reeducation de l`equilibre d`ataxiques, de cerebelleux et de

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reeducation de l`equilibre d`ataxiques, de cerebelleux et de
Roland SULTANA, G. HEURLEY - Centre de rééducation fonctionnelle Pomponiana,
BP 41, 83407 Hyères Cedex
Jacques CRÉMIEUX, Olivier GORGY- CNRS-NBM, BP 71, 13402 Marseille Cedex
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RÉÉDUCATION DE L’ÉQUILIBRE D’ATAXIQUES,
DE CÉRÉBELLEUX ET DE PERSONNES ÂGÉES À
L’AIDE
D’ARTS MARTIAUX INTERNES ET EXTERNES
ADAPTÉS
INTRODUCTION
L’utilisation d’exercices thérapeutiques pour préserver ou améliorer la santé des
gens n’est pas un concept nouveau (Licht et Johnson, 1965). Les historiens
décrivent leur utilisation en Grèce aussi bien qu’en Inde bien avant la naissance de
Jésus (Licht, 1965). Mais ce qui est recouvert par le terme générique de cong fou
(gongfu ou kung fu suivant la graphie utilisée pour traduire le chinois (Florence,
1995)) décrit par Amiot dès 1779 en Occident, et incluant l’utilisation d’un ensemble
de postures, de mouvements et d’exercices respiratoires, est un des seuls types
d’exercices (avec le yoga), qui ait su traverser les âges, depuis son utilisation dans la
Chine ancienne (Adams, Daniel & Rullman, 1975), tout en évoluant pour parvenir
jusqu’à nous. Notons que dès leur début, la visée thérapeutique de ces exercices est
difficilement séparable de leur utilisation en tant que pratique martiale ou d’art de
combat (Despeux, 1981, Jwing-Ming, 1997 pour le taiji quan (ou tai chi chuan) ;
Habersetzer, 1991, Jwing-Ming, 1995 pour le qi-qong (ou chi-kung)), pratique qui a
influencé l’évolution d’autres arts martiaux, qui ont souvent donné les formes
sportives actuelles, tel que les arts martiaux chinois ou vietnamiens, ou même le
karaté-do japonais moderne.
Si l’utilisation de ce type d’exercice est classique dans la pratique de la médecine
chinoise, elle l’est beaucoup moins dans la pratique de la médecine occidentale
(Réquéna, 1991 ; Voranger, 1988) et son introduction y est beaucoup plus récente,
bien qu’influençant souvent le développement de nouvelles thérapies (exemple MayRopers, 1996).
L’utilisation d’une activité physique ou sportive pour rééduquer n’est bien sûr pas
propre à celle des arts martiaux (voir par exemple l’utilisation des méthodes
gymniques ou de natation pour la rééducation vertébrale par Efther et Préau (1991)
ou la rééducation des cérébelleux par Sultana (1981) ; ou les différentes activités
proposées dans les actes du IXe congrés sur les activités physiques adaptées,
Minvielle, Caillaud, Ramanantsoa (1997)), aussi bien chez des malades que des
sujets présentant des incapacités motrices ou mentales (Adams, Daniel & Rullman,
1975 ; Terranova, 1986 ; Shepard, 1991). Mais, comme le rappelait Lehmann (1981)
il ne va pas de soi d’ouvrir les activités sportives, même adaptées, aux personnes
handicapées au point de vue moteur, comme de leur demander un geste de frappe
d’une jambe du type mae geri en karaté, alors qu’ils ont déjà d’énormes difficultés à
tenir en équilibre sur leurs deux membres inférieurs. D’autre part, que le sujet soit
une personne âgée ou un patient, pour tenir compte de son expérience passée, il ne
lui sera pas demandé la même chose s’il n’a jamais pratiqué de sport, ou s’il a déjà
pratiqué un sport, ou même un sport de combat, parfois même à haut niveau
(Delpech, 1996). De plus, la rééducation fonctionnelle, dont le but est de prévenir ou
de réduire les déficits, a été qualifiée de spécifique chez la personne âgée du fait du
vieillissement biologique normal de l’individu (Ribeyre, Rabourdin, 1982), impliquant
donc de tenir compte de l’âge des sujets dans la fréquence, l’intensité, la durée et
l’échauffement des exercices sportifs adaptés proposés.
