Thérapeutique et technique en situations d - École du Val-de
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Thérapeutique et technique en situations d - École du Val-de
&Armées Médecine Musée du Val-de-Grâce Revue du Service de santé des armées N°1 TOME 36 ISSN 0300-4937 N°1 Février 2008 MÉDECINE ET ARMÉES Revue du Service de santé des armées SOMMAIRE Pages T. 36 - n° 1 - Février 2008 Direction centrale du Service de santé des armées Médecine et Armées 1, Place Alphonse Laveran, 75230 Paris Cedex 05. DIRECTEUR DE LA PUBLICATION MGI PH. LOUDES THÉRAPEUTIQUE ET TECHNIQUE EN SITUATIONS D’URGENCE 3 11 • Remplissage vasculaire dans le cadre du choc hémorragique : modèle expérimental comparant le sérum salé isotonique et une association sérum salé hypertonique/hydroxyéthylamidon (hyperhes®). P.RAMIARA, A. ROCHE, D. BLAYAC, D. LAMBERT, J.-P. CARPENTIER. 19 • Anesthésie locorégionale intraveineuse : technique ancienne encore d’actualité en 2006. G. DOSSEH, P. RAMIARA, V. MARDELLE, P. AUSSET, R. PÉTROGNANI, J.-P. CARPENTIER. 25 • Évaluation de l’outil ultrasonique dans les mains d’un urgentiste. Introduction de la notion de triage ultrasonique aux urgences. F. GRÉGOIRE. 33 • Évaluation de l’utilisation du tube laryngé (LTS II TM) par les personnels des services médicaux d’unité. P. RAMIARA, S. BÉNÉFICE, É. MEAUDRÉ, A. POLYCARPE, J.-P CARPENTIER. 39 • Thrombolyse pré-hospitalière par ténectéplase d’une embolie pulmonaire massive compliquée d’un arrêt cardiaque prolongé. J. LEYRAL, D. MEYRAN, C. BAR, T. ACZEL, Y. LE GOFF, J. MARCHI, P. LE DRESS. 43 • Transfusion sanguine à bord d’un SNLE : un contexte opérationnel original. E. DELMOND, T. DAVID, B. ÉLIE, R. ABILIOU. 51 • Évolution de la réanimation dans les armées : à propos du conflit algérien. G. DUCHESNE †. RÉDACTEUR EN CHEF MG F. FLOCARD – Tél. : 01 40 51 47 01 RÉDACTEURS EN CHEF ADJOINTS MC É. DARRÉ – MC A. SPIEGEL. SECRÉTARIAT DE RÉDACTION Mme M. SCHERZI - Melle L. TOUCHANE Tél. : 01 40 51 47 44 Fax : 01 40 51 51 76 Email : [email protected] TRADUCTION MC M. AUDET-LAPOINTE COMITÉ DE RÉDACTION MCS B. BAUDUCEAU – CDC A. BENMANSOUR – MCS A.-X. BIGARD – PHC P. BURNAT – MCS J.-D. CAVALLO – MC É. DARRÉ– MCS J.-M. DEBONNE – MCS S. FAUCOMPRET – MG R. JOSSE – VEGI J.-C. KERVELLA – MCS. J.-M. ROUSSEAU – MCS D. VALLET. COMITÉ SCIENTIFIQUE MGI J.-L ANDRÉ – MGI D. BÉQUET – MGI P. BINDER – MG G. CAMILLERI – MGA Y. P. JEANDEL – MGI F. EULRY – MG A. GALÉANO – MGI J.-F. GOUTEYRON – MGI G. MARTET – MG J. MARTIN – MGI J.-P. MENU – MG M. MORILLON – MGI B. ROUVIER – PGI C. RENAUDEAU – GB C. TILLOY – MGI J.E. TOUZE – MG M. VERGOS. CONSEILLERS HONORAIRES MGI P H . ALLARD – MGI M. BAZOT – MGI B. BRISOU – MCS A. CHAGNON – MGI L. COURT – MGI J.-P. DALY – MGA J.DE SAINT JULIEN - MGI R. FORISSIER – MGI M. FROMANTIN – MGI CL. GIUDICELLI – MGI G. GUELAIN - CDG P H . KAHL – MGI J. KERMAREC – MGI CH. LAVERDANT – MGI P. LEFEBVRE – PGI LECARPENTIER – VEGI R. LUIGI – VEGI C L . MILHAUD – MGI J. MINÉ – MCS CL. MOLINIÉ – MCS J.-L. PAILLER – MG G. POYOT – MGI P. QUEGUINER – MGI J.-M. VEILLARD – MGI J. VIRET – MGI R. WEY. ÉDITION Délégué à l'information et à la communication de la Défense (DICoD) - BP 33, 00450 Armées. Tél. : 01 44 42 30 11 ABONNEMENT (5 NUMÉROS PAR AN) ECPAD/Service abonnements, 2 à 8 route du Fort, 94205 IVRY-SUR-SEINE Cedex. Tél. : 01 49 60 52 44 - Fax : 01 49 60 52 68. Tarif des abonnements/1 an : • Métropole : 36,50 € • DOM-TOM par avion : 59,70 € • Étranger par avion : 70,00 € • Militaires et - 25 ans Métropole : 25,00 € • Militaires et - 25 ans DOM-TOM : 48,00 € Prix du numéro : 7,50 € Les chèques sont à libeller à l’ordre de l’agent comptable de l’ ECPAD. IMPRIMEUR ET ROUTAGE Pôle graphique de Tulle – BP 290 –19007 Tulle Cedex. Tél. : 05 55 93 61 00 Commission paritaire N° 0306 B 05721 ISSN : 0300-4937 COUVERTURE Ghislaine PLOUGASTEL [email protected] • Le Novoseven ® peut-il être utile en opex ? Analyse de la littérature. X. ZIRPHILE, B. DEBIEN, J.-P. PÉREZ, B. LENOIR. PRATIQUE MÉDICO-MILITAIRE 55 • Évaluation des pratiques et des besoins en matière d’éducation pour la santé dans les armées en 2005. R. MIGLIANI, L. OLLIVIER, B. QUEYRIAUX, M. MARÉCHAL, R. MICHEL, J.-P BOUTIN. 61 • Les odontogrammes dans les armées. Un aspect particulier et un retour d’expérience. J.-P. DELOBEL, B. GRIFFET, PH. TATON. MISE AU POINT 65 • Facteurs prédictifs de l’efficacité de l’oxygénothérapie hyperbare dans le traitement des surdités brusques idiopathiques : étude prospective portant sur 101 patients. H. LEYRAL, C. LEYRAL, R. DAUMAN, G. GBIKPI-BENISSAN. 73 • Particularités des urgences bucco-dentaires. Place des chirurgiens-dentistes militaires dans les réseaux de prise en charge. B. FENISTEIN, N. BRUY, PH. KAHL. 77 • Apport du dosage des D-dimères au diagnostic précoce d’une thrombose veineuse cérébrale : une observation. A. GOUILLOU, T. VITRY, A. DIDELOT, L. GUILLOTON, D. FELTEN, A. DROUET. 83 • Hypotension intracrânienne spontanée du liquide cérébrospinal : une cause méconnue de céphalée. A. FAIVRE, J. BORDES, A. RIMBOT, P. ALLA, J. GRAPPERON, J. VALANCE. ÉPIDÉMIOLOGIE 89 • Investigation autour d’un cas de leptospirose chez un commando de l’armée de l’Air. L. OLLIVIER, O. ROMAND, J.-M. BOVIS, P. KRAEMER, P. HANCE, C. ROQUEPLO, J.-L. MARIÉ, A. TODESCO, R. MIGLIANI, B. DAVOUST, J.-P. BOUTIN. FAIT CLINIQUE 93 • Le rhinosclérome : à propos de trois cas, revue de la littérature. H. AMMAR, F. BENARIBA, M. TOUATI, I. ZRARA, M. ALOUANE. CONTENTS Pages THERAPEUTIC AND TECHNIQUE IN EMERGENCY 3 • Is Novoseven ® useful in war traumatology? X. ZIRPHILE, B. DEBIEN, J.-P. PÉREZ, B. LENOIR. 11 • Fluid resuscitation in hemorrhagic shock: experimental model comparing normal saline and an association hypertonic. 19 • The intravenous regional anesthesia: an old but still topical practice in 2006. G. DOSSEH, P. RAMIARA, V. MARDELLE, P. AUSSET, R. PÉTROGNANI, J.-P. CARPENTIER. 25 • Assessmet of ultrasonography performed by an emergency physician. Introducing ultrasonographic screening in emergency-rooms. F. GRÉGOIRE. 33 • Evaluation of the use of laryngeal tube (LTS IITM) by personals of units medical services. P. RAMIARA, S. BÉNÉFICE, É. MEAUDRÉ, A. POLYCARPE, J.-P CARPENTIER. 39 • Pre-hospital thrombolysis by tenecteplace of a massive pulmonary emboly with a prolonged cardiac arrest. J. LEYRAL, D. MEYRAN, C. BAR, T. ACZEL, Y. LE GOFF, J. MARCHI, P. LE DRESS. 43 • Blood transfusion aboard SSBN: a specific operation context. É. DELMOND, T. DAVID, B. ÉLIE, R. ABILIOU. 51 • Evolution of resuscitation in the armed forces: about the Algerian conflict. G. DUCHESNE † . P.RAMIARA, A. ROCHE, D. BLAYAC, D. LAMBERT, J.-P. CARPENTIER. MEDICO MILITARY PRACTICE 55 • Practices and requirements for health education in french armed forces in 2005. R. MIGLIANI, L. OLLIVIER, B. QUEYRIAUX, M. MARÉCHAL, R. MICHEL, J.-P BOUTIN. 61 • The odontogram and the medical french forces service. J.-P. DELOBEL, B. GRIFFET, PH. TATON. PROGRESS CASE REPORT 65 73 • Predictable succes factors of hyperbaric oxygen therapy in the treatment of sudden hearing loss: a prospective study based on 101 patients. H LEYRAL, C. LEYRAL, R. DAUMAN, G. GBIKPI-BENISSAN. • Particularities of oral emergencies. The place or military dental surgeons in the care management networks. B. FENISTEIN, N. BRUY, PH. KAHL. 77 • D-dimer’s value for diagnosis of cerebral thrombo-phlebitis without abnormalities on early MRI with venous sequencies. A. GOUILLOU, T. VITRY, A. DIDELOT, L. GUILLOTON, D. FELTEN, A. DROUET. 83 • Spontaneaous intracranial hypotension, an unusual cause of headache. A. FAIVRE, J. BORDES, A. RIMBOT, P. ALLA, J. GRAPPERON, J. VALANCE. EPIDEMIOLOGY 89 1re de couverture « Le siège de Maastricht, 1er juillet 1673 ». La mort de d’Artagnan Huile sur toile par Marino Barberio MSSA Inv. n° 2006.7561. 4e de couverture avec l’aimable autorisation de la société Martineau. 2 • A leptospirosis case occuring in an aircraftman. L. OLLIVIER, O. ROMAND, J.-M. BOVIS, P. KRAEMER, P. HANCE, C. ROQUEPLO, J.-L. MARIÉ, A. TODESCO, R. MIGLIANI, B. DAVOUST, J.-P. BOUTIN. CLINICAL CASE REPORT 93 • Rhinoscleroma. A three-case report and review of the literature. H. AMMAR, F. BENARIBA, M. TOUATI, I. ZRARA, M. ALOUANE. Thérapeutique et technique en situations d’urgence LE NOVOSEVEN® PEUT-IL ÊTRE UTILE EN OPEX ? Analyse de la littérature X. ZIRPHILE, B. DEBIEN, J.-P. PÉREZ, B. LENOIR RÉSUMÉ Le facteur VII recombinant activé, commercialisé par les laboratoires Novo-Nordisk ® sous le nom de NOVOSEVEN ®, est actuellement utilisé comme agent hémostatique dans le traitement des épisodes hémorragiques chez les patients hémophiles (A ou B), déficitaires en facteur VII, ou souffrant de thrombasthénie de Glanzmann. L’analyse de son mode d’action au sein des plus récentes conceptions du processus hémostatique a laissé entrevoir d’autres perspectives d’utilisation. Son usage chez des patients souffrant d’aucun trouble préalable de l’hémostase est de plus en plus étudié, notamment dans le traitement de la coagulopathie du choc hémorragique. L’intérêt croissant pour cette molécule s’explique de plus par la baisse des besoins transfusionnels que son emploi laisse entrevoir. Dans le domaine de la médecine militaire, cette propriété peut-être fondamentale, l’approvisionnement en produits sanguins labiles étant une problématique cruciale. Une revue de la littérature est réalisée concernant l’utilisation du rFVIIa en réanimation médicochirurgicale, en insistant sur le panel des indications du traitement ainsi que sur les posologies employées. À la lumière de ces données, des propositions d’utilisation du rFVIIa en situation d’exception en temps de conflit peuvent être formulées. Mots-Clés : Choc hémorragique traumatique. Facteur VII. NOVOSEVEN®. rFVIIa. I. INTRODUCTION. Le choc hémorragique est actuellement encore la principale cause de mortalité lors des conflits armés (1). Aussi, les médecins militaires sont-ils donc particulièrement concernés par toute technique visant à réduire le saignement ou l’utilisation de produits sanguins labiles dont on connaît la relative pénurie dans les formations chirurgicales de l’avant. Le NOVOSEVEN ®, facteur VII recombinant activé (rFVIIa) est développé par les laboratoires NovoNordisk® pour le traitement des épisodes hémorragiques et la prévention des saignements avant geste invasif chez Correspondance : X. ZIRPHILE, 26 chemin du Barp, 33 850 Léognan. médecine et armées, 2008, 36, 1 ABSTRACT IS NOVOSEVEN ® USEFUL IN WAR TRAUMATOLOGY ? Recombinant activated factor VII (rFVIIa) is currently used as a hemostatic agent for the treatment of bleeding in patients with Glanzmann's thrombasthenia, hemophiliacs (A or B), or with factor VII deficiency. The analysis of its mechanism of action within the recent models of haemostasis has led to other possible uses. Its use for patients without congenital coagulopathy is more and more studied, especially for the coagulopathy following hemorrhagic shock. The growing interest for this molecule can also be explained by the diminution of transfusion needs which it seems to involve. In military medicine, this property can be fundamental, as blood products are very difficult to obtain. A complete review of the literature is realized, concerning rFVIIa's use, pointing on the different indications and the doses used. Based upon all the exposed data, propositions for the use of rFVIIa in military medicine can be stated. Keywords: Traumatic hemorrhagic shock. Factor VII. NOVOSEVEN®. rFVIIa. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 3-9) des patients souffrant de coagulopathies congénitales (hémophilies A ou B, déficits congénitaux en facteur VII, thrombasthénies de Glanzmann). Depuis la publication princeps de Kenet et coll (2), en 1999, relatant son utilisation avec succès dans un cas de choc hémorragique traumatique chez un patient sans coagulopathie préexistante, cette molécule fait l’objet de nombreuses études en dehors de son indication première. L’objet de cet article est de présenter une synthèse des publications traitant de l’utilisation du rFVIIa dans le traitement des chocs hémorragiques sans coagulopathie pré-existante, et de discuter une proposition d’utilisation en situation de pénurie relative de produits sanguins labiles comme les OPEX. 3 II. REVUE DE LA LITTÉRATURE CONCERNANT L’UTILISATION DU NOVOSEVEN® DANS LES CHOCS HÉMORRAGIQUES. Une revue de la littérature concernant tous les emplois du NOVOSEVEN ® dans les chocs hémorragiques et en dehors d’une coagulopathie congénitale a été réalisée. Toutes les études et les cas cliniques publiés entre le 1er janvier 1999 et le 31 octobre 2005 ont été inclus. La recherche a été faite sur MedLine en utilisant le « MeSH term » : « Factor VIIa ». Parmi les 1 339 articles retrouvés, nous avons exclu ceux ne traitant pas de cas ou d’études cliniques, ainsi que les cas cliniques relatant uniquement une inefficacité du rFVIIa ; ceci afin de n’analyser que l’utilisation de la molécule avec succès. Ceci nous a permis de retenir 224 articles incluant au total 1 849 patients. A) INDICATIONS RETROUVÉES (tab. I, fig. 1). L’analyse de cette littérature nous a permis de retrouver des indications extrêmement variées. Néanmoins, certains domaines d’indication priment, notamment la traumatologie (19,74 % des patients), l’hépato-gastroentérologie (18,82 % des patients) et la neurochirurgie (18,66 % des patients). Tableau I. Répartition des domaines d’utilisation du rFVIIa retrouvés dans la littérature. Pourcentage de patients 4 STOMATOLOGIE 0,11 ORL 0,22 CHIRURGIE VASCULAIRE 0,43 CHIRURGIE GÉNÉRALE 0,54 CHIRURGIE GYNÉCOLOGIQUE 0,59 PRÉVENTION DE GESTES INVASIFS 0,92 CHIRURGIE UROLOGIQUE 1,62 CHIRURGIE ORTHOPÉDIQUE 3,40 ACCIDENTS AUX ANTI-COAGULANTS 3,41 OBSTÉTRIQUE 4,49 PÉDIATRIE 6,60 CHIRURGIE CARDIOLOGIQUE 8,87 HÉMATOLOGIE 9,19 CHIRURGIE VISCÉRALE 11,36 NEUROCHIRURGIE 18,66 HÉPATO-GASTRO-ENTÉROLOGIE 18,82 TRAUMATOLOGIE 19,74 Figure 1. Répartition par domaine d’indication des différentes utilisations du NOVOSEVEN® dans le traitement des chocs hémorragiques retrouvées dans la littérature. B) RÉSULTATS SUR LA DIMINUTION DU SAIGNEMENT. Plus particulièrement, dans le domaine des chocs hémorragiques d’origine traumatique ou périopératoires, où la plupart des études à l’heure actuelle sont rétrospectives, on retrouve une diminution des besoins transfusionnels grâce à l’utilisation de rFVIIa (3-5), tant en termes de concentrés globulaires que de plasma frais congelé et de concentrés plaquettaires. Néanmoins, aucune d’entre elles n’a démontré d’amélioration significative de la mortalité, ou même de baisse des durées d’hospitalisation (même si le rFVIIa s’est avéré efficace en ces termes en neurochirurgie et en hépato-gastro-entérologie). Une étude intéressante, mais de faible recrutement (13 patients) (6), a pu montrer avec une différence signif icative que les patients répondant le mieux au rFVIIa sont ceux dont la coagulopathie a été au préalable traitée (coagulopathie évaluée par un score dépendant des taux plaquettaire, de fibrinogène, du TP et du TCA). La seule étude prospective, randomisée contre placebo, en double aveugle actuelle dans le domaine de la traumatologie (7) s’est en réalité scindée en deux sous-études. Les auteurs ont analysé l’effet du rFVIIa dans des groupes de patients souffrant de traumatismes fermés ou de traumatismes ouverts. Ils ont pu retrouver également un intérêt au NOVOSEVEN® en termes de diminution des besoins transfusionnels, significatif uniquement dans l’étude concernant les traumatismes fermés. x. zirphile C) POSOLOGIES UTILISÉES. Si l’on observe les posologies administrées, on s’aperçoit qu’il existe une grande disparité en fonction des cas. À la lecture de ces publications, on retrouve une posologie cumulée moyenne de 179,49 μg/kg, avec un écart-type important, de +/- 220,78 μg/kg, témoignant d’une grande hétérogénéité de la population. Ceci est probablement dû à l’absence actuelle de recommandations, quant à l’utilisation du Novoseven® dans ces indications. Dans ce contexte, la notion de dose médiane paraît plus pertinente : on retrouve alors 85,04 μg/kg. D) COMPLICATIONS RAPPORTÉES. Ce sont essentiellement des complications thromboemboliques (8-10). D’après Roberts et coll (11) le taux d’effets secondaires déclarés rapportés au rFVIIa, de 1996 (mise sur le marché aux USA) à novembre 2002, est très inférieur à 1 %. On retrouve : AVC ischémiques, Coagulations intravasculaires disséminées (CIVD), infarctus du myocarde, thromboses veineuses profondes (dont embolies pulmonaires). De plus, après analyse de ces cas, la très grande majorité d’entre eux était constituée de patients regroupant au moins un facteur de risque thromboembolique. Cela suggère que le rFVIIa favoriserait la formation de caillots sur des sites déjà altérés (plaques d’athérome, lésions endothéliales…), plutôt qu’il n’engendrerait par lui-même de réelles thromboses. Cette hypothèse concorde avec le mode d’action pharmacologique du rFVIIa (12), qui agit plutôt en présence de Facteur tissulaire (FT), non exprimé à l’état physiologique en intra-vasculaire. Plusieurs études histologiques animales (modèles de lésions hépatiques et utilisation de doses allant jusqu’à 720 μg/kg, (13-15) n’ont pas retrouvé de signes de pathologie thrombotique postérieurement à l’utilisation de NOVOSEVEN®. Une controverse existe actuellement concernant l’usage de rFVIIa chez les patients atteints de CIVD et de sepsis. En effet, lors de la CIVD, on retrouve du FT présent à la surface de monocytes circulants et de cellules endothéliales. Il semble donc logique de penser que l’administration de rFVIIa dans ces conditions conduirait à une aggravation de la symptomatologie thrombotique. Cependant, des expériences in vitro ne mettent pas en évidence d’hypercoagulabilité dans ces conditions (16). Un modèle animal sur des singes chez lesquels a été induite une CIVD par injection d’endotoxines n’a également montré aucun emballement du système hémostatique (11). De fait, plusieurs cas ont été publiés relatant l’utilisation de rFVIIa en cas de sepsis et de CIVD (17-27), dont notamment la publication princeps de 1999 de Kenet et coll (2). Il est donc pour l’instant impossible de répondre formellement, quant à l’innocuité du rFVIIa. Néanmoins, les nombreux cas rapportés sont en faveur d’un profil assez rassurant. Aussi est-il légitime de penser que le rFVIIa peut être utilisé en sécurité ; mais que dans le cas le novoseven® peut-il être utile en opex ? d’un risque thromboembolique élevé, le rapport bénéf ices/risques doit être mesuré avec précaution. D’autant plus qu’en conditions de chirurgie de guerre, la surveillance sera très difficile à renforcer. III. INTÉRÊT POTENTIEL DU NOVOSEVEN® DANS LES FORMATIONS MÉDICOCHIRURGICALES DE L’AVANT. Dans le domaine de la traumatologie, nous l’avons vu, le rFVIIa apparaît donc comme une molécule novatrice, susceptible de diminuer les besoins transfusionnels des patients. Néanmoins, si aucune étude n’a actuellement pu montrer d’amélioration de la mortalité des polytraumatisés grâce au rFVIIa, il faut relativiser ce dernier point lorsque l’on se place dans le contexte des opérations extérieures. En effet, dans ces conditions, le NOVOSEVEN® pourrait revêtir une grande importance pour plusieurs raisons : – la première est la réduction des besoins transfusionnels. En effet, si l’approvisionnement en PSL des formations de l’avant est actuellement assuré au mieux par le Centre de transfusion sanguine des armées (CTSA), il peut parfois suffire d’un seul blessé grave pour que leurs réserves en Concentré de globules rouges (CGR) soient épuisées, ou sérieusement compromises. L’intérêt de l’emploi d’une thérapeutique pouvant faire diminuer la quantité de transfusions est donc ici manifeste ; à la fois pour le pronostic même du blessé traité, mais aussi pour celui de tous les autres, qui pourraient alors bénéficier des Produits sanguins labiles (PSL) économisés ; – la deuxième raison tient aux conditions d’évacuation. Si l’accès au plateau technique primaire constitué par la formation médicochirurgicale avancée peut parfois être long, la prise en charge spécialisée plus complète (bloc spécialisé, radiologie interventionnelle…) ne sera accessible actuellement qu’après une ÉVASAN stratégique. Celle-ci implique donc un délai supplémentaire qui peut être délétère, et l’expérience acquise ces dernières années l’a démontré, en cas de saignement incomplètement maîtrisé. En effet, si la réanimation du choc hémorragique est difficile en temps normal, elle devient quasiment illusoire au cours d’un vol. L’intérêt de l’emploi d’une thérapeutique pouvant stopper ou tout au moins diminuer le débit du saignement rapidement est donc d’importance pour la survie d’un blessé évacué porteur d’une lésion hémorragique. Enf in, en ce qui concerne la logistique, le NOVOSEVEN ® n’ajoute que peu de contraintes, puisqu’il se présente sous la forme de kits constitués de petits flacons de lyophilisat et de tout le matériel nécessaire à la reconstitution du produit injectable. Il se conserve entre +2 °C et +8 °C, ce qui est déjà le cas pour plusieurs produits utilisés. Tous ces facteurs tendent à montrer que le NOVOSEVEN ® pourrait avoir sa place en opérations extérieures, lors de la prise en charge du blessé souffrant d’hémorragie grave dans les formations 5 médicochirurgicales de l’avant. Alors que son intérêt dans la prise en charge pré-hospitalière en France métropolitaine semble faible, le cas précis du blessé en situation d’exception et de ses contraintes amène à penser que le NOVOSEVEN® peut être un composant potentiel non négligeable de la pharmacopée du réanimateur militaire. Il faut cependant évoquer le principal facteur limitant à un usage à grande échelle du rFVIIa : son coût. Il s’agit en effet d’une molécule extrêmement onéreuse. Trois dosages sont commercialisés actuellement : – 1,2 mg (1 200 μg), soit 60 kUI ; 767,66 € ; – 2,4 mg (2 400 μg), soit 120 kUI ; 1 535,32 € ; – 4,8 mg (4 800 μg), soit 240 kUI ; 3 070,64 €. Le coût de traitement par NOVOSEVEN ® seul d’un patient de 70 kg à une posologie préconisée chez les hémophiles revient à : 4 605,96 € HT. Cela correspond au prix d’une dose de 4,8 mg et d’une dose de 2,4 mg (7,2 mg soit pour un patient de 70 kg, une posologie de 103 μg/kg en raison du conditionnement du produit ou bien 90 μg/kg pour un patient de 80 kg). Par comparaison, la transfusion de 10 CGR, 8 Plasma frais congelé (PFC), 1 CPA (soit environ le taux à partir duquel le NOVOSEVEN ® est utilisé dans la plupart des études), avec 1,5 g de fibrinogène (Clottagen®), revient à 3 408,21 € HT. Une étude a réalisé une évaluation pharmacoéconomique d’utilisation de rFVIIa en simulant rétrospectivement son administration chez des patients admis pour un épisode de transfusion massive (28). Elle a démontré un intérêt économique à partir du 15 e CGR environ. Ces résultats sont bien sûr à relativiser du fait de la nature « virtuelle » de cette étude, mais il s’agit à l’heure actuelle de la seule de ce type. IV) RECOMMANDATIONS ACTUELLES D’UTILISATION DU NOVOSEVEN®. A) UTILISATION PROPHYLACTIQUE. Les études utilisant le NOVOSEVEN ® de manière prophylactique en chirurgie chez des patients sans aucun trouble de la crase n’ont montré que peu d’intérêt sur le plan de la réduction du saignement. Du fait du coût du traitement, l’utilisation prophylactique du NOVOSEVEN® ne peut donc être recommandée. B) UTILISATION CURATIVE. Des recommandations par une équipe israélienne concernant l’usage du NOVOSEVEN ® dans le choc hémorragique ont déjà été publiées (29). Les conclusions de cet article sont les suivantes : – indications : tout patient non morituri souffrant de choc hémorragique massif et non contrôlable par les mesures d’hémostase chirurgicale et les moyens médicaux associés ; - l’hémorragie massive est alors définie ainsi : • perte d’une masse sanguine en moins de 24 heures, 6 • perte d’une moitié de masse sanguine en moins de 3 heures, • saignement de plus de 150 ml/min, ou de plus de 1,5 ml/kg/min pendant au moins 20 minutes, - les moyens médicaux de contrôle sont définis ainsi : • correction de l’acidose (pH > 7,2), • utilisation de 10 à 15 ml/kg de PFC, • utilisation d’1 à 2 unités plaquettaires/kg, • correction de l’hypothermie (il a été démontré in vitro que l’activité du rFVIIa ne souffrait que peu de l’hypothermie (30) ; sa correction permet néanmoins de diminuer la coagulopathie) ; – contre-indications : la seule contre-indication absolue est le cas de patients dont la situation est jugée désespérée par l’équipe médicale. Les auteurs retiennent comme contre-indication relative un antécédent d’événement thromboembolique grave dans les six mois précédents ; – précautions d’emploi : les auteurs recommandent de n’utiliser le rFVIIa qu’après avoir restauré certains paramètres : - fibrinogène > 0,5 g/L, - plaquettes > 50 000/mm3, - pH > 7,2 ; – posologie : dose recommandée entre 100 mg/kg et 140 μ g/kg, par voie intra-veineuse lente (deux à cinq minutes). Une seconde dose, à la même posologie, peut être administrée à 15-20 minutes de la première, en cas de non-réponse ou de réponse partielle. L’emploi d’une troisième dose est laissé à l’appréciation du clinicien, mais il est recommandé de recontrôler les paramètres de la coagulopathie (cf. précautions d’emploi) avant ; – association à la chirurgie : si le rFVIIa est efficace, il est conseillé une reprise chirurgicale, afin de rechercher des lésions hémorragiques accessibles au chirurgien, qui auraient pu être masquées préalablement par les saignements diffus d’origine micro-vasculaire. C) GUIDELINES EUROPÉENS. Des recommandations européennes (31) ont été faites récemment concernant plusieurs indications. Sur le plan de la traumatologie, le rFVIIa a été recommandé avec un niveau de preuve B dans les traumatismes fermés, et non recommandé dans les traumatismes pénétrants. D) PROPOSITION D’ÉTUDE D’UTILISATION DU NOVOSEVEN ® EN SITUATION D’EXCEPTION. Cette revue de la littérature peut nous permettre de conclure à des propositions d’utilisation du NOVOSEVEN ® en situation d’exception. Devant le manque actuel de données dans cette indication, seule la réalisation d’une étude prospective concernant le protocole proposé serait en mesure de le valider. Néanmoins, à l’heure actuelle, une telle étude parait difficile à mettre en œuvre du fait de limites méthodologiques probables d’emblée : le contexte de sa réalisation et le manque d’effectif ne pouvant permettre de conclure sur le plan statistique. x. zirphile Les deux questions qui se posent alors en pratique au réanimateur à l’avant seront : 1. Quand l’utiliser ? À ce sujet, la plupart des études répondent par l’usage de NOVOSEVEN® à partir de l’utilisation du 10e CGR. À noter que la seule étude prospective à ce sujet (7) a utilisé le NOVOSEVEN ® juste après la fin du 8 e CGR, si le médecin estimait que la transfusion allait se poursuivre encore. Les cliniciens de cette étude incluaient les patients lors de l’utilisation du 6e CGR, ils anticipaient donc leur indication afin de mettre à disposition le produit le cas échéant. Sur des critères strictement économiques, il faudrait utiliser le rFVIIa à partir du 15e CGR. En conclusion, nous proposons de décider d’utiliser le NOVOSEVEN ® en cas de choc hémorragique avec coagulopathie résultante et saignement micro-vasculaire diffus intarissable malgré les gestes chirurgicaux d’hémostase et la réanimation conventionnelle. En cas de nécessité de transfusion de six CGR (et de PCS sans limite de quantité) au moins, associés si besoin à du f ibrinogène, prévoir une utilisation possible du NOVOSEVEN®. À partir de l’utilisation du 8e CGR, l’emploi d’une dose de NOVOSEVEN® est justifié. En situation d’exception, si le réanimateur est face à un afflux de blessés nécessitant des PSL, et/ou si le ravitaillement est insuffisant, le seuil de CGR peut être abaissé. Le choix du seuil de huit CGR s’explique par la faible quantité de PSL disponibles en opérations extérieures et des conditions locales d’exercice. Dans tous les cas, il est à noter que les auteurs s’accordent tous pour dire que le pré-traitement de la coagulopathie est indispensable préalablement à l’utilisation de rFVIIa. Le NOVOSEVEN® ne sera donc administré qu’après avoir pris en charge la coagulopathie du mieux possible sur le plan diagnostique (en particulier recherche d’une fibrinolyse pouvant faire indiquer des antifibrinolytiques plutôt que le NOVOSEVEN ® ) et thérapeutique, en fonction des moyens disponibles : correction de l’acidose et de l’hypothermie, utilisation de CLOTTAGEN®, et de PFC. Le seuil minimal de 50 000 plaquettes/mm3 défini par Martinowitz et coll (29) n’est pas d’actualité ici, du fait de l’absence de plaquettes à l’avant. De plus, l’effet hémostatique du rFVIIa a déjà été démontré in vitro par des concentrations de 10 000 à 20 000 plaquettes/mm3 (32), et plusieurs cas cliniques vont également dans ce sens (30, 33-36). À noter la série de neuf patients thrombopéniques de Kristensen et coll (35), qui montre une diminution du TS plus marquée chez les patients dont le taux de plaquettes est > 20 000/mm3 ; mais qui confirme l’effet du rFVIIa chez tous ses patients. En cas d’absence de réponse après l’injection du NOVOSEVEN®, le délai avant une seconde injection recommandé par Novo-Nordisk® dans les indications du NOVOSEVEN® ayant obtenu l’Autorisation de mise sur le marché (AMM) est de deux heures (37), délai qui correspond à la demi-vie du produit. Néanmoins, les le novoseven® peut-il être utile en opex ? modif ications des paramètres d’exploration de l’hémostase (TP et TCA notamment) apparaissent dans les 15 à 20 minutes de l’injection (29). De plus, en cas de choc hémorragique, le délai de deux heures est parfois difficile à maintenir. Il n’y a actuellement aucune donnée statistique sur ce point, mais il semble raisonnable dans ces conditions de proposer une seconde injection à 20 minutes environ de la première, en cas de non-réponse ou de réponse partielle. L’administration de doses supplémentaires est laissée au jugement du praticien, mais il faut souligner le fait que la demi-vie du produit n’est que de deux heures. Toutes ces indications sont laissées à l’appréciation du clinicien, qui sera juge de la situation, en fonction du patient, des lésions, de la qualité de la prise en charge chirurgicale, mais aussi et surtout des possibilités d’évacuation rapide vers un centre de soins plus adapté. 2. À quelle posologie ? Nous avons vu la dose médiane employée dans la littérature avec succès : 85,04 μg/kg. La posologie ayant l’AMM chez les patients hémophiles est de 90 μg/kg. Actuellement, la seule étude prospective réalisée en traumatologie (7) a utilisé des doses importantes, définies arbitrairement (200 μg/kg, puis 100 μg/kg à deux reprises). Néanmoins, cette étude a manqué de puissance de recrutement, et les autres données sont plutôt en faveur de doses nécessaires plus faibles. Ces données et les impératifs économiques nous incitent donc à recommander l’administration de NOVOSEVEN® en bolus de 90 μg/kg lors de la première injection (soit une dose de 7 200 μg chez un patient de 80 kg, ce qui correspond à un flacon de 2,4 mg plus un flacon de 4,8 mg. Si une seconde dose s’avère nécessaire, il est alors licite devant l’absence de réponse d’augmenter la posologie à 120 μg/kg. De même que les critères d’indication du produit, la posologie doit pouvoir être ré-évaluée par le praticien, et ce, notamment en cas de nécessité d’injections itératives (annexe I). V. CONCLUSION. Le NOVOSEVEN ® paraît donc être un produit utile en OPEX dans le domaine du choc hémorragique d’origine traumatique. D’autres forces armées étrangères l’ont déjà inclus dans leur pharmacopée dans cette indication. D’un point de vue méthodologique, il faudrait réaliser une nouvelle étude prospective afin d’évaluer l’eff icacité réelle du produit dans tous les types de traumatismes et de prouver une dose minimale efficace. Néanmoins, une telle étude à l’échelle du seul SSA semble peu réaliste lorsque l’on voit que la plus grande étude actuelle en la matière (7) a manqué de recrutement (inclusion de 277 patients). La collection des données de chacun permettra sans doute, à terme, de préciser les indications, les modalités d’administration, et la posologie de cet agent hémostatique d’avenir. 7 Logigramme proposé concernant l’utilisation du NOVOSEVEN® en opérations extérieures. 8 x. zirphile RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Combat casualty care conference. Londres, 9-10 mars 2006. 2. 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Use of le novoseven® peut-il être utile en opex ? 22. 23. 24. 25. 26. 27. 28. 29. 30. 31. 32. 33. 34. 35. 36. 37. recombinant FVIIa for intaperitoneal coagulopathic bleeding in a septic patient. Curr Surg 2003 jul-aug ; 60 (4) : 423-7. Gidiri M, Noble W, Rafique Z, Patil K, Lindow SW. Caesarean section for placenta praevia complicated by postpartum haemorrhage managed successfully with recombinant activated human coagulation factor VIIa. J Obstet Gynaecol 2004 nov; 24 (8): 925-6. Kretzschmar M, Zahm DM, Remler K, Pfeiffer L, Victor L, Schirmeister W. Pathophysiological and therapeutic aspects of amniotic fluid embolism (anaphylactoid syndrome of pregnancy): case report with lethal outcome and overview. Anaesthesist 2003 may ; 52 (5) : 419-26. Sokolic V, Bukovic D, Fures R, Zadro M, Scuric I, Colak F et al. Recombinant factor VIIa (rFVIIa) is effective at massive bleeding after caesarean section-a case report. Coll Antropol 2002 dec; 26 Suppl: 155-7. 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Accès le 20 novembre 2005. 9 COMMUNIQUÉ BRIGADE DE SAPEURS-POMPIERS DE PARIS SERVICE MÉDICAL D'URGENCE MC FUILLA – MC PETIT – MC LE HOT SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES CLUB DES ANESTHÉSISTES RÉANIMATEURS ET URGENTISTES MILITAIRES présentent « CONFÉRENCES DE RÉANIMATION PRÉ-HOSPITALIÈRE » Cycle 2007 - 2008 Mardi 12 février 2008 à 16h30 Mardi 25 mars 2008 à 16h30 TOXICOLOGIE ÉVALUATION DES PRATIQUES PROFESSIONNELLES ET ACCRÉDITATION DES PERSONNELS DE SANTÉ : CADRE RÉGLEMENTAIRE, MODALITÉS ET MÉTHODES D’ÉVALUATION Président : Pr. BAUD (Hôpital Lariboisière) Coordinateur: MP. ERNOUF (BSPP) Épidémiologie des tentatives d’autolyses médicamenteuses prises en charge par les ambulances de réanimation de la BSPP : comparatif 2002/2007 MP. SABOUREAU, MP TRAVERS (BSPP) Prise en charge d’une intoxication aiguë : de la régulation à la prise en charge hospitalière Pr. DANEL (SAMU38) Président : Pr. CLERGUE (Hôpitaux uiversitaires de Genève) Coordinateur : MP PAQUIN (BSPP) Évaluation des pratiques professionnelles et accréditation des personnels de santé : le point de vue de l’HAS Dr. WERNER (HAS) Case report : prise en charge d’une intoxication à la Nivaquine Dr. LOISEAU (BSPP) Évaluation des pratiques professionnelles et accréditation des personnels de santé : le point de vue de la SFAR Dr. LAGNEAU (SFAR) Case report : prise en charge d’une intoxication auchlorure de méthylène MP ERNOUF (BSPP) Évaluation des pratiques professionnelles en pratique : l’exemple d’un service d’anesthésie-réanimation Dr. BONNET (Hôpital Saint-Louis) Mardi 20 mai 2008 à 16h30 LA MORT INATTENDUE DU NOURRISSON (MIN) Président : Dr. CHABERNAUD (Smur Pédiatrique SAMU 92) Coordinateur : M1C DUBOURDIEU (BSPP) Mieux connaître les MIN en 2008 Dr. BLOCH (Institut national de veille sanitaire) Les difficultés du pré-hospitalier CCH Haudry, Dr. DUBOURDIEU (BSPP), Dr. AYACHI (Smur Pédiatrique SAMU 93) Accueil à l’hôpital et rôle des centres de référence Dr. BRIAND-HUCHET (Centre de référence MSN hôpital Antoine BÉCLERE) Lieu : École du Val-de-Grâce, Amphithéâtre Rouvillois, 1 place Alphonse Laveran, 75230 Paris Cedex 5. Secrétariat des conférences : BSPP/SMU – 1 place Jules Renard – BP 31 – 75823 Paris Cedex 17 – Tél. : 01 56 79 67 53 – Mail : [email protected] Comité d'organisation : MP (TA) DE STABENRATH, M1C DUBOURDIEU, MP ERNOUF, M2C LARTIGUE, MP PAQUIN, MP WAROUX, MCD WIELS. 10 Thérapeutique et technique en situations d’urgence REMPLISSAGE VASCULAIRE DANS LE CADRE DU CHOC HÉMORRAGIQUE Modèle expérimental comparant le sérum salé isotonique et une association sérum salé hypertonique/hydroxyéthylamidon (hyperhes®) P. RAMIARA, A. ROCH, D. BLAYAC, D. LAMBERT, J.-P. CARPENTIER RÉSUMÉ Le remplissage par solutés hypertoniques semble utile à la phase initiale du choc hémorragique. Comparé au sérum salé isotonique, l’importance et la durée de l’expansion de l’association sérum salé hypertonique/hydroxyéthylamidon ne sont pas connues. Sur un modèle porcin de choc hémorragique contrôlé, une étude a été réalisée pour comparer les quantités de sérum salé isotonique et de l’association sérum salé hypertonique/hydroxyéthylamidon nécessaires à la restauration d’une hémodynamique systémique identique et les conséquences de l’utilisation de ces solutés sur la perfusion splanchnique. Dans ce modèle reproductible de choc hémorragique, une réanimation à faible volume par sérum salé hypertonique/hydroxyéthylamidon corrige de manière durable l’hémodynamique systémique avec treize fois moins de volume que le sérum salé isotonique, sans différence sur la perfusion splanchnique. L’utilisation de sérum salé hypertonique/ hydroxyéthylamidon entraîne une élévation de la natrémie, tolérable et transitoire mais devant être contrôlée. Mots-clés : Choc hémorragique. Hémodynamique systémique. Perfusion splanchnique. Sérum salé hypertonique/hydroxyethylamidon. ABSTRACT FLUID RESUSCITATION IN HEMORRHAGIC SHOCK: EXPERIMENTAL MODEL COMPARING NORMAL SALINE AND AN ASSOCIATION HYPERTONIC. Fluid resuscitation by hypertonic solutions seems useful for the initial phase of hemorrhagic shock. Compared with normal saline solution, the importance and duration of the expansion of association hypertonic saline/hydroethylstarch are unknown. On swine model controlled hemorrhagic shocks, a study has been realised to compare the quantity of normal saline solution and association hypertonic solution/hydroethylstarch that was needed to restore an identical systemic hemodynamics and the consequences of the use of those solutions on splanchnic perfusion. In this reproducible model of hemorrhagic shock, association hypertonic saline solution/hydroethylstarch can durably correct hemodynamics with thirteen times less volume than normal saline solutions with no difference on splanchnic perfusion. The use of this solution elevates the natremia, which has to be monitored. Keywords: Hemorrhagic shock. Systemic hemodynamics. Splanchnic perfusion. Normal saline solution. Association hypertonic saline/hydroethylstarch. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 11-17) I. INTRODUCTION. La réanimation initiale du choc hémorragique, basée sur un remplissage sans objectif de pression artérielle élevée, semble être de plus en plus justifiée. En effet, de nombreux travaux cliniques ont montré que, tant que le saignement n’est pas contrôlé, un remplissage massif augmente la P. RAMIARA, médecin principal, praticien confirmé. A. ROCH, praticien hospitalier, praticien hospitalier. D. BLAYAC, chef de clinique. D. LAMBERT, médecin principal, praticien hospitalier. J.