Rapport en faveur de la libération immédiate de Nadiya Savchenko

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Rapport en faveur de la libération immédiate de Nadiya Savchenko
 Plaidoyer en faveur de la libération immédiate
de la députée ukrainienne Nadiya Savchenko.
Rapport de l’Association des étudiants ukrainiens en France et de l’Organisation Non Gouvernementale Cosmopolitan Project Foundation #FreeSavchenko Auteurs : Maciej Bukowski, Anna Shcherbak, Anastasia Fomitchova
Réalisé avec l’aide du rapport publié par Open Dialog Foundation « Report : the case of Nadiya Savchenko »
Cosmopolitan Project Foundation & Association des Etudiants Ukrainiens en France 23 rue Greneta 75002 Paris info@cosmospolitan-­‐project-­‐foundation.org -­‐http://www.cosmopolitan-­‐project-­‐foundation.org [email protected] -­‐ http://aeuf.org/ 1 En violation de toutes les règles de droit international, Nadiya Savchenko a été enlevée dans la région de
Luhansk à l’est de l’Ukraine par des miliciens armés pro-russes le 17 Juin 2014, illégalement transférée et
mise en détention en Russie. Elue députée à la Rada Ukrainienne et déléguée à l’Assemblée Parlementaire
du Conseil de l’Europe, sa libération avait déjà été prévue par les accords de Minsk négociés avec la Russie
par le Président Français et la chancelière allemande, et sa relaxe immédiate exigée par ses collègues de
l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) le 28 Janvier 2015 ainsi que par de nombreuses
personnalités européennes. En grève de la faim depuis plus de 100 jours contre sa détention illégale, son
état se dégrade d’heures en heures.
Comme toute personne relevant de la juridiction des Etats-membres Nadiya Savchenko bénéficie des
garanties offertes par les instruments du Conseil de l’Europe, en particulier la Convention Européenne des
Droits de l’Homme qui condamne l’enlèvement, le transfert et la détention illégale. Au titre de ses
fonctions de représentante à l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe, Nadia Savchenko
bénéficie en outre de l’immunité parlementaire.
Face à cette violation flagrante des accords de Minsk II l’Association des Etudiants Ukrainiens en France,
l’ONG Cosmopolitan Project Foundation en partenariat avec Open Dialog Foundation et le mouvement
ukrainien Vidsitch ont lancé une campagne internationale pour la libération immédiate et sans condition
de Nadia Savchenko. Appuyés par une pétition à près de 48 000 signatures lancée sur change.org et
intitulée « Libérez Nadia Savchenko ! »1.
Nous appelons la communauté international à faire pression sur la Fédération de la Russie pour
libérer Nadia Savchenko avant qu’il ne soit trop tard.
A l’heure de la présence de la sœur de Nadia Savchenko, Vira, en France du 13 au 17 Avril 2015 nous
prions les acteurs européens d’entendre notre appel. L’échec de cette entreprise ne serait pas seulement un
drame pour le moral des ukrainiens, mais le serait également pour l’exercice de la diplomatie européenne
dans la négociation des accords de Minsk.
1
http://www.change.org/freesavchenko Cosmopolitan Project Foundation & Association des Etudiants Ukrainiens en France 23 rue Greneta 75002 Paris info@cosmospolitan-­‐project-­‐foundation.org -­‐http://www.cosmopolitan-­‐project-­‐foundation.org [email protected] -­‐ http://aeuf.org/ 2 I.
L’enlèvement de Nadia Savchenko à Metallist (région de Luhansk)
Nadia Savchenko était pilote dans les forces armées ukrainiennes. Dans le cadre de l’Opération AntiTerroriste (ATO) menée dans l’Est de l’Ukraine à laquelle elle participait en tant que volontaire dans le
bataillon « Aydar » sous la direction du Ministère de la Défense ukrainien, elle fut enlevée par des miliciens
armés pro-russes près du village de Metallist dans la région de Luhansk le 17 Juin 2014 avec M. Taras
Sinyagovsky, et plusieurs autres soldats du bataillon « Aydar ».
Grâce à la coopération des services secrets russes et des milices armées opérant à l’Est de l’Ukraine, Nadia
Savchenko fut transférée de force en Russie par ses ravisseurs la nuit du 24 Juin 2014.
