D`un prof à l`autre

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D`un prof à l`autre
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D’un prof … à l’autre
La lettre mensuelle
Numéro 41 – Janvier 2012
…
2009
09
2010
10
2011
11
2000 douce !
Bonne année !
Au sommaire ce mois-ci :
p. 2 • Éditorial
p. 3 • Petite annonce TFE
p. 4 • Proposition de sujets pour les stages des étudiants de 1re année
p. 5 • Maitrise de la langue : pensons à travailler sur le vocabulaire usuel
p. 8 • Voyage à Amsterdam : se promener pour écrire
p. 10 • Petites leçons de phonétique corrective : les voyelles… etc.
p. 12 • Un album : Mon ami Paco
p. 15 • Réfléchir à la citoyenneté au cours de français
p. 18 • Lu dernièrement
p. 19 • On vous informe
p. 20 • Index des articles parus dans « D’un prof… à l’autre »
N.B. : Ce document est
conçu pour pouvoir être
imprimé : n’hésitez pas à le
montrer à vos collègues.
D’un prof … à l’autre
La lettre du régendat en français de HELMo Sainte-Croix
61, Hors-Château - 4000 Liège
Comité de rédaction : Sylvie Bougelet, Pierre-Yves Duchâteau,
Jean Kattus
Abonnement/courrier : [email protected]
Numéros précédents disponibles sur www.yahoo.fr Connexion | nom d’utilisateur : dupala1 - mot de
passe : franrelfle Connexion Mail Boite de réception | Index des articles dans le n° 41
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Éditorial
Nos élèves, nos étudiants, nos collègues, nous-mêmes avons été durement touchés par la
fusillade du 13 décembre. Dans ces circonstances, tout en respectant les émotions qui
s’exprimaient, nous avons tenté de retrouver du sens : le texte ci-dessous, une lettre ouverte1
écrite en 1975 par Julos BEAUCARNE, poète et chanteur, au lendemain de l’assassinat de sa
femme par un homme devenu fou, nous y a aidés.
Amis bien aimés,
Ma loulou est partie pour le pays de l'envers du décor. Un homme lui a donné neuf coups de
poignards dans sa peau douce. C'est la société qui est malade. Il nous faut la remettre
d'aplomb et d'équerre, par l'amour, et l'amitié, et la persuasion.
C'est l'histoire de mon petit amour à moi, arrêté sur le seuil de ses 33 ans. Ne perdons pas
courage, ni vous ni moi, je vais continuer ma vie et mes voyages avec ce poids à porter en
plus et mes 2 chéris qui lui ressemblent.
Sans vous commander, je vous demande d'aimer plus que jamais ceux qui vous sont proches.
Le monde est une triste boutique, les cœurs purs doivent se mettre ensemble pour l'embellir, il
faut reboiser l'âme humaine. Je resterai sur le pont, je resterai un jardinier, je cultiverai mes
plantes de langage. A travers mes dires, vous retrouverez ma bien-aimée ; il n'est de vrai que
l'amitié et l'amour. Je suis maintenant très loin au fond du panier des tristesses. On doit
manger chacun, dit-on, un sac de charbon pour aller en paradis. Ah ! Comme j'aimerais qu'il y
ait un paradis, comme ce serait doux les retrouvailles…
En attendant, à vous autres, mes amis de l'ici-bas, face à ce qui m'arrive, je prends la liberté,
moi qui ne suis qu'un histrion, qu'un batteur de planches, qu'un comédien qui fait du rêve avec
du vent, je prends la liberté de vous écrire pour vous dire ce à quoi je pense aujourd'hui : je
pense de toutes mes forces qu'il faut s'aimer à tort et à travers.
Puissions-nous contribuer chacun, là où nous sommes, avec nos compétences et notre volonté,
à reboiser l’âme humaine, à remettre la société d’aplomb et d’équerre, par l’amour, et
l’amitié, et la persuasion.
1
Ce texte a été dit par Claude Nougaro : http://www.youtube.com/watch?v=sghdhJBUe3s
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A l’aube de 2012, après avoir publié 40 numéros de la revue D’un prof… à l’autre, nous
voudrions remercier tous ceux qui ont participé à la rédaction d’un ou plusieurs article(s). Ils
ont ainsi pu partager avec vous des idées d’activités vécues ou à vivre avec les élèves, des
lectures, des réflexions ou des informations sur des problématiques liées aux cours de français
(langue maternelle ou étrangère) ou de religion. Merci donc aux étudiants, aux maitres de
stage et aux professeurs qui ont enrichi le contenu de la revue.
Afin de pouvoir relire un ou des article(s) portant sur un thème en particulier, vous trouverez
une liste de tous les sujets traités dans les 40 premiers numéros de la revue à la fin des articles
de ce mois. Mais après nous être penchés sur le passé, nous pensons déjà à l’avenir. En ce
début d’année, nous voudrions renouveler notre appel à collaborations qui se base sur le
slogan suivant :
C’est tellement
mieux
de partager
tout ce qu’on fait
de mieux !
Envoyez vos propositions d’articles,
vos conseils de lecture,
le compte rendu de vos réussites,
vos bonnes idées …
à [email protected] !
En nous réjouissant de lire vos articles,
nous vous souhaitons une excellente année 2012 !
Petite annonce TFE
Étudiante en troisième année, je souhaite concrétiser mon projet de TFE. Celui-ci porte sur la
manière d’effectuer des recherches et de vérifier la fiabilité des informations dans le cadre
d’une séquence sur la presse écrite. J’aimerais expérimenter celle-ci idéalement avec des
élèves de la fin du 2e degré ou du 3e degré de l’enseignement professionnel. N’hésitez pas à
m’envoyer un e-mail si ce sujet vous intéresse. Merci d’avance.
Florence PAULUS – [email protected]
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Proposition de sujets pour les stages des étudiants de 1re année
Comme chaque année, nous proposons une liste de sujets aux maitres de stage qui
accueilleront dans leurs classes les étudiants de première année lors de leur premier stage
actif, au début du mois de février. Nous avons eu l’occasion de travailler avec eux sur base de
ces sujets, ce qui les aidera lors de leurs préparations.
Ce mode de fonctionnement présente plusieurs avantages. Premièrement, avoir déjà réfléchi
aux aspects didactiques et méthodologiques (objectifs poursuivis surtout en deuxième année)
permettra aux stagiaires de se concentrer davantage sur la relation avec les élèves et la gestion
du groupe (objectifs importants en première année).
Deuxièmement, nous savons qu’il existe toujours un risque de voir certains stagiaires donner
des leçons mal préparées. Ceux qui en pâtissent alors sont notamment vos élèves. Il y a fort à
parier qu’avec l’organisation proposée, ce risque peut être considérablement réduit.