-P. CARPENTIER, médecin chef des services. Correspondance : P. RAMIARA, service d’anesthésie réanimation, HIA Laveran, BP 50, 13998 Marseille Armées. médecine et armées, 2008, 36, 1 spoliation sanguine et induit une surmortalité (1, 2). Toutefois, la nature et la quantité de soluté restent encore sujettes à discussion et affaires d’école. Le remplissage par sérum salé hypertonique est intéressant du fait du faible volume administré et de sa simplicité d’utilisation. Les travaux expérimentaux et cliniques le prouvant sont désormais anciens et nombreux (3-6). Dans nos armées et pour le choc traumatique de l’avant, l’utilisation de ces solutés semble particulièrement intéressante. Depuis plusieurs années, ces solutés ont été développés en y associant des colloïdes permettant d’améliorer l’efficacité de l’expansion volémique (7). Des études expérimentales 11 ont évalué la quantité de soluté hypertonique associée à des dextrans qui permettait d’obtenir un effet hémodynamique équivalent à celui d’un remplissage par cristalloïdes (8, 9). Peu d’études ont comparé le sérum salé isotonique et l’association sérum salé hypertonique/hydroxyethylamidon, commercialisée sous le nom d’HyperHes®. Dans un modèle porcin de choc hémorragique contrôlé, nous avons étudié les quantités de Sérum salé isotonique (SSI) et d’HyperHes ® (Sérum salé hypertonique 7,2 % associé à un Hydroxyéthylamidon, (SSH/HEA)) nécessaires à une restauration identique de l’hémodynamique systémique et les conséquences sur la perfusion splanchnique. II. MATÉRIEL ET MÉTHODE. Après accord du comité d’éthique vétérinaire local, 19 porcs fermiers femelles de quatre mois pesant en moyenne 43 ± 4 kg ont été inclus dans l’étude. Après un jeûne de vingt-quatre heures, les animaux étaient prémédiqués par une injection intramusculaire de midazolam (2 mg/kg). Une fois endormis, ils étaient pesés puis installés sur la table d’intervention. L’anesthésie était alors approfondie par inhalation à l’aide d’un masque facial et d’un mélange de sévoflurane 8 % et d’oxygène pur. Une voie veineuse était alors placée à l’oreille. Un soluté de sérum salé isotonique était perfusé au débit de 7 ml/kg/h. L’anesthésie était entretenue par voie intraveineuse par du midazolam (0,2 mg/kg/h) et du fentanyl (0,01 mg/kg/h). Une trachéotomie était alors réalisée selon des conditions techniques et d’asepsie chirurgicale. La ventilation mécanique (Servo 900C, Siemens, Elema, Suède) était alors initiée via une canule de trachéotomie (I.D. 8.0, Mallinckrodt Medical, Hazelwood MO, USA) avec un volume courant de 10 ml/kg, une FiO2 de 0,21 un rapport I: E de 1:2 et une absence de PEP. La fréquence respiratoire était réglée afin d’obtenir une PCO2 artérielle entre 35 et 45 mmHg. La curarisation était débutée une fois les voies aériennes sécurisées par du pancuronium. L’animal était ensuite équipé d’un cathéter artériel 5F en carotide interne gauche par abord chirurgical, d’une voie veineuse centrale positionnée en jugulaire interne gauche et d’un cathéter de Swan-Ganz positionné en jugulaire externe droite (Baxter Healthcare Corporation, Irvine, CA, USA). Une sonde de tonométrie gastrique (TRIP NGS, Datex-Ohmeda, France) était mise en place sous contrôle scopique et connectée à un tonomètre (Tonocap®). Les mesures hémodynamiques comprenaient la Fréquence cardiaque (FC), les pressions artérielles systémiques mesurées en fin d’expiration avec notamment la Pression artérielle moyenne (PAM). Le débit cardiaque était monitoré en continu par un moniteur de débit cardiaque (Baxter Healthcare Ltd, CA, USA). Les valeurs d’Index cardiaque (IC) retenues pour analyse ont été obtenues après injection de trois bolus de 12 ml de sérum 12 glucosé 5 % entre 0 et 5 °C à travers un système clos en fin d’expiration. Les mesures gazométriques comprenaient les PO2, PCO2 et pH artériels et veineux, mesurées par un analyseur de gaz du sang (278 blood gas system, Ciba Corning, Medf ield, MA, USA). Le taux d’hémoglobine et la saturation en oxygène du sang veineux mêlé ont été mesurés à l’aide d’un co-oxymètre. Au niveau microcirculatoire, la perfusion splanchnique était évaluée par la technique de tonométrie gastrique (Tonocap®, TC 200, Datex-Ohmeda, France). Toutes les dix minutes, le gradient de PCO2 (gap CO2) était calculé selon la formule : – gap PCO2 = PCO2im-PaCO2 avec une correction des pressions partielles en CO 2 pour une température de 32 °C (PCO2 im : PCO2 intra muqueux). Les variables suivantes ont été calculées : – surface corporelle SC en m2 = K/(poids en kg) 2/3 où K = 0,112 pour les cochons ; – Index cardiaque (IC) en l/min/m2 = Débit cardiaque (Qc)/SC ; – volume d’éjection indexé (VEI) = IC/fréquence cardiaque ; – résistances vasculaires systémiques indexées (RVSI) = (PAM/IC)/79,9. Les quantités totales de sodium (Na) administrées, la natrémie et le dosage des lactates plasmatiques étaient aussi mesurés. III. PROTOCOLE EXPÉRIMENTAL (fig. 1). Le modèle expérimental choisi était un modèle de Wiggers modifié. Dans le modèle de Wiggers (10), la spoliation sanguine est effectuée pour amener la pression artérielle moyenne à une valeur prédéterminée, puis elle est maintenue constante pendant la période de choc. L’obtention et le maintien de la pression artérielle moyenne prédéfinie nécessitent, dans un premier temps, de poursuivre la spoliation sanguine puis, dans un deuxième temps, de retransfuser le sang. Ce modèle d’hémorragie présente l’intérêt de réaliser l’étude d’un choc hémorragique prolongé, notamment à la phase irréversible du choc. Dans notre modèle, en plus des objectifs de pression artérielle moyenne, nous prenions en compte l’index cardiaque et la saturation veineuse en oxygène. Figure 1 Schéma protocole. p. ramiara Tous les animaux étaient anesthésiés selon le même protocole pour s’affranchir des implications de l’anesthésie sur les résultats (11). Après une demi-heure de stabilisation, les animaux étaient randomisés par table de randomisation préétablie en trois groupes : – groupe contrôle (C) : (n = 5) pas de choc, mais anesthésie et ventilation mécanique seuls ; – groupe sérum salé isotonique (SSI) : (n = 7) choc puis réanimation réalisée par un remplissage de deux fois et demi le volume saigné ; – groupe HyperHES ® (SSH/HEA) : (n = 7) choc puis remplissage par 250 ml d’un mélange de sérum salé hypertonique à 7,2 % et d’hydroxyéthylamidon à 6 %. Après l’enregistrement des données de base (T0), la manipulation était débutée. La durée du protocole était de six heures et a été divisée en cinq phases : – phase précoce de l’hémorragie (30 min) (T1) ; – phase tardive de l’hémorragie (1 h 30) (T2) ; – remplissage (2 heures) (T3) ; – transfusion (une heure) (T4) ; – suivi (une heure) (T5). La saignée était débutée via le cathéter artériel carotidien au rythme de à 0,8 à 1 ml/kg/min et poursuivie jusqu’à l’obtention des critères suivants dans un délai de 25 ±5 min (phase précoce de l’hémorragie) (T1) : – PAM entre 40 et 45 mmHg ; – une chute de l’index cardiaque de plus de 40 % ; – une SvO2 inférieure à 30 %. Le but était d’obtenir une PAM à cette valeur avec une baisse de l’index cardiaque de plus de 40 % et une SvO2 inférieure à 30 %. Ces trois critères devaient être maintenus pendant une période supplémentaire de 90 min, en poursuivant la saignée ou en retransfusant l’animal (phase tardive de l’hémorragie) (T2). Pendant les deux heures suivantes (remplissage), les animaux étaient réanimés soit par une perfusion de sérum salé isotonique SSI (NaCl à 0,9 %) à un débit initial de 2 ml/kg/min, soit par une association de sérum salé hypertonique et d’hydroxyéthylamidon SSH/HEA (HYPERHES®, Fresenius) 4 ml/kg en dix minutes suivi d’une perfusion de 0,2 ml/Kg/min. Le but étant de connaître les volumes utilisés pour les deux stratégies et d’avoir un effet hémodynamique identique, les vitesses d’administrations ont été standardisées ; elles correspondaient à celles de la littérature (8) et à la pratique clinique. Lorsque l’index cardiaque atteignait 90 % de sa valeur de base et que la SvO2 était supérieure à 50 %, le remplissage était adapté afin de maintenir ces paramètres pendant cette phase (T3). Pendant l’heure suivante, le sang était retransfusé afin d’obtenir un taux d’hémoglobine égal à 80 % du taux d’hémoglobine initial (T4). Après une heure d’observation, une dernière mesure était réalisée avant le sacrifice des animaux (T5). Pendant la phase hémorragique, la FiO2 était réglée à 0,21 correspondant à l’absence expérimental de réanimation. Puis, elle était augmentée à 0,5 au début du remplissage remplissage vasculaire dans le cadre du choc hémorragique et maintenue constante jusqu’à la fin du protocole expérimental correspondant à la prise en charge médicalisée. Les analyses statistiques ont été réalisées en utilisant le logiciel SPSS (SPSS Inc., Chicago, IL, USA). La normalité de la distribution des données a été vérifiée par un test de Kolmogorov-Smirnov. Les résultats sont exprimés en moyenne ± écart-type. Selon la distribution, un test paramétrique ou non paramétrique était utilisé. Les quantités de sodium administrées et les volumes transfusés ont été comparés selon le test de Mann-Whitney. Une analyse de variance pour mesures répétées a été utilisée pour analyser les effets du groupe et du temps sur les paramètres mesurés. Le test pour analyse post-hoc de Tukey a été utilisé quand l’ANOVA montrait une différence signif icative. Pour tous les tests, un p inférieur ou égal à 0,05 était considéré comme significatif. IV. RÉSULTATS. Comme l’illustre le tableau des résultats, les volumes de sang retirés étaient de 37±6 ml/kg pour le groupe SSI et 39±3 ml/kg pour le groupe SSH/HEA, soit des volumes comparables (p = non significatif (ns)). Tableau I. Résultats. GROUPE SSI GROUPE SSH-HEA Volume Saigné (mL/kg) 37+6 39+3 REMPLISSAGE (mL/kg) 90+17 6,8+1,9 Transfusion (mL/kg) 14+8 15+9 Sodium total(g) 34+4 20+5 Natrémie fin R (mmol/L) 132+6 148+8 Les objectifs de réanimation ont été atteints puis maintenus avec 90±17 ml/kg de SSI et 7±2 ml/kg de SSH/HEA soit treize fois moins de volume dans ce dernier groupe (p < 0,0001). Les valeurs d’IC (fig. 2), de SvO 2 (fig. 3) n’étaient pas différentes entre les deux stratégies pendant toute la durée du protocole. Figure 2. Évolution de l’index cardiaque en fonction du temps et du groupe. 13 Figure 3. Évolution de la SvO2 en fonction du groupe et en fonction du temps. Figure 5. Évolution de la pression artérielle moyenne en fonction du groupe et en fonction du temps. Les volumes de sang retransfusés étaient de 14±8 ml/kg pour SSI et 15±9 ml/kg pour SSH/HEA (p = ns). Si dans le groupe SSH/HEA, la quantité de sodium (20±5 g de Na) était moindre par rapport au groupe SSI (34±4 g de Na) (p < 0,01) ; les natrémies étaient plus élevées (148±8 mmol/l) dans ce groupe à la f in du remplissage que dans le groupe SSI (132±6 mmol/l) (p < 0,05). Elles n’étaient pas différentes entre les deux groupes par la suite. Pour l’hémodynamique systémique, après remplissage, les résistances vasculaires systémiques (fig. 4) et la PAM (f ig. 5) étaient modérément plus basses dans le groupe SSH/HEA que dans le groupe SSI, et la FC plus élevée (fig. 6) par rapport au groupe contrôle. À la vitesse de remplissage dictée par le protocole, les objectifs hémodynamiques ont été atteints en 52±12 min dans le groupe SSI et 60±13 min dans le groupe SSH/HEA (p = ns). Pour ce qui est de la perfusion splanchnique, le GapCO2 (f ig. 7) était comparable dans les deux groupes. De même, la lactatémie (fig. 8) était comparable quelque soit le soluté utilisé. V. DISCUSSION. A) RAPPEL. de Baue en 1967, et aux études qui en ont découlées (3, 12, 13). De ces travaux expérimentaux et/ou cliniques, est né le concept de small volume resuscitation. L’utilisation des solutés hypertoniques est maintenant reconnu, et a montré un gain en terme de mortalité. Une méta-analyse a mis en évidence une réduction globale de la mortalité des patients en état de choc hémorragique traités par ces solutés (4). L’augmentation de survie ou de sortie de l’hôpital au 30e jour post-traumatique était en moyenne de 3,6 % avec un effet d’autant plus net que les patients présentaient une hypotension artérielle sévère (14), ou nécessitaient une intervention chirurgicale d’hémostase (15). Un soluté hypertonique est une solution dont l’osmolalité est supérieure à celle du plasma (environ 300 mOsm/l), et dont l’espace de diffusion est limité au compartiment extracellulaire. Le sérum salé hypertonique, soluté de référence, existe sous différentes concentrations à 7,2 % ou 7,5 %, semblant correspondre à des concentrations optimales. La courte durée d’action a fait proposer l’adjonction d’une solution de colloïde (dextran ou L’intérêt de l’utilisation du sérum salé hypertonique est ancien pour le choc hémorragique, et remonte au travail Figure 4. Évolution des résistances systémiques en fonction du groupe et en fonction du temps. 14 Figure 6. Évolution de la fréquence cardiaque en fonction du groupe et en fonction du temps. p. ramiara Figure 7. Évolution du Gap CO2 en fonction du groupe et en fonction du temps. hydroxyéthylamidon) af in de prolonger la durée de l’expansion plasmatique (7, 16, 17). Les mécanismes d’action de ces solutés sont encore imparfaitement compris, mais on sait qu’ils agissent tout d’abord sur les trois déterminant du débit cardiaque. Ils augmentent la pré-charge par le transfert osmotique des liquides intra-cellulaires vers le secteur plasmatique. En effet, l’augmentation brutale d’osmolalité entraîne immédiatement un transfert d’eau du secteur interstitiel et intracellulaire vers le compartiment plasmatique. Bien que le pouvoir d’expansion du sérum salé hypertonique à 7,5 % soit de 300 % environ, cet effet reste transitoire. En effet, dans un travail expérimental, Velasco et coll. retrouvent une augmentation d’environ 50 % de la volémie après perfusion de sérum salé hypertonique, elle n’est plus que de 10 % à la troisième heure et a totalement disparu à la sixième heure (18). Ils améliorent la contractilité myocardique : un effet inotrope positif intervient dans la conservation du volume d’éjection systolique (19, 20). Ils baissent les résistances vasculaires systémiques et donc la post-charge ; l’hypertonicité plasmatique entraîne une vasodilatation pré-capillaire qui redistribue le flux sanguin vers les territoires coronaires, splanchniques et rénaux (8, 21). En plus de ces actions, les solutés hypertoniques améliorent les Figure 8 Évolution des Lactates en fonction du groupe et en fonction du temps. remplissage vasculaire dans le cadre du choc hémorragique conditions microcirculatoires ; en effet, ils améliorent la perfusion tissulaire en modif iant la rhéologie du flux sanguin par modification du volume des globules rouges et des cellules endothéliales. La vasodilatation pré-capillaire induite améliore l’apport tissulaire en oxygène (21, 22). En plus, de ces avantages hémodynamiques, ces solutés ont également des effets anti-œdémateux et trouvent tout leur intérêt dans les traumatisés graves où s’associent traumatisme crânien et hypotension (23). Ils améliorent la compliance et la pression de perfusion cérébrale en diminuant l’eau intra-cérébrale par un effet mannitol-like. Enfin, ils ont un rôle d’immunomodulateur dans la réponse inflammatoire au traumatisme initial ; ils atténuent l’amorçage de la réaction inflammatoire au travers d’une réduction de l’activation des polynucléaires (24). À coté de ces effets thérapeutiques, ces solutions ont des effets délétères qui doivent être connus avec en premier lieu des troubles hydro-électrolytiques (25). La natrémie doit être monitorée dans la mesure du possible. Toutefois, les données cliniques accumulées jusqu’à présent pour une administration aux posologies habituelles 4 à 6 ml/kg montrent que la natrémie n’a pas d’effet délétère si elle est transitoire (< 160 mMol/l). Des effets vasculaires ont été notés en cas d’administration rapide se traduisant par une hypotension brutale avec arythmies cardiaques ; d’où l’importance d’une titration. Enf in, à la pososlogie usuelle, il n’y a pas d’effets sur l’hémostase (26). Dans les armées et dans le concept de la réanimation de l’avant, ces solutés hypertoniques sont intéressants car, aux avantages thérapeutiques s’allient les avantages logistiques (faible encombrement, approvisionnement et conservation facile). Une mise au point sur leur utilisation a été réalisée dans cette revue (27). B) DISCUSSION DES RÉSULTATS. Dans notre étude, nos résultats sont concordants avec ceux de la littérature qui nous rappellent l’efficacité de ce type de soluté en dépit d’un volume moindre. Les publications sont nombreuses et l’intérêt clinique est désormais validé (28). Ce sont les travaux expérimentaux de Velasco sur le chien qui avaient rappelé les propriétés bénéfiques du SSH seul au cours d’un choc hémorragique (13). Secondairement, les modèles expérimentaux de choc hémorragique contrôlé se sont succédés arrivant aux mêmes conclusions et permettant d’envisager son utilisation en pratique clinique (3). Au niveau expérimental, c’est l’association dextran-SSH qui a été la plus étudiée. Dés 1985, Smith et coll avaient montré chez le mouton choqué que cette solution, comparée au Ringer Lactate (RL) restituait l’état hémodynamique avec six fois moins de volume (29). En 1989, Chudnofsky, chez le même type de modèle que le notre mais avec un protocole différent, avait rappelé que l’association dextran-SSH améliorait l’état hémodynamique (9). Récemment, Chiara et coll, dans un modèle porcin de choc hémorragique contrôlé, ont montré l’intérêt de cette association comparée au sérum salé isotonique sur l’hémodynamique systémique et splanchnique (8). 15 Peu de travaux dans la littérature ont comparé l’association SSH/Hydroxyéthylamidon au sérum salé isotonique. Notre travail montre que, dans ce modèle de choc hémorragique à objectif hémodynamique identique, il a fallu treize fois moins de volume d’HyperHES® que de sérum physiologique. Ce résultat signif icatif est lié aux conditions expérimentales différentes des autres études qui font référence dans ce domaine et dans la littérature. L’effet de l’association SSH/HEA a été durable au moins pendant la phase de protocole. Toutefois, il est reconnu que cette prolongation du pouvoir d’expansion du fait de la présence d’un colloïde est discutable (6, 7). Pour les solutés hypertoniques : ce n’est pas la quantité de soluté perfusé qui compte pour la restitution de la masse plasmatique mais la quantité de sodium administrée (30). On peut remarquer que, dans notre étude, bien que la quantité de sodium totale ait été plus importante dans le groupe SSI, la natrémie de fin de remplissage était plus importante dans le groupe SSH/HEA par rapport au groupe SSI. L’élévation de la natrémie a été tolérable et transitoire pendant la totalité du protocole. En effet, même si probablement la charge osmotique a été brutale, l’effet de l’expansion volémique a probablement compensé rapidement la charge sodée. Dans notre protocole, la réanimation a été obtenue à pression artérielle moyenne plus basse, en raisons d’effets vasodilatateurs comme l’illustre les figures 4 et 5. Cet effet sur la post-charge est une des caractéristiques de ces solutés hypertoniques. Cette propriété de l’association SSH/HEA ne diffère pas des autres solutés hypertoniques. Ils entraînent une diminution des résistances vasculaires systémiques qui participent à l’amélioration du débit cardiaque et des débits régionaux (31). Dans notre travail, nous n’avons pas étudié l’amélioration de la contractilité myocardique. Même si les avis restent controversés sur ce sujet, il a été retrouvé dans une étude échographique chez l’homme, que l’association étudiée augmentait le débit cardiaque en améliorant les conditions de remplissage du ventricule gauche (32). Les troubles microcirculatoires étaient évaluées par tonométrie gastrique : dans les deux groupes choqués et traités, la perfusion de la muqueuse gastrique a été corrigée après traitement de manière équivalente et durable (f ig. 7). Il est sur, que cette technique de mesure n’est pas la technique la plus fiable des débits régionaux. Toutefois, ce résultat couplé à la correction de la lactatémie, témoin de l’hypoxie tissulaire (fig. 8) montre l’absence d’avantage quelque soit la stratégie de réanimation. Il n’y a eu aucun avantage même si les quantités dans le groupe SSH/HEA étaient inférieures au groupe SSI. Enfin, le modèle de choc choisi reflète mal la pratique clinique. Il s’agissait d’un modèle de Wiggers modifié. L’hémorragie était contrôlée : le débit était indépendant des conditions hémodynamiques, et ne prenait pas en compte les modifications physiopathologiques de l’anesthésie. Toutefois, le but premier était de mettre en évidence la différence de volumes nécessaires entre ces deux solutions à objectif hémodynamique identique. De par sa reproductibilité et du fait de la possibilité d’obtenir un degré de choc sévère et long, ce modèle était adapté. D’autres modèles de choc expérimental existent (non contrôlé ou sans anesthésie) qui simulent mieux la pratique préhospitalière, et notamment la réanimation de l’avant, laissant entrevoir d’autres travaux en perspectives. VI. CONCLUSION. Dans ce modèle reproductible de choc hémorragique contrôlé, l’association sérum salé hypertonique/ hydroxyéthylamidon, commercialisée sous le nom d’HyperHes®, corrige l’hémodynamique systémique avec treize fois moins de volume que le sérum physiologique, sans différence sur la perfusion splanchnique. Même si ce type de choc expérimental est peu transposable à la pratique clinique, ces résultats nous rappellent l’intérêt et nous rendent conf iants, quant à l’utilisation de ces solutés à la phase initiale du choc hémorragique. Du fait des faibles volumes utilisés et des effets bénéfiques potentiels circulatoires, ce soluté peut donc être intéressant chez le traumatisé grave de l’avant à la posologie de 4 à 6 ml/kg en 20 à 30 min. À sa capacité de remplissage, s’allient des avantages logistiques qui intéressent tous les intervenants dans la prise en charge du choc traumatique de l’avant. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Solomonov E, Hirsh M, Yahiya A, Krausz MM. The effect of vigorous fluid resuscitation in uncontrolled hemorrhagic shock after massive splenic injury. Crit Care Med 2000 ; 28 (3) : 749-54. 2. Bickell WH, Wall MJ Jr, Pepe PE, Martin RR, Ginger VF, Allen MK et al. Immediate versus delayed fluid resuscitation for hypotensive patients with penetrating torso injuries. 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EDDLESTON) Prix de thèse Mardi 9 septembre 9h 11h30 12h 12h30 14h Sessions parallèles – session « intoxications en envenimations tropicales » – session « paludisme et maladies vectorielles » – session « actualités en médecine tropicales » Interventions orales de 10 minutes suivies de 5 minutes de questions Flashs d’actualité Prix de sposters coktail déjeunatoire Forum-débat : éthique et bonnes pratiques de la recherches dans les pays en développement coordonné par le MC ROGIER. Droits d’inscription : 80€ jusqu’au 31 mars 2008 – 100€ après le 31 mars 2008. Pour tous renseignements : Service de la communication, IMTSSA XIV e Actualité du Pharo BP 46, 13998 Marseille armées – Tél. : +33(0)4 91 15 01 22/86 – Fax +33 (0)4 91 15 01 46 – Mail : [email protected] – Site web : www.actupharo.com 18 Thérapeutique et technique en situations d’urgence ANESTHÉSIE LOCORÉGIONALE INTRAVEINEUSE Technique ancienne encore d’actualité en 2006 G. DOSSEH, P. RAMIARA, V. MARDELLE, P. AUSSET, R. PÉTROGNANI, J.-P. CARPENTIER RÉSUMÉ L’anesthésie locorégionale intraveineuse, décrite par Bier en 1908, est restée pendant de nombreuses années la technique d’anesthésie locorégionale la plus utilisée. L’avènement des techniques de blocs plexiques et tronculaires sous électrostimulation l’a rendue désuète aux yeux des anesthésistes réanimateurs. Cependant, elle reste une technique simple, fiable, économique, avec peu d’effets secondaires mais nécessitant une grande rigueur dans le choix des indications et la mise en œuvre. Mots-Clés : Anesthésie locorégionale intraveineuse. ABSTRACT THE INTRAVENOUS REGIONAL ANESTHESIA: AN OLD BUT STILL TOPICAL PRACTICE IN 2006. The intravenous regional anesthesia described by Bier in 1908 remained for many years the most used technique of regional anesthesia. The advent of plexus and troncular blocks with nerve stimulator has made it outdated to the anaesthesiologists. However, it remains a simple, reliable, and inexpensive technique, with limited side effects but which requires rigour in the choice of its indication and realization. Keywords: Intravenous regional anesthesia. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 19-24) I. INTRODUCTION. L’anesthésie est une discipline en évolution constante avec pour objectifs une eff icacité et une sécurité sans cesse croissantes au prix d’une amélioration des techniques utilisées. L’anesthésie locorégionale en est un exemple avec le développement des techniques de blocs plexiques avec électrostimulation au détriment de techniques plus anciennes comme l’anesthésie locorégionale par voie intraveineuse qui représentait 33 % des anesthésies locorégionales du membre supérieur en France en 1996 (1). Cette technique reste régulièrement utilisée au sein de l’hôpital d’instruction des armées Laveran. Notre expérience conf irme les données de la littérature concernant l’eff icacité et les effets indésirables de cette technique. Nous pensons donc que son enseignement et son utilisation doivent être poursuivis. G. DOSSEH, médecin principal, praticien confirmé. P. RAMIARA, médecin principal, praticien confirmé. V. MARDELLE, médecin principal, praticien confirmé. P. AUSSET, médecin en chef, praticien certifié. R. PÉTROGNANI, médecin en chef, professeur agrégé. J.-P. CARPENTIER, médecin chef des services, professeur agrégé. Correspondance : G. DOSSEH, fédération d’anesthésie réanimation, HIA Laveran, BP 50, 13998 Marseille Armées. médecine et armées, 2008, 36, 1 II. ANESTHÉSIE LOCORÉGIONALE INTRAVEINEUSE (ALRIV). A) PRINCIPE DE LA TECHNIQUE ET MÉCANISME D’ACTION. L’ALRIV, décrite par Bier en 1908, consiste après exsanguination et mise en place d’un garrot, à introduire dans le secteur vasculaire veineux un anesthésique local afin de permettre sa diffusion et sa pénétration jusqu’aux terminaisons des f ibres nerveuses périphériques du territoire opéré (2, 3) (fig. 1). L’anesthésique local injecté inhibe les canaux sodiques en modif iant le courant entrant de sodium et bloque l’activité électrique des fibres nerveuses. Son action sur Figure 1. ALRIV-Garrot et cathéter en place. 19 les canaux calciques atténue également la libération des neurotransmetteurs post synaptiques (3). L’anesthésie obtenue résulte aussi de l’addition d’autres mécanismes dont les phénomènes de compression et d’ischémie des troncs nerveux apparaissant après 20 à 30 minutes de garrot (5, 6). L’anesthésie s’installe habituellement en dix à quinze minutes. Il s’agit d’un bloc sensitivomoteur intéressant l’ensemble du territoire correspondant à la zone d’exsanguination. La durée de l’anesthésie est en fonction de la durée de gonflage du garrot. Dès que celui-ci est dégonflé, la sensibilité réapparaît en cinq minutes et l’analgésie se lève en dix minutes. La durée minimale de l’ALRIV est de 20 minutes et la durée maximale tolérable par le patient est de 90 minutes. Ces délais sont conditionnés par le temps de résorption de l’anesthésique local et la tolérance du garrot. Un pic plasmatique d’anesthésique local se produit dans la minute suivant la levée du garrot. Il peut être responsable d’effets secondaires neurologiques à type de sensation vertigineuse, de paresthésies, d’acouphènes et de troubles de l’élocution. Le dégonflage progressif du garrot avec deux ou trois regonflages toutes les dix à quinze secondes allonge le temps d’obtention du pic plasmatique (7). B) INDICATIONS, INCONVÉNIENTS ET CONTRE INDICATIONS. Cette technique est utilisable dans la chirurgie de durée brève (inférieure à 60 minutes) et peu algique du membre supérieur au-delà du coude et du membre inférieur, en deçà du genou (2, 7-10). En pratique, son utilisation courante se limite au membre supérieur. Il peut s’agir d’actes de chirurgie réglée (maladie de Dupuytren, syndrome du canal carpien, ablation de matériel d’ostéosynthèse, kyste arthro-synovial…) ou d’actes pratiqués dans le cadre de l’urgence (section tendineuse, fractures de l’extrémité inférieure des os de l’avant-bras, fracture de métacarpien…). Les inconvénients rapportés de cette technique sont la mauvaise tolérance du garrot, l’existence d’un suintement au site opératoire pouvant gêner le chirurgien et la levée brutale de l’analgésie après retrait du garrot. Les réelles contre indications de l’ALRIV sont rares : le refus du patient, les contre-indications du garrot (tab. I), les troubles sévères de la conduction (blocs auriculoventriculaires du 2e et 3e degré), l’insuffisance hépatique sévère, le risque d’occlusion artérielle insuff isante Tableau I. Contre indications du garrot. CONTRE INDICATIONS DU GARROT Drépanocytose Hypertension artérielle sévère Ischémie du membre Infection du site opératoire Fistule artério-veineuse 20 (grand obèse, calcifications artérielles) et l’allergie aux anesthésiques locaux. Les mauvaises indications dues aux limites de cette technique sont plus nombreuses : intervention de longue durée, chirurgie douloureuse en post opératoire, hypertension artérielle, obésité avec risque d’occlusion artérielle inefficace (7, 9). C) PRÉMÉDICATION. Elle est indiquée et nécessaire pour le bon déroulement de tout geste anesthésique. Dans le cadre de l’ALRIV, elle améliorerait la tolérance du garrot selon une étude d’observation réalisée en Amérique du Nord (8). Par ailleurs, les benzodiazépines ont pour certains auteurs l’avantage d’avoir un effet anticonvulsiviant intéressant en cas de toxicité des anesthésiques locaux (2). D) RÈGLES DE SÉCURITÉ. Conformément aux recommandations de la Société française d’anesthésie réanimation, la réalisation d’une ALRIV nécessite la mise en place d’une voie veineuse de sécurité (sur le membre controlatéral) et d’un monitorage de l’électrocardiogramme, de la pression artérielle non invasive, et de la saturation artérielle en oxygène. Le matériel d’anesthésie générale et de réanimation, vérifié et fonctionnel doit être à portée de main. Un contact verbal permanent doit être maintenu avec le patient afin de déceler précocement les signes cliniques de toxicité de l’anesthésique local (10). E) EXSANGUINATION. Elle a pour but de vider le secteur veineux avant l’injection de l’anesthésique local. La bande d’Esmach habituellement utilisée par les chirurgiens pour améliorer l’exsanguination par enroulement centripète ne doit plus être utilisée. En effet, sa mise en place est douloureuse, dangereuse en cas de lésion osseuse, et expose au risque de fractures d’ostéophytes, de lésions nerveuses ou cutanées (7, 10). La simple gravité par surélévation du membre supérieur à 90° pendant cinq à dix minutes est suff isante pour assurer une exsanguination de bonne qualité. Elle peut être améliorée par l’utilisation prudente et douce d’une bande « Velpeau » (5, 7). F) GARROT PNEUMATIQUE. La technique initiale décrite par Bier utilisait deux garrots espacés, avec injection de l’anesthésique local dans le segment de membre exsanguiné et exclu. L’apparition en 1964 de garrots pneumatiques à double chambre a conduit à la modification de la technique avec l’exclusion de la partie distale en aval du garrot (2, 3). Le choix du brassard doit être adapté à la morphologie du patient. Une forme conique est préférable chez les sujets obèses. La taille est idéalement choisie en fonction de la circonférence du bras, le rapport de la largeur sur la circonférence du membre devant être supérieur ou égal à 0,4. g. dosseh La pression de gonflage du garrot ne doit pas être excessive afin de limiter les phénomènes d’intolérance. L’habitude répandue de gonfler le garrot à une pression de 100 à 250 mm Hg au-dessus de la tension artérielle systolique doit être abandonnée. La formule de Graham : (Pression artérielle (PA) systolique- PA diastolique) x [(circonférence du membre/trois fois la largeur du garrot) + PA diastolique] évaluant la Pression d’occlusion artérielle (POA) détermine avec précision la pression de gonflage nécessaire et suffisante (5). Une autre méthode plus rapide consiste à déterminer la POA minimale en détectant la disparition du pouls radial ou du signal de pléthysmographie au cours d’une mesure de la pression artérielle non invasive. Le garrot est alors gonflé à 50 mm Hg au-dessus de cette POA minimale, car la pression artérielle du patient augmente progressivement après mise en place du garrot. L’utilisation d’un garrot double chambre permet lors de l’exsanguination, d’améliorer celle-ci en gonflant successivement la partie distale puis proximale. Ensuite, durant le geste chirurgical, le re-gonflage du garrot distal se situant en zone anesthésiée permet de diminuer les phénomènes d’intolérance. Le contrôle électronique de l’autorégulation de la pression de gonflage ainsi que les alarmes de baisse de pression et de temps écoulé permettent de réduire les risques de lâchage de garrot. Les «petits moyens» mécaniques (pinces, occlusion manuelle par plicature du tube) sont dangereux car peu fiables et délétères pour le matériel (2, 6, 7). Le siège du garrot se situe habituellement à la racine du membre. Certains auteurs ont proposé sa mise en place à l’avantbras pour la chirurgie de la main. Cette position permet une réduction des doses d’anesthésique local injecté et une efficacité accrue. Il existe néanmoins un risque de fuite au niveau des veines mal comprimées situées entre les deux os. Ce risque semble sans conséquence toxique d’autant plus que les doses d’anesthésiques locaux nécessaires sont réduites (11). Les douleurs dues au garrot sont un des effets indésirables de l’ALRIV et peuvent en devenir une limite si elles sont importantes. L’injection préalable de lidocaïne intraveineuse à la posologie de 1 mg/kg semble réduire l’intensité de celles-ci selon une étude récente (12). La limite de cette méthode est le risque d’atteindre les doses toxiques de lidocaïne. H) ANESTHÉSIQUES LOCAUX. La procaïne initialement utilisée par Bier a été remplacée par la lidocaïne lors de son apparition en 1963. Il s’agit de la seule molécule ayant l’autorisation de mise sur le marché pour l’ALRIV en France. Une concentration de 0,5 % et un volume de 0,5 ml/kg, soit une posologie maximale de 3 mg/kg ne doivent pas être dépassés pour éviter les effets toxiques après la levée du garrot (2, 7). Tous les autres anesthésiques locaux ont été étudiés dans cette indication. La mépivacaïne à la posologie de 5 mg/kg procurerait une meilleure anesthésie per-opératoire sans effets toxiques systémiques. Elle n’a cependant pas l’Autorisation de mise sur le marché (AMM) pour cette indication (13). La bupivacaïne présentant une toxicité cardiovasculaire importante est formellement contre-indiquée malgré la bonne analgésie post opératoire qu’elle procure (14). La ropivacaïne à 0,2 % et la lévobupivacaine à 0,125 %, moins cardiotoxiques que la bupivacaïne, permettent une bonne analgésie post opératoire avec peu d’effets secondaires à la levée du garrot mais ne possèdent pas l’AMM dans cette indication (15-17). III. UTILISATION DE L’ALRIV AU SEIN DE L’HÔPITAL D’INSTRUCTION DES ARMÉES LAVERAN. Une observation prospective réalisée sur huit mois (octobre 2002 à juin 2003) au sein du département d’anesthésie réanimation de notre hôpital, a permis d’évaluer la place de cette technique dans notre pratique. Au cours de cette période, 107 interventions chirurgicales du membre supérieur ont été réalisées sous ALRIV. L’âge moyen des patients concernés était de 50 ans avec un sexe ration H/F de 1,3. La majorité des patients étaient classés ASA 1 (51 %) (fig. 2). Les interventions chirurgicales les plus couramment réalisées sous ALRIV étaient : décompression de nerf médian dans le cadre d’un syndrome du canal carpien, ostéosynthèses de fractures des os de la main ou des doigts, exploration de plaies de la main ou des doigts avec suspicion d’atteinte tendineuse, ostéosynthèses de fractures de l’extrémité inférieure du radius, ablation de matériel d’ostéosynthèse, exérèse de kystes arthro- G) MODE D’INJECTION. L’injection se réalise idéalement dans une veine du dos de la main qui aura été préalablement cathétérisée. Le site de l’injection n’influence pas la qualité de l’anesthésie (11). La vitesse d’injection ne doit pas dépasser 0,5 ml/s afin d’éviter une pression élevée et une fuite sous le garrot. Les voies intra artérielle et intra osseuse ont été proposées et étudiées par certains auteurs. Elles ne doivent pas être utilisées car en dehors de la difficulté de mise en œuvre, elles n’ont pas fait la preuve de leur meilleure efficacité et sont dangereuses (2). anesthésie locorégionale intraveineuse Figure 2. Répartition par classe ASA (Hôpital Laveran). 21 synoviaux, ténolyses dans le cadre de la maladie de Dupuytren (tab. II). L’intervention chirurgicale était réalisée en urgence dans 31 % des cas. L’acte était pratiqué en ambulatoire dans 16 % des cas. La durée moyenne de la chirurgie était de 23 minutes. La douleur pré-opératoire évaluée par l’Échelle visuelle analogique (ÉVA) était inférieure à 40/100 chez 94 % des patients. Tableau II. Indications chirurgicales (Hôpital Laveran). n Canal carpien 44 Exploration de plaies de la main et section de tendons de doigts 18 Fractures de la main et/ou des doigts 15 Ablation de matériel d’ostéosynthèse 10 Fractures de l’extrémité inférieure du radius 8 Exérèse de kystes 8 Doigt à ressaut-Maladie de Dupuytren 2 Neurolyse 1 Arthrodèse (doigts) 1 Une prémédication avait été prescrite chez 77 % des patients : hydroxyzine dans 91 % des cas et alprazolam dans 9 % des cas. L’exsanguination était réalisée selon les habitudes des praticiens. Les modes d’exsanguination étaient variés : membre surélevé avec bande Velpeau (25 %) – membres surélevés avec bande d’Esmach (24%) – Bande d’Esmach seule (20 %) – membre surélevé seul (16 %) – bande « Velpeau » seule (15 %). Il faut noter que cette étude a été réalisée avant la publication des recommandations de bonne pratique de la société française d’anesthésie réanimation déconseillant l’utilisation de la bande d’Esmach. Quel que soit le mode utilisé, l’ÉVA durant l’exsanguination était en majorité inférieure à 30/100. Les autres données recueillies concernant la mise en œuvre de la technique étaient : le délai de mise en œuvre de la technique (intervalle entre l’entrée en salle du patient et l’obtention d’une anesthésie chirurgicale), la pression de gonflage du garrot et le temps d’ALRIV (intervalle entre le gonflage et le dégonflage du garrot) (tab. III). L’eff icacité per-opératoire était évaluée par l’ÉVA et les données hémodynamiques (fréquence cardiaque et pression artérielle non invasive) à 15, 30 et 45 minutes (fig. 3, 4). 22 Tableau III. Mise en œuvre de la technique (Hôpital Laveran). Moyenne Délai de mise en œuvre (minutes) Pression de gonflage du garrot (mm Hg) Temps d’ALRIV (minutes) 32 260 47 Le recours à une technique complémentaire a été nécessaire dans 40 % des cas. La cause la plus fréquente était l’agitation, l’anxiété ou l’inconfort du patient. Une sédation par midazolam ou propofol était alors le traitement. Une anesthésie insuffisante se traduisant par des douleurs au membre opéré et nécessitant l’injection d’un morphinomimétique a été rapportée dans 4 % des cas. Un échec a nécessité une conversion en anesthésie générale. Une intolérance au garrot distal a été relevée chez 48 patients (45 %). Son délai moyen d’apparition a été de 28 minutes. Dix complications mineures (9,3 % des patients) ont été rapportées (tab. IV). L’analgésie post opératoire systémique utilisait deux produits dans la majorité des cas (77 %). Figure 3. ÉVA à 15, 30 et 45 minutes (Hôpital Laveran). Figure 4. Données hémodynamiques à 15, 30 et 45 minutes (Hôpital Laveran). g. dosseh Les produits utilisés ont été : paracétamol (86 % des patients), tramadol (56 %), kétoprofène (40 %), néfopam ou nalbuphine. La durée moyenne de séjour en salle de surveillance post interventionnelle était de 40 minutes (10 à 160 minutes) et l’ÉVA moyen avant le retour en secteur d’hospitalisation était de 15/100. Tableau IV. Complications (Hôpital Laveran). n Malaise vagal 5 Nausées - Vomissements 2 Acouphènes à la levée du garrot 1 Probable passage systémique de lidocaïne 1 Purpura ecchymotique en aval du garrot 1 IV. DISCUSSION. A) EFFICACITÉ ET MORBIDITÉ DE LA TECHNIQUE. L’ALRIV est associée à un taux de réussite de 85 % à 95 % (6, 8, 9). Dans notre étude, aucune conversion en anesthésie générale n’a été nécessaire en raison d’un geste chirurgical prolongé démontrant ainsi la nécessité de réaliser cette technique dans des indications adéquates. Le seul échec observé fut complet et total dès la mise en œuvre. Elle entraîne de rares complications. En 1989, une étude nord américaine portant sur 1 906 ALRIV en 20 ans retrouve 1,6 % d’effets secondaires mineurs à type de vertiges, acouphènes ou bradycardies (18) et ce à une époque où la sécurité en anesthésie, la standardisation de la technique et le matériel n’avaient rien de comparable avec la période actuelle. Auroy et coll. en 1994, rapportent trois cas de convulsions secondaires à un lâchage précoce du garrot au cours de 11 229 ALRIV réalisées en quatre mois (1). Plus récemment, les mêmes auteurs ne retrouvent aucune complication lors des 4 448 ALRIV réalisées sur une période de dix mois (19). Nous n’avons observé aucune complication majeure dans notre pratique. Mais le recours à une technique complémentaire semble élevé (40 %). L’inconfort du patient et l’anxiété en étaient les causes les plus fréquentes. Il s’agit d’une situation courante dans toutes les techniques d’anesthésie locorégionale ou l’association systématique d’une sédation intraveineuse à objectif de concentration semble intéressante. uniquement, permettant d’étendre la zone d’anesthésie sous le garrot distal. Celui-ci peut donc être gonflé secondairement en zone anesthésiée. C’est la méthode couramment utilisée au sein du service. La clonidine utilisée à une posologie de 1 μg/kg améliore la tolérance du garrot et potentialise l’analgésie (20). C) SUINTEMENT AU SITE OPÉRATOIRE. Certains auteurs ont étudié l’effet d’une seconde exsanguination avec dégonflage et regonflage rapide du garrot après installation de l’anesthésie et avant l’incision chirurgicale. Cette technique semble apporter un meilleur confort au chirurgien sans effets toxiques secondaires à la levée temporaire du garrot (21). Elle n’a jamais été utilisée dans notre étude. D) QUALITÉ DE L’ANESTHÉSIE ET DE L’ANALGÉSIE POST OPÉRATOIRE. 