Nous présentons ici dans une première partie, une approche descriptive, clinique, de
l’utilisation de ce type de techniques dérivées des arts martiaux (Sultana et al.,
1997), et dans une deuxième partie, une tentative de quantifier expérimentalement
l’effet de leur utilisation sur une population de personnes âgées (Gorgy, 1996). Ce
type de techniques soit, dérivent de la pratique adaptée d’arts martiaux dits internes :
« Nei-chia kung-fu » (type qi-qong ou tai chi chuan) ou externes : « Wai-chia kung-fu
» (type karaté), soit, en cas d’atteintes légères des patients, utilise la pratique prévue
pour des débutants de ces arts martiaux. Cette classification entre arts martiaux
internes et externes n’est pas évidente et elle est sujette à controverse (Dufresne et
Nguyên, 1994 ; Itier, 1997 ; Raffort, 1997), pour simplifier (tout en sachant que cela
ne recouvre pas la totalité du phénomène) les uns, les internes, seraient plutôt
souples et lents, les autres plutôt violents et saccadés, les uns s’intéresseraient
surtout au développement de l’énergie interne peu visible, les autres à la force
physique dans ses manifestations extérieures visibles.
APPROCHE CLINIQUE
Cette pratique d’arts martiaux adaptés constitue une activité très conviviale pour les
jeunes patients (ataxique, cérébelleux, traumatisé crânien, dont l’étiologie peut être
variable : sclérose en plaques...), car toujours en présence permanente du
rééducateur et en interaction avec celui-ci, et pouvant parfois s’effectuer en groupe, y
compris incluant du personnel soignant désirant s’y initier. Ces activités permettent
un travail intensif de l’équilibre et une maîtrise de l’agressivité dans une ambiance
chaleureuse et motivante (possibilité d’utilisation d’un fond musical approprié, en
particulier pour diminuer les risques de stress ou normaliser la vitesse des exercices
qui doit suivre le rythme imposé par la musique). Il faut adapter l’activité et les
exercices proposés à la personnalité du patient et au degré du handicap : coup de
poing, coup de pied, parade (associés ou non à des déplacements en marche avant
et arrière), des rotations, apprentissage des chutes...
Ainsi le karaté exécuté en position debout convient principalement aux sujets
présentant un handicap de gravité intermédiaire ou fruste (Vallet, 1995). Les
enchainements de mouvements lents issus des gymnastiques chinoises type qi-qong
ou tai chi chuan conviendront mieux à des patients présentant une hypertonie
spastiques et ne devant faire les exercices qu’avec un minimum de force (avec
l’hypothèse que l’on évite ainsi d’exacerber la spasticité).
Dans les atteintes profondes on doit généralement se limiter aux luttes amicales en
positions basses.
Intérêt pour l’équilibre statique et dynamique : Le travail de l’équilibre est très
important dans les arts martiaux et donc pour cette utilisation comme technique de
rééducation posturale et locomotrice (Tse, Bailey, 1992). En effet, il sert aussi bien
pour tenir certaines positions uni ou bipédales, associées à divers mouvements des
membres supérieurs, du tronc et de la tête, que pour assurer les transferts du poids
du corps d’un pied sur l’autre, les changements de postures et les chutes volontaires
et involontaires (photo 1).
Intérêt orthopédique : Tous les exercices qui sont effectués en position debout, le
sont avec un rachis bien placé en insistant sur un auto-grandissement axial sans
raideur. La position de chaque articulation est également soigneusement contrôlée.
Les assouplissements ne sont pas oubliés puisque les mouvements effectués
permettent l’étirement des principales chaînes musculo-aponévrotiques.
Intérêt pour la respiration : Parmi les différentes formes de respiration souvent
associées aux exercices de qi-qong, nous insisterons sur la respiration abdominale
inversée. Cette technique est particulièrement intéressante pour les patients et pour
les personnes âgées.
– Elle permet un massage des organes intra-abdominaux, par une alternance de
pression et de dépression à leur niveau.
– Elle permet également une prise de conscience et un renforcement des muscles du
plancher périnéal qui sont sollicités à chaque inspiration, et qui doivent se relâcher
sur l’expiration. On évite ainsi la distension du périnée lors de l’augmentation de
pression intra-abdominale inspiratoire.
De ce fait cette respiration peut jouer un rôle important en cas d’incontinence à
l’effort (ce type d’incontinence est particulièrement fréquent chez des personnes
âgées et en particulier chez les anciennes sportives). D’autre part, on sait que la
respiration influence l’équilibration posturale (Jeong, 1991 ; Bouisset, Duchêne,
1994), d’où l’intérêt de savoir la contrôler.