Afin de faciliter la collaboration entre l’étudiant et le maitre de stage, un contrat précisant
entre autres le(s) sujet(s) des activités ou des séquences sera complété lors de la première
journée d’observation. Elle aura lieu le 19 janvier. Nous remercions déjà les maitres de stage
pour leur participation active à la formation des étudiants.
Sujets en français
1. Lire et écrire un conte du pourquoi et éventuellement deux activités de structuration qui y
sont liées (la conjugaison du passé simple et l’alternance entre le passé simple et l’imparfait
dans un récit au passé)
2. Lire et écrire un calligramme
3. Débloquer l'écriture (ateliers d'écriture divers)
4. Lire et écrire un texte prédictif (un horoscope)
5. Ecrire une fable ou une contrefable
6. Dire un texte (un poème) à voix haute
7. Lire un texte selon la méthodologie du dévoilement progressif
8. Ecouter des chansons
Sujets en religion
1. Possibilité d'enseigner ces 2 paraboles: "Grain de sénevé" (Mc 4,30-32) et "Bon grain et
ivraie" (Mt 13,24-30)
2. Découvrir la géographie physique et « biblique » d’ISRAEL au temps de Jésus et,
éventuellement, la géographie plus large des « pays bibliques »
3. Découvrir la culture et la foi juives au temps de Jésus (institutions, fêtes, organisation de
la vie religieuse, croyances, coutumes)
4. Présentation de la Bible en tant que livre
5. Jésus de Nazareth comme personnage historique
6. Jésus, homme libre
7. Découvrir l’« Année liturgique »
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Maitrise de la langue : pensons à travailler sur le vocabulaire usuel
Soit les phrases suivantes, tirées de travaux d’étudiants (il s’agissait de rapports d’interviews
de professeurs de français langue étrangère) :
1.
2.
3.
4.
« Il faut sans cesse répéter le cours précédent. »
« Cette option se déroule en journée. »
« Les exigences du cours montent. »
« … pour permettre aux élèves une plus grande diversité dans leurs
apprentissages. »
5. « Les élèves demandent beaucoup de compréhension de la part du professeur. »
6. « Elle m’a également dit que le public qu’elle enseigne était très varié. »
7. « [L’enseignante doit] refaire beaucoup de rappels… »
8. « Cette classe bouge beaucoup cette année, c’est-à-dire qu’il y a beaucoup
d’arrivées et de départs. »
9. « Les objectifs voulus par le cours dépendent avant tout du groupe. »
10. « Une des plus grandes satisfactions du professeur est de voir la progression de ses
apprenants. »
11. « Toutes les activités sont fondées en fonction des apprenants. »
12. « Mme P…, quant à elle, dispose d’un certificat de FLE, détenu à l’Université de
Louvain. »
13. « Ce sont des jeunes qui ne peuvent pas entrer dans les cours de promotion sociale
étant donné qu’il faut au minimum 16 ans. »
14. « L’établissement prévoit d’installer un troisième niveau [d’enseignement du
français langue étrangère]. »
15. « Le CERAN est une école qui donne également des stages pour les jeunes
pendant les vacances. »
16. « Il baigne dans la classe une ambiance multiculturelle. »
17. « Un système d’ateliers a été mis en place et […] obtient de bons résultats. »
18. « [Cependant,] il peut parfois subvenir des conflits entre les communautés. »
19. « Les élèves constituent ensemble des explications théoriques. »
Où le bât blesse-t-il ? Difficile à dire précisément, dans la mesure où le correcteur, dans une
constante recherche de sens, tend à pallier ces maladresses par des inférences spontanées.
Tâchons tout de même de déterminer en quoi ces phrases nous paraissent maladroites.
Dans chacun de ces énoncés, un mot est mal choisi. Ainsi, ce n’est pas le « cours » qui est
« répété », mais plutôt « les contenus enseignés » lors de ce cours (phrase 1) ; ce n’est pas
l’ « option » qui « se déroule », mais plutôt « les cours (ou les leçons) donné(e)s dans le cadre
de cette option » (phrase 2) ; « les exigences » peuvent-elles « monter » ? Ne dira-t-on pas
plutôt qu’elles « augmentent » (phrase 3) ? « Offrir une plus grande diversité » n’est-il pas
plus indiqué que « permettre une grande diversité » (phrase 4) ? « Un système » peut-il
« obtenir des résultats » (phrase 17) ? Le verbe « obtenir » ne requiert-il pas un sujet
humain ? Dès lors, il serait plus correct d’écrire simplement que « le système donne de bons
résultats», etc. Poursuivez seuls la correction ! Soulignez le mot inadéquat et remplacez-le
par un terme plus approprié. A la suite de cet article, un corrigé vous est proposé.
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Regardons d’un peu plus près ces tournures bancales et tâchons de les classer selon la nature
du problème :
• confusion entre deux termes de sens proche, qui renvoient à des réalités proches (par
exemple, entre « demander », qui implique, avec un sujet humain, une intention, et
« requérir », qui n’implique pas systématiquement une telle volonté) : phrases 1, 2, 3,
4, 5, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 19. Il s’agit de l’erreur la plus commune.
• confusion entre paronymes (« survenir » et « subvenir ») : phrase 18.
• utilisation de mots passe-partout et peu adaptés à un registre écrit formel, soutenu :
phrases 7, 8, 10. (Notez également le pléonasme de la phrase 7 : « refaire des
rappels ».)
• problème d’incompatibilité actancielle (par exemple, « un cours », sujet non humain,
ne peut pas « vouloir »…) : phrases 9, 17.
• problème de construction des compléments de verbe (on « enseigne » quelque chose
« à » quelqu’un) : phrase 6.
Certains d’entre vous diront peut-être que je suis trop pointilleux et que d’ailleurs, dans
quelques cas, ce qui passe à mes yeux pour des maladresses pourrait être considéré par
d’autres comme des tournures acceptables. Je répondrai simplement que si une impression de
maladresse surgit dans l’esprit du maitre, il doit en informer l’élève2, et tâcher avec lui d’en
expliciter l’origine. C’est sans doute au prix d’un tel effort de clarification que l’élève,
acquérant le souci de la précision, réalisera de réels apprentissages en écriture. Aussi l’analyse
des erreurs devrait-elle être accomplie par l’apprenant lui-même : le fait de prendre
conscience des contraintes qui déterminent les choix lexicaux devrait l’aider à s’exprimer
progressivement de façon plus fine et soutenue.