1. Les produits adjuvants. Divers agents ont été étudiés en injection locale avec la lidocaïne dans le but d’améliorer la qualité de l’analgésie post opératoire ou d’associer une myorelaxation à l’anesthésie procurée (tab. V). Aucune étude, correctement réalisée, n’a démontré l’avantage de l’utilisation d’anesthésiques généraux, de curares non dépolarisants ou de morphinomimétiques en association aux anesthésiques locaux (22). Leur utilisation est par ailleurs dangereuse. La clonidine semble renforcer l’analgésie per et post opératoire par un effet non déterminé (action anesthésique locale ou action sur le système nerveux central) (20). La dexmetomidine, ayant une affinité dix fois supérieure à la clonidine pour les récepteurs alpha 2, améliore la qualité du bloc sensitif per-opératoire et prolonge l’anesthésie post opératoire (23). Les anti inflammatoires non stéroïdiens renforcent l’analgésie post opératoire dans les vingt quatre premières heures en l’absence d’effets secondaires avec des doses inférieures à la posologie intraveineuse systémique (24). Tableau V. Adjuvants utilisés (22). Morphinominétiques AINS et AUTRES ANTALGIQUES DIVERS gallamine péthidine tramadol Kétamine pancuronium morphine kétorolac clonidine atracurium fentanyl ténoxicam bicarbonate de sodium B) MAUVAISE TOLÉRANCE DU GARROT. rocuronium sufentanil métamizol L’utilisation de garrot à double chambre permet de débuter l’anesthésie après le gonflage du garrot proximal mivacurium anesthésie locorégionale intraveineuse CURARES d-tubocurarine 23 2. La conduite de l’analgésie post opératoire. La mise en œuvre précoce d’une analgésie post opératoire multimodale permet de couvrir dans la majorité des cas la levée rapide de l’anesthésie per-opératoire. L’association d’antalgiques de niveau 1 (paracétamol, anti inflammatoires non stéroïdiens) et de niveau 2 (néfopam, tramadol) permet d’obtenir des niveaux satisfaisants à l’échelle visuelle analogique comme nous l’avons observé dans notre pratique. E) SURVEILLANCE. La réalisation d’une ALRIV nécessite une surveillance rigoureuse portant sur la tolérance du garrot et la toxicité des AL. En effet, le risque est maximal lors du dégonflage du garrot où survient un pic plasmatique de lidocaïne. V. CONCLUSION. L’ALRIV réalisée avec rigueur est une technique simple, rapide, fiable et sûre justifiant la poursuite de son enseignement et de son utilisation. Le respect des limites de cette technique permet d’obtenir la satisfaction du patient dans la grande majorité des cas. Elle représente une alternative intéressante pour la pratique occasionnelle de l’anesthésie locorégionale de la main et de l’avant-bras lors d’actes chirurgicaux de courte durée et peu algiques en post opératoire. Les nombreux antalgiques utilisables par voie générale permettent d’anticiper le traitement de la douleur post opératoire avant de lâcher le garrot. Ces caractéristiques lui confèrent un intérêt certain en pratique médico-militaire (situation d’isolement, opérations extérieures). RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Auroy Y, Narchi P, Messiah A, Litt L, Rouvier B, Samii K. Serious complications related to regional anesthesia. Results of a prospective survey in France. Anesthesiology 1997 ; 87 : 479-86. 2. Estèbe JP. Anesthésie locorégionale intraveineuse. Ann Fr Anesth Réanim 1999 ; 18 : 663-73. 3. Brill S, Middleton W, Brill G, Fisher A. Bier's block; 100 years old and still going strong! Acta Anaesthesiol Scand 2004; 48 (1): 117-22. 4. Mazoit JX. Mode d’action et toxicité des anesthésiques locaux. Paris : Elsevier ; Conférences d’actualisation, 38e congrès national d’anesthésie réanimation ; 1996 : 249-62. 5. Estèbe JP, Malledant Y. Le garrot pneumatique d’orthopédie. 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GRÉGOIRE RÉSUMÉ Nous présentons ici, une évaluation d’activité aux urgences portant sur l’aide au triage des patients par l’outil ultrasonique dont l’opérateur est un urgentiste. Nous proposons également une extension d’application d’une méthode de réalisation d’un test échographique, le Programme rapide d’échographie du polytraumatisé (PREP) en situation non traumatologique. Pendant l’année 2004, 433 tests échographiques ont été évalués, en étudiant l’orientation des patients en fonction de l’évaluation clinique, du résultat du test avec ou sans contrôle immédiat. Dans notre étude, le test échographique apporte toujours une information même s’il est négatif et contribue à l’orientation facilitée du patient. Mots-clés : Échographie. FAST. PREP. Test. Triage ultrasonique. ABSTRACT ASSESSMENT OF ULTRASONOGRAPHY PERFORMED BY AN EMERGENCY PHYSICIAN. INTRODUCING ULTRASONOGRAPHIC SCREENING IN EMERGENCY-ROOMS. We present here an assessment of a special emergencyroom activity that is sorting patients with ultrasonography performed by an emergency physician. We also propose to extend an original method of ultrasonographic body exploration: PREP, Programme Rapide d’Echographie du Polytraumatisé (Focussed Assessment with Sonography for Trauma = FAST) to all common and usual situations in emergency room. During 2004, we practiced 433 ultrasonography tests and followzd the patients observing their clinical evaluation and the result of their test with or without immediate control. In our study, the test always gives an information, even if it is negative, and contributes to an easier referral of the patient. Keywords: FAST. PREP. Ultrasonography test. Ultrasonography Sorting Patients. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 25-31) I. INTRODUCTION. non invasif, reproductible, réalisable au lit du patient ne doit pas faire oublier qu’elle dépend d’abord de sa disponibilité et celle de l’opérateur. Le temps d’imagerie ultrasonique dans la chaîne de prise en charge est sous la responsabilité d’un expert imageur médical. Dans les pays anglo-saxons la réalisation peut être effectuée par un acteur non médical (sonographeur) au même titre que les clichés radiologiques en imagerie conventionnelle sont réalisés par des manipulateurs diplômés en électroradiologie. Ce transfert de compétence existe également vers les chirurgiens et médecins urgentistes ayant reçu une formation spécifique et adaptée à leur exercice quotidien (1-5). L’outil ultrasonique appartient à l’imagerie de référence constituée également par la tomodensitométrie et la résonance magnétique nucléaire, mais reste un sujet d’actualité médicale (images tridimensionnelles, produit de contraste…). Les domaines d’application sont vastes, particulièrement aux urgences où l’évaluation rapide d’un patient nécessite une offre technique adaptée en terme d’efficacité, de délai d’obtention et de coût. L’évaluation des patients aux urgences passe très souvent par un examen échographique. Cette étape du recours à l’imagerie spécialisée sollicite un maillon de la chaîne de prise en charge sur des indications nécessairement pertinentes. La fiabilité de cet examen II. MÉTHODE. F. GRÉGOIRE, médecin principal. Correspondance : F. GREGOIRE, HIA Robert Picqué, service des urgences, Upatou, BP 28, 33998 Bordeaux Armées. Nous avons évalué un test échographique ou « échotest » au sein d’une UPATOU ayant un recrutement d’un peu plus de 16 000 passages en 2004 dont environ 45 % de monotraumatologie essentiellement « légère ». médecine et armées, 2008, 36, 1 25 Nous avons décidé d’appliquer et d’évaluer l’indication du test à tous les patients nécessitant un test échographique de « triage ». L’appareil utilisé dans notre service est un échographe Hitachi Odyssée 2000 (fig. 1, 2). Nous avons choisi une méthode simple de pratique de l’échographie qui n’est pas un examen spécialisé mais une série de tests intégrée dans un programme : le Programme rapide d’échographie du polytraumatisé (PREP) (6). Le PREP permet, après trois jours de formation (24heures), l’acquisition d’images de très bonnes qualités et surtout de répondre très rapidement à trois questions principales: – y a-t-il un épanchement intra péritonéal (gazeux ou liquidien) ? – y a-t-il un épanchement thoracique (gazeux ou liquidien) ? –. y a-t-il un épanchement péricardique circonférentiel ? Cette méthode permet de répondre également à cinq questions complémentaires : – y a-t-il un anévrysme de l’aorte abdominale ? – y a-t-il un globe vésical ? – y a-t-il une dilatation pyélocalicielle ? – y a-t-il une grossesse intra utérine ? – y a-t-il une thrombose fémoro-poplitée ? Tout comme la méthode anglo-saxonne du Focused assessment of sonography for trauma (FAST) (7–9), dont il s’inspire, le PREP s’applique essentiellement à la traumatologie mais avec des champs d’extension. Le PREP explore par la méthode du quadrillage les zones anatomiques suivantes (fig. 3) : Figure 1. Salle d’échographie (service des urgences). Figure 2. Échographe Hitachi Odyssée 2000. 26 Figure 3. Zones anatomiques explorées par le PREP. f. grégoire – hémithorax latéral droit, espace hépato-rénal et rein droit (PREP 1) ; – hémithorax latéral gauche, espace splénorénal et rein gauche (PREP 2) ; – cul de sac de Douglas et vessie (PREP 3) ; – hémithorax antérieur droit, gauche et paroi antérieure du cœur (PREP 4) ; – aorte abdominale (PREP 5) ; – pli de l’aine et creux poplité avec test de compression (PREP 5). Il s’agit d’une étude prospective portant sur des tests échographiques réalisés en 2004 par un urgentiste formé au PREP. Une fiche de recueil est ouverte pour chaque patient comprenant date et heure de réalisation du test ainsi que le motif et le résultat. Il est précisé si ce test était contrôlé (échographie ou scanner) avant l’orientation du patient également mentionnée (retour domicile, mutation ou transfert inter hospitalier). On teste toujours par un écho-test complet les zones anatomiques en dehors de la zone cliniquement suspectée (« résister à l’appel du point d’appel clinique ».). Puis le test se focalise sur toute zone considérée comme anormale si elle ne correspond pas aux images normalement attendues. À l’étage sus-diaphragmatique, l’outil échographique est mis à contribution pour le diagnostic de pneumothorax, de pneumopathie (par « quadrillage » thoracique également intégré dans le PREP). L’exploration de la paroi antérieure myocardique est plus spécifiquement effectuée pour la recherche par voie sous xiphoïdienne d’un épanchement liquidien circonférentiel si une péricardite est évoquée. Les fenêtres échographiques thoraco-abdominales recherchent principalement les épanchements liquidiens ou gazeux, mais aussi selon l’orientation clinique, permettent l’inspection parenchymateuse intra péritonéale (vésicule, appendice). L’examen de l’espace rétro péritonéal se limite à l’inspection du parenchyme rénal principalement pour la détection d’une dilatation pyélocalicielle. On recherche à l’étage pelvien un épanchement liquidien ou une lithiase enclavée à la jonction urétérovésicale. Le test est effectué pour les voies urinaires sur présomption de colique néphrétique ; moins à la recherche de lithiase que de complication obstructive (hydronéphrose) (10). Un écho-test est également effectué pour un bilan d’hématurie (a fortiori dans un contexte traumatique) ou toute lombalgie non rhumatologique suspecte. Le test échographique est également utilisé pour la suspicion de pyélonéphrite. Le test en indication « gynécologique » est rarement utilisé (à la recherche d’un épanchement notamment du Douglas) en situation clinique très limitée : suspicion de grossesse intra ou extra utérine ou rupture de kyste ovarien. En aucun cas le test ne dérive vers un examen échographique gynéco-obstétrical spécifique morpho-métrique. évaluation de l’outil ultrasonique dans les mains d’un urgentiste Le contrôle de l’aorte abdominale est systématiquement réalisé car inclus dans les séquences du programme PREP ce qui permet un mode de dépistage d’un anévrysme par le biais de la f ilière des urgences. Néanmoins le test est particulièrement indiqué sur point d’appel clinique ou diagnostic d’exclusion a fortiori chez les personnes de plus de 50 ans (dépistage). Le test échographique de l’axe veineux des membres inférieurs est réalisé pour l’exclusion d’une thrombose veineuse proximale (recherche d’une thrombose fémoro-poplitée) par la technique des deux points de compression (sur arguments cliniques et/ou test biologique) (11, 12). A) CONTRÔLE DES TESTS. On déf init par « test négatif non contrôlé » un test permettant un diagnostic d’exclusion selon le site anatomique évalué cliniquement. Ce test n’est pas contrôlé pendant le temps de séjour dans le service des urgences par un expert imageur au moyen d’un examen échographique de référence ou tomodensitométrique. Cependant et quelle que soit l’orientation du patient, notamment s’il y a un retour à domicile, une prescription de contrôle d’imagerie (échographie ou tomodensitométrie) est rédigée et remise au patient avant sa sortie et notée sur le compte rendu du test dans la copie du dossier médical transmis. La procédure est identique avant toute mutation de service ou transfert inter hospitalier. Un « test positif non contrôlé » est un test répondant à au moins une des questions du PREP sans nécessité d’examen plus complet de contrôle d’imagerie. Le test à lui seul fait le diagnostic et guide la conduite à tenir. Ce test n’est pas contrôlé pendant le temps de séjour dans le service des urgences par un expert imageur (échographie de référence ou tomodensitométrie). Un contrôle est toujours demandé ou prescrit (échographie ou tomodensitométrie) selon l’orientation du patient (hospitalisation/transfert ou a fortiori retour à domicile). Un « test négatif est contrôlé » s’il permet d’affirmer un diagnostic d’exclusion mais néanmoins vérifié par une expertise échographique ou tomodensitométrique devant la persistance d’un doute au terme de l’évaluation clinique. Ce contrôle est effectué « intramuros » (échographie ou tomodensitométrie selon l’état clinique du patient) au sein du service des urgences, avant toute décision d’orientation du patient. Un « test positif contrôlé » est un test répondant à au moins une des questions du PREP ou mettant en évidence une image pathologique (toujours contrôlée) ou non reconnue (et donc considérée par défaut comme anormale). Dans certains cas, ni la clinique, ni ce test positif imprécis ne suffisent pas à eux seuls pour faire la lumière sur le diagnostic et imposent un complément d’imagerie. Ce contrôle est également effectué « intramuros » (échographie ou tomodensitométrie selon l’état clinique du patient) avant toute décision de traitement ou d’orientation du patient. 27 III. RÉSULTATS. Du 1er décembre 2003 au 30 novembre 2004 sur des tests pratiqués sur 208 journées. L’urgentiste s’initiant à l’échographie, a validé entre temps la formation au PREP fin novembre 2003. Pour l’année 2004, on enregistre 16 158 passages. Environ 2 600 patients sont pris en charge annuellement par chaque praticien (deux seniors et deux internes de jour ; un senior et un interne pour la garde) dans le service des urgences. L’urgentiste aura réalisé des tests échographiques pour 16 % (433) des patients pris en charge. Il n’y a aucun critère de sélection des patients. A) FRÉQUENCE DE RÉALISATION DES TESTS ÉCHOGRAPHIQUES (FIG. 4). On constate une progression linéaire (voire exponentielle) du volume de test échographique et plus particulièrement à partir de la formation validée au PREP (fin novembre 2003). B) HORAIRE DE RÉALISATION DES TESTS (FIG. 5). Bien que la majorité des tests soit réalisée la journée « aux heures ouvrables », la période nocturne entre 19 h 00 et 8 h 00 représente prés de 20 % des tests pratiqués (par l’urgentiste en garde). C) INDICATION DES TESTS ÉCHOGRAPHIQUES (FIG. 6). Cent pour cent des dossiers ont pu être étudiés (n = 433) à propos de la classe pathologique d’indication du test échographique. Dans plus de deux tiers des cas un « écho-test » est effectué pour un motif médical (63 %) et un plus d’un quart des cas pour un problème chirurgical non traumatologique (cholécystite, appendicite…). D) SECTEURS ANATOMIQUES ET POINTS D’APPEL CLINIQUE MOTIVANT UN TEST ÉCHOGRAPHIQUE (FIG. 7). On définit donc les secteurs anatomiques « pathologiques » listés dans la figure 7, évoqués à l’issue d’un écho-test complet. Les secteurs anatomiques testés sont principalement sur les reins et voies urinaires dans plus de 47 % des cas. E) VALIDITÉ DES TESTS ÉCHOGRAPHIQUES (FIG. 8, 9). Un diagnostic d’exclusion ou d’éliminer un diagnostic de gravité lors de la prise en charge des patients ont été négatifs pour 44 % des tests (contrôlés et non contrôlés). Seul 16 % des tests ont nécessité un contrôle d’imagerie, surtout si le test est positif. Figure 4. Nombre de tests échographiques mensuels (2003-2004). Figure 5. Tranches horaires de réalisation des test échographiques (2003-2004). 28 f. grégoire Figure 6. Motifs d’admissions et d’indications des tests échographiques. Figure 9. Moyens de contrôle des tests échographiques. F) ORIENTATION DES PATIENTS À L’ISSUE DU TEST (FIG. 10). Figure 7. Secteurs anatomiques explorés par les tests échographiques. Les contrôles sont obtenus par une échographie dite de « référence » (34 %) faite par un médecin radiologue référent mais le plus souvent par une tomodensitométrie (66 %) à l’issue du test échographique de l’urgentiste et indépendamment du résultat. Aucun test n’a été doublement contrôlé par une échographie de référence puis un scanner. Au terme de la prise en charge des patients bénéficiant d’une aide au triage par le test échographique, 42 % des patients ne sont pas hospitalisés indépendamment du résultat du test. En effet, ces patients ne présentaient pas de diagnostics urgents confirmés par le test négatif où dont le test positif ne révélait pas de signes de gravité (exemple : lithiase urinaire à la jonction urétéro-vésicale sans hydronéphrose). Cinquante et un pour cent des hospitalisés et sept pour cent des patients transférés avaient, soit un test positif de gravité ou non, soit un test négatif mais dont l’évaluation f inale imposaitnécessairement une hospitalisation quelque soit le résultat du test. Figure 10. Orientation des patients post test échographique. G) ORIENTATION DES PATIENTS EN FONCTION DU RÉSULTAT ET CONTRÔLE DES TESTS (TAB. I). Figure 8. Résultats et validités des tests échographiques. évaluation de l’outil ultrasonique dans les mains d’un urgentiste 1. Non hospitalisés. Des patients (29 %) ont pu quitter le service des urgences sans hospitalisation avec un test échographique négatif (contrôlé ou non). 29 Tableau I. Orientation des patiens en fonction du résultat et contrôle des tests. Hospitalisation ou Transfert Retour à domicile Total Test positif 133 42 175 Test négatif 47 91 138 Total 180 133 313 73,90 % 68,40 % Sensibilité Spécificité 76 % VPP 65,90 % VPN Les patients quittant le service avec un test positif avec ou sans contrôle (moins de 14 %) n’avaient pas de signe de gravité échographique. Il n’y a pas de contrôle des tests négatifs sur une absence de signe de gravité clinique ni échographique (33,3 %) ou présence d’une anomalie échographique sans critère de gravité (12,9 %). Un test négatif est prédictif d’un retour à domicile (Valeur prélictive négative (VPN) = 66 %). 2. Hospitalisés/transférés. limité et n’a pas pour vocation de se substituer à l’examen échographique d’un radiologue. Ce « triage ultrasonique » des patients n’augmente pas la puissance du diagnostic (sensibilité) posé aux urgences puisque les diagnostics positifs suspectés et attendus l’auraient été par l’examen échographique réalisé par l’expert imageur s’il avait été sollicité en première intention. Le volume de tests négatifs (par la production d’images normales) sans solliciter le radiologue (sauf si doute clinique persistant motivant un contrôle) reste important pour la suite à donner de l’évaluation du patient et son orientation, a fortiori s’il est envisagé un retour à domicile. Le gain réel du test échographique est dans l’augmentation de la puissance de diagnostic d’élimination (test négatif) permettant un gain de temps dans la prise en charge du patient et une aide au choix de la meilleure f ilière d’orientation (notamment pour le retour à domicile) sans « emboliser » pendant de précieuses heures les couloirs de la zone de soins et les lits de l’Unité d’hospitalisation de courte durée (UHCD). Un test positif guide la pertinence du traitement et l’orientation du patient. Un test négatif guide surtout l’orientation (avec en corollaire, une aide précieuse à la gestion des lits de l’UHCD). Le principe du contrôle aux urgences renforce aussi, sans doute, la pertinence du recours à l’avis spécialisé tout en transformant favorablement la communication avec le radiologue qui a tout à gagner Dans 58 % des patients hospitalisés indépendamment du résultat du test, la majorité (plus de 42 %) a été hospitalisée avec un test échographique positif. Le plus souvent, l’hospitalisation est associée à un test échographique positif. Des patients (15 %) ont été hospitalisés malgré un test négatif. Un test ultrasonique positif est prédictif d’une hospitalisation (Valeur prélictive positive (VPP) = 76 %) car l’indication motivée par la clinique recherche un diagnostic d’exclusion, une conf irmation ou une recherche de complication à partir du diagnostic positif clinique. IV. DISCUSSION (fig. 11). L’intégration de l’outil échographique dans la démarche diagnostique aux urgences est communément admise. L’utilisation de l’échographe par un urgentiste formé pour la production et l’interprétation d’images est un concept nouveau, en France notamment. La formation PREP est originale par ses objectifs. Sa méthodologie est surtout immédiatement applicable après une formation de trois jours. Cette méthode simple permet la réalisation de coupes échographiques idéales dans leur obtention et interprétation (« gold standard »). Elle permet de répondre à un nombre de question volontairement 30 Figure 11. Résultat du test échographique et orientation. f. grégoire avec un interlocuteur urgentiste maîtrisant le PREP ou toute autre formation élémentaire en ultrasonographie. Cette présente évaluation se limite à un retour d’expérience isolé d’un urgentiste sur la pratique du « triage ultrasonique ». À partir de cette pratique individuelle et en espérant qu’elle précède d’autres analyses de pratique individuelle ou collective, on espère entrevoir la perspective encourageante d’un nouveau mode de pratique en médecine d’urgence. Si le PREP est une méthode parfaitement adaptée dans le domaine traumatologique, il semble également s’intégrer efficacement aux champs de compétence hors traumatologique de la médecine d’urgence. L’échographie est moins un outil diagnostic qu’un outil de triage et d’aide au traitement d’urgence et à l’orientation des patients. Il semble acquis que le bénéf ice (non mesuré dans l’étude) est un gain de temps et de qualité de prise en charge (13). La tentation serait grande d’introduire le PREP « bis » : Programme rapide d’échographie du patient. Parions enf in sur une généralisation de la pratique de l’échographie ciblée, par le biais de formations générales (universités) ou spécifiques (centres d’instruction des techniques de réanimation de l’avant), pour les urgentistes et tous les praticiens militaires de terrain (sous-marins et bâtiments de surfaces, antennes chirurgicales, et médecine de l’avant, hospitalière ou en unités, des forces de projection terrestres et aéroportées en opération extérieures). V. CONCLUSION. L’échographie est totalement intégrée à la démarche diagnostique de l’urgentiste. Cependant, le triage ultrasonique par l’urgentiste est un concept nouveau. Ce mode d’exercice sollicitant l’outil ultrasonique est amené à se généraliser sans se substituer à l’évaluation clinique première. L’échographie permet le plus souvent d’exclure un diagnostic conditionnant le retour à domicile ou permettant la bonne orientation de filière d’hospitalisation. Afin de guider l’orientation du patient, la demande d’un examen d’imagerie particulier (échographie ou tomodensidométrique) moins pour conf irmer que d’exclure un diagnostic urgent, est une réalité. L’échographie apporte toujours une information à l’urgentiste, même si son résultat est normal, et aide souvent à la décision de sortie du patient. Quelle que soit la formation spécifique (limitée) ou générale, l’échographe devrait pouvoir être une machine accessible à l’urgentiste. Un examen échographique standardisé réalisé par l’urgentiste doit toujours être contrôlé en temps réel ou différé selon son résultat et la situation clinique afin d’améliorer la performance de prise en charge et la sécurité des patients accueillis aux urgences. Remerciements : Pr. J.-M Bourgeois, Dr F. Gréco, Dr Ph. Pès, (CFFE, Centre francophone de formation à l’échographie, Nîmes www.ultrason.com). MC. G. Mion (DAR, HIA Val-de-Grâce), MC. B. Fontaine (DAR, HIA Robert Picqué), Service de santé des armées. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. American Institute of Ultrasound in Medicine. Official statement: training guidelines for physicians who evaluate and interpret diagnostic ultrasound examinations (1997). 2. Bourgeois J-M. L’échographie est surestimée en matière de traumatisme abdominal aigu. Qui doit réaliser l’échographie ? Qui surestime qui ? Journal Mensuel d’échographie, 1998 ; 1-5. 3. Buzzas GR, Kern SJ et al. A comparison of sonographic examinations for trauma performed by surgeons and radiologists. Journal of trauma 1998 ; 44 : 604-8. 4. Kern ST, Smith S, Fry WR, Helmer SD, Reed JA, Chang FC. Sonographic examination of abdominal trauma by senior surgical residents. Am Surg. 1997 ; 63 : 669-74. 5. Lanoix R, Leak L, Gaeta T, Gernsheimer JR. A preliminary evaluation of emergency ultrasound in the setting of an emergency medicine training program. Am J Emerg Med. 2000 ; 18 : 41-5. 6. Pès P, Rigoulet N, Gréco F, Bourgeois J-M. Échographie pour l’urgentiste, communication, Centre francophone de formation à l’échographie (Nîmes), JAMUP 2004. 7. Philip N. Salen, Scott W. Melanson, Michael B. Heller.The Focused Abdominal Sonography for Trauma (FAST) Examination: Considerations and Recommendations for Training Physicians in the Use of a New Clinical Tool Hospital. J. Trauma 1999 ; 46 : N° 3. évaluation de l’outil ultrasonique dans les mains d’un urgentiste 8. Scalea TM, Rodriguez A, Chiu WC et al. Focused assessment with sonography for trauma (FAST): results from an international consensus conference. J Trauma. 1999 ; 46 : 466-72. 9. Khimoun A, Mougin-Damour K, Tournan V et al. Apport du PREP (Programme rapide d’echographie du polytraumatisé) au médecin urgentiste. Communication congrès urgences 2006. JEUR. 2006 ; IS157- 422. 10. Bourgeois J-M. Est-il possible d’apprendre rapidement à des urgentistes une classification d’une hydronéphrose sur la vue de documents échographiques ? Journal Mensuel d’échographie, 2000 ; N° 5 : 1-5. 11. Jolly BT, Massarin E, Pigman EC. Color Doppler ultrasonography by emergency physicians for the diagnosis of acute deep vein thrombosis.Acad Emerg Med. 1997 ; 4 : 129-32. 12. Cogo A, Lensing AW, Koopman MM, Piovella F, Siragusa S, Wells PS et al. Compression ultrasonography for diagnostic management of patients with clinically suspected deep vein thrombosis: prospective cohorte study. BMJ.1998 ; 316 : 17-20. 13. Hadef H, Bilbault P, Arzouq H et al. Intérêt de l’échographie de dépistage sur le temps passé aux urgences. Étude comparative. Communication congrès urgences 2006. JEUR. 2006 ; IS157-420. 31 VIENT DE PARAÎTRE LIVRE DE L'ÉCOLE DU VAL-DE-GRÂCE ANNALES 2007 Quelles qu'en soient les formes d'exercice, la médecine se réfère à ses principes hippocratiques fondateurs. Parce qu'ils sont universels, elle est donc unique, cela ne donne que plus d'intérêt à la très grande diversité des pratiques en fonction des époques, des évolutions scientifiques et morales, des modes parfois, des groupes sociaux et des circonstances. L'emballement qui a accompagné le progrès scientifique et technique des dernières décennies semble progressivement faire place à plus de maturité et de prudence dans l'appropriation, par chaque discipline, des avancées qui la concernent. La médecine militaire, elle aussi, a évolué dans bien des domaines. Elle s'est dotée d'équipements de niveau technique élevé, a amélioré ses connaissances sur les réponses psycho-physiologiques en environnement hostile, redéfini ses doctrines et ses bonnes pratiques à la lumière de l'expérience acquise sur de très nombreux théâtres d'opérations. Elle s'est affirmée dans un savoirfaire qui converge avec les plus récentes préoccupations de la santé publique : réflexion actualisée sur les situations de crise sanitaire, prise en compte de risques nouveaux naturels ou agressifs, nécessaire coordination des moyens, réactivité dans l'action. Les différents chapitres de cet ouvrage sont autant de témoignages que l'École du Val-de-Grâce fournit de cette évolution qui permet à la médecine militaire française de se présenter aujourd'hui comme l'une des pratiques les plus modernes et novatrices, aussi bien au sein de l'espace national que plus largement à l'échelon international. Médecin général des armées Bernard LAFONT directeur central du Service de santé des armées ISBN : 978-2-1 1-006743-2 – Prix : 10€ – Format : 24X 16 – Pages : 252 – Documentation française : 29/31, quai Voltaire 75344 Paris cedex 07 – Tél. : 01 40 15 70 00 – Fax : 01 40 15 72 30 – www.Ladocumentationfrancaise.fr 32 Thérapeutique et technique en situations d’urgence ÉVALUATION DE L’UTILISATION DU TUBE LARYNGÉ (LTS II™) PAR LES PERSONNELS DES SERVICES MÉDICAUX D’UNITÉ P. RAMIARA, S. BÉNÉFICE, É. MEAUDRÉ, A. POLYCARPE, J.-P CARPENTIER RÉSUMÉ Dans les services médicaux d’unité, les brancardierssecouristes, les infirmiers et les médecins sont formés à la ventilation au ballon auto-remplisseur pour assurer une assistance ventilatoire chez des blessés en détresse respiratoire et/ou comateux. Mais seul le médecin est formé à l’intubation oro-trachéale. Au cours d’une mission extérieure, une étude a été réalisée pour évaluer la facilité d’utilisation d’un dispositif supra-laryngé, le tube laryngé (LTS II™), par l’ensemble des personnels des services médicaux d’unité. Mots-clés : Brancardiers-secouristes. Dispositif supralaryngé. Infirmiers. Médecins. Tube Laryngé (LTS II™). ABSTRACT EVALUATION OF THE USE OF LARYNGEAL TUBE (LTS II™) BY PERSONELS OF UNITS MEDICAL SERVICES. Medics, nurses and physicians of units’ medical services are trained to use facemasks and self-inflating bags for the treatment of patients with respiratory distress and/or in coma. But tracheal intubation can only be performed by a doctor. During two months, a study was carried out to assess whether a suppraglottic device, the laryngeal tube (LTS II™) is easy to use for personnels of units medical services. Keywords: Laryngeal tube (LTS II™). Medics. Nurses. Physicians. Supraglottic device. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 33-37) I. INTRODUCTION. Les personnels des services médicaux d’unité (SMU), médecins (M), inf irmiers diplômés d’état (IDE) et brancardiers secouristes (BS), sont formés non seulement aux gestes de secourisme mais aussi à la réalisation d’une ventilation au masque et au ballon auto-remplisseur, af in d’assurer une assistance ventilatoire chez des blessés en détresse respiratoire et/ou comateux. Seul le médecin est formé à la technique de référence de l’assistance ventilatoire : l’intubation oro-trachéale. En temps de paix comme en temps de guerre, le soutien des groupes et/ou des sections est le plus souvent réalisé par des paramédicaux rarement par des médecins. Afin de proposer un nouveau moyen de contrôle des voies aériennes supérieures efficace et utilisable par tous, une P. RAMIARA, médecin principal, praticien confirmé. S. BÉNÉFICE, médecin en chef, praticien certifié. É. MEAUDRÉ, médecin principal, praticien certifié. A. POLYCARPE, médecin principal, praticien certifié. J.-P CARPENTIER, médecin chef des services, professeur agrégé du SSA. Correspondance : P. RAMIARA, service anesthésie réanimation, HIA Laveran, BP 50, 13998 Marseille Armées. médecine et armées, 2008, 36, 1 étude a été réalisée pour évaluer la facilité d’utilisation d’un dispositif supra-laryngé, le tube laryngé (LTS II™), par les personnels médicaux et paramédicaux des forces au cours d’une mission extérieure. II. MATÉRIEL ET MÉTHODE. Commercialisé depuis 1999 par la société VBM Medizintechnik GmBH, le tube laryngé (fig. 1) est un dispositif supra-laryngé constitué d’un tube unique en silicone avec deux ballonnets œsophagien et oropharyngé entre lesquels se trouve un orifice ventral pour la ventilation. Les deux ballonnets sont gonflés simultanément par l’intermédiaire d’une tubulure unique. La mise en place œsophagienne de la pointe du tube laryngé est nécessaire pour permettre la ventilation. Sur certains modèles, un orifice accessoire pour la mise en place d’une sonde gastrique est disponible. Le ballonnet œsophagien assure une étanchéité de bonne qualité par une pression de fuite élevée (28 cm d’H2O), et une vidange gastrique de l’estomac par sonde gastrique est possible par l’orifice accessoire. Il existe cinq codes couleur correspondant à cinq tailles 33 différentes proportionnelles à la taille du patient : deux tailles enfant, trois tailles adulte (<155 cm, entre 155-180 cm, > 180 cm). Cette étude prospective, non randomisée, a été effectuée avec l’accord des patients au cours d’une mission de deux mois dans le cadre d’une antenne chirurgicale. Trente quatre patients devant bénéf icier d’une chirurgie réglée ont été inclus. Pour les patients opérés, les critères d’inclusion ont été : patients ASA ≤ 2 ; âge > 18 ans ; taille entre 150 et 180 cm ; sans anomalie des voies aériennes supérieures, sans critères d’intubation difficile à l’examen clinique (Mallampatti ≤ 2 ; ouverture de bouche ≥ 35 mm ; distance thyro-mentale ≥ 65 mm), concernant une chirurgie extra-péritonéale ou périphérique. Les personnels évalués étaient les personnels médicaux et paramédicaux des forces (médecin, infirmier et brancardier-secouriste) toute expérience confondue. Après la projection d’une vidéocassette sur l’utilisation technique du tube laryngé, les candidats étaient orientés vers le bloc opératoire sans pénétrer dans la salle d’intervention. Les patients devant être opérés et pouvant participer à l’étude étaient admis pour l’induction en salle d’intervention lors de la projection du support audiovisuel. La pose de la voie veineuse périphérique réalisée, la perfusion était entretenue par des cristalloïdes pour compenser le jeune pré-opératoire et les pertes insensibles pré-opératoires. Le monitorage était standard et comprenait : la pression artérielle non invasive, la fréquence cardiaque, la SpO2, la PETCO2 et un monitorage de la curarisation. Le protocole d’anesthésie était standardisé avec : propofol à la posologie de 1 à 3 mg/kg, sufentanil à la posologie 0,5 μg/kg associé à une curarisation par vécuronium à la posologie à 0,15 mg/kg. Dans notre travail, le tube Laryngé de taille 4 (fig. 1) a été utilisé ; il était stérilisé selon les normes en vigueur et avec les recommandations du fabricant entre chaque patient. La ventilation manuelle était réalisée jusqu’à l’obtention d’un train de quatre (TOF) < 2/4 au niveau du muscle sourcilier, témoignant d’une curarisation profonde et simulant un arrêt respiratoire. Le LTS II™ était préparé, mis à proximité du patient anesthésié. Le patient était laissé en décubitus dorsal, la tête en position neutre. Le candidat était alors appelé ; il était chronométré, dès son entrée en salle, pour la pose et jusqu’à la fixation du dispositif. Les critères étudiés étaient : le nombre de mise en place (échec si deux tentatives infructueuses), le temps pour obtenir un premier volume courant (Vt) efficace (> 500 ml), la présence d’un traumatisme (sang sur le tube laryngé et dans le pharynx à la laryngoscopie directe), et l’appréciation par l’opérateur de la facilité d’utilisation à partir d’une échelle allant de zéro (difficile) à dix (facile). Ces paramètres étaient recueillis par un anesthésiste présent en salle qui contrôlait la bonne position du dispositif par l’auscultation et les données spirométriques fournies par le respirateur d’anesthésie (Fabius Dräger®). Une fois la phase d’étude effectuée et avant de débuter la chirurgie, le contrôle des voies aériennes supérieures était réalisé par intubation trachéale, ce qui permettait à l’examinateur de noter la présence de sang sur le dispositif ou l’existence d’un traumatisme à la laryngoscopie directe. III. RÉSULTAT. Au total, 34 personnels ont été évalués pour la mise en place du LTS II™ chez des patients anesthésiés et curarisés soit : 13 brancardiers-secouristes, 12 infirmiers et 9 médecins. Les résultats sont représentés dans le tableau I. Au total, 32 personnels ont posé un tube laryngé, soit 94 % de notre population. Deux échecs ont été enregistrés, soit 6 % des professionnels évalués : un médecin et un secouriste. Les temps pour la pose, la fixation et la réalisation d’un premier volume courant supérieur à 500 ml, qui correspond au volume efficace Tableau I. Résultats évaluation de mise en place du LTS II TM par groupe. Nbre de Temps de Nbre de facilité mise en Échec pose traumad’utilisation place moyen (s) tisme Médecin (n = 9) 8 1 63± 27 1 9,2/10 Infirmier (n = 12) 12 0 63± 27 0 9,2/10 Brancardier secouriste (n = 13) 12 1 71± 28 1 8,9/10 Figure 1. Tube Laryngé LTS II™ Taille 4. 