Ø Détention et interrogatoires à Voronezh en violation de l’article 127 du code pénal de la
Fédération de Russie, et des articles 56 et 189 du Code de procédure pénale de la
Fédération de Russie.
Du 24 au 30 Juin, la pilote ukrainienne de 33 ans fut gardée sous surveillance dans un hôtel de la ville de
Voronezh.
Pendant cette période de captivité elle subit plusieurs interrogatoires sans la présence d’un avocat ni la
possibilité de communiquer avec ses proches2. Les interrogatoires furent directement menés par Dmitry
Manshin qui l’informa qu’elle était interrogée comme témoin dans le cadre de l’affaire contre le Ministre de
l’Intérieur ukrainien Arsen Avakov, et le gouverneur de la région de Dnipopetrovsk, Igor Kolomoysky.
Elle subit également des interrogatoires relatifs à la mort des deux journalistes russes Igor Kornelyuk et
Anton Voloshin sans la possibilité d’avoir accès à un avocat en violation des articles 56 et 189 du Code
de Procédure Pénale qui précisent qu’un avocat peut être présent pendant l’interrogatoire du témoin si
celui-ci le demande. Cette période de séquestration dans l’hôtel de Voronezh s’est effectuée en violation
de l’article 127 du Code de Procédure pénale de la Fédération de Russie.
Nadia Savchenko est officiellement mise en accusation le 30 Juin 2014, date à laquelle la justice de la
Fédération de Russie lui désigne un avocat commis d’office, Nikolay Shulzhenko. La sœur de Nadia
Savchenko, Vira Savchenko signe un accord le 11 Juillet 2014 avec trois avocats pour assurer sa défense
avec l’aide de l’ONG Open Dialog Foundation : Mark Feygin, Ilya Novikov and Nikolay Polozov. Elle est
placée à l’isolement le 17 Juillet 2014.
2
http://euromisto.cv.ua/content/nadiya-­‐savchenko-­‐rozpovila-­‐pro-­‐svoie-­‐vikradennya Cosmopolitan Project Foundation & Association des Etudiants Ukrainiens en France 23 rue Greneta 75002 Paris info@cosmospolitan-­‐project-­‐foundation.org -­‐http://www.cosmopolitan-­‐project-­‐foundation.org [email protected] -­‐ http://aeuf.org/ 3 Ø Accusations officielles et absence de preuves
Nadia Savchenko est officiellement accusée de « complicité » dans la mort de deux journalistes russes, Igor
Kornelyuk et Anton Voloshin. Ces journalistes qui se trouvaient sur le territoire ukrainien sans
autorisation, avec un groupe de miliciens armés et sur le fondement des conclusions d’un interrogatoire
subi par le soldat ukrainien Taras Sinyagovsky alors que ce dernier était blessé. Le soldat, sous la menace et
la torture a ainsi indiqué qu’il avait vu Nadia Savchenko « parler avec quelqu’un au téléphone » pendant la
bataille à côté du village de Metallist. Sur le seul fondement de ce témoignage les enquêteurs ont en conclu
que Nadia Savchenko avait commandité les tirs de mortiers sur les positions où les journalistes étaient
localisés3. Selon le Comité d’enquête elle aurait informé par téléphone S.V. Melnychuk, le commandant du
bataillon Aydar de la position précise des journalistes.
ð Les avocats de Nadia Savchenko ont réussi à démontrer plusieurs éléments dans la construction de
sa défense :
-
Sur le meurtre des deux journalistes
a. Taras Sinyagovsky, l’auteur du témoignage a reconnu que l’interrogatoire avait été mené sous la
menace physique et des pressions psychologiques : ce dernier n’est donc pas recevable comme
élément de preuve en tant que tel.
b. Nadia Savchenko a été faite prisonnière dans le nord du village de Metallist alors que les
journalistes ont été tués à une intersection au sud du village. Sur le fondement de son
témoignage, elle a été enlevée aux alentours de 11h du matin alors que les journalistes ont été
tués vers 13h4, ce que prouvent les enregistrements présentés par la défense le 11 mars 2015.
c. L’historique et la géolocalisation des appels passés par Nadia Savchenko, également utilisés par
la défense, l’innocentent totalement.
-
Sur le franchissement illégal de la frontière
Selon le Comité d’enquête de la Fédération de Russie, Nadia Savchenko aurait franchi la frontière de son
plein gré pour demander l’asile en Russie. Le 29 Octobre, elle reconnaît officiellement un de ses ravisseurs,
Igor Plotnitsky. Le parquet de Kiev publie un rapport sur la participation de Igor Plotnisky et O. Popov
dans l’enlèvement de Nadia Savchenko5.