Ajoutons que ces irrégularités résultent d’une maitrise lacunaire d’un vocabulaire usuel et
qu’en plus de travailler avec des manuels du type 1000 mots pour réussir (que je ne désavoue
pas et que je continuerai de proposer aux étudiants), il convient de s’entrainer à la
manipulation d’un vocabulaire courant en proposant à l’élève, comme on le fait parfois en
FLE (français langue étrangère), de « déstocker » un maximum de combinaisons verbe +
complément ou sujet + verbe à partir d’un nom ou d’un verbe donnés.
Voici, en guise d’exemple, un exercice conçu à partir de quelques-unes des erreurs recensées
ci-dessus.
un cours
suivre un cours ; participer à un cours ; donner un cours ; s’inscrire à un cours ;
annuler un cours…
un diplôme
obtenir un diplôme ; délivrer un diplôme ; remettre un diplôme ; décerner un
diplôme…
des exigences
faire part de ses exigences ; imposer ses exigences ; répondre à des exigences ; se
plier à des exigences ; satisfaire à des exigences ; ses exigences augmentent…
de la compréhension
faire preuve de compréhension ; requérir de la compréhension de la part d’autrui…
enseigner
Le maitre enseigne les mathématiques à ses élèves. J’enseigne le français à des
adultes.
des objectifs
fixer des objectifs ; déterminer des objectifs ; atteindre des objectifs ; viser des
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Elève de l’enseignement secondaire ou supérieur…
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objectifs…
permettre
Maman ne permet pas que nous sortions (subjonctif). Je vous permets de parler
(infinitif) à voix basse. Le médecin (sujet humain) me permet un verre de bière par
jour. Vous permettez tout à cet enfant ! Ma santé (sujet : chose) me permet (=
« autorise ») tous les excès !...
offrir
J’ai offert des fleurs à ma maman. Ce magasin offre un grand choix de chaussures. Il
m’a offert (= « proposé ») de l’accompagner (infinitif). Cette situation offre de
nombreux avantages (= « procure »)…
Comment enrichir encore ce tableau ? Pourquoi ne pas utiliser Internet, où l’on trouvera, pour
un mot introduit dans un moteur de recherche, un nombre important d’énoncés dans lesquels
il est inséré ? De l’examen critique de ces énoncés, l’élève récoltera des informations utiles
quant à l’emploi ce mot. Il se renseignera sur :
• le sens et les nuances que le mot revêt (offrir ≠ permettre : cf. ci-dessus),
• les mots auxquels il est couramment associé (suivre un cours, satisfaire à des
exigences, obtenir un diplôme, atteindre un objectif…),
• la nature des actants qui l’accompagnent (vouloir exige un sujet humain),
• la manière dont ses compléments se lient à lui (enseigner quelque chose à quelqu’un).
Mais avant même de procéder à ce type d’exercices, il faudra faire écrire les élèves sur des
sujets assez complexes, afin de les amener à manipuler les mots pour exprimer des idées qui
ne font pas forcément partie de leurs préoccupations quotidiennes. Ensuite, on pourra dresser
une liste des erreurs de vocabulaire relevées dans les copies et soumettre cette liste à
l’attention de leurs auteurs. Les corrections donneront lieu à une progressive amplification du
tableau ci-dessus, lequel pourra figurer dans un « cahier de vocabulaire », fidèle auxiliaire de
l’élève scripteur.
Pierre-Yves DUCHATEAU
Corrigé
1. « Il faut sans cesse répéter les contenus du cours précédent. »
2. « Les cours donnés dans le cadre de cette option se déroulent en journée. »
3. « Les exigences du cours augmentent. »
4. « … pour offrir aux élèves une plus grande diversité dans leurs apprentissages. »
5. « Les élèves requièrent beaucoup de compréhension de la part du professeur. »
6. « Elle m’a également dit que le public auquel elle enseigne le français était très varié. »
7. « [L’enseignante doit] effectuer beaucoup de rappels… »
8. « La composition de cette classe varie beaucoup cette année, c’est-à-dire qu’il y a beaucoup d’arrivées et de
départs. »
9. « Les objectifs visés par le cours dépendent avant tout du groupe. »
10. « Une des plus grandes satisfactions du professeur est d’assister à/de constater la progression de ses
apprenants. »
11. « Toutes les activités sont créées en fonction des apprenants. »
12. « Mme P…, quant à elle, dispose d’un certificat de FLE, obtenu à l’Université de Louvain. »
13. « Ce sont des jeunes qui ne peuvent pas s’inscrire aux cours de promotion sociale étant donné qu’il faut au
minimum 16 ans. »
14. « L’établissement prévoit d’instaurer un troisième niveau [d’enseignement du français langue étrangère]. »
15. « Le CERAN est une école qui organise également des stages pour les jeunes pendant les vacances. »
16. « Il règne dans la classe une ambiance multiculturelle. »
17. « Un système d’ateliers a été mis en place et […] donne de bons résultats. »
18. « [Cependant,] il peut parfois survenir des conflits entre les communautés. »
19. « Les élèves élaborent ensemble des explications théoriques. »
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Voyage à Amsterdam : se promener pour écrire
Comme cela a déjà été expliqué dans les numéros précédents de la revue, les étudiants de 2e
année du régendat en français sont partis en voyage à Amsterdam. L'une des activités
proposées sur place était un atelier d’écriture qui incluait une promenade inspiratrice3. Le but
de celle-ci était principalement de faciliter l’écriture en se servant de ce qui est observé dans
les différents endroits visités, en s'imprégnant de l'atmosphère des lieux.
Afin de choisir le genre de textes que les participants à l’atelier auront à écrire, il est possible
de s'inspirer de la littérature existante. Avant la promenade à Amsterdam, il a été proposé aux
étudiants de lire "Un charmant défaut " d'Arthur JAPIN4, dont l'histoire se déroule en partie à
Amsterdam.
Voici le résumé de ce livre. L'histoire de l'unique amour du plus
grand séducteur de tous les temps s'acheva en 1758 à Amsterdam.
Casanova, encore adolescent, s'était épris d'une certaine Lucia, dont
le seul et charmant défaut était son très jeune âge. Il s'engagea donc à
revenir six mois plus tard pour demander sa main. Mais à son retour,
la promise s'était enfuie, sans doute avec un rival. Des années plus
tard, le grand libertin retrouva l'infidèle, affreusement défigurée,
dans une maison close d'Amsterdam.
En s'inspirant du roman lu auparavant, il
s'agissait d'écrire une histoire d’amour et de la
situer à Amsterdam, à notre époque. Ainsi, le
cadre spatial du roman était conservé, mais
l'époque était modifiée. En effet, il est souvent
difficile de se représenter les conditions de vie
d'une époque antérieure et d'écrire une
histoire se déroulant à cette période en
assurant une certaine cohérence. De plus,
situer le récit à l’époque actuelle a l'avantage
de donner plus de sens à l’activité d'écriture
des élèves en leur permettant d’établir des
liens entre l’intrigue et leur vécu, leurs
observations lors de la promenade, leurs
sentiments au moment de la rédaction du
texte, etc.