34 p. ramiara en cas d’arrêt cardio-respiratoire, sont quel que soit le groupe, inférieur à 90 secondes. Les appréciations moyennes par groupe sur la facilité d’utilisation sont toutes satisfaisantes et proches de 9/10. complet de ces derniers avant introduction, lubrification de la partie postérieure du tube laryngé par du K-Y™. La main libre de l’opérateur dégage le maxillaire inférieur vers le haut, ce qui permet de s’assurer de la bonne position de la langue. L’autre main prend le matériel IV. DISCUSSION. En temps de paix comme lors de conflit, l’incidence des accidents imposant le recours à une assistance et un contrôle des voies aériennes supérieures est peu connu au sein des forces. Si elles sont plus fréquentes lors de conflit, ces situations sont en effet rares mais non exceptionnelles en temps de paix. Le soutien des exercices (manœuvre, marche course) est réalisé selon les recommandations des textes officiels (1) par des auxiliaires sanitaires et des infirmiers avec parfois des médecins selon l’importance des personnels impliqués et le type d’activité réalisée. En cas de détresse respiratoire, les personnels paramédicaux ne sont formés qu’à la ventilation au masque avec ballon auto-remplisseur. Cette technique est difficile à maîtriser si on la pratique peu, avec un risque non négligeable d’inhalation et d’inefficacité (2, 3). Dans les forces, seul le médecin est formé à l’intubation oro-trachéale, référence en matière de contrôle des voies aériennes supérieures. Le nombre d’intubation oro-trachéale réalisé en dehors de toutes structures hospitalières dans nos armées n’est pas connu mais ce dernier geste est rarement pratiqué. Dans la littérature, il est reconnu que le peu de pratique de ce geste est un des facteurs d’échec à sa réalisation (4, 5). D’ailleurs, afin de maintenir leur compétence technique, les praticiens des forces doivent réaliser des stages périodiques en Centre d’instruction aux techniques élémentaires de réanimation de l’avant (CITERA) ou des activités pré-hospitalières en métropole. C’est pour tenter de trouver une solution à ces deux problèmes que cette étude a été réalisée : évaluer un dispositif f iable et utilisable par tous au sein des services médicaux d’unité. Le tube laryngé est un dispositif supra glottique de ventilation, récemment mis à la disposition des anesthésistes en France (6, 7). Il fait partie des moyens utilisables en cas d’intubation difficile non prévue (8). Comme le Combitube™, il peut être utilisé en pré-hospitalier (9, 10) et en anesthésie (7, 11). Également, comme le masque laryngé, il en existe plusieurs modèles : autoclavable réutilisable ou à usage unique, simple ou munis d’un canal de drainage qui vise à améliorer les pressions de fuites, réduire le risque d’inhalation gastrique et permettre l’aspiration du contenu de l’estomac. Le tube autoclavable est plus rigide et le canal de drainage en augmente son calibre et sa rigidité. Dans cette étude, le matériel utilisé était le tube laryngé, LTS II™ de la société VBM Medizintechnik GmBH. Sa mise en place est simple et ne requiert pas d’exposition préalable (fig. 2). L’opérateur se place derrière le patient, la tête est dans l’axe légèrement surélevée ou en position neutre. Le matériel doit avoir été préparé avant sa mise en place : vérification de l’intégrité des ballonnets et dégonflage Figure 2. Séquence de pose du tube laryngé LTS II ™. évaluation de l’utilisation du tube laryngé (lts IITM) par les personnels des services médicaux d’unités 35 comme un stylo au niveau du marquage. L’extrémité effilée est poussée contre le palais du patient, en le faisant glisser lentement le long du voile du palais et de la cloison postérieure dans l’axe de l’hypopharynx. Une marque repère existe sur les tubes qui doit être au niveau des dents, une fois le dispositif en place. Les ballonnets sont gonflés au volume indiqué sur la seringue selon le code couleur. Le ballonnet proximal stabilisant le tube est rempli en premier et s’adapte à l’anatomie du patient. Le ballonnet distal est gonflé automatiquement grâce à une communication des canaux de gonflage, il obture la bouche œsophagienne. Pour des utilisations courantes, le fabricant recommande d’appliquer une pression de 60 cm H2 O aux ballonnets et de la vérifier avec un inflateur. Notre travail démontre la facilité d’utilisation de ce matériel quel que soit le niveau de formation et d’expérience des professionnels étudiés. Les temps de mise en place pour obtenir un premier volume courant eff icace sont en secondes de 71±28 dans le groupe brancardiers secouristes, 63±27 dans le groupe infirmier et 63+27 dans le groupe médecin. Deux échecs, un dans le groupe auxiliaire sanitaire et un dans le groupe médecin, ont été enregistrés. Comparés aux autres études réalisées en pré-hospitalier ou sur mannequin qui montrent que ce dispositif est utilisable par des personnels paramédicaux sans entraînement préalable (9, 10), nos résultats sont comparables ; ils rappellent la facilité de mise en place de ce type de dispositif. Toutefois ces travaux sont réalisés dans des pays où le système de secours pré-hospitalier est différent du notre, avec recours à des « paramédics ». Ces derniers sont formés à la ventilation au masque et ballon ; mais également à l’intubation oro-trachéale (12). Le niveau de nos personnels paramédicaux est différent et extrêmement variable d’une unité à l’autre. Dans leur formation initiale, les infirmiers, comme les brancardiers secouristes, ne sont formés qu’à la ventilation au masque et au ballon auto-remplisseur. Il est sûr que les conditions de pose dans notre travail (patient anesthésié, curarisé, sans critères de ventilation difficile) ne sont pas celles de la réalité sur le terrain. Le but était de reproduire un modèle pouvant simuler un arrêt cardio-respiratoire, et surtout d’évaluer la facilité de pose de ce dispositif par les différentes catégories de personnel d’un service médical d’unité. Dans les deux groupes paramédicaux, donc les moins formés, cette dernière a été cotée à 9/10 en moyenne. D’autres études seront donc probablement nécessaires pour se mettre dans des conditions plus proches de la réalité après la mise en place du tube laryngé dans les unités avec recueil des données après son utilisation. Ce qui semble également intéressant, est la possibilité d’avoir un outil supplémentaire de contrôle des voies aériennes supérieures en unité. En effet, même si les médecins sont formés à l’intubation trachéale au cours de leur brevet de médecine de l’avant, des stages CITERA et lors des formations complémentaires comme la capacité de médecine d’urgence. Ce dispositif peut représenter 36 une alternative à l’intubation comme cela a déjà été le cas dans certaines observations publiées (13). Il semble que ce dispositif soit peu traumatisant ; dans notre travail, seuls deux traumatismes ont été enregistrés correspondant aux deux échecs : ils s’agissaient de la présence de sang sur le LTS II™ sans lésions muqueuses associées. Ce caractère atraumatique est retrouvé dans la littérature (14). Toutefois il faut admettre que les conditions de mise en place étaient optimales : patient anesthésié, curarisé, avec contrôle des pressions des ballonnets, contrôle du dispositif et de sa bonne position par un praticien. De plus, dans notre travail, les dispositifs n’étaient pas laissés en place après la phase d’étude pour évaluer la possibilité de lésions par la présence de sang à la laryngoscopie directe. Or, il est reconnu que les pressions de gonflage des ballonnets doivent être contrôlées et vérifiées pendant l’utilisation, car un excès de pression peut être à l’origine de lésions ischémiques des muqueuses oro-pharyngées (15, 16). Un cas récent de lésion oro-pharyngée a été décrit lors d’une utilisation en chirurgie réglée en dehors de toutes difficultés de mise en place (17). Enfin, même si ce critère n’était pas étudié dans notre travail, il est reconnu dans la littérature que les pressions de fuites sont plus élevées avec le tube laryngé qu’avec un autre dispositif supra laryngé comme le masque laryngé, avec donc moins de risques d’insufflation gastrique (18). L’orifice accessoire du LTS II™ permet l’introduction d’une sonde gastrique pour vidanger l’estomac. Il y a donc un double mécanisme de protections vis-à-vis de l’inhalation. Le modèle, commercialisé et utilisé dans ce travail, permettait sous couvert d’être stérilisé selon les normes recommandées par le laboratoire de nombreuses réutilisations. Pour les services médicaux d’unité, cette particularité est intéressante notamment du fait du faible nombre de contrôle des voies aériennes supérieures en urgence, et de la possibilité de restériliser le dispositif par autoclave. Toutefois, il en existe désormais à usage unique pour prévenir le risque de contamination par agents transmissibles non conventionnels (14). V. CONCLUSION. Facile à mettre en place et peu traumatisant, le tube laryngé LTS II™, peut représenter une solution pour des personnels paramédicaux et médicaux des forces, parfois isolés, en attendant une évacuation vers une structure adaptée. En effet, il permet d’assurer une assistance ventilatoire, de protéger les bronches contre une inhalation et de vidanger l’estomac. Une réflexion doit donc être menée afin d’envisager la possibilité de mettre en place le tube laryngé LTS II™, au niveau des services médicaux d’unité et des postes de secours ; et de mettre en place une formation initiale, dans le cadre des CITERA et des formations élémentaires, portant sur les indications et les modalités de mise en place. p. ramiara RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. 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LE GOFF, J. LEYRAL, C. MALAGOLI, J. MARCHI, O. MAURIN, D. MEYRAN, D. PONS D. ZEKRI. 9782840235286 – Éditions SAURAMPS Médical – Sarl Dominique Torreilles – 11 boulevard Henri IV – CS79525 – 34960 Montpellier Cedex 2 – Tél. : 04 67 63 68 80 – Fax : 04 67 52 59 05 – Mail : [email protected] – Succursalle : 8 rue de Primatice – 75013 Paris – Tél. : 01 40 09 27 71 – Fax : 01 40 09 80 71. évaluation de l’utilisation du tube laryngé (lts IITM) par les personnels des services médicaux d’unités 37 COMMUNIQUÉ BATAILLON DE MARINS POMPIERS DE MARSEILLE SERVICE MÉDICAL D’URGENCE ET DE RÉANIMATION CLUB DES ANESTHÉSISTES RÉANIMATEURS ET DES URGENTISTES MILITAIRES IMTSSA présentent « LES JEUDIS DE L’URGENCE » 2008 JEUDI 7 FÉVRIER 2008 JEUDI 6 MARS 2008 L’URGENCE EN MÉDECINE TROPICALE Président J.M. SAISSY (IMTSSA). Animateur : A. PUIDUPIN (HIA Laveran) LES TROUBLES DU RYTHME EN URGENCE : DE LA CELLULE AU TRAITEMENT Président : P. HENO (HIA Bégin, Paris). Animateur : J. LEYRAL (BMPM) Recommandations pour la pratique clinique 2007 : Accès palustre chez l’enfant N. GUILHEM (CHU Nord, Marseille) Accès palustre chez l’adulte P. PAROLA (CHU Nord, Marseille) Prévention du paludisme J.-P. DELMONT (CHU Nord, Marseille) Patient fébrile après un séjour en milieu tropical : quels diagnosticsd’urgence en dehors du paludisme ? P. BERNARD (HIA Ste-Anne, Toulon) Urgences tropicales : cas cliniques G. LEYRAL (HIA Ste-Anne, Toulon) Troubles du rythme : mieux comprendre le mécanisme pour mieuxcomprendre le traitement P. HENO (HIA Bégin, Paris) Tachycardies à QRS larges : une démarche diagoistique rapide et fiable D. MEYRAN (BMPM) Prise en charge des arytmies en urgence : les recommandations de SAMU de France J.-P. TORRES (Paris) Ateliers : cas cliniques sur mannequis simulateurs de troubles du rythme JEUDI 15 MAI 2008 JEUDI 3 AVRIL 2008 L’ÉCHOGRAPHIE CLINIQUE EN MÉDECINE D’URGENCE Président : P. JEAN (CHU Nord, Marseille). Animateur : T. ACZEL (BMPM), P. PES (SAMU 44) Intérêt de l’échographie en médecine préhospitalière T. ACZEL, J. LEYRAL (BMPM) L’échographie au SAU N. ATTARD (CHU Ste Marguerite, Marseille) L’échographie clinique : outil indispensable pour l’urgentiste de demain ? P. PES (SAMU 44), E. HINGLAIS (CHU Tenon, Paris) Ateliers pratiques : initiation à l’échographie LE MÉDECIN URGENTISTE EN SITUATION D’EXCEPTION avec la Société française de médecine de catastrophe Président : R. NOTO (Paris). Animateur : L. STEMPFEL, O. MAURIN (BMPM) Le secours en montagne F. MANGELLE (SAMU 31) La médecine d’urgence en spéléologie F. ROCOURT (CHU Grenoble) Le médecin de marine : un homme à la mer P. LAFROGNE (EMM Toulon) Soutien médical d’une unité contre terroriste : concept au GIGN F. CASTEL, E. LE GONIDEC (GIGN Paris) Soutien médical d’une mission du commandement des opérations spéciales J.M. Pontier (HIA Sta-Anne Toulon) JEUDI 5 JUIN 2008 JEUDI 26 JUIN 2008 ACTUALISATION DES PRATIQUES DE MÉDECINE D’URGENCE EN MILIEU NRBC Président : A. CAMPILLO (DRSSA). Animateur : L. LACHENAUD (BMPM) LES PATHOLOGIES DES VACANCES Président : P. KIEGEL (CH Aix en Provence). Animateur : S. PETIT (BMPM) Actualités des doctrines nationales NRBC L. LACHENAUD (BMPM) Reconstitution dosimétrique en cas d’accident d’irradiation J.F. BOTTOLLIER-DEPOIS (IRSN, Paris) Nouvelle stratégie thérapeutique des brûlures radiologiques M. BENDERITTER (IRSN, Paris) Exercice : attentat radiologique Ateliers médico-techniques : risques et menaces radiologiques Les envenimations graves G. MION (HIA Val-de-Grâce, Paris) L’urgence et les sports nautiques émergents S. PETIT (BMPM) Prise en charge des brûlés E. DANTZERL (HIA Ste-Anne, Toulon) Accident de plongée C. PENY (HIA Ste-Anne, Toulon) Hyperthermie maligne d’effort A. PUIDUPIN (HIA Laveran, Marseille) Lieu : Institut de médecine tropicale du Service de santé des armées, bd Charles Livon 13007 Marseille. Horaires : de 9h00 à 12h30 et de 14h à 16h30 – Réservation obligatoire pour le déjeuner –t Tél. : 04 95 05 40 82 Fax : 04 95 05 40 78 – Email : [email protected] 38 Thérapeutique et technique en situations d’urgence THROMBOLYSE PRÉ-HOSPITALIÈRE PAR TÉNECTÉPLASE D’UNE EMBOLIE PULMONAIRE MASSIVE COMPLIQUÉE D’UN ARRÊT CARDIAQUE PROLONGÉ. J. LEYRAL, D. MEYRAN, C. BAR, T. ACZEL, Y. LE GOFF, J. MARCHI, P. LE DREFF RÉSUMÉ Le traitement de l’embolie pulmonaire massive repose sur la thrombolyse en urgence. Cette thérapeutique est exceptionnellement réalisée au domicile des patients car elle nécessite au préalable des examens d’imagerie pour confirmer le diagnostic. Les auteurs rapportent le cas d’une femme, âgée de 58 ans, présentant une embolie pulmonaire responsable d’une détresse respiratoire et d’un choc cardiogénique qui a été thrombolysée à son domicile par une équipe du Service mobile d’urgences et réanimation. La situation clinique s’est initialement dégradée avec survenue d’un arrêt cardio-circulatoire. Celui-ci a été récupéré après 40 minutes de réanimation. Pendant son transport, la patiente montrait les premiers signes de réveil, le lendemain, en réanimation, son score de Glasgow était évalué à 15. En l’absence d’examen d’imagerie, une détresse circulatoire et à plus forte raison un arrêt cardio-circulatoire sont une bonne indication à la thrombolyse pré-hospitalière d’une embolie pulmonaire massive. La ténectéplase est efficace et peut être employée dans cette indication. La survenue d’un arrêt circulatoire doit donner lieu à une réanimation cardio-pulmonaire prolongée (au moins 60 minutes en l’absence de récupération). La présence d’échographes portatifs dans les ambulances de réanimation doit être encouragée, car elle permet de confirmer, dès la phase pré-hospitalière, le diagnostic clinique du médecin. Mots-clés : Arrêt cardiaque. Choc cardiogénique. Embolie pulmonaire massive. Ténectéplase. Thrombolyse pré-hospitalière. I. INTRODUCTION. Le traitement de l’embolie pulmonaire massive repose sur la fibrinolyse en urgence. Cette thérapeutique invasive n’est qu’exceptionnellement réalisée en Service mobile d’urgences et réanimation (SMUR) parce qu’en l’absence d’examen complémentaire, le diagnostic d’embolie J. LEYRAL, médecin principal, praticien certifié. D. MEYRAN, médecin en chef. C. BAR, médecin principal. T. ACZEL, médecin. Y. LE GOFF, médecin principal. J. MARCHI, médecin. P. LE DREFF, médecin en chef, praticien confirmé. Correspondance : J. LEYRAL, SMUR du BMPM, 137 Bd de Plombières, 13303 Marseille Cedex 03. médecine et armées, 2008, 36, 1 ABSTRACT PRE-HOSPITAL THROMBOLYSIS BY TENECTEPLACE OF A MASSIVE PULMONARY EMBOLY WITH A PROLONGED CARDIAC ARREST. The treatment of massive pulmonary embolism stands on the trombolysis in emergency. This treatment is exceptionnaly made in prehospital situation because it needs some complementary exams, to confirm the diagnosis. The authors relate the case of a 58 years old woman witch presents a pulmonary emboly responsible of a respiratory failure and a cardiogenic shock who have been trombolysed at home by a SMUR team. The clinical situation has been deteriorated by the arrival of a cardiac arrest. This one has been resuscitated after cardio pulmonary of resuscitation (45 minutes). During the transport the patient has showed the first signs of waking. 24 hours after the admission in the intensive care unit the Glasgow score was estimated at 15. Without complementary exams, a cardiogenic shock and, more other, a cardio pulmonary arrest, are a very good indication for a prehospital trombolysis. The tenecteplase is in that case efficient and indicated. The occurrence of a cardiac arrest must give rise to a prolonged cardio pulmonary resuscitation (at least 60 minutes in absence of recovery of cardiac functions). In the future it should be desirable that the prehospital emergency team had at one’s disposal a portable echograph, who permits in this situations to confirm the medical diagnosis. Keywords: Cardiac arrest. Cardiogenic shock. Massive pulmonary embolism. Pre-hospital thrombolysis. Tenecteplase. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 39-42) pulmonaire sur le terrain est difficile et incertain. Aussi, cette urgence cardiovasculaire ne bénéf icie le plus souvent que d’un traitement pré-hospitalier minimal comprenant une oxygénothérapie, une anti-coagulation et une surveillance médicale armée du patient pendant son transport. Il n’est donc pas rare que les patients s’aggravent en cours de transport et que certains décèdent avant d’accéder aux techniques hospitalières de désobstruction. Nous rapportons ici le cas d’une embolie pulmonaire grave, compliquée d’un choc cardiogénique puis d’un arrêt cardiaque prolongé qui a bénéficié avec succès d’une thrombolyse pré-hospitalière par ténectéplase. 39 II. OBSERVATION. Une ambulance de réanimation des marins-pompiers de Marseille a été envoyée au domicile de Mme B., âgée de 58 ans, pour suspicion d’asthme aigu très grave. À l’arrivée du SMUR, la patiente était consciente (score de Glasgow à 15), agitée, très angoissée, livide et en sueurs. Elle alléguait une oppression basi-thoracique et épigastrique ainsi qu’une sensation de « manque d’air ». Ses antécédents étaient limités à deux malaises récents, dont le dernier, dix jours auparavant, s’était accompagné d’une perte de connaissance avec chute, responsable d’une fracture du péroné. La fracture avait été immobilisée par une attelle rigide, la patiente n’avait pas bénéficiée d’un traitement préventif par héparine de bas poids moléculaire. Ses facteurs de risques se limitaient à une obésité. Elle ne prenait aucun traitement. L’auscultation pulmonaire, strictement normale, a éliminé aussitôt le diagnostic d’asthme. L’examen cardiovasculaire retrouvait une fréquence cardiaque à 110 battements par minute (bpm), une pression artérielle à 80/40 mmHg, une cyanose des lèvres et des extrémités, des marbrures et un temps de recoloration capillaire allongé au-delà de trois secondes. La saturation percutanée en oxygène n’était pas mesurable par l’oxymètre de pouls. Des signes d’insuffisance cardiaque droite étaient cliniquement perceptibles (hépatalgie à la pression et reflux hépato-jugulaire). L’électrocardiogramme 18 dérivations inscrivait une tachycardie sinusale à 130 bpm, un axe normal (30°), un bloc de branche droit complet et un aspect S1Q3 (fig. 1). Il n’existait pas de trouble significatif de la repolarisation. Le reste de l’examen était sans anomalie majeure. Devant ce tableau, le diagnostic de choc cardiogénique compliquant une embolie pulmonaire a été retenu. La patiente a été mise en position de Trendelenbourg, oxygénée (12 l/min), perfusée, un remplissage a été débuté. La décision de f ibrinolyser la patiente a été prise par le médecin du SMUR devant l’absence d’amélioration rapide de l’état clinique de la patiente et l’apparition de trouble de la conscience (somnolence). M me B. a alors présenté un arrêt cardio-circulatoire (dissociation électromécanique). Un massage cardiaque externe a été aussitôt débuté, puis la patiente a été intubée, ventilée et a reçu un premier bolus de 1 mg d’adrénaline par voie intraveineuse directe, renouvelé toutes les trois minutes (13 mg en dose totale). Les 8 000 UI de ténectéplase ont ensuite été administrées en bolus unique, associées à 4 000 UI d’héparine par voie intraveineuse. La réanimation cardio-pulmonaire a été poursuivie 40 minutes avant de récupérer une activité cardiaque spontanée. Le maintien de conditions hémodynamiques stables (pression artérielle systolique comprise entre 90 et 100 mmHg) a nécessité l’association de deux sympathomimétiques (dobutamine 10 μg/kg/minute et adrénaline 3 mg/heure). Durant le transport madame B a présenté des signes de réveil (mouvements spontanés de la tête, résistance à la ventilation en pression positive) rendant nécessaire une sédation pour adapter la patiente au respirateur (fentanyl 100 μg/heure et midazolam 5 mg/heure). Elle est arrivée dans le service de réanimation après 1 h 30 de prise en charge par le SMUR. À son admission, Mme B. est jugée hémodynamiquement trop instable pour être transférée en radiologie pour y bénéficier d’un angioscanner thoracique. Une échographie cardiaque trans-thoracique a en revanche été rapidement réalisée au lit du malade. Celle-ci a confirmé le diagnostic d’embolie pulmonaire massive, puisqu’elle objectivait une dilatation des cavités droites, une insuff isance tricuspide sévère et une élévation des pressions artérielles pulmonaires à 45 mmHg. Le dosage des D. Dimères par méthode ÉLISA trouvait un taux supérieur à 4mg/L. Le pro-BNP était mesuré à 219 UI/L, la troponine à 0,6 μg/L. Il n’existait pas de syndrome inflammatoire. L’évolution a été dans un premier temps favorable : à l’arrêt de la sédation la patiente a présenté un état neurologique très satisfaisant (score de Glasgow estimé à 15), l’hypoxémie a été corrigée par la ventilation contrôlée (FiO2 = 0,5), l’état hémodynamique a été stabilisé sous perfusion continue d’adrénaline et de noradrénaline. Malheureusement, le deuxième jour, l’état de la patiente s’est dégradé : l’hypoxémie est devenue réfractaire à une ventilation optimale, l’état de choc n’a plus pu être contrôlé malgré des posologies importantes de sympathomimétiques, une insuffisance rénale sévère a nécessité une hémodiafiltration continue. La patiente est décédée le troisième jour de son hospitalisation dans un tableau de défaillance polyviscérale. Figure 1. Électrocardiogramme de Mme B. (tachycardie à 140 bpm, aspect S1Q3 bloc de branche droit). 40 j. leyral III. DISCUSSION. Un choc cardiogénique révèle une embolie pulmonaire dans environ 5 % à 10 % des cas (1). Dans notre observation, la présence de plusieurs facteurs de risques de maladie thrombo-embolique (âge > 40 ans, obésité, immobilisation d’un membre) associés à une dyspnée, une douleur basi-thoracique, des signes cliniques d’insuffisance cardiaque droite aiguë (hépatalgie et reflux hépato-jugulaire) et électrocardiographiques de cœur pulmonaire aigu (bloc de branche droit, aspect S1Q3) rendent le diagnostic d’embolie pulmonaire hautement probable. La tachycardie et l’angoisse sont également fréquemment retrouvées lors d’une embolie pulmonaire, mais ils peuvent être ici attribués à l’état de choc. La probabilité diagnostique d’embolie pulmonaire aurait pu être conf irmée par l’utilisation d’un score d’évaluation. En SMUR le score de Wells, exclusivement clinique, est le seul utilisable (tab. I). Les autres scores (ASE et genevois), fréquemment utilisés aux urgences, ne pouvaient pas ici aider le médecin car ils utilisent des critères d’imagerie et de biologie rarement disponibles en SMUR (2). Tableau I. Score de Wells Antécédents personnels d'EP ou de TVP + 1,5 Chirurgie < 1 mois ou immobilisation récente + 1,5 Cancer actif +1 FC > 100 bpm + 1,5 Signes cliniques de TVP +3 Hémoptysie +1 Diagnostic alternatif moins probable que l'EP +3 Probabilité clinique d'EP faible <2 Probabilité clinique d'EP intermédiaire 2-6 Probabilité clinique d'EP forte >6 EP = embolie pulmonaire, TVP = thrombose veineuse profonde, FC = fréquence cardiaque, bpm = battements par minute. La présence d’un choc cardiogénique, affirmé dans notre observation par l’association d’une hypotension artérielle persistante inférieure à 90 mmHg à des signes d’hypoperfusion tissulaire périphérique conduit au diagnostic d’embolie pulmonaire grave telle qu’elle est définie par la société européenne de cardiologie (ESC) (3). La fibrinolyse en est le traitement de référence (4, 5). Celle-ci est recommandée chez un patient hospitalisé, après conf irmation diagnostique de l’embolie par, au minimum, une échographique cardiaque transthoracique montrant des signes de cœur pulmonaire aigu (3, 6). Aussi, à l’avenir, la f ibrinolyse pourrait être réalisée dès la phase pré-hospitalière de la prise en charge d’une embolie pulmonaire grave par des équipes de SMUR équipées d’un appareil d’échographie portatif et d’un médecin formé à son usage. Seule l’altéplase (actilyse ® ) bénéf icie de l’Autorisation de mise sur le marché (AMM) dans l’embolie pulmonaire. Cependant, les sociétés savantes estiment que les autres fibrinolytiques peuvent également être employés, même si la priorité doit aller à la molécule qui agit le plus rapidement et qui, en 2000, était l’altéplase (6). La ténectéplase est aujourd’hui, de par sa simplicité d’emploi, le fibrinolytique à disposition de la plupart des SMUR. Ce produit n’était pas commercialisé au moment de la publication des recommandations de l’ESC sur l’embolie pulmonaire. Il est aujourd’hui prouvé que les délais d’action et l’efficacité de la ténectéplase sont au moins comparables à ceux de l’altéplase dans l’infarctus du myocarde (7). Aussi, l’emploi de la ténectéplase dans l’embolie pulmonaire massive est préconisé par plusieurs équipes (8) et nous paraît justifié lorsqu’il est le seul produit fibrinolytique à disposition de l’équipe médicale d’urgence et que les contre-indications de ce produit ont été scrupuleusement écartées (tab. II). Dans notre observation, le SMUR ne disposait pas des techniques d’imagerie embarquées permettant de confirmer le diagnostic clinique d’embolie pulmonaire massive. C’est l’inefficacité du remplissage vasculaire, l’importance des signes de choc et la dégradation de l’état neurologique qui, laissant entrevoir une issue rapidement fatale, ont conduit le médecin à décider d’une thrombolyse « de sauvetage ». Le succès de cette thérapeutique pré-hospitalière d’exception a été récemment décrit dans la littérature (3, 4, 9). Dans ces trois observations d’embolies pulmonaires massives fibrinolysées en SMUR, le critère principal de thrombolyse était la dégradation rapide de l’état hémodynamique du patient, malgré la mise en route des thérapeutiques « conventionnelles » par le SMUR. Deux des trois patients ont été fibrinolysés sans élément d’imagerie pour asseoir le diagnostic clinique du médecin urgentiste (un patient avait bénéf icié d’un angioscanner). Les trois patients ont eu une évolution très favorable. Nous décrivons ici une quatrième observation d’embolie pulmonaire massive traitée par ténectéplase amélioré par une équipe d’urgence pré-hospitalière. Dans notre observation, le traitement par ténectéplase semble avoir été efficace, au moins partiellement, malgré la survenue précoce d’un arrêt cardiaque prolongé. Tableau II. Contre-indications de la fibrinolyse dans l'embolie pulmonaire massive d'après la société européenne de cardiologie (3). Contreindications absolues Contre-indications relatives - Traumatisme sévère récent (moins de quinze jours) ; - Intervention chirurgicale récente (moins de dix jours), biopsie récente ; - Neurochirurgie ou chirurgie ophtalmique de moins de un mois ; - Diathèse - Réanimation cardiaque prolongée récente ; hémorragique - Ponction récente d'un vaisseau non compressible connue ou intramusculaire ; - HTA sévère non contrôlée (PAS > 180 mmHg, PAD - Antécédent récent > 110 mmHg) ; - Endocardite bactérienne ; d'hémorragie - Ulcères digestifs avec saignement récent intra-crânienne. (moins de dix jours) ; - Grossesse, accouchement récent ; - Rétinopathie diabétique hémorragique ; - Traitement par AVK avec TP < 50 %, thrombopénie < 100 000/mm3. thrombolyse pré-hospitalière par ténectéplase d’une embolie pulmonaire massive compliquée d’un arrêt cardiaque prolongé 41 Dans notre observation, la récupération d’une activité cardiaque après 40 minutes de réanimation de l’arrêt cardio-circulatoire, puis la stabilisation des conditions hémodynamiques laissent penser que la fibrinolyse a été efficace sur le thrombus. Il est également possible que la thrombolyse ait eu un effet directement bénéfique sur la réanimation de l’arrêt cardiaque proprement dit. Les manœuvres de réanimation cardio-pulmonaire sont théoriquement une contre-indication relative à l’emploi d’un produit fibrinolytique (3). Cependant, certaines études suggèrent un effet bénéfique de la fibrinolyse dans l’arrêt cardiaque lorsque celui-ci fait suite à une embolie pulmonaire massive (10). Dans ces situations, l’effet de la fibrinolyse étant retardé de plusieurs dizaines de minutes, il est recommandé de poursuivre les manœuvres de réanimation 60 à 90 minutes après l’injection du produit (11). D’autre part, il est également possible que la fibrinolyse ait contribué à l’excellente récupération neurologique de notre patiente. Il est en effet prouvé expérimentalement que l’administration de thrombolytique chez l’animal améliore la fonction neurologique après un arrêt cardiaque récupéré, en diminuant l’état d’hypercoagulabilité et donc les phénomènes de micro-agrégation intra-cérébraux inhérents à cette situation (12). Enfin, le massage cardiaque, générateur de pressions thoraciques importantes, a pu aider à la fragmentation du caillot. En réanimation, l’échographie cardiaque a été le seul examen d’imagerie réalisé pour confirmer le diagnostic d’embolie pulmonaire. Cette attitude est conforme aux recommandations des sociétés savantes qui préconisent de ne pas déplacer le patient pour réaliser d’autres examens (TDM, scintigraphie, angiographie), lorsque la suspicion d’embolie pulmonaire est forte et que le patient conserve des conditions hémodynamiques instables (3). Un écho-doppler veineux des membres inférieurs aurait également pu être réalisé, car il confirme la présence d’un thrombus veineux dans plus de 50 % des cas où la thrombose est cliniquement suspectée (13). Le décès à J3 est une évolution malheureusement classique, puisque la mortalité de l’embolie pulmonaire compliquée de choc cardiogénique est estimée à 70 %. IV. CONCLUSION. La fibrinolyse est le traitement de référence de l’embolie pulmonaire massive. En l’absence d’altéplase elle peut être réalisée avec la ténectéplase, qui est aujourd’hui l’unique thrombolytique à disposition de la majorité des SMUR. Le diagnostic d’embolie pulmonaire doit être idéalement confirmé par un examen d’imagerie, qui peut être une échographie cardiaque. Le développement de l’imagerie embarquée, en particulier la mise en place des échographes portatifs dans les ambulances et des formations universitaires d’échographie d’urgence devrait permettre dans l’avenir, aux médecins urgentistes, de confirmer dès la phase pré-hospitalière, un diagnostic clinique d’embolie pulmonaire massive. En l’absence de conf irmation diagnostique par échographie, la f ibrinolyse préhospitalière d’une embolie pulmonaire massive doit rester une technique de sauvetage. Cette technique est néanmoins efficace et doit être connue des médecins urgentistes car elle permet parfois de transformer une situation hémodynamique catastrophique. La survenue d’un arrêt cardiaque ne doit pas remettre en question la stratégie thérapeutique, mais au contraire faire bénéficier au patient du maximum de l’action du thrombolytique par une réanimation cardio-pulmonaire prolongée au-delà de 60 à 90 min. Remerciements : les auteurs remercient Mademoiselle Sylvie Capraro pour son aide dans la mise en forme du document. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Le Gall C, Simmoneau G. Embolie pulmonaire. Encycl Méd Chir, urgences. 24-115-A-13, 9 p. Paris : Elsevier SAS, 2004. 2. Roy PM. Observation commentée : une suspicion d’embolie pulmonaire. JEUR 2003 ; 16 : 41-5, 2003. 3. Guidelines on diagnosis and management of acute pulmonary embolism. Task force on pulmonary Embolism, European society of cardiology. Eur Heart J 2000 ; 21 : 1 301-36. 4. Clément D, Loyant R, Labet T. Ténectéplase et embolie pulmonaire massive. Urgence Pratique 2004 ; 64 : 45-6. 5. Delasara C, Boyez E, Sicot J, Capelle P. Embolie pulmonaire massive : thrombolyse pré-hospitalière de sauvetage par ténectéplase. À propos d’un cas. JEUR 2005 ; 18 : 214-6. 6. Recommandations des experts de la Société de réanimation de langue française pour la prévention et le traitement de la maladie thrombo-embolique. Réanimation 2001 ; 10 : 456-61. 7. Wallentin L, Goldstein P, Amstrong PW, Granger CB, Adgey AA, Arntz HZ et al. Efficacy and safety of tenecteplase in combination with the low-molecular-weight heparin enoxaparine or unfractionated heparin in the pre-hospital setting: the assessment of the safety and efficacy of a new thrombolytic regimen 42 8. 9. 10. 11. 12. 13. (ASSENT)-3 PLUS randomized trial in acute myocardial infarction. Circulation 2003 ; 108 : 135-42. Caldicott D, Parasivam S, Harding J, Edwards N, Bochner F. Tenecteplase for massive pulmonary embolus. Resuscitation 2002 ; 55 : 211-3. Boursier F, Maistre JP, Saddedine M, Pernot T, Adnet F. 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ABILIOU RÉSUMÉ La transfusion sanguine en situation d’exception, qui peut se définir comme un acte transfusionnel indispensable en l’absence de Produits sanguins labiles (PSL) disponibles à partir de l’approvisionnement normal, est un acte adapté à certaines situations opérationnelles des armées. Dans ce cadre-là, bien que l’utilisation du sang total prélevé sur place ne relève pas du Code de la Santé Publique en matière de sécurité transfusionnelle, son principe est de procurer aux militaires blessés des soins transfusionnels appropriés pour la préservation de leur vie et la prévention des séquelles. C’est pourquoi le Service de santé des armées (SSA) a édité en 2003 une notice relative à la transfusion sanguine en situation d’exception. Dans le cas particulier des Sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE), la mission de dissuasion nucléaire impose à ce type de bâtiments un isolement médical total les mettant ainsi constamment en situation d’exception. Aussi, en collaboration avec le Centre de transfusion sanguine des armées (CTSA), une instruction particulière a été établie afin de définir une procédure de sélection systématique de donneurs de sang au sein des équipages de SNLE en période d’entraînement à terre, ainsi que les modalités pratiques d’une transfusion sanguine en patrouille opérationnelle, afin de réagir au plus vite et le mieux possible en situation d’urgence médicale. ABSTRACT BLOOD TRANSFUSION ABOARD SSBN: A SPECIFIC OPERATIONAL CONTEXT. Blood transfusion in exceptional situations, which can be defined as an essential transfusion act in case of a lack of commonly available licensed labile blood components, is adapted to some specific operational situations in the army. In this particular context, even if the total use of the blood taken on the spot doesn’t depend on National Health Code in term of transfusion security, this act consists in providing to the casualties the appropriate transfusion care for the protection of their life and the prevention of after effects. That is why the french joint military health service published in 2003 a note related to exceptional blood transfusion. The SSBN deterrence mission entails specific constraints as being medically isolated, placing the ships in an exceptional situation. Then, together with the joint blood transfusion centre, a special instruction has been implemented in order to define a systematic blood donor selection process within the SSBN crew members during the training periods on the ground as well as the practical conditions of a blood transfusion on operational patrol ; this is aimed at reacting as quickly as possible and acting for the best in case of medical emergency. Keywords: Blood donors. SSBN. Transfusion. Mots-clés : Donneurs de sang. Sous-marins nucléaires. Transfusion. I. INTRODUCTION. La transfusion sanguine en situation isolée, loin des plateaux techniques et des possibilités d’approvisionnement que nous connaissons en métropole, a fait l’objet ces dernières années de larges réflexions (1, 2). Cet acte médical nécessite, dans ces circonstances exceptionnelles, des adaptations, af in de respecter au mieux les règles de l’art, définies dans les différents référentiels. E. DELMOND, médecin principal. T. DAVID, médecin en chef, praticien confirmé. B. ÉLIE, médecin en chef. R. ABILIOU, médecin chef des services, praticien certifié. Correspondance : E. DELMOND, centre médical de l’ESNLE, BP 500, 29240 Brest Armées. médecine et armées, 2008, 36, 1 (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 43-50) Ainsi, le Service de santé des armées (SSA) a édité en 2003 une notice technique relative à la transfusion sanguine en situation d’exception (3) accompagnée de kits de transfusion. Ce texte définit les modalités d’adaptation des actes transfusionnels hospitaliers aux situations opérationnelles. Après avoir détaillé les caractéristiques des différents Produits sanguins labiles (PSL) produits par le Centre de transfusion sanguine des armées (CTSA) et leurs conditions d’utilisation à l’avant, elle précise les règles de la transfusion à l’avant en situation d’exception. La sécurité transfusionnelle repose sur la détermination précise, redondante et contrôlée du groupe sanguin (ABO, Rh, Kell) de chacun des militaires d’une force projetée, dès sa constitution, par le médecin d’unité avec 43 une information médicale préalable sous forme de conférences sur le don de sang et une présélection des donneurs potentiels. Puis, sur le théâtre d’intervention ou sur un bâtiment à la mer, cette notice définit les tâches du chef santé pour une éventuelle collecte sur place, avec la sélection des donneurs potentiels par groupe sanguin, la mise en œuvre de cette collecte et la conduite à tenir dans le cas d’une transfusion en urgence, avant toute évacuation sanitaire. En juillet 2005, une instruction particulière a été réalisée af in d’adapter ces procédures au cas particulier des Sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) où l’isolement de l’équipe médicale est total en patrouille opérationnelle (4). Dans cet article, nous détaillerons cette instruction en rappelant tout d’abord la mission remplie par les SNLE dans le cadre de la dissuasion nucléaire, avec ses implications directes sur l’équipe médicale embarquée ; et pourquoi, dans l’éventualité d’une transfusion en patrouille et compte tenu du caractère labile des produits sanguins, il est absolument nécessaire de procéder à une sélection systématique de donneurs de sang potentiels avant le départ, ceci afin de pouvoir réagir en urgence dans les meilleures conditions possibles de sécurité. Cette instruction précise point par point ces procédures de sélection, leur application au cours d’une transfusion en patrouille, les matériels utilisés et comporte des fiches techniques en annexes. Nous finirons par analyser les données mises à notre disposition concernant le retour d’expérience depuis la mise en application de cette instruction. II. CONTEXTE IMPLICATIONS. OPÉRATIONNEL ET A) DISSUASION NUCLÉAIRE STRATÉGIQUE. 