3
http://www.unian.net/politics/943304-­‐v-­‐rossii-­‐ozvuchili-­‐somnitelnyie-­‐dokazatelstva-­‐protiv-­‐letchitsyi-­‐savchenko.html http://tsn.ua/politika/na-­‐moment-­‐vbivstva-­‐rosiyskih-­‐zhurnalistiv-­‐savchenko-­‐vzhe-­‐dvi-­‐godini-­‐bula-­‐v-­‐poloni-­‐advokat-­‐
414494.html 5
Site officiel de parquet à Kiev: http://www.kyiv.gp.gov.ua/ua/news.html?_m=publications&_c=view&_t=rec&id=146326 4
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procédure
•
Violation des droits de l’accusée
Le refus d’une protection diplomatique
a. Le consul ukrainien Gennediy Breskalenko a émis neuf demandes pour rendre visite à Mme
Savchenko au centre de détention, toutes refusées par la justice de la Fédération de Russie. Il
ne fut autorisé à la voir qu’une seule fois, le 16 Juillet 2014, après que son avocat Mark Feygin
fut intervenu et que la Cour Européenne des Droits de l’Homme ait demandé des explications
à la Fédération de Russie.
b. Lors de sa demande émise fin Juillet, sa demande pour rendre visite à Nadia Savchenko a
également été déclinée, le juge prétextant que le nombre de visites autorisées (2 par mois) avait
déjà été dépassé en violation de la loi fédérale sur le placement en détention provisoire
des suspects et des personnes accusées d’avoir commis un crime laquelle ne s’applique
pas sur la visite des consuls.
c. Des représentants d’ONG ukrainienne et des parlementaires polonais et ukrainiens se sont
également vu refuser leur droit de visite à Nadia Savchenko lors de leur séjour en Russie du 16
au 18 Juillet 2014 et du 11 au 13 août 2014.
•
Emploi de moyens de pression psychologiques à l’encontre de Nadia Savchenko, des
membres de sa famille et de ses avocats
L’emploi de moyens de pression psychologique contre Nadia Savchenko
Nadia Savchenko est placée à l’isolement le 17 Juillet 2014 avec l’interdiction de se voir transmettre des
livres en langue ukrainienne, mesure justifiée par la Cour par l’ « impossibilité d’en vérifier le contenu ».
Son avocat Mykola Polozov fait une déclaration le 2 Octobre 2014, indiquant que Mme Savchenko est
maintenue sous pression constante6 à la maison d’arrêt n°6 de Moscou où elle a été transférée le 22
Septembre7. Le 24 septembre, la Cour requiert une expertise psychiatrique à l’encontre de Nadia
Savchenko8 laquelle est finalement menée le 13 Octobre9. Le 18 Février 2015, les médecins de Nadia
6
http://www.pravda.com.ua/news/2014/10/2/7039637/ http://www.pravda.com.ua/news/2014/09/24/7038747/ 8
Ibid. 9
http://espreso.tv/news/2014/10/13/savchenko_vidpravyly_na_psykhiatrychnu_ekspertyzu__ne_chekayuchy_sudu 7
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été forcée de prendre des médicaments inconnus11.
L’emploi de tels moyens de pression peuvent s’apparenter à de la torture prohibée par le Pacte
International relatif aux droits civils et politiques (1966), la Convention des Nations Unies contre
la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (1984), la Convention
Européenne des Droits de l’Homme (1950) et la Convention Européenne pour la prévention de la
torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (1987).
L’emploi de pressions contre les avocats de Nadia Savchenko
Le 21 Juillet 2014, l’avocat Mark Feygin a fait l’objet d’une déclaration envoyée par l’administration du
centre de détention n°3 de Voronezh à l’Association du Barreau de Moscou, « Moscow Legal Center »
dans laquelle il était écrit que Mark Feygin avait été « attrapé » communiquant deux lettres écrites « qui
n’avaient pas été soumises à une censure préalable » écrites par la sœur de Nadia Savchenko, Vira
Savchenko. La déclaration émise par l’Administration du centre de détention demandait à l’Association du
Barreau de Moscou de prendre « toutes les mesures nécessaires et appropriées » à l’encontre de Mark
Feygin. De telles méthodes démontrent l’intention des autorités de la Fédération de Russie de
prendre toutes les mesures possibles allant de sanctions administratives à la perte de la licence
d’avocat pour décourager les avocats de Nadia Savchenko de se saisir de l’affaire.