Figure 1 : Vondelpark
Pour faciliter l’élaboration du récit, il était proposé aux participants de respecter le schéma
global que voici :
- Partie descriptive:
* Description des lieux
* Description des personnages
- Partie narrative :
* L'histoire proprement dite.
3
Cet atelier a permis de réinvestir des démarches mises en évidence lors des cours de didactique de l’écriture
suivis avec Mme Bougelet.
4
Arthur JAPIN, Un charmant défaut. Ed. Héloïse d’Ormesson, 2006.
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Ces différentes parties pouvaient être rédigées en alternance, mais elles devaient toutes faire
partie du récit et être enchainées de manière cohérente.
Comme cela a été signalé ci-dessus,
différentes démarches étaient prévues lors
de l’atelier pour faciliter l’écriture. Il
s’agissait notamment d’enrichir le contenu
du récit en observant le paysage tout au
long d’une promenade. Ces observations
ont été
réalisées en deux étapes.
Premièrement, durant toute la promenade
(en marchant donc), les participants ont
noté des éléments permettant de décrire les
lieux en se basant sur leurs sens (vue, ouïe,
odorat, toucher). Deuxièmement, des
pauses ont été prévues à certains endroits
stratégiques afin de recueillir des éléments
plus précis.
Figure 2 : Place du Rijksmuseum
Le choix des lieux de pause est très important. En effet, ils doivent respecter certaines
conditions matérielles (suffisamment de place pour tous les participants, des endroits où
s'assoir, etc.) et, dans le même temps, ils doivent avoir un pouvoir évocateur puissant (les
scripteurs peuvent s’inspirer de nombreux éléments caractérisant les endroits choisis pour
écrire leur récit).
Lors de la promenade à Amsterdam, les étudiants ont parcouru des lieux que l'on pourrait
facilement imaginer romantiques et d'autres, au contraire, tout à fait triviaux. Ils ont pu se
promener librement dans le Vondelpark et ils se sont arrêtés sur la place du Rijksmuseum.
Ces deux endroits possédaient à la fois un pouvoir évocateur fort et des installations pratiques
qui facilitaient l'écriture. Le troisième endroit où une pause a été effectuée était la place
Leidseplein, une place animée, au cœur de la ville, en contraste avec les deux lieux
précédents.
Pour faciliter l’écriture par un moyen
supplémentaire, l’activité a été réalisée
par groupes de deux. On ne le dira jamais
assez, la confrontation, le partage des
idées permet aux élèves d'entrer plus
facilement dans l'écriture.
Au final, l'activité s'est plutôt bien
déroulée : le soleil était au rendez-vous
lors de la promenade, les participants
étaient motivés et les écrits produits de
qualité.
Figure 3 : Leidseplein
Lionel HARDY
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Petites leçons de phonétique corrective
Comment aider les élèves non francophones
à prononcer correctement le français ?
3. Les voyelles… etc.
- Le « bousse » ??? Je ne comprends pas. Que veux-tu dire ?
- Le bousse, nouméro quatre, pour la gare !
- Ah oui, le bus… !
La prononciation incorrecte des voyelles entraine des difficultés de communication…
Tâchons de comprendre ce qui se passe, puis d’aider les élèves à prononcer correctement les
sons, dans ce cas-ci le [y] de « bus », « numéro » et tant d’autres mots « outiles », pardon
[ytil] !
Connaissez-vous l’Alphabet Phonétique International (A.P.I.) ? Si oui, vous pouvez
poursuivre votre lecture. Si non, allez d’abord le réviser dans le numéro précédent … ☺
1. Qu’est-ce qui se passe ?
Depuis que notre cerveau est capable de discerner les sons, nous avons tous été baignés dans
une langue maternelle qui nous a conditionnés peu à peu à percevoir seulement les différences
pertinentes entre les sons, c’est-à-dire celles qui permettent de distinguer un mot d’un autre et
de faire sens. Un exemple ? En français, les voyelles [i], [y] et [u] servent à distinguer les
mots « pis », « pus » et « pou ».
Mais ce système de différences (appelé crible phonologique) varie d’une langue à l’autre.
Ainsi, alors qu’en français nous avons besoin de seize voyelles différentes pour distinguer les
mots, cinq suffisent en espagnol et, en arabe, seulement trois ! Dans ces deux langues, le son
[y] de « bus », par exemple, n’existe tout simplement pas.
Pour mieux comprendre, on peut comparer le crible phonologique d’une
langue à une passoire qui filtre les sons parvenant à notre oreille avant qu’ils
ne soient traités par le cerveau pour être compris. Là où, en français, cette
passoire comporte 16 trous (16 voyelles), elle n’en comporte que 5 en
espagnol (voir schéma ci-dessous). Pour parvenir au cerveau, les sons du
français sont bien obligés de « se débrouiller » pour passer par ces seuls 5 trous. Ils
choisissent bien sûr de passer par le trou le plus proche. Le [y] de « bus » passera donc par le
trou du [u] : il sera alors perçu exactement comme un [u] et sera donc reproduit comme tel :
l’apprenant prononcera, en toute bonne foi, « bousse » [bus] au lieu de « bus » [bys] !
Crible
phonologique
du français
5
Crible
phonologique
de l’espagnol5
R. RENARD, Mémento de Phonétique. Didier Hatier, 1983.
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2. Que faire ?
Il s’agit donc, puisque l’élève ne perçoit pas bien les caractéristiques des sons du français, de
rééduquer sa perception des sons… et donc, indirectement, sa prononciation. La
méthodologie que nous proposons ici se situe à l’opposé des méthodologies articulatoires qui
visent quant à elles à ce que l’élève positionne correctement ses organes phonateurs
(essentiellement la bouche) pour arriver à prononcer le son correctement. Dans notre approche
(méthodologie verbo-tonale de correction phonétique), c’est le cerveau qui sera
« reconditionné » et pourra ainsi produire, naturellement, le son correct : la phonation est en
effet conditionnée par l’audition.
Il faudra donc proposer à l’élève de répéter ce que l’on appelle un « modèle optimal », c’està-dire un énoncé contenant le son difficile à prononcer pour lui, mais qui sera soit déformé,
soit placé dans un contexte facilitateur, de façon à en accentuer les caractéristiques jusque-là
mal perçues et d’aider ainsi le cerveau de l’apprenant à les percevoir.