1. Concept et missions. La dissuasion nucléaire française a pour f inalité la défense des intérêts vitaux du pays. La Force océanique stratégique (FOST) contribue à assurer la permanence de cette dissuasion en maintenant au moins un SNLE à la mer paré à tirer ses missiles sur ordre direct du Président de la République. Pour répondre à cette mission, chaque SNLE doit donc pouvoir effectuer des patrouilles de longue durée en immersion dans toutes les mers du monde en restant indétectable et apte à tirer à tout moment ses missiles à têtes nucléaires sans en être empêché. Ces impératifs de discrétion maximale sont rendus possibles grâce à l’autonomie procurée par la propulsion nucléaire, une gestion particulière des émissions radio ou du sonar et le maintien en profondeur suff isante du sous-marin pendant toute la durée de la patrouille. Une évacuation sanitaire risque ainsi de compromettre sa mission et doit rester exceptionnelle. C’est pourquoi chaque sous-marin est doté d’une équipe médicale spécialement formée à faire face à toute urgence sans concours extérieur. 44 2. SNLE. Afin de tenir l’engagement de permanence à la mer, la Marine nationale met en œuvre quatre SNLE basés sur le site de l’Île-Longue située en presqu’île de Crozon dans le Finistère. Un SNLE de type « Triomphant » (fig. 1) est un bâtiment de 138 mètres de long, 12,5 mètres de diamètre et déplace 14 300 tonnes en plongée. Il embarque seize missiles type M45 portant chacun six têtes nucléaires d’une portée de Figure 1. Un SNLE de type « Triomphant » est un bâtiment de 138 mètres de long, 12,5 mètres de diamètre et déplace 14 300 tonnes en plongée. plusieurs milliers de kilomètres. Son autodéfense est assurée par des torpilles et des missiles Exocet à changement de milieu. Un réacteur nucléaire de 150 MW assure au sous-marin une autonomie quasi illimitée. Il peut ainsi naviguer en plongée jusqu’à quatre-vingt dix jours sans interruption, la seule réelle limite étant la quantité de vivres embarqués et la résistance physique de l’équipage. Af in de permettre la permanence d’au moins un sous-marin à la mer, deux équipages de 110 hommes chacun se relaient toute l’année sur chaque sous-marin, un bleu et un rouge, d’une moyenne d’âge de trente ans, chacun comprenant un état-major de quinze officiers et des off iciers-mariniers techniciens de haut niveau (principalement des électriciens, des mécaniciens et des détecteurs anti-sous-marins). Un cycle opérationnel comprend une période d’entraînement à terre à Brest sur simulateurs, une période d’entretien du bâtiment à l’ÎleLongue et une patrouille à la mer de neuf à dix semaines, soit environ 110 jours de mer par homme et par an. Le rythme d’activité d’un équipage est présenté dans la figure 2. Figure 2. Le rythme d’activité d’un équipage de SNLE. e. delmond B) ÉQUIPE MÉDICALE EMBARQUÉE. 1. Missions. L’équipe médicale embarquée participe pleinement au contrat opérationnel : elle doit respecter au maximum l’exigence de discrétion du SNLE tout en tenant compte de l’absence d’avis extérieur pendant plus de deux mois. La décision d’évacuation sanitaire (ÉVASAN) est soumise à l’appréciation conjointe du médecin du bord et du commandant et doit rester dans le domaine de l’exception. L’arrivée des secours pouvant atteindre plusieurs jours, l’équipe médicale doit alors pouvoir assurer les soins au patient pendant ce temps. Durant une patrouille, la mission de l’équipe médicale embarquée peut se résumer par : « écouter, surveiller, soigner, opérer si nécessaire (éventuellement transfuser), mais évacuer le moins possible ». 2. Constitution et spécificités. L’équipe médicale est dimensionnée pour être autonome, polyvalente et constamment à l’écoute de l’équipage. Elle comprend un médecin Certifié en médecine appliquée aux sous-marins nucléaires (CMASN) et deux infirmiers diplômés d’état dont un anesthésiste qui bénéficient d’une formation technique initiale spécifique (deux ans pour le médecin, de deux à cinq mois pour les infirmiers) leur permettant de faire face, sans concours extérieur, à toute urgence médicale, chirurgicale, toxicologique ou radiologique survenant à la mer. Entre chaque plongée, l’ensemble de l’équipe médicale reçoit une formation technique continue et retourne à l’hôpital militaire de rattachement, l’HIA ClermontTonnerre de Brest, afin de se « recycler » médicalement et chirurgicalement. 3. Locaux hospitaliers. L’inf irmerie du bord, d'une surface totale d’environ 20 m2, est constituée d’un mini-bloc opératoire (fig. 3), d’une salle de visite, d’une chambre d’hospitalisation de deux lits, et d’un laboratoire de développement radiologique. Dans cet espace restreint, s’imbriquent notamment une baie anesthésie, deux appareils de radiographie (un conventionnel et un dentaire), une table d’opération se transformant en fauteuil dentaire, le matériel classique de chirurgie, des automates de biologie et de biochimie, deux scialytiques, une valise de soins dentaires et les classiques drogues d’urgences et d’anesthésie réanimation. III. CONDITIONS D’UNE TRANSFUSION À BORD D’UN SNLE. Les conditions d’exercice de la médecine à bord d’un SNLE en patrouille sont marquées par l’extrême isolement. La durée d’une patrouille (environ 70 jours) exclut la possibilité d’embarquer des Produits sanguins labiles (PSL), les Concentrés de globules rouges (CGR) ne se conservant que 42 jours, les plaquettes 5 jours seulement (5). Le ravitaillement à la mer n’est pas envisageable pour des raisons évidentes de discrétion et de délais. Une telle situation rentre ainsi pleinement dans le cadre de la notice technique du Service de santé des armées (3) où le sang total prélevé sur place est bien la seule solution envisageable. L’équipe médicale assume alors des fonctions qui dépassent le cadre décrit dans la notice : le médecin fait office de chirurgien lorsqu’une intervention devient indispensable et assume les responsabilités du réanimateur lorsqu’il faut transfuser un patient. Une transfusion ne sera envisagée à bord d’un SNLE qu’en situation ultime, après que les techniques d’économie de sang auront atteint leurs limites (1, 2) et lorsque la survie du patient sera engagée. Les seules réelles indications de transfusion se résument donc au choc hémorragique ou à une brûlure étendue (6, 7). Quoi qu’il en soit, il n’y a jamais eu de transfusion en mer au cours des 415 patrouilles opérationnelles effectuées par les SNLE depuis que la FOST existe et tous ces éléments permettent de qualifier d’exceptionnel l’acte transfusionnel sur sous-marin. Mais la gestion de tout risque potentiel à bord impose de s’y préparer. IV. PROCÉDURE DE SÉLECTION DES DONNEURS (FIG. 4). A) GÉNÉRALITÉS. 1. Les donneurs et le sang. L’équipage d’un SNLE représente dans son ensemble le « vivier » de donneurs qui pourrait être utilisé dans le cadre d’une transfusion de sang total à la mer au cours d’une patrouille. Figure 3. Mini-bloc opératoire de l’infirmerie du bord. transfusion sanguine à bord d’un snle 2. Définition de la sélection. Il s’agit, avant chaque patrouille, de sélectionner et de classer, par l’interrogatoire et la clinique, l’ensemble des membres de l’équipage en trois catégories : – donneurs potentiels ; – donneurs potentiels avec réserve ; – donneurs exclus. 45 B) INFORMATION DE PRÉ-DON, EN PHASE D’ENTRAÎNEMENT À TERRE. 1. Principes et objectifs. Cette information de pré-don entre dans la dynamique sécuritaire qui caractérise la chaîne transfusionnelle (9) : – sensibiliser à l’importance du don de sang au profit des forces ; – informer suffisamment tôt l’équipage afin qu’il puisse envisager de devenir donneur régulier avant la patrouille : inciter au don ; – remotiver les donneurs réguliers afin de les fidéliser ; – responsabiliser les futurs donneurs parce que donner son sang : - c’est se connaître ; c’est savoir repérer ses propres comportements à risques et ainsi comprendre le principe de la fenêtre sérologique dangereuse, - c’est aussi, grâce au volontariat, pouvoir s’auto-exclure (10) du don sans honte ni culpabilisation, - c’est s’engager lorsque l’on donne son sang et pouvoir tout dire au médecin lors de l’entretien ultime (cela permet une véritable authenticité dans les réponses aux questions posées par le médecin), - c’est enfin sauver potentiellement quelqu’un. 2. Moyens. Figure 4. Procédure de sélection des donneurs. 3. Pourquoi une sélection en amont ? Nous avons vu qu’une transfusion à bord ne se fait que dans le cas d’une urgence vitale. Il ne faut donc pas que l’équipe médicale gaspille un temps précieux à effectuer alors une sélection de donneurs. Celle-ci doit donc se faire absolument par anticipation à terre (3, 8). L’information sur le don et le recensement des donneurs potentiels au sein de l’équipage avant le départ en mer présente aussi l’avantage d’inciter au don régulier à quai, un donneur régulier étant à privilégier pour un don en urgence. 4. Objectifs de la procédure de sélection. Objectifs de la procédure de sélection : – être prêt le jour dit à choisir et à convoquer rapidement les donneurs potentiels ; – avoir déjà effectué le maximum de travail de sélection en amont afin de n’avoir à réaliser qu’un interrogatoire de qualification ultime le plus court possible ; – avoir motivé suffisamment de membres de l’équipage à être des donneurs réguliers pour disposer d’un maximum de donneurs potentiels en cas d’urgence ; – éviter toute erreur de compatibilité en ayant anticipé toutes les procédures en période calme. 46 a) Collectifs. Au début de chaque phase d’entraînement (fig. 1), une conférence est donnée au profit de tout l’équipage : cette information doit être délivrée avant que ne débutent les visites médicales systématiques afin de donner à chacun le temps de la réflexion. Ses objectifs sont de : – sensibiliser le personnel à l’hypothèse d’une transfusion à la mer ; – présenter l’acte transfusionnel ; – faire comprendre quelques notions de sécurité transfusionnelle et ses implications ; – expliquer les procédures envisagées sur SNLE ; – préparer à l’entretien individuel de sélection lors de la visite médicale ; – impliquer les membres de l’équipage afin que chacun se sente concerné. Elle comprend une projection du f ilm du SSA sur le don de sang ainsi qu’une communication orale avec support visuel de type power point par le médecin-major de l’équipage. b) Individuels. Lors de la visite médicale systématique d’aptitude à la Navigation sous-marine (NSM), le médecin procède à un entretien avec chaque membre d’équipage en vue d’une sélection des donneurs dans le respect des recommandations (11). Pour cela, il doit : – reprendre les différents messages de la conférence et compléter ainsi la sensibilisation et l’information d’une manière plus individualisée ; e. delmond – susciter des questions d’ordre plus privé et éclaircir certains points ; – renforcer la relation médecin-donneur et donc augmenter la fiabilité du questionnaire de qualification. C) DÉMARCHE DE SÉLECTION À LA VISITE MÉDICALE EN ENTRAÎNEMENT. 1. Généralités. Le médecin de l’équipage prof ite donc de la visite d’aptitude à la navigation sous-marine qui a lieu lors de chaque période d’entraînement pour anticiper le plus possible un éventuel don de sang à la mer. Ce premier interrogatoire va lui permettre de sélectionner les donneurs potentiels de son équipage. Ce travail en amont est consigné sur une « f iche d’aide à la première qualif ication d’un donneur potentiel sur SNLE » (f ig. 5), remplie à chaque visite médicale systématique et conservée dans le livret médical de l’intéressé. Au moment de l’entretien ultime lors de la transfusion en patrouille, la « fiche de don de sang à bord d’un SNLE » (fig. 6) sera remplie. La démarche de sélection se fait donc en deux temps. Figure 6. Fiche de don de sang sur SNLE. 2. Fiche d’aide à la première qualification d’un donneur potentiel sur SNLE. Cette f iche comporte plusieurs parties à vérif ier dans l’ordre suivant : a) État civil. Devront être renseignés en premier : le prénom, le nom, la date et le lieu de naissance ainsi que le SNLE, son équipage et le cycle. b) Recherche des contre-indications. Les principes de confiance, d’honnêteté et de responsabilité dans les réponses du donneur prennent ici tout leur sens. Une liste exhaustive des contre-indications au don de sang est proposée par le CTSA au prof it du médecin examinateur (4). Figure 5. Fiche qualification donneur potentiel sur SNLE. transfusion sanguine à bord d’un snle c) Étude des examens biologiques. Le médecin étudie les analyses sanguines disponibles dans le livret médical de l’intéressé (hémogramme, biochimie, sérologies) et vérif ie la présence d’un groupage ABO Rh Kell (sur deux prélèvements distincts). Il ne prescrit aucun examen complémentaire à titre systématique. 47 d) Question du volontariat. Le donneur potentiel doit aff irmer son accord pour un éventuel don à la mer en partie af in d’éviter des volontariats suscités par l’urgence et la solidarité devant une situation dramatique (8). La position de volontaire signifie aussi l’acceptation des contraintes du don, avec des réponses franches aux questions parfois précises sur le mode de vie. Dans le cas contraire, le volontariat n’a plus de sens. Le médecin entoure la réponse à la question : « volontaire au don de sang à la mer ? » : Oui, non. Et demande sa signature au volontaire. e) Bilan et qualification finale. En considérant toutes les données ainsi récupérées, le médecin répond à deux questions et qualifie dans l’état actuel de ses connaissances (et pour la patrouille à venir) la personne présente : – « contre-indication ? » : Aucune, temporaire, définitive. – « Donneur potentiel ? (pour la patrouille) » : Oui, non, avec réserve. f) Commentaires éventuels et signature du médecin. D) AVANT LE DÉPART EN PATROUILLE OPÉRATIONNELLE. La mise à jour de la base de données médicales de l’équipage au vu des fiches de première qualification a pour objectif de pouvoir éditer rapidement, par groupe sanguin, une liste de donneurs volontaires fiables ainsi qu’une liste de donneurs volontaires avec réserves. V. TRANFUSION À BORD D’UN SNLE EN PATROUILLE. A) PHASE PRÉ-TRANSFUSIONNELLE EN PATROUILLE. 1. Décision. Le médecin pose l’indication de transfusion. Il renseigne l’ordonnance médicale type de prescription de PSL et déclenche la procédure. Les kits de transfusion sont déstockés. 2. Choix et convocation des donneurs. Le groupe et le rhésus du futur receveur sont connus ainsi que le nombre de poches de sang à prélever, donc le nombre de donneurs nécessaires pour son groupe ABO. La liste des donneurs potentiels compatibles est éditée, une première liste comprenant les donneurs sans restriction et une deuxième comprenant ceux avec réserves. Le médecin fait son choix parmi les donneurs en fonction du nombre de poches nécessaires et du nombre de donneurs compatibles. Les donneurs retenus sont convoqués à l’infirmerie du sous-marin. 48 3. Sélection ultime. Le médecin procède alors au second entretien de pré-don. Il interroge rapidement et de façon confidentielle, chaque donneur, et répond à ses éventuelles questions. Enfin, il lui fait confirmer son volontariat en lui faisant signer la fiche de don de sang à bord d’un SNLE. 4. Prélèvement du don. Les donneurs acceptés rejoignent le local dédié aux prélèvements avec leur fiche de don remplie. L’infirmier préleveur effectue les prélèvements de sang total selon le « mémento pratique de l’infirmier préleveur à bord d’un SNLE » (4). Il prélève trois tubes pilotes si une ÉVASAN est imminente : deux pour les sérologies et un pour le groupage qui serviront au suivi transfusionnel ultérieur. Chaque tube est identifié par une étiquette. En l’absence d’ÉVASAN, les tubes témoins ne sont pas prélevés ; ils le seront ultérieurement lorsqu’un acheminement correct sera possible. Enfin, il vérifie que le don est conforme, c’est-à-dire que chaque poche contient au moins 400 ml de sang, que le prélèvement s’est effectué sans incidents avec trois tubes pilotes, il complète la f iche de don et la signe. Une étiquette d’identification est collée sur la poche. B) PHASE DE TRANSFUSION EN PATROUILLE. 1. Qualification biologique du don. Un test rapide VIH est réalisé par l’infirmier transfuseur : – s’il est positif ou non valide, le don est d’emblée écarté. Le donneur sera revu à un moment plus opportun par le médecin ; – si le test est négatif, l’infirmier transfuseur renseigne la fiche de don (numéro de lot, résultat). L’infirmier transfuseur vérifie, sous la responsabilité du médecin, la compatibilité ABO ultime avant transfusion à l’aide du sang de la tubulure. Il remplit la fiche de don et la signe. 2. Geste transfusionnel. Le groupe du donneur est identique à celui du receveur, ou à défaut compatible en l’absence de donneurs identiques à bord du SNLE. L’acte transfusionnel peut être réalisé. Le transfuseur surveille et recueille les effets secondaires immédiats et précoces de la transfusion et remplit la fiche transfusionnelle de l’avant en y notant tout incident. C) PHASE POST-TRANSFUSIONNELLE EN PATROUILLE. La transfusion terminée, afin de respecter les règles de traçabilité, le dossier transfusionnel du patient le suit jusqu’à l’hôpital et la surveillance posttransfusionnelle est assurée par le service hospitalier qui le prend en charge (3). Le dossier transfusionnel comprend : – la carte de groupe avec les deux déterminations ; – les résultats des sérologies de référence ; e. delmond – la fiche d’aide à la première qualification d’un donneur potentiel sur SNLE ; – l’ordonnance médicale prescrivant les PSL ; – la fiche de don de sang sur SNLE ; – la carte de compatibilité ABO réalisée au lit du malade ; – la fiche transfusionnelle de l’avant ; – les enveloppes pré-imprimées à l’adresse du CTSA. Les poches utilisées pour le don et les tubes pilotes sont entreposés au réfrigérateur à +4 °C en attente de l’évacuation sanitaire. Le don de sang est inscrit sur les livrets médicaux des donneurs et du receveur en y apposant une étiquette. VI. MATÉRIEL (fig. 7). A) MATÉRIEL STANDARD DISPOSITION DES SOUS-MARINS. MIS À Matériel standard mis à disposition des sous-marins : – deux kits de transfusion en situation d’exception sont mis à disposition de chaque sous-marin par la Direction des approvisionnements des établissements centraux (DAEC). Chaque kit contient le nécessaire pour effectuer cinq dons de sang ; – un paquet de tests « determine HIV » ; – la notice technique relative à la transfusion en situation d’exception (3) ; – une mallette SSA contenant le matériel nécessaire à la conférence d’incitation au don de sang. B) MATÉRIEL SPÉCIFIQUE AUX SNLE. Matériel spécifique aux SNLE : – un CD-rom par équipage de SNLE comprenant la conférence-type dédiée à l’information des personnels sous-mariniers embarqués (4) ; – des f iches d’aide à la première qualif ication d’un donneur potentiel sur SNLE (une par membre d’équipage) ; – vingt fiches de don de sang sur SNLE ; – dix ordonnances médicales de prescription de transfusion sur SNLE (4) ; – dix fiches transfusionnelles de l’avant (3). VII. RETOUR D’EXPÉRIENCE. Cette procédure de sélection systématique des donneurs de sang est mise en place à bord des SNLE depuis 2005. Quelques éléments se dégagent depuis sa mise en application. Cette sélection, qui suppose la responsabilisation des donneurs vis-à-vis des receveurs potentiels, est plus facilement appréhendée par les équipages de SNLE dans les conditions les plus favorables, c’est-à-dire hors du stress de l’urgence et de l’improvisation. La mise en place précoce de cette sélection, à terre, est essentielle pour la sécurité transfusionnelle et pour la relation de confiance médecin-donneur ou médecinreceveur, deux éléments essentiels du don de sang à bord d’un SNLE en patrouille. Elle consiste dans un premier temps en une conférence/information spécialement structurée dans le but de sensibiliser les équipages et de les motiver au don de sang, tout en leur expliquant clairement la démarche de cette sélection et la pertinence du questionnaire de qualification. Cette information collective cherche notamment à montrer aux membres des équipages de SNLE l’intérêt qu’ils ont à répondre de la façon la plus juste et la plus précise possible à ce questionnaire, même s’ils jugent que certaines questions sont totalement indiscrètes. Ainsi, environ 10 % des personnes interrogées tolèrent mal cette intrusion dans leur intimité, essentiellement en ce qui concerne les questions à propos des comportements à risques ou de leur mode de vie (homosexualité notamment). Il apparaît donc souhaitable, dans un deuxième temps, lors de la visite d’aptitude, d’aborder l’entretien individuel par un échange sur le volontariat, le médecin rappelant que cette démarche est un engagement responsable qui implique l’acceptation des questions d’ordre privé et la franchise dans les réponses apportées. Si ce questionnaire semble gênant, il faut proposer le non-volontariat af in de ne rien imposer et de ne pas susciter de réponses erronées. On retiendra que 75 % des donneurs sont qualif iés sans restrictions, 22 % avec réserves et 2 % sont exclus (antécédents de transfusion, comportements à risques manifestes…). De plus, en ce qui concerne le volontariat, 2 % des marins interrogés se déclarent d’eux-mêmes non volontaires pour diverses raisons (peur des piqûres, gêne face au questionnaire…). VIII. CONCLUSION. Figure 7. Kit de transfusion de SNLE. La notice technique du SSA relative à la transfusion sanguine en situation d’exception (3) pose le cadre de ce geste rarissime à bord des unités de la Marine nationale. transfusion sanguine à bord d’un snle 49 Appliquée au cas particulier des SNLE, cette notice permet de garantir une sécurité transfusionnelle optimale avec les moyens disponibles en situation opérationnelle (3). L’innocuité d’une transfusion en patrouille opérationnelle réside en effet dans une présélection systématique rigoureuse à terre des donneurs potentiels parmi l’équipage, ainsi que dans l’exécution précise et raisonnée d’une procédure prédéfinie de collecte de sang et de transfusion à la mer, pratiquée dans le respect des règles de compatibilité et de traçabilité. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Lienhard A, Olive F, Niel L, Joussemet M, Pats B ; Sécurité transfusionnelle en opérations extérieures. Médecine et Armées 2001 ; 29 (6) : 539-42. 2. Fabre G, Joussemet M. Transfusion en situation de catastrophe. In catastrophes, « de la stratégie d’intervention à la prise en charge médicale » sous la direction du Pr P Huguenard. Paris : Elsevier ; 1996, 271-6. 3. IM N° 136 DEF/DCSSA/AST/TEC du 15 janvier 2003 relative à la transfusion sanguine en situation d’exception. 4. Instruction particulière N° 11 ESNLE/SANTE/DR du 19 juillet 2005. La transfusion sanguine à bord des SNLE. 5. Chabanel A, Folléa G. Produits sanguins labiles et leur préparation. Rev Prat 2001 ; 51 : 1 311-7. 6. IM N° 2225 DEF/DCSSA/AST/TEC du 30 septembre 1991 7. 8. 9. 10. 11. relative à l’emploi du sang, de ses dérivés et des autres liquides de remplissage vasculaire. Joussemet M, Fabre G. Place des produits d’origine sanguine dans le remplissage vasculaire. Conférence de réanimation préhospitalière Paris brigade des sapeurs pompiers de Paris, 17 mai 1994. Joussemet M. Transfusion à l’avant : actualités et perspectives. Médecine et Armées 2003 ; 31 (4) : 322-4. Note AFS-94.02.10 du 4 mars 1994 relative à l’organisation et la qualité de la collecte (information et questionnaire médical). Beauplet A. La chaîne transfusionnelle : du donneur au receveur. Rev Prat 2001 ; 51 : 1 294-8. Note AFS du 10 février 1993 relative à l’entretien médical dans la sélection des donneurs de sang. INFORMATION CHANGEMENT D’ADRESSE OU ABONNEMENT Afin d’éviter de fausses directions dans l’expédition de la revue « Médecine et Armées », les lecteurs sont invités à signaler en temps utile leur changement d’adresse à l’un des organismes suivants, en fonction de leur qualité, à l’aide du bulletin ci-dessous : – pour les officiers généraux (2s) : DCSSA, bureau « officiers généraux » BP 125, 00459 ARMÉES. – pour les officiers du corps du SSA : DCSSA, bureau « des affaires communes et condition de vie » BP 125, 00459 ARMÉES. – pour les abonnés payants : ECPA, service édition, 2 à 8 route du Fort, 92205 Ivry-sur-Seine Cedex. NOM : PRÉNOM : QUALITÉ : ANCIENNE ADRESSE : NOUVELLE ADRESSE : 50 e. delmond Thérapeutique et technique en situations d’urgence ÉVOLUTION DE LA RÉANIMATION DANS LES ARMÉES À propos du conflit algérien G. DUCHESNE † I. ORIGINES DE LA RÉANIMATION. Réanimation est un terme très employé. Le mot évoque d’emblée une thérapeutique spectaculaire suivie rapidement du retour à la vie normale d’un malade en état de mort apparente. Cette impression est encore plus forte lorsqu’on utilise le terme anglo-saxon de « ressuscitation ». Le mot n’a cependant pas toujours la même résonance puisqu’il peut désigner aussi bien l’application en extrême urgence de la respiration artificielle d’un noyé inconscient qu’un ensemble de thérapeutiques, pour la plupart médicamenteuses, administrées à un malade parfaitement conscient qui vient de subir, ou même va subir, une intervention chirurgicale importante. On peut tenter de préciser les différentes acceptions du terme en suivant, dans une chronologie très approximative, les différents actes thérapeutiques qui ont successivement mérité de se voir attribuer ce même vocable de réanimation. C’était certes bien un acte de réanimation que les gestes classiques des méthodes de Sylvester ou de Schaeffer, souvent couronnés de succès et permettant au noyé le retour à une vie normale. Et c’était aussi certainement un acte de réanimation que le massage cardiaque d’abord permis par la thoracotomie, maintenant pratiqué par manœuvres externes. Ces deux grands types de réanimation – ventilatoire et cardiaque – résument, pour certains, la réanimation ; ils ne constituent cependant, pour d’autres, que l’un des chapitres qu’ont suscités les spécialités médicales les plus diverses. Si la pathologie infectieuse a apporté sa contribution à l’arsenal thérapeutique de ce que l’on appelle maintenant réanimation, c’est essentiellement à cause des formes respiratoires de la poliomyélite. Réanimations ventilatoire et cardiaque pourront dès lors être pratiquées hors du poumon d’acier, à l’utilisation toujours imparfaite et qui interdisait parfois de traiter l’association d’une paralysie respiratoire à une paralysie de la déglutition. Ces cas deviennent curables depuis qu’un appareillage permet la ventilation interne par l’intermédiaire de la trachéotomie. Ces respirateurs, dont celui d’Engström est resté longtemps le plus remarquable, permettent une ventilation adaptée à la morphologie du malade comme à son type d’affection. Correspondance : B. WEBER, 13 rue Brezin, 75014 Paris. médecine et armées, 2008, 36, 1 Leur efficacité et leur souplesse ont pour rançon aussi bien les excès que les insuff isances : ils imposent le contrôle des constantes sanguines (gaz du sang et équilibre acido-basique). Les appareils de ce type permettent désormais de traiter les détresses respiratoires quelles que soient leurs causes ; ils entrent dans l’arsenal de la réanimation dont l’indépendance par rapport à l’étiologie du symptôme traité apparaît comme une caractéristique. Les services de néphrologie interviennent bientôt dans le programme de la réanimation par leur souci de l’équilibre hydro électrolytique, les notions d’osmolarité des milieux aqueux, d’hyper ou de déshydratation cellulaire. Au-delà des tentatives thérapeutiques médicamenteuses, ces déséquilibres sont traités de façon idéale par le rein artif iciel qui prend ainsi sa place dans l’arsenal de la réanimation. C’est probablement parce que la transfusion pratiquée chez un blessé grave ou choqué a pu permettre un retour rapide à un meilleur état circulatoire que l’on a associé les deux termes de transfusion et de réanimation. Il s’agit là d’une nouvelle source de la réanimation, née en pratique pendant la dernière guerre mondiale et particulièrement importante pour le Service de santé. Malgré d’exceptionnelles tentatives de transfusion indirecte, la transfusion de sang avant 1940 était effectuée de bras à bras. Les méthodes de conservation vont permettre un approvisionnement en sang, son stockage et une plus grande facilité d’utilisation. Elles vont aussi permettre de traiter un plus grand nombre de blessés, pratiquement toujours hémorragiques en pathologie de guerre. Le redoutable choc traumatique a trouvé la parade que lui offre le maintien ou la restauration de la masse sanguine circulante. Cet impératif, le maintien de la masse sanguine n’imposant pas forcément l’utilisation de sang complet, des substituts ont plus tard été proposés allant des dérivés du sang (plasma lyophilisé ou sérumalbumine) à de grosses molécules synthétiques parmi lesquelles le Service de santé a retenu la gélatine fluide modifiée (Plasmagel). Le sang restant naturellement le liquide idéal, l’association des deux termes de transfusion et de réanimation montre que la transfusion a bien été une autre source de la réanimation polyvalente. Ainsi, la réanimation, partie de gestes simples, s'est progressivement enrichie de thérapeutiques, médicamenteuses ou mécaniques, complexes et destinées à maintenir ou restaurer l’équilibre du milieu intérieur qui reflète plus ou moins celui des grandes fonctions de l’organisme. 51 À ces données classiques, sont venus s’ajouter de nouveaux concepts théoriques susceptibles d’influencer la réanimation en lui donnant une orientation originale mais contestée. Pour ceux qui acceptent la vision physiopathologique préconisée par Henri Laborit, il faut d’abord admettre que toute maladie est une réponse de l’organisme à une agression. Cette réponse dépend assez peu de l’étiologie et son intensité est parfois telle qu’elle devient nocive par elle-même ; il apparaît donc logique de la combattre (comme l’on cherche à diminuer les excès thermiques de la fièvre). Lorsque cette réaction associe une vasoconstriction à une chute de la pression artérielle, on comprend qu’un traitement qui préconise l’utilisation de médicaments neuro ou vaso-plégiques, en principe hypotenseurs, ait rencontré l’opposition de certains médecins. Lorsque, en outre, cette conception, concrétisée sous le nom d’agressologie, en est venue à chercher à influencer la vie cellulaire, dont la responsabilité dans la modification du milieu intérieur n’est pas discutable, les sceptiques, forts de l’incertitude de nos connaissances de la vie cellulaire, l’ont accueillie comme une tentative présomptueuse et imprudente. Constatons que la réanimation en Algérie n’a fait appel qu’à des données classiques, en admettant comme classique l’utilisation laboritienne de la neuroplégie. II. APPLICATIONS DU CONCEPT DE RÉANIMATION À LA CHIRURGIE DE GUERRE EN ALGÉRIE. A) PERSONNEL. La règle préconisée a retenu l’affectation systématique d’un réanimateur à chaque poste chirurgical. Médecins du contingent, ils avaient choisi leur affectation, à la fin de leurs classes, en fonction de leur rang de sortie à l’examen terminal. Cette notion n’est pas indifférente car parmi ceux qui ont ainsi privilégié le stage de réanimation de trois mois à effectuer au service de réanimation transfusion de l’HMI du Val-de-Grâce, plusieurs, motivés par cette spécialité nouvelle pour eux, orienteront leur carrière ultérieure vers l’anesthésie ou la réanimation. Les premiers médecins affectés comme réanimateurs transfuseurs dans les formations hospitalières dans l’armée d’Italie avaient effectué un stage dans le service de transfusion du professeur Benhamou (à Alger) où ils avaient pu approfondir leurs connaissances hématologiques et envisager la réanimation sur le plan théorique. Chaque service de chirurgie des principaux hôpitaux algériens a évidemment été destinataire d’un réanimateur, soit l’hôpital Maillot à Alger, celui de Constantine et celui d’Oran. Mais on trouvera aussi un réanimateur dans tous les postes de chirurgie répartis sur le territoire algérien : dans l’Algérois à Tizi-Ouzou, Blida, Orléans ville ; dans l’Oranais à Tlemcen, Sidi-BelAbbès, Colomb-Béchar ; dans le Constantinois, à Sétif, Anaba, Souk-Haras, Batna, Tébessa, Khenchela et dans les territoires du sud à Djelfa, Ouargla et Gardaïa. 52 B) DOTATION EN MATÉRIEL DES SERVICES DE RÉANIMATION. L’importance reconnue de la transfusion parmi les activités de réanimation a justifié la dotation à chaque poste de réanimation du matériel de prélèvement du sang associé à des solutions anticoagulantes et d’un réfrigérateur, évidemment essentiel pour la conservation du sang. L’absence de laboratoire dans la plupart de ces petits postes chirurgicaux a conduit à les doter d’un matériel de cryoscopie détectant les anomalies de l’osmolarité plasmatique ainsi que de solutions de sulfate de cuivre capables de donner une idée approximative de la protidémie. Les stocks de sang ont pu, selon les activités militaires du secteur, soit être limités à un ou deux flacons des deux groupes O et A, soit comporter des réserves plus importantes. L’activité des réanimateurs s’est révélée extrêmement variable. III. ASPECT CLINIQUE DE LA RÉANIMATION. L’attitude vis-à-vis du blessé était relativement codifiée, au moins au stade du ramassage : le blessé recevait un traitement antalgique (Dolosal), associé le plus souvent à un neuroplégique (Phénergan) avec la prétention de diminuer ou de retarder le risque de choc. En fonction du délai existant entre blessure et hospitalisation, une évacuation sanitaire accompagnée d’un réanimateur a pu être envisagée, sous couvert de la perfusion d’un flacon de sang, d’une grosse molécule ou d’un soluté glucosé. Dès cette étape, les réanimateurs se sont cependant heurtés aux éventuelles difficultés de la voie d’abord qu’ils ont plus ou moins facilement résolues en fonction de leur familiarité avec la ponction des veines profondes (sous-clavière ou jugulaire). Les évacuations par hélicoptères, qui ont l’avantage de diminuer le délai entre la blessure et son traitement chirurgical, ont été assurées par les soins d’un médecin réanimateur convoyeur qui poursuivait son activité jusqu’au relais pris par la formation chirurgicale. S’est alors posé le problème de l’horaire de l’intervention par rapport aux gestes de réanimation : comment distinguer les cas où il vaut mieux attendre la correction de l’état de choc pour opérer et ceux où l’intervention devient elle-même élément de déchocage ? Pour le blessé, supposé déchoqué et opéré, les suites opératoires se déroulaient en principe de façon classique. La surveillance se bornait à gérer le volume de la masse circulante en surveillant l’évolution de la tension artérielle et surtout la régression du pincement de la différentielle, à attendre chez le blessé de l’abdomen le retour du péristaltisme, à administrer les liquides de perfusion nécessaires à l’hydratation et à l’apport d’électrolytes, ceci jusqu’à l’ébauche d’une alimentation par voie veineuse lorsque sont apparues des solutions d’acides aminés, puis de suspensions lipidiques. L’évolution était inévitablement différente selon le type et/ou la multiplicité des lésions, la blessure éventuelle de tube digestif, les problèmes respiratoires posés par une blessure thoracique. Les difficultés qu’ont rencontré ces g. duchesne † médecins réanimateurs sont bien identifiées et détaillées dans les lettres qu’ils ont adressées, hors hiérarchie, au Val-de-Grâce ; mais ces lettres, comme le montrent les quelques extraits présentés chronologiquement ci-après, révèlent aussi les possibilités d’une réanimation que la plupart d’entre eux découvraient. IV. LETTRES D’ALGÉRIE. A) EXTRAITS. 1. J. Bougé, janvier 1960. En gros, en 19 mois d’AFN, j’ai donné environ 1 500 anesthésies avec deux morts par faute anesthésique grossière de ma part : l’une et l’autre dans les deux premiers mois de ma pratique ici… J’ai mené environ 70 réanimations « majeures » (au-delà de 48 heures de perfusion intraveineuse) dont 5 « refroidissements » à 36,5/37 sous déconnexion : 4 résultats spectaculaires tous les 4 chez des civils musulmans ; 1 mort militaire. J’ai eu 9 morts dont 3 militaires parmi ces sujets. J’ai eu à passer environ 120 litres de sang dont le 1/3 me provenait du Centre d’Oran et les 2/3 de mes donneurs (surtout inf irmiers de l’hôpital militaire mais aussi légionnaires). Je n’ai pas eu un seul accident. J’ai eu environ 2 000 groupages sanguins à pratiquer… je vous serai très longtemps reconnaissant de m’avoir donné le goût des techniques anesthésiologiques (et qui sera désormais ma spécialité). 2. Lt Richardet, janvier 1960. Ce sont donc des pieds de mine que je reçois. J’ai longtemps bagarré pour que la réanimation s’exerce avant l’acte chirurgical. J’ai vu plusieurs arrêts cardiaques d’induction chez des blessés conduits directement sur la table, sans réanimation, sans prémédications alors que l’urgence n’était pas évidente. Mais je vois que je n’avais que partiellement raison. Il n’y a pas de réanimation véritable sans amputation. Il aurait suff i, bien sur, de faire une kaliémie. Le photomètre à flamme existe, relégué à la cave de la pharmacie. Je garde le souvenir des dosages de Maillot. J’allais oublier une question intéressante. La déconnexion. Je l’ai essayée une fois. Polyblessé par mine (pied de mine + fracture du fémur + crâne). La Tension artérielle (TA) était à 7 à la 30e heure ; déchoquage à l’arrivée, rechute progressive; de nouveau apport large de sang; rechute. Perfusion de M1 (association Largactil – Phénergan – Dolosal). Chute à 6, puis remontée progressive avec élargissement de la différentielle ; 4 heures après la TA était à 12-9 et s’y est maintenue. Malheureusement, le blessé, trachéotomisé, n’a pas été évacué (pourquoi ?) et est mort d’infection pulmonaire 48 heures après. Le glucosé hypertonique n’existait qu’en ampoules de 20 ml à mon arrivée, ce n’était pas facile d’emploi. J’ai maintenant des flacons de 250 ml à 15 % et 30 %. C’est bien sur un médicament « formidable ». On obtient des remontées tensionnelles que ni le sang ni les substituts ne permettent, mais c’est un trompe l’œil. J’utilise souvent la voie sous-clavière. C’est là aussi une méthode irremplaçable. Mais il y a des accidents. J’ai eu évolution de la réanimation dans les armées plusieurs gonflements du creux sus claviculaire (bien que le sang reflue dans la tubulure surbaissée pour contrôle). Excellente voie, je crois, le temps de « regonfler » les veines périphériques. 3. Alain Lispchutz, mai 1960. Première grosse évacuation sanitaire (ES). Embuscade à 23 heures… j’embarque les plus graves au nombre de six. Une deuxième banane emmènera les six suivants. Il faut sept minutes pour caser les six blessés. Aucune fiche médicale de l’avant ne porte de diagnostic. Je repère le plus agité et le plus pâle. Je vous assure que l’appareil à tension a été inutile. J’ai regardé les cinq autres en vitesse, en voyant si le pouls était bien frappé ou non. Puis, je suis revenu à lui. Un orifice abdominal antérieur (c’était en fait l’orifice de sortie, l’autre était paravertébral droit). Pas de pouls. J’ai installé un Dextran et j’avais juste terminé quand nous sommes arrivés, non à l’antenne mais sur le terrain. Il était 0 h 40. Je suis monté dans l’ambulance, j’ai surveillé la perfusion. À l’arrivée TA 8- ? Avec De Seguin, en 10 minutes on fait passer 500 ml de Dextran, 500 ml de Subtosan ; TA 14-8. Anesthésie : 1 h ; durée de l’intervention ? Néphrectomie droite. Il y avait un énorme hématome de la loge rénale avec plaie du pédicule ; 2,5 l de sang sont administrés pendant toute l’interventions et ce matin la TA est restée stable… Les autres gestes utiles sont faits presque toujours par les infirmiers (surtout ceux du REP) : Dolosal-Phenergan, antibiotique, rappel de sérum antitétanique, immobilisation des fractures. Que reste-t-il ? Les gestes de réanimation respiratoire : en pratique, on peut mettre le blessé demi assis, lui introduire dans la bouche une canule de Guedel, faire une aspiration bucco pharyngée, donner de l’oxygène et fermer un thorax ouvert. Intubation et trachéotomie me paraissent irréalisables dans des conditions satisfaisantes à l’intérieur d'un hélicoptère. Il faut agir avant de partir… Les encombrements trachéobronchiques, les hémothorax, les pneumothorax suffocants sont mon cauchemar. Dans une autre lettre, je me réserve de vous parler des questions d’organisation, car il y a des endroits où l’évacuation sanitaire fonctionne bien. Et puis j’essaierai de porter un jugement sur ce que je fais. Si je me juge inutile, je demanderai à être utilisé comme réanimateur dans un petit hôpital. 