En outre Mark Feygin rapporte que la justice fait pression sur Nadia Savchenko pour la forcer à refuser les
avocats qui lui ont été envoyés avec l’aide d’Open Dialog Foundation pour accepter d’être représentée par
l’avocat commis d’office12.
10
Site oficiel du Président ukrainien: http://www.president.gov.ua/news/32299.html http://www.pravda.com.ua/news/2015/03/4/7060433/ 12
http://nbnews.com.ua/ua/news/132746/ 11
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Entraves à la construction de moyens de défense de l’accusée et vices de
procédure
1. Entraves à la construction de moyens de défense de l’accusée en violation de la
Convention Européenne des Droits de l’Homme
Le 17 Octobre 2014, les avocats de Nadia Savchenko rapportent que les représentants du Service Fédéral
d’Exécution des Peines (SFEP) la surveillent jour et nuit. Les conditions de rendez-vous violent les articles
de la Convention Européenne car ils sont obligés de s’entretenir avec en présence de cinq représentants du
Service Fédéral d’Exécution des Peines.13 Ils rapportent qu’ils se voient empêchés de préparer
correctement les séances.14
Le Procureur Général d’Ukraine, Vitaliy Yarema fait une déclaration au titre de laquelle il souligne que le
Bureau du Procureur Général de la Fédération de Russie refuse de coopérer dans l’affaire de Nadia
Savchenko.
2. Les vices de procédure dans le déroulement de l’affaire Savchenko
La première audition relative à l’affaire Savchenko a eu lieu le 2 Juillet 2014 au tribunal du District
Novousmansky de Voronezh et s’est déroulée à huis clos en l’absence de Nadia Savchenko en violation
de l’article 108 point 4 du Code de Procédure Pénale de la Fédération de Russie et sans que
l’ambassade d’Ukraine en soit informée. Il est décidé que Nadia Savchenko restera incarcérée jusqu’au 30
Août 2014. Le 10 Juillet 2014, le tribunal régional de Voronezh tint sa seconde session à huis clos. Le
Consul d’Ukraine en Russie se vit refuser l’accès à la salle d’audience et les documents relatifs à
l’affaire n’étaient pas traduits en ukrainien.
Le 25 Juillet 2014, le tribunal régional de Voronezh tint une audience pour examiner l’affaire en appel
contre sa arrestation. Malgré la demande de son avocat Nadia Savchenko se fit refuser l’accès à la salle
d’audience par le juge Tatiana Litovkin après qu’elle ait elle-même soumis une requête auprès du tribunal le
17 Juillet pour pouvoir y assister en personne. Son avocat demanda une caution de 500 000 roubles pour
remise en liberté provisoire, mais la Cour confirma sa décision prise en première instance et prolongea sa
détention jusqu’au 30 Août 2014.
Le 2 août 2014 le tribunal régional de Voronezh organisa une autre audition dans l’affaire Savchenko au
sujet de l’enlèvement de la jeune femme en Ukraine et son transfert illégal en Russie. La Cour rend une
décision statuant que la jeune femme se trouvait en Russie de son plein gré et qu’aucune atteinte à sa
liberté n’avait été émise avant la date officielle de sa mise en détention le 30 Juin 2014. Le 7 Novembre
2014, le tribunal refuse de lui fournir des interprètes15.
13
https://twitter.com/Moscow_advokat/status/523079300485246976 http://www.pravda.com.ua/news/2014/10/17/7041127/ 15
http://www.pravda.com.ua/news/2014/11/7/7043499/ 14
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Les violations par la Russie des textes et des Conventions Internationales
à laquelle la Fédération de Russie est partie
Outre des violations flagrantes des procédures de droit interne (notamment des articles 56, 127 et 189 du
Code de Procédure Pénale de la Fédération de Russie et de la loi fédérale sur le placement en détention
provisoire des suspects et personnes accusées d’avoir commis un crime), en retenant Nadia Savchenko
prisonnière, la Fédération de Russie a également violé un grand nombre d’articles de conventions
auxquelles cette dernière est partie.
1. Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966
En ce qui concerne la liberté et la sécurité de Mme Savchenko, ainsi que les garanties
procédurales et les droits qui lui sont accordés, les autorités russes ont porté atteinte aux articles
suivants du Pacte :
ð Article 9 : qui reconnaît les droits à la liberté et à la sécurité de la personne. Il interdit l'arrestation
et la détention arbitraires, exige que toute privation de liberté soit soumise à la loi et oblige les
parties à permettre à ceux privés de leur liberté de contester leur emprisonnement devant les
tribunaux.
ð Articles 9.3 et 9.4 : qui imposent des garanties procédurales en matière d’arrestation exigeant que
toute personne arrêtée soit rapidement informée des charges retenues contre elle et qu’elle soit
aussitôt traduite devant un juge. Les mêmes dispositions restreignent également l'utilisation de la
détention provisoire qui ne peut être imposée que dans des circonstances exceptionnelles et pour
une période aussi courte que possible.
ð Article 14 : qui reconnaît et protège le droit à la justice et à un procès équitable.
ð Article 14.1 : qui établit certaines règles fondamentales – chaque personne est égale devant les
tribunaux et présumée innocente et une audience publique doit avoir lieu devant un tribunal
compétent, indépendant et impartial, dont le jugement ou la décision doit être rendue publique.
Ces obligations s’appliquent à la fois aux audiences pénales et civiles, à tous les cours et tribunaux.
2. Convention européenne des droits de l’homme du 4 novembre 1950
En ce qui concerne la liberté et la sécurité de Mme Savchenko, ainsi que les garanties
procédurales et les droits qui lui sont accordés, les autorités russes ont porté atteinte aux articles
suivants de la Convention :
ð Article 5 : qui prévoit que chacun a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Le droit à la
liberté n’est susceptible d’atteinte qu’en raison d’une arrestation légale ou la détention dans
certaines autres circonstances, telles que l'arrestation sur des soupçons raisonnables d'un crime. Cet
article fournit également aux personnes arrêtées, le droit d'avoir rapidement accès au dossier
judiciaire pour déterminer la légalité de l'arrestation ou de la détention, d'être jugé dans un procès
dans délai raisonnable ou d’être libéré en attendant le procès, ainsi qu’avec le droit à une
indemnisation en cas d'arrestation ou de détention en violation de cet article.
Cosmopolitan Project Foundation & Association des Etudiants Ukrainiens en France 23 rue Greneta 75002 Paris info@cosmospolitan-­‐project-­‐foundation.org -­‐http://www.cosmopolitan-­‐project-­‐foundation.org [email protected] -­‐ http://aeuf.org/ 8 ð article 6 : qui protège le droit à un procès équitable dans les affaires pénales et/ou portant sur les
droits civiques. L’article garantit à l’accusé le droit à une audience publique devant un tribunal
indépendant et impartial dans un délai raisonnable, la présomption d'innocence, et un nombre de
droits minimaux pour les personnes accusées dans une affaire criminelle : période suffisante et les
moyens pour préparer la défense, l'accès à une représentation juridique, droit d'interroger les
témoins contre eux ou de les faire examiner, droit à l'assistance gratuite d'un interprète.
L’Affaire devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme
Le 9 Février 2014 l’avocat de Nadia Savchenko dépose une demande en indication de mesures
conservatoires devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme en demandant l’application de
mesures provisoires en vertu de l’article 39 du règlement de la Cour sur le fondement des articles 5
(droit à la liberté et à la sûreté) et 6 (droit à un procès équitable dans un délai raisonnable) de la
Convention Européenne des droits de l’Homme. Il était fait état des risques de traitement
inhumains qui pourraient résulter d’une alimentation forcée.
La Cour Européenne des Droits de l’Homme a rendu sa décision le 14 Février, refusant
l’application des mesures provisoires demandées au motif que la grève de la faim menée par Nadia
Savchenko était volontaire et ne pouvait être considérée comme la justification pour l’application
de telles mesures, vu que la personne retenue causait les dommages pour elle-même16. Néanmoins
le rejet de cette demande en indication de mesures conservatoires n’est pas antinomique avec
l’ouverture d’un nouveau recours Savchenko vs. Russie.