Une notion importante reste à expliquer : le timbre. Savez-vous distinguer la sonorité d’un
violon, d’un violoncelle et d’une contrebasse ? Si oui, vous savez distinguer leur timbre
respectif ! Chacun de ces instruments peut bien entendu produire la même note, le même la
par exemple, mais celui-ci, résultant de la vibration d’une corde, résonne dans des instruments
de tailles différentes. Le la du plus petit des instruments, le violon, aura un timbre clair tandis
que celui de la contrebasse produira un timbre sombre. Il en va de même pour les voyelles :
les cordes vocales produisent en vibrant un son d’une certaine hauteur qui est ensuite modulé
par les organes phonateurs, qu’on appelle dans ce cas les résonateurs. Le [i] de « pis » étant
articulé à l’avant de la bouche, son résonateur est petit : il a un timbre clair. Le [u] de « pou »
étant articulé à l’arrière de la bouche, son résonateur est grand : il a un timbre sombre. Quant
au [y] de « bus », il est articulé en position médiane et possède donc un timbre moyen, entre
clair et sombre.
violon
Timbre
violoncelle
contrebasse
clair ----------------------------------------------------------------- sombre
[i]
[y]
[u]
En résumé, l’hypothèse est donc la suivante : si les hispanophones n’arrivent pas à bien
prononcer le [y] de bus, c’est parce qu’ils n’en perçoivent pas bien les caractéristiques. Ils
l’assimilent au [u] ; autrement dit, ils survalorisent ses éléments sombres au détriment de ses
éléments clairs. Il « suffira » donc de leur proposer à répéter un modèle de prononciation de
ce [y] qui, lui, survalorisera les éléments clairs de la voyelle, pour compenser en quelque
sorte. On « tirera » le son () dans le sens contraire de l’erreur () commise par l’apprenant !
En théorie, cela parait bien compliqué… Mais en pratique, c’est beaucoup plus simple ! On
essaie le mois prochain !
Jean KATTUS
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Un album : Mon ami Paco
Mon ami Paco est le titre d’un album de Luc BABA et
Marion DIONNET6, publié par l’asbl Les Territoires de la
Mémoire7.
Il raconte l’histoire de Claire. Elle a un nouveau
camarade de classe qui n’est pas de la même couleur de
peau qu’elle. Il s’appelle Paco. Une amitié nait entre eux
et Claire s’empresse de l’écrire dans son journal. Mais
subitement, un jour, Paco n’est plus là…
Plusieurs raisons m’ont poussé à demander à l’auteur et à l’illustratrice de venir animer les
étudiants de 2e année sur le thème des migrations qu’ils abordent dans leur album. Tout
d’abord la qualité de celui-ci, née de leur expérience au contact des migrants, de la finesse de
leur réflexion et de leur talent de conteur et de dessinatrice, tout empreint de sensibilité. Puis
le contact qu’ils ont su établir avec les participants de la formation organisée à l’intention de
bibliothécaires et d’enseignants par Annoncer la couleur8. Et enfin la réflexion d’une
enseignante durant cette formation : « Je viens suivre cette formation parce que l’histoire de
Paco est arrivée dans ma classe et que je n’avais pas d’outils pour pouvoir en parler avec les
enfants… ». Voici donc, en quelques mots, le compte rendu du travail que nous avons mené à
la grande satisfaction de tous.
1. Lire les illustrations
Les territoires de la mémoire mettent gratuitement à la disposition des enseignants les
illustrations de Mon ami Paco reproduites sur support rigide au format affiche. Il s’agissait
pour les étudiants de les regarder attentivement les unes après les autres, de dire ce qu’ils y
voyaient et de tenter de les remettre en ordre, du début à la fin du récit.
2. Ecouter le texte
Chaque page du journal intime de Claire est lue à voix haute par l’auteur et l’illustratrice. Les
étudiants associent alors à chacun des textes l’illustration qui d’après eux lui correspond.
Ainsi, ils confirment ou infirment l’ordre initial qu’ils avaient établi ensemble.
Commentaires didactiques
1. Lire les illustrations sans avoir connaissance du texte permet de développer des
compétences de lecture souvent peu maitrisées par les lecteurs en difficulté : observer
6
Luc BABA, auteur liégeois, a publié de nombreux ouvrages, notamment pour la jeunesse : Clandestins (Labor,
2006 et Mijade, 2009) et le tout récent Les aigles ne tuent pas les mouches (Thierry Magnier, octobre 2011).
Mon ami Paco est le premier album de Marion DIONNET, illustratrice.
7
Les Territoires de la Mémoire est un centre d’éducation à la résistance et à la citoyenneté. Pour effectuer un
« Travail de Mémoire » auprès des enfants, des jeunes et des adultes, l’association développe diverses initiatives
pour transmettre le passé et encourager l’implication de tous dans la construction d’une société démocratique
garante des libertés fondamentales. www.territoires-memoire.be
8
Annoncer la couleur, Programme fédéral d’éducation à la citoyenneté mondiale.
www.annoncerlacouleur.be
Voir l’article sur la formation évoquée dans le numéro 39 (novembre) de notre revue.
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précisément le contenu de l’illustration, inférer des significations, émettre des
hypothèses sur la suite, percevoir la cohérence de l’ensemble, etc.
2. La lecture à voix haute effectuée par les auteurs constitue toujours un moment
privilégié : le texte parle au lecteur par la voix de celui qui l’a conçu, pensé, écrit.
Cette connaissance intime que l’auteur a de son texte est perceptible dans la lecture
qu’il en offre et la qualité de silence pendant l’écoute témoigne du respect que chacun
éprouve à l’égard du travail d’écriture accompli.
3. Dans un album, l’image et le texte, intimement mêlés et fondus, dialoguent et
s’enrichissent mutuellement. Récemment encore, l’album était destiné exclusivement
à un public d’enfants. Mais depuis quelques années, il n’hésite pas à s’adresser à un
public adolescent et adulte. Souvent, ses qualités littéraires et artistiques en font une
œuvre d’art à part entière.
3. Interviewer l’illustratrice et l’auteur
1. Les étudiants ne connaissent ni l’illustratrice, ni l’auteur. Ils viennent juste de découvrir
leur album. Pendant 5 minutes, chacun prépare individuellement des questions à leur poser.
2. Jeu de rôles « surprise » : 2 étudiants volontaires se voient attribuer les rôles de Luc Baba et
de Marion Dionnet et un 3e les interroge.
3. Les mêmes questions sont ensuite posées à Luc Baba et Marion Dionnet ; on peut donc
comparer les réponses imaginées et la réalité.
