Promouvoir les réformes économiques Processus de privatisation

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Projet d’Appui à la Gestion Economique
N0 035
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Processus de privatisation au Burundi
Promouvoir les réformes économiques
Juillet 2008
I. Le Gouvernement est engagé dans le processus de privatisation
Durant deux jours 3 et 4 juillet 2008, un forum sur la privatisation a réuni les experts du Service Chargé des entreprises Publiques SCEP, les
Cadres des ministères économiques et des entreprises publiques. Il a permis de passer en revue différents thèmes aussi riches que variés autour
de la question de la privatisation qui dans presque tous les pays, est devenue un domaine important de politique économique.
Ce forum a été ouvert par le Deuxième vice président de la République du Burundi Son Excellence Monsieur Ntisezerana Gabriel.
Il a été clôturé par le Ministre à la présidence chargé de la bonne
gouvernance, de la privatisation, de l’inspection générale de l’Etat
et de l’administration locale, Monsieur Nivyabandi Martin.
Les deux autorités ont rappelé que la politique de privatisation
introduite au Burundi depuis 1991 s’articule notamment autour
de quatre principaux objectifs : l’amélioration de l’efficacité de la
gestion, la réduction ou la suppression des subventions directes et
indirectes, la modernisation de l’outil de production et la promotion du secteur privé.
Pour atteindre ces objectifs, le Gouvernement a adopté la stratégie
à deux niveaux complémentaires à savoir le redressement par
l’approche de l’assistance/conseil en gestion courante et le redressement par l’approche de la réforme structurelle notamment
par la privatisation.
La question de privatisation revêt plusieurs dimensions qui sont
de nature économique et financière, juridique et politique, sociale
et sociologique. Les thèmes qui ont fait objet des échanges étaient
de trois catégories. La première catégorie a porté sur deux thèmes
d’ordre général à savoir : « Les expériences en matière de privatisation : cas du Burundi et cas du Rwanda ». La deuxième catégorie était relative aux thèmes spécifiques en rapport avec la réforme/privatisation de la filière caféicole et du secteur thé au Burundi. La troisième catégorie a porté sur la privatisation de grandes entreprises
publiques comme l’Office National des Télécommunications (ONATEL) du Burundi, une grande société de télécommunication du
Sénégal dénommée SONATEL, les entités du secteur de l’eau et de l’électricité.
Les expériences en privatisation des entreprises publiques des autres pays, en l’occurrence le Cameroun, le Kenya, le Rwanda, le
Sénégal, et la Tanzanie ont été données. Il a été noté que le cadre légal et institutionnel constituait un dispositif important pour
garantir le succès de la privatisation. Les contraintes rencontrées semblent similaires partout dans nos pays d’Afrique : la peur de
l’échec de la privatisation, la peur de la perte d’emplois et le problème de financement de la privatisation
Toutefois, les conditions de succès pour faire face aux contraintes sont fonction des objectifs visés des stratégies mises en place et
des avantages qu’on tire de la privatisation des entreprises concernées.
Les différents conférenciers ont indiqué que parmi les facteurs clés de succès les plus importants sont axés sur l’existence d’un cadre
légal et institutionnel efficace, l’implication de tous les acteurs ou intervenants dans le processus de privatisation, la formulation
d’objectifs clairs attendus de la mise en œuvre du processus de privatisation, le choix d’une stratégie appropriée de privatisation sur
base des conclusions du diagnostic probable, la mise en place d’un système de régulation efficace, le suivi de la privatisation avant et
après le processus, une stratégie de communication qui précède et accompagne le processus en direction de l’ensemble des parties
prenantes au processus.
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II. Principales recommandations :
A l’issue des échanges, les participants au Forum, ont formulé les recommandations. Votre bulletin les a regroupé en cinq grands ensembles.
