13
ans, Moatez n’a plus d’illusions. Comme des milliers d’enfants
syriens, il est brisé par la guerre. Rien qu’à Alep, sur les 3 millions
d’habitants que comptait la ville avant la guerre, ils ne sont plus
que 250 000 aujourd’hui. Si beaucoup ont fui vers les pays voisins,
32 000 personnes y auraient été tuées, dont 10 000 enfants. Armés
de leur courage et d’un arsenal de fortune, ce sont eux qui se battent
désormais face à une armée professionnelle. Les images de Hussein
et ses camarades combattant en sandales contre une armée officielle lourdement armée sont impressionnantes. Alors, que restet-il désormais à tous ces enfants dont les rêves ont été brisés par
une guerre qui les dépasse ? « Quand je serai grand, je serai un
combattant », martèle Moatez qui se dit prêt à mourir en martyr
au combat pour venger les morts de sa famille. Quels sont les
choix de la population civile à l’heure où le fondamentalisme
religieux est si fédérateur ? se demande le documentaire. Peut-on
parler d’embrigadement religieux lorsqu’ils décident d’eux-mêmes de mener ce qu’on appelle le djihad, la guerre sainte ? Des
questions d’une grande complexité auxquelles Syrie, enfants en
guerre tente d’apporter des éléments de réponse. » – Metronews
Dévoilant l’histoire et les rouages de ce régime opaque, le film
revient sur le règne de Bachar et sur celui de son père, Hafez, et
montre à la fois comment cette famille s’est accaparée le pays et
les limites d’un gouvernement héréditaire qui ne se maintient
que par la terreur, l’intimidation et la corruption.
« Christophe Ayad et Vincent de Cointet, qui ont déjà signé pour
ARTE un film sur le conflit du Darfour, reviennent ici sur le
règne de Bachar et sur celui de son père, et montrent comment
cette famille alaouite – courant minoritaire du chiisme – s’est
accaparée le pays. Ponctué d’images d’actualité, de nombreux
entretiens – avec des opposants, des politologues, Émile Lahoud,
ancien président libanais, les ministres Hubert Védrine et Bernard
Kouchner, Stephen Hadley, conseiller du président Bush... –
dévoilent l’histoire et les rouages de ce régime opaque. On comprend ainsi la position cruciale au Proche-Orient d’un pays suspecté d’être directement impliqué dans l’assassinat de l’ancien
Premier ministre libanais Rafic Hariri, et qui soutient des mouvements terroristes comme le Hezbollah. Débutant et finissant
par des images clandestines des émeutes du printemps dernier,
le film montre aussi les limites d’un gouvernement autoritaire
et corrompu. » – ARTE
Première diffusion française 13 janvier 2015 [France 2]
Distributeur Compagnie des Phares & Balises Format DVD –
1.85 : 1 Production Compagnie des Phares & Balises – Avec la
participation de France Télévisions Producteurs Fanny
Glissant, Jean Labib Montage Audrey Maurion
Distributeur Andana Films Format DVD Production Bonne
Compagnie Coproduction INA/ARTE France Avec la
participation de RTBF/RTS/RSI/SRC/RDI Auteurs Christophe
Ayad, Vincent de Cointet Commentaire Sylvain RoumetteImage Marc Lavastrou, Denis Leroy, Julien Pradinaud, Benoit
Tricot Montage Benoit Tricot
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 115
Yol,
la permission
[YOL]
Turquie
Yol, la permission
Uzak
Yumurta
Milk
Pour un instant, la liberté
Les Trois Singes
Miel
Il était une fois en Anatolie
Winter Sleep
Génocide arménien. Le spectre de 1915
Mustang
Kurdistan, Kurdistan
Yilmaz Güney – Turquie/Suisse/France, 1982, 110 mn, coul –
Palme d’or Cannes 1982
Cinq prisonniers turcs bénéficiant d’une permission rejoignent
leurs familles. Dans un pays répressif soumis aux coutumes
archaïques, cette liberté éphémère va avoir des conséquences dramatiques…
« Les cinq récits entrecroisés de Yol mettent en scène l’échec des
rêves de chacun des protagonistes, avec pour seul point commun
une atmosphère sourde, plombée, une douleur aussi lancinante
que le mouvement du train qui relie entre elles les différentes
histoires. Dans Yol, c’est l’atmosphère qui exprime le sens, et non
pas l’intrigue, qui est morcelée. C’est pourquoi le principe de
l’unité du film, l’idée d’enfermement, est diffus, mais directement
visible. L’emploi des symboles, les expressions figées de la plupart
des personnages, les différents cadrages concourent à imposer
cette atmosphère-vérité : l’enfermement est une présence constante, totale et qui ne se manifeste vraiment que lorsqu’on pense
s’en être affranchi. En effet, une fois sorti de prison, chacun entrera
dans une autre prison, plus vaste, dont les murs ne sont pas tous
de pierre et qui ne sont pas à l’extérieur de soi. Le cinéma de
Güney est plus descriptif que narratif, il repose sur la puissance
des images qui se passent des mots. Ce sont toujours des “visions”
que l’on retrouve à l’origine de ses films. Il les intègre à un récit
dont elles constituent l’accomplissement : la Turquie tout entière
est envisagée comme un vaste bagne dont les pénitenciers ne sont
que la forme extérieure et visible. Aucun abri, pourtant, ne peut
résister à la violence des mentalités archaïques. » – Manifeste
Sortie française 1er septembre 1982 Distributeur Les Films
sans frontières Format DVD – 1.37 : 1 Production Güney Film/
Cactus Film/Antenne 2/SRG Producteurs Edi Hubschmid, K.L.
Puldi Coproducteur Yilmaz Güney Scénario Yilmaz Güney
Image Erdogan Engin Son Loïs Koenigswerther Montage
Yilmaz Güney, Elisabeth Waelchli Musique Sebastien Argol,
Zülfü Livaneli, Hélène Arnal – Avec Tarik Akan (Seyit Ali), Serif
Sezer (Zine), Halil Ergün (Mehmet Salih), Meral Orhonsay
(Emine), Necmettin Çobanoglu (Omer)…
116 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
TURQUIE
Uzak
Yumurta
Nuri Bilge Ceylan – Turquie, 2002, 110 mn, coul
Semih Kaplanoglu – Turquie, 2007, 97 mn, coul
Istanbul, de nos jours. Mahmut, un photographe d’âge mûr,
accueille Yusuf, son jeune cousin venu de la campagne pour
trouver du travail…
La mort de sa mère ramène Yusuf, un bouquiniste d’Istanbul,
dans son village natal. Dans la maison familiale l’attend
Ayla, une jeune fille qui partageait l’existence de la défunte
depuis quelques années et qu’il ne connaît pas. Elle va le
pousser à accomplir un rite sacrificiel pour sa mère…
Nuri Bilge Ceylan, à la fois scénariste, réalisateur, directeur de la
photographie et producteur – signe l’un des plus beaux films de
l’année 2002. Aussi fort visuellement qu’émotionnellement, il se
construit autour de deux personnages contraires : Yusuf est chômeur et vient chercher chez Mahmut, son ami d’enfance, un travail
en ville. Il est proche de sa famille et ne vit que pour elle, Mahmut
en est loin. Il cherche les filles, Mahmut les a. À la fois lointains
et proches, ils sont ensemble, mais chacun avec leur solitude.
Les deux acteurs sont étonnamment crédibles – double prix d’interprétation à Cannes 2002 – et Istanbul enneigé n’a jamais été
aussi beau. Les images inoubliables s’enchaînent comme ce cargo
échoué sur la neige ou ce magnifique plan d’ouverture sur le
village de Yusuf. – François Aymé
« Impression rare de deux êtres de fiction qui portent en eux
toutes nos contradictions : le regret de tout ce qu’on abandonne
en avançant dans la vie, les concessions trop vite acceptées, les
proches oubliés, l’égoïsme qui, peu à peu, triomphe. Les acteurs
ne sont pas pour rien dans la réussite de ce film subtil. En turc,
“uzak” signifie lointain. Grands sont la distance entre les êtres,
l’écart entre les rêves et la vie comme elle va, c’est-à-dire coucicouça, sur le Bosphore comme ailleurs. Incroyablement proches
sont les héros de Uzak, nos amis, nos frères. » – Télérama
Sortie française 14 janvier 2004 Distributeur Pyramide Format
35 mm – 1.85 : 1 Production NBC Ajan Coproduction NBC Film
Producteur Nuri Bilge Ceylan Scénario Nuri Bilge Ceylan
Image Nuri Bilge Ceylan Direction artistique Ebru Ceylan
Décors Ebru Yapici Son Ismail Karadas, Erkan Aktas Montage
Ayhan Ergüsel, Nuri Bilge Ceylan – Avec Muzaffer Özdemir
(Mahmut), Mehmet Ermin Toprak (Yusuf), Zuhal Gencer Erkaya
(Nazan), Nazan Kirilmis (Lovar), Fatma Ceylan (la mère)…
« Premier volet d’une trilogie annoncée avec Süt (le lait) et Bal (le
miel), Yumurta (l’œuf) a été l’une des révélations de la Quinzaine
des réalisateurs 2008. En ouvrant le film sur un long plan-séquence
où une vieille paysanne n’est qu’une silhouette vacillante au fond
du plan pour ensuite faire face à la caméra puis disparaître dans
la brume, Yumurta affiche son ambition de travailler le temps.
Pour Yusuf, le retour dans son village natal est une rupture dans
sa vie de citadin, une brèche qu’il refuse de considérer. Mais l’environnement de son enfance va agir sur lui de façon inattendue.
Dans la maison de sa mère, les plantes et les fleurs sont des stèles
végétales, la matérialisation des défunts de la famille. À la vue d’un
cordier en pleine action, Yusuf défaille et c’est l’odeur archaïque
d’un oignon pelé qui lui redonne connaissance. Le rythme de la
nature et de la campagne le ramène à son propre rythme, à celui
du poète qu’il fut et qu’il n’est plus. On retrouve dans ce film une
ambiance assez proche de Neige du romancier Orhan Pamuk, avec
cette sensation de doute qui assaille un pays hésitant entre traditions très ancrées et élans trop rapides du côté de la modernité.
C’est la lente et modeste réconciliation entre ces deux temporalités
qui fait toute la saveur de Yumurta. » – Positif
Sortie française 23 avril 2008 Distributeur Les Acacias Format
35 mm – 1.85 : 1 Production Kaplan Film Production
Coproduction PPV /Inkas Film Production Producteur Semih
Kaplanoglou Coproducteurs Lilette Botassi, Panayiotis Papazolu Scénario Semih Kaplanoglu, Orçun Köksal Image Özgür
Eken Direction artistique Naz Ereyda Décors Metin Baki Son
Ismail Karadas, Yorgos Mikrogiannakis Montage Semih Kaplanoglu, Suzan Hande Güneri – Avec Nejat Isler (Yusuf), Saadet
Isil Aksoy (Ayla), Ufuk Bayraktar (Haluk), Tulin Özen (la femme
dans la librairie), Gülçin Santircioglu (Gül)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 117
TURQUIE
Milk
[SÜT]
Pour un instant,
la liberté [EIN AUGENBLICK FREIHEIT]
Semih Kaplanoglu – Turquie/France/Allemagne, 2008, 102 mn, coul
Arash T. Riahi – Autriche/France/Turquie, 2008, 110 mn, coul
Yusuf, jeune étudiant, est inquiet sur son avenir. Passionné
de poésie, certaines de ses œuvres commencent à être
publiées. En attendant, Yusuf et sa mère, Zehra, luttent pour
gagner leur vie avec le lait qu’ils tirent des vaches. Mais la
crise économique met l’avenir de l’exploitation en péril…
De nos jours, les destins croisés de plusieurs réfugiés
clandestins de l’Iran vers la Turquie et l’Allemagne....
« Milk est le deuxième volet de la « Trilogie de Yusuf », initiée par
Semih Kaplanoglu avec Yumurta (« Œuf ») et qui s’achèvera avec
Miel. Parce que chaque film met en scène ce personnage-totem
à un âge et dans une histoire différents, l’ensemble constitue
davantage une chronique poétique de l’Anatolie. D’une grande
beauté formelle, porté par des acteurs magnifiques, Milk est de
ces films contemplatifs émaillés de parti-pris de mise en scène et
de cadrage parfois énigmatiques, mais extrêmement séduisants.
À l’image de la superbe séquence d’ouverture, forte et magique,
qui place le spectateur en déchiffreur attentif et sensible d’un
monde opaque. En poète, en somme. Laissez-vous prendre à
ce film dans lequel la nature est un temple où de vivants piliers
laissent parfois sortir de confuses paroles... » – Nicolas Milési
« J’essaie de filmer les divers aspects de la vie. Ce qu’on ne voit pas,
ce qu’on ne connaît pas, aussi bien que ce qu’on voit et qu’on
sait. La réalité, mais avec ses vibrations spirituelles qui dépassent
notre perception et font la beauté du monde. Je trouve insuffisant, limité, un art où manque la spiritualité. Pour moi, un plan
doit rendre sensible l’existence de l’invisible. Et de la beauté.
Je souhaite que mes personnages découvrent la beauté et l’âme
qui soufflent en eux et les portent en ce monde depuis leur naissance. » – Semih Kaplanoglu
Sortie française 22 septembre 2010 Distributeur Les Acacias
Format 35 mm – 1.85 : 1 Production Kaplan Film Production/
Arizona Films/Heimatfilm Producteur Semih Kaplanoglou
Coproducteurs Guillaume de Seille, Johannes Rexin Scénario
Semih Kaplanoglu, Orçun Köksal Image Özgür Eken Décors Naz
Ereyda Son Marc Nouyrigat Montage François Quiquéré – Avec
Melih Selcuk (Yusuf), asak Köklükaya (Zehra), Riza Akin (Ali
Hoca), Saadet Isil Aksoy (Semra), Tülin Özen (la fille du village)…
118 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
« Premier long-métrage du documentariste d’origine iranienne
Arash T. Riahi, Pour un instant, la liberté rend hommage à celles
et ceux qui, chaque année, choisissent l’exil, à la poursuite d’un
rêve universel : celui d’une vie meilleure. Véritable film-somme
sur le sujet de l’immigration, ce premier opus magistral parvient
à évoquer toutes les situations possibles à travers le destin tragicomique d’un ensemble de personnages, tous plus attachants les
uns que les autres. Voulant donner chair à ces êtres que l’on trimballe comme des marchandises d’un pays à l’autre, Riahi réalise
une œuvre sans concession, entre rires et larmes. Du voyage périlleux en passant par l’exploitation des réfugiés par leurs propres
compatriotes et jusqu’aux interminables démarches pour obtenir
une régularisation, l’auteur ne nous épargne aucun passage obligé,
tout en osant quelques commentaires politiques bien ciblés. Ainsi,
la République islamique d’Iran est décrite comme une terrible
dictature poursuivant ses ressortissants jusque dans les pays étrangers. Autant dire que le cinéaste n’a pas intérêt à remettre un
jour un pied à Téhéran. Il dénonce aussi les politiques européennes visant à réduire de manière drastique l’accueil aux réfugiés
puisque derrière chaque refus de régularisation se cache sans
doute une condamnation à mort pour le demandeur d’asile. » –
À voir à lire
Sortie française 28 janvier 2009 Distributeur Les Films du
Losange Format DCP – 1.85 : 1 Production Wega Films/Les
Films du Losange Coproduction Pi Film Producteurs Michael
Katz, Veit Heiduschka Coproductrice Margaret Ménégoz
Producteur exécutif Michael Katz Scénario Arash T. Riahi
Image Michi Riebl Décors Christoph Kanter Costumes Monika
Buttinger Son Bernhard Maisch, Mohsan Nasiri Montage
Karina Ressler Musique Karuan – Avec Navid Akhavan (Ali),
Pourya Mahyari (Merdad), Kamran Rad (Kian), Behi DjanatiAtai (Lale), Payam Madjlessi (Hassan)…
TURQUIE
Les
Trois Singes
[ÜÇ MAYMUN]
Miel
Nuri Bilge Ceylan – Turquie/France/Italie, 2008, 109 mn, coul
Semih Kaplanoglu – Turquie/Allemagne, 2010, 103 mn, coul
Une famille disloquée à force de petits secrets devenus de
gros mensonges tente désespérément de rester unie en
refusant d’affronter la vérité. Mais suffit-il de refuser de la
voir, de l’entendre ou d’en parler, comme dans la fable des
« trois singes », pour effacer toute la vérité ?
Yusuf, 6 ans, vit avec ses parents dans un village isolé
d’Anatolie. Pour le petit garçon, la forêt environnante est
un lieu de mystère et d’aventure où il aime accompagner
Yakup, son père apiculteur. Mais un jour, celui-ci disparaît…
Nuri Bilge Ceylan, auteur déjà remarqué grâce à Uzak et Les
Climats, n’a pas volé son Prix de la mise en scène au dernier
Festival de Cannes. Le cinéaste déroule une véritable tragédie
familiale baignée de couleurs cuivrées sombres et reposant sur
une tension de chaque instant. Œuvre profondément morale
(le mensonge comme porte de l’enfer), au scénario classique et
solide, Les Trois Singes dénonce également la corruption du pays.
Quand l’esthétique est au service de l’éthique. Un film magnifiquement noir. – François Aymé
« Somptueusement filmé en numérique avec des images longuement retravaillées en postproduction, Les Trois Singes est un
film envoûtant sur la jalousie, l’arrogance du pouvoir, la violence
et surtout le mensonge, ces accommodements qui permettent
d’éviter jusqu’au bout d’avoir à affronter la vérité. “Les gens vont
au cinéma pour rire ou pleurer : j’ai voulu les prendre à contre-pied
pour les obliger à regarder dans le gris de la vie, là où il n’y a ni
héros ni victime, mais où chacun est tout à la fois l’un et l’autre”,
explique Nuri Bilge Ceylan. Un film implacable, où chacun feint
de ne pas voir, de ne pas entendre, de ne pas savoir. Il n’y a là ni
morale ni le moindre espoir de justice. » – Libération
« Le choc, quand on voit un film de Kaplanoglu, dépouillé de
musique et presque sans paroles, voué aux bruits animaliers, aux
échos du vent ou de la pluie, est le défilé d’émotions, le chaos de
sensations qui, dans les deux premiers films (Yumurta et Milk),
ramènent sans cesse le héros à sa petite enfance, et dans le troisième (Miel) le confrontent à ses rêves. Ce cinéaste a une approche
du temps qui nous mène bien au-delà de l’époque où vivent ses
personnages, et une façon de les regarder qui nous fait pénétrer
dans leur âme. Il parle de son style comme d’un “réalisme spirituel”, de son art comme d’une scrutation de la vie “à la lumière
des puissances supérieures”. Chez Kaplanoglu, la mère est aussi
tradition. Les films parlent autant d’émancipation que de rupture
avec un monde voué à disparaître. Ils dépeignent le choc entre
la beauté d’un monde rural, ancestral, une nature inviolée, et la
modernité. La modification du paysage, le passage de l’agriculture
à l’industrie, de la terre à l’usine. Il regrette un temps où l’œuf
était pondu dans le poulailler familial, le lait produit dans une
économie domestique, le miel récolté dans le respect de la nature.
Limpide, élégiaque, radieux dans sa manière d’évoquer les épreuves
de Yusuf, le cinéma de Kaplanoglu apaise, fascine, grandit. » –
Le Monde
Sortie française 14 janvier 2009 Distributeur Pyramide Format
35 mm – 2.35 : 1 Production Zeyno Film/NBC Film/Pyramide
Productions/Bim Distribuzione Productrice Zeynep Özbatur
Coproducteurs Fabienne Vonnier, Valerio de Paolis, Cemal
Noyan, Nuri Bilge Ceylan Scénario Ebru Ceylan, Ercan Kesal, Nuri
Bilge Ceylan Image Gökhan Tiryaki Décors et costumes Ebru
Ceylan Son Murat Senürkmez, Olivier Goinard Montage Ayhan
Ergüsel, Bora Göksingol, Nuri Bilge Ceylan – Avec Hatice Aslan
(Hacer), Yavuz Bingöl (Eyüp), Ahmet Rifat Sungar (Ismail),
Ercan Kesal (Servet), Cafer Köse (Bayram)…
[BAL]
Sortie française 22 septembre 2010 Distributeur Bodega
Films Format 35 mm – 1.85 : 1 Production Kaplan Film Production Coproduction Heimatfilm Producteur Semih Kaplanoglu
Coproducteurs Johannes Rexin, Bettina Brokemper Scénario
Semih Kaplanoglu, Orçun Köksal Image Baris Özbiçer Décors
Naz Erayda Costumes Ozge Ozturk Son Matthias Haeb
Montage Ayhan Ergüsel, Semih Kaplanoglü, Orçun Köksal –
Avec Bora Atlas (Yusuf), Erdal Besikçioglu (Yakup, le père),
Tülin Ozen (Zehra, la mère), Alev Uçarer, Ayse Altay…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 119
TURQUIE
Il était une fois
en Anatolie [BIR ZAMANLAR ANADOLU’DA]
Winter
Sleep
[KIS UYKUSU]]
Nuri Bilge Ceylan – Turquie/Bosnie-Herzégovine, 2011, 157 mn,
coul
Nuri Bilge Ceylan – Turquie/Allemagne/France, 2014, 196 mn, coul
Au cœur des steppes d’Anatolie, un meurtrier tente de guider
une équipe de policiers vers l’endroit où il a enterré le corps
de sa victime. Au cours de ce périple, une série d’indices sur
ce qui s’est réellement passé fait progressivement surface…
Aydin tient un petit hôtel en Anatolie centrale avec sa jeune
épouse Nihal, dont il s’est éloigné, et sa sœur Necla qui
souffre encore de son récent divorce. En hiver, à mesure
que la neige recouvre la steppe, l’hôtel devient leur refuge,
mais aussi le théâtre de leurs déchirements…
« Après Les Trois singes – tragédie implacable, pétrie d’une plastique sombre, Nuri Bilge Ceylan renoue avec une manière plus
proche, notamment, des Climats. Au fil de cette chronique de
l’accablement – à quoi rime la résolution d’un crime, pour peu
qu’on le rapporte au chaos général ? – il ménage des percées
de lumière, de brèves épiphanies, promesses – à moins qu’il ne
s’agisse de vœux pieux – de la fin prochaine d’un cycle : celui de
la violence. Ceylan scrute les courbes monotones des paysages,
la douleur secrète des visages, à la tête de ce qui, autant qu’un
convoi de police, paraît une quête de cinéma ; quand les uns cherchent le corps du délit, l’auteur guette, par les mêmes chemins,
le décor de sa plus belle scène. Il y sera question, notamment, de
la ressemblance entre un procureur et Clark Gable... Si Ceylan
est en terrain connu, tout à son formalisme virtuose (lumière
splendide, minutie picturale des plans), il y a là, dans cette façon
d’augmenter son sens tragique d’accents bouffons, un petit air
d’inédit ; il y a surtout – et c’est plus étonnant, dans cette course
lente, cet art de sonder les âmes, quelque chose de Simenon. »
– Les Fiches du cinéma
« Nuri Bilge Ceylan filme un érudit qui a tout loisir pour écrire
ses éditos dans la feuille locale en remettant à plus tard la rédaction de sa grande œuvre : une histoire du théâtre turc. Tâche qui
lui permet principalement de se réfugier à l’abri du monde dans
l’atmosphère rassurante de son bureau : Camus et Shakespeare
veillent sur lui. Cependant, il ne parvient pas à éviter les conflits
qui le mettent face à ses contradictions. Intellectuel, citoyen du
monde, il est sourd aux affres affectives de ses deux compagnes
et étranger aux difficultés très terre à terre de ses locataires qui
le font cependant vivre… C’est également un homme au soir
de sa vie qui ignore tout des questionnements et des angoisses
des nouvelles générations. Il ne faut en aucun cas appréhender
la durée exceptionnelle du film ; nécessaire, elle lui permet de
mener à bien toutes ces lignes narratives qui s’entrecroisent dans
une splendide complexité et, ce faisant, de réaliser un grand film
répondant à la définition d’Eisenstein : « Une véritable unité de la
forme et du contenu exige aussi l’unité dans la perfection qualitative des deux. » (Au-delà des étoiles). » – Jean-Marie Tixier
Sortie française 2 novembre 2011 Distributeur Memento Films
Format DCP – 2.35 : 1 Production Zeyno Film Coproduction
Prod2006/1000 Volt/TRT/Imaj/Fida Film/NBC Film Producteur
Zeynep Özbatur Atakan Coproducteurs Mirsad Purivatra, Eda
Arikan, Ibrahim Sahin, Müge Kolat, Murat Akdilek, Nuri Bilge
Ceylan Producteur exécutif Çagri Erdogan Scénario Ercan
Kesal, Ebru et Nuri Bilge Ceylan Image Gïkhan Tiryaki Direction
artistique Dilek Yapkuöz Ayaztuna Son Erkan Altinok Montage Bora
Göksingol, Nuri Bilge Ceylan – Avec Muhammet Uzuner (le docteur Cemal), Yilmaz Erdogan (le commissaire Naci), Taner Birsel
(le procureur Nusret), Ahmet Mümtaz Taylan (Arap Ali)…
Sortie française 6 août 2014 Distributeur Memento Films
Format DCP – 2.35 : 1 Production Zeyno Film/Bredok
Filmproduction/Memento Films Production/Imaj Producteur
Zeynep Özbatur Atakan Producteur exécutif Sezgi Üstün
Coproducteurs Alexandre Mallet-Guy, Mustafa Dok,
Muzaffer Yıldırım, Müge Kolat, Olivier Père, Rémi Burah, Nuri
Bilge Ceylan Scénario Ebru Ceylan, Nuri Bilge Ceylan Image
Gökhan Tiryaki Décors Gamze Ku Son Andreas Mücke
Montage Nuri Bilge Ceylan, Bora Göksingol – Avec Haluk Bilginer (Aydin), Melisa Sözen (Nihal), Demet Akba (Necla), Ayberk
Pekcan (Hidayet), Serhat Kiliç (Hamdi)…
120 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
TURQUIE
Génocide arménien.