4. Chacun peut poser les questions qu’il souhaite.
5. L’auteur témoigne de ses nombreuses rencontres avec des élèves et l’illustratrice donne
quelques explications concernant le dessin engagé.
Commentaires didactiques :
1. Cette façon de procéder rend les étudiants réellement acteurs de l’interview.
2. La méthodologie est amusante et permet de révéler des représentations souvent
stéréotypées du travail de l’écrivain.
4. Dessiner / Ecrire
Luc Baba et Marion Dionnet proposent de multiples pistes d’écriture / dessin en lien avec
Mon ami Paco. Librement, chacun en choisit une et dispose de 30 minutes environ pour se
lancer.
1. Ecrire le dialogue entre deux enfants qui ne comprennent pas pourquoi Paco a
disparu
2. Imaginer un extrait du journal intime que Paco écrirait lui aussi
3. Réaliser une planche de B.D.
4. Ecrire la pétition dont la première phrase est donnée dans l’album
5. Au départ des explications du dossier pédagogique de la fin du livre, écrire
l’interview de Paco : « Pourquoi es-tu venu t’installer en France ? », « Pour
quelle raison t’a-t-on arrêté ? »
6. Créer une image métaphorique engagée sur un thème du livre : la migration,
l’enfermement, la séparation, etc.
7. Créer un dialogue entre un personnage évoqué dans le texte (la boulangère) et Paco
8. Dessiner et écrire une carte postale à Paco
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9. Imaginer un reportage sur l’histoire de Paco
10. Tous ensemble, réaliser une grande fresque comportant des mots-clés
11. Utiliser une des cartes postales distribuées par Les territoires de la Mémoire et
reproduisant une illustration de l’album, comme ci-dessous, pour écrire une
demande aux autorités en charge de la politique d’immigration.
Ceux qui le désirent peuvent ensuite dire leur texte ou montrer leur dessin au groupe. L’auteur
et l’illustratrice y réagissent et commentent la réalisation, si du moins son auteur est d’accord.
Commentaires didactiques :
1. Les multiples propositions d’écriture ou de dessin garantissent que chacun puisse y trouver
ce qui le motive à produire.
2. Luc Baba et Marion Dionnet ont donné leur avis sur les productions des étudiants, mettant
en évidence ce qu’ils appréciaient et donnant quelques pistes d’amélioration potentielle:
richesse des apports, dans une dynamique centrée sur la qualité et le style…
Exemples de productions graphiques :
Fanny Ruzziconi
Delphine Migliara
Jean KATTUS
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Réfléchir à la citoyenneté au cours de français
Indignez-vous ! dit Stéphane HESSEL9. S’in-digner, dit-il en détachant le préfixe du radical,
c’est se lever pour redonner à l’homme sa dignité. En référence au texte de la Déclaration
universelle des Droits de l’Homme à la rédaction duquel il a participé, il en appelle à notre
vigilance et à notre responsabilité, individuelle et collective, face aux situations, nombreuses
et variées, quotidiennes, dans lesquelles la dignité de l’homme est bafouée.
Ci-dessous une activité qui va dans ce sens, à mener avec le texte Matin
brun de Franck PAVLOFF10.
1. Voici le début d’un texte. Ecris-en la suite pour rejoindre la fin qui t’est
donnée également.
Début du texte
MATIN BRUN
Les jambes allongées au soleil, on ne parlait pas vraiment avec Charlie, on échangeait des
pensées qui nous couraient dans la tête, sans bien faire attention à ce que l’autre racontait de
son côté. Des moments agréables, où on laissait filer le temps en sirotant un café. Lorsqu’il
m’a dit qu’il avait dû faire piquer son chien, ça m’a surpris, mais sans plus. C’est toujours
triste un clebs qui vieillit mal, mais passé quinze ans, il faut se faire à l’idée qu’un jour ou
l’autre il va mourir.
- Tu comprends, je pouvais pas le faire passer pour un brun.
- Ben, un labrador, c’est pas trop sa couleur, mais il avait quoi comme maladie ?
- C’est pas la question, c’était pas un chien brun, c’est tout.
- Mince alors, comme pour les chats maintenant ?
- Oui, pareil.
Pour les chats, j’étais au courant. Le mois
dernier, j’avais dû me débarrasser du mien, un
de gouttière qui avait eu la mauvaise idée de
naitre blanc, taché de noir.
C’est vrai que la surpopulation des chats
devenait insupportable, et que d’après ce que les
scientifiques de l’Etat national disaient, il valait
mieux garder les bruns. Que des bruns. Tous les
tests de sélection prouvaient qu’ils s’adaptaient
mieux à notre vie citadine, qu’ils avaient des
portées peu nombreuses et qu’ils mangeaient beaucoup moins. Ma foi, un chat c’est un chat,
et comme il fallait bien résoudre le problème d’une façon ou d’une autre, va pour le décret qui
instaurait la suppression des chats qui n’étaient pas bruns.
9
Voir informations publiées dans le numéro 40 de décembre.
Franck PAVLOFF, Matin brun, Cheyne Editeur, 1998. (11 pages seulement, idéal à lire en classe)
10
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Les milices de la ville distribuaient gratuitement des boulettes d’arsenic. Mélangées à la pâtée,
elles expédiaient les matous en moins de deux.
Mon cœur s’était serré, puis on oublie vite.
Fin du texte
On frappe à la porte. Si tôt le matin, ça n’arrive jamais. J’ai peur. Le jour n’est pas levé. Il fait
encore brun dehors. Mais arrêtez de taper si fort, j’arrive.
2. Lecture des productions des élèves – analyse de la cohérence du récit – discussion sur le
contenu et les intentions des scripteurs – liens avec la réalité historique et l’actualité.
3. Lecture complète de Matin brun, le « texte-frère » de ceux qui ont été écrits par les élèves.
Eclaircissements – réactions.
4. Prolongements possibles :
a) « Les indignés célèbres »
Des hommes et des femmes, au cours de l’histoire
récente, ont résisté et résistent encore. Renseigne-toi,
choisis-en un(e) et écris sa biographie. En voici un
exemple, celle de Vaclav Havel, récemment décédé.
Le Vif-L’Express n°51, 23 décembre 2011
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b) « Moi, ce qui m’indigne… »
Repère dans la presse des titres de journaux qui font référence à un évènement, une situation,
un comportement qui aujourd’hui t’indigne. Ecris un texte court expliquant précisément cet
évènement ou cette situation, d’une part, et les raisons de ton indignation, d’autre part.
MSF Magazine n°123, Décembre 2011
c) Lecture de dessins, d’œuvres d’art :
Comment comprends-tu le dessin et la sculpture ci-dessous ? Comment y réagis-tu ?