3. La Convention de Genève du 12 août 1949 sur les prisonniers de guerre
La troisième Convention de Genève du 12 août 1949 porte sur la protection des prisonniers capturés lors
de conflits armés tant nationaux qu’internationaux. En effet, nonobstant les hésitations sur la qualification
du conflit ukrainien actuel en raison de l’absence d’engagement officiel de la Russie, Mme Savchenko doit
être considérée, à la lumière de l’article 4 de la convention, comme une prisonnière de guerre.
ð Article 17 : Nadia Savchenko a été interrogée sur les informations qu’elle possède concernant le
positionnement des forces ukrainiennes en violation flagrante de cet article.
ð Article 84 : la justice russe n’a pas offert les garanties essentielles d’indépendance et d’impartialité
comme l’exige l’article 84 de la Convention.
ð Article 105 : cet article oblige la Puissance détentrice à fournir d'office un avocat à l'inculpé quand
ce dernier ou la Puissance protectrice n'en a pas choisi, à charge de cette dernière. Le détenu a ainsi
le droit, aux offices d'un interprète compétent et il doit être avisé de ces droits en temps utile,
avant les débats, par la Puissance détentrice.
16
http://hudoc.echr.coe.int/webservices/content/pdf/003-­‐5014927-­‐6157206 Cosmopolitan Project Foundation & Association des Etudiants Ukrainiens en France 23 rue Greneta 75002 Paris info@cosmospolitan-­‐project-­‐foundation.org -­‐http://www.cosmopolitan-­‐project-­‐foundation.org [email protected] -­‐ http://aeuf.org/ 9 IV.
Les appels de la communauté internationale
Les appels de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe
•
Déclaration adoptée le 26 Janvier par la Commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe17 « La Commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées de l’Assemblée parlementaire du
Conseil de l’Europe (APCE) exhorte les autorités russes à remettre immédiatement en liberté l’un de ses
membres, Nadia Savtchenko. Dans une déclaration adoptée aujourd’hui lors de sa réunion, la commission
a indiqué : Mme Savtchenko a été capturée le 18 juin 2014 par les séparatistes alors qu’elle servait au sein
des forces gouvernementales ukrainiennes engagées dans le conflit de l’Est de l’Ukraine. Peu après, elle a
été transférée en Russie, selon des indications crédibles, où les autorités la maintiennent depuis en
détention provisoire. Elle a été mise en examen pour complicité dans la mort de deux journalistes russes,
qui ont péri lors de combats dans l’Est de l’Ukraine, mais elle n’a pas encore été jugée. Bien qu’elle soit
détenue depuis plus de sept mois, les autorités russes n’ont pas présenté d’éléments de preuve crédibles
pour étayer les charges qui pèsent sur elle. En octobre, Mme Savtchenko a été élue députée au Parlement
ukrainien, puis désignée comme membre de la délégation ukrainienne à l’Assemblée parlementaire. Depuis
le 13 décembre, elle poursuit une grève de la faim afin de protester contre son maintien en détention. C’est
pourquoi, son état de santé s’est considérablement dégradé. Son maintien en détention ne fera que rendre
plus difficiles les efforts politiques déployés pour rechercher une solution au conflit dans l’Est de l’Ukraine
.La Commission exhorte les autorités russes à libérer toute autre personne qui, après avoir été faite
prisonnière au cours du conflit de l’Est de l’Ukraine, serait encore détenue par elles en violation des
dispositions du protocole de Minsk sur la remise en liberté des prisonniers. »
•
Résolution 2028 adoptée le 27 Janvier 2015 en 4e séance18 -­‐ Point 13.3 de la résolution « l’Assemblée exhorte toutes les parties à libérer et échanger tous les prisonniers de guerre et les personnes
emprisonnées en raison du conflit, et à échanger les dépouilles mortelles »
•
Résolution 2034 adoptée le 28 Janvier 2015 en 6e séance19 -­‐ Point 11 de la résolution « L’Assemblée exprime sa vive inquiétude concernant l’incarcération et l’inculpation par la Fédération de
Russie de Mme Nadia Savtchenko, qui est à présent membre de l’Assemblée. L’Assemblée estime que son
transfert par des insurgés ukrainiens vers la Fédération de Russie et son emprisonnement ultérieur par les
autorités russes constituent une violation du droit international que l’on peut qualifier, de facto,
d’enlèvement. Elle demande que la Fédération de Russie respecte ses obligations de droit international, en
tant que Partie à l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe et son Protocole,
en vertu desquels Mme Nadia Savtchenko, membre de l’Assemblée parlementaire, jouit d’une immunité
parlementaire européenne. L’Assemblée appelle les autorités russes à libérer Mme Savtchenko dans les 24