Le spectre de 1915
Mustang
Nicolas Jallot – France, 2014, 52 mn, doc, NB & coul
Deniz Gamze Ergüven – France/Allemagne/Turquie/Qatar, 2015,
97 mn, coul
1915. L’Empire ottoman subit les soubresauts de la Grande
Guerre qui entraînera sa chute. Dans ce contexte historique,
plus d’un million d’Arméniens sont exterminés par les Turcs.
C’est le premier génocide du XXe siècle. En Turquie, son
évocation est toujours occultée…
Dans un village turc, cinq sœurs déclenchent un scandale
aux conséquences imprévisibles. La maison familiale se
transforme en prison, on programme des mariages arrangés.
Animées par un même désir de liberté, les jeunes filles se
rebellent contre l’autorité des parents…
« À travers l’histoire personnelle d’un Turc et d’une Arménienne,
le documentaire revient sur les traces de ce génocide arménien
longtemps occulté. Un siècle après le massacre de ce peuple, et
malgré le déni en Turquie, le tabou est enfin levé sur ce pan de
l’Histoire. D’une facture classique et très pédagogique, s’appuyant
à la fois sur des images d’archives, des entretiens avec des historiens
et deux descendants des protagonistes, ce documentaire propose
une synthèse de ce sujet toujours brûlant. « Les Turcs Fethiye Çetin
et Hasan Cemal n’auraient en principe jamais dû s’accorder. L’une,
avocate et militante pour les droits de l’homme, est la petite-fille
d’une rescapée du génocide arménien. L’autre, journaliste et écrivain, est le petit-fils de Cemal Pacha, l’un des trois organisateurs
des massacres et des déportations qui ont causé la mort de plus
d’un million d’Arméniens entre 1915 et 1916. Pourtant, tous deux
se battent de concert pour que cette sombre période de l’histoire
de la Turquie sorte enfin de l’ombre. C’est le ralliement au tsar
d’une poignée de soldats arméniens, au lendemain de la défaite
ottomane de janvier 1915 sur le front russe, qui va servir de prétexte
pour accuser de trahison une minorité autochtone catholique et
exterminer les trois quarts de sa population. L’oubli a suivi le déni.
Exorciser les démons familiaux, tel est le sens du combat mené par
Fethiye Çetin et Hasan Cemal pour la reconnaissance du premier
génocide du XXe siècle. » – L’Obs
« L’insouciance du début fait rapidement place à une atmosphère
lourde, oppressante que les adolescentes, destinées à être mariées
au plus vite, tentent de déjouer ou de s’en accommoder. Tout est
étouffant : la maison dont elles ne peuvent sortir, le jardin entouré de
murs, la végétation envahissante – autant d’éléments qui les coupent
du monde extérieur. Deniz Ergüven entend dénoncer le carcan des
traditions dans la société turque contemporaine, empêchant les
jeunes filles de faire des études, les étouffant dans des robes « couleur
de merde » (comme le dit la plus jeune, celle qui se rebelle le plus
ouvertement – et dans laquelle se projette vraisemblablement la réalisatrice elle-même). Les images des sœurs trompant l’ennui comme
elles le peuvent, riant, se disputant, leurs longs cheveux jouant sur
leur dos dans un torrent de lumière, sont empreintes d’une beauté
et d’une sensualité indéniables. À ces moments très esthétiques
succèdent des passages trépidants : une virée rocambolesque lors
d’un match de foot interdit aux hommes ou la tentative de fuite…
Le spectateur est tenu en haleine, tour à tour émerveillé par la beauté
des actrices, outré par leur vie rétrécie, ému par leur connivence et
leurs moyens dérisoires de résister. » – Hélène Hanusse
Distributeur Zed Format DVD – 1.85 : 1 Production
Transparences productions Avec la participation de France
Télévisions/RTBF Producteurs Charles Gazelle, Hervé Dresen
Auteurs Régis Genté, Nicolas Jallot Image Emmanuel Roy
Montage Mathieu Zeitindjioglou Musique A-Music –
Commentaire dit par Michel Elias
Sortie française 17 juin 2015 Distributeur Ad Vitam Format DCP –
2.39 : 1 Production CG Cinéma Coproduction Vistamar /Uhland +/
BAM Films/The Doha Film Institute Producteur Charles Gillibert
Coproducteurs Frank Henschke, Anja Uhland, Mine Vargi
Producteurs exécutifs Violaine Gillibert, Emre Oskay Scénario
Deniz Gamze Ergüven, Alice Winocour Image David Chizallet, Ersin
Gök Direction artistique Serdar Yemi çi Costumes Selin Sözen
Son Ibrahim Gök, Olivier Goinard Montage Mathilde Van de
Moortel Musique Warren Ellis – Avec Güne Nezihe ensoy
(Lale), Do a Zeynep Do u lu (Nur), Elit can (Ece), Tu ba
Sunguro lu (Selma), layda Akdo an (Sonay)…
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 121
TURQUIE
Kurdistan, Kurdistan
Bulent Gunduz – France, 2015, 74 mn, coul
Delil Dilanar est l’un des plus célèbres chanteur du Kurdistan.
Au cours des années 1990, il est forcé de quitter sa patrie
pour s’exiler en Europe. Vingt ans plus tard, lors d’un concert
à New York, il annonce son retour dans son foyer natal. Mais
une fois au Kurdistan, il ressent une profonde solitude...
Kurdistan, Kurdistan est le premier long métrage de Bulent Gunduz,
né à Karayazi en 1979 (Kurdistan turque). Diplômé de l’Université
Kahraman Maras en tant qu’ingénieur en travaux publics, il s’intéresse très vite au monde des medias. Il étudie le cinéma et le journalisme à Istanbul, puis devient journaliste pour la chaîne National 6
pendant deux ans. Pour des raisons politiques, il quitte son pays et
s’installe à Paris en 2001. En 2010 il réalise son premier documentaire, pour lequel il obtient de nombreux prix internationaux,
notamment le Prix du jury et le Prix du Meilleur réalisateur au New
York International Indépendant Film Festival.
Depuis 2011, il écrit des articles pour un journal kurde publié en
Europe. En 2013, il réalise son deuxième documentaire, Roboski
mon amour, sur le drame causé par la mort de trente-quatre personnes (dont 19 enfants) suite au bombardement du village de Roboski
par un avion de chasse turc dans le sud-est de la Turquie.
Kurdistan, Kurdistan, évoque quant à lui l’exil et le retour vers ses
racines d’un musicien kurde, ainsi que ses retrouvailles avec un
musicien qui fut autrefois son maître. C’est également l’occasion
d’émouvantes retrouvailles avec sa famille, ainsi qu’une redécouverte de son pays natal.
Distributeur Cinepotamya Format DCP Scénario Bulent
Gunduz Image Savali Aydar, Semih Yldiz Montage Ulas Devrim
Karasungur Musique Amed Tabar
122 FILMS
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LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
Proche Orient d’hier et d’aujourd’hui
Lawrence d’Arabie [LAWRENCE OF ARABIA]
David Lean – Grande-Bretagne, 1962, 222 mn, coul
En 1916, un jeune officier britannique devient le conseiller militaire des tribus arabes soulevées contre l’Empire ottoman. Faisant
taire leurs divisions et bravant le désert, il les mène à la conquête du port d’Aqaba. Le premier d’une série d’exploits qui vont
faire de Lawrence une légende vivante…
David Lean a su mettre en relief les enjeux de l’accord Sykes-Picot, issu
de tractations franco-anglaises menées dès les années 1915-1916, et
visant à se partager, une fois la guerre terminée, les possessions de
l’Empire ottoman. Le portrait de Lawrence cristallise les multiples
ambitions du film. Parmi celles-ci, embrasser, avec ce personnage
pétri de contradictions et de paradoxes, non seulement l’itinéraire
d’un individu hors du commun, mais plus largement les soubresauts militaires, politiques et stratégiques qui embrasent le MoyenOrient entre 1916 et 1918. Lean trace les lignes de force d’intérêts
croisés, parfois convergents, mais toujours teintés de duplicité. Tous
(le général Allenby [commandant des forces anglaises en Égypte],
Dryden [chef du Bureau des Affaires arabes] ou le prince Fayçal)
manipulent Lawrence – à moins qu’ils ne soient occasionnellement,
mais toujours pour un temps très bref, manipulés par lui. Pourtant,
malgré l’influence durable de son action (une action dont Lean
montre qu’après des débuts retentissants – la prise d’Aqaba – elle
connaît une trajectoire en demi-teinte), Lawrence est le jouet de forces qui le dépassent. C’est pourquoi son aventure laisse un goût amer :
il était écrit dès le départ que de la bonne volonté et de la conscience d’un destin prêt à s’accomplir, surgirait une cruelle désillusion.
Sortie française 15 mars 1963 Distributeur Park Circus Format DCP – 2.20 : 1 Production Horizon Pictures Producteur Sam Spielgel
Scénario Robert Bolt, Michael Wilson Image Freddie Young Direction artistique John Stoll, Ben Rogers Décors John Box Costumes Phyllis
Dalton Son Paddy Cuningham Montage Anne V. Coates Musique Maurice Jarre – Avec Peter O’Toole (T.E. Lawrence), Alec Guiness
(le prince Feyçal), Anthony Quinn (Auda Abu Tayi), Jack Hawkins (le général Allenby), Omar Sharif (Sherif Ali)…
La Révolution des femmes, un siècle de féminisme arabe
Feriel Ben Mahmoud – France, 2014, 52 mn, coul, doc
Il y a 50 ans, l’émancipation semblait promise aux femmes arabes. Que s’est-il passé depuis dans des sociétés qui peuvent
sembler aujourd’hui cadenassées par le sexisme et le patriarcat ? À travers le Proche-Orient, les témoignages de militantes,
d’artistes, de politologues…
« Cet excellent documentaire est nécessaire. Il montre que depuis
près d’un siècle le mouvement de libération de la femme suivi du
reverrouillage de la condition féminine dans les pays arabo-musulmans est soumis aux aléas géopolitiques. Des chercheurs, comme
l’historienne Sophie Bessis, expliquent que des esprits éclairés tels le
Tunisien Tahar Haddad (1899 – 1935) ou l’Égyptien Qassim Amin
(1865 – 1908) voyaient dans l’émancipation de la femme le fer de
lance de la modernisation. Des archives rappellent que Bourguiba
et Nasser avaient fait leurs ces idées. Des musulmanes, des juives et
des chrétiennes purent s’instruire, travailler, se lancer en politique,
dans le cinéma… jusqu’à ce que la guerre de 1967 ramène un islam
conservateur en politique et que le pétrole mène le jeu. Affaiblies et
menacées, les féministes ne désarment pourtant pas ! » – Isabelle
Francq, La Vie
Première diffusion française 5 mars 2015 [France 3, dans le cadre de la série « Docs interdits »] Distribution Java Films Format Blu-Ray – 1.85 :
1
Production Drôle de Trame Production déléguée Virginie Adoutte Documentalistes Charlotte de Luppé, Hanane Ben Mahmoud, Gwendal
LoayeMondeguer Image Thierry Rodon, Jesus Rodriguez Martins, M’Rad Ben Mahmoud, Jad Hatem, Julien Faucher Mixage Amélie Canini,
Bruno Lagoarde Montage Josiane Zardoya Musique Kaïs Sellami – Commentaire dit par Rachida Brakni. Avec les voix de Jeanne Carré,
Jeanne Cellard, Delphine Haber
LE PROCHE-ORIENT AU CINÉMA
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FILMS 123
LE PRIX DU FILM D’HISTOIRE DE PESSAC
CATÉGORIE FICTION
Les jurys de la compétition fiction sont présentés pages 16-17
EN COMPÉTITION : 10 FILMS D’HISTOIRE EN AVANT-PREMIÈRE
SÉLECTION : François AYMÉ, commissaire général du Festival
A PERFECT DAY de Fernando León de Aranoa
ALIAS MARIA de José Luis Rugeles Gracia
LES CHEVALIERS BLANCS de Joachim Lafosse
LE DERNIER JOUR DE YTZHAK RABIN d’Amos Gitaï
LE DOSSIER PETROV de Georgi Balabanov
FRITZ BAUER, UN HÉROS ALLEMAND de Lars Kraume
MAINTENANT, ILS PEUVENT VENIR de Salem Brahimi
MEMORIES ON STONE de Shawkat Amin Korki
LA MONTAGNE MAGIQUE d’Anca Damian
SOLEIL DE PLOMB de Dalibor Matanic
Film de clôture
LE PONT DES ESPIONS de Steven Spielberg
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2013
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FICTIONS
125
A Perfect Day (Un jour
comme un autre)
FERNANDO LEÓN DE ARANOA
Espagne, 2015, 1h45, couleur
SUJET Un groupe de travailleurs
humanitaires est en mission à la fin
de la guerre en ex-Yougoslavie : Sophie,
nouvelle recrue, veut absolument
aider ; Mambrú, désabusé, veut juste
rentrer chez lui ; Katya, elle, voulait
Mambrú ; Damir veut que le conflit se
termine ; et B ne sait pas ce qu’il veut…
SORTIE FRANCE
: 16 mars 2016
FORMAT DE LA COPIE
: DCP / 2.35 – 5.1 – DISTRIBUTEUR : UGC
Fernando León de Aranoa, Diego Farias, adapté du roman de Paula
IMAGE Alex Catalán – MONTAGE Nacjo Ruiz Capillas – MUSIQUE Arnau Bataller –
PRODUCTION Luis Fernández Lago, Patrica de Muns, Javier Méndez
SCÉNARIO
Farias –
Benicio Del Toro (Mambrú), Tim Robbins (B), Olga Kurylenko (Katya),
Mélanie Thierry (Sophie), Fedja Stukan (Damir), Sergi López (Goyo)…
INTERPRÈTES
FERNANDO LEÓN DE ARANOA
Réalisateur et scénariste espagnol né en 1968,
il commence sa carrière en écrivant plusieurs
sketchs pour des humoristes avant de passer
à la mise en scène avec plusieurs courts et
son premier long-métrage, Familia, sorti en
France en 1998 et pour lequel il reçoit le Goya
du meilleur réalisateur révélation. Il connaît
la consécration en 2002 avec Les Lundis au
Soleil où il collabore avec l’acteur Javier
Bardem. Il est aujourd’hui considéré comme
le chef de file de la veine sociale du cinéma
espagnol contemporain.
Filmographie :
2010 : Amador
2005 : Princesas
2002 : Les lundis au soleil
1998 : Barrio
1996 : Familia
126 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
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FICTIONS
Il y a quelques années, j’ai tourné un documentaire dans le nord de l’Ouganda avec
des membres de Médecins sans Frontières. Dans ce qu’on peut appeler un bar,
situé à une quinzaine de kilomètres de la frontière soudanaise, alors qu’on buvait
une bière Nile Special tiède, j’ai entendu notre responsable de la sécurité évoquer
le roman de Paula Farias, Dejarse llover, pour la première fois. Paula est médecin,
coordinatrice d’urgences pour MSF, et écrivain. D’une certaine manière, elle a deux
façons d’aider les autres. J’ai été fasciné par la simplicité de l’intrigue de son roman,
et par sa profondeur. Il dépeint avec un humour absurde la cruauté de la guerre.
Loin des scénarios habituels du genre, le film s’attache à une autre guerre,
une guerre silencieuse, qui va au-delà des lignes de front et des accords de paix.
À la frontière entre l’Éthiopie et la Somalie, une experte en logistique australienne
nous a un jour raconté que son travail était comparable à celui de ces trois catégories
de personnes : les missionnaires, les mercenaires, les martiens. Soit il s’agit de
personnes qui viennent de débarquer et qui veulent sauver le monde, soit
d’humanitaires professionnels qui sont là depuis des années, soit encore de personnes
ballotées d’une guerre à l’autre depuis tellement longtemps qu’elles ne trouvent
plus leur place nulle part. Le film les évoque toutes les trois. Ces gens, qui mènent
une guerre à l’intérieur d’une autre au quotidien. La guerre entre la volonté et le
découragement, entre le bon sens et l’absurde. Leur guerre, et l’espoir et l’humour
comme remparts contre la tragédie. Le film n’a d’autre genre que la vie elle-même.
Comme une poupée russe, il s’agit d’un drame à l’intérieur d’une comédie,
à l’intérieur d’un road-movie, à l’intérieur d’un film de guerre. Mais une chose est
sûre. S’il s’agissait de musique, ce serait du rock punk. Rapide, direct, âpre, ce film,
comme une course contre la montre, n’a pas de temps à perdre. Il est comme
les humanitaires : dur, résistant, intuitif, rapide, direct. Ici, il n’y a pas de temps pour
la réflexion, la culpabilité ou le travail de deuil. Il n’y a pas de temps pour la compassion
ou les larmes. Il n’y a de temps que pour l’action. – Note d’intention du réalisateur
Alias Maria
JOSÉ LUIS RUGELES GRACIA
Colombie/Argentine/France, 2015, 1h32, couleur
SUJET La jungle colombienne, de nos
jours. Maria 13 ans, est une enfantsoldat. Son univers : la jungle et
la guérilla, pas d’école, pas d’enfance,
mais la brutalité, le machisme,
les ordres aboyés, l’arbitraire. Et une
grossesse qui doit rester secrète...
SORTIE FRANCE
: Prochainement
FORMAT DE LA COPIE
SCÉNARIO
MUSIQUE
: DCP – 2.35 : 1 –
DISTRIBUTEUR
: Sophie Dulac Distribution
DIEGO VIVANCO – IMAGE Sergio Ivan Castano – MONTAGE Delfina Castagnino –
Camilo Sanabria – PRODUCTION Federico Duran
Carlos Clavijo (Mauricio), Anderson Gomez (Byron), Carmenza Gonzales
(épouse du médecin), Lola Lagos (Diana), Julio Pachon (le médecin)…
INTERPRÈTES
JOSE LUIS RUGELES GARCIA
Après avoir tourné son premier longmétrage, Garcia, en 2010, couronné de prix
dans plusieurs festivals en Amérique du sud,
le cinéaste José Luis Rugeles s’est attelé
pendant quatre ans à la préparation de son
second film, Alias Maria. Avec une forte
expérience dans le domaine de la publicité et
du clip, il fut longuement reconnu pour son
travail lors de grands festivals de publicités,
notamment à Cannes. Il est également le
co-fondateur d’une société de production
et co-créateur de projets comme
Buenaventura mon amour (en développement)
et producteur associé sur le film El Paramo.
Filmographie :
2010 : Garcia
2007 : El Dragon de Comodo (court-métrage)
« Le film a démarré par une réflexion sur le conflit armé en Colombie. Nous avons
commencé en réalisant des entretiens avec des femmes soldats et nous avons vite
compris qu’elles avaient toutes été recrutées alors qu’elles n’étaient encore que
des enfants, pour différentes raisons comme l’absence de gouvernement, la séduction
par les armes, la quête de pouvoir, ou la volonté de s’extirper d’un modèle familial
violent mais également parce que les familles préfèrent abandonner leur fille plutôt
qu’un garçon lorsqu’ils doivent remplir le quota de recrutement. Nous avons pensé
que la meilleure manière de raconter cette histoire était en se concentrant sur
le regard silencieux de Maria, alors qu’elle observe les dégâts entrainés par
la guerre au cœur de notre société. C’est pour cette raison que j’avais besoin d’être
au plus près de mes personnages, et plus particulièrement, près d’elle. J’avais
besoin de voir la guerre à travers ses yeux. Être capable de vibrer avec elle, sentir
le pouls de ses émotions. Je ne voulais pas utiliser de steadycam, les mouvements
seraient devenus stériles, trop propres. Mais la caméra au poing aurait également
été trop brutale et j’aurais perdu le lien avec l’intimité du personnage.
Heureusement, nous avons trouvé le Movi, un équipement de caméra qui nous
permettait de nous déplacer sur des terrains sauvages tout en maintenant l’équipe
de tournage dans une sorte d’ambiance de guérilla constante, sans lumière et en
équipe très réduite. Ce qui fut au final une excellente chose pour le film et a donc
permis au directeur de la photographie de se concentrer sur son meilleur outil :
son œil. Le résultat est des plus réalistes. Cette épaisse jungle où le vert se répand
à perte de vue oppresse non seulement les personnages, mais également
le spectateur, d’une certaine manière. Nous n’avions pas pour envie de tourner
un film d’action ou de guerre. Nous ne voulions pas montrer la violence, mais
plutôt ses dommages collatéraux, du point de vue féminin, d’une jeune fille,
une mère aussi, qui se bat pour son futur. » – Note d’intention du réalisateur
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
FICTIONS 127
Les Chevaliers blancs
JOACHIM LAFOSSE
France, Belgique, 2015, 1h52, couleur
SUJET Jacques Arnault, président de
l’ONG « Move for kids », a convaincu
des familles françaises en mal
d’adoption de financer une opération
d’exfiltration d’orphelins d’un pays
d’Afrique dévasté par la guerre. Entouré
d’une équipe de bénévoles dévoués
à sa cause, il a un mois pour trouver
300 enfants en bas âge et les ramener
en France...