En direction des producteurs de biens et services
- Assurer l’encadrement des annonciations d’agriculteurs : limiter les risques de corruption
- Distribuer au public les lois sur la privatisation, textes spécifiques
- Communiquer la liste des SPP à privatiser
- Faire auditer systématiquement les
comptes des SPP
- Elaborer un programme complet
de privatisation à moyen ou à court
terme pour permettre aux privés de s’y
préparer à temps
- synthétiser les lois et les simplifier pour
un outil efficace des organes chargés
de la privatisation
- Assurer la transparence dans la conduite du processus de privatisation
pour informer largement le public
- Impliquer les partenaires sociaux dans
le processus de privatisation (concept,
mise en œuvre, évaluation)
- Supprimer l’opacité (privilégier
l’approche participative)
- Impliquer les producteurs dans le processus de privatisation
(sensibilisation, encadrement…)
- Lever les contraintes actuelles et assouplir et améliorer et les
procédures
- Lever les insuffisances constatées
En directions des partenaires sociaux
- Lever les incompréhensions
- Débat ouvert sur les différents aspects de la privatisation
- Procéder à la privatisation des entreprises avant la faillite de
ces dernières
- Créer un environnement favorable à la privatisation effective
- Alerter à temps sur la vie de l’entreprise, redressement au moment opportun
- Vulgariser les principes, les objectifs, les contenus, les stratégies
de réforme des SPP
- Informer le public sur la santé financière des SPP pour pouvoir
adopter des réformes adaptées
- Elaborer une politique de communication autour des réformes
- Assainir les comptes des SPP à réformer notamment par la
compensation directe des dettes et des créances croisées entre
l’Etat et les SPP pour les cas qui le justifient.
- Améliorer le cadre légal et réglementaire en s’inspirant des expériences des autres pays
- Assurer la transparence dans le processus de privatisation pour
éviter des susceptibilités éventuelles
- organiser des séances de sensibilisation des parties prenantes
au processus de privatisation
- Restructuration financière des SPP pour nettoyer les bilans
- Prise en charge des pertes de change après analyse approfondi
des situations spécifiques des SPP
En direction du SCEP
- Assainir et redresser la gestion de la REGIDESO avant
d’appliquer le processus de réforme proprement dit
- Mettre en place tous les mécanismes pour améliorer l’environnement de la gestion des entreprises
- Bien analyser les mécanismes de libéralisation qui ne gênent
pas la privatisation des entreprises
- Continuer le débat sur les différents processus de privatisation
des SPP identifiées
- Libéraliser des secteurs d’activités des SPP pour leur permettre
d’évaluer dans le milieu concurrentiel
- La privatisation n’est pas la solution aux problèmes du secteur
de l’eau et de l’électricité
- Il faut que le Gouvernement soutienne les mesures à court et à
moyen terme envisagées pour la REGIDESO
- Il faut ensuite que parallèlement le Gouvernement aille très
rapidement dans la libéralisation pour ouvrir le secteur aux
investisseurs et augmente, ainsi le taux de desserte et de raccordement en électricité
- Mettre a jour les comptes et les auditer avant la privatisation
- Instaurer un dialogue permanent entre les organes privatiseurs
et le secteur prive (repreneurs potentiels)
- Négocier le plan social entre les partenaires intéresses
- Manifester un engagement réel de la part des dirigeants des
SPP et des autorités concertés par les processus de privatisation
- Accélérer la privatisation des Sociétés sous pression concurrentielle nationale et internationale.
En direction des syndicats
- Pour les syndicats des SPP a privatiser biens manifester leurs
objectifs réels et bien réfléchir sur le plan social souhaite.
- Faire une répartition du capital de façon a favoriser l’investisseur
stratégique et permettre le développement des entreprises privatisées.
En direction du gouvernement
- Créer un environnement permettant l’intégration des entreprises dans la compétitivité nationale et internationale car aux
rythmes de l’évolution des affaires il n’y a pas bien d’hésiter.
- Proposer aux décideurs les stratégies appropriées pour la réussite des processus de privatisation.
- Prendre en compte les intérêts économiques nationaux dans les
stratégies de privatisation.
- Prendre les précautions nécessaires pour éviter des dérapages
éventuels
- Tirer les leçons du passe pour améliorer les processus de privatisation
- Réfléchir sur les meilleures stratégies de privatisation et assurer
le suivi d’après privatisation.
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iii. Les expériences d’ailleurs
RWANDA
Monsieur le secrétaire exécutif du bureau de
la privatisation au Rwanda , vous venez de
prendre part à ce forum sur la privatisation,
quelle sont les grandes différences que vous
faites entre le processus burundais et le processus rwandais de privatisation ?
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de l’emploi et nous voulons intéresser
aussi bien les investisseurs nationaux
qu’internationaux c’est pas toujours facile.
Est il possible de privatiser sans supprimer
les emplois ?