4. Deuxième courrier, quelques jours après. Les évacuations sanitaires sont avant tout une question d’organisation. Une des raisons de cet état de choses, c’est que personne, au fond, n’est convaincu de la nécessité d’un médecin évacuateur. Et moi-même ? Je pense que neuf fois sur dix, il n’a rien à faire. Reste ce fameux dixième. Vaut-il ou non la peine de faire quelque chose ? J’irai jusqu’à penser qu’un seul exemple suff irait à justifier un ensemble de mesures dans ce domaine. Il n’y aurait pas lieu de faire au départ de distinction entre réanimateur-convoyeur et convoyeur tout court. Et le stage de l’hôpital Necker (stage de réanimation respiratoitre et ventilation artificielle) serait ouvert à tous. Je crois beaucoup plus utile de lire et de comprendre 53 les articles de M. Cara que de connaître l’épidémiologie de l’hépatite virale. Alain Lipschutz, sera quelques mois plus tard, mortellement blessé par une pale d’hélicoptère au cours d’un convoyage. 5. R Trahais, mai 1960. Pour ce qui est de la rééquilibration post-opératoire nous nous servons uniquement du Delta, hématocrite et des règles que vous nous avez enseignées. Car il n’existe pas de photomètre à flamme à Orléans ville et les taux d’urée sanguine et urinaire sont souvent fantaisistes… Depuis mon arrivée ici, bien que moyennement habile de mes doigts, je réussis assez facilement les perfusions dans la veine sous-clavière, ce qui m’évite des dénudations fastidieuses chez les nourrissons. Chez les choqués militaires, nous faisons maintenant passer aussi le Plasmagel, qui permet d’attendre la transfusion sanguine, dans la veine sous-clavière… 6. R Assan, juin 1960. La principale diff iculté est de mettre un trocard dans n’importe quelle veine et de ne pas avoir peur de vider mon frigidaire de ses flacons de sang. Les fortes doses d’Hydergine ne me font plus peur, associées à la Novocaïne et au Diparcol. 7. Asp Kachaner, décembre 1960. Vous m’avez à la fois étonné et ravi de m’apprendre que, non seulement sans y croire mais encore en l’ignorant, je faisais de la neuroplégie… 8. Ss Lt Leygue, décembre 1961. J’ai eu à traiter une dizaine de piqûres de scorpion, dont certaines fort graves où, à côté du sérum antiscorpionique, la thérapeutique de déconnexion m’a donné de bons résultats. Je n’ai pas eu l’audace d’employer la neuroplégie seule, sans sérothérapie, bien que cette dernière soit d’efficacité douteuse, d’après Pasteur, 3-4 heures après la morsure. Or je voyais fréquemment les malades 7-8 heures après piqûre… 8. R Cormis, janvier 1962. J’ai trouvé ici (Collo) de bonnes conditions de travail et une installation plus que convenable. Nous avons un important fichier de donneurs et il est relativement facile d’avoir du sang frais des militaires. B) COMMENTAIRES Tenant compte de l’abondante correspondance hors hiérarchie reçue au Val-de-Grâce lors du conflit algérien, on peut alors schématiser la réanimation en prenant l’exemple du blessé de l’abdomen choqué. Il sera traité successivement par une médication antalgique (Phénergan-Dolosal) lors du ramassage, puis par la perfusion d’une grosse molécule (souvent du Plasmagel) soit au cours de l’évacuation, soit dès son arrivée à l’échelon hospitalier, tandis que sont pratiqués les examens sanguins permettant les transfusions ultérieures. Les difficultés d’abord veineux chez le blessé choqué incitent à pratiquer la ponction d’une veine profonde (sous-clavière 54 ou jugulaire). Au remplissage vasculaire est associée habituellement une neuroplégie (mélange M1 : LargactilPhénergan-Dolosal ou une association NovocaïneHydergine) facilitant l’obtention d’un élargissement de la différentielle et la stabilité du déchocage. L’association de l’acte chirurgical, contrindiquée naguère par l’état de choc, sera, en fait, plus précoce car elle contribue avec l’anesthésie qu’elle nécessite au déchocage et à sa stabilité. Dans l’hypothèse d’une évolution favorable, le traitement comprendra alors la poursuite de l’hydratation, la recherche d’un bon équilibre hydro-électrolytique et, en attendant la reprise du péristaltisme, une alimentation parentérale associant soluté glucosé hypertonique et solution d’acides aminés. Dans la mesure où une surveillance biologique est possible, la prévention des complications tbrombo-embolique est assurée par la succession héparine-antivitamine K. V. CONCLUSION. Comme on peut le supposer pour tout conflit, en Algérie les conditions d’une réanimation idéale ont rarement été réunies. Cette expérience a toutefois confirmé la notion qu’en pathologie de guerre, le réanimateur est le collaborateur indispensable du chirurgien. C’est bien ce qu’a admis la direction du Service de santé en décidant la formation de spécialistes de réanimation. Cette formation comportant l’acquisition de connaissances approfondies, hématologiques, biochimiques et physiologiques, assurée par un assistanat de trois ans, prélude au concours de la spécialité d’anesthésie réanimation. Une chaire d’anesthésie réanimation de guerre s’imposait dans le Service de santé. L’autre élément dominant apporté par le conflit algérien est la confirmation de l’importance primordiale du sang dans le traitement du blessé de guerre. Conscient de cette notion, le Service de santé militaire avait dès la fin de la dernière guerre mondiale décidé la création d’un Service central de transfusion-réanimation (SCTRA) susceptible d’assurer l’approvisionnement en sang des formations sanitaires, chargé de la préparation et de la distribution des flacons de solution anticoagulante citratée glucosée (solution ACD) destinés à la récolte et à la conservation temporaire du sang deux à trois semaines s’il est maintenu entre 4 et 6°, chargé aussi de la préparation des serums-test, du plasma lyophilisé, des produits de fractionnement du plasma (serum-albumine, fraction fibrinogène, facteur antihémophilique A…). Ce service assure enf in le stockage et la distribution des grosses molécules synthétiques (gélatine fluide modifiée ou Plasmagel) en attendant la mise au point de solutions d’hémoglobine tolérée par le rein et celle de la conservation durable du sang sous forme congelée respectant la survie des éléments cellulaires. Il est possible de conclure en reconnaissant que le Service de santé est conscient de ce que le sang reste et restera sans doute longtemps encore le maître-mot de la réanimation de guerre. g. duchesne † Pratique médico-militaire ÉVALUATION DES PRATIQUES ET DES BESOINS EN MATIÈRE D’ÉDUCATION POUR LA SANTÉ DANS LES ARMÉES EN 2005 R. MIGLIANI, L. OLLIVIER, B. QUEYRIAUX, M. MARÉCHAL, R. MICHEL, J.-P. BOUTIN RÉSUMÉ Une enquête sur les pratiques et les besoins en matière d’éducation pour la santé dans les armées a été réalisée en 2005. Un médecin et un infirmier ont été tirés au sort dans chacun des services médicaux d’unité des trois armées et de la gendarmerie. Le taux de participation à cette enquête a été de 86 % pour les médecins et pour les infirmiers, 79,1 % des médecins et 51,2 % des infirmiers déclaraient avoir réalisé des séances d’éducation dans leur unité. Selon les circonstances, les durées médianes des séances variaient de 25 à 60 minutes et les tailles médianes des auditoires variaient de 25 à 70 personnes. Les infirmiers étaient 91,9 % à déclarer qu’ils devaient participer à l’éducation sanitaire dans leur unité. Quarante et un pour cent des médecins et cinquante-neuf pour cent des infirmiers souhaitaient bénéficier d’une formation aux techniques d’éducation sanitaire. Sept thèmes éducatifs ont été jugés prioritaires : les infections sexuellement transmissibles, les maladies à transmission vectorielle, l’alcoolisme, le tabagisme, les drogues illicites, le coup de chaleur d’exercice et les traumatismes sonores. L’éducation pour la santé dans les armées pourrait être renforcée au niveau du Service de santé des armées par la création de stages de formation et d’un service dédié ayant notamment pour objectif de développer des outils d’évaluation de l’efficacité de cette stratégie de prévention. Des enquêtes auprès du Commandement et des militaires sont également nécessaires pour compléter l’évaluation des pratiques, des perceptions et des besoins de l’éducation sanitaire dans les armées. Mots-clés : Armée. Éducation pour la santé. Thèmes éducatifs. I. INTRODUCTION. L’éducation pour la santé s’inscrit dans une politique de promotion de la santé telle que l’a définie l’Organisation mondiale de la santé (OMS), dans la charte d’Ottawa (1). Elle vise à informer, motiver et encourager l’adoption volontaire par la population de comportements favorables à la santé, permettant d’éviter les maladies, de R. MIGLIANI, médecin en chef, professeur agrégé du SSA. L. OLLIVIER, médecin principal, praticien confirmé. B. QUEYRIAUX, médecin principal, praticien confirmé. M. MARÉCHAL, statisticienne. R. MICHEL, médecin en chef, praticien certifié. J.-P. BOUTIN, médecin chef des services, professeur du SSA. Correspondance : R. MIGLIANI, École du Val-de Grâce, département d’épidémiologie et de santé publique, Ilôt Bégin, 00498 Armées. médecine et armées, 2008, 36, 1 ABSTRACT PRACTICES AND REQUIREMENTS FOR HEALTH EDUCATION IN FRENCH ARMED FORCES IN 2005. A survey on practices and requirements for health education in Armed Forces was realized in 2005. A physician and a nurse were chosen by drawing lots in every medical practice unit of all the French Forces. Participation rate in this study reached 86 % for physicians and nurses. 79.1 % of the physicians and 51.2 % of the nurses declared having realized educative sessions in their unit. Depending circumstances, median duration on the sessions varied between 25 to 60 minutes and median size of the auditory varied between 25 to 70 persons. 91.9 % of the nurses said that nurses had to take part in health education in their unit. 40.7 % of the physicians and 58.9 % of the nurses would have liked to receive a training to the right sanitary education. Seven educative themes were given top priority : sexual transmitted diseases, diseases with vectorial transmission, alcoholism, addiction to smoking, illicit drugs, heat stroke in exercise, acute sonorous traumatism. For 71.1 % of the physicians and 52.5 % of the nurses the best educational support was a power point presentation. Health education in the Forces can be improved owing to development of training sessions and creation of an service dedicated to health education. A survey on practice, perception and requirements for health education is also necessary for soldiers and commanders. Keywords : Army. Educative themes. Health education. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 55-60) les guérir si l’on est malade et de faciliter la réadaptation (2). Elle concourt par ailleurs à la réussite d’autres mesures de santé publique comme les campagnes de dépistage, l’amélioration de la qualité et de l’accessibilité des soins, la protection de l’environnement. L’éducation pour la santé est une préoccupation très ancienne des armées (3). Dans les armées françaises, elle a fait l’objet de peu de publications qui rapportaient des évaluations de campagne de sensibilisation dans les domaines de l’alcoolisation excessive et du paludisme (4, 5). Pour ce qui concerne les pratiques éducatives des médecins, peu d’enquêtes ont également été réalisées et la seule récemment publiée concernait le domaine des infections sexuellement transmissibles (6). 55 Cet article présente une enquête, réalisée à la demande de la Direction centrale du Service de santé des armées (DCSSA), qui avait pour but de dresser un premier état des lieux sur les pratiques et les besoins des médecins et des infirmiers des armées en matière d’éducation pour la santé destinée à des groupes de militaires. Elle n’abordait pas les pratiques d’éducation individuelle et thérapeutique. Les résultats de cette enquête devaient apporter des éléments de réflexion pour améliorer l’éducation sanitaire collective. Les objectifs spécifiques étaient : i) de décrire la pratique de l’éducation pour la santé collective réalisée dans les services médicaux d’unité (SMU) ; ii) d’identifier les thèmes d’éducation sanitaire prioritaires selon les médecins et les infirmiers et iii) de déterminer les supports souhaités pour réaliser l’éducation pour la santé. Cette enquête n’avait pas pour objectif d’évaluer l’impact et l’efficacité de l’éducation pour la santé dans les armées. II. MÉTHODES. Pour atteindre ces objectifs une enquête transversale par auto-questionnaire anonyme a été réalisée. La population cible était constituée par les médecins et infirmiers, diplômés d’État ou autorisés à pratiquer, des SMU. Au sein de chaque SMU, un médecin et un infirmier d’active ou sous contrat, renseignaient un questionnaire spécifique. Après exclusion des hôpitaux des armées et des SMU sans médecin, 347 SMU ont été retenus pour participer à cette enquête. Dans chacun d’eux, un médecin a été tiré au sort par le Département d’épidémiologie et de santé publique (DESP) de l’Institut de médecine tropicale du Service de santé des armées (IMTSSA) à partir de la liste des médecins d’unité fournie par la DCSSA. Lorsqu’il n’y avait qu’un seul médecin dans le SMU, il était inclus. Le médecin chef de l’unité ou son remplaçant attribuait le questionnaire destiné aux infirmiers, à celui dont la date de naissance était la plus proche de la date de réception du questionnaire. Les questionnaires ont été adressés par voie postale à l’ensemble des 347 SMU. Une enveloppe à l’adresse du DESP et affranchie était jointe à chaque questionnaire pour favoriser les réponses. Deux relances systématiques ont été réalisées par l’intermédiaire des DESP, un et deux mois après l’envoi des questionnaires. Les informations recueillies par les questionnaires concernaient les caractéristiques des sujets enquêtés (sexe, année d’engagement, année du diplôme, armée d’emploi, type d’unité), les activités d’éducation sanitaire à l’unité et en opérations extérieures (moyens et supports utilisés, thèmes éducatifs abordés, occasions, durée des séances, nombre de participants, lieux des séances), les besoins pour les activités éducatives (formation aux techniques d’éducation, aux logiciels de présentation assistée par ordinateur (PAO), banques de données, supports éducatifs), les thèmes éducatifs jugés prioritaires et des commentaires libres. La plupart des questions étaient des questions à réponses fermées. Les réponses ont été saisies à l’aide du logiciel de saisie automatique TeleForm® (Cardiff™, Vista, CA, USA). 56 L’analyse des données a été réalisée avec les logiciels Excel® et Epi-Info©. Le test du chi2 a été utilisé pour les comparaisons des proportions. Le seuil de signification a été f ixé à 5 %. Les intervalles de conf iance à 95 % des proportions ont été calculés par la méthode binomiale exacte. III. RÉSULTATS. A) TAUX DE PARTICIPATION. Les questionnaires ont été adressés dans chaque SMU le 28 avril 2005. À la date du 28 août, après deux relances, 297 médecins et 297 infirmiers ont retourné le questionnaire complété, soit un taux de participation identique de 85,6 %. Les taux de participation chez les médecins n’étaient pas significativement différents selon l’armée : Terre 81,8 %, Gendarmerie 87,3 %, Marine 84,5 %, Air 95,3 % et Services communs et interarmées 92,9 % (p>0,05). De même, chez les infirmiers, on ne notait pas de différence significative selon l’armée : Terre 84 %, Gendarmerie 77,8 %, Marine 91,4 %, Air 90,7 % et Services communs et interarmées 100 % (p>0,05). B) CARACTÉRISTIQUES DES ÉCHANTILLONS. Le tableau I donne les principales caractéristiques des médecins et des infirmiers ayant participé à l’enquête. La majorité des participants étaient des hommes, appartenant à des unités opérationnelles et dont la durée médiane dans le poste était égale à deux ans. Tableau I. Caractéristiques des médecins et des infirmiers du Service de santé des armées ayant participé à l’enquête sur l’éducation pour la santé en 2005. Sexe masculin Sexe féminin Médecins (n = 297) Infirmiers (n = 297) 238 (80,1 %) 59 (19,9 %) 209 (70,4 %) 88 (29,6 %) 19 ans 1 an – 37 ans 11 ans 1 an – 37 ans Durée engagement : – médiane – extrêmes Ancienneté dans la spécialité : – médiane – extrêmes 8 ans 10 ans < 1 an – 29 ans < 1 an – 36 ans Type d’unité : – – – – – opérationnelle opérationnelle/soutien soutien école non précisé 148 (49,8 %) 57 (19,2 %) 41 (13,8 %) 50 (16,8 %) 1 (0,4 %) 131 (44,1 %) 69 (23,2 %) 43 (14,5 %) 48 (16,2 %) 6 (2 %) Ancienneté dans l’unité : – médiane – extrêmes 2 ans 2 ans < 1 an – 12 ans < 1 an – 25 ans C) PRATIQUE DE L’ÉDUCATION SANITAIRE. Le tableau II détaille les principales pratiques d’éducation sanitaire des médecins ayant participé à l’enquête. Parmi les médecins ayant déclaré avoir bénéficié d’une formation dans le domaine de l’éducation sanitaire, celle-ci avait été acquise à l’IMTSSA lors de stages de formation continue de lutte contre les Infections r. migliani Tableau II. Pratiques de l’éducation sanitaire collective des médecins des armées en 2005 (297 médecins répondants). Pratiques de l’éducation sanitaire N % IC95 %* Médecins ayant bénéficié d’une formation aux techniques d’éducation 103 34,7 % 29,3 %-40,4 % Médecins ayant réalisé des séances d’éducation dans l’unité actuelle 235 79,1 % 74,1 %-83,6 % Thèmes éducatifs abordés par au moins 50 % des médecins dans l’unité actuelle : — Maladies à transmission vectorielle — Infections sexuellement transmissibles — Coup de chaleur d’exercice — Alcoolisme — Hygiène de l’eau et de l’alimentation — Drogues illicites — Maladies du péril fécal 183 182 150 139 131 125 123 77,9 77,4 63,8 59,1 55,7 53,2 52,3 72,0 71,6 57,3 52,6 49,1 46,6 45,7 Médecins ayant participé à des OPEX** parmi ceux ayant réalisé des séances d’éducation sanitaire 109 46,4 % 39,9 %-53 % Médecins ayant réalisé des séances d’éducation sanitaire en OPEX** 86 78,9 % 70,0 %-86,1 % Thèmes éducatifs abordés par au moins 50 % des médecins en OPEX** : — Infections sexuellement transmissibles — Maladies à transmission vectorielle — Hygiène de l’eau et de l’alimentation — Coup de chaleur d’exercice — Maladies du péril fécal — Hygiène corporelle en opérations — Alcoolisme 69 67 65 62 56 47 43 80,2 77,9 75,6 72,1 65,1 54,7 50,0 70,2 67,7 65,1 61,4 54,1 43,5 39,0 % % % % % % % % % % % % % % %-83,0 %-82,6 %-70,0 %-65,5 %-62,2 %-59,7 %-58,9 %-88,0 %-86,1 %-84,2 %-81,2 %-75,1 %-64,5 %-61,0 % % % % % % % % % % % % % % * Intervalle de confiance à 95 % ** Opérations extérieures sexuellement transmissibles (IST) et le VIH-Sida et de lutte contre le paludisme pour 62,1 %, à l’École du Val-de-Grâce pour 34 % et dans d’autres lieux pour 3,9 %. Pour préparer les séances d’éducation, les médecins s’appuyaient sur des revues médicales et scientifiques pour 91,5 % d’entre eux, 67,7 % utilisaient Internet, 43,8 % des livres médicaux et 18,2 % d’autres moyens. Des organismes extérieurs étaient peu souvent sollicités. L’Institut national de prévention et d’éducation sanitaire (INPES), les DESP et les Directions régionales du Service de santé des armées étaient cités par moins de 15 % des médecins. Le tableau III indique la fréquence des séances d’éducation selon le moment et l’armée d’emploi des médecins ainsi que les durées des séances et le nombre de participants. Les lieux de déroulement des séances étaient variables. Plusieurs lieux pouvaient être cités et dans 70,6 % des cas les séances se déroulaient dans des salles de cours, de réunion ou des salles audiovisuelles, dans 53,2 % dans un amphithéâtre ou une salle de cinéma, dans 17,4 % à l’infirmerie, dans 12,3 % à la cafétéria, au foyer, au mess, à l’ordinaire ou au carré marine et dans 9,8 % des cas enfin dans d’autres lieux. Le support éducatif le plus utilisé par les médecins était une Présentation assistée par ordinateur (PAO) pour 69,4 % (IC 95 % : 63 %-75,2 %) d’entre eux. Selon les thèmes éducatifs, les films soit n’étaient pas utilisés comme support, soit l’étaient par 2 % à 16 % des médecins. Quatre de ces films ont été plus particulièrement cités : « Mosquito park » qui aborde le thème du paludisme, « Sida propos » et « Soucis d’amour » qui abordent le thème du Sida et « Détonation danger » celui des traumatismes sonores. Les infirmiers étaient 51,2 % (152/297 ; IC 95 % : 45,3 %57 %) à déclarer avoir déjà réalisé, seuls ou avec l’aide des médecins, des séances d’éducation sanitaire dans l’unité actuelle. Trois principales raisons de non réalisation de l’éducation sanitaire collective ont été citées par les médecins : le manque de temps (56 % des 100 raisons exprimées), le manque de moyens (20 %) et le manque d’intérêt du Commandement (16 %). Cinq principales raisons de non participation aux activités d’éducation pour la santé ont été citées par les infirmiers : le manque de temps (34 % des 164 raisons exprimées), le manque de moyens (30 %), le fait que l’éducation n’était pas une priorité dans l’unité (18 %), le manque de personnels (10 %) et la non mise à contribution des infirmiers (8 %). D) BESOINS EXPRIMÉS DANS LE DOMAINE DE L’ÉDUCATION. Un premier besoin exprimé dans cette enquête concernait l’implication des infirmiers dans l’éducation pour la évaluation des pratiques et des besoins en matière d’éducation pour la santé dans les armées en 2005 57 Tableau III. Fréquence des séances d’éducation collective selon le moment et l’armée d’emploi des médecins, durée des séances et nombre de participants en 2005 dans les armées. Ensemble des médecins Moment des séances — — — — — — — — — A l’incorporation Avant départ en mission En cours de mission Retour de mission Séances aux cadres Evènements particuliers Journée sans tabac Journée mondiale Sida Autres moments n = 235 (%) 84 (35,7) 150 (63,8) 95 (40,4) 11 (4,7) 93 (39,6) 18 (7,7) 7 (3) 4 (1,7) 61 (26) Durée des séances (en minutes) Armée d’emploi des médecins Terre n = 118 (%) 64 87 52 7 57 8 2 1 24 (54,2) (73,7) (44,1) (5,9) (48,3) (6,8) (1,7) (0,8) (20,3) Marine Gendarmerie Air n = 33 (%) n = 40 (%) n = 34 (%) 6 (18,2) 15 (45,5) 23 (69,7) 1 (3) 4 (12,1) 2 (6,1) 3 (9,1) 1 (3) 9 (27,3) 7 (17,5) 25 (62,5) 3 (7,5) 0 (0) 13 (32,5) 6 (15) 1 (2,5) 0 (0) 11 (27,5) 3 19 15 2 12 2 1 3 13 (8,8) (55,9) (44,1) (5,9) (35,3) (5,9) (2,9) (8,8) (38,2) Autres* n = 10 (%) 4 (40) 4 (40) 2 (20) 1 (10) 7 (70) 0 (0) 0 (0) 0 (0) 4 (40) Médiane Extrêmes 60 48 40 25 30 30 30 45 30 20-180 10-120 10-120 2-30 10-120 15-180 30-90 30-60 15-300 Nombre de participants Médian Extrêmes 40 65 30 65 50 25 30 70 30 10-300 10-120 8-120 25-400 10-120 15-180 20-250 20-2 000 15-120 * Cabinets médicaux des services communs et inter-armées santé dans les armées. Les infirmiers étaient en effet 91,9 % (IC 95 % : 88,2 %-94,8 %) à déclarer qu’ils devaient participer à l’éducation sanitaire dans leur unité. Les raisons invoquées étaient les suivantes : plus grande proximité avec la troupe et l’équipage et discours mieux accepté pour 49 % des infirmiers, rôle d’éducateur de l’infirmier pour 28 %, activité de prévention de l’infirmier pour 16 % et rôle d’aide et de remplaçant du médecin pour 9,5 %. Les autres besoins exprimés concernaient la formation, l’accès à des informations utiles et des supports éducatifs. Le tableau IV indique la part des médecins et des infirmiers déclarant des besoins en formation. La majorité des médecins (78 %) et des infirmiers (89 %) souhaitaient des formations courtes ne dépassant pas une semaine en milieu militaire ou civil. Les médecins étaient 98 % (IC 95 % : 95,7 %-99,3 %) à souhaiter disposer de banques de données actualisées, 85,9 % (81,4 %-89,6 %) à être intéressés par des présentations d’éducation toutes faites et adaptées aux armées. Tableau IV. Proportions des médecins et des infirmiers du Service de santé servant en unité déclarant des besoins de formation en éducation sanitaire en 2005. Médecins (n = 297) Formations souhaitées Thèmes éducatifs spécifiques Oui % IC95 % 106 36 (30,2 %-46,6 %) Infirmiers (n = 297) Oui % IC95 % - - - Techniques 121 40,7 (35,1 %-46,6 %) -175 58,9 (53,1 %-64,6 %) d’éducation pour la santé Techniques de PAO* 125 42,1 (36,4 %-47,9 %) 189 63,6 (57,9 %-69,1 %) * PAO : présentation assistée par ordinateur. 58 E) THÈMES ÉDUCATIFS PRIORITAIRES POUR LES ARMÉES. La f igure 1 indique les thèmes éducatifs jugés prioritaires par les médecins et les inf irmiers par ordre de fréquence décroissante. Sept thèmes ont été plus fréquemment cités par les participants à l’enquête : les Infections sexuellement transmissibles (IST), les maladies à transmission vectorielle, l’alcoolisme, le tabagisme, les drogues illicites, le coup de chaleur d’exercice et les traumatismes sonores. Une différence significative de priorisation entre médecins et inf irmiers est constatée pour quatre thèmes. Les médecins considèrent plus souvent la prévention du tabagisme et des accidents de la voie publique comme prioritaire, tandis que les inf irmiers accordent plus d’importance à l’hygiène corporelle en opération et à la promotion du don du sang. IV. DISCUSSION. Cette évaluation est la première dans le domaine de la pratique de l’éducation pour la santé, destinée à des groupes de militaires, qui concerne les médecins et les inf irmiers de l’ensemble des armées. Le taux de participation à cette enquête est particulièrement remarquable, proche de 86 %, identique pour les médecins et les infirmiers, malgré la longueur relative des questionnaires. Plusieurs éléments peuvent expliquer le taux de participation à cette enquête : les relances systématiques, l’anonymat des questionnaires, la plus grande fréquence des questions à réponses fermées, l’enveloppe affranchie accompagnant le questionnaire pour la réponse, et l’intérêt certain des médecins et des infirmiers pour les activités d’éducation pour la santé. Bien que les taux de participation ne différent pas selon l’armée d’appartenance dans chacun des échantillons, les résultats doivent être nuancés par la non participation d’environ un médecin et un infirmier sur six. Aucune enquête sur les non-répondants n’a été réalisée. Cette enquête confirme et quantifie l’importance de l’activité d’éducateurs pour la santé des médecins et r. migliani Figure 1. Thèmes éducatifs prioritaires pour les médecins et les infirmiers par ordre de fréquence décroissante (plusieurs citations possibles). des infirmiers tant en métropole, auprès des militaires nouvellement incorporés ou en instance de départ en mission, qu’en opérations sur le terrain et en mer. Les infirmiers souhaitent, dans leur grande majorité, participer et s’impliquer davantage dans les activités d’éducation pour la santé. Ils considèrent être plus proche de la troupe, avoir un discours mieux accepté, avoir un rôle d’éducateur et enfin pouvoir aider et remplacer les médecins en cas de nécessité. Ce rôle d’éducateur fait partie intégrante des nouvelles qualifications demandées aux infirmiers de santé publique de l’armée de Terre américaine (7). Cette enquête montre que les conditions d’exercice ne sont pas optimales avec de nombreux médecins non formés aux techniques d’éducation et de communication, qui travaillent souvent seuls, sollicitant peu de soutien à l’extérieur, qui manquent de temps, avec des temps d’activité, des tailles d’auditoire et des locaux mis à leur disposition pas toujours adaptés pour être eff icaces. L’enquête montre que les auditoires sont souvent supérieurs à 25 personnes. Pour réaliser des séances interactives, l’auditoire ne doit pas dépasser une vingtaine de personnes. Si pour de nombreux médecins, les locaux mis à leur disposition sont des salles de petite taille, plus propices aux séances interactives, pour environ un sur deux sont également mis à leur disposition des amphithéâtres et des salles de cinéma de plus grande taille, plus favorables aux séances d’information passives limitant les échanges. Le support éducatif le plus utilisé par les médecins, loin devant tous les autres supports, est la PAO. Les films réalisés par le Service de santé des armées sont peu utilisés et très anciens. Si les médecins n’ont pas fait de commentaires sur les quelques f ilms mis à leur disposition, plusieurs infirmiers, sans que ces affirmations ne revêtent un caractère représentatif, ont insisté sur le manque d’actualisation de ces films (plus de dix ans en général). Les médecins et les infirmiers sont nombreux à exprimer un besoin de formation, formation aux techniques d’éducation et de communication et formation informatique. L’essentiel des formations reçues dans le domaine de l’éducation est le fait du Service de santé des armées. Lors des stages de formation continue organisés par l’IMTSSA, une formation à l’éducation sanitaire est effectivement réalisée. La plus développée et la plus interactive est celle du stage de lutte contre les IST dont la très grande majorité des stagiaires sont des médecins. Le module de formation se déroule sur quatre demijournées. La première est consacrée aux bases et principes de l’éducation et de la communication, la seconde à la préparation d’une communication à un groupe de jeunes recrues sur un thème éducatif et d’un questionnaire d’évaluation, la troisième à la présentation filmée de la communication dans une unité avec administration du questionnaire avant-après et la dernière à l’analyse critique de la communication orale et à l’étude des résultats de l’évaluation. évaluation des pratiques et des besoins en matière d’éducation pour la santé dans les armées en 2005 59 Le besoin est réel pour les médecins de disposer de banques de données actualisées et d’informations pour les aider à mettre à jour leurs supports éducatifs. Les DESP pourraient en partie fournir ce type d’informations à partir des déclarations que les médecins réalisent dans le cadre de la surveillance épidémiologique (8) et à partir des dossiers documentaires élaborés et mis à jour par l’unité de veille de l’IMTSSA dans le cadre de la banque épidémiologique de données sur l’outre-mer et la zone intertropicale, plus connue sous l’acronyme Bédouin (9) dorénavant accessible à partir des postes ayant accès à l’IntraSan et ultérieurement pour tous les off iciers du Service de santé des armées titulaires de la Carte professionnelle de santé. Les thèmes éducatifs les plus fréquemment cités sont assez similaires dans les trois armées et la gendarmerie et concernent principalement les risques auxquels sont ou peuvent être exposés les militaires notamment lors des missions opérationnelles : ceux liés à l’environnement et aux vecteurs, aux défauts d’hygiène, aux conduites addictives et à l’activité sexuelle. V. CONCLUSION. Cette évaluation des pratiques et des besoins, qui ne concerne que le Service de santé d’unité, a besoin d’être complétée par d’autres enquêtes, en particulier des études sur les connaissances, les attitudes, les perceptions et les pratiques dans le domaine de l’éducation pour la santé auprès des militaires des Forces et du Commandement. Ces enquêtes pourraient permettre d’adapter au mieux les pratiques d’éducation pour la santé destinée aux militaires et d’obtenir leur coopération et leur participation active à la promotion de leur santé (10). Pour améliorer la pratique de l’éducation pour la santé au niveau du Service de santé des armées, deux actions paraissent pouvoir être d’ores et déjà proposées : i) la réalisation de formations spécif iques à l’éducation sanitaire et à la communication en santé destinées aux médecins et aux infirmiers afin de mettre à disposition des armées des éducateurs plus efficaces capables de former à leur tour des auxiliaires éducateurs servant de relais au sein des Forces et ii) la création d’un service technique d’éducation pour la santé ayant notamment pour tâches de coordonner l’élaboration des supports éducatifs sur les thèmes jugés prioritaires, de participer à la réalisation d’études sociales et comportementales au sein des forces armées pour identifier les facteurs influençant la prise de risque ou l’attitude de protection afin d’adapter les messages éducatifs et de développer des outils et des méthodes d’évaluation de l’éducation sanitaire. L’évaluation de l’impact, de l’efficacité et du rendement de l’éducation pour la santé est importante à développer si l’on veut avoir l’assurance d’améliorer la santé (11). Elles figurent dans les propositions faites depuis 2001 dans le plan national d’éducation pour la santé et le principe d’évaluation est inscrit dans la loi de santé publique de 2004 (12, 13). Enfin, pour espérer développer et améliorer l’éducation pour la santé dans les armées, il faut également envisager, dans l’avenir, d’élaborer et de mettre en œuvre un véritable programme d’éducation pour les armées s’appuyant sur un plan d’action et d’organiser les structures de coordination et d’exécution au sein du Service de santé et des Forces. Des efforts de plaidoyer auprès des États-Majors pourraient favoriser les prises de décision nécessaires. Remerciements : à l’ensemble des médecins et des infirmiers ayant participé à cette enquête et au Département d’épidémiologie et de santé publique de l’École du Val-de-Grâce pour l’aide apportée dans la diffusion des messages d’information et de relances de cette enquête. Les personnels intéressés peuvent obtenir le rapport de cette enquête auprès du département d’épidémiologie et de santé publique . RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Organisation mondiale de la santé. 1re Conférence internationale pour la promotion de la santé (Ottawa, 1986). 2. Tondeur L. L’éducation pour la santé, une efficacité sous conditions. Actualité et dossier en santé publique 1996 ; 16 : 22-6. 3. Craig SC. The evolution of public health education in the US army, 1893-1966. US Army Medical Department Journal AprilJune 2006 : 7-17. 4. Proust M, Darmandieu M. La campagne « Publi-Santé » dans les formations d’une région militaire. Médecine et Armées 1989 ; 17 (1) : 69-71. 5. Milleliri JM, Dancourt C, Rey JL. 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Actualité et dossier en santé publique 1996 ; 16 : 1-2. 11. Godart C, Chevalier A, Hazard B, Siret B, Busi A, Michelin B et al. Éducation pour la santé en entreprise ? Un service médical à l’épreuve du terrain. Santé publique 2002 ; 14 : 301-9. 12. Ministère de l’Emploi et de la Solidarité. Plan national d’éducation pour la santé. Janvier 2001. 13. Loi N° 806-2004 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. r. migliani Pratique médico-militaire LES ODONTOGRAMMES DANS LES ARMÉES. Un aspect particulier et un retour d’expérience J.-P. DELOBEL, B. GRIFFET, Ph. TATON RÉSUMÉ ABSTRACT THE ODONTOGRAM AND THE MEDICAL FRENCH FORCES SERVICE. L’odontogramme est un document important obligatoire et réglementaire du dossier médical du militaire. Il décrit l’état dentaire. Mis à jour au moins une fois par an, soit par écrit, soit par saisie informatique, sa présentation évolue. Le service médical du 1er RPIMa a mis au point un odontogramme simplifié qui a fait preuve de son efficacité. Dans un futur proche, l’odontogramme d’Interpol remplacera les systèmes existants. Mots-clés : Interpol. Odontogramme. Livret médical réduit. The odontogram is an important document in the military health record that describes the person’s dental health. Updated at least once a year, either in writing or electronically, its presentation evolves. The Medical Service of the 1er RPIMa has put together a simplified odontogram that has proven to be an efficient tool. The Interpol Odontogram will soon replace the current system. Keyword: Condensed medical record. Interpol. Odontogram. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 61-64) I. INTRODUCTION. L’odontogramme est un document médical important qui rentre dans la constitution du dossier médical du militaire. Cette pièce obligatoire, réglementaire de surcroît (NE 455/DEF/DCSSA/AST/TES/1 du 19 février 1996), l’accompagne depuis l’incorporation, jusqu’au retour à la vie civile, puis est archivée. S’il permet notamment de suivre les différentes étapes de l’histoire dentaire de chacun, l’odontogramme reste également une pièce essentielle du Livret médical réduit (LMR) qui suit le militaire en opération extérieure (OPEX). II. JUSQU’À PRÉSENT. L’odontogramme « classique », avec un schéma dentaire pré-imprimé, connu de ceux qui fréquentent les milieux médicaux militaires, est l’outil utile et le plus largement utilisé dans les différentes formations des armées. Facile d’emploi, avec deux examens par page, lisible par des personnels moins spécialisés, il rend toujours de grands services. Il est rempli le plus souvent par nos camarades du secteur civil mais également du secteur militaire. J.-P. DELOBEL, chirurgien-dentiste principal (r). B. GRIFFET, chirurgien- dentiste (r). Ph. TATON, médecin principal. Correspondance : J.-P. DELOBEL, cabinet médical d’unité du 1er RPIMa, citadelle Général Berge, BP 12, 64109 Bayonne Cedex. médecine et armées, 2008, 36, 1 Cette feuille odontologique est renseignée au moins une fois par an, lors de la visite médicale systématique destinée à l’aptitude. Cet odontogramme reste cependant encore approximatif et insuff isamment renseigné par les praticiens du secteur civil, en effet, les conventions schématiques standardisées ne sont pas toujours utilisées et rendent donc difficile l’interprétation pour le médecin d’unité. Un examen supplémentaire est normalement effectué avant le départ en mission OPEX ou en mission de courte durée pour prendre en compte les modif ications intervenues après des soins conservateurs ou prothétiques. Un exemple : – ce patient a donc été examiné deux fois : - la visite systématique annuelle (VSA) a révélé, dans ce cas la nécessité de soins conservateurs et prothétiques (fig. 1), - lors de l’examen de contrôle, l’odontogramme est donc modifié (fig. 2). III. CAS PARTICULIER DE L'ODONTOGRAMME SIMPLIFIÉ. Le militaire part donc en mission à l’étranger avec son LMR qui contient les données principales : nom, âge, matricule, dates des différentes vaccinations, groupage 61 Figure 1. Odontogramme de la feuille odontologique lors de la visite systématique annuelle (VSA). sanguin, odontogramme simplifié (dans le cas que nous évoquons), dont les services médicaux ont besoin. Compte tenu de la nature de certaines missions qui sont confiées aux unités des Forces spéciales et notamment celles du 1er Régiment de parachutistes d’infanterie de Marine (1er RPIMa), un odontogramme informatique a été mis en place en coopération avec les médecins de l’unité. Cet outil été développé au sein d’un dossier patient informatique inédit dans les formations militaires et en place uniquement au sein du 1er RPIMa. L’histoire récente a malheureusement mis en lumière la nécessité pour le médecin en opération de disposer d’un odontogramme le plus complet possible, notamment en vue d’une éventuelle identif ication post-mortem formelle. Cet odontogramme informatique est renseigné en même temps que la visite dentaire annuelle et comporte un certain nombre d’abréviations, reportées sur le livret médical réduit, aidant ainsi le médecin à reconnaître une « bouche ». L’introduction d’une case, remarque en dessous de l’odontogramme du LMR, permet sur une « bouche » commune, sans soin antérieur, de noter cependant certains signes particuliers qui pourront eux aussi aider le médecin en cas de problème. Un dossier dentaire complet, comprenant notamment le panoramique dentaire et la feuille odontologique, est conservé dans le dossier médical du personnel qui reste au Cabinet médical de l’unité (CMU) et qui peut être consulté à tout moment en cas de problème ou d’incertitude. Figure 2. Odontogramme du même patient mis à jour après les soins effectués. 