SORTIE FRANCE :
27 janvier 2016
DCP – DISTRIBUTEUR : Le Pacte
FORMAT DE LA COPIE :
Joachim Lafosse, Bulle Decarpentries, Thomas Van Zuylen – IMAGE JeanFrançois Hensgens – MONTAGE Sophie Vercruysse – MUSIQUE Arnau Bataller – PRODUCTION Jacques-Henri Bronckart, Olivier Bronckart, Sylvie Pialat
SCÉNARIO
: Vincent Lindon (Jacques Arnault), Louise Bourgoin (Laura Turine),
Valérie Donzelli (Françoise Dubois), Reda Kateb (Xavier Libert), Stéphane Bissot
(Marie Latour), Raphaëlle Lubansu (Nathalie Joris)…
INTERPRÈTES
JOACHIM LAFOSSE
Sorti diplômé de l’Institut des arts de diffusion
en 2001, Joachim Lafosse fait parler de lui en
remportant la même année le Prix du meilleur
court métrage au Festival de Namur pour
son film de fin d’études, Tribu. Sa carrière de
cinéaste lancée, il réalise en 2004 son premier
long, Folie privée puis se consacre à la mise en
scène de deux films qui sortiront en France
en 2007 : Ça rend heureux, où Joachim Lafosse
retrouve son acteur fétiche Kris Cuppens, et
Nue Propriété, un drame familial présenté à
la Mostra de Venise 2006. En 2008, c’est un
autre de ses compatriotes, Jonathan Zaccaï,
que le cinéaste belge dirige pour le troublant
Élève libre, remarqué à la Quinzaine des
Réalisateurs. À perdre la raison (Prix
d’interprétation féminine « Un Certain Regard
» à Cannes), sorti en 2012 lui offre une grande
notoriété grâce à un travail de mise en scène
particulièrement rigoureuse et complexe.
Filmographie :
2012 : À perdre la raison
2008 : Élève libre
2006 : Nue propriété
2006 : Ça rend heureux
2004 : Folie privée
128 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
FICTIONS
En évoquant l’affaire de l’Arche de Zoé, récit invraisemblable et troublant d’une
association humanitaire dont les intentions sont plus que floues, Joachim Lafosse
sonde à nouveau les comportements humains les plus complexes. Depuis Nue
Propriété, son second-long métrage, le cinéaste belge construit une carrière autour
d’un certain malaise : des récits d’hommes et de femmes dont l’inconscient,
où l’inconscience, mène systématiquement à une issue dramatique. Joachim
Lafosse filme l’indicible : l’avant, l’après, rarement le pendant, laissant toujours
son spectateur se positionner sur une scène dont il ne connait pas parfaitement
le décor, ni les protagonistes. Les Chevaliers Blancs était déjà pressenti pour
concourir en compétition au dernier Festival de Cannes, mais fut seulement dévoilé
au public cet été au festival de San Sebastian, en Espagne, dont il est reparti avec
le Prix du meilleur réalisateur. C’est loin d’être un hasard, car le style Lafosse
commence à se faire remarquer, devient une signature ; celle d’un cinéaste ayant
trouvé ses marques, faisant de faits divers de véritables histoires de cinéma.
Son sens du cadre et de la coupe est à envisager comme une grammaire lacunaire,
où l’absence d’explication permet tout autant à l’intelligence et à l’imaginaire de
se développer. Joachim Lafosse déploie ainsi une certaine idée de la mise en
scène : montrer ce que l’on souhaite cacher, et dissimuler ce que l’on veut démontrer.
En ce sens, les personnages qui habitent cette Arche de Zoé deviennent les véritables
ambassadeurs du cinéma de Lafosse : ils n’évoquent jamais leur véritable mission,
mais ont l’audace de se faire suivre par une journaliste, caméra au poing. L’opacité,
en toute transparence. Et à l’instar de son précédent film, À perdre la raison,
l’émotion parvient à se frayer un chemin dans les brèches humaines, individuelles,
là où les êtres ne parviennent plus à jouer un rôle trop lourd à endosser.
Le cinéaste laisse son spectateur libre d’interpréter, de comprendre, de se faire son
opinion et sous cette objectivité factice, c’est tout un discours qui se précise… bien
des heures après la projection.
Le Dernier Jour d’Yitzhak
Rabin
[RABIN, THE LAST DAY]
AMOS GITAÏ
Israël, France, 2015, 2h33, couleur
SUJET 4 novembre 1995. Yitzhak Rabin,
Premier ministre israélien, l’homme
des accords d’Oslo et Prix Nobel
de la paix, est assassiné sur la place
des Rois d’Israël à Tel-Aviv après un
long discours contre la violence et pour
la paix. Son assassin : un étudiant juif
religieux d’extrême droite...
SORTIE FRANCE :
16 décembre 2015
DCP – DISTRIBUTEUR : Sophie Dulac Distribution
FORMAT DE LA COPIE :
Amos Gitai, Marie-José Sanselme – IMAGE Éric Gautier – MONTAGE Yuval
Orr, Tahel Sofer, Isabelle Ingold – MUSIQUE Amit Poznansky – PRODUCTION Sylvie
Pialat, Jean-Baptiste Dupont, Amos Gitai, David Kessler, Laurent Truchot
SCÉNARIO
: Yitzhak Hiskiya (Président de la commission), Pini Mittelman
(membre de la commission), Tomer Sisley (le chauffeur de Rabin), Yael Abecassis
(Interviewer), Tomer Russo (Directeur de l’hôpital)…
INTERPRÈTES
AMOS GITAÏ
Après avoir commencé à travailler pour la
télévision israélienne à la fin des années 70,
il réalise plusieurs documentaires dont
Journal de campagne, tourné pendant
la guerre du Liban, qui se voit rapidement
confronté à la censure et oblige son créateur
à fuir le pays. Il s’installe alors à Paris et
réalise les films Esther et Berlin Jérusalem.
Après l’élection d’Yitzhak Rabin comme
Premier ministre en 1993, Amos Gitaï rentre
en Israël. Il signe alors plusieurs réalisations
et entame en 1990 sa trilogie des villes,
Devarim, Yom Yom et Kadosh. Il dirigera
également plusieurs acteurs de renommée
internationale comme Natalie Portman
dans Free Zone et Juliette Binoche dans
Désengagement.
Filmographie sélective :
2014 : Tsili
2009 : Carmel
2007 : Désengagement
2005 : Free Zone
2004 : Terre promise
2000 : Kippour
1999 : Kadosh
1995 : Devarim
1986 : Esther
« La difficulté de ce film a été de trouver le bon équilibre entre reconstitution et
images d’archives. Nous avons décidé d’inclure des extraits de discours télévisés.
Leur force est telle qu’il n’était ni souhaitable ni nécessaire de les recréer.
Nous avons aussi inclus des extraits des entretiens que nous avions enregistrés
pendant nos recherches pour le film, notamment celui avec Shimon Peres (qui était
ministre des Affaires étrangères sous Rabin) et celui avec Leah, la femme de Rabin.
Nous avons visionné des archives vidéos en nous demandant comment les
transposer dans une forme cinématographique. Nous avons tourné la reconstitution
de l’assassinat sur la place même où Rabin a été abattu. Le montage et le travail
de Yuval Orr, Tahel Sofer et Isabelle Ingold a été plus long que d’habitude,
justement à cause de l’insertion de toutes ces images d’archive.
Mon but n’était pas de créer un culte autour de la personnalité de Rabin, ni de
le remplacer par un acteur. Rabin avait une réelle aura et j’ai pensé qu’il serait
intéressant de construire le film autour de son absence, comme autour d’un trou
noir. Il n’est pas présent physiquement dans le film. Ceci étant dit, j’ai également
refusé de me concentrer sur l’assassin. En Israël aujourd’hui, nous sommes
quotidiennement confrontés à la violence. Je ne pense pas qu’il soit bon d’ériger
l’Histoire en mythe. Je préfère mettre en évidence les éléments qui ont mené
à l’assassinat de Yitzhak Rabin, et à l’anéantissement de tout l’espoir de paix.
J’ai choisi d’en dire peu pour, je l’espère, promouvoir un avenir meilleur. » –
Note d’intention du réalisateur
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
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FICTIONS 129
PREMIÈRE FRANÇAISE
Le Dossier Petrov
[DOSIETO PETROV]
GEORGI BALABANOV
Allemagne/Bulgarie, 2014, 1h30, couleur
SUJET À la fin des années 1980,
les autorités interdisent à Alexander
Petrov, un comédien de renom, de se
produire sur scène. Lorsqu’il réapparait,
après la chute du régime communiste,
alors qu’il doit donner un discours aux
funérailles de celui qu’il admirait le
plus, son maitre et ami, il apprend que
celui-ci est coupable de l’avoir jadis
dénoncé. Anéanti il décide de s’éloigner
de la vie publique. C’est à ce moment
que Markov, une vieille connaissance,
lui offre son aide…
SORTIE FRANCE :
Prochainement
DCP / 2.35 – DISTRIBUTEUR : Arsam International
FORMAT DE LA COPIE :
Georgi Balabanov, Jean-Claude Carrière – IMAGE Stefan Ivanov – MONTAGE
Vessela Martschevski – MUSIQUE Mario Scheider – PRODUCTION Dimitar Gotchev
SCÉNARIO
: Mihail Bilalov, Hristo Shopov, Georgi Novakov, Anjela Ndyalkova,
Ana Papadopulu, Radina Kardjilova…
INTERPRÈTES
GEORGI BALABANOV
Né en 1951 à Sofia, Georgi Balabanov est
diplômé de de la National Theater Academy
de Sofia. De 1976 à 1980, il dirige le théatre
de Pazardzhik, en Bulgarie. Il tournera
Commemoration, son premier court-métrage,
en 1981, gagnant dans divers festivals.
Il poursuivra avec une série de documentaires
sur les peintres bulgares.
Filmographie :
2000 : Les malheurs de Sofia
1987 : Under the Circus Roof
1984 : Solo for an english horn
1983 : People from the stage
130 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
FICTIONS
L’intrigue du film est basée sur le vieux mythe de Faust et Méphistophélès. C’est
une version mise à jour de l’histoire de l’intellectuel frustré qui vend son âme au
diable après avoir perdu foi en ce qui est bon. Plus tard, frappé par le doute,
il recule, mais il ne parvient pas à remonter le temps. Le « rôle » de Faust est
attribué au fameux comédien Alexander Petrov, et celui du tentateur (et ex-ami) à
Victor Markov. La différence importante par rapport au mythe classique est que
dans notre version, Méphistophélès ne triomphe pas, mais disparait aussi, sa mort
étant une punition pour son arrogance. L’action du film se déroule sur trois couches
temporelles différentes – la fin des années 1980, au début des années 1990 et
de nos jours. Ce sont trois périodes issues de la même époque : celle de la transition
d’une société communiste vers la société bulgare moderne. « C’est véritablement
le premier film sur la transition démocratique en Bulgarie », annonce Dimitar
Mitovski, co-producteur du film : de l’aube de ces changements à aujourd’hui.
On assiste alors dans ce film à une histoire de calomnie, mais également au début
d’une brutale accumulation de capital aux dépens de vies humaines, littéralement
écrasées. Selon son réalisateur, le film résonne aujourd’hui comme un signal
des limites du modèle économique et de civilisation occidental. « Si le film fascine
autant, c’est qu’il met en exergue la liberté et l’intelligence des Bulgares, révélant
là où nous avons échoué à nous enfoncer complètement dans le paradis des
consommateurs » conclut Georgi Balabanov.
PREMIÈRE FRANÇAISE
Fritz Bauer,
un héros allemand
[DER STAAT GEGEN FRITZ BAUER]
LARS KRAUME
Allemagne, 2015, 1h45, couleur
SUJET En 1957, le juge Fritz Bauer
apprend qu’Adolf Eichmann se cache à
Buenos Aires. Les tribunaux allemands
préfèrent tourner la page plutôt que
le soutenir. Fritz Bauer décide alors
de faire appel au Mossad, les services
secrets israéliens…
SORTIE FRANCE :
13 Avril 2016
DCP – DISTRIBUTEUR : ARP Sélection
FORMAT DE LA COPIE :
Lars Kraume, Olivier Guez – IMAGE Jens Harant – MONTAGE Barbara Gies –
Christoph M.Kaiser, Julian Maas – PRODUCTION Thomas Kufus,
Georg Steinert
SCÉNARIO
MUSIQUE
Burghart Klaußner (Fritz Bauer), Ronald Zehrfeld (Karl Angermann),
Sebastian Blomberg (Ulrich Kreidler), Laura Tonke (Fräulein Schütt),
Michael Schenk (Adolf Eichmann), Dani Levy (Chaim Cohn)…
INTERPRÈTES
LARS KRAUME
Avant de réaliser 3 : 21 Uhr, son premier
court métrage, en 1992, Lars Kraume travaille
comme assistant des photographes de publicité Ralf Braun, Bernd Wagner et Fritz Dressler. En 1994, il entre à l’Académie allemande
du cinéma et de la télévision à Berlin.
En 1998, Lars Kraume tourne Dunkel, son
film de fin d’études qui remporte le Prix Adolf
Grimme de la meilleure réalisation. À la suite
de ce succès, il met en scène le thriller psychologique Der Mörder meiner Mutter pour la
chaîne de télévision allemande SAT 1.
En 2001, Lars Kraume dirige son premier long
métrage, Viktor Vogel, directeur artistique,
une comédie sur l’ascension et les désillusions d’un jeune cadre dans une grande
agence de publicité.
Filmographie :
2010 : Les Jours à venir
2005 : Keine Lieder über Liebe
2001 : Viktor Vogel, directeur artistique
Fritz Bauer fait partie de ces hommes qui ont préféré se battre pour les générations
futures plus que pour lui-même. Son combat, à la sortie de la Seconde Guerre
mondiale, est déterminé par ce désir de construire une nouvelle société, d’ouvrir de
nouvelles perspectives à la génération post-Adenauer, premier chancelier fédéral
de la RFA. Le réalisateur Lars Kraume s’est attelé à rendre hommage à cet homme
ordinaire devenu un héros allemand aux yeux de toute une jeunesse désabusée,
complexée et meurtrie. Dans l’intimité autant que dans l’ardeur de sa lutte,
le film dessine le portrait d’un homme en voie de rédemption que le cinéaste décrit
comme « l’histoire d’un homme brisé et pessimiste qui revient en Allemagne après
la Seconde Guerre mondiale et qui sera transformé grâce à son combat contre
l’oubli collectif ». À partir d’un grand travail de recherches et à travers la lecture
de plusieurs dizaines d’ouvrages, le réalisateur et son scénariste, Olivier Guez,
également auteur du livre L’impossible retour – Une histoire des juifs en Allemagne
depuis 1945, ont constitué une somme importante d’informations sur un homme
complexe, brillant, également victime d’un certain acharnement : ses détracteurs
usant de son homosexualité pour provoquer sa chute… Le choix du comédien
Burghart Klaussner s’est imposé de lui-même : « Il a immédiatement saisi
la personnalité de Fritz Bauer et l’a interprété de manière incroyablement juste »
raconte Lars Kraume. « Il avait le même âge, le même physique, l’esprit vif,
la maturité émotionnelle, la rage innée et aussi l’humour… ». La performance est
saisissante, mais également toute en nuances, nonchalante, conférant à ce
personnage historique une douce humanité, dans la veine de ses convictions.
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
FICTIONS 131
Maintenant,
ils peuvent venir
SALEM BRAHIMI
France/Algérie, 2015, 1h35, couleur
SUJET Fin des années 80 en Algérie
le socialisme se meurt et l’islamisme
d’importation afghane plonge le pays
dans le fanatisme. Et bientôt dans
l’horreur. Sur injonction de sa mère,
Nouredine épouse la belle Yasmina.
Avec elle, alors que le pays bascule
dans la tragédie, il apprendra l’amour,
la famille et la résistance. Mais rien
n’échappe à la violence islamiste…
SORTIE FRANCE :
prochainement
DCP / 2.35 – DISTRIBUTEUR : KG Productions
FORMAT DE LA COPIE :
Salem Brahimi, Arezki Mellal – IMAGE Léonidas Arvanitis – MONTAGE Yorgos
Lamprinos – MUSIQUE Eric Neveux – PRODUCTION Michèle Ray-Gavras, Salem Brahimi
SCÉNARIO
Amazigh Kateb (Nouredine), Rachida Brakni (Yasmina), Farida Saboundji
(la mère), Thoraya (la mère de Yasmina), Inès Nouri (Safia), Ilyane Djebbouri (Kamel) …
INTERPRÈTES
SALEM BRAHIMI
Né à Londres en 1972, franco-algérien,
producteur et réalisateur, Salem Brahimi
co-réalise le documentaire Africa is Back en
2010 avec Chergui Kharroubi puis en 2014,
Abd-el-Kader qui allie prises de vue réelles et
animation. Il a également collaboré en tant
que producteur sur Cartouches Gauloises
de Mehdi Charef et Mon Colonel de Laurent
Herbiet.
Filmographie :
2014 : Abd El Kader
2010 : Africa is Back
132 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
FICTIONS
Maintenant, ils peuvent venir c’est d’abord l’histoire d’un homme, Nouredine, qui
lutte contre deux femmes : sa mère d’abord, son épouse Yasmina ensuite… Il lutte
jusqu’à commencer à apprendre, grandir, grâce à Yasmina. Telle est la Méditerranée :
un homme lutte contre les femmes, mais ce sont ces mêmes femmes qui bâtissent
cet homme. Ce film est très méditerranéen : à Alger, comme à Athènes ou Beyrouth,
on n’échappe pas à la mer. On n’échappe pas à la mère. On n’échappe pas à la politique.
Et on trouve la tragédie au coin de la rue. La tragédie c’est cette décennie noire.
Comment a-t-on pu devenir ça ? C’est la question que nous pose la barbarie, notre
éternel présent. C’est la question que pose Sophie et son choix impossible. Et que
pose Nouredine. Quand la violence est là, elle habite tout. Même l’amour d’un père
pour sa fille. En tournant ce film, je pensais aux mots de Gramsci : « le vieux monde
se meurt. Le monde nouveau tarde à apparaitre. Et dans ce clair-obscur apparaissent
les monstres ». Et une caméra permet de regarder les monstres dans les yeux.
De la décennie noire à Daech, nous sommes toujours dans ce clair-obscur dont parle
Gramsci : la nuit barbare et ses désespérances. Mais l’espoir, têtu, attend le jour.
Nous avons tourné ce film en Algérie. Librement. Certains diraient dans l’indifférence.
Ce qui n’était pas du tout indifférent, c’était de recréer pour nos besoins de cinéma
une période terrible sous les fenêtres des gens qui l’ont vécue. C’était un poids
moral. Mais un carburant aussi. Tout d’un coup, quand les passants, les figurants,
l’équipe vous disent : « tu sais ce barrage, ce faux barrage, ce voisin assassiné,
c’est mon histoire » on mesure d’un coup l’écart entre l’artifice du cinéma et la vérité
de ces douleurs. – Note d’intention du réalisateur
Memories on Stone
[BÎRANÎNEN LI SER KEVIRÎ]
SHAWKAT AMIN KORKI
Allemagne/Irak, 2014, 1h37, couleur
SUJET Hussein et Alan, deux amis
d’enfance kurdes décident de tourner
un film qui retracerait le génocide
perpétré par Saddam Hussein et ses
troupes dans les années 80 où près de
200 000 Kurdes furent massacrés.
Mais tourner dans l’Irak de l’aprèsguerre ne s’avère pas une chose si
facile.
La plus grosse difficulté arrive lorsqu’il
s’agit de trouver la femme qui devrait
jouer le rôle principal…
FORMAT DE LA COPIE :
DCP – VENTES
INTERNATIONALES :
Mitos Films
Mehmet Akta, Shawkat Amin Korki – IMAGE Salem Salavati – MONTAGE
Ebrahim Saeedi – MUSIQUE John Gürtler, Özgür Akgül – PRODUCTION Mehmet Aktas
SCÉNARIO
Hussein Hassan (Hussein), Nazmi Kirikn (Alan), Shima Molaei (Sinur),
Rekesh Shahbaz, Hishyar Ziro…
INTERPRÈTES
SHAWKAT AMIN KORKI
Né au Kurdistan irakien en 1973, il quitte son
pays sous la pression de la milice irakienne
et rejoint l’Iran où il restera jusqu’en 1999.
Durant ses années en Iran et par la suite en
Irak, il travaille pour le théâtre, la télévision et
le cinéma. Il réalise ainsi ses premiers courtsmétrages entre 1997 et 2005, présentés dans
de nombreux festivals internationaux.
Il commence alors à se faire connaitre du
public et reçoit plusieurs prix pour son
travail. En 2002, il collabore à l’organisation
du premier Festival du court métrage d’Erbil.
Crossing the Dust, son premier long-métrage
a été présenté au Festival international du
film de Rotterdam en 2007.
Filmographie sélective :
2009 : Kick Off
2006 : Crossing The Dust
Après Crossing the dust (2006) et Kick Off (2009), Shawkat Amin Korki poursuit
son exploration du passé douloureux du peuple kurde irakien. À nouveau, il évite
la pose mélodramatique, usant de rebondissements parfois rocambolesques pour
adopter un ton tragicomique qui n’enlève rien au sérieux de l’entreprise…
En pratiquant l’exercice du film dans le film, le cinéaste irakien construit dans
Memories on Stone une mise en abyme sinueuse où les désirs d’un metteur en
scène de reconstituer le génocide kurde perpétré par Saddam Hussein dans
les années 1980 se mêlent au regard d’un autre cinéaste, le vrai cette fois,
dont l’histoire est intrinsèquement liée à celle de son alter ego. Dans cet imbroglio
historique, où les questions de société actuelles ressurgissent entre deux claps et
interrogent celles du passé, c’est aussi tout le devoir de mémoire d’un art que
Memories on Stone questionne et de la capacité de l’exercer dans une région
du monde où la libre expression n’a rien d’une évidence.
En réalisant un croisement entre une autobiographie, un hommage aux cinéastes
qui l’ont précédé et un pamphlet politique, Shawkat Amin Korki s’inscrit dans
une tradition engagée du cinéma du Proche-Orient tout en y insufflant une belle
dimension esthétique et cinématographique. Ainsi, il n’hésite pas à transformer
le format de son œuvre, déployant un superbe Cinémascope quand le ronflement
d’une caméra l’impose et engage son film dans un portrait grisant des coulisses
d’un tournage. Entre difficultés de casting, jalousie maladive du fiancé de l’actrice
principale, caprice de star et anachronismes qui retardent le « Moteur ! »,
c’est une nuit américaine dans les collines irakiennes à laquelle le réalisateur nous
invite. Les déconvenues y sont nombreuses, brutales, inattendues, mais au final
il y aura bien un film. Même deux… Et une question : Qui pour les voir ?