heures et à garantir son retour en Ukraine ou la remettre à un pays tiers. »
17
http://www.assembly.coe.int/nw/xml/News/News-­‐View-­‐FR.asp?newsid=5386&lang=1&cat=134 http://assembly.coe.int/nw/xml/XRef/Xref-­‐XML2HTML-­‐FR.asp?fileid=21480&lang=FR 19
http://assembly.coe.int/nw/xml/XRef/Xref-­‐XML2HTML-­‐FR.asp?fileid=21538&lang=FR 18
Cosmopolitan Project Foundation & Association des Etudiants Ukrainiens en France 23 rue Greneta 75002 Paris info@cosmospolitan-­‐project-­‐foundation.org -­‐http://www.cosmopolitan-­‐project-­‐foundation.org [email protected] -­‐ http://aeuf.org/ 10 Les appels de la Présidente de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe
La présidente de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe, Mme Anne Brasseur a également
demandé à Sergueï Narychkine, Président de la Douma d’Etat de Russie, son assistance pour obtenir la
libération d’urgence de Nadia Savtchenko dans une déclaration en date du 21 Janvier 201520, demande
réitérée le 12 Février 201521 et le 3 mars 201522, date à laquelle Mme Anne Brasseur a exprimé qu’il restait
« peu de temps » pour sa libération.
Les appels de la Haute-Représentante et Vice-Présidente de la Commission
•
Déclaration de Mme Federica Mogherini Haute Représentante et Vice-­‐présidente de la Commission sur le maintien en détention de Nadia Savchenko le 4 mars 201523. « Aujourd'hui, un tribunal moscovite a rejeté un nouveau recours de Nadia Savchenko contre sa détention
illégale en Fédération de Russie, qu'elle avait formé en invoquant l'immunité que lui confère son statut de
membre de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe. À une majorité écrasante, le Comité des
ministres du Conseil de l'Europe a adopté ce matin à Strasbourg une décision demandant la libération
sans délai de Mme Savchenko. Mme Savchenko est en grève de la faim depuis 82 jours. Après une si longue
période, elle risque des séquelles irréversibles, voire la mort. La Verkhovna Rada (Conseil suprême)
d'Ukraine a une nouvelle fois demandé la libération de toute urgencede Nadia Savchenko, afin que ses
jours ne soient pas mis en danger. Une fois encore, je joins ma voix à toutes celles qui appellent les
autorités russes à libérer immédiatement Mme Savchenko pour des raisons humanitaires. Je demande
également la libération de M. Oleg Sentsov et de tous les autres prisonniers ukrainiens détenus
illégalement. L'ensemble de mesures en vue de l'application des accords de Minsk et l'engagement de
libérer tous les otages et les personnes détenues dans le cadre du conflit ukrainien seraient ainsi respectés. »
•
Déclaration de Dider Reynders, Président du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, à Bruxelles le 27 mars 201524 « Comme toute personne relevant de la juridiction des Etats membres, Madame Savchenko doit bénéficier
pleinement des garanties offertes par les instruments pertinents du Conseil de l’Europe, en particulier la
Convention européenne des Droits de l’Homme. L’enlèvement, le transfert illégal et la détention illégale de
personnes sont des pratiques inacceptables. La Belgique préside le Comité des Ministres du Conseil de
l’Europe. Notre pays a œuvré pour permettre aux protagonistes concernés de trouver une solution
acceptable pour tous. La Belgique avait espéré, en vain, que Madame Savchenko serait libérée dans le cadre
des derniers accords conclus à Minsk. »
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http://www.assembly.coe.int/nw/xml/News/News-­‐View-­‐FR.asp?newsid=5378&lang=1&cat=15 http://www.assembly.coe.int/nw/xml/News/News-­‐View-­‐FR.asp?newsid=5427&lang=1&cat=15 22
http://www.assembly.coe.int/nw/xml/News/News-­‐View-­‐FR.asp?newsid=5452&lang=1&cat=15 23
http://eeas.europa.eu/statements-­‐eeas/2015/150304_02_fr.htm 24
http://www.coe.int/fr/web/portal/belgianchairmanship/-­‐/asset_publisher/19FYqiXaSOVg/content/didier-­‐reynders-­‐
calls-­‐on-­‐russia-­‐to-­‐release-­‐nadia-­‐savchenko-­‐and-­‐other-­‐ukrainian-­‐citizens?inheritRedirect=false 21
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Nadia Savchenko, une prisonnière politique
« In Russian courts, acquittals do not happen. They are handed down only occasionally, and certainly, they cannot be rendered
in political cases. Therefore, we must soberly and clearly understand that in such cases we must not rely on the politics, or just
the proceedings. We need to find a synergic combination of both in order to bring the issue to the top so that everyone
understands that it is not the judge of the Voronezh Court, but Putin himself who is responsible for the decision on the case”
déclaration de l’avocat de Nadia Savchenko, Mark Feygin.