62 Par conséquent, si pour les besoins d’une identification médico-légale, l’odontogramme simplifié n’est pas suffisant, le document complet (actuellement la feuille odontologique) resté au cabinet médical d’unité est immédiatement communiqué au spécialiste médical qui se trouve sur place et servira ainsi à la levée de doute. Cette procédure a démontré toute son eff icacité lors d’évènements récents survenus sur un théâtre d’opération extérieure. Les données de l’odontogramme ainsi recueillies et synthétisées sur le LMR ont permis au médecin de l’unité, présent sur le théâtre d'opérations de réaliser une identification comparative, en apportant la certitude du décès de deux militaires. Cette identification dentaire a été rendue indispensable devant un état de décomposition des corps examinés à J4 de leur décès et en l’absence de tout autre moyen médico-légal et ce dans des conditions d’exercices précaires. Ce rapport d’examen post-mortem a été nécessaire pour permettre le rapatriement de leurs corps en métropole dans des délais rapides, et les confier sereinement aux familles, tout en fournissant aux autorités judiciaires un examen médico-légal reconnu (fig. 3). A) ÉVOLUTION DANS UN PROCHE AVENIR. Le système de l’odontogramme dentaire informatisé est appelé à évoluer. Le Service de santé des armées (SSA) a choisi d’utiliser l’odontogramme d’Interpol dans le futur Système informatique des services médicaux d’unité (SISMU), dont la mise en place présente des diff icultés de réalisation. Avec le développement des conflits régionaux, les forces militaires sont engagées au sein de coalitions ou sous mandat d’organisations internationales : UE, OTAN, ONU. Par conséquent, les documents médicaux et Figure 3. Schéma, de l’odontogramme simplifié dans le Livret médical réduit (LMR). L’espace réservé ci-dessus sert, en outre, à mentionner les particularités anatomiques en cas de denture sans CAO (carie, dent absente, obturation). j.-p. delobel l’odontogramme en particulier, doivent pouvoir être lus sans difficulté par un personnel médical de toute nation. L’odontogramme Interpol, qui doit être rempli en langue anglaise, répond à ces critères. Des outils informatiques, déjà existants, adaptés à ce système, tels que des moteurs de recherche, permettent d’exploiter les données collectées et d’accélérer l’identification surtout dans les cas de catastrophes de grande ampleur ayant entraîné un grand nombre de victimes. Le logiciel Disaster victim identification (DVI) système international créé par la société danoise Plass Data Software permet d’intégrer et donc de numériser les fiches ante-mortem des présumés disparus (formulaire Interpol AM jaunes) et post-mortem des victimes retrouvées (formulaires Interpol PM roses) en y incorporant les éléments numériques existants (comme les radios et les photos). Les odontogrammes sont complétés grâce à un système de code, où chaque dent est décrite par des termes provenant d’un lexique pré-établi. Il permet ensuite de réaliser une comparaison (un « match ») de ces odontogrammes et ainsi de sélectionner les schémas dentaires les plus proches. C’est un logiciel assez fastidieux puisqu’il faut du temps pour réaliser la saisie de tous les odontogrammes : il est donc recommandé dans les catastrophes d’assez grande envergure (il n’est pas vraiment nécessaire pour seulement quelques identifications) (fig. 4). renouvellement du panoramique n’intervient que tous les cinq ans, ce qui peut le rendre obsolète en cas de modifications importantes de l’état dentaire. 2. L’aide à l’identification. L’aide à l’identif ication, dont le principe consiste à confronter des données collectées ante-mortem, par le médecin ou le chirurgien-dentiste lors des visites systématiques ou précédant les départs OPEX ou MCD et celles observées post-mortem. La saisie manuelle de la feuille odontologique fait appel à des représentations symboliques en théorie standardisées, des différentes obturations dentaires, prothèses, migrations, absences, rotations etc. On note que parfois le renseignement de l’odontogramme est plutôt sommaire et il faut rappeler l’importance du soin à apporter lors de l’établissement de ce document. Si la confrontation des données aboutit à une incompatibilité voire à une impossibilité, on a alors recours à l’anthropométrie, la biométrie, les empreintes digitales, les caractéristiques morphologiques (tatouages cicatrices), l’analyse ADN qui peut aussi s’étudier grâce à la pulpe dentaire de dents saines extraites à cette fin. B) L’ODONTOGRAMME A AUSSI SES LIMITES. 1. Renseigné par un professionnel. Il faut qu’il soit renseigné par un professionnel. Son enregistrement doit par conséquent être effectué par un personnel habitué à l’examen clinique, car il est parfois difficile de détecter des restaurations esthétiques qui, comme leur nom l’indique, doivent remplir les conditions d’un mimétisme parfait et sont donc pratiquement invisibles. Cela reste un examen particulièrement chronophage pour lequel chaque professionnel doit être sensibilisé. Figure 4. Exemple d’interface (plass data system). IV. DISCUSSION. A) L’ODONTOGRAMME POSSÈDE DEUX FONCTIONS PRINCIPALES. 1. Le suivi de la santé dentaire du militaire. C’est la transcription d’un examen clinique, mis à jour au moins une fois par an. D’importantes précisions sont apportées par l’orthopantomogramme qui permet d’observer les couronnes et racines dentaires, le parodonte, les structures osseuses maxillaire et mandibulaire, les sinus maxillaires, l’articulation temporo-mandibulaire et donc de diagnostiquer des lésions échappant à l’examen clinique . Cependant, le les odontogrammes dans les armées 2. Caractéristiques d’individualités. Compte tenu de l’amélioration de l’hygiène buccodentaire, de l’alimentation, de la prévention, des traitements d’orthodontie, de plus en plus de dentures se révèlent parfaites et presque semblables, il faut donc observer avec attention toute caractéristique qui pourrait les individualiser et en faire mention ce qui peut également être source d’erreurs. C) L’INTÉRÊT DE L’ODONTOGRAMME SIMPLIFIÉ. Le livret médical réduit édité par « GETSAN » ne comporte pas d’indication suff isante pour pouvoir procéder à l’identification. L’originalité de la démarche réalisée au sein du service médical du 1er RPIMa consiste à recueillir un maximum de données dentaires ante-mortem et de les transcrire sur le livret médical réduit qui accompagne chaque militaire en opération. 63 Les données figurant sur l’odontogramme simplifié sont standardisées. Elles en facilitent la lecture . Ce document accompagne le militaire sur le théâtre d’opérations, c’est pourquoi les praticiens du CMU du 1 er RPIMa ont conçu l’odontogramme simplif ié qui permet d’identifier les victimes, à condition que leur nombre soit réduit. Les résultats préliminaires, établis par le médecin présent sur la zone de combat qui procède à la confrontation des données, grâce à ce document simple, didactique, d’interprétation aisée peuvent être communiqués très rapidement aux autorités. En cas de doute, le schéma complet peut être communiqué par le CMU, au médecin présent sur le théâtre d’opérations. Il est bien évident que cet odontogramme simplifié, adapté à certaines situations bien particulières, ne prétend pas remplacer son homologue plus complet qui contient par ailleurs un examen radiologique avec le panoramique dentaire. V. CONCLUSION. La nécessité d’un document d’identification odontologique standardisé et actualisé s'impose. À l’évidence, les Forces armées, dont les unités opérationnelles des Forces spéciales, engagées dans des interventions dangereuses, sont concernées par l’utilisation de cet outil informatique. Le Service de santé est un des principaux acteurs de l’évolution de ce concept. Le secteur civil ne doit pas être en reste puisque, les catastrophes naturelles, le risque terroriste, certaines activités de loisir, font que tout un chacun peut être malheureusement une victime devant être identifiée. Sans identif ication formelle, aucun processus administratif ne peut être engagé, pouvant poser de réels problèmes, en cas d’héritage, de succession, en cas de dissolution du mariage, en cas d’indemnisation par les assurances. De même que, la réalisation du travail de deuil par la famille ou les proches peut être considérablement entravée par l’absence d’identification puisqu’on parle alors de « porté manquant et de porté disparu ». Dans le secteur civil, le praticien de l’art dentaire n’a pas l’obligation légale de réaliser l’odontogramme de son patient. On peut déplorer que les concepteurs des logiciels de gestion des cabinets dentaires civils n’aient pas standardisé leurs odontogrammes. Cet élément si important pour l’identification figurera-t-il peut être un jour dans les données de la « puce » de la carte vitale, sous forme éventuellement d’un odontogramme numérique voire alphanumérique (comme celui développé par Pierre Fronty). La prochaine étape est peut être une visualisation numérique du système bucco-dentaire directement exploitable par les moteurs de recherche, sous un standard unique. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Gunepin M, Derache F. Étude du potentiel discriminant des formules dentaires dans le cadre de l'identification de victimes militaires. Médecine et Armées, 2007, 35 (1) : 35-44. 2. Dussourt E. Identification bucco dentaire et guerre de 14-18. Actes. 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L’odontologie judiciaire : les rôles et les responsabilités du dentiste. Sylvie Louise Avon, Journal de l’Association dentaire canadienne Juillet/août 2004, Vol. 70, N° 7. j.-p. delobel Mise au point FACTEURS PRÉDICTIFS DE L’EFFICACITÉ DE L’OXYGÉNOTHÉRAPIE HYPERBARE DANS LE TRAITEMENT DES SURDITÉS BRUSQUES IDIOPATHIQUES Étude prospective portant sur 101 patients H. LEYRAL, C. LEYRAL, R. DAUMAN, G. GBIKPI-BENISSAN RÉSUMÉ Les surdités brusques constituent une urgence thérapeutique dont le traitement n’est pas parfaitement codifié. Parmi les choix thérapeutiques, l’oxygénothérapie hyperbare est retenue par certaines équipes. Nous présentons une étude originale prospective portant sur 101 patients et visant à déterminer les facteurs prédictifs du succès de l’oxygénothérapie hyperbare dans le traitement des surdités brusques. Les patients inclus étaient en échec de traitement médical. Ils ont bénéficié d’au moins dix séances d’oxygénothérapie hyperbare. Parmi les patients, 48,5 % n’ont pas eu de bénéfice réel au traitement et 51,5 % en ont retiré un bénéfice. Le délai tardif de prise en charge, l’importance de la perte audiométrique initiale, les pertes auditives prédominant sur les fréquences aiguës et la présence d’un contexte infectieux ont été associés à un pronostic défavorable. L’oxygénothérapie hyperbare semble donner de bons résultats, à condition d’être utilisée précocement, c'est-à-dire en première intention. Mots-clés : Facteurs pronostiques. Oxygénothérapie hyperbare. Surdité brusque. Traitement. ABSTRACT PREDICTABLE SUCCESS FACTORS OF HYPERBARIC OXYGEN THERAPY IN THE TREATMENT OF SUDDEN HEARING LOSS: A PROSPECTIVE STUDY BASED ON 101 PATIENTS. Sudden hearing loss is considered as a medical emergency. The treatment is not perfectly codified. Among the therapeutic options, some teams use hyperbaric oxygen therapy. We report an uncommon prospective study of 101 patients which intends to determine predictable success factors in the treatment of sudden hearing loss with hyperbaric oxygen therapy. The included patients were not improved with a prior medical treatment. They have been treated by at least 10 hyperbaric oxygen sessions. 48,5 % of patients had no reponse and 51,5 % had an improvement. Unfavourable prognostic factors found were delayed treatment, severity of initial hearing loss, predominant highfrequency hearing loss, and infectious syndrome associated. Hyperbaric oxygen therapy seems to give good results, if it is used early, as the first step in sudden hearing loss treatment. Keywords: Hyperbaric oxygen therapy. Prognostic factors. Sudden hearing loss. Treatment. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 65-72) I. INTRODUCTION. La surdité brusque est la survenue ou l'aggravation d'une surdité d'oreille interne, d'apparition soudaine, sans cause ou mécanisme pathogénique évidents. Le clinicien confronté à cette situation est relativement démuni. En effet, à l’exception de la corticothérapie (générale ou intratympanique) qui a montré un intérêt, aucun autre traitement n’a fait la preuve d’une efficacité dans des études cliniques correctement menées (1-3). H. LEYRAL, médecin principal, docteur en médecine. C. LEYRAL, docteur en médecine. R. DAUMAN, professeur des universités, praticien hospitalier. G. GBIKPI-BENISSAN, professeur des universités, praticien hospitalier. Correspondance : H. LEYRAL, service médical 50/120, Base aérienne 120, 33 164 CAZAUX AIR. médecine et armées, 2008, 36, 1 Mais malheureusement, les surdités brusques peuvent laisser des séquelles lourdes à l’origine d’un handicap individuel et social important, d’autant plus si elles surviennent sur une « oreille unique ». C’est dans l’optique de limiter au maximum les répercussions fonctionnelles de cette pathologie que la recherche de traitements apportant un réel bénéfice s’impose. En 1970, Appaix (4) suggère l’utilité de l’Oxygénothérapie hyperbare (OHB) dans le traitement des surdités brusques. Depuis cette époque, de nombreuses équipes, dont l’équipe bordelaise, ont utilisé ce traitement. Toutefois, cette option thérapeutique reste discutée (elle n’est pas retenue dans les pays 65 anglo-saxons) et les études s’y rapportant sont relativement peu nombreuses et parfois contradictoires. Les objectifs de ce travail sont d’évaluer l’efficacité de l’OHB dans le traitement des surdités brusques et de définir les facteurs prédictifs de succès d’un tel traitement. II. MATÉRIEL ET MÉTHODE. L’étude prospective a porté sur 101 patients atteints d’une surdité brusque unilatérale ou bilatérale et traités par OHB dans l’unité de médecine hyperbare du Centre hospitalier universitaire de Bordeaux, qui comporte deux caissons. A) CRITÈRES D’INCLUSION ET D’EXCLUSION. Les malades inclus dans cette étude étaient soit en situation d’échec thérapeutique (après des traitements habituellement recommandés, à savoir la corticothérapie, l’hémodilution ou les traitements à visée rhéologique), soit traités par OHB en première intention. Les patients présentant des contre-indications au traitement par OHB (telles que les pathologies coronariennes non stabilisées, l’hypertension artérielle non contrôlée, l’emphysème pulmonaire et les broncho-pneumopathies chroniques obstructives, les troubles de perméabilité tubaire…) ont été exclus. Les patients porteurs d’une surdité mixte ou une surdité fluctuante ont été également exclus. Enf in seuls les patients ayant bénéf icié d’au moins dix séances d’OHB ont été retenus. B) RECUEIL ET ANALYSE DES DONNÉES. Une f iche de recueil des données était remplie par les inf irmiers du service, lors de l’inclusion et du traitement des patients. Elle regroupait des données médicales concernant le patient et ses antécédents, sa surdité et ses signes d’accompagnement, le traitement reçu antérieurement et durant les séances, le protocole thérapeutique utilisé. Les résultats du traitement et les complications survenues au cours de celui-ci étaient également analysés. Une audiométrie tonale était effectuée à la première et à la dixième séance. L’efficacité thérapeutique était appréciée en comparant les seuils audiométriques avant et après le traitement par OHB. La perte était calculée par rapport à une audition idéale (seuil à 0 dB) à partir de la moyenne des seuils sur les fréquences des 500, 1 000, 2 000, 4 000 Hertz. Le gain audiométrique était le pourcentage de récupération sur ces quatre fréquences ((récupération en dB/perte avant les séances) x 100). C) PROTOCOLE THÉRAPEUTIQUE. 1. Déroulement des séances (fig. 1). Les séances se sont déroulées dans un des deux caissons hyperbares du service de médecine hyperbare. 66 Figure 1. Protocole thérapeutique d’OHB employé pour le traitement des surdités brusques. L’inhalation de l’oxygène s’effectuait au moyen d’un masque. Le patient était systématiquement perfusé. La séance durait 120 minutes et se déroulait en trois phases: – la montée en pression en quinze minutes, faisait passer la pression ambiante de 1 à 2,2 atmosphères (ATA). Le patient respirait de l’air ; – la période de plateau thérapeutique fixée à 2,2 ATA durait 90 minutes. Le patient respirait l’oxygène pur au moyen de son masque et les gaz expirés étaient éliminés hors du caisson par un système de déverseur ; – le retour à la pression ambiante commençait dès la fin de la période thérapeutique. Elle durait environ quinze minutes. Le patient respirait de l’air. À l’issue de la séance, le patient regagnait sa chambre s’il était hospitalisé, ou son domicile s’il venait en externe. Le nombre de séances habituellement réalisé était de 10, et pouvait être porté à 15 si l’on espérait un gain audiométrique supplémentaire. Le rythme des séances était en règle générale d’une séance par jour, parfois de deux, en fonction de la tolérance et de la disponibilité du patient. 2. Traitement médicamenteux reçu pendant les séances. Les patients hospitalisés recevaient durant la séance 3 mg de piribédil et 1 mg/kg de méthylprednisolone (en fonction de la prescription du spécialiste ORL traitant, certains patients recevaient en plus de ce traitement 100 mg de lidocaïne). Les patients externes recevaient durant la séance une perfusion de 100 mg de pentoxifylline. D) ANALYSE STATISTIQUE. Une f iche de recueil des données était remplie par les inf irmiers du service puis les données ont été introduites et traitées dans la base de données du logiciel EPIINFO 2000. III. RÉSULTATS. A) ANALYSE DE LA POPULATION. L’étude a porté sur 101 patients. L’âge moyen était de 49,7 +/- 13,2 ans, avec des extrêmes allant de 19 à 78 ans. Le sex ratio était de 1,2 (55 hommes et 46 femmes). h. leyral B) ÉTUDE DES SEUILS AUDITIFS. Le seuil auditif moyen au moment de la prise en charge était de 51,6 dB +/- 27,2 dB. C) COMPLICATIONS DU TRAITEMENT HYPERBARE. Trois patients ont présenté des complications attribuables au traitement par OHB (soit seulement 2,97 % de la population). Il s’agissait : – d’un malaise de type vagal survenu après la séance ; – d’une poussée hypertensive durant la séance ; – d’un barotraumatisme de l’oreille moyenne. Tableau II. Facteurs prédictifs du succès du traitement OHB. Facteur prédictif étudié D) RÉSULTATS DU TRAITEMENT. Selon l’évolution des seuils audiométriques entre la première et la 10e séance, les malades ont été classés en quatre groupes : échec ou aggravation (gain ≤ 0 %), résultats négligeable (0 % < gain ≤ 25 %), résultat moyen (25 % < gain ≤ 50 %), résultat bon ou récupération totale (gain > 50 %) (tab. I). Globalement, le gain audiométrique était de 30,66 % +/- 31,94 %. Au total, 48,5 % des patients n’ont pas eu de bénéfice réel au traitement (échec, résultat négligeable, voire aggravation) et 51,5 % des patients en ont retiré un bénéfice (amélioration ou guérison). Pour 61 patients (soit 70,9 %) sur les 85 patients présentant des acouphènes, 36 patients (41,8 %) ont ressenti une amélioration ou une disparition pour 25 patients (29,1 %) de leurs acouphènes au cours du traitement. Tableau I. Évolution des seuils audiométriques après la dixième séance. Nombre de patients % des patients Échec ou aggravation (gain ≤ 0 %) 23 22,8 Négligeable (0 % < gain ≤ 25 %) 26 25,7 moyen (25 % < gain ≤ 50 %) 21 20,8 Bon ou récupération totale (gain > 50 %) 31 30,7 Total 101 100 Résultats – récupération minime ou échec lorsque le gain était inférieur ou égal à 25 % ; – récupération modérée (gain entre 25 % et 50 %), importante (gain supérieur à 50 %) ou guérison complète (retour au niveau antérieur s’il était connu ou audition normale). Les facteurs prédictifs retrouvés étaient les suivants : l’importance de la perte initiale, le profil de la courbe audiométrique, le délai de prise en charge, la présence d’un contexte infectieux. Ils sont résumés dans le tableau II. E) FACTEURS PRÉDICTIFS DE L’EFFICACITÉ DU TRAITEMENT. Af in d’étudier les facteurs prédictifs de l’eff icacité du traitement par OHB, nous avons séparé deux groupes de patients en fonction de l’évolution de leurs seuils audiométriques : Importance de la perte initiale : ≤ 60 dB > 60 dB Récupération Gain ≤ 25 % Gain > 25 % 60 % (n=36) 40 % (n=23) 61,9 % (n=26) 38,1 % (n=16) Profil de la courbe audiométrique : Courbe « ascendante » 29 % (n=7) 70,8 % (n=17) Courbe « descendante » 64,7 % (n=22) 33,3 % (n= 13) Délai de prise en charge ≤ 7 jours > 7 jours Présence d’un contexte infectieux Oui Non 34 % (n=16) 61,1 % (n=33) 66 % (n=31) 38,9 (n=21) 72,2 % (n=13) 27,8 % (n=5) 45,6 % (n=13) 54,4 % (n=43) Différence statistique p=0,02 p=0,02 p=0,007 p=0,04 Si les typologies de courbes audiométriques « descendantes » et « ascendantes » étaient des facteurs de mauvais pronostic (pour les premières) ou de bon pronostic (pour les secondes), aucune différence significative de récupération n’a été retrouvée pour les autres prof ils de courbe (cophose, courbe en « dos d’âne », plate, ou en « cupule »). Par ailleurs, aucun des autres paramètres étudiés n’était signif icativement corrélé à la récupération (la présence de vertiges, l’âge des patients, le sexe, le coté atteint, la présence de facteurs de risques cardiovasculaires, d’antécédents cardiovasculaires…). En outre, nous n’avons pas noté non plus de différence signif icative de gain entre les groupes de patients ayant bénéf icié d’une hémodilution et ceux n’en ayant pas bénéf icié, ni entre les différentes options thérapeutiques à savoir corticothérapie, et/ou traitement à visée rhéologique (tab. III). IV. DISCUSSION. Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer la physiopathologie des surdités brusques. Les principales facteurs prédictifs de l’efficacité de l’oxyogénothérapie hyperbare dans letraitement des surdites brusques idiopathiques : étude prospective portant sur 101 patients 67 Tableau III. Facteurs étudiés non prédictifs du succès du traitement par OHB. Gain Facteur étudié Facteurs de risques cardiovasculaires > 25 % Âge (ans) : < 41 41-60 61-80 36 % 51 % 55,6 % 64 % 49 % 44,4 % Sexe : Homme Femme 54,5 % 41,3 % 45,5 % 58,7 % p=0,18 Présence d’acouphène : Oui Non 48,2 % 50 % 51,8 % 50 % p=0,83 Présence de vertiges : Oui Non 50 % 48,7 % 50 % 51,3 % p=0,92 Tabagisme : Oui Non 55,6 % 46,6 % 44,4 % 53,4 % p=0,39 Hypercholestérolémie : Oui Non 50 % 46,9 % 50 % 53,1 % p=0,82 Hypertention Artérielle : Oui Non 52,6 % 47,5 % 47,4 % 52,5 % p=0,43 p=0,30 Non interprétable (1 seul patient diabétique) Diabète : Présence d’antécédents cardio-vasculaires : Oui Non 66,7 % 46,7 % 33,3 % 53,3 % Oreille atteinte : Gauche Droite Bilatérale 50 % 43,6 % 100 % 50 % 56,4 % 0% Hémodilution : Oui Non 44,3 % 55,6 % 55,7 % 44,4 % p=0,28 Traitements à visée fhéologiques avant les séances : Oui Non 50,7 % 41,7 % 49,3 % 58,3 % p=0,44 Corticothérapie avant les scéances : Oui Non 53,7 % 50 % 46,6 % 50 % p=0,91 Traitements à visée rhéologiques pendant les séances : Oui Non 47,2 % 49,1 % 52,8 % 50,9 % p=0,86 Corticothéapie pendant les séances : Oui Non 50 % 46,2 % 50 % 53,8 % p=0,71 Traitement reçu origines suspectées sont virales, ischémiques, ou dysimmunitaires. Pour certains, la rupture de membranes cochléaires est une étiologie plausible. La plupart des nombreux traitements évalués (médications vasodilatatrices, blocage du ganglion stellaire, hémodilution normovolémique intentionnelle, antiagrégants plaquettaires, fibrinolytiques, inhibiteurs calciques…) n’ont pas fait la preuve de leur efficacité dans des études correctement menées. La corticothérapie semble être la seule option thérapeutique apportant un bénéfice (celui-ci restant modéré) dans le traitement des surdités brusques comme en témoignent les études de Wilson et al. en 1980 (5) et de Moskowitz et al. en 68 Différence statistique ≤ 25 % p=0,52 p=0,52 1984 (2). Cependant ces données ne sont pas retrouvées dans toutes les séries (6). À coté de la corticothérapie générale, l’injection intratympanique de dexaméthasone, technique récemment développée, semble donner de très bons résultats dans de nombreuses études (7-10), et comme le suggèrent Doyle et al. (3) dans leur revue, pourrait être recommandée en cas d’échec ou de contre-indication de la corticothérapie générale. Parmi les traitements proposés, l’OHB est employée depuis plus de 30 ans en particulier depuis la série d’Appaix et Demart (4). Cependant son efficacité est discutée et elle n’est utilisée que dans les pays européens et asiatiques. h. leyral A) ARGUMENTS EN FAVEUR DE L’EFFICACITÉ DE L’OHB DANS LES SURDITÉS BRUSQUES. Fisch (11) constate une diminution importante de la pression partielle en oxygène (PpO2) périlymphatique chez les patients ayant une surdité et attribue cette baisse de PpO2 périlymphatique à des lésions du lit capillaire cochléaire (d’origine virale ou thrombotique). De nombreux travaux (12) ont étudié l’effet des traumatismes acoustiques chez diverses espèces animales. Ces études montrent, toutes, une baisse des PpO2 périlymphatiques et une baisse du débit sanguin cochléaire. Les études de Lamm, Frühwald et al. en 1976 et de Hu et al. en 1989 (12), réalisées sur des oreilles internes saines de cobayes montrent une augmentation considérable de la PpO2 périlymphatique (+ 460 % des valeurs initiales), accompagnée d’une baisse des débits sanguins cochléaires et d’une augmentation des potentiels évoqués auditifs lors d’une séance l’OHB à 2,6 ATA Les mêmes résultats sont retrouvés sur des oreilles internes de cobayes ayant subi un traumatisme sonore aigu. Les auteurs constatent par ailleurs que l’élévation de la PpO 2 périlymphatique lors des séances d’OHB persiste plus d’une heure après l’arrêt de la séance et que l’oxygénothérapie normobare est insuffisante pour restaurer durablement la PpO2 périlymphatique. L’oxygène est délivré aux cellules sensorielles et nerveuses de l’oreille interne par un réseau capillaire cochléaire terminal et la distance de diffusion est extrêmement importante en comparaison d’autres tissus. À cet égard, la PpO2 péri et endolymphatique augmente seulement si l’augmentation de la PO 2 artérielle est très importante. Cette condition ne peut être réalisée que par l’OHB. L’hypoxie cochléaire est responsable d’un déf icit énergétique en ATP et donc d’une baisse de l’activité des pompes Na + /K + ATP dépendantes. Il en résulte un déséquilibre ionique dans les compartiments liquidiens de l’oreille interne et des modif ications structurelles pouvant expliquer la diminution des potentiels d’action auditifs (13). Le traitement par OHB permettrait un apport d’oxygène aux pompes Na + /K + et par ce biais, la restauration de l’équilibre ionique et des fonctions électrophysiologiques de l’oreille interne. Les études animales conf irment l’amélioration des potentiels d’action mesurés au niveau du VIII e nerf crânien (12), des potentiels évoqués auditifs (14) et des potentiels microphoniques cochléaires (12,13) attendus de cette normalisation des conditions d’oxygénation de l’oreille interne. Les études cliniques évaluant l’efficacité du traitement hyperbare dans les surdités brusques sont encore à ce jour trop peu nombreuses et souvent trop restreintes pour établir une conclusion formelle. De plus, la plupart incluent des patients en situation d’échec aux thérapeutiques habituelles et qui ont donc une probabilité de récupération beaucoup plus faible. Enfin, peu d’études sont contrôlées, ce qui rend difficile l’interprétation des résultats ; nous ne pouvons alors que nous contenter de comparer les gains à ceux décrits par Mattox et Simmons (15) concernant la récupération spontanée sans traitement. Néanmoins récemment, dans trois études comparées et de méthodologie satisfaisante (Fattori et al. en 2001 (16), Aslan et al. en 2002 (17), Racic et al. en 2003 (18)), l’OHB a donné des résultats extrêmement favorables et largement supérieurs aux groupes contrôles (traitement vasodilatateur le plus souvent) lorsque celle-ci est employée en première intention : – Fottori et al. en 2001 (16) comparent dans une étude prospective randomisée deux groupes de patients atteints d’une surdité brusque et traités par dix séances d’OHB (30 patients) ou par Buflomédil (20 patients). Les patients du groupe OHB sont 83,3 % à avoir une amélioration de leurs seuils auditifs supérieure à 25 %, contre 55 % des patients du groupe Buflomédil. Par ailleurs, le gain moyen dans le groupe OHB est de 61 % contre 24 % dans le groupe Buflomédil (p < 0,05) ; – Aslan et al. en 2002 (17) comparent deux groupes de patients. Dans le premier groupe de 25 patients, le traitement repose sur l’association Bétahistine, prednisone et blocage du ganglion stellaire, le deuxième groupe de 25 patients reçoit le même traitement avec en plus 20 séances d’OHB. Le gain est de 37,9 dB dans le groupe OHB contre seulement 20 dB dans le groupe n’ayant pas bénéficié de séances d’OHB (p = 0,006) ; – enf in, Racic et al. en 2003 (18) constatent dans une étude rétrospective que les patients bénéf iciant d’un traitement par OHB (51 patients) ont un gain moyen de 46,35 dB, contre seulement 21,48 dB pour les 64 patients du groupe traité par pentoxifylline (p < 0,01). Un gain de plus de 25 dB est constaté chez 88,3 % des patients traités par OHB, et chez 12,75 % des patients traités par pentoxifylline. Ces essais montrant une efficacité notable de l’OHB dans le traitement des surdités brusques idiopathiques doivent être toutefois confirmés par une étude multicentrique de plus grande envergure. Cependant, la recommandation de type 2 formulée par la première conférence de consensus européenne sur la médecine hyperbare nous semble tout à fait justifiée, l’OHB constituant « une part importante du traitement et (…) pouvant prévenir des désordres sérieux » (19). B) ÉVOLUTION DES SEUILS AUDITIFS. Dans notre série, nous avons constaté une récupération moyenne, bonne ou correcte (gain > 25 %) chez 51,5 % des patients. Pour 48,5 % des patients, un échec ou aucun bénéfice appréciable n’a été constaté. Ce résultat peut sembler peu convaincant, si on le compare aux données rapportées par Mattox et Simmons (15) qui décrivent une récupération spontanée (sans traitement) complète ou satisfaisante dans 65 % des cas. facteurs prédictifs de l’efficacité de l’oxyogénothérapie hyperbare dans letraitement des surdites brusques idiopathiques : étude prospective portant sur 101 patients 69 Cependant, plusieurs éléments expliquent cette différence : – dans notre étude, les patients admis sont presque tous soit en situation d’échec thérapeutique après plusieurs jours de traitements conventionnels, soit affectés d’une surdité très profonde (donc de plus mauvais pronostic) ; – nous avons évalué l’impact propre à l’OHB, les résultats audiométriques étant relevés entre le début des séances et la fin des séances. Ils ne tiennent pas compte de la récupération déjà obtenue avant le début de l’oxygénothérapie. En réalité, il convient plutôt de comparer les résultats avec ceux obtenus dans les études portant sur l’utilisation de l’OHB en deuxième intention. Lamm et al. (20) ont réalisé en 1998 une revue de la littérature et ont regroupé les données de 46 publications portant sur le traitement de désordres divers de l’oreille interne (surdité brusque et traumatisme sonore aigu) par OHB en deuxième intention. Les résultats montrent une récupération de plus de 20 dB dans 54 % des cas et une récupération de moins de 20 dB ou un échec dans 46 % des cas. Par ailleurs, les résultats de notre série sont superposables à ceux décrits dans la plupart des études publiées lorsque l’OHB est utilisé en seconde ligne. C) TOLÉRANCE ET COMPLICATIONS DU TRAITEMENT. La tolérance du traitement par OHB est bonne puisque seulement quatre interruptions des séances ont été notées (soit chez 3,96 % des patients et pour 0,40 % du nombre total de séances). Les raisons de ces interruptions relèvent plus de l’inconfort induit par le traitement que de réels effets indésirables. On constate seulement trois complications attribuables au traitement (2,97 %), à savoir : – un malaise de type vagal survenu après la séance ; – une poussée hypertensive durant la séance ; – un barotraumatisme de l’oreille moyenne. Aucune complication n’a eu de gravité et n’a laissé de séquelles. Cette analyse souligne la relative innocuité des séances d’OHB. Celle-ci est d’autant plus sûre que les contre-indications au traitement sont recherchées et que les patients concernés ont été exclus. D) ÉTUDE DES FACTEURS PRÉDICTIFS DE LA RÉCUPÉRATION. L’analyse d’un certain nombre de critères a permis de mettre en évidence quatre facteurs prédictifs de l’efficacité du traitement. Cependant il faut se poser la question de savoir si ces facteurs ne sont pas en grande partie prédictifs de la récupération spontanée. En effet, l’analyse de la littérature que nous détaillons dans ce paragraphe montre que tous les facteurs que nous avons retenus (à l’exception de la présence d’un contexte infectieux) sont les facteurs pronostiques de l’évolution naturelle. 70 1. Délai. Plus le délai de prise en charge est long, plus les chances de récupération sont faibles. Cette notion est classique et, hormis dans la série de Barthélémy (21), est retrouvée dans toutes les études pronostiques (1, 6, 22, 23). 2. Importance de la perte audiométrique. Le degré de la surdité est également retrouvé comme étant un facteur de mauvais pronostic. Cet indicateur pronostique est lui aussi très classique (1, 6, 22, 23). 3. Forme de la courbe audiométrique. Nous retrouvons dans notre série le constat fréquemment rapporté dans la littérature selon lequel les patients ayant une courbe audiométrique descendante (c’est-àdire avec une perte prédominant sur les fréquences aiguës) ont un pronostic auditif plus souvent défavorable et les patients ayant une courbe audiométrique ascendante (c’est-à-dire avec une perte prédominant sur les fréquences graves) un pronostic auditif meilleur. D’autres auteurs font le même constat (1, 6, 22). Cette notion est toutefois à relativiser dans la mesure où les fréquences aiguës sont celles de la presbyacousie et correspondent donc potentiellement à des pertes préexistantes à la surdité brusque. Par ailleurs, le taux de succès est plus faible chez les patients cophotiques (33,3 % des patients seulement ont un gain de plus de 25 %), mais la différence n’est pas signif icative en raison d’un nombre de cas trop faible (douze patients seulement ont une cophose). 4. Présence d’un contexte infectieux. La présence d’un contexte infectieux concomitant à la surdité est significativement corrélée à une probabilité de récupération plus faible. Cette donnée n’est pas habituellement citée dans la littérature et pourrait amener à penser que différents groupes étiopathogéniques de surdité brusque doivent être individualisés. 5. Évolution des acouphènes. La diminution de l’intensité des acouphènes est fortement corrélée à la récupération auditive. Zennaro et al. (24) arrivent aux mêmes conclusions. La présence d’acouphènes prédisposant pour certains auteurs (25) à une meilleure récupération n’a pas été significativement corrélée dans notre série à une bonne récupération. 6. Présence de vertiges. Les vertiges sont fréquemment cités comme étant un facteur de mauvais pronostic (21, 22, 25, 26). Notre série ne retrouve pas cet élément pronostique, à l’instar de certains auteurs (24). 7. Âge des patients. L’âge avancé présenté par certains comme un élément pronostique (1, 6, 21, 22), n’est pas retenu dans notre série comme étant un élément défavorable. h. leyral D’autres auteurs arrivent au même résultat (1, 2, 23, 24). Enf in, d’autres facteurs étudiés n’ont pas montré d’influence sur le pronostic : sexe, oreille atteinte, présence de facteurs de risque cardio-vasculaire, antécédents cardio-vasculaires… et nous n’avons pas noté non plus de différence significative de gain entre les groupes de patients ayant bénéficié d’une hémodilution et ceux n’en ayant pas bénéficié, ni entre les différentes options thérapeutiques (corticothérapie, traitement à visée rhéologique). V. CONCLUSION. L’efficacité clinique du traitement par OHB dans les surdités brusques a été évaluée dans de nombreuses études. Malheureusement, les résultats de celle-ci sont souvent aléatoires, se heurtant à la difficulté d’apprécier la part de récupération attribuable au traitement et celle liée à la récupération spontanée (celle-ci n’étant pas connue à ce jour avec précision), et à l’impossibilité de réaliser aisément des études comparatives en double aveugle. En outre, la fréquence relativement faible de cette affection limite la taille des séries étudiées. Notre étude rencontre les mêmes difficultés et donne des résultats de récupération globale comparables à ceux décrits par Lamm et al. en 1998 (20) dans leur revue de la littérature, lorsque l’OHB est utilisée en deuxième intention. Trois études cliniques récentes, contrôlées et correctement menées (16-18), indiquant l’OHB en première intention, ont donné cependant des résultats extrêmement probants puisque largement supérieurs aux groupes contrôles (traitement vasodilatateur le plus souvent). Ces conclusions doivent être conf irmées par une étude multicentrique de plus grande envergure. Parmi les facteurs prédictifs du succès de l’oxygénothérapie hyperbare, nous retrouvons les facteurs pronostiques habituellement décrits dans la littérature, à savoir : le délai de prise en charge, l’importance de la perte, le type de la courbe audiométrique initiale. Nous notons, par ailleurs, que la présence d’un contexte infectieux concomitant à la surdité est un facteur de mauvais pronostic audiométrique, ce qui pourrait amener à penser que l’origine infectieuse constitue une entité étiopathogénique à part entière. Enf in, nous constatons que l’évolution favorable des acouphènes est fortement corrélée à l’amélioration de la surdité, ce qui confirme les résultats de l’étude de Zennaro (24). L’analyse de ces facteurs prédictifs ne permet pas de déf inir de critères décisionnels pour indiquer ou réfuter le traitement par OHB. Il nous semble cependant que la prise en charge de ces patients doit permettre de les traiter le plus tôt possible, c'est-à-dire sans attendre l’échec de traitement médicamenteux conventionnels. Remerciements : à l’équipe infirmière du centre de médecine hyperbare pour leur aide apportée au recueil des données et à la prise en charge thérapeutique des patients. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Mosnier I, Bouccara D, Sterkers O. Les surdités brusques en 1997 : hypothèses étiopathogéniques, conduite à tenir, facteurs pronostiques, traitements. Ann Otolaryngol Chir Cervicofac 1997 ; 114 (7-8) : 251-66. 2. Moskowitz D, Lee KJ, Smith HW. Steroid use in idiopathic sudden sensorineural hearing loss. Laryngoscope 1984 ; 94 : 664-6. 3. Doyle KJ, Bauch C, Battista R, Beatty C, Hughes GB, Mason J et al. Intratympanic steroid treatment: a review. Otol Neurotol 2004 ; 25 (6) : 1 034-9. 4. Appaix A, Demard F. Oxygénothérapie hyperbare et surdité brusque. 