La technique est très simple :
– L’inspiration est associée à une contraction abdominale et périnéale (inspirez en
rentrant le ventre et en serrant l’anus et le périnée) ;
– L’expiration est un temps de décontraction (soufflez en relâchant le ventre et le
périnée).
Intérêt psycho-socio-relationnel de la pratique aménagée des arts martiaux : La
découverte d’une activité nouvelle, ainsi que l’aspect ludique et esthétique de ces
exercices explique la forte motivation des patients. Ils développent la coopération et
la solidarité avec l’équipe enseignante. Ils ont une action sur la joie de vivre des
patients et de ce fait sont particulièrement utiles chez les sujets tristes ou repliés sur
eux-même. L’éthique des arts martiaux prône le contrôle de soi, et le respect des
autres en toutes circonstances ; Cette maîtrise est importante de chez des patients
qui ont tendance à être souvent agressifs. De plus, ces exercices permettent
d’entretenir le goût de l’effort (photo 2).
Conclusion provisoire : motivation, convivialité, amélioration de l’équilibre,
épanouissement personnel dans le respect des autres. Avec toutes ces
caractéristiques, peut-on s’étonner que l’utilisation aménagée des arts martiaux
puisse jouer un rôle favorable à l’épanouissement physique et psychologique des
patients ?
Enfin, en raison de la spécificité relative de chaque apprentissage, il est important de
comprendre que les arts martiaux internes et externes ne prétendent pas se
substituer à la rééducation fonctionnelle de ces patients qui reste incontournable :
rééducation de la station debout, de la marche, de la montée d’escalier, de
l’habillage, de la toilette....
APPROCHE EXPERIMENTALE
C’est sous l’aspect du développement psychomoteur de l’individu qu’il a été tenté de
démontrer l’effet de la pratique du qi-qong, qi gong ou chi-kung (qi = énergie, qong =
discipline), activité médicale et martiale qui serait née sous le règne de l’Empereur
Jaune Huang Di entre 2690-2590 avant J.C. ou plus probablement (Voranger, 1988)
à l’époque des Han (200 ans avant J.C.). Il a fallu dégager les aspects
neurophysiologiques et neuropsychologiques propres à cette pratique. Des
mécanismes complexes sous tendent l’activité posturale et d’équilibre essentielle en
qi-qong. Il est important de réaliser que « la référence posturale est utilisée par le
système nerveux pour calculer la trajectoire du mouvement volontaire dans l’espace
péricorporel » (Biguer et al., 1988). La posture est un référant autour duquel
s’organisent les réactions anti-gravitaires, axio-proximo-distales, l’organisation
posturale de la tête et des segments. Une notion directement liée à celle de posture
est celle d’équilibre, qui sous tend elle-même celle du mouvement adapté. L’équilibre
signifie l’état de repos d’un corps sollicité par plusieurs forces qui s’annulent. Il y a 4
éléments principaux qui sous tendent le maintien de l’équilibre pendant la posture
(Massion, 1993) :
– Le contrôle de la projection au sol du centre de gravité à l’intérieur du polygone de
sustentation,
– Les signaux détecteurs d’erreurs ou re-afférences sensorielles,
– Les diverses régulations lors du mouvement ou coordinations entre posture et
mouvement (qui regroupent les réactions posturales, les réactions posturales
anticipatoires), lors de coordinations entre posture et respiration, et de coordinations
entre mouvement et respiration,
– Le schéma corporel.
Le qi-qong exploite ces mécanismes au travers de 3 classes de postures (assise,
couchée et debout) et sa pratique tente d’amener le pratiquant vers un travail interne
de régulation tonique, de relaxation, de respiration, de connaissances tactilokinesthésiques et topographiques du corps, de connaissances spatiales, de
connaissances des propriétés statiques et dynamiques du corps en vue d’optimiser
les diverses coordinations amenant au mouvement adapté.
Il est essentiel de placer le qi-qong dans sa pratique du mouvement lent sous
contrôle proprioceptif prédominant. En effet, la pratique lente nous fait entrer dans la
possibilité de contrôler le mouvement, de corriger les erreurs à chaque instant par
boucles de rétroaction concomitantes à la tâche, et nécessite un contrôle trés fin, en
continu, de la posture. Suivant les théories d’Adams (1971) et de Schmidt (1975) le
sujet comparerait son acte présent à un modèle interne ou mémoire de référence du
geste, avec en pathologie l’hypothèse d’une diminution ou disparition de cette
référence. Donc le qi-qong est une activité motrice internalisée et lente (kung fu
interne) mais qui peut, par extension, s’actualiser dans des pratiques martiales
externes et rapides (kung fu externe).