Le 14 Décembre 2014, Nadia Savchenko a commencé une grève de la faim qu’elle ne cessera qu’à sa
libération ou au dernier jour de sa vie en Russie. Tout comme d’autres otages retenus en Russie - tels que
Oleg Sentsov, Alexey Chirniy, Alexandr Kolchenko, Gennadiy Afanasyev - Nadia Savchenko est une
prisonnière politique du pouvoir actuel. Sa libération, ainsi que celle des autres otages emprisonnés en
raison du conflit russo-ukrainien avait été prévus dans les accords de Minsk 2, négociés avec la Russie par
le Président français et la Chancelière allemande mais ne sont toujours pas appliqués.
A l’heure où les premières discussions sur l’application des accords de Minsk ont débuté et alors que Nadia
Savchenko est à plus de 100 jours de grève de la faim, le comportement de non-droit de la Russie du point
de vue du droit international remet en cause l’équilibre et la stabilité politique européenne. Alors que le
conflit ne cesse de s’étendre et que la Russie ne cesse d’envoyer des hommes et des armes à l’Est de
l’Ukraine, contraindre la Russie à libérer Nadia Savchenko et les autres prisonniers politiques représente
aujourd’hui l’espoir de la voir faire son premier pas pour la paix en Europe.
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Qui sommes nous ?
Cosmopolitan Project Foundation ONG de soutien à la société civile dans les pays en mutation démocratique (Érythrée, Hongrie, Iran, Tunisie, Ukraine, Syrie, Birmanie), nous travaillons sur l'Ukraine depuis 2004. Depuis 2004, nous faisons un travail de plaidoyer et d’information concernant la situation politique en Ukraine auprès des décideurs et journalistes et accompagnons la communauté ukrainienne dans ses démarches. Plus récemment, nous avons notamment organisé deux missions d'observations électorales de la société civile en Ukraine en mai et octobre dernier avec l'envoi de plus d'une centaine d'observateurs provenant d'Europe et d'Amérique du Nord, en lien avec le Ministère des Affaires étrangères français, l'Ambassade d’Ukraine en France, les alliances françaises, la communauté ukrainienne en France et au Canada et les universités ukrainiennes. Cosmopolitan Project Foundation travaille avec plusieurs autres ONG dans le cadre de projets communs en Ukraine. Cosmopolitan Project Foundation a ouvert un bureau ukrainien à Kiev le 20 février dernier. L’Association des Étudiants Ukrainiens en France Créée le 9 mai 1978, c’est la seule organisation représentative des Étudiants Ukrainiens ou récemment diplômés en France. Initialement à vocation culturelle elle a pris un nouveau tournant depuis le début de la Révolution Ukrainienne de Novembre 2013. Aujourd’hui elle se donne pour but de défendre les intérêts des étudiants ukrainiens ou d’origine ukrainienne en France que ce soit sur les aides financières (bourses), de logement ou de toutes autres problématiques relatives à des démarches administratives pour les titres de séjour, les inscriptions universitaires, ou autre. Depuis la Révolution Ukrainienne cette association est devenue le point de ralliement des étudiants ukrainiens vivant en France. L’association fournit également un cadre propice pour se retrouver plusieurs fois par an à l’occasion de soirées ou de réceptions, d’être tenu au courant des diverses actions menées par la diaspora ukrainienne et de participer aux différents évènements organisés en France. Cosmopolitan Project Foundation & Association des Etudiants Ukrainiens en France 23 rue Greneta 75002 Paris info@cosmospolitan-­‐project-­‐foundation.org -­‐http://www.cosmopolitan-­‐project-­‐foundation.org [email protected] -­‐ http://aeuf.org/ 13