Sur ce je préfère être réaliste pour dire que
la réponse à cette question n’est pas aisée.
Toutefois, quand je me réfère aux expériences que nous venons d’écouter pendant
ce forum, je trouve que c’est possible moyennant quelques sacrifices. D’une part les
syndicats peuvent bien négocier leur plan
social avec le gouvernement et d’autre
part le repreneur peut faire une bonne offre pour garder les effectifs en place quitte
à les répartir dans de nouvelles branches
de l’activité qu’il vient d’acheter. Cependant, je voudrais dire aux gens que le maintien des effectifs à son coût que le trésor
public doit supporter.
Dans ces conditions que faire puisque les
entreprises sont du domaine de la propriété
publique ?
Je vois cinq grandes différences et trois
grandes ressemblances. Au niveau des différences, je note d’abord que le processus
burundais a démarré longtemps avant le
processus dans notre pays, le Rwanda. A
chaque privatisation, le SCEP a besoin
d’un décret particulier pour chaque entreprise alors qu’au Rwanda il y a eu un seul
décret pour toute une liste d’entreprises à
reformer. Au niveau des organes qui pilote
la privatisation , le Burundi a le comité interministériel de privatisation et le conseil
des ministres à la fois alors qu’au Rwanda, il y a le secrétariat et puis le conseil
du gouvernement . Dans le cas précis des
télécommunications, la libéralisation est
venue avant la privatisation. Et en fin au
Rwanda nous avons une liste d’entreprises
à liquider parce qu elles ont été tellement
affectées par la guerre qu’on ne peut pas
espérer les privatiser. Ici au Burundi, vous
préférez attendre le décret de privatisation
pour pouvoir dire que telle entreprise est
à privatiser, alors qu’au Rwanda chaque
entreprise publique connaît son statut en
la matière. Les dirigeants d’entreprise ont
un mandat qui s’inscrit dans le choix du
gouvernement.
Au niveau des ressemblances, les deux
processus sont tous conduits par les gouvernements en place. Il y a aussi des points
communs au niveau des objectifs poursuivis par la privatisation. Et puis nous
sommes tous préoccupés par la question
Le plus important est de bien communiquer sur les avantages de la privatisation.
Il faut insister sur le fait que la privatisation est une des façons de reformer une
économie et non pas la seule. A côté de
l’aspect financier il faut aussi voir le côté
pérennité de l’activité et modernisation
de l’économie. L’arrivée de nouveaux investisseurs nous permettra d’accéder à
de nouvelles technologies. Le Rwanda
vient d’abriter un forum régional sur
l’investissement cela nous a permis de
comprendre qu’il est temps d’élargir nos
horizons, notre espace économique
SENEGAL
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Monsieur Diallo ….. vous venez de partager
votre expérience sur la privatisation des télécommunications avec certains pays africains
dont le Burundi, quelles grandes différences
avez-vous dégagé ?
Dans les deux situations, il y a une volonté
de dialoguer mais il y a une grande différence au niveau de la volonté politique.
Au Sénégal, le dialogue a démarré avec le
processus de privatisation alors qu’ici je
remarque que cette volonté de dialoguer
intervient un peu plus tard. Apparemment
on veut dialoguer avec les autres acteurs
parce qu’on n’a pas pu privatiser sans leur
participation. A mon avis, il n’est jamais
trop tard pour bien faire.
L’autre différence se situe au niveau de
l’information des acteurs sur l’état des entreprises publiques et leur performance.
Les gens pensent que les entreprises sont
trop bonnes pour être vendues ou qu’elles
sont très malades. C’est un mauvais point
de départ pour un processus de réforme
notamment en matière de privatisation.
J’ai été particulièrement touché par
l’absence de certains audits, de certains
indicateurs de performance aussi bien à
l’ONATEL comme à la REGIDESO
qu’a évoqué le SCEP. En l’absence de
ces données, il est difficile d’ouvrir un dialogue franc avec les syndicalistes.
Vous étés vous-mêmes syndicaliste et vous
avez appuyé la privatisation dans votre pays
alors que vos collègues burundais s’y opposent
dans des termes à peine voilés, comment expliquez vous cette différence ?