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
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FICTIONS 133
La Montagne magique
ANCA DAMIAN
Roumanie/Pologne/France, 2015, 1h25, animation couleur
SUJET Polonais réfugié à Paris dans
les années 60, la vie aventureuse
d’Adam Jacek Winkler prend un tournant radical dans les années 80. Se
rêvant chevalier du XXe siècle, Jacek
quitte
la France pour combattre les Soviétiques
aux côtés du commandant Massoud
en Afghanistan…
SORTIE FRANCE :
23 décembre 2015
DCP / 5.1 – DISTRIBUTEUR : Arizona Distribution
FORMAT DE LA COPIE :
Anca Damian, Anna Winkler – ANIMATION Theodore Ushev, Sergiu Negulici,
Raluca Popa, Tomek Ducki, Dan Panaitescu – MONTAGE Ion Ioachim Stroe –
MUSIQUE Alexander Balanescu – PRODUCTION Anca Damian, Joana Ronikier,
Guillaume de Seille, Bénédicte Thomas
SCÉNARIO
AVEC LES VOIX DE
Winkler)
ANCA DAMIAN
Anca Damian a étudié la direction de la
photographie à l’Académie de Théâtre et
Cinéma de Bucarest ; elle est également
diplômée d’un doctorat en Cinéma et Média.
Elle a occupé le poste de directrice de la photographie sur deux longs-métrages et
plusieurs documentaires. Elle réalise son
premier long-métrage Rencontres croisées
en 2008. Le voyage de M. Crulic (2011), son
second long-métrage, est un documentaire
d’animation sélectionné dans plus de 150
festivals internationaux parmi lesquels
Locarno, BFI London, Annecy, Copenhague,
Pusan et le New Directors/New Films de
New York. Le film reçoit plus de 35 prix
internationaux, notamment le Cristal du long
métrage au Festival du Film d’Animation
d’Annecy en 2012. Son troisième film, Un été
très troublé (2013) est primé à trois reprises
par l’Union des réalisateurs roumains.
La Montagne Magique, documentaire
d’animation, est son quatrième long-métrage.
Filmographie :
2013 : O vara foarte instabila
2011 : Le voyage de Monsieur Crulic
2008 : Intalniri incrucisate
134 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
FICTIONS
Christophe Miossec (Adam Jacek Winkler) , Lizzie Brochère (Anna
La Montagne Magique est le second opus d’une trilogie consacrée à l’héroïsme,
entamée avec Le voyage de M. Crulic. À chaque fois, il est question d’un individu
faisant face à sa propre mort, en voulant donner un sens à son existence et à la Vie.
Crulic (le héros de Le voyage de M. Crulic) était un quidam, un inconnu devenu célèbre
à travers sa mort. Un personnage kafkaïen broyé par la société, qui ne trouva que
la mort pour prouver sa vérité. Winkler est au contraire un héros romantique, un de ces
chevaliers dont les origines proviennent des racines profondes de l’histoire de l’humanité.
Sa vie prend sens dans une lutte contre le mal qui doit être menée jusqu’à la mort.
Adam Jacek Winkler peut être considéré tour à tour comme un fou, un marginal ou
un aventurier. Si Crulic devient un héros sans jamais ne l’avoir désiré, Winkler ne veut
vivre que dans la liberté de choix héroïques. Né peut-être trop tard par rapport à ses
modèles du Moyen-Âge, sa vie et sa mort mettent en relation le rapport de l’individu
avec l’Histoire. Mais la fin du combat signe également la fin de toute raison de vivre.
Winkler choisira de quitter la vie dans les montagnes, entre ciel et terre, dans l’absolu
de la nature. Ce film traverse les frontières de l’Europe, d’Est (la Pologne) en Ouest
(la France), et le Moyen-Orient : l’Afghanistan, un pays qui semble à la fois au
commencement et à la fin du monde. La Montagne Magique associe visuellement,
“éléments réels” et dessins, afin de créer une surréalité. Les éléments réels sont en
partie constitués des archives personnelles d’Adam Jacek Winkler, des photos où
il apparaît, et d’autres qu’il a prises en Afghanistan. Il y a aussi des références à
l’histoire du cinéma, notamment des films muets et des films en noir et blanc.
La Montagne Magique propose une palette complexe des émotions humaines et
une échelle des valeurs archétypales qui sont dans le coeur de l’humanité. – Note
d’intention de la réalisatrice
Soleil de plomb
[ZVIZDAN]
DALIBOR MATANIC
Croatie/Serbie/Slovénie, 2015, 2h03, couleur
SUJET Trois histoires d’amour
différentes se déroulant à trois époques
différentes, 1991, 2001 et 2011, dans
deux villages des Balkans où règne
la haine inter-ethnique…
SORTIE FRANCE :
mars 2016
DCP / 2.35 – 5.1 –
FORMAT DE LA COPIE :
DISTRIBUTEUR :
Bac Films
Dalibor Matanic – IMAGE Marko Brdar– MONTAGE Tomislav Pavlic – MUSIQUE
Alen Sinkauz, Nenad Sinkauz – PRODUCTION Ankica Juric Tilic, Frenk Celarc, Nenad
Dukic, Petra Vidmar, Miroslav Mogorovich
SCÉNARIO
Tihana Lazovic (Jelena/Natasa/Marija), Goran Markovic (Ivan/Ante/Luka),
Nives Ivankovic (Jelenina/Natasina Majka)…
INTERPRÈTES
DALIBOR MATANIC
Réalisateur et scénariste croate né en 1975,
Dalibor Matanic se fait connaitre en 2002
avec son film Fine Dead Girls qui remporte
le Prix du Jury au Festival de Sochi.
Sa filmographie reste méconnue pour
le public français, puisque Soleil de Plomb
constitue sa première distribution sur
le territoire français. Le cinéaste est reparti
de la dernière édition du Festival de Cannes
avec le Prix du Jury dans la sélection Un
Certain Regard.
Filmographie :
2013 : Handymen
2011 : Papa
2010 : Mère Asphalte
2008 : Kino Lika
2002 : Fine Dead Girls
En tant que réalisateur, j’ai longtemps été intrigué par les haines inter-ethniques
omniprésentes dans la région des Balkans, et par les conflits engendrés par
la guerre, la religion et la politique. Avec ce film, je souhaitais explorer trois
histoires différentes dans lesquelles un garçon croate et une jeune fille issue d’une
famille serbe se rencontrent, à travers trois décennies. Les histoires se déroulent
au même endroit, dans des villages brûlés par le soleil, et les amants ont toujours
une vingtaine d’années. À travers le prisme de ces trois romances, je voulais
donner une idée de l’atmosphère de tensions néfastes dans laquelle les communautés
outragées vivent dans la région. Je ne suis assurément pas le seul, dans notre
jeune siècle, à affirmer que la xénophobie et la haine de « l’autre », sont des
problèmes particulièrement sérieux, omniprésents et éminemment dangereux.
Il me semble qu’il n’y a pas de moyen plus efficace pour faire un film sur ce sujet
que de filmer une histoire d’amour et de confronter l’intolérance à l’acceptation,
la peur et la haine à l’espoir, le pardon et l’amour. Mon objectif en tant que réalisateur
était d’opposer la nature luxuriante du monde et les certitudes insouciantes de
la jeunesse aux actions humaines qui sont le fruit de haines, histoires, traditions,
confusions et peurs de longue date, et d’utiliser une narration cinématographique
afin de pouvoir observer comment, dans cette région, la vie des jeunes est influencée
par les événements historiques. J’ai toujours voulu faire un film qui refléterait
les réalités de ces régions ; qui permettrait de nous regarder tels que nous sommes
lorsque nous nous autorisons à agir non comme des personnes normales et
décentes, mais comme une communauté contrôlée par des besoins sombres et
conditionnés. Soleil de Plomb est une célébration de l’altruisme et de l’amour –
ce qu’il y a de plus beau dans la nature humaine, mais qui peine à reprendre
le pouvoir dans notre région. Car je ne suis sûr que d’une chose : à la fin,
les politiques et le nationalisme extrême ne gagnent jamais. Seul l’amour vaincra. –
Note d’intention du réalisateur
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
FICTIONS 135
FILM DE CLÔTURE - AVANT-PREMIÈRE
Dimanche 22 novembre à 20h30
Le Pont des espions [BRIDGE OF SPIES]
Steven Spielberg - États-Unis, 2015, 2h12, couleur
SUJET James Donovan, un avocat de Brooklyn se retrouve plongé au cœur de la guerre froide lorsque la CIA l’envoie accomplir
une mission presque impossible : négocier la libération du pilote d’un avion-espion américain U-2 qui a été capturé...
décembre 2015 – FORMAT DE LA COPIE : DCP – 2.35 : 1
Coen, Joel Coen, Matt Charman – IMAGE Janusz Kaminski – MONTAGE Michael Kahn – MUSIQUE Thomas Newman
PRODUCTION Marc Platt, Kristie Krieger, Steven Spielberg
INTERPRÈTES : Tom Hanks (James Donovan), Mark Rylance (Rudolf Abel), Amy Ryan (Mary Donovan), Alan Alda
(Thomas Watters), Sebastian Koch (Wolfgang Vogel), Scott Shepherd (Hoffman)…
SORTIE FRANCE 2
SCENARIO Ethan
Steven Spielberg est un grand cinéaste de la mémoire. L’Histoire,
le réalisateur américain la connaît bien. De 1941, comédie sur
l’entrée en guerre des américains à Lincoln, biopic sur l’une des
plus grandes figures politiques des États-Unis, en passant par
La Couleur Pourpre, Empire du Soleil, La Liste de Schindler,
Amistad, Il faut sauver le soldat Ryan ou Munich, sa filmographie
est ponctuée de grands récits historiques, parfois même souterrains, dissimulés derrière l’apparat du grand spectacle. Car à y
regarder de plus près, Spielberg n’a jamais cessé d’écrire l’Histoire :
celle d’Hollywood dans un premier temps, mais également celle
du monde, entre mythes et réalité. Le personnage d’Indiana Jones,
à qui il a consacré quatre films, en est le principal émissaire, mais
en mêlant les grandes périodes historiques (et jurassiques) et
en empruntant plus facilement le chemin de l’anticipation que
de la science-fiction lorsqu’il s’agit d’évoquer le futur, Spielberg
a écrit sa propre histoire du monde, déployant discrètement,
mais sûrement son discours d’auteur à part entière. La filmographie de Spielberg est ainsi constituée de ponts : l’immigré coincé
dans un aéroport dans The Terminal est un cousin éloigné d’E.T,
tandis qu’une Guerre des Mondes prend l’apparence d’un génocide déjà filmé quelques années plus tôt, plus sobrement.
L’Histoire est partout, sans revendiquer systématiquement la
majuscule. Cette cohérence entre ses œuvres, Spielberg fait
mine de l’ignorer ou plutôt, il tente de la dissimuler derrière une
bonhommie lui permettant de satisfaire autant les amateurs
de grand spectacle que les cinéphiles les plus exigeants. Pour
ceux qui doutaient encore de son statut de légende du cinéma
américain, Steven Spielberg nous livre cette année l’une de
ses plus grandes réussites, Le Pont des Espions, qui marque
sa première collaboration avec deux des plus grands auteurs
136 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
FICTIONS
du grand écran, les frères Coen. Le résultat est à découvrir en
clôture de cette 26e édition du Festival international du film
d’histoire.
STEVEN SPIELBERG
Sans doute une des personnalités les plus emblématiques et
influentes du Septième Art, Steven Spielberg se montre très précoce. Enfant, il réalise quelques petits films amateurs puis abandonne rapidement ses études pour tenter sa chance à Hollywood.
Son talent de mise en scène se révèle au grand jour en 1971 avec
le téléfilm Duel, oppressante course-poursuite entre un employé
de commerce et un camion fou, qui remporte le Grand Prix du
Festival d’Avoriaz. Puis il y aura un avant et un après 1975 pour
Steven Spielberg. À cette époque, il terrifie le monde entier avec
Les Dents de la mer, une référence dans le cinéma d’épouvante
qui le propulse star internationale de la mise en scène à seulement
29 ans. Réalisateur de légende ayant travaillé avec les plus grands
acteurs, bénéficiant d’une cote de popularité jamais égalée, Steven
Spielberg est également producteur à succès.
Filmographie sélective :
2012 : Lincoln
2011 : Cheval de guerre
2005 : Munich
1998 : Il faut sauver le soldat Ryan
1997 : Amistad
1993 : La Liste de Schindler
1987 : Empire du Soleil
1979 : 1941
LE PRIX DU FILM D’HISTOIRE DE PESSAC
CATÉGORIE DOCUMENTAIRE
Les jurys de la compétition documentaire sont présentés pages 18-19
EN COMPÉTITION : 14 DOCUMENTAIRES D’HISTOIRE INÉDITS
SÉLECTION : Pierre-Henri DELEAU, délégué général du Festival
1961, LA ROUTE DE L’ÉGALITÉ de Mathilde Fassin
A PLACE FOR EVERYONE de Angelos Rallis et Hans Ulrich Gössl
L’ASSASSINAT DE JEAN DE BROGLIE, UNE AFFAIRE D’ÉTAT de Francis Gillery
LES BARONS EMPAIN. LA DYNASTIE FRACASSÉE de Alice Gorissen et Tanguy Cortier
LA BATAILLE DE FLORANGE de Jean-Claude Poirson
LA BATAILLE DU CHARBON 1944-1948 de Frédéric Brunnquell
ENTRE DEUX MAI 1968-1981 – LES ARTISTES ET LA POLITIQUE de Yves Riou et Philippe Pouchain
ET LE BAL CONTINUE de Gueorgui Balabanov
LES FEMMES DE LA LIBÉRATION de Xavier Villetard
FRANÇOIS MITTERRAND. QUE RESTE-T-IL DE NOS AMOURS ? de William Karel
LA GUERRE DE CORÉE, LES VOLONTAIRES FRANÇAIS OUBLIÉS de Cédric Condon et Jean-Yves Le Naour
HOMELAND / IRAK ANNÉE ZÉRO de Abbas Fahdel
L’HOMME QUI RÉPARE LES FEMMES - LA COLÈRE D’HIPPOCRATE de Thierry Michel
LES MARCHANDS D’HITLER de Stéphane Bentura
© AB Productions.
1961, la route de l’égalité
Mathilde Fassin – France – 2015 – 52 mn
Mathilde Fassin
Nicolas Ruffault
SON Michèle Moreux
MONTAGE Cédric Le Floch
PRODUCTION DÉLÉGUÉE AB Productions
DISTRIBUTION AB international distribution
AVEC LA PARTICIPATION du Centre National du Cinéma et de l’Image animée
AUTEURE
IMAGE
En 1961, aux États-Unis, des hommes et femmes, noirs ou blancs, entendent abolir
les dispositions ségrégationnistes qui subsistent largement dans les États du sud,
et faire respecter les droits constitutionnels des Noirs américains. En embarquant
dans des bus à destination du sud, en investissant pacifiquement les lieux réservés
aux blancs, ces « Freedom Riders » vont faire avancer leur cause, au prix d’un
engagement sans faille et malgré les violences subies.
MATHILDE FASSIN
Diplômée de l’École supérieure de journalisme
de Lille en 2010, Mathilde Fassin s’est
spécialisée dans les sujets sur les États-Unis,
où elle a grandi jusqu’à l’âge de sept ans.
Elle a vécu et travaillé à New York en 20122013, dans la presse écrite, et continue à
écrire sur la société américaine depuis Paris.
1961, La route de l’égalité est son premier
film. Elle vient de remporter la bourse d’aide
à l’écriture « Brouillon d’un rêve », remise
par la SCAM, pour un futur projet, toujours
ancré aux États-Unis, et tourne actuellement
un nouveau documentaire racontant le périple
d’une famille Afro-Américaine sur les traces
de leurs ancêtres, en Afrique, intitulé Out of
America.
138 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
Dès février 1960, de jeunes noirs américains, souvent étudiants, décident de mener
des actions non violentes afin de lutter contre la ségrégation : en s’installant dans
des lieux publics qui leur sont interdits, ils manifestent de façon pacifique mais
active leur volonté de faire tomber les barrières qui les empêchent de jouir de leurs
droits. Les sit-ins de Greensboro s’étendent. Des actions sont menées à Nashville,
à Atlanta… Une nouvelle forme d’action voit bientôt le jour. Des militants décident
de se rendre, en bus, à La Nouvelle-Orléans, en appliquant le même principe :
investir les lieux réservés aux blancs, sans céder aux intimidations ou à la violence.
On sélectionne les étudiants qui partiront, on les forme. Pour ces jeunes gens bien
habillés, polis, mais déterminés, il faut être irréprochable.
Dès leur arrivée dans le Sud, les agressions commencent, orchestrées par le Ku
Klux Klan, sous l’œil bienveillant de la police. Dans l’Alabama, les bus sont attaqués,
parfois brûlés, leurs occupants passés à tabac. Malgré le danger, ces « Freedom
Riders » font des émules. Il s’agit pour eux de « combattre la haine par l’amour,
la violence par la non-violence ». Et si Martin Luther King se montre réticent à
participer directement au mouvement, ce dernier prend de l’ampleur, submergeant
bientôt les autorités locales. Kennedy, fraichement élu, aurait bien aimé se passer
de cet activisme en faveur des droits civiques. S’il protège désormais les Freedom
Rides en les escortant, il laisse les gouverneurs des États du sud juger les militants.
Peine perdue : en choisissant l’emprisonnement plutôt qu’une amende, ces militants
mettent à l’épreuve les capacités carcérales, et finissent par obtenir le retrait des
dispositions ségrégationnistes dans les gares et bus. Aujourd’hui, les acteurs de
cette lutte, septuagénaires, n’ont rien perdu de leur engagement. Et s’ils se montrent
fiers de ce qu’ils ont accompli, ils savent que l’Amérique d’aujourd’hui n’en a pas
fini avec ses vieux démons.
DOCUMENTAIRES INÉDITS
A Place for Everyone
Angelos Rallis et Hans Ulrich Gössl – Belgique – 2014 – 60 mn
Angelos Rallis et Hans Ulrich Gössl
Joel Bocken, Matthias Förster, Corantin Parmentier, Kayambi Musafiri
MONTAGE SON Marie Paulus
MONTAGE Matthias Forster, Angelos Rallis
PRODUCTION AJC ! - Atelier Jeunes Cinéastes
EN ASSOCIATION AVEC Marie-Claire Wiesenhofer, Austria Rwanda Partnership
AVEC LE SOUTIEN de Angelos Rallis Documentary Production, Ulrike Lunacek, CineArt Steiermark,
Kultursektion Stadt Wien, Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel de la Fédération WallonieBruxelles
AUTEURS
IMAGE
ANGELOS RALLIS
Angelos Rallis est cinéaste de film
documentaire et photo-journaliste. Il a
entamé sa carrière comme metteur en scène
de théâtre pour la télévision nationale Grecque
et pour l’Université d’Athènes. En Angleterre,
il a effectué des recherches en sociologie
visuelle au Centre for Urban and Community
Research (CUCR). Depuis, il travaille sur un
projet à long terme de documentation sur
les cultures émergentes et les communautés
de l’East End à Londres. Son travail a été publié
dans des journaux et est utilisé par des agences
de presse et des ONG dans le monde entier.
HANS ULRICH GÖSSL
Spécialiste en communication et producteur à
Bruxelles, il a fait ses études en science de la
Communication et Politique Européenne
à Vienne, Londres et Bruges. En Italie, il a été
Serviteur de la Mémoire de l’Holocauste
Autrichien pour lequel il s’est consacré à des
travaux de recherche sur la représentation
de la Shoah dans le cinéma contemporain.
Depuis 2007, il se rend régulièrement au Rwanda
avec une organisation de développement
autrichienne.
Au Rwanda, vingt ans se sont écoulés depuis le massacre d’un million de Tutsis
et de Hutus modérés par leurs voisins Hutus en 1994. Aujourd’hui, une nouvelle
génération de Rwandais, survivants ou descendants des génocidaires, se retrouve
face-à-face. Comment vivre ensemble, se mélanger, quand la défiance subsiste,
que les réflexes ethniques n’ont pas disparus, que certains enfants cherchent
encore la vérité sur le meurtre de leurs parents ?
Un homme parle de son village natal, Mwendo, un village paisible, bien qu’il ait été
le théâtre des atrocités du génocide rwandais. Des chants rappellent la tragédie,
ces hommes et femmes qui préféraient tuer plutôt que d’avoir un Tutsi pour voisin.
Vingt années ont passées. Ont-elles pour autant effacé les traces de cette horreur ?
À Mwendo toujours, une jeune femme, Benoîte, cherche à savoir comment a été
tuée sa mère, quand elle avait 5 ans. Elle revient pour la première fois sur les lieux,
interroge les habitants, a bien du mal à connaître le nom de l’assassin, qui est
toujours emprisonné. Personne ne semble vouloir dire la vérité.
Tharcisse, lui, essaye de faire tomber les barrières qui semblent toujours séparer
les Rwandais, de comprendre comment son peuple en est arrivé là, afin de prévenir
toute récidive. Si l’origine ethnique a désormais disparu des documents d’identité,
la défiance demeure encore, empêchant les mariages « mixtes ».
Les Tutsis se demandent comment « soigner les Hutus de ce mal qui est en eux »…
Le pardon est difficile à accorder aux anciens bourreaux, quand on a perdu ses
parents à 5 ans. Et les familles ont bien du mal à accorder la main de leur fille à un
jeune homme, lorsque celui-ci est fils d’un ancien condamné. Au Rwanda, en 2014,
chacun tente de trouver sa place, dans un équilibre plus que fragile.
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
DOCUMENTAIRES INÉDITS 139
© CPB-Amaury Brumeault.
L’Assassinat de Jean de Broglie,
une affaire d’État
Francis Gillery – France – 2015 – 70 mn
Francis Gillery
Christophe Petit, Éric Turpin, Gaspard Gillery
MONTAGE Jean-Christophe Chauvel, Sylvie Bourget
DESSINS Amaury Brumault
PRODUCTION Compagnie des Phares et Balises
AVEC LA PARTICIPATION de Planète+, de France Télévisions
AVEC LE SOUTIEN du Centre National du Cinéma et de l’Image animée
AUTEUR
IMAGE
FRANCIS GILLERY
Auteur et réalisateur, il signe de nombreux
sujets pour des magazine littéraires ou
scientifiques à la télévision de 1996 à 2000
(« Nimbus », « Texto », « Qu’est-ce qu’elle dit
Zazie ? »). Il a écrit deux ouvrages :
Je me suis raconté des histoires très tôt
(avec François Rivière, Fleuve Noir, 2011)
et Lady Died (Fayard, 2006).
Parmi ses réalisations documentaires
récentes :
2014 : Vienne, ombres et lumières (125 mn)
2012 : Stalingrad, les héroïnes cachées de
l’Armée rouge (52 mn)
2011 : Ils ne savaient pas. Les Français et la
Shoah (90 mn)
2010 : La Légende du juge Borrel (90 mn)
2009 : La Vie après la Shoah (90 mn)
2008 : La Double Mort de Pierre Bérégovoy
(90 mn)
2007 : Diana et les fantômes de l’Alma
(90 mn)
140 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
Le 24 décembre 1976, le prince Jean de Broglie, député de l’Eure et ancien ministre
du général de Gaulle est assassiné en pleine rue. Cinq jours plus tard, Michel
Poniatowski, alors ministre de l’Intérieur, annonce à la télévision française que
les coupables ont été arrêtés : le meurtre de Jean de Broglie a été commandité
par ses associés, pour une histoire de prêt non honoré. Un mobile absurde auquel
personne ne croit.