Follow the leader, London, 2010. By Isaac CORDAL, Cement Eclipses
Cherche un dessin, une illustration, une photo, une peinture, une sculpture en lien avec une
situation, un comportement ou un évènement qui t’indigne et explique pourquoi tu l’as
choisi(e).
Commentaires didactiques
1. - De la politique au cours de français, à l’école ?
- Plutôt de l’éducation à la citoyenneté. Être citoyen, au sens étymologique du terme, c’est
être membre de la cité, du groupe et y exercer pertinemment ses droits et devoirs. Cela
s’apprend. Et c’est le rôle des enseignants, notamment, d’éduquer les enfants qui leur sont
confiés à cette dimension. Le cours de français est un cours « de communication et de
culture », particulièrement susceptible d’apprendre aux jeunes à s’informer, à se positionner
de façon réfléchie, à prendre la parole et à écouter les autres. La classe est sans doute pour
beaucoup, avec la famille, le premier lieu d’apprentissage de la démocratie.
2. – Oui, mais s’ils disent des choses « qu’il ne faut pas » ?
- Certes, il y a des risques à donner la parole, celui de l’inconfort de devoir gérer toutes
sortes de propos … mais le risque est encore plus grand de ne pas la donner, cette parole qui
libère et crée du lien. Fort de cette conviction, l’enseignant pourra se former peu à peu à la
gestion de la prise de parole et gagner en assertivité face à ses élèves. Le programme de toute
une vie professionnelle ☺ !
Jean KATTUS
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Lu dernièrement
Daniel GLATTAUER, Quand souffle le vent du nord. Grasset, 2010.
Un homme et une femme. Ils ne se connaissent pas mais s’échangent des
mails. Jusqu’à devenir accros. Jusqu’à ne plus pouvoir se passer l’un de
l’autre, sans se rencontrer pour autant…
C’est captivant, romantique, simple, souvent fin et drôle… On s’identifie
aux personnages, ça pourrait nous arriver, peut-être… Une lecture-évasion
ma foi très plaisante.
Laurence COSSE, Les amandes amères. Gallimard, 2011.
Découvrant que Fadila ne sait ni lire ni écrire, Edith entrevoit à quel point
la vie est compliquée pour un analphabète et combien c’est humiliant. Elle
lui propose de lui apprendre à lire le français.
Fadila n’est pas jeune. Edith n’est pas entrainée. L’apprentissage s’avère
difficile. Ce qui semblait acquis un jour est oublié la semaine suivante…
La narratrice relate par le menu les leçons qu’elle donne à Fadila et ce
qu’elle apprend de son quotidien et de son histoire. « J’jamais été
l’école » lui dit Fadila. Elle ne sait pas ce qu’est une courbe ou une droite.
Elle ne comprend pas des notions aussi simples que mettre un point « sur » un i… Mais Fadila
est attachante… Et au-delà des apprentissages, pour le moins aléatoires, ce qui compte
finalement, c’est la valeur de la relation entre deux personnes qui se découvrent et
« s’apprivoisent » peu à peu.
Judy DUTTON, La foire aux sciences. Médium documents, L’école des loisirs, 2011.
Taylor, 14 ans, n’a jamais aimé les jouets. Son truc : le tableau périodique
des éléments, particulièrement les trente-quatre derniers, les plus radioactifs… Garret, en cinquième dans un coin reculé de l’Arizona, une réserve
Navajo où près de la moitié des enfants ne terminent pas le lycée, est devenu
une légende grâce à un radiateur de Pontiac 1967, une feuille de Plexiglas et
soixante-neuf cannettes de soda…
Ce sont des histoires vraies. Ce sont des garçons qui s’intéressent aux
sciences. Et qui réussissent ! C’est amusant à lire, et parfait pour des adosgarçons que, souvent hélas, la littérature ne fait pas particulièrement
vibrer… A mettre entre les mains de tous vos collègues professeurs de sciences !
Jean KATTUS
D’un prof … à l’autre D’un prof … à l’autre D’un prof … à l’autre D’un prof … à l’autre D’un prof … à
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On vous informe !
Ce concours de textes s’adresse à toute personne résidant en
Belgique, à partir de l’âge de 12 ans, sans autre distinction.
Qui d’entre nous n’a pas rêvé un jour de recevoir des pouvoirs
magiques afin de modifier l’un ou l’autre aspect de la réalité ? Il y a
tant de choses que nous aimerions changer d’un simple coup de
baguette : notre aspect physique, notre stock de connaissances, le
fonctionnement de la société, la faim et la maladie, le climat, etc.
Certes, de tels pouvoirs peuvent aussi servir des buts moins nobles :
la vengeance, la jalousie, l’élimination d’un rival. Entre générosité,
égoïsme et malfaisance, l’éventail des possibilités est immense, sans
oublier l’art des illusionnistes.
De nombreux auteurs ont traité ce thème, d’Ovide à J.K. Rowling en
passant par Charles Perrault et les frères Grimm. C’est ainsi que sont
nés des personnages mythiques comme Merlin l’enchanteur, la fée
Morgane, Aladin et la lampe merveilleuse, l’Apprenti sorcier, Harry Potter et tant d’autres. Leurs
aventures nous ont fait pleurer, sourire, trembler. Avec le concours de la Maison de la Francité,
chacun peut à son tour inventer une histoire merveilleuse, fantastique ou dramatique dont il sera le
héros fabuleux.
Revue de la Maison de la Francité, n°68, 4 e trimestre 2011
Ecrivez sur ce thème un récit de 2 à 4 pages et envoyez-le entre le 1er février et le 18 avril à
la Maison de la Francité. Le choix du genre et du style est libre. Trois catégories : cadets (1215 ans), juniors (15-18 ans) et adultes. Les lauréats recevront des chèques, des livres, des
entrées gratuites, des abonnements, etc. Les meilleurs textes seront publiés.
Règlement complet et formulaire d’identification : www.maisondelafrancite.be
Adresse postale :
Maison de la Francité, 18, Rue Joseph II, 1000 Bruxelles
Fax : 02/219 67 37
Courriel :
[email protected]
Commentaires – pistes didactiques
1. Lire le règlement du concours est un excellent exercice de compréhension d’un texte de type
injonctif. Les contraintes que le règlement impose constitueront des balises claires facilitant l’entrée en
écriture.
2. Le sujet invite à consulter de nombreux textes : on ira les (re)lire pour écrire, créant ainsi une
dynamique positive.
3. Participer à un concours, c’est oser montrer son texte à d’autres personnes que son professeur ou ses
camarades. Outre le fait que cela rend à l’écriture son rôle véritable (on écrit pour « dire quelque
chose », le mieux possible, à un vrai lecteur, inconnu et pas seulement pour « être corrigé »), cela
exige du scripteur de s’attacher à produire un texte de très grande qualité.