Permettez moi de nuancer votre question
en soulignant trois aspects importants
qu’il ne faut pas négliger dans tout processus de privatisation. Le gouvernement
a la responsabilité de réguler l’activité
économique cela ne veut pas dire qu’il n’a
pas d’intérêt. Il est intéressé par le payement des dividendes, des taxes et des
impôts. Quant aux syndicalistes ils sont
ouvertement intéressés par l’emploi et
leurs salaires. Les investisseurs eux sont
intéressés par l’activité et les bénéfices
qu’ils peuvent réaliser. Ainsi donc, la privatisation est une scène de lutte d’intérêt.
Il faut le reconnaître et le dire ouvertement.
Pour s’opposer à la réforme les syndicats
doivent proposer d’autres alternatives
pour permettre au gouvernement de faire
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des recettes et aussi aux travailleurs de garder les emplois. Il ne suffit pas de s’opposer pour s’opposer. Il faut pouvoir formuler une
offre valable, sinon la loi permet au propriétaire d’une entreprise publique ou privée de la réformer. Cela est valable en Afrique et
ailleurs. Je constate qu’il y a beaucoup d’hésitations, une volonté politique mitigée en témoigne les retards dans les choix et décisions,
cela a un coût supplémentaire car nous perdons les avantages comparatifs. Prenez le cas de l’ONATEL à un certain moment il était
seul sur le marché et maintenant il partage la clientèle avec l’ensemble des opérateurs du mobile et du fixe.
Avez-vous un message en direction des syndicalistes africains en général et les burundais en particulier ?
Je n’ai pas de leçons à formuler. Mais je voudrais insister sur quatre éléments essentiels. Ceux qui ont pris des crédits pour investir
dans le secteur public n’ont pas eu tord comme certains collègues semblent vouloir l’insinuer. Et les travailleurs en ont plus bénéficié
par rapport au reste des citoyens. Aujourd’hui le monde est globalisé au profit des grands groupes lesquels sont aussi le résultat des
privatisations, des acquisitions, des fusions et autres types de réformes économiques. Il faut donc s’inscrire dans cette dynamique
mondiale au lieu de s’accrocher aveuglement à des approches qui n’attirent plus les investisseurs.
Ce n’est pas toujours que l’Afrique va bénéficier des annulations de la dette comme en ont parlé nos amis du Cameroun. Les syndicats
ont toujours eu cette responsabilité historique d’éclairer les masses laborieuses.
AUTRES EXPERIENCES
le kenyan donnant
l’expérience de son pays dans la
privatisation de la filière thé.
Expérience du Cameroun dans la privatisation
du secteur eau et électricité.
Expérience de la Tanzanie
dans la privatisation de la filière café.
IV. Points de vue d’une syndicaliste
La nature des
recommandations démontre
que le processus
de privatisation
du Burundi est
très lent et très
opaque pourquoi
voulez
vous que les
syndicats
se
laissent emporter. Le cas du Sénégal est assez formateur
sur ce point. Le SCEP conseille le gouvernement, dans ces
conditions il ne peut pas représenter le personnel des entreprises à privatiser.
Le besoin d’argent pour le gouvernement conduit ce même
gouvernement à concurrencer ou ruiner ses entreprises.
Prenez le cas de AIR Burundi qui vend des tickets à crédits
au gouvernement et que ce dernier fait des mois pour rembourser. Le gouvernement qui accorde plus de cinq licences
d’exploitation de la téléphonie au moment où il cherche à
privatiser l’ONATEL.Le montant des impayés de l’Etat
en vers la Regideso etc…
En peu de mots, nous ne sommes pas contre les réformes
notamment la privatisation, mais les syndicats exigent
une implication suffisante à toutes les phases du processus. Les syndicats veulent une réforme transparente et expliquée avec des chiffres actualisées. Notre sentiment est
que le gouvernement veut se débarrasser des individus à
n’importe quelle prix ou alors protéger certains mauvais
gestionnaires sans se soucier de la pérennité de l’activité
et des emplois. Au contrairement à d’autres pays la privatisation au Burundi va renforcer la pauvreté du pays et la
misère des citoyens.
Conception : PAGE • Photos : Jooris Ndongozi Production • Impression : Mister Minute Service
Quelles leçons apprises de ce forum, madame la syndicaliste de
Air Burundi ?
Nous avons beaucoup appris de cette rencontre, mais il
faut remarquer qu’ici chez nous le SCEP et le comité interministériel de privatisation travaillent en vase clos en
ignorant les autres partenaires
notamment les
syndicats.

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