Mais que cachait cette affaire, pour que le ministre de l’Intérieur viole ainsi le secret
de l’instruction et fasse fi de la présomption d’innocence ? Qui était vraiment Jean
de Broglie ? Fruit d’une enquête au long cours, le film met en lumière les rapports
étroits entre le gouvernement et les services de police de l’époque et questionne
le fonctionnement du système judiciaire français dans les années 1970. Il pointe
les incohérences de l’instruction et s’appuie sur le récit des journalistes qui en
suivirent avec passion les nombreux rebondissements.
Il fait surtout le lien entre le financement du parti des Républicains indépendants
qui mena Valery Giscard d’Estaing à la présidence de la République et un scandale
financier espagnol impliquant la puissante organisation l’Opus Dei.
Le récit se construit à partir des entretiens avec des journalistes français (Claude
Angeli, Michel-Bôle Richard, Pierre Assouline) qui suivirent avec passion les nombreux
rebondissements de cette affaire. Il nous conduit en Espagne auprès des journalistes
espagnols du journal La Vanguardia qui mirent à jour les liens entre l’Opus Dei et
la famille Giscard d’Estaing.
Il s’appuie sur le témoignage des avocats (Roland Dumas, Francis Spizner)…
Des politiques (Jean-Pierre Soisson, Gérard Longuet) et des policiers en poste à
l’époque (Jean-Bernard Vincent, Jean-Luc Ruiz)… Des proches de Jean de Broglie
(son fils, sa secrétaire). Mais aussi du policier désigné et condamné comme
organisateur du crime, Guy Simoné, qui continue aujourd’hui de clamer son
innocence. Les dessins d’Amaury Brumault restituent l’atmosphère de l’époque et
redonnent vie à certains événements racontés par les protagonistes.
© Cie des Phares et Balises
DOCUMENTAIRES INÉDITS
Les Barons Empain. La dynastie fracassée
Alice Gorissen et Tanguy Cortier – France – 2015 – 90 mn
Alice Gorissen et Tanguy Cortier
D’après Les Barons Empain de Yvon Toussaint (éditions Fayard)
IMAGE Tanguy Cortier, François Roland, François Schmitt, Laurent Ramamonjiarisoa
SON Jean-Christophe Lion, Olivier Ronval
MONTAGE Sandrine Deegen
MUSIQUE Thierry Durel
PRODUCTION Flair Production
COPRODUCTION To Do Today Productions, RTBF, ARTE G.E.I.E.
AVEC LA PARTICIPATION du Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel de la Fédération WallonieBruxelles, de la Wallonie, du Centre National du Cinéma et de l’Image animée
AVEC LE SOUTIEN du Pôle Image de Liège et de Cinéfinance
AUTEURS
ALICE GORISSEN
Directrice de production sur des événements,
documentaires, fictions et émissions TV en
Belgique, elle a également travaillé comme
scénariste et documentaliste sur plusieurs
projets documentaires. Elle signe sa première
co-réalisation documentaire avec Les Barons
Empain, la dynastie fracassée.
TANGUY CORTIER
Il débute sa carrière à la télévision belge
comme réalisateur (journaux, émissions
culturelles). Il développe des activités de
producteur, scénariste, vidéographe... Depuis
2009, il réalise plusieurs films documentaires,
parmi lesquels :
Semal nécessaire… (69 mn)
24h au parlement (52 mn)
Les Francofolies de Spa (5 x 40mn)
Michèle Noiret, à contrechamp (52 mn)
Les Francofolies de Kinshasa (90 mn)
Les Barons Empain, ou l’histoire chaotique d’une famille passée en une centaine
d’années de la fortune à un oubli presque total. Bâtissant un empire industriel
et financier gigantesque dès la fin du XIXe siècle, Édouard Empain fut un industriel
aventureux, mais atypique. Le dernier baron, Édouard-Jean, victime d’un enlèvement crapuleux, ne se releva jamais de cette épreuve, témoignant aujourd’hui de la
destinée peu commune de cette famille...
Né en 1852, Édouard Empain, débutant comme simple dessinateur, brûle les étapes
et devient administrateur de sociétés, avant de fonder sa propre banque et d’investir
avec succès. Dans cette atmosphère de capitalisme belge débridé, ce self-made
man, qui n’appartient pas à la bonne société, multiplie les projets, bâtissant
rapidement un empire industriel. Il se passionne pour les transports, y voit une
activité lucrative et d’avenir, construit le Métropolitain à Paris. Il investit au Congo
Belge, développant le réseau ferré et exploitant les ressources minières et forestières.
Il crée de toutes pièces une ville en Égypte, Heliopolis. Suivant son instinct,
il réussit à transformer des projets risqués en réussites financières, s’attirant jusqu’à
la sympathie du roi Léopold II. Anobli, devenu même général au sortir de la Grande
Guerre, Édouard Empain semble pourtant fuir les codes de la respectabilité
bourgeoise. S’il a deux enfants, il n’est pas marié. En 1921, il régularise sa situation :
ses fils pourront lui succéder. Louis semble se désintéresser rapidement des affaires,
préférant consacrer sa fortune aux institutions et écrits pédagogiques. Jean, lui,
est un flambeur, multipliant les conquêtes féminines, se mariant avec une danseuse
qui lui a donné un fils, Édouard-Jean. Mais rien ne semble aller droit dans cette
famille. Et les bouleversements au lendemain de la Seconde Guerre mondiale
mettent à mal l’empire industriel : nationalisations en France, en Égypte,
indépendances en Afrique... Édouard-Jean, surnommé Wado, doit affronter sa
famille pour récupérer la présidence d’un immense groupe. Grisé par ses succès en
affaires, il ne se relève pas d’une ultime épreuve, celle de son enlèvement en 1978
et des révélations sur sa vie privée. Aujourd’hui, il porte sur son histoire et celle
de ses aïeux un regard désabusé et fataliste, comme si une malédiction avait
poursuivi cette famille tout au long de son existence.
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
DOCUMENTAIRES INÉDITS 141
La Bataille de Florange
Jean-Claude Poirson – France – 2015 – 109 mn
Jean-Claude Poirson
Jean-Claude Poirson
MONTAGE Benjamin Prost, Catherine Mamecier
MUSIQUE ORIGINALE Laurent Faessel
PRODUCTION Human Doors
AVEC LA COLLABORATION DE France Télévisions, Alsace 20, Mirabelle TV
AVEC LA PARTICIPATION DU Centre national du Cinéma et de l’Image animée
AVEC LE SOUTIEN DU Conseil Régional de Lorraine, de la Région Alsace, de la Communauté
urbaine de Strasbourg, de la Communauté d’agglomération du Val de Fensch,
du Département de la Moselle
AUTEUR
IMAGE ET SON
JEAN-CLAUDE POIRSON
Dans une autre vie, Jean-Claude Poirson,
sorti d’un quartier populaire de Nancy à
l’âge de 14 ans, a été tour à tour apprenti
verrier, imprimeur, chauffagiste, soudeur,
sidérurgiste, ouvrier spécialisé chez Peugeot,
avant de s’immerger dans Mai 68. Ancien
ouvrier maoïste de la Gauche Prolétarienne,
il fera 16 mois de prison en 1970 et plusieurs
grèves de la faim dans le cadre de La Cause
du Peuple, le journal maoïste dont Jean-Paul
Sartre prendra la direction avant de devenir
l’actuel Libération. En 1978, il part faire la
route jusqu’en Inde et une grande partie de
l’Asie. Passionné par l’image, il fonde en 1991
Human Doors, société de production basée à
Strasbourg. On lui doit plus d’une quarantaine
de films documentaires engagés tel que :
Sous les ponts de l’Europe, film sur une
communauté de clochards ; Armand Gatti,
L’Université des Exclus, un film sur
l’expérience de réinsertion par le théâtre
d’une centaine d’exclus ; Elles rêvaient d’un
autre monde, sur la prostitution ; Jusqu’au
Bout de la vie et Monsieur Strub, deux films
sur la fin de vie et plus récemment
ArcelorMittal, à la vie ou la mort ou encore
Florange, les damnés de l’acier.
142 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
En février 2012, devant la menace de la fermeture des derniers hauts-fourneaux
de leur vallée, les « ArcelorMittal » s’engagent dans un combat pour sauver leurs
emplois et leur activité. Pendant de longs mois, ils vont tenter de faire plier
l’actionnaire, Lakshmi Mittal, et alerter l’opinion publique sur le sort qui leur est
réservé. Une lutte au long cours, où le courage de ces hommes est mis à l’épreuve,
face aux fausses promesses, aux trahisons, au découragement...
Lorsqu’en 2012 le magnat de l’acier Lakshmi Mittal, après avoir acquis Arcelor en
2006 et supprimé des milliers d’emplois en Europe, s’apprête à fermer deux hautsfourneaux à Florange, les salariés décident de résister. Échaudés par les promesses
non tenues de Nicolas Sarkozy en 2008, ils s’accrochent à l’espoir qu’un nouveau
gouvernement saura les entendre et s’opposera aux destructions d’emplois.
Alors que la campagne présidentielle de 2012 est lancée, ils reçoivent le soutien de
François Hollande, qui vient à leur rencontre, s’engage à proposer une loi. Résolus
à ne rien céder, les syndicalistes tentent de bloquer l’activité de l’usine, mais sont
délogés par la force. S’ils ne peuvent faire plier eux-mêmes Mittal, ils comptent bien
gagner la bataille médiatique et peser dans cette élection.
Edouard Martin et ses compagnons de lutte vont multiplier les actions. Une « Marche
pour l’acier » va réunir ces représentants qui vont rallier Paris en marchant pendant
320 km, essayant de sensibiliser les habitants rencontrés à leur cause. Mais les jours
et les mois passent. Sur les piquets de grève, on dort à même le sol, on se serre les
coudes, on se remonte le moral.
L’élection en mai 2012 de François Hollande redonne un nouvel espoir, les ArcelorMittal sont désormais reçus au Parlement européen, mais le compte à rebours a
déjà commencé. Le 30 novembre, le gouvernement annonce qu’il n’y aura pas de
«nationalisation transitoire» des hauts-fourneaux. Le 24 avril 2013, c’est l’extinction
définitive. Pour ces hommes qui se sont tant battus, la fin est amère. Si certains
comme le leader syndicaliste Édouard Martin entament une nouvelle vie, d’autres
auront payé chèrement leur engagement pour sauver leur travail et leur région.
DOCUMENTAIRES INÉDITS
La Bataille du charbon 1944-1948
Frédéric Brunnquell – France – 2015 – 60 mn
Frédéric Brunnquell
Marc Soupa
MONTAGE Laure Matthey
MUSIQUE ORIGINALE David Catteloin, Lionel Raepsaet
PRODUCTION Morgane
AVEC LE SOUTIEN du Centre National du Cinéma et de l’Image animée, de la Procirep –
Société des producteurs, de l’ANGOA, de France Télévisions
AUTEUR
SON
La « Bataille du charbon », c’est celle que menèrent les mineurs dans une France
exsangue et détruite, afin de relever la production de cette énergie alors vitale et de
reconstruire économiquement et industriellement le pays au sortir de l’Occupation.
Au prix de sacrifices, ces mineurs gagnèrent cette bataille, furent adulés, avant de
subir une féroce répression lors de la grande grève de 1948...
FRÉDÉRIC BRUNNQUELL
Auteur et réalisateur de films documentaires,
il a réalisé également comme journaliste
de nombreux reportages pour des chaînes
françaises. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages,
dont un consacré à la guerre du Liban.
Parmi ses réalisations documentaires
récentes :
2015 : Classe moyenne, des vies sur le fil
(3 x 52mn)
2013 : Printemps Arabes, la confiscation (80 mn)
2012 : Nos vies discount (52 mn)
2011 : Giscard, l’homme blessé (90 mn) Sélection Prix du film d’histoire catégorie
Documentaire, Pessac 2012
2010 : François Mitterrand et la guerre
d’Algérie (70 mn) - Sélection Prix du
documentaire, Pessac 2010
2008 : Paradis fiscaux, la grande évasion (52 mn)
2007 : Ébola ce n’est pas une maladie pour
rire (52 mn)
2006 : La Vraie Vie des mondes virtuels (52 mn)
2006 : New York porte du monde (52 mn)
La France en 1945 est un pays dévasté, où l’on manque de tout. Nourriture,
logement, matériel font cruellement défaut. La production de charbon, qui a chuté
pendant les années d’occupation allemande, est au centre de toutes les attentions :
nécessaire pour se chauffer, mais surtout énergie essentielle à l’industrie, aux
transports. Sans elle, pas d’acier, de rails, de locomotives, de ciment, de briques...
De Gaulle l’a bien compris, lui qui prononce dès juillet 1945 un discours à Béthune,
exhortant les mineurs à se retrousser les manches et à retrouver au plus vite
les niveaux de production d’avant-guerre. Mais les mineurs sont las. Fatigués par
les privations, dégoûtés par l’attitude des dirigeants des compagnies minières
pendant l’occupation, alors que eux ont payé un lourd tribut en freinant la production
qui partait vers l’Allemagne. Maurice Thorez, secrétaire général du PCF, fils et petitfils de mineur, va débloquer la situation. Galvanisant les travailleurs des mines
lors d’un rassemblement à Waziers, il obtient leur adhésion. Rapidement,
la production redécolle. Le mineur devient un héros sur les affiches et dans les films
de propagande. Avec la hausse de la production, le réseau ferré est remis en état,
les marchandises circulent, l’industrie redémarre. La France semble sauvée.
En mai 1946, les mines sont nationalisées et un statut du mineur est promulgué,
portant sur les salaires et les congés. Mais les risques et la dureté du travail, eux,
n’ont pas disparus. Alors, lorsque la conjoncture se retourne, que le gouvernement
entend faire baisser les coûts d’extraction, les mineurs décident de passer à
la grève. La répression du ministre de l’Intérieur Jules Moch est impitoyable.
En décembre 1948, après 7 semaines de grève, les mineurs sont battus. Licenciements,
amendes et peines de prison pleuvent sur ces travailleurs, à qui il ne reste que la
fierté d’avoir gagné la bataille du charbon et l’amertume d’avoir été trahis.
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
DOCUMENTAIRES INÉDITS 143
© Gaumont Pathé Archives.
Entre deux Mai 1968-1981.
Les artistes et la politique
Yves Riou et Philippe Pouchain – France – 2015 – 52 mn
Yves Riou et Philippe Pouchain
Wilfrid Sempé
SON Yolande Decarsin
MONTAGE Catherine Vilpoux
PRODUCTION Flach Film Production
COPRODUCTION INA
AVEC LA PARTICIPATION du Centre National du Cinéma et de l’Image animée, de Planète+,
de France Télévisions
AVEC LE SOUTIEN de la Procirep – société des Producteurs et de l’ANGOA
AUTEURS
IMAGE
YVES RIOU et PHILIPPE POUCHAIN
Auteurs et réalisateurs, ils ont signé ensemble
de très nombreux documentaires pour
la télévision, notamment autour du monde
du spectacle. Metteurs en scène, acteurs,
ils ont joué dans des films pour le cinéma et
la télévision, et ont également présenté leurs
propres spectacles, joués notamment aux
théâtre Fontaine, théâtre d’Edgar, théâtre
de l’Espace Gaité, Bobino, à l’Olympia,
au Festival d’Avignon, Festival de Cannes,
Printemps de Bourges, Sigma de Bordeaux…
Parmi leurs récentes réalisations
documentaires :
2014 : Chansons du Front Populaire (42 mn)
2014 : Sur la Piste des Indiens des Plaines (52 mn)
2013 : Chansons de la Belle Époque (42 mn)
2013 : Châtelet sur scène, la fabuleuse
histoire (52 mn)
2013 : Cocteau Marais, un couple mythique
(60 mn)
2012 : Les Artistes et le Parti (52 mn)
2012 : Juliette Gréco, l’insoumise (76 mn)
2011 : Clowns (90 mn)
2010 : L’Occupation sans relâche, les artistes
pendant la guerre (90 mn)
2009 : Du côté de chez Vian (52 mn)
144 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
Quels ont été le rôle et la place des artistes dans les changements à l’œuvre dans
la société française entre 1968 et 1981, et quels furent leurs rapports à la politique ?
Entre un monde artistique qui embrassa le mouvement de Mai 68, fasciné par une
possible révolution culturelle, et les désillusions des années 1980, retour sur une
période charnière où les artistes furent souvent des acteurs de premier plan...
Dans la France de Mai 68, où les propositions de changement sociétal fusent,
les artistes sont à leur aise. On s’y apostrophe, on dispute le magistère des Anciens,
les idées se croisent, se perdent parfois dans une « théâtralité » des propositions
qui fascine. Le Théâtre de l’Odéon, occupé et dont le directeur Jean-Louis Barrault a
été démis, symbolise cette nouvelle prise de la Bastille où les artistes jouent un rôle
majeur. Si certains artistes se tiennent à l’écart, d’autres font corps avec ce mouvement.
Au Festival de Cannes en 1968, on remet en cause l’idée même de compétition,
de circuit commercial, et Godard s’insurge contre l’absence de problématiques liées
au monde étudiant ou ouvrier dans les films. Le mouvement peut être cruel : au
Festival d’Avignon, Jean Vilar, conspué, ne s’en remettra jamais vraiment.
La remise en cause est radicale avec le Living Theatre, qui entend démolir les codes
du théâtre classique et dénoncer. D’autres fuient les lieux institutionnalisés et
fondent de nouveaux espaces. Le cinéma ne semble pas être en reste, avec
l’adaptation de L’An 01 ou le scandale de La Grande Bouffe de Marco Ferreri à
Cannes en 1973. Si le ministre de la Culture Maurice Druon essaye de siffler la fin
de la récréation, et si un chanteur comme Michel Sardou semble lui défendre
les valeurs « éternelles » de la France, une chose est sûre : les artistes doivent
prendre position. Pourtant, alors que les chanteurs apparaissent dans les meetings
politiques lors de la présidentielle de 1974, le débat se déplace. Révolution
des mœurs, statut de la femme, sexualité sont désormais à l’agenda des artistes.
Certains dénoncent le théâtre engagé « où l’on s’ennuie à mourir ». On cultive plutôt
l’humour potache, on court au café théâtre, on se perd dans les nuits du Palace.
Et si le Parti socialiste entend développer une « nouvelle politique culturelle » à
l’approche des élections de 1981, une parenthèse, où artistique rimait avec politique,
semble s’être refermée.
DOCUMENTAIRES INÉDITS
© Ladybirds Films
Et le bal continue
Gueorgui Balabanov – France – 2015 – 90 mn
Gueorgui Balabanov
Stefan Ivanov
SON Ivailo Ianev, Vesseline Zografov
MONTAGE Vesselka Kiriakova
PRODUCTION Ladybirds Films
COPRODUCTION ARTE France
AVEC LA PARTICIPATION du Centre National du Cinéma et de l’Image animée
AVEC LE SOUTIEN de la Région Île-de-France, de la Procirep - Société des Producteurs,
de l’ANGOA, de « Brouillon d’un Rêve » de la SCAM
AUTEUR
IMAGE
GEORGI BALABANOV
Auteur et réalisateur, Gueorgui Balabanov
suit des cours d’art dramatique de 1969
à 1974 à Sofia. Il est metteur en scène au
Théâtre de Pasardjik en Bulgarie de 1976 à
1980, puis réalisateur à partir de 1981.
De 2000 à 2005, il réalise divers courts
métrages pour la télévision bulgare.
Parmi ses réalisations :
2014 : Le Dossier Petrov (voir page 130)
1999 : Les Malheurs de Sofia
1996 : La Frontière de nos rêves
1991 : L’Ombre du chasseur
1990 : Le Royaume de Dieu
1989 : Palais du rire
1988 : Pod coupola (Sous le chapiteau)
1986 : Pessenta na Strouma (La Chanson
de la Strouma)
Comment se porte la société bulgare aujourd’hui ? En suivant quelques personnages,
en essayant d’interroger les Bulgares sur ce qu’ils vivent et leur regard sur ce pays,
le tableau dressé n’incite guère à l’optimisme. Corruption, mafia, démocratie de façade, communautés dressées entre elles, misère du plus grand nombre et richesse
de quelques oligarques. La Bulgarie, passée de l’ère soviétique à l’intégration dans
l’Europe, est un pays désabusé, et rares sont ceux qui pensent qu’il peut encore
se relever...
Dans un hôtel de Sofia se tient une réception pour quelques riches Bulgares.
Dans les vieilles cités délabrées, on vit avec quelques centaines d’euros de pension
par mois. Des médecins, des enseignants se rassemblent devant le parlement, aux
cris de « démission », « mafia »... Dans la rue, une soupe populaire. Un homme se
demande où sont passés les espoirs démocratiques nés de la fin de la Bulgarie
communiste, de la Marche bleue de l’espoir de 1990... De ces espoirs déçus
d’une transition vers une véritable démocratie, les Bulgares veulent bien parler.
Ils évoquent les élections truquées, l’achat massif de votes, la corruption.
Mais lorsqu’il s’agit de parler de mafia, de crime organisé, de dénoncer ceux qui
profitent de ce système, on préfère ne rien dire. Une forme d’omerta s’installe.
Azis, chanteur pour le moins excentrique, star dans son pays, en est aussi la mauvaise
conscience. Ses chansons et ses clips parlent crument d’homosexualité, et il est
d’origine tzigane : deux tares dans un pays de Chrétiens orthodoxes qui ne goute
guère ce genre d’orientation, et qui n’a pas de mots assez durs contre les roms,
accusés de tous les maux et de conduire le pays à sa perte.
Dans les couloirs de l’université de Sofia, les jeunes étudiants eux non plus ne se
font guère d’illusion à l’approche des élections. Ici, ce qui compte, ce n’est pas
« ceux qui votent, mais ceux qui comptent les votes »... Pourtant, lorsqu’un vieux
poète dissident tente de secouer les consciences et en appelle à manifester,
personne ou presque ne le suit. Comme si tous les acteurs de cette mascarade
étaient las et résignés, incapables de s’accrocher à un quelconque espoir.