4. Le genre est libre : une bonne occasion pour repréciser les caractéristiques propres au récit
fantastique, à la légende, au conte merveilleux, etc., en fonction des choix des élèves.
5. Si j’étais magicien, je ferais… : Si + Imparfait, + Conditionnel : une structure grammaticale souvent
malmenée, que le thème du concours donne l’occasion de repréciser.
Jean KATTUS
D’un prof … à l’autre D’un prof … à l’autre D’un prof … à l’autre D’un prof … à l’autre D’un prof … à
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Index des articles parus dans « D’un prof… à l’autre »
Vous trouverez ci-dessous la liste alphabétique des sujets qui ont été évoqués dans les 41
numéros de la revue de novembre 2007 à janvier 2012. Elle a comme objectifs de faciliter la
recherche d’articles portant sur un thème en particulier et de constituer, en ce début d’année,
un récapitulatif de tous les numéros.
A
Accueillir un auteur en classe
Acrostiche
Actualité (l’intégrer dans le cours de français) : Barack Obama
Halloween
L’actualité économico-(tragi)-comique au cours de français
Affiche (droits de l’Homme – campagne de sensibilisation)
Numéro(s) de la revue
2,13, 19, 24, 35, 41
4
7
27
40
2
Alphabet phonétique
40
Appétence (en lecture et écriture)
2
Art détourné
Ateliers et activités d’écriture
26
1, 2, 3, 12, 13, 17, 18, 22, 23, 28, 35,
37, 38
40
Audio-guide
B
Baba (Luc) Mon ami Paco
Bande dessinée
Begag (Azouz)
Bentolila (Alain) Le verbe contre la barbarie
C
Cadavres exquis
Calligramme
Carte postale publicitaire
Caviardage
Chanson
Citoyenneté au cours de français (vivre ensemble)
(la
chanson
engagée
l’interview)
(y réfléchir en classe)
Comenius (une assistante Comenius au Portugal)
Comparaison
Compétences (parler des compétences aux étudiants)
Conjuguer
Consignes
Conte du pourquoi
Contrefable
Cousseau Alex (littérature de jeunesse)
D
Défi-lecture
Defourny Michel (littérature de jeunesse)
Dionnet (Marion) Mon ami Paco
Dominique Demers
Droits de l’Homme
E
Exposé (critères d’évaluation)
F
Fable
Fantastique dans la bande dessinée
Film : se préparer à aller voir un film et l’exploiter
Entre les murs
39, 41
1, 17, 33, 34
19
2
et
20
2
3
32
9, 32
15
32
41
36
31
16
20
3
17, 28, 40
3, 8
3
1, 2, 3
15
39, 41
24
2, 17
1, 3, 25
34, 40
1
6
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Welcome
Precious (le film) et Push (le roman)
intégrer des films dans ses cours
FLE (www.oasisfle.com)
(pédagogie de l’erreur)
(www.lepointdufle.net)
(les « systèmes » du français)
(tables de conversation)
(phrase « boule de neige »)
(travailler avec des images)
(travailler avec les Niouzz)
(poésie : Demain, dès l’aube…)
(promenade dans Liège pour apprendre le français)
(tradition culinaire de la Chandeleur)
(utiliser le subjonctif présent)
(travailler sur le rythme et l’intonation)
(une activité pour faire connaissance)
(leçons de phonétique corrective)
(le passé composé et l’imparfait)
G
Laurent Gaudé (Eldorado)
Génération Y (élèves de la génération Y)
Genres de textes (manipuler les genres de textes)
Grammaire
Gudule (La vie à reculons) : carnet de lecture
H
Haïku
Harry Potter
I
Images …
Interculturel (Lire Tête de Turc de Nicolas Ancion)
Interview
J
K
L
Lavachery Thomas (littérature de jeunesse)
Lecture à dévoilement progressif
Lettre
Lire (difficulté de bien lire et d’enseigner à lire)
Lire des histoires aux petits
(http ://lirenligne.free.fr)
Littératie
Littérature de jeunesse et éducation (Anne Provoost)
Livres coups de cœur ou lus dernièrement
M
Magazine Café littéraire
Médiations de la lecture
Molière
Multidisciplinarité
Musée (visite d’un musée)
N
O
Oral (critères d’évaluation)
Orthographe grammaticale (induction et sélection des règles)
Orthographe (réforme)
P
Participes passés
Pédagogie de l’erreur (FLES)
Phonétique (leçons de phonétique corrective)
11
23
32
1
1
3
3
7
20
22
22
30
31
31
34
35
38
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39, 40
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10, 11, 12, 20, 30
21
1
1
22
29, 30
32
13
11, 19
33
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24
3
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2
36, 38, 39, 40, 41
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19
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1,3
5
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5, 13
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P.N.L.
Poésie
Ponctuation
Portrait à la Picasso
Prix littéraire
Pronoms indéfinis
Prosodie
Publicité
28
2, 29, 30
5, 23
26
12
20
38, 39
22, 26, 33
Q
R
Racisme
Rascal
Religion Texte « Aimer, c’est… »
La fête de Noël… autrement
Noël à grand prix ou à prix cadeaux ?
Au commencement était le Verbe, et le Verbe s’est fait chair
Rentrée des classes (au cours de français)
Ressources (site du secteur français de l’enseignement catholique))
Résumer un article (Alain Bentolila)
Roman-photo
S
Signet
Souvenir de vacances (à raconter et à écrire)
Stages
T
Tables de conversation (FLE)
Temps des verbes
Texte-frère
Théâtre (activités pour se préparer à assister à une pièce de théâtre
ou l’exploiter)
Tisseron Serge (Harry Potter)
Tshibanda Pie
U
V
Vocabulaire
Voyage (préparer et exploiter deux journées à Bruxelles)
(deux semaines à Oran en Algérie)
(voyage à Amsterdam : le musée Anne Frank)
(voyage à Amsterdam : concevoir un audio-guide en lien
avec la visite du Rijksmuseum)
(voyage à Amsterdam : se promener pour écrire)
WXYZ
3, 17
33, 35
16
18
29
30
15
39
2
16, 38
8
37
8, 9, 10, 11, 19, 30, 31, 32, 33, 34, 35,
36, 41
7
39, 40
17, 29
33, 38
1
3
23, 26, 28, 30, 31, 32, 41
17
32
39
40
41
Sylvie BOUGELET
D’un prof … à l’autre D’un prof … à l’autre D’un prof … à l’autre D’un prof … à l’autre D’un prof … à