METHODES
C’est dans le cadre de la rééducation psychomotrice de la personne âgée que fut
engagé un protocole expérimental visant à vérifier si le qi-qong pouvait améliorer les
performances des sujets. Le but de la rééducation était de permettre un
ralentissement de l’apparition des déficits psychomoteurs (coordination gestuelle et
praxie, représentation de l’espace, motricité fine, renforcement musculaire, mémoire
et calcul...) causés par le vieillissement naturel, ou une amélioration avec réduction
de ces déficits. Deux groupes (tirés d’une population âgée mutualiste sans
antécédent neurologique), de 5 sujets chacun, furent évalués à un moment T0 par un
test dérivé du Lincoln-Oseretski composé originellement de 36 items (Roger, 1984),
adapté à l’adulte et à la personne âgée avec 16 items. Ce test est composé de 4
groupes d’items moteurs (G1 : équilibre, G2 : coordination dynamique générale, G3 :
motricité fine, G4 : neurologique). Pour G1 nous trouvons, par exemple, la possibilité
et la manière (avec plus ou moins d’oscillations, de mouvement des bras...) de tenir
10 à 15 secondes la station debout pieds alignés, l’équilibre sur la pointe des pieds,
l’équilibre sur un pied les yeux ouverts et fermés. Pour G2 nous trouvons la marche à
reculons, taper des rythmes avec pieds et mains en même temps en étant assis...
Chaque groupe suivit deux séances de rééducation psychomotrice par semaine,
identiques dans leur contenu, une d’une durée normale de 2 heures et une de 1
heure. Un des 2 groupes pratiqua, pendant la séance de 2 heures, du qi-qong
pendant 1/2 heure à 3/4 d’heure, sous la direction d’un des auteurs de l’article, ayant
à la fois une formation de psychomotricien et d’enseignant de qi-qong. La durée
totale étant d’environ 40 à 50 heures de qi-qong qui ont été étalées sur une période
de 7 à 8 mois. La durée de la rééducation psychomotrice pour le groupe test était en
moyenne de 1 an 2 mois, et pour le groupe contrôle de 4 ans et 4 mois.
RESULTATS
L’étude statistique effectuée par analyse de variance après re-évaluation en un
temps T1 montra que la différence des résultats entre test T0 et retest T1 était
hautement significative pour le groupe qi-qong [F(1, 8) = 34,9 ; p < 0,0004] et
significative pour le groupe contrôle [F(1, 8) = 5,9 ; p < 0,041], ceci allant dans le
sens d’un effet positif de l’entraînement pour les 2 groupes de sujets. Par ailleurs, la
comparaison des scores des 2 groupes montra que l’écart entre les résultats au test
initial T0 n’était pas significativement différent [F(1, 8) = 1,11 ; p < 0,32]. Par contre,
l’écart entre les résultats au retest T1 des 2 groupes était significativement différent
[F(1, 8) = 8,44 ; p < 0,019], donc objectivant l’effet différentiel dû au qi-qong. La
figure 1 montre cette évolution des résultats test/retest plus importante pour les
sujets qi-qong que pour les sujets contrôles. L’étude de l’interaction montre une
différence significative entre l’évolution des résultats obtenus entre situations test et
retest pour le groupe qi-qong comparé à celle du groupe contrôle [F(1, 8) = 6,08 ; p <
0,04]. La figure 2, qui donne les résultats individuels des 5 sujets âgés pratiquant le
qi-qong, montre que l’effet est obtenu chez tous les sujets, bien qu’à des degrés
divers. Il n’y a pas eu d’effet négatif de la pratique du qi-qong, d’autre part un
questionnaire de satisfaction a montré l’intérêt des sujets pour les exercices
pratiqués.