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
DOCUMENTAIRES INÉDITS 145
Les Femmes de la Libération
Xavier Villetard – France – 2015 – 60 mn
Xavier Villetard
Inspiré de l’ouvrage What Soldiers Do de Mary Louise Roberts (University of Chicago
Press, 2013)
IMAGE Christopher Morley-Pegge, Yoann Le Gruiec
SON Yolande Decarsin, Frédéric Bouvier
MONTAGE Nadia Collot
PRODUCTION Maha Productions
AVEC LA PARTICIPATION de France Télévisions
AVEC LE SOUTIEN de la Région Basse-Normandie, du Centre National du Cinéma et de
l’Image animée, de la Maison de l’Image Basse-Normandie, de la Procirep - Société des
Producteurs et de l’ANGOA
AUTEUR
XAVIER VILLETARD
Journaliste au service culture de Libération
et à « Cinéma Cinémas », puis auteur de
documentaires aux côtés de Claude Ventura
(Chambre 12, hôtel de Suède et Scott
Fitzgerald : retour à Babylone) ou de Guy
Girard (La légende de My Way), Xavier
Villetard s’est tourné vers la réalisation avec
un court métrage sur David Lynch. Depuis,
il a réalisé un peu plus d’une vingtaine de
films, parmi lesquels :
2014 : Comment nous avons construit le
métro de Moscou (52 mn)
2013 : Beat Generation (55 mn) – Sélection
Panorama du Documentaire, Pessac 2013
2012 : Cuba année zéro (80 mn)
2011 : L’Énigmatique histoire de B. Traven
(62 mn)
2010 : Chez Frida Khalo (52 mn) –
Sélection Prix du film d’histoire catégorie
Documentaire, Pessac 2011
2008 : Les Filles des ruines (62 mn) –
Sélection Prix du film d’histoire catégorie
Documentaire, Pessac 2009
2007 : Tu seras un homme, mon fils (52 mn)
2006 : La Campagne de Russie (52 mn)
2005 : Forever Lénine (52 mn)
146 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
La Libération de la France fut pour les femmes une période ambivalente, où joie et
craintes se mêlaient. Peur des combats, des pillages, des violences qui leur seraient
faites. Absence des hommes encore prisonniers ou déportés, présence à la fois
salvatrice et redoutée des GI’s américains. À travers les écrits de ces femmes ou
jeunes filles françaises se dessine une mémoire inédite de cette période...
Alors que la libération de la France s’engage dès juin 1944, les femmes françaises
doivent faire face à une situation nouvelle. Il faut survivre désormais aux combats
qui se déroulent autour d’elles, se cacher, mais aussi préserver des ressources
qui sont bien souvent convoitées par les soldats libérateurs. Débarquant en masse,
les GI’s se montrent généreux, mais arrivent en conquérants. À ces soldats, en guise
de motivation, on a vendu l’image de femmes françaises « charnelles » pour ne pas
dire faciles. Ils comptent bien en profiter, ne voyant souvent en elles que des biens
de consommation que l’on pourra acquérir et troquer. Les viols se multiplient,
que l’encadrement s’empresse de mettre sur le compte des seuls soldats noirs,
histoire de sauver cyniquement la réputation de l’armée américaine.
Dans Paris qui commence à être libéré, comme dans le reste de la France,
les hommes encore présents se livrent aux premières épurations sauvages,
et réservent un sort particulier aux femmes accusées de collaboration. Violences
collectives, femmes tondues et exposées : une forme de reprise en main contrainte
du corps des femmes est à l’œuvre, comme si cette violence supplémentaire et
spécifique permettrait l’expiation des années d’occupation. Alors que les femmes
continuent de s’inquiéter dans leurs lettres du sort des hommes retenus en Allemagne,
les premiers convois de rapatriés arrivent à Paris. Comment gérer ces retours, après
des années d’absence, d’hommes dont le statut a été mis à mal, que faire de ces
enfants qui sont parfois nés en leur absence ? Ces femmes, qui peuvent désormais
voter, mais demeurent des mineurs juridiques, devront composer, et tenter
de reprendre le cours de leur vie.
DOCUMENTAIRES INÉDITS
© Guy Le Querrec / Magnum Photos.
Cette image a été réalisée lors d’une séance de pose pour le sculpteur Daniel Druet.
François Mitterrand.
Que reste-t-il de nos amours ?
William Karel – France – 2015 – 90 mn
William Karel
François Reumont
SON Emmanuel Milhau, Francesca Faiella
MONTAGE Pauline Pallier
MUSIQUE Siegfried Canto
PRODUCTION Roche Productions
COPRODUCTION RTBF, ARTE France
AVEC LA PARTICIPATION de Radio Télévision Suisse, Radio-Canada Television,
Al Arabiya News Channel
AVEC LE SOUTIEN du Centre National du Cinéma et de l’Image animée
AUTEUR
IMAGE
WILLIAM KAREL
Auteur-réalisateur, il a également co-scénarisé
trois films de Philippe Faucon : Sabine (1992) ;
Mes dix-sept ans (1996) et Dans la vie (2005).
Il a publié deux ouvrages : Opération « Vent
printanier » (avec Blanche Finger, éditions
La Découverte, 1992) et Une terre deux fois
promise (éditions du Rocher, 1998).
Parmi ses dernières réalisations
documentaires :
2014 : Jusqu’au dernier. La destruction des
Juifs d’Europe (Co-réalisation Blanche Finger)
2012 : Barack Obama. Au cœur de la maison
blanche
2011 : Album(s) d’Auschwitz (co-réalisation
Blanche Finger) - Sélection Prix du film
d’histoire - catégorie Documentaire,
Pessac 2011
2011 : Looking for Nicolas Sarkozy
2011 : Philip Roth, sans complexe
2010 : Gallimard, le Roi Lire
2009 : Mais qui a tué Maggie ? - Sélection
Prix du film d’histoire - catégorie
Documentaire, Pessac 2009
2008 : Meurtres à l’Empire State Building
2006 : Poison d’avril
2005 : La Fille du juge
2004 : Le Monde selon Bush
2003 : Jean Moulin. Lettre à un inconnu
2003 : CIA – Guerres secrètes
2002 : Opération Lune
Vingt ans après la disparition de François Mitterrand, quels souvenirs subsistent
de ce personnage hors-norme, célébré par certains, critiqué par bien d’autres.
Quel bilan politique tirer de ces deux septennats, après une arrivée au pouvoir en
1981 qui avait suscité tant d’espoirs pour le peuple de gauche ? Et que retenir de
cet homme, de ses secrets longtemps bien gardés, de ses arrangements avec l’Histoire, de sa pratique du pouvoir ?
Le bilan politique de François Mitterrand, après son élection en mai 1981, a déjà
été inventorié : abolition de la peine de mort, hausse du salaire minimum,
des allocations familiales, retraite à 60 ans, 5ème semaine de congés payés,
nationalisations, politique culturelle... Mais ce programme social et économique est
rapidement abandonné, devant les difficultés économiques et industrielles du pays.
Confronté au chômage, à une côte de popularité qui dégringole, Mitterrand va
chercher ailleurs les moyens de rester au pouvoir. S’intéressant peu aux questions
économiques, il voit en l’Europe une planche de salut, pour la France et pour son
avenir politique, sans oublier d’encourager sur la scène nationale l’émergence du
Front national aux dépens de la droite. Peine perdue : en 1986, la gauche battue aux
législatives, il « invente » la cohabitation, retranché à l’Élysée, face à un Jacques
Chirac qu’il ne ménage pas. Deux années qu’il passe à préparer sa réélection.
Pour certains, ce deuxième mandat est celui de trop : dérives du pouvoir, scandales,
révélations, nouvelle cohabitation. Et l’impression que François Mitterrand n’a pas
réussi à saisir l’ampleur des changements qui secouaient l’Europe à ce moment là,
avec la chute du Mur de Berlin.
C’est aussi une période difficile pour un homme qui a longtemps gardé ses secrets.
Le livre Une jeunesse française de Péan jette une lumière crue sur sa période vichyste.
Sa relation avec Bousquet, responsable de la rafle du Vel’ d’Hiv’, choque. Acculé,
Mitterrand s’accroche, nie parfois avec aplomb. Jusqu’à la fin, il sent que ce pouvoir
qu’il exerce le maintient en vie, lui qui a si longtemps repoussé la maladie. En mai
1995, il préside son dernier Conseil des ministres. Il meurt le 8 janvier 1996.
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
DOCUMENTAIRES INÉDITS 147
La Guerre de Corée,
les volontaires français oubliés
Cédric Condon et Jean-Yves Le Naour – France – 2015 – 52 mn
Cédric Condon et Jean-Yves Le Naour
Cyrille Liberman
SON Amaury Arboun
MONTAGE Cédric Condon
MUSIQUE ORIGINALE David Lassalle et Philippe Charriot
DESSINS ORIGINAUX David Chambard
PRODUCTION Kilaohm Productions
COPRODUCTION ECPAD
AVEC LA PARTICIPATION du Ministère de la Défense, Secrétariat Général pour l’Administration,
Direction de la Mémoire, du Patrimoine et des Archives, du Centre National du Cinéma
et de l’Image animée, de la Procirep - Société des Producteurs et de l’ANGOA,
de France Télévisions
AVEC LE SOUTIEN de la Fondation d’entreprise Carac
AUTEURS
IMAGE
CÉDRIC CONDON
Auteur-réalisateur, il a notamment réalisé :
2014 : Les Français du Jour J (90 mn) Sélection Panorama du Documentaire,
Pessac 2014
2013 : Le Procès du viol (52 mn) - Prix du
Public, Pessac 2013
2012 : On a volé le Maréchal ! (52 mn) Sélection Prix du documentaire, Pessac 2012
2012 : Algérie, nos années Pieds-rouges
(90 mn) - Sélection Panorama du
Documentaire , Pessac 2012
2011 : Notre ami l’empereur Bokassa Ier (52 mn)
2011 : Le Dernier guillotiné (52 mn)
2010 : L’Affaire Rattaire (52 mn)
2009 : L’Île aux cannibales (75 mn) - Sélection
Prix du documentaire, Pessac 2010
JEAN-YVES LE NAOUR
Jean Yves Le Naour est historien, spécialiste
de la Grande Guerre et de l’histoire du XXe
siècle, auteur d’une trentaine d’ouvrages
parmi lesquels : Les Soldats de la honte
(Perrin, 2011), 1916 : L’enfer (Perrin, 2014),
1915 : l’enlisement (Perrin, 2013), 1914 :
la grande illusion (Perrin, 2012), Dictionnaire
de la Première Guerre mondiale (Larousse,
2008), Le soldat inconnu vivant (Hachette,
2002). Il est également l’auteur de plusieurs
documentaires d’histoire, et a co-réalisé
les films Quand la Grande Guerre rend fou
(avec Gregory Laville, 2014, 52 mn) et
Nos salles obscures (avec Nicolas Levy-Beff,
2012, 52 mn).
148 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
Qui se souvient aujourd’hui que la France à participé au conflit le plus violent
et le plus meurtrier de la guerre froide : la guerre de Corée ? C’est cette guerre
si violente que ce documentaire se propose de raconter grâce aux témoignages
d’anciens combattants français qui se sont prêtés au jeu de la mémoire,
une mémoire parfois douloureuse.
Le film nous fait entrer dans l’émotion d’une guerre à hauteur d’hommes, dans
le quotidien marqué par la neige et le froid, la camaraderie et les durs combats dans
lesquels les Français se sont engagés avec gloire et courage aux côtés des soldats
américains admiratifs de leur bravoure.
Le documentaire s’attache également à contextualiser les grands enjeux stratégiques
et géopolitiques de cette guerre méconnue qu’est la guerre de Corée, alternant
ainsi l’histoire singulière et la grande Histoire. Le fil rouge narratif entrecroise
ce qui se passe sur le terrain, parmi les volontaires du bataillon français, comme
ce qui se trame à la Maison Blanche, au Kremlin, à Pékin ou dans l’état-major des
grands généraux qui ont orchestré cette guerre.
Ce film bénéficie d’images d’archives inédites, notamment celles de l’ECPAD sur
le bataillon français, jamais sollicitées jusqu’alors, et celles d’archives personnelles
des vétérans français. La guerre de Corée, premier affrontement et plus grande crise
de la guerre froide, est un trou noir mémoriel en France. La guerre d’Indochine
lui a certainement fait écran, et la défaite de Dien Bien Phu a dissimulé les lauriers
du bataillon français de l’ONU. Curieusement, le même oubli prévaut aux États-Unis
où la guerre de Corée est effacée par le grand drame du Vietnam.
© Kilaohm Productions
DOCUMENTAIRES INÉDITS
Homeland : Irak année zéro
Abbas Fahdel – Irak – 2014 – 352 mn
1ère partie : Before the Fall (2h40) - 2ème partie : After the Battle (2h54)
AUTEUR, IMAGE, SON, MONTAGE
Abbas Fahdel
Abbas Fahdel / Stalker Production
DISTRIBUTION Nour Films
SORTIE EN SALLES 10 février 2016
PRODUCTION
Le quotidien d’une famille irakienne, dans les mois qui précèdent l’intervention
américaine de 2003, et à la suite de l’invasion de l’Irak par les soldats américains.
Pendant un an et demi, Abbas Fahdel a filmé sa famille, ses amis et proches,
saisissant l’atmosphère d’attente d’une population face à la guerre qui s’annonce,
et les conséquences immédiates de la chute du régime et des destructions sur la
vie des Irakiens.
ABBAS FAHDEL
Réalisateur, scénariste et critique de cinéma,
Abbas Fahdel est né en Irak. Installé en
France depuis l’âge de 18 ans, il y étudie
le cinéma en suivant notamment les cours
d’Éric Rohmer, Jean Rouch et Serge Daney.
Auteur coup sur coup de deux documentaires
(Retour à Babylone, 2002 et Nous les Irakiens,
2004), en 2008, il termine son premier long
métrage de fiction, L’Aube du monde, tourné
en Égypte et interprété par Hafsia Herzi et
Hiam Abbass.
Bagdad, février 2002, premier jour de l’Aïd. Dans une maison, une famille se réveille
au son des dessins animés de la télévision irakienne. Même si l’atmosphère semble
paisible, certains gestes traduisent une tension. Aux actualités, on diffuse des images
de Saddam Hussein recevant ses ministres, refusant de répondre aux accusations
américaines sur les « armes de destruction massive ». La guerre est déjà dans
les esprits. En prévision de cette guerre, on creuse un puits dans le jardin, luxe que
toutes les familles ne pourront pas s’offrir. Sur les vitres, le scotch collé lors de
la première guerre de 1991 pour éviter que celles-ci ne volent en éclats n’a pas disparu.
Les coupures d’électricité sont fréquentes, il faut aller chercher ses rations
alimentaires. Depuis des années, les Irakiens vivent dans un pays privé de ressources,
sous embargo.
La famille séjourne à Hit, sur les rives de l’Euphrate, où les ponts détruits en 1991
n’ont jamais été reconstruits. Dans les palmeraies, au milieu des vergers et des
animaux, loin de la promiscuité de la capitale, les enfants jouent. Fatalistes, ils ne se
font pas d’illusions sur l’issue du conflit : « bâtons et cocktails molotov contre avions
et missiles ».
Bagdad, avril 2003, deux semaines après le début de l’invasion. Saddam Hussein ne
tardera pas à être capturé. Partout, des immeubles calcinés, des soldats américains,
des pillards irakiens qui font régner la terreur, forçant les habitants à s’armer.
Si les Irakiens se réjouissent de la chute d’un Saddam Hussein honni, ils savent
que la présence américaine, la désorganisation, la violence qui se développe,
n’annonce rien de bon pour leur pays. Les meurtres se multiplient. Et une génération
de jeunes Irakiens, qui étaient les « enfants de l’embargo », seront désormais les
enfants de la guerre.
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
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DOCUMENTAIRES INÉDITS 149
© Thierry Michel.
L’Homme qui répare les femmes.
La colère d’Hippocrate
Thierry Michel – Belgique – 2015 – 112 mn
Thierry Michel et Colette Braeckman
Thierry Michel, Colette Braeckman, Christine Pireaux
IMAGE Michel Téchy, Thierry Michel
SON Jean-Luc Fichefet
MONTAGE Idriss Gabel
MUSIQUE ORIGINALE Michel Duprez, Edo Bumba
PRODUCTION Les Films de la Passerelle
COPRODUCTION Ryva Productions, RTBF, Public Sénat, Lichtpunt
AVEC LE SOUTIEN du Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel de la Fédération WallonieBruxelles et de Voo, de Wallonie Image Production, de RTS Radio Télévision Suisse,
de TV5 Monde
AUTEURS
SCÉNARIO
THIERRY MICHEL
Cinéaste, photographe, enseignant et
journaliste, Thierry Michel a notamment
réalisé :
2013 : L’Irresistible ascension de Moïse
Katumbi (83 mn) - Sélection Prix du film
d’histoire - catégorie Documentaire,
Pessac 2013
2012 : L’Affaire Chebeya , un crime d’État (60 mn)
2010 : Katanga, la guerre du cuivre (90 mn)
2010 : Métamorphose d’une gare (80 mn)
2009 : Sœur Sourire, les coulisses d’un
tournage (52 mn)
2009 : Mines de tracas au Katanga (52 mn)
2009 : Fétiches et Minerais (26 mn)
2009 : Katanga Business (120 mn)
2005 : Congo River (120 mn)
2002 : Iran, sous le voile des apparences (90 mn)
1999 : Mobutu, roi du Zaïre (135 mn) Sélection thématique, Pessac 2010
150 PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
Depuis quinze ans, le docteur Denis Mukwege soigne les femmes et filles violées
et blessées en République démocratique du Congo. Dans un pays déstabilisé
par deux décennies de conflits, où le viol est devenu une arme de guerre utilisée
massivement, il se bat, au péril de sa vie, pour que ces femmes retrouvent
un espoir de vie, et que ce pays sorte un jour de cette spirale destructrice...
Depuis 1996, à la suite du génocide rwandais et la fuite de miliciens hutus au
Congo-Zaïre, la région du sud Kivu a connu un déchaînement de violences et d’atrocités sans précédent. Dans un pays confronté à une lutte armée pour le pouvoir,
à l’intrusion de combattants du Rwanda voisin, à la présence constante de milices
qui se disputent les richesses du sol, les massacres d’une population sans défense
se sont multipliés.
Cibles privilégiées, les femmes payent un lourd tribut. Enlevées, séquestrées,
violées, mutilées, victimes d’atrocités commises par les différents groupes armés,
elles sont aussi souvent exclues de leur communauté, de leurs familles. Ces femmes
ou fillettes, Denis Mukwege, gynécologue, a décidé de les aider, de les soigner
et de leur redonner un espoir. Dans son hôpital de Tanzi, il enchaîne les opérations,
offre une aide juridique. Il essaye aussi de prendre en charge et de reconstruire
psychologiquement des femmes dont il loue le courage. Victime d’une tentative
d’assassinat en 2012, obligé de s’exiler avec sa famille, il revient finalement, touché
par la mobilisation d’associations de femmes congolaises. Fils d’un pasteur,
ce médecin courageux se désespère pourtant devant l’ampleur des dégâts causés
à la population de son pays, touchant des générations entières de femmes. Denis
Mukwege essaye de combattre cette spirale des violences sexuelles en utilisant
toutes les voies qui peuvent s’offrir à lui. Il multiplie les discours devant
les organisations internationales, l’ONU, les grandes universités. Lauréat du prix
Sakharov en 2014, il appelle aussi ses concitoyens à s’emparer de ce problème
et à protéger leurs femmes et filles. Mais dans un pays marqué par des années
de guerre, désorganisé, livré à l’appétit des multinationales, sans volonté
gouvernementale de s’attaquer à ces maux, l’espoir d’un homme cède parfois
la place à la colère.
DOCUMENTAIRES INÉDITS
© illustration Ottavio Coffano / Siècle Productions.
Les Marchands d’Hitler
Stéphane Bentura – France – 2015 – 62 mn
Stéphane Bentura
Pierre Chautard
SON Fabien Blanchard, Peter Kautzsch
MONTAGE Frédéric Fournier, assisté de Bertrand Amiot
ILLUSTRATIONS Ottavio Coffano
MUSIQUE ORIGINALE Thomas Dappelo
PRODUCTION Siècle Productions
AVEC LA PARTICIPATION de AB Thématiques pour Toute L’Histoire, de TV5 Monde, de la RTBF,
du Centre National du Cinéma et de l’Image animée, de France Télévisions
AUTEUR
IMAGE
STÉPHANE BENTURA
Diplômé en histoire contemporaine à la
Sorbonne et à Sciences-Po Paris, spécialiste
de l’URSS, il a travaillé dès 1989 à l’AFP,
d’abord comme correspondant en Russie
puis à Washington. En 1991, il couvre
notamment pour cette agence la libération
du président soviétique Mikhaïl Gorbatchev,
enfermé dans sa datcha de Foros en Crimée,
lors du putsch d’août 1991. Réalisateur depuis
une quinzaine d’années, il se spécialise
notamment dans les documentaires et les
grands reportages d’investigation.
Parmi ses récentes réalisations :
2013 : Saint Tropez, histoire secrète d’un
petit port de pêche (61 mn)
2013 : Stress scolaire : l’obsession de
l’excellence (75 mn)
2013 : Affaire Armstrong, qui sont
les complices ? (52 mn)
2012 : Libye : le blogueur et le dictateur (52 mn)
2011 : Les bio du village (52 mn)
2010 : QI : Histoire d’une imposture (52 mn)
2010 : Mexique : au bord de l’overdose (52 mn)
2009 : Africastups (52 mn)
2008 : Trafic d’art : les nouvelles filières (110 mn)
En 2013, on découvre par hasard en Allemagne une très importante collection
d’œuvres d’art, acquises pour beaucoup grâce aux nazis. Ce « Trésor de Munich »,
Cornelius Gurlitt le tenait de son père, Hildebrand, marchand d’art très actif
dans l’Allemagne nazie. Enquête sur ces réseaux qui ont organisé la spoliation
des œuvres détenues par les Juifs, en Allemagne et en France…
À Düsseldorf, en 2014, on enterre Cornelius Gurlitt, un homme très discret, vivant
reclus. Quelques mois auparavant, on a découvert chez lui plus d’un millier d’œuvres
d’art – peintures, dessins – signées Picasso, Matisse, Renoir, Chagall... Ce trésor,
Cornelius le tenait de son père, Hildebrand Gurlitt, important marchand d’art. Mais
la légalité de cette collection apparaît rapidement suspecte. Dans l’Allemagne nazie,
dès 1933, les mesures contre les populations juives et les confiscations se multiplient.
Ceux qui détiennent des œuvres d’art sont contraints de s’en séparer, si elles ne
sont pas tout simplement confisquées. Ce qui peut relever de l’art officiel nazi est
réparti entre quelques dignitaires du parti. Le reste, les œuvres modernes,
expressionnistes, ce que les nazis nomment « l’Art dégénéré », n’est pas détruit,
mais revendu pour soutenir l’effort de guerre.
Amateur et spécialiste de cet « art dégénéré », Hildebrand Gurlitt semble vite
comprendre comment tirer parti de cette situation. En 1939, il fait partie des experts
désignés par Goebbels pour orchestrer ces ventes aux enchères, où figurent des
Picasso, Mondrian, Kandinsky... experts qui ne manquent pas de se servir au passage.
Avec la capitulation française, c’est un nouveau « marché » qui s’ouvre : ventes
contraintes, saisies, pillages des appartements des personnes déportées, alimentent
un réseau que se partagent dignitaires nazis et marchands sans scrupules.
À la fin de la guerre, Hildebrand Gurlitt se replie à Dresde, puis dans un petit village
de Bavière, emportant avec lui « sa » collection. Interrogé par les équipes américaines
chargées de récupérer les œuvres d’art pillées, les fameux « monument men », il
réussit à passer entre les gouttes, affirmant n’avoir jamais profité des spoliations.
Dans une Allemagne d’après-guerre marquée par le déni et le mensonge, il expose
même ces tableaux, sans être inquiété, avant de mourir en 1956. Aujourd’hui,
malgré les preuves accumulées, justice allemande, musées et marchands ne semblent
pas toujours disposés à faire toute la lumière sur l’étendue des spoliations.
PRIX DU FILM D’HISTOIRE 2015
-
DOCUMENTAIRES INÉDITS 151
L’ARMÉE SECRÈTE
ARMÉNIENNE
Audrey Valtille – France – 2015 – 56 mn
PANORAMA 2015
DU DOCUMENTAIRE
D’HISTOIRE
Audrey Valtille
Nathanaël Louvet,
Samvel Galstyan
MONTAGE Aurélie Charlier
MUSIQUE ORIGINALE Jérémy Gravier
AUTEURE
IMAGE ET SON
Agat Films & Cie
France 3 Corse ViaStella
EN ASSOCIATION AVEC SOFITVCINE 2
AVEC LE SOUTIEN du Centre National du
Cinéma et de l’Image animée
PRODUCTION
COPRODUCTION
Séances à l’auditorium de la Médiathèque Jacques Ellul
10 DOCUMENTAIRES D’HISTOIRE RÉCENTS
SÉLECTION : Pierre-Henri DELEAU, délégué général du Festival
L’ARMÉE SECRÈTE ARMÉNIENNE d’Audrey Valtille
AU NOM DU TEMPLE de Charles Enderlin
LE COMBATTANT DE LA PAIX, BENJAMIN FERENCZ
de Michaël Prazan
DAS REICH, UNE DIVISION SS EN FRANCE de Michaël Prazan
LA FRANCE EN GUERRE de Martin Blanchard
POULIDOR PREMIER de Patrick Jeudy
SHOAH, LES OUBLIÉS DE L’HISTOIRE de Véronique Lagoarde-Ségot
UNE JEUNESSE ALLEMANDE de Jean Gabriel Périot
LA VENGEANCE DES ARMÉNIENS. LE PROCÈS TEHLIRIAN
de Bernard George
LES VOIX DE SREBRENICA de Nedim Loncarevic
152 PANORAMA 2015 DU DOCUMENTAIRE
En 1975, de jeunes Arméniens de la
diaspora installés au Liban décident de
créer l’ASALA, l’Armée secrète arménienne
pour la libération de l’Arménie.
Leur objectif est éminemment politique –
forcer le gouvernement turc à reconnaître
le génocide arménien et à restituer les
terres ancestrales –, mais leurs moyens sont
ceux de la lutte armée. Fortement inspirée
par le mouvement palestinien tout en
renouant avec la tradition révolutionnaire
arménienne (le modèle du fedayin), l’ASALA commet 80 attentats à travers le monde,
visant le plus souvent des diplomates turcs,
mais frappant parfois aveuglément et
tuant des innocents. Active jusqu’en 1985,
l’ASALA a pourtant permis de remettre
l’Arménie au cœur de l’agenda politique
international et chaque Arménien s’est
alors retrouvé partagé entre la gêne d’être
assimilé à ces actions terroristes et
le constat de leur efficacité médiatique :
depuis 1982, de nombreuses reconnaissances
du génocide arménien ont été adoptées à
travers le monde.
Pourtant aujourd’hui, 100 ans après les
faits, l’État turc refuse toujours de considérer les massacres arméniens comme un
génocide, quitte à entretenir l’une des plus
importantes opérations de négationnisme
de l’Histoire. Les anciens membres de
l’ASALA, eux, sont toujours épris de justice
et continuent leur combat. De manière
complètement inédite, ils racontent les
racines de leur engagement, et surtout,
jusqu’où ils ont accepté d’aller (ou de ne
pas aller).
Charles Enderlin – France – 2014 – 66 mn
Charles Enderlin
Audrey Horowitz
IMAGE Alon Grego, Hovsep Nalbandian
SON Ran Grego, Meni Matok, Naor Lévy
MONTAGE Nathalie Rose
MUSIQUE ORIGINALE Frédéric Chaslin
AUTEUR
ASSISTANTE RÉALISATION
Zadig Productions
AVEC LA PARTICIPATION de France Télévisions
AVEC LE SOUTIEN du Centre National du
Cinéma et de l’Image animée
PRODUCTION
Au nom du Temple est le premier film
documentaire analysant à l’aide de
témoignages exclusifs, l’élan messianique
du Sionisme religieux depuis la guerre
de juin 1967 et l’occupation par des soldats
juifs du Mont où se dressait le Temple,
le lieu saint du judaïsme détruit par
les Romains 2000 ans plus tôt.
Pour les rabbins nationalistes, c’était
la confirmation de leur vision : le sionisme
est annonciateur de la rédemption.
Au nom de la conquête de ce qui est pour
eux la Terre d’Israël, ils ont envoyé leurs
disciples coloniser la Cisjordanie et Gaza.
Combattant toutes les initiatives de paix,
ils préparent, désormais, la construction
d’un nouveau Temple juif à la place
d’al Aqsa, les saintes mosquées, le troisième
lieu saint de l’Islam.
LE COMBATTANT DE LA
PAIX, BENJAMIN FERENCZ
Michaël Prazan – France – 2015 – 30 mn
Michaël Prazan – sur une idée
de Noël Mamère
IMAGE Stanley Staniski
SON Ray Rifice, Robert Sullivan
MONTAGE Yvan Gaillard
MUSIQUE ORIGINALE Stéphane Haeri
AUTEUR
Kuiv Productions
de France Télévisions
AVEC LE SOUTIEN de la Fondation pour
la Mémoire de la Shoah, de la Procirep –
Société des Producteurs, de l’ANGOA,
du Centre National du Cinéma et de
l’Image animée
PRODUCTION
AVEC LA PARTICIPATION
Le plus jeune procureur en charge de juger
les criminels nazis à Nuremberg s’appelle
Benjamin Ferencz. Chargé de collecter
la documentation nazie qui sera utilisée
comme preuves à charge par le Tribunal
militaire pénal international, il découvre
les rapports des Einsatzgruppen,
ces « commandos mobiles de tuerie » qui
ont exécuté plus de 1 million de juifs sur
le front de l’est à partir de juin 1941.
Infatigable combattant de la paix, Benjamin
Ferencz consacrera ensuite sa vie à la justice
internationale. Son but : créer un tribunal
permanent inspiré par celui de Nuremberg,
chapeauté par l’ONU, et qui sera chargé de
juger les crimes de guerre, les crimes contre
l’humanité, les crimes de génocide.
C’est grâce à son action que seront créés à
La Haye, en 1993, le Tribunal pénal
international pour l’Ex-Yougoslavie, puis en
1994, le Tribunal pénal international pour
le Rwanda. La Cour pénale internationale
créée en 2002 est la consécration d’une vie :
« ce qui rend cette cour si unique est son
objectif premier qui est de prévenir les crimes
avant qu’ils ne soient commis, en faisant savoir
par avance aux criminels potentiels qu’ils
seront appelés à rendre des comptes devant
une Cour pénale internationale » déclare-t-il
lors du réquisitoire qu’il prononce au
premier procès de la CPI en 2009 qui juge
le criminel congolais Patrice Lubanga.
À travers le récit des progrès réalisés par
la justice internationale depuis la Seconde
Guerre mondiale se dessine le portrait
sensible d’un homme hors du commun,
et toujours méconnu.
DAS REICH,
UNE DIVISION SS
EN FRANCE
Michaël Prazan – France – 2015 – 90 mn
AUTEURS
Prazan
Christiane Ratiney et Michaël
Laurent Chalet
Roger Dupuis
MONTAGE Yvan Gaillard
MUSIQUE ORIGINALE Stéphan Haéri
IMAGES COMPLÉMENTAIRES
MONTAGE SON
Nilaya Productions
de ARTE France,
de France Télévisions
AVEC LE SOUTIEN du Centre National du
Cinéma et de l’Image animée, du Ministère
de la Défense – Secrétariat général pour
l’administration, Direction de la mémoire,
du patrimoine et des archives,
de la Procirep – Société des Producteurs
et de l’ANGOA
PRODUCTION
AVEC LA PARTICIPATION
© 17 Mars.
AU NOM DU TEMPLE
Le 6 juin 1944, alors que le Débarquement
débute sur les plages normandes, Hitler
comprend qu’il a besoin de renforts. Le leader
nazi fait appel à la division blindée SS Das
Reich, une unité d’élite basée à Montauban.
Quinze mille hommes prennent alors la route
avec une double mission : rejoindre au plus
vite la Normandie et nettoyer les maquis
français des résistants qui ne manqueront pas
de s’interposer. Cette unité d’élite, composée
de jeunes engagés – dont des Alsaciens –
et de vétérans rompus aux méthodes
punitives, va multiplier les atrocités,
notamment un meurtre de masse à Tulle
(98 hommes choisis au hasard et pendus à
des balcons ou à des réverbères) puis, plus
effroyable encore, le massacre de la population
d’Oradour-sur-Glane (642 morts).
Soixante-dix ans après, l’histoire retient aussi
que la plupart des bourreaux ont été amnistiés
ou jamais inquiétés.
PANORAMA 2015 DU DOCUMENTAIRE 153
LA FRANCE EN GUERRE
POULIDOR PREMIER
Martin Blanchard – France – 2015 – 73 mn
Patrick Jeudy – France – 2015 – 93 mn
Jean-Christophe Notin et Martin
Blanchard
IMAGE Olivier Raffet, Emmanuelle Collinot,
Nicolas Eprendre, Soumaïla Ouedraogo
SON Nicolas Schlomoff, Baptiste Charvet,
Théo Caradec, Adama Salia Diarra
MONTAGE Chantal Le Baron
MUSIQUE ORIGINALE Baptiste Charvet
AUTEUR
Kuiv Productions
de France Télévisions
AVEC LE SOUTIEN du Centre National du
Cinéma et de l’Image animée, du ministère
de la Défense – Secrétariat général pour
l’administration, Direction de la mémoire,
du patrimoine et des archives
PRODUCTION
AVEC LA PARTICIPATION
L’Opération Serval début officiellement
le 11 janvier 2013 par un coup de tonnerre :
Le Président de la République annonce
que des troupes françaises ont été déployées
au Mali. S’ensuit une guerre éclair, un rezzou
victorieux qui verra les troupes françaises
et tchadiennes libérer le nord du Mali des
djihadistes. Des images de foules en liesse
accueillant les soldats français en libérateurs,
des combats loin des caméras au cœur
d’un désert hostile, une opération
relativement consensuelle, qui a évité le piège
de l’enlisement afghan, c’est a priori la trace
que laissera Serval. Première guerre contre
le terrorisme menée par la France en Afrique,
Serval constitue à ce titre un tournant capital
dans la gestion des conflits, mais n’est bien
que la première opération spectaculaire
d’une série d’autres destinées pour la France
à lutter contre l’expansion djihadiste
en Afrique, avec ses effets de contagion sur
le territoire européen. La France en guerre
propose une plongée dans les coulisses
du lancement de l’Opération Serval, au plus
près des opérations des forces spéciales,
mais aussi un accès inédit au cœur
du pouvoir français, de sa chaîne de décision.
La guerre offre en effet aux politiques
un exercice rare : celui de voir leurs ordres
avoir des répercussions quasi directes sur
le terrain. Un exercice qui peut être grisant,
au risque d’oublier que la seule solution
ne peut être que militaire. Serval n’a en rien
résolu la crise de gouvernance malienne,
la question touareg.
154 PANORAMA 2015 DU DOCUMENTAIRE
Véronique Lagoarde-Ségot – France –
2015 – 52 mn
Patrick Jeudy
Christine Marier
MUSIQUE ORIGINALE Hélène Blazy
MONTAGE
PRODUCTION
et Balises
Véronique Lagoarde-Ségot
de Valérie Pozner
et Alexandre Sumpf
SON Amélie Canini
MONTAGE Véronique Lagoarde-Ségot
MUSIQUE ORIGINALE Marc-Olivier Dupin
AUTEURE
Compagnie des Phares
COPRODUCTION
D’APRÈS UNE IDÉE ORIGINALE
INA
de RTS, de TV5 Monde,
de France Télévisions
AVEC LE SOUTIEN du Centre National du
Cinéma et de l’Image animée,
de la Procirep – Société des producteurs,
de l’ANGOA
AVEC LA PARTICIPATION
Mélisande films
ARTE France
AVEC LA PARTICIPATION de Histoire, de la SRC-RDI
AVEC LE SOUTIEN du Centre National du
Cinéma et de l’Image animée,
de la Procirep – Société des producteurs,
de l’ANGOA
PRODUCTION
COPRODUCTION
Qui ne connaît pas Raymond Poulidor ?
Ce champion intègre et attachant, fils
d’agriculteur aux plaisirs simples, a figuré
parmi les plus grands cyclistes du monde
pendant presque deux décennies sans
remporter une seule fois le Tour de France !
Tout a concouru à l’empêcher de gagner :
coups du sort, rivalité étouffante avec Jacques
Anquetil ou l’apparition d’un nouveau
champion, comme Eddy Mercks lors du
Tour 1969. Ses défaites l’ont paradoxalement
fait entrer dans la légende. En effet, s’il y a
un terrain sur lequel « Poupou » devançait
largement ses adversaires, c’est bien celui
de l’amour du public, toujours palpable
quarante ans après.
© Pressesport.
AUTEURS
SHOAH, LES OUBLIÉS
DE L’HISTOIRE
Les archives Soviétiques abritent l’unique
mémoire filmique de l’Holocauste.
Au lendemain de l’invasion allemande,
les Soviétiques décident d’utiliser leur
savoir-faire et d’imprimer sur pellicule
la redoutable machinerie d’extermination
de l’ennemi. Pour cet État totalitaire en
guerre, la propagande est essentielle.
L’image devient une arme de persuasion
efficace dans l’engagement à la grande
guerre patriotique. Le cinéma se fait
drapeau. Pris dans le prisme de la propagande,
les films, les documentaires et les actualités
constituent la matière « d’une autre
histoire que l’Histoire », il faudra donc
retourner dans les rushs. Emboîter notre
regard de spectateur dans celui de l’opérateur
qui a pris ces images, étudier le montage.
Mais dans cette stratégie de guerre par
l’image, un trou noir est créé : l’identité des
victimes. Les juifs sont oubliés. Les autorités
s’emploient à promouvoir un nouveau
mythe fondateur de la citoyenneté soviétique,
celui de la « grande guerre patriotique »,
qui n’aurait pas pu acquérir la même force
de persuasion si l’extermination des juifs
avait fait l’objet d’un traitement séparé.
Ces images mises en regard avec les images
allemandes, nous ouvrent à une vision
de la Shoah à l’est, inédite jusqu’à présent.
UNE JEUNESSE
ALLEMANDE
LA VENGEANCE DES
ARMÉNIENS. LE PROCÈS
TEHLIRIAN
Jean-Gabriel Périot – France – 2015 – 93 mn
Jean-Gabriel Périot
Anne Paschetta,
Pierre Hodgson, Nicole Brenez et Anne
Steiner
IMAGE Thierry Beaumel
MONTAGE SON Étienne Curchod
ASSISTANTS MONTAGE Avril Besson, MonaLise Lanfant
MUSIQUE ORIGINALE Alan Mumenthaler
SCÉNARIO ET MONTAGE
COLLABORATION À L’ÉCRITURE
AUTEURS
Laurence Chassin et Bernard
George
IMAGE Jean-Louis Laforêt, Serge Dell’Amico
SON Florent Ravalec
MONTAGE Pierre-Joseph Licidé
MUSIQUE ORIGINALE Roberto Baccherini
PRODUCTION
Cinétévé
ARTE France, CNRS Images
AVEC LA PARTICIPATION de RSI, du Centre
National du Cinéma et de l’Image animée
AVEC LE SOUTIEN de la Procirep – Société
des Producteurs, de l’ANGOA,
de la Mission du centenaire de la Première
Guerre mondiale, de la Région ProvenceAlpes-Côte d’Azur
PRODUCTION
Local Films
DISTRIBUTION UFO Distribution
COPRODUCTION
© W-film Distribution / Local Films.
La Fraction Armée Rouge (RAF), organisation
terroriste d’extrême gauche, également
surnommée « la bande à Baader » ou
« groupe Baader-Meinhof », opère en
Allemagne dans les années 70.
Ses membres, qui croient en la force de
l’image, expriment pourtant d’abord leur
militantisme dans des actions artistiques,
médiatiques et cinématographiques.
Mais devant l’échec de leur portée, ils se
radicalisent dans une lutte armée, jusqu’à
commettre des attentats meurtriers qui
contribueront au climat de violence sociale
et politique durant « les années de plomb ».
Nedim Loncarevic – France – 2015 – 52 mn
Bernard George – France – 2014 – 52 mn
AUTEURS
PRODUCTION
LES VOIX
DE SREBRENICA
Le 15 mars 1921, Talaat Pacha, ancien chef
du gouvernement turc en exil à Berlin,
est abattu en pleine rue par Soghomon
Tehlirian, un jeune Arménien. « J’ai tué un
homme, mais je ne suis pas un meurtrier… »
Lors de son procès devant la justice
allemande, quelques mois plus tard,
l’assassin se pose en victime et renverse
la situation. Il conduit le tribunal à
s’interroger sur la culpabilité de Talaat Pacha
dans les massacres des Arméniens de 1915.
Au terme d’un procès expédié en seulement
deux journées, il est acquitté. Ce procès
incroyable remet en lumière le génocide et
offre une tribune à la cause arménienne.
Appelés à la barre, des rescapés témoignent
en détail des déportations et des massacres
auxquels ils ont survécu, révélant toute
l’ampleur du système d’extermination du
gouvernement Jeune-Turc. En s’appuyant
sur les minutes du procès, le film restitue
toute l’ambiguïté entourant l’affaire.
Il montre comment le sentiment d’injustice a
poussé des hommes à venger leur peuple…
Car Soghomon Tehlirian n’a pas agi seul
et sans plan d’action. Il est le premier des
vengeurs de l’opération Némésis qui a
perpétré entre 1921 et 1922 les assassinats de
cinq autres dignitaires turcs. À l’heure des
commémorations du centenaire du génocide
arménien, le film explore les ressorts du
premier crime contre l’humanité du XXe siècle,
et pose la question de sa reconnaissance
internationale, qui fait encore débat un siècle
après les faits.
Nedim Loncarevic et FrançoisXavier Destors
IMAGE Nedim Loncarevic
SON Frederique Dhavernas
MONTAGE Cécile Fernandez
MUSIQUE ORIGINALE Adnan Dado Musanovic
13 Productions
France Télévisions
AVEC LA PARTICIPATION de BHT1
AVEC LE SOUTIEN du Centre National du
Cinéma et de l’Image animée,
de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur,
de la Procirep – Société des Producteurs et
de l’ANGOA
COPRODUCTION
Il est presque 14 heures, ce jour du 11 juillet
1995. Le drapeau serbe flotte à l’entrée de
Srebrenica. La ville bosniaque, pourtant
protégée par l’ONU, est tombée aux mains
des armées serbes. La communauté
internationale ne réagit pas. En quelques
jours, dans cette région de Bosnie,
est perpétré le plus grand massacre qu’ait
connu l’Europe depuis la Seconde Guerre
mondiale. Plus de 8000 hommes, lancés
dans une course contre la mort à travers
les montagnes, vont être capturés et
massacrés. 30 000 autres, vieillards, femmes
et enfants seront déportés avec l’aide des
Casques bleus. Symbole de la guerre
de purification ethnique, le martyr
de Srebrenica a plusieurs fois été raconté,
mais en partie seulement. Vingt ans après,
grâce à des archives inédites et de nouveaux
témoignages, Les Voix de Srebrenica
raconte l’histoire d’une faillite collective qui
nous concerne tous.
PANORAMA 2015 DU DOCUMENTAIRE 155
PROGRAMME PÉDAGOGIQUE
CLASSES PASSEPORT
Les classes passeport rencontrent un vif succès - plus
d’une centaine de classes d’écoles, de collèges et de lycées
passeront une journée sur le festival. Ils assisteront à
la projection de deux films, visiteront les expositions et
rencontreront soit un professionnel du cinéma, soit un
historien spécialiste de la thématique ou un journaliste.
Grandir au Proche-Orient — Primaire et collège
Wadjda de Haïfa Al Mansour et Où est la maison de
mon ami ? d’Abbas Kiarostami.
: Mario Castelli, Marie-Annick Cluzan,
enseignants, Nathalie Vard, conseillère pédagogique en arts
visuels.
INTERVENANTS
L’Égypte antique racontée par Hollywood
— Collège et lycée
Cléopâtre de Joseph L. Mankiewicz.
INTERVENANT
Nouvelle.
Les Femmes du bus 678 de Mohamed Diab
: Claude Aziza, professeur honoraire à la Sorbonne
La décennie qui ébranla le Proche-Orient
— Collège et lycée
Lawrence d’Arabie de David Lean.
INTERVENANTS
EDITO
Guerre civile en Syrie, conflit israélo-palestinien, suite
des révolutions arabes, tensions en Iran, en Turquie, entre
communautés religieuses, centenaire du génocide
arménien…
Rarement le thème de notre Festival, choisi en novembre
2014, aura autant été au cœur d’une actualité si brûlante.
Tous les sujets cités concentrent l’attention des médias,
des politiques et de l’opinion, mais sont bien trop
souvent reçus avec un déficit de connaissances
et un surcroît de préjugés. Cette 26e édition revêt donc
un enjeu particulièrement crucial dans la formation
historique, civique et culturelle des élèves. Nous avons
veillé, quand cela était possible d’un point de vue
cinématographique, à offrir une longue perspective
historique : de l’antiquité égyptienne (Cléopâtre)
au génocide arménien (Génocide arménien : le spectre
de 1915) en passant par les relations entre juifs et
musulmans (Juifs et musulmans, si loin si proches) et
le conflit israélo-palestinien (The Gatekeepers, Le Temps
qu’il reste).
La majorité des sujets et des titres proposés sont
néanmoins contemporains, traitant à la fois de questions
de société (la place des femmes notamment, la censure
artistique), de religion (Iranien), adoptant à plusieurs
reprises le point de vue des enfants (Où est la maison de
mon ami ?, Wadjda) ou de la jeunesse (Les Chats
persans, Hors-jeu). Face à ces sujets complexes et
délicats, nous avons pris le parti d’une sélection aux
styles et aux genres variés bâtis sur des narrations
solides et accessibles, du classique à grand spectacle
(Lawrence d’Arabie) au film d’animation Art et Essai
(Persepolis, Valse avec Bachir), du documentaire
(La Vierge, les Coptes et moi, Tahrir) aux chefs-d’œuvre
des cinéastes du Proche-Orient de renommée
internationale tels que Asghar Farhadi, Abbas Kiarostami,
Jafar Panahi, Elia Suleiman, en passant par la production
hollywoodienne qui a su allier efficacité et regard critique
(Green Zone).
François Aymé, commissaire général du Festival
156
: Patrick Richet, enseignant honoraire d’histoire.
Religion et révolution : filmer l’Égypte d’aujourd’hui — Lycée
Tahrir, place de la révolution de Stefano Savona et
La Vierge, les Coptes et moi de Namir Abdel Messeeh.
: Jean-Philippe Cimetière, professeur de lettres
modernes et Jean Laurenti, documentaliste, auteur, professeur
de cinéma.