CONCLUSION
Des résultats de cette étude, et d’un travail portant sur le tai chi (Tse, Bailey, 1992)
on peut en déduire que le qi-qong et le tai chi ont une efficacité thérapeutique en
psychomotricité de la personne âgée qui semble probable, en particulier sur
l’équilibration posturale, mais il faudrait s’en assurer par une étude portant sur un
échantillon de sujets plus important, et comparer avec d’autres méthodes
rééducatives. Il faudrait aussi se poser la question de savoir si la pratique du
mouvement lent (faisant appel à des mécanismes de contrôle et de réalisation
distincts du mouvement rapide) peut réellement apporter une meilleure gestion de la
rapidité, par exemple en sport de combat et en arts martiaux, ou une meilleure
gestion des actes quotidiens et comment elle peut le faire. En particulier, il est
essentiel de placer ce travail de mouvement lent dans celui de qualité et de précision
du geste amenant à une meilleure gestion de l’effort de la part de l’individu, ainsi que
l’obtention d’une véritable économie du geste chez la personne âgée. Outre les
effets physiologiques du qi-qong, il ne faudrait pas écarter ses éventuels bénéfices
psychologiques (effet de la relaxation dynamique par exemple). De là, le qi-qong
semble constituer une pratique pouvant amener l’individu à une véritable recherche
d’équilibres physique, physiologique et psychologique.
DISCUSSION GÉNÉRALE
Si, au point de vue empirique, il semble bien que l’utilisation de pratiques sportives
ou martiales adaptées soit intéressante pour la rééducation psychomotrice des
patients, ne serait ce qu’au point de vue de leur psychologie par le plaisir des
patients de participer à ces activités, ce qui les rapproche de la pratique des
personnes en pleine santé telle qu’elle est véhiculée par l’image du sport dans notre
société. Ce résultat semblerait aussi pouvoir s’appuyer sur plus d’un millier de
références portant sur les vertus thérapeutiques de ces pratiques, avec toutes les
difficultés rencontrées pour comprendre ces études s’appuyant sur des références
issues de la médecine traditionnnelle chinoise (Ribaute, 1987 ; Gascoigne, 1997).
Malheureusement, ces références ne supportent généralement pas pour la plupart
les critères de publications de résultats scientifiquement prouvés. Parmi les rares
travaux supportant ces critères, il a pu être prouvé l’effet de l’entraînement en qiqong sur l’activité corticale (Zhang, Li et He, 1988 ; Zhang, Zhao et He, 1988) et sur
la résistance des sujets à l’augmentation de la gravité due à la force centrifuge (Guo
et al., 1988 et 1991). D’un autre coté, objectiver en quantifiant l’amélioration générale
des fonctions motrices pose un tout autre problème, même si les résultats obtenus
sont encourageants. Ce problème se pose bien sûr pour l’utilisation en rééducation
de tous les sports (Gabel, 1986). Il se pose d’ailleurs aussi bien pour la quantification
de l’effet de l’entraînement sportif en général (Crémieux et al., 1995 ; Durny et
Avanzini, 1998), ou de l’effet de l’exercice sur l’équilibre postural chez la personne
âgée (Lichtenstein et al., 1989). Il se pose aussi pour toute technique d’évaluation
générale des troubles moteurs et de leur évolution dans le temps (exemple le test de
Tinetti, 1986, qui analyse l’équilibre des sujets dans différentes activités motrices en
séparant l’équilibre statique et l’équilibre dynamique) pour laquelle il n’y a pas de
consensus sur une méthode universellement reconnue (Berg et al., 1989 ; FuglMeyer et al., 1975 ; Gatev et al., 1996 ; Sanford et al., 1993).
Il en est de même pour une quantification de l’état subjectif de forme dans laquelle
se trouvent les patients ayant suivi ces exercices sportifs adaptés. Dans sa revue sur
les recherches effectuées sur les sports de combat, Pieter (1994) trouve que les
styles chinois étudiés (tai chi chuan, wing chun) ont une demande aérobique (mesuré
par la VO2 Max) plus faible que les styles coréens ou japonais (tae kwon do et
karaté), ce qui traduit des formes de travail assez différentes ; le tai chi chuan
présentant lui même des différences avec le wing chun dans le sens d’une meilleure
efficacité respiratoire pour le tai chi (Schneider, Leung, 1991). Mais il est difficile de
relier ces résultats quantifiés des effets de la pratique et ce que l’on peut appeler
l’état de forme ressentie par les sujets (Buestel, 1982), dont l’amélioration est aussi
un des buts des exercices thérapeutiques proposés en rééducation (Yardley, Hallam,
1996).
Nous voyons que dans ce domaine beaucoup reste encore à faire au niveau d’une
validation scientifique de l’utilisation de ces méthodes dérivées de sports de combat
et d’arts martiaux, même si empiriquement elles semblent apporter des résultats
intéressants. Dans tous les cas d’utilisation de ces méthodes, nous rappelons qu’il
n’est pas question qu’elles se substituent aux techniques traditionnelles de
rééducation mais qu’elles les complètent.
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