INTERVENANTS
La jeunesse face aux révolutions iranniennes
— Lycée
Persepolis de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud
et Les Chats persans de Bahman Ghobadi.
: Edith Yildizoglu, professeure documentaliste
et Assal Bagheri, sémiologue et spécialiste du cinéma iranien.
INTERVENANTS
Juifs et musulmans, si loin si proches
— Collège et Lycée
Juifs et musulmans, si loin si proches de Karim Miske
et Jaffa de Keren Yedaya.
: Jean-Michel Gaillard, professeur honoraire
d’histoire-géographie.
INTERVENANTS
Israël-Palestine : histoires croisées — Lycée
Le Temps qu’il reste d’Elia Suleiman et The Gatekeepers
de Drorh Moreh .
: Virginie Courrèges, professeure de lettres,
coordinatrice de « Collège au cinéma », Eli Barnavi, historien
et ex-ambassadeur d’Israël en France, Charles Enderlin, grand
reporter, correspondant de France en Israël depuis 1981.
INTERVENANTS
La guerre d’Irak vue par Hollywood — Collège
et Lycée
Green Zone de Paul Greengrass et Dans la Vallée d’Elah
de Paul Haggis.
INTERVENANTS
: Martial Durand, professeur d’histoire-géographie.
Femmes arabes en lutte — Collège et Lycée
Les Femmes du bus 678 de Mohamed Diab et La Révolution
des femmes. Un siècle de féminisme arabe de Feriel Ben
Mahmoud.
: Michèle Hédin, administratrice du Cinéma
Jean Eustache et du FIFH, Feriel Ben Mahmoud, réalisatrice et
Leïla Dakhli, chercheure au CNRS..
INTERVENANTS
PROGRAMME PÉDAGOGIQUE
CLASSES CITOYENNES
LA DÉCENTRALISATION
Projection d’un film sur le thème, suivi d’une conférence
par une personnalité sensible aux questions de citoyenneté.
Cette année encore, le festival propose des séances dans toute
l’Aquitaine et permet ainsi aux élèves éloignés de Pessac de profiter de
la programmation et de rencontrer à l’issue de la séance un intervenant
sur la thématique. L’édition 2015 investira donc les 17 villes suivantes :
Bergerac (24), Périgueux (24), Andernos-les-Bains (33), Bazas (33),
Blanquefort (33), Blaye (33), Cadillac (33), Coutras (33), Créon (33),
Gujan-Mestras (33), Pauillac (33), Biscarrosse (40), Aiguillon (47),
Marmande (47), Monsempron-Libos (47), Agen (47), Bayonne (64).
La place des filles dans la société
saoudienne — Primaire et collège
Wadjda d’Haïfa Al Mansour.
: Marie-Annick Cluzan, Mario Castelli, enseignants,
Nathalie Vard, conseillère pédagogique en arts visuels.
INTERVENANT
Le conflit israélo-palestinien
vu par les enfants — Collège et lycée
Promesses de Justine Shapiro, B. Z. Goldberg et Carlos Bolado.
INTERVENANTS
: Patrick Richet, enseignant honoraire d’histoire.
Les enfants dans la guerre — Collège et lycée
Syrie, enfants en guerre de Yuri Maldavsky.
: Jean-Jacques Issouli, professeur de lettres
et d’histoire de l’art et Yuri Maldavsky, réalisateur.
INTERVENANTS
L’étranger, entre fantasme et réalité — Lycée
Derrière la colline d’Emin Alper.
: Jean-François Cazeaux, responsable cinéma au
Rectorat de l’Académie de Bordeaux et Sandra Mourad,
professeure de lettres et chargée de mission en cinéma au rectorat.
INTERVENANTS
CLASSES HISTOIRE ET MÉMOIRE
Le conflit au Liban : mémoire et traumatisme
Valse avec Bachir d’Ari Folman.
: Cathy Rousset, professeure de lettres classiques
et Yann Bouyrat, docteur en histoire et chercheur au Centre
d’études des mondes moderne et contemporain.
INTERVENANTS
Le génocide arménien
Génocide arménien, le spectre de 1915 de Nicolas Jallot.
: Christian Salles, professeur d’histoire-géographie
et d’histoire de l’art et Michel Marian, maître de conférences à
l’IEP de Paris et Nicolas Jallot, réalisateur.
INTERVENANTS
CLASSES CINÉMA
Cinéma et société en Iran — Lycée
Une séparation de Asghar Farhadi et Hors jeu de Jafar Panahi.
: Élisabeth Rhodas, professeure d’allemand et de
cinéma et Mamad Haghighat, cinéaste et critique.
INTERVENANTS
CLASSES PHILO
Rhétorique, laïcité et religion — Terminale
Iranien de Mehran Tamadon.
INTERVENANTS
: Dominique Jobard, professeure de philosophie.
SÉANCE DÉCOUVERTE
Contes persans en papiers et tissus
— Maternelle et primaire
Les contes de la Mère Poule de V. Fard-e-Moghadam,
F. Torabi, M.A. Sarkani
INTERVENANTS
visuels.
: Nathalie Vard, conseillère pédagogique en arts
LES DOSSIERS
19 dossiers pédagogiques ou documentaires sont proposés sur les
différents dispositifs du programme pédagogique. Ils sont consultables
au bureau du Festival. Les dossiers pédagogiques ont été préparés cette
année par : Mario Castelli, Marie-Annick Cluzan, Jean-François Cazeaux,
Jean-Philippe Cimetière, Virginie Courrèges, Martial Durand, Jean-Michel Gaillard, Dominique Jobard, Catherine Lafon-Tallet, Jean Laurenti,
Sandra Mourad, Patrick Richet, Élisabeth Rhodas, Cathy Rousset,
Nathalie Vard, Edith Yildizoglu, Claude Aziza, Christian Salles, Michèle
Hédin et Jean-Jacques Issouli.
Un grand merci au groupe pédagogique qui établit la programmation,
développe les dispositifs, rédige les dossiers pédagogiques du festival et
intervient auprès des élèves.
LE GROUPE PÉDAGOGIQUE
François Aymé, commissaire général du Festival, Boris Barbiéri,
chargé d’édition et rédacteur du catalogue du Festival, Michèle Hédin,
membre du conseil d’administration du cinéma et du Festival,
Mario Castelli, enseignant, Marie-Annick Cluzan, enseignant,
Jean-François Cazeaux, responsable cinéma au Rectorat de l’Académie
de Bordeaux, Jean-Philippe Cimetière, professeur de lettres modernes,
Virginie Courrèges, professeure de lettres, coordinatrice de « Collège
au cinéma », Martial Durand, professeur d’histoire-géographie,
Frédéric Fièvre, professeur d’histoire-géographie, Anne-Claire Gascoin,
chargée du jeune public au cinéma Jean Eustache, Jean-Michel Gaillard,
professeur honoraire d’histoire-géographie, Dominique Jobard,
professeure de philosophie, Catherine Lafon-Tallet, conseillère
pédagogique circonscription de Pessac, Jean Laurenti, documentaliste,
écrivain, professeur de cinéma, Sandra Mourad, professeure de lettres,
chargée de mission en cinéma au rectorat de Bordeaux, Julia Pereira,
chargée de mission sur la programmation et le protocole au Festival,
détachée sur la mission scolaire, Sylvie Perpignan, professeure
d’histoire-géographie, Patrick Richet, enseignant honoraire d’histoire,
Élisabeth Rhodas, professeure d’allemand et de cinéma, Cathy Rousset,
professeure de lettres classiques, Nathalie Vard, conseillère pédagogique
en arts visuels, Edith Yildizoglu, professeure documentaliste,
Christian Salles, professeur d’histoire-géographie et d’histoire de l’art,
Jean-Jacques Issouli, professeur de lettres et d’histoire de l’art.
A côté des membres du groupe pédagogique, interviendront également
sur les séances décentralisées : Florence Beaulieu, conseillère pédagogique
en arts visuels, coordonnatrice Ecole et Cinéma, Romain Bondonneau,
professeur de cinéma, Alain Charlier, professeur d’histoire
Préparation et coordination du programme pédagogique : Julia Pereira,
Frédérique Ballion, Françoise Alaerts.
Nous remercions l’équipe du cinéma Jean Eustache, Esther Cuenot
(Association des cinémas de proximité en Aquitaine) et Vanessa Tribes
(Association des cinémas de proximité en Gironde).
Grâce au soutien de l’association des Cinémas de proximité de
la Gironde, de l’association des Cinémas de proximité en Aquitaine,
du Conseil régional d’Aquitaine, du Conseil général de la Gironde,
de l’Action culturelle du Rectorat de Bordeaux, du CDDP de la Gironde,
de l’Inspection académique et de la Ville de Pessac.
Contes des Mille et Une Nuits — Primaire
Le Voleur de Bagdad de Ludwig Berger, Michael Powell et
Tim Whelan.
: Catherine Lafon-Tallet, conseillère pédagogique,
circonscription de Pessac et Nathalie Vard, conseillère
pédagogique en arts visuels.
INTERVENANTS
Le Prix Bernard-Landier du jury lycéen
(catégorie documentaires inédits)
9 lycéens se prêtent à l’exercice de jurés, le temps d’une
compétition, celle du Prix du film d’histoire, catégorie
documentaire. Ils sont encadrés dans leur réflexion, leur
analyse, et leurs délibérations par Frédéric Fièvre,
enseignant, membre du groupe pédagogique. Ce jury sera
présidé par Guy Séligmann, écrivain et cinéaste.
Présentation du jury page 19.
Valse avec Bachir d’Ari Folman
157
158 PARTENAIRES
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* A consommer avec modération. L’abus d’alcool est dangereux pour la santé.
PARTENAIRES 159
REMERCIEMENTS
GÉNÉRIQUE
Le 26e Festival international du film d’histoire est réalisé
grâce au soutien de Ville de Pessac, Bordeaux Métropole,
Département de la Gironde, Conseil Régional d’Aquitaine, Centre
National du Cinéma et de l’Image Animée, Ministère de la Culture
et de la Communication, Ministère de la Défense - Secrétariat Général
pour l’Administration - Direction de la Mémoire, du Patrimoine
et des Archives, Rectorat de Bordeaux, Caisse des Dépôts
et Consignations, Audiens
ASSOCIATION DU FESTIVAL INTERNATIONAL DU FILM D’HISTOIRE
Président d’honneur Jean-Noël Jeanneney
Président Alain Rousset
Vice-président Jean Labib
Secrétaire général Claude Aziza
Trésorier Allain Glykos
avec la participation de ARTE actions culturelles, France Télévisions,
France 3 Aquitaine, France 5, France Culture, France Bleu Gironde,
FIP, L’Histoire, La Croix, Sud Ouest, Association des Professeurs
d’Histoire et de Géographie, Café économique de Pessac, Canopé,
Central Dupon Images, Cinéma Jean-Eustache, Cinémas de proximité
de la Gironde, Cinémas de proximité en Aquitaine, Collectif Pessac SSI,
ECPAD, IJBA, INA, Les Amis du Monde diplomatique,
Librairie Encre Blanche, Librairie Mollat, Lycée Pape-Clément,
Médiathèque Jacques-Ellul, SCAM, Sciences-Po Bordeaux,
Université de Bordeaux, Université Bordeaux Montaigne
et avec le soutien de Air France, Aquitanis, Château Pape Clément,
Château Smith Haut Lafitte, CIJA, Cofely Services-GDF Suez,
Crédit Mutuel du Sud-Ouest, Dév Conseils, Domaine Clarence Dillon :
Château Haut-Brion et Château La Mission Haut-Brion, Domofrance,
éditions Cambourakis, Galerie Arts & Regards, Gaz de Bordeaux,
Géant Casino Pessac, Groupe Arom Traiteur, Holiday Inn, iConcept,
La Maison de la Syrie, Peugeot SIASO Bordeaux, PROCIREP Société des Producteurs, SNCF, Syndicat Viticole de Pessac-Léognan,
TBC - tram et bus de Bordeaux Métropole, Thales, Triaxe,
Vignobles Michel Gonet : Château Haut Bacalan et Château
Haut-L’Evêque, Vignobles André Lurton : Château La Louvière,
Château Coucheroy, Château Couhins-Lurton
Nous tenons à remercier toutes les personnes et organismes
qui nous ont aidés à construire cette 26e édition, et notamment
Association La Fraternité et M. Le Roy, Bruno Konrad, Lycée Pape-Clément
et Jean-Michel Martinez, Hélène Lamberty et Élisabeth Lajoie,
Maison de l’Aquitaine à Paris, librairie Encre blanche à Pessac
et Bertrand Frouin, Paroisse Saint-Martin, Sud Ouest Publicité
ainsi que l’ensemble des services de la ville de Pessac.
Les services Communication de la Ville de Pessac, de Bordeaux
Métropole et du Conseil Régional d’Aquitaine
Les cinémas participant à la décentralisation
Le Grand Écran Cyrano - Bergerac (24), Cap Cinéma - Périgueux (24),
Le Rex - Andernos-les-Bains (33), Le Vog - Bazas (33), Les Colonnes Blanquefort (33), Le Zoetrope - Blaye (33), Le Lux - Cadillac (33),
L’Espace culturel Maurice Druon - Coutras (33), Le Cinemax Linder Créon (33), Le Gérard-Philipe - Gujan-Mestras (33), L’Eden - Pauillac (33),
Le Renoir - Biscarrosse (40), Les Montreurs d’Images - Agen (47),
Le Confluent - Aiguillon (47), Le Plaza - Marmande (47), Le Liberty Monsempron-Libos (47), L’Atalante - Bayonne (64).
Les intervenants du programme pédagogique, les rédacteurs
des dossiers et l’ensemble du groupe pédagogique du Festival
sans oublier
Triaxe, Jean Pascal Judalet et son équipe
Imprimerie BLF et Florence Duprat
Antonin Dubuisson et Allain Glykos
Virginie Franceschinis
Philippe Roure
Jérôme Lopez
Urbs
CATALOGUE DU FESTIVAL
Directeur de publication François Aymé
Secrétaire de rédaction Boris Barbiéri
Conception graphique Philippe Roure
Documentation et rédaction :
- programmation thématique Boris Barbiéri
- compétitions documentaires Bruno Scheurer
- débats, compétition fiction, expositions Kevin Dutot
- débats L’Histoire Claire Wallet
- séances spéciales Julia Pereira
- invités et jurys Marie-Laure Sagardiluz
- programme pédagogique Frédérique Ballion et Françoise DurieuxAlaerts
160
Membres
Anne-Marie Cocula (professeur émérite à l’université Bordeaux Montaigne),
Marcel Desvergne (ancien président d’Aquitaine Europe Communication),
Isabelle Dulaurens (adjointe déléguée à la culture de la ville de Pessac),
Jean-Marie Dupont (ancien président de Biarritz Festivals), Alexandre
Fernandez (professeur d’histoire contemporaine à l’université Bordeaux
Montaigne), Valérie Hannin (directrice de la rédaction et rédactrice
en chef de la revue L’Histoire), Michèle Hédin (membre du groupe
pédagogique du Festival), Stéphane Khémis (fondateur de la revue
L’Histoire), Danielle Le Roy (ancienne adjointe déléguée à la culture de
la ville de Pessac), Séverine Nikel (Directrice des Sciences humaines
aux éditions du Seuil), Pierre Pommier (réalisateur, auteur), Jean Rozat
(ancien directeur général d’ARTE), Jean-Marie Tixier (président de
l’association du Cinéma Jean Eustache), Thomas Wieder (rédacteur en
chef au journal Le Monde), Michel Winock (historien et membre fondateur
de la revue L’Histoire).
Délégué général Pierre-Henri Deleau
Catégorie Fiction :
Présidente du jury du Prix du Film d’histoire de Pessac 2015 Chahdortt
Djavann
Président du jury étudiant Laurent Heynemann
Catégorie Documentaires inédits :
Président du jury du Prix du Film d’histoire de Pessac 2015 Yuri Maldavsky
Président du jury lycéen Guy Seligmann
Président du jury des jeunes journalistes IJBA Hugues Le Paige
Panorama du Documentaire 2015 :
Président du jury du Prix de la Ville de Pessac Karel Prokop
ORGANISATION
Association du Festival international du film d’histoire
Commissaire général et sélection du Prix du film d’histoire - catégorie
Fiction François Aymé
Adjointe au Commissaire général Julia Pereira
Organisation générale Bruno Scheurer
Coordination des débats et de l’exposition « Syian eyes of the world »
Kevin Dutot
Régie générale : François Daguisé, assisté de Pauline Rouchaléou
Relations invités Marie-Laure Sagardiluz,
assistée de Mirentxu Epherre-Iriart
Mission scolaire et décentralisation Frédérique Ballion,
Françoise Durieux-Alaerts, Julia Pereira, Anne-Charlotte Girault
Relations presse, site internet et communication Julie Fauchie
Documents de communication, créations graphiques Boris Barbiéri
Relations publiques Anne-Marie Recurt et Julia Pereira,
assistées de Chloé Versini
Responsable « Beyrouth Café 3ème étage » Kevin Dutot,
assisté de Violette Aymé, Clémence Debizet et Tom Peltriaux
Logistique chauffeurs Isabelle Pauly et Flora Couhault
Stagiaire Victor Courgeon
Accueil des groupes scolaires Mélissandre Cazanobe, Laurie Durand,
Stéphanie Gariteau, Cathy Onno, Mayara Siridiwe
Rencontres d’histoire et cahier histoire du catalogue Valérie Hannin
(directrice de la rédaction et rédactrice en chef de la revue L’Histoire),
Olivier Thomas, Claire Wallet
Photographe Alain Birocheau
CINÉMA JEAN-EUSTACHE
François Aymé, Nicolas Milesi, Valérie Galin-Chené, Anne-Claire Gascoin,
Audrey Pailhes, Raphaëlle Ringeade
Caisse, accueil Agnieszka Bogaczyk, Victor Courgeon, Rosita Coustes,
Nadia Hadouch, Zane Lukina, Vanessa Petitjean, Madenn Preti, Emeline
Roche, Sébastien Visor
Graphisme Jérôme Lopez
Responsables hall du cinéma Marie Castagné et Jean Le Maître
Opérateurs projectionnistes Nathalie Cazenave, Nicolas Gardien,
Aurélie Lavergne, Lucas Perrinet, Séverine Valentin, Eric Altenburger
Merci à Joanna Visor, Marie-Anne Boutet, Nelly Degueil
Association des cinémas de proximité de la Gironde Cathy Gery et
Vanessa Tribes
Association des cinémas de proximité en Aquitaine Rafaël Maestro
et Esther Cuenot
INDEX DES FILMS
8 jours 77
Les 112 jours de Khomeyni
en France 92
1961, la route de l’égalité 138
A Perfect Day 109
A Perfect Day (un jour comme
un autre) 126
A Place for Everyone 139
À propos d’Elly 90
A World Not Ours 111
Adieu Bonaparte 73
Ajami 103
Alias Maria 127
L’Armée secrète arménienne 152
L’Assassinat de Jean de Broglie,
une affaire d’État 140
Au nom du temple 153
Au revoir 91
L’Autre 74
Le Ballon blanc 84
Les Barons Empain. La dynastie
fracassée 141
La Bataille de Florange 142
La Bataille du charbon 1944-1948 143
Beaufort 97
Caramel 110
Le Cercle 86
Le Cerf-volant 109
Le Chaos 76
Les Chats persans 90
Les Chebabs de Yarmouk 114
Les Chevaliers blancs 128
Les Citronniers 98
Clemenceau 9
Cléopâtre 71
Le Combattant de la paix, Benjamin
Ferencz 153
Le Cycle 83
Daech : naissance d’un État terroriste 81
Dan et Aaron 101
Das Reich, une division SS en France 153
Le Dernier Jour de Ytzhak Rabin 129
Désengagement 98
Le Destin 73
Deux Anges 86
Dol ou la vallée des tambours 79
Le Dossier Petrov 130
Dunia 75
Eau argentée 114
Elizabeth II, la révolution d’une reine 5
Les Enfants de Belle Ville 87
Entre deux mai 1968-1981 – Les artistes
et la politique 144
Et le bal continue 145
Et maintenant, on va où ? 110
INDEX DES FILMS
Étoiles de jour 112
Le Facteur 83
Les Femmes de la Libération 146
Les Femmes du bus 678 77
Femmes du Caire 76
La Fête du feu 89
La Fiancée syrienne 113
La Fin des Ottomans 7
La France en geurre 154
François Mitterrand, que reste-t-il
de nos amours ? 147
Fritz Bauer, un héros allemand 131
Gare centrale 70
The Gatekeepers 105
Génocide arménien, le spectre
de 1915 121
Le Goût de la cerise 85
La Guerre de Corée, les volontaires
français oubliés 148
Homeland. Irak année zéro 149
L’Homme qui répare les femmes –
La colère d’Hippocrate 150
Hors jeu 88
Il était une fois en Anatolie 120
L’Immeuble Yacoubian 75
Intervention divine 95
Jaffa 102
Jean Lacouture ou la position du
biographe 10
Kilomètre zéro 79
Kurdistan, Kurdistan 122
Lawrence d’Arabie 123
Le Caire raconté par Youssef Chahine 70
Maintenant ils peuvent venir 132
Les Marchands d’Hitler 151
May in the Summer 107
Les Méduses 99
Memories on Stone 133
Miel 119
Milk 118
Le Miroir 85
Le Moineau 72
Mon trésor 96
La Montagne magique 134
Les Murmures du vent 80
Mustang 121
My Father, My Lord 99
My Sweet Pepper Land 80
Nahid 92
Noce en Galilée 94
Omar 106
Où est la maison de mon ami ? 84
Persepolis 89
Pharaon 71
Le Policier 105
Le Pont des espions 136
La Porte du soleil 95
Les Portes fermées 74
Poulidor premier 154
Pour un instant, la liberté 118
Prendre femme 96
Le Procès de Viviane Amsalem 106
Protestants de France 5
La Révolution des femmes, un siècle
de féminisme arabe 123
Sang et or 87
La Section « White » Bagdad 2004 81
Les Sept Jours 102
Shoah, les oubliés de l’Histoire 154
Soleil de plomb 135
Syrie, le crépuscule des Assad 115
Syrie, enfants en guerre 115
Taxi Téhéran 93
Le Temps qu’il reste 104
Terra incognita 108
La Terre 72
Terre promise 97
Les Tortues volent aussi 78
Les Trois Singes 119
Une jeunesse allemande 155
Une jeunesse israélienne 100
Une nuit 88
Une séparation 91
Uzak 117
La Vache 82
Le Vagabond 104
Valse avec Bachir 100
La Vengeance des Arméniens. Le procès
Tehlirian 155
La Visite de la fanfare 101
Les Voix de Srebrenica 155
Voyage dans la mémoire 113
Wadjda 69
Winter Sleep 120
Les Yeux brûlés 9
Yol, la permission 116
Yumurta 117
Z32 103
Achevé d’imprimer le 10 novembre 2015 sur les presses de BLF Impression, Le Haillan - Photogravure : BLF, Le Haillan
Coordination : association du Festival international du film d’histoire : 7 rue des Poilus – 33600 Pessac – Téléphone : 05 56 46 25 43
Site internet : www.cinema-histoire-pessac.com
Prix de vente : 10
- Dépôt légal 4e trimestre 2015
163
Dunia de Jocelyne Saab.