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Axé sur une approche cherchant à favoriser le lecteur plutôt que le rédacteur, ce Guide pratique de rédaction scientifique apprend comment communiquer son plaisir et faire plaisir au lecteur, comment le garder attentif, réduire son temps de lecture et mettre en valeur les résultats. Il aide à choisir une rédaction fluide, manipuler la métaphore, bien utiliser les références, choisir un titre, et bien plus encore. Cet ouvrage est destiné aux étudiants, chercheurs, scientifiques académiques ou d'entreprise, à tous ceux qui sont concernés par la sentence « publish or perish »... L’auteur : Jean-Luc LEBRUN est formateur des scientifiques travaillant aux Instituts de recherche d'A*STAR (Agence nationale de recherche de Singapour). Il a été directeur du Centre de recherche d'Apple à Singapour. Il anime dans le monde entier de nombreux séminaires d'écriture scientifique, dont les participants ont réclamé l'édition du présent ouvrage. ISBN : 978-2-86883-904-6 – Pages : 192 – Prix : 24 € – EDP Sciences – 17 avenue du Hogga, Parc d'activités de Courtabœuf, BP 112, 91944 Les Ulis cedex A – Contact Presse : Elise C HATELAIN – [email protected] – Tél. : 01 69 18 69 87 – www.edpsciences.org 72 h. leyral Mise au point PARTICULARITÉS DES URGENCES BUCCO-DENTAIRES Place des chirurgiens-dentistes militaires dans les réseaux de prises en charge B. FENISTEIN, N. BRUY, P. KAHL RÉSUMÉ Les urgences bucco-dentaires possèdent des singularités importantes. Les praticiens militaires, par leurs missions, les connaissent bien et peuvent apporter un éclairage complémentaire à ce dossier. Pour développer de manière cohérente l’offre de prise en charge des urgences, il nous semble que le recours à la mise en place de réseaux est nécessaire pour que mutualisation des moyens et des savoir-faire rime avec potentialisation des résultats. Toutefois, ce développement de l’offre de soins est destiné à traiter des conséquences sans en corriger les causes. Or celles-ci sont souvent accessibles aux mesures de prévention. Il est donc cohérent de promouvoir d’abord la logique de soins suivis et réguliers plutôt que de développer, au-delà du raisonnable, les possibilités de recours aux urgences différant ainsi le réel traitement au détriment parfois de celui-ci. Mots-clés : Chirurgiens-dentistes militaires. Réseaux. Urgences bucco-dentaires. I. INTRODUCTION. L’urgence est l’un des aspects où les chirurgiens-dentistes, civils ou militaires, sont très souvent sollicités. Quelles que soient les circonstances de la consultation en «urgence», le patient est toujours dans une situation de vulnérabilité modulée par des éléments contextuels et le type de pathologie présentée. Mais que sont véritablement les urgences dentaires ? Comment les appréhender rationnellement et efficacement ? Quels sont les apports spécifiques des chirurgiens-dentistes militaires à ce dossier? II. PROBLÉMATIQUE SPÉCIFIQUE DES URGENCES BUCCO-DENTAIRES. Hormis les traumatismes, la plupart des pathologies bucco-dentaires sont prévisibles et, au-moins chez l’adulte, d’évolution relativement lente ; les urgences B. FENISTEIN, chirurgien-dentiste. N. BRUY, interne des Hôpitaux de Paris. P. KAHL, chirurgien-dentiste, chef des services. Correspondance : B. FENISTEIN, Groupe médical Rochambeau, 51 401 Mourmelon-Le-Grand Cedex. médecine et armées, 2008, 36, 1 ABSTRACT PARTICULARITIES OF ORAL EMERGENCIES. THE PLACE OR MILITARY DENTAL SURGEONS IN THE CARE MANAGEMENT NETWORKS. The place or military dental surgeons in the care management networks. Oral emergencies have their own important particularities, and military practitioners, who know well about them with their missions, are bound to provide an additional perspective to this topic. It seems to us tint a coherent development of the care offer in oral emergency needs the implementation of networks that will allow to pool resources (means) and expertise (abilities) thus aiming to the best possible results. However, such a development intends to treat consequences without curing their causes while prevention can often do so. It is therefore more appropriate to promote primarily (the logic of) ongoing and routine care than to overdevelop the possibilities of resorting to emergency procedures which tends to postpone the actual treatment sometimes to its detriment. Keywords: Oral emergencies. Networks. Military dental surgeons. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 73-75) douloureuses, infectieuses ou hémorragiques devraient être rares et pourtant quand une structure existe, elle est souvent saturée. Les traumatismes, de fréquence mineure, n’expliquent pas ces encombrements préjudiciables à une prise en charge de qualité (1-3). S’il est facile de comprendre que patient et praticien n’apprécient pas l’urgence de la même façon, il faut aussi avoir à l’idée que cette notion évoque quelquefois des réalités bien différentes aussi entre professionnels, dès le stade de la définition de l’urgence. « L’urgence est une notion à la fois évolutive et subjective sans réelle définition légale » d’après Mirisch (4). Une « vraie urgence » est pour Mérat « une souffrance psychologique ou physique » (5). Ceci reste très vaste et introduit la notion de « fausse urgence » par opposition à la « vraie urgence » sans toutefois nous donner des précisions suffisantes pour nous éclairer. Ainsi, l’urgence caractérisera-t-elle, simplement et de manière très large, ce qui ne peut être différé. Cette acception impliquant une notion d’action immédiate, tout praticien devra donc se poser la question des conséquences d’une abstention dans ce cadre et y répondre. En revanche, pour savoir jusqu’où 73 doivent aller nos interventions, le Code de la santé publique est clair en nous faisant obligation de limiter nos actes au strict cadre de ladite urgence. La deuxième difficulté est la confusion entre gravité et urgence. Alors que pour le professionnel de santé, la dichotomie est stricte, pour le patient, ces deux notions ont tendance à rester synonymes. Les différentes situations pathologiques, récapitulées dans le tableau I en sont l’illustration. Il existe aussi des caractéristiques propres aux urgences odonto-stomatologiques. Le nombre important de patients se présentant comme des « urgences » est remarquable ; cette quantité est inégalée dans les autres spécialités (1). – le motif de consultation est souvent la douleur ; elle peut être intense, « insomniante » et ne cède pas forcément aux antalgiques courants. Enfin, l’absence de protocoles définis entraîne souvent des erreurs dans la prise en charge avec des conséquences : – locales, à type de perte de chances (abstention thérapeutique ou report de soins sur dents traumatisées) (6) ; – générales, parfois importantes, comme la prescription d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sur des processus infectieux mal contrôlé avec des complications graves (7) ; – de santé publique, comme des prescriptions inadaptées de radiographies (8) ou d’antibiotiques (9, 10). Le surtraitement est aussi un écueil, car d’un point de vue médico-légal et déontologique, on doit se limiter au strict minimum. À côté de ces particularités intrinsèques, il est à noter l’absence de chirurgiens-dentistes dans la plupart des Services dédiés à l’urgence (SAU). III. INTÉRÊT DES RÉSEAUX FORMALISÉS DANS LA PRISE EN CHARGE DES URGENCES. Les caractéristiques des urgences bucco-dentaires, tout comme l’expérience démontrent les diff icultés d’organisation ou de réalisation d’une filière rationnelle de prise en charge sérieuse, stable et connue capable de répondre de manière adaptée aux besoins. Dans un tel contexte, le partage dans une sorte de mutualisation limitée pourrait apporter des solutions intéressantes. Mais, si on définit les réseaux comme des ensembles de liens tissés entre différentes personnes, structures ou institutions dans le but de remplir plus aisément un objectif commun, on devine aisément que l’apport en expériences, en matériels, en connaissances, en personnels de manière formalisée sous forme de Tableau I. Exemple de classement de pathologies en fonction des caractères indépendants (urgence-gravité). URGENT NON URGENT 74 GRAVE NON GRAVE Cellulites diffuses Fractures alvéolodentaires Cancers buccaux Maladie carieuse ou parodontale conventions écrites doit permettre au groupe ainsi constitué d’obtenir plus aisément des résultats qu’en général, aucun, isolé, n’aurait été capable d’atteindre. Ce n’est donc pas une simple mutualisation dans laquelle il existe déjà un partage et une coopération mais bien un processus de potentialisation des résultats. Il existe en pratique de nombreux types de réseaux en fonction des buts recherchés et des contraintes rencontrées. Les réseaux de soins, de recherche ou d’enseignement en sont des exemples. Souvent, au-moins didactiquement séparés, ils sont en pratique, le plus souvent étroitement intriqués. Ces réseaux méritent donc d’être développés à tous les niveaux. Si les réseaux interinstitutionnels permettent de mettre en place des moyens importants et apportent beaucoup d’un point de vue de l’organisation logistique et de la diffusion de l’information, les réseaux interservices ou interdisciplines sont nécessaires à une prise en charge qui, pour être optimale, se doit d’être multidisciplinaire. Enfin les réseaux de praticiens de la même spécialité permettent de répartir la charge et de couvrir l’intégralité du calendrier. IV. QUELS APPORTS PEUVENT AMENER LES CHIRURGIENS-DENTISTES DES ARMÉES ? Dans cette problématique non spécifiquement militaire, que peuvent amener les chirurgiens-dentistes des armées ? Compte tenu de leur nombre réduit et de l’importance quantitative relative des soins qu’ils peuvent être en mesure de dispenser, ils ne peuvent pas avoir un rôle significatif dans la prise en charge effective des urgences des non ayant-droits de la Défense ; tout au plus, une participation symbolique. En revanche, ils sont en première ligne en opérations extérieures, en unité élémentaire, dans les hôpitaux d’instruction des armées ou en camp militaire pour prendre en charge seuls ou en collaboration avec les autres acteurs du Service de santé des armées les militaires malades ou blessés au cours de leurs missions. D’abord, de part leur exercice et leurs expériences spécif iques, ils peuvent donc aider à la compréhension fondamentale des difficultés généralement rencontrées dont la plupart sont transposables à quelques différences près, au milieu civil. De plus, ils ont l’habitude des collaborations nationales et internationales dans le cadre des opérations extérieures. Ils disposent de populations définies et contrôlables par le biais des visites médicales systématiques qui leur permettent d’évaluer les besoins (11) et de mettre en œuvre des dispositifs de prévention. Les chirurgiens-dentistes militaires peuvent aussi aider à la proposition de schémas de solutions évaluées. Ces propositions concernent les trois domaines de la formation, de l’orientation des patients et de la prévention. Si les chirurgiens-dentistes militaires peuvent quelquefois développer un pôle d’excellence plus particulièrement dans un domaine restreint de notre vaste spécialité, (chirurgie buccale, implantologie, prothèses, cariologie…) tous acquièrent une expérience b. fenistein importante dans le domaine de la prise en charge des urgences bucco-dentaires. Leur raison d’être, le soutien des Forces en tous lieux et tous temps le leur impose. Ils se doivent donc d’approfondir et d’entretenir ces précieuses et indispensables connaissances. Un fascicule référentiel dédié à la prise en charge des urgences bucco-dentaires comme il en existe dans le civil (12) mais adapté à la pratique de terrain en France, en opérations extérieures ou sur les bâtiments de la Marine nationale serait bienvenu pour servir de guide à un enseignement demandé souvent par d’autres acteurs de santé du service comme les infirmiers et les médecins d’unité. L’importance de la bonne orientation des patients, dès le départ, est souvent mésestimée. Or les retards de prise en charge ou les engorgements de certaines structures sont souvent dus à des méconnaissances ou à de mauvaises définitions de ces voies d’orientation. C’est pourquoi l’apport des militaires dans la mise en place des réseaux et dans ce type de dossier amène une plus-value. Le troisième domaine de propositions concerne la prévention des urgences. Il est maintenant évident qu’un suivi régulier diminue de façon considérable le recours aux services d’urgence. Ceci a été établi par de nombreuses études militaires (11, 13-16) et civile (3). Pour ce qui concerne la population militaire, la diminution du nombre de consultants en France ou en opérations extérieures semble bien être directement en rapport avec le recours exclusif à des chirurgiens-dentistes militaires d’active ou de réserve dans le cadre du contrôle de la réalité des soins dispensés en milieu civil et la détermination des aptitudes dans le respect des textes réglementaires. Le praticien militaire doit établir un dialogue direct avec le commandement dont il est le conseiller ; ainsi objectifs et contraintes de chacun peuvent être explicités et compris de manière réciproque. Sous l’impulsion de leur chef de corps, les commandants d’unités élémentaires commencent à prendre conscience que la préparation dentaire, loin d’être une contrainte supplémentaire, est bel et bien un investissement de fond rentable en terme de santé et de disponibilité opérationnelle. Certes, il existera toujours des urgences quelle que soit la qualité de la préparation en amont, mais, à côté des praticiens, l’encadrement a un rôle préventif à jouer dans de multiples situations. L’incitation au port du protège-dents est un exemple évident mais la modification de certaines conditions d’entraînement ou de préparation au combat peuvent aussi trouver des illustrations. L’absence d’usage de certains obstacles (girafe, espalier etc.) lorsqu’ils sont rendus glissants par des conditions météorologiques défavorables, va dans ce sens. En ce qui concerne le service public et la population civile, il est donc cohérent de proposer de promouvoir plutôt les soins suivis et réguliers que de développer seulement, et au-delà du raisonnable, des moyens de prise en charge des urgences qui n’ont d’autre but que de différer le réel traitement. V. CONCLUSION. Le domaine des urgences bucco-dentaires, que nous avons essayé de mettre en lumière, n’est pas simple à comprendre et à négocier sans maîtriser les particularités singulières de notre spécialité. La mise en place de réseaux formalisés sous forme de conventions écrites nous semble être une voie intéressante à suivre dans ce dossier. Les premiers résultats déjà obtenus en milieu militaire, qui devraient s’amplifier encore par le développement des responsabilités prises par les chirurgiens-dentistes des armées, fournissent des données nombreuses, cohérentes et convergentes de nature à éclairer le dossier civil correspondant. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Khaleeq UR. Emergency dental services: review of the Community Health Trust Service in Birmingham between 1997 and 2000. Prim Dent Care 2003 ; 10 (3) : 93-6. 2. Douglass AB, Douglass JM. Common dental emergencies. Am Fam Physician 2003 ; 67 (3) : 511-6. 3. Powers LJ, Grana JR, Keen ND, Hanchak NA. Preventive service utilisation as a predictor for emergency dental examinations. Community Dent Health 2000 ; 17 (1) : 20-3. 4. Mirisch D. Urgences et déontologie. Inf Dent 2004 ; 86 (17) : 1 812. 5. Merat P. Gestion de l’urgence au cabinet dentaire. Inf Dent 2004 ; 86 (17) : 1 057-63. 6. Dorney B. Inappropriate treatment of traumatic dental injuries. Aust Endod J 1999 ; 25 (2) : 76-8. 7. Revol P, Gleizal A, Kraft T, Breton P, Freidel M, Bouletreau P. Brain abscess and diffuse cervico-facial cellulitis: complication of third molar extraction. Rev Stomatol Chir Maxillofac 2003; 104 (5): 285-9. 8. Sewell J, Drage N, Brown J. The use of panoramic radiography in a dental accident and emergency department. Dentomaxillofac Radiol 2001 ; 30 (5) : 260-3. particularités des urgences bucco-dentaires 9. Dailey YM, Martin MV. Are antibiotics being used appropriately for emergency dental treatment ? Br Dent J 2001 ; 191 (7) : 595. 10. Anderson R, Calder L, Thomas DW. Antibiotic prescribing for dental conditions: general medical practitioners and dentists compared. Br Dent J 2000 ; 188 (7) : 398-400. 11. Fenistein B. Pourquoi tant de consultations dentaires en opex ? Médecine et Armées 2004 ; 32 (2) : 123-6. 12. Roth F et al. Les urgences bucco-dentaires. Paris : AP/HP éd. Douin ; 1999 : 107 p. 13. Moss DL. Dental emergencies during SFOR 8 in Bosnia. Military Medicine 2002 ; 167 (11) : 904-6. 14. Chaffin J, Brooks S, Kahue P. Dental cost of deploying a National Guard unit to Bosnia. Mil Med 2002 ; 167 (6) : 474-7. 15. Dunn WJ, Langsten RE, Flores S, Fandell JE. Dental emergency rates at two expeditionary medical support facilities supporting operations enduring and Iraqi Freedom. Mil Med 2004; 169 (7): 510-4. 16. Skec V, Macan D, Spicek J, Susac M, Luksic I. Influence of oral health on combat readiness in the Croatian. Mil Med 2002 ; 167 (12) : 1 016-9. 75 VIENT DE PARAÎTRE DE LA SANCTION À LA PRÉVENTION DE L'ERREUR MÉDICALE Propositions pour une réduction des événements indésirables liés aux soins Sous la direction de Georges DAVID et Claude SUREAU On a récemment pris conscience de la fréquence jusqu'alors largement sous-estimée des événements indésirables liés aux soins, plus simplement dits erreurs ou accidents médicaux. L'Académie nationale de médecine, soucieuse d'une telle situation, a repris l'étude de ce problème en l'orientant selon trois axes. Prévenir plus que punir Jusqu'à présent l'erreur médicale n'apparaissait et n'était traitée que sous l'angle judiciaire, ce qui contribuait à une dissimulation expliquant la sous-estimation de ce type de risque. lI convient maintenant de donner une priorité à la prévention, en débordant le champ relativement limité de la faute pour réduire l'ensemble des défaillances, dommageables ou non, les « presque-accidents », selon l'expression employée en aéronautique. Analyser les erreurs dans leur contexte systémique La médecine moderne, surtout hospitalière, est devenue plus complexe. Le patient entre dans une véritable chaîne soignante aux multiples maillons et intervenants. La défaillance, même si elle est apparemment individuelle, doit être analysée dans ce contexte systémique afin d'en déduire les règles de bonnes pratiques pour les soignants et de bon fonctionnement pour le système. L'expérience de l'aéronautique constitue, de ce point de vue, un modèle pour la médecine, voire pour la justice. Instaurer un nouvel état d'esprit L'erreur ne doit plus être l'objet d'un refoulement. Parce qu'elle entache les bénéfices de la médecine, parce qu'elle entame la confiance des patients, elle ne peut plus restée enfouie dans la conscience des soignants. Il faut la traquer et l'affronter au grand jour. ISBN 2 7430 0941 1 – Prix : 28 € – Édition médicales internationales – E.M. INTER, allée de la Croix Bossée, 94234 Cachan cedex – Tél. : 01 45 46 15 00 – Mail : www.eminter.fr. 76 Mise au point APPORT DU DOSAGE DES D-DIMÈRES AU DIAGNOSTIC PRÉCOCE D’UNE THROMBOSE VEINEUSE CÉRÉBRALE Une observation A. GOUILLOU, T. VITRY, A. DIDELOT, L. GUILLOTON, D. FELTEN, A. DROUET RÉSUMÉ Une jeune femme, sans antécédent, ni traitement, en surcharge pondérale présentait depuis dix jours un tableau d’hypertension intracrânienne isolée. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) avec en particulier des séquences en T2* et angiographiques veineuses ainsi que la composition du liquide cérébrospinal (LCS) étaient normales. Le dosage sanguin des D-dimères était élevé. Devant l’apparition brutale d’une une aphasie six jours plus tard, le scanner X cérébral montra un œdème hémisphérique gauche modéré et une hémorragie méningée, l’angiographie par résonance magnétique objectivant alors une thrombose du sinus longitudinal supérieur. La disparition de l’aphasie fut obtenue en 48 heures sous héparinothérapie IV. Si le scanner X peut être pris en défaut dans 20 % des cas de thrombose veineuse cérébrale, l’IRM ne l’est habituellement pas, si elle comporte des séquences veineuses. Elle ne fut pourtant contributive que de façon retardée dans notre observation, alors que le taux des D-dimères était initialement élevé, soulignant leur contribution au diagnostique, qui demeure encore controversée dans la littérature. La survenue d’une hémorragie méningée ne doit pas détourner de l’héparinothérapie qui demeure le traitement de référence. Mots-clés : D-dimères. Hémorragie méningée. Hypertension intracrânienne. IRM avec séquences angiographiques. Thrombose veineuse cérébrale. ABSTRACT D-DIMER’S VALUE FOR DIAGNOSIS OF CEREBRAL THROMBO-PHLEBITIS WITHOUT ABNORMALITIES ON EARLY MRI WITH VENOUS SEQUENCES. A young woman, with no medical history but overweight revealed high intracranial pressure. Emergency imagery was completely normal. D-dimers were the only biological abnormalities. Facing neurological worsening (aphasia), cerebral scanner showed subarachnoid haemorrhage, left hemispheric oedema while MRI and MRA both showed a superior longitudinal sinus thrombosis. Clinical recovery was obtained within 48 h using heparin therapy despite the subarachnoid haemorrhage. If brain CT scan can be normal in 20 % of cerebral venous thrombosis, MRI is usually revealing in most cases, but sometimes is not, which gives interest to MRA. Here our patient’s imaging was initially normal, but D-dimers were elevated which helped to diagnosis. In the litterature, D-dimers’ contribution to diagnose has yet to be defined. Parenchymatous complications are frequent, often haemorrhagic. Subarachnoid haemorrhage is nonetheless scarce. Despite haemorrhagic complications, and if there is no indication of neurological surgery, the reference treatment is decoagulation heparin dose, quickly replaced by antivitamin K. Keywords : Cerebral venous thrombosis. D-dimer. Intracranial hypertension. MRI with angiographic study. Subarachnoid haemorrhage. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 77-81) I. INTRODUCTION. La Thrombose veineuse cérébrale (TVC) est une entité beaucoup moins fréquente que son homologue artérielle, puisque évaluée à 0,5 % des accidents vasculaires cérébraux (1), mais probablement sous A. GOUILLOU, médecin aspirant. T. VITRY, médecin principal. A. DIDELOT, interne. L. GUILLOTON, médecin en chef. D. FELTEN, médecin chef des services. A. DROUET, médecin en chef. Correspondance : A. DROUET, service de neurologie, HIA Desgenettes, BP 25, Lyon Armées. médecine et armées, 2008, 36, 1 évaluée, dont le diagnostic a été facilité par l’imagerie moderne, en particulier l’IRM qui permet habituellement une exploration efficace et sans risque, notamment des Sinus longitudinal supérieur (SLS) et latéraux (SL) (1-3). Pour autant, la détection du thrombus sur les séquences usuelles peut être délicat, particulièrement au début de sa constitution, mais peut être facilitée par l’utilisation de séquences en écho de gradient (T2*) et angiographiques veineuses (ARM). Par ailleurs, il a été souligné l’intérêt diagnostic du dosage sanguin des D-dimères (1, 3), ce qu’illustre bien l’observation présentée où le tableau 77 d’une Hypertension intracrânienne (HIC) isolée incitait à rechercher une TVC, mais où l’IRM initiale était prise en défaut. L’évolution, bien que compliquée d’une hémorragie méningée, fut favorable sous héparinothérapie dont elle ne contre indique pas l’emploie. a II. OBSERVATION. Une étudiante, âgée de 22 ans, d’origine guyanaise, en métropole depuis trois années, sans antécédent médical personnel ni anomalie familiale connue de l’hémostase, non migraineuse, exempte de tabagisme et de tout traitement, consulta pour une céphalée diffuse, à type de lourdeur, modérée mais inhabituelle et tenace évoluant depuis dix jours. Installée rapidement mais sans notion de coup de tonnerre, majorée par l’effort et accompagnée de quelques nausées, elle fut suivie quatre jours plus tard d’une diplopie binoculaire horizontale un peu plus marquée dans le regard latéral droit. À l’examen, la patiente, légèrement fébrile à 38°, en nette surcharge pondérale (95 kg pour 165 cm) présentait une paralysie isolée du VI droit, sans autre anomalie sur le plan somatique. Le fond d’œil révéla un œdème papillaire bilatéral marqué. L’imagerie cérébrale, comportant un scanner X sans injection, et une IRM avec notamment des séquences en T2* et angiographiques veineuses par contraste de phase (f ig. 1a) et après injection de Gadolinium (f ig. 1b, c), se révéla normale, comme l’étude du LCS (en dehors de l’hyperpression du liquide de ponction non quantif iée). La biologie sanguine excluait tout syndrome inflammatoire, mais objectivait un taux de D-dimères au double de la normale (900 ng/ml pour une normale inférieure à 400 ng/ml) (tab. I), sans anomalie de la radiographie pulmonaire. Une héparinothérapie à l’aide d’un pousse-seringue électrique fut instaurée trois jours durant, dans l’attente d’un doppler veineux des membres inférieurs puis stoppée, une fois connue sa normalité, l’hypothèse d’une Hypertension intracrânienne (HIC) idiopathique compliquant un surpoids étant retenue, sans attribuer de valeur pathologique formelle à l’élévation des D-dimères. Trois jours après l’arrêt (J6), la patiente présenta brutalement une aphasie trans-corticale sensorielle, sans anomalie de l’Électro encéphalogramme (EEG). En revanche, le scanner X cérébral sans injection montrait un œdème hémisphérique gauche et une hémorragie méningée modérée en regard, avec un signe du triangle dense dans le SLS (fig. 2) ; l’IRM confirmait ces lésions parenchymateuses et méningées, montrant l’absence de flux en contraste de phase dans le SLS (fig. 3a) et son mauvais remplissage après injection de Gadolinium qui entourait un thrombus en isosignal T1 (Fig. 3b, c) ; en séquence FLAIR et écho de gradient, le thrombus était hypointense. Le taux des D-dimères était égal à 3 390 ng/ml (tab. I). L’héparinothérapie fut reprise, précocement relayée par les AVK qui furent maintenu sept mois, associée à un traitement antiépileptique préventif par Gabapentine (900 mg/j). L’aphasie régressa 78 b c Figure1. ARM, perméabilité du SLS en contraste de phase (a) en 3d après gadolinium (b) coupe sagittale (c) axiale à J1 a. gouillou Tableau I. Évolution du taux des D-dimers, du bilan de la coagulation et des marqueurs de l'inflammation durant l'hospitalisation Dates : 20.01 21.01 23.01 26.01 27.01 02.02 10.02 jour/mois/2006 D-dimères : inférieurs à 400ng/ml 900 880 650 héparinémie : 0,3-0,6 UI/ml NF NF 0,42 NF NF 0,37 NF Ratio TCA : 0,01,20 0,97 0,97 1,94 1,03 2,64 2,09 1,19 INR NF NF NF NF NF 1,5 3,2 Taux prothrombine : 70-100 % 88 88 90 88 79 61 29 CRP : 0,0-5,0 mg/l 1,9 2,3 2,1 14,7 NF NF 0,2 VS : 2-10 NF NF 20 26 NF 32 12 3 390 2 490 1 370 1 070 en 48 heures et les signes d’HIC en une dizaine de jours, tandis que l’IRM réalisée quatre mois plus tard montrait les stigmates de l’hémorragie méningée en écho de gradient, mais la perméabilité retrouvée du SLS. Le bilan étiologique est resté négatif à ce jour. chez les patients ayant une HIC isolée (50 %) (2). L’IRM est ainsi devenue l’examen incontournable à réaliser devant toute suspicion diagnostique, se révélant très sensible, puisqu’elle permet de visualiser la thrombose, les éventuelles lésions parenchymateuses et parfois, la cause sous-jacente (1-3, 7). Elle peut cependant être prise en défaut durant les premiers jours si l’on n’utilise que les séquences standards (T1, T2, FLAIR) (1, 2, 7), ce qui justifie la réalisation de séquences plus sensibles, en T2* et angiographiques au temps veineux (ARM), cette dernière montrant l’absence de flux dans le sinus thrombosé, plusieurs techniques étant disponibles (contraste de phase, temps de vol ou après injection de gadolinium) (1). Chez le sujet normal, les sinus circulants ont un signal hypointense sur les séquences pondérées en T1 et en T2. Toutefois dans notre observation, toutes les modalités techniques, y compris les séquences en T2* et l’ARM ont été prises en défaut plus de dix jours après le début des symptômes : à cette date, les anomalies attendues (du 5e au 30e jour) sont un thrombus endoluminal bien visible, car hyperintense sur les séquences pondérées en T1 et en T2, alors que le caillot encore frais est mal visualisable étant isointense en T1 et hypointense en T2 durant les cinq premiers jours de sa constitution. Le thrombus a pourtant adopté dans notre cas cette dernière tonalité de signal sur les séquences T1 et T2, identique à l’aspect endoluminal initialement constaté six jours plus tôt, excepté en T2* où il est devenu nettement hypointense, ce qui pourrait conférait un intérêt tout particulier à cette séquence dans le diagnostic des TVC (8). III. DISCUSSION. Cette observation souligne les difficultés diagnostiques parfois rencontrées pour détecter une Thrombose veineuse cérébrale (TVC), en dépit de l’utilisation de séquences en écho de gradient (T2*) et angiographiques veineuses (ARM) lors de la réalisation de l’IRM. Les céphalées constituent le symptôme le plus fréquent (de 75 % à 95 % des cas selon les séries) et le plus souvent inaugural des TVC (1, 3), revêtant une grande diversité d’expression (1-3). Elles peuvent être isolées ou volontiers associées à des signes focaux, à une encé-phalopathie ou à une ophtalmoplégie, d’installation aiguë à chronique et de forte intensité (évoquant une HIC ou une hémorragie méningée) ou plus banale (pseudo-migraineuse, hémicrânienne paroxystique, tensive ou banale) (1-4). Un tableau isolé d’hypertension intra-crânienne (HIC), comme celui de notre patiente, résume l’expression de la maladie dans 20% à 40% des cas selon les séries (1-3), et doit être différencié tout particulièrement du cadre de l’HIC idiopathique, où l’imagerie écarte la possibilité d’une hydrocéphalie, d’un processus expansif ou d’une lésion vasculaire, la composition du LCS étant normale et divers désordres métaboliques ou prises médicamenteuses absentes (5). Le scanner X cérébral, sans et avec injection, en dépit de sa plus grande facilité d’accès, méconnaît une TVC dans 10 % à 20 % des cas (1, 6, 7), et encore plus fréquemment Figure 2. TDM, coupe axiale à J6 : hémorragie méningée et œdème hémisphérique gauche. apport du dosage des d-dimères au diagnostic précoce d’une thrombose veineuse cérébrale 79 a c b Figure 3. ARM, obstruction du SLS en contraste de phase - (a) en 3d après gadolinium - (b) coupe sagittale - (c) axiale à J6 Ainsi, les séquences en T2* semblent particulièrement sensibles en cas de thrombose veineuse corticale isolée ou dans les premiers jours de la constitution d’une TVC (fréquence de 90 % d’hyposignal en T2* versus 70 % d’hypersignal T1 pour le thrombus) (1). De façon plus surprenante, la première ARM pourtant réalisée plus de dix jours après le début des signes cliniques n’a pas montré d’anomalie de flux dans le SLS : si l’on écarte un défaut technique peu probable, l’intrication peu vraisemblable d’une HIC idiopathique puis d’une TVC avec ou sans rôle favorisant éventuel de la rachicenthèse dans son apparition (les D-dimères étant augmentés dés le début de la maladie), cette normalité de l’ARM pourrait s’expliquer par la présence initialement d’un simple ralentissement du flux veineux sans formation de caillot néanmoins suff isant pour générer une HIC, par un thrombus n’obstruant que partiellement un sinus de diamètre standard ou de grande taille ou gênant la résorption du liquide cérébrospinal (LCS) en feutrant les granulations de Paccioni, par une augmentation du retour veineux (3) ou enfin, par l’extension secondaire au sinus longitudinal supérieur d’une thrombose veineuse corticale limitée et non visualisée par l’examen initial. 80 La place des D-dimères dans la démarche diagnostique des TVC n’est pas encore parfaitement établie. En effet, trois études (9-11) avaient montré la bonne valeur prédictive négative de ce dosage, lorsqu’elle était étudiée chez des patients admis aux urgences pour une céphalée présente depuis moins de trois semaines et chez qui était confirmé le diagnostic de TVC. Plus récemment, Crassard et al. (12), ont montré en revanche que 10 % des 73 patients étudiés porteurs d’une TVC datant de moins de 30 jours, avaient un taux de D-dimères estimé normal (de moins de 500 ng/ml) et que l’élévation moyenne était plutôt modérée, puisque égale à 1 521 ng/ml. De plus, les D-dimères étaient normaux chez 4 % des patients devant un tableau clinique évocateur (HIC, signes de souffrance encéphalique), mais surtout chez 26 % de ceux qui ne présentait qu’une céphalée isolée peu spécifique. En somme, si l’on ne peut actuellement formellement exclure une TVC aiguë sur un dosage négatif des D-dimères, sa positivité constitue une aide indéniable au diagnostic, même s’il existe des faux positifs. Il est possible, que la valeur seuil de positivité des D-dimères (supérieure à 500 ng/ml) doivent être revue à la baisse dans les TVC, par comparaison avec les thromboses a. gouillou systémiques, en raison de la petite taille et de la localisation peu accessible du caillot. Si une composante hémorragique est fréquemment observée au sein de l’infarctus veineux (par érythrodiapédèse secondaire à la stase veineuse et à l’hyperpression capillaire), venant compliquer l’extension de la thrombose sinusienne aux veines corticales (10 % à 50 % de cas) (1, 2, 6) ou dans le LCS (13), il s’agit beaucoup plus rarement d’une hémorragie méningée caractérisée sur le plan clinique et radiologique isolée (14), voire sous durale (6). Une thrombose du SLS, comme celle de notre patiente, peut s’étendre aux veines superficielles drainant le sang du cortex cérébral dans les sinus dure-mériens, veines dont la faculté de se dilater et d’inverser leur flux explique la rareté de leur rupture, qui demeure cependant possible en raison d’une paroi mince dépourvue de tunique musculaire (2). La recherche d’une TVC s’impose donc en cas d’hémorragie méningée en l’absence d’anévrisme ou de malformation vasculaire. En dehors de la nécessité exceptionnelle d’évacuer chirurgicalement un hématome compressif et mal toléré, le traitement reste habituellement la décoagulation à dose efficace par héparinothérapie intraveineuse (TCA, deux fois au-dessus des valeurs normales) ou de bas poids moléculaire (15, 16), y compris en cas de lésion hémorragique (13, 15), permettant le plus souvent une évolution favorable sans séquelle. Un relais par AVK (avec une INR entre deux et trois) est instauré après la phase aiguë, pour une période de six à douze mois (1). Le taux de mortalité dans une étude internationale multicentrique récente, regroupant 624 patients était seulement de 4,3 % (17), le décès étant le plus souvent imputable à l’affection responsable ou à une embolie pulmonaire. IV. CONCLUSION. La gravité de l’évolution naturelle des TVC, rend nécessaire d’en évoquer le diagnostic devant un tableau trompeur ou paucisymptomatique, et de recourir à une exploration IRM combinant des séquences T1, T2, FLAIR, T2* et angiographiques veineuses, ainsi qu’à un dosage sanguin des D-dimères. Si l’IRM est ainsi devenue l’examen de référence, son apparente normalité, non exclue au stade très précoce ou en cas de problèmes techniques, doit faire discuter, en cas de forte suspicion, un complément d’investigation par angio-scanner et surtout par artériographie conventionnelle, voire dans les cas moins évocateurs ou moins sévères par une nouvelle IRM réalisée quelques jours plus tard. L’héparinothérapie constitue le traitement de choix à instaurer en urgence, même en cas de complication hémorragique méningée. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Bousser MG, Ferro JM. Cerebral venous thrombosis : An update. Lancet Neurol 2007 ; 6 : 162-70. 2. Crassard I, Ameri A, Rougemont D, Bousser MG. Thromboses veineuses cérébrales. Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, Paris), Neurologie, 17-046-R-10 ; 2003 : 12p. 3. Crassard I, Bousser MG. Céphalées au cours des thromboses veineuses cérébrales. Rev Neurol 2005 ; 161 : 706-8. 4. Biousse V, Ameri A, Bousser MG. 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Lalive PH, de Moerloose P, Lovblad K, Sarasin FP, Mermillod B, 11. 12. 13. 14. 15. 16. 17. apport du dosage des d-dimères au diagnostic précoce d’une thrombose veineuse cérébrale Sztajzel R. Is measurement of D-dimer useful in the diagnosis of cerebral venous thrombosis ? Neurology 2003 ; 61 : 1 057-60. Kosinski CM, Mull M, Schwarz M, Koch B, Biniek R, Schlafer J et al. Do normal D-dimer levels reliably exclude cerebral sinus thrombosis ? Stroke 2004 ; 35 : 2 820-5. Crassard I, Soria C, Tzourio C, Woimant F, Drouet L, Ducros A et al. A negative D-dimer assay does not rule out cerebral venous thrombosis : a series of seventy-three patients. Stroke 2005 ; 36 : 1 716-9. Tidahy E, Derex L, Belo M, Dardel P, Robert R, Honnorat J et al. Thrombophlébite cérébrale révélée par une hémorragie sous arachnoïdienne. Rev Neurol 2004 ; 160 : 459-61. Sztajzel R, Coeytaux A, Dehdashti AR, Delavelle J, Sinnreich M. Subarachnoid hemorrhage : a rare presentation of cerebral venous thrombosis. 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PRÉSENTATION DU MANUSCRIT • Le manuscrit est fourni: – soit sur papier en trois exemplaires; – soit sur support numérique adressé par voie postale; – soit adressé par E. mail (Internet, Intranet, Lotus); – soit sous forme multiple. • Le manuscrit est rédigé: – en langue française (sauf exception après accord de la rédaction); – en double interlignage en Times new roman corps 12; – recto seulement marge gauche ; – paginé. • La première page comporte: – le titre précis et concis sans abréviation, en lettres capitales accentuées, – le nom du ou des auteurs en lettres capitales accentuées, précédé des initiales du prénom en lettres capitales accentuées (avec trait d'union pour les prénoms composés) séparés par un point. – le nom du ou des auteurs, précédé des initiales du prénom des auteurs suivis du grade et du titre principal; – le nom, l'adresse et les coordonnées téléphoniques, de télécopie ou E-mail de l'auteur destinataire des correspondances, des épreuves à corriger. • La deuxième page est réalisée selon les règles avec: – le titre en français en lettres capitales accentuées; – le titre en anglais ; – le résumé en français de 15 lignes maximum sans abréviation ni référence; – suivi de quatre à cinq mots-clés répertoriés, classés par ordre alphabétique et séparés par un point; – le résumé en anglais suivi des mots-clés répertoriés, classés par ordre alphabétique et séparés par un point. • Le texte: – débute à la troisième page; – est concis, précis et les évènements passés sont écrits au passé composé ; – les abréviations sont en nombre limité et exclues du titre et des résumés et sont explicites lors du premier emploi ; le terme entier est précédé de l'abréviation mise entre parenthèses lors de la première apparition dans le texte; – la terminologie est respectée (symbole, unité, nombre écrit en chiffres sauf ceux inférieurs à dix sept, lorsqu'ils commencent une phrase ou lors d'énumérations fréquentes dans le texte, médicaments). – La présentation est au carré (texte justifié) sans retrait ni interligne, ni gras dans le texte ni mot souligné et selon le plan: I. CHAPITRE. A) SECTION. 1. Article. a) Paragraphe. – alinéa; - sous alinéa, les puces • peuvent être utilisées sans renvois de bas de page. • Les figures (graphiques, illustrations et photographies): – sont en nombre limité; – sont numérotées en chiffres arabes; – sont appelées précisément dans le texte, placées entre parenthèses par ordre d'apparition ; – les photos sont fournies en trois exemplaires (idem pour les radiographies) respectent l'anonymat des patients et peuvent être remplacées par des fichiers numériques (sous format JPEG); – les diapositives sont accompagnées d'un tirage papier; – au verso des figures l'orientation est indiquée; – les légendes sont dactylographiées sur une feuille à part expliquant les unités utilisées (pour les graphiques). • Les tableaux: – sont en nombre limité; – sont numérotés en chiffres romains; – sont fournis sur une seule page avec leur titre et leur numéro; – sont précisément appelés dans le texte, placés entre parenthèses par ordre d'apparition; – doivent se suffirent à eux même sans que l'on doive se référer au texte. • Les remerciements: – sont placées en fin de texte. • Les références bibliographiques: – sont numérotées en chiffres arabes placés entre parenthèses (dans le texte, les tableaux et les figures) dans l'ordre d'apparition; – les chiffres sont séparés par des virgules, mais au-delà de deux chiffres successifs seuls les deux extrêmes sont présentés, séparés par un trait d'union; – les noms des auteurs, séparés par une virgule, sont mentionnés jusqu'à six, au-delà, le dernier des six est suivi de la mention « et al. ». – les noms des revues sont conformes aux listes officielles référencées. LES RÉFÉRENCES Les références comportent obligatoirement, dans l'ordre suivant: – noms des auteurs en minuscules accentuées (première lettre en capitale accentuée) suivis des initiales des prénoms en majuscules accentuées séparés par une virgule, le dernier étant suivi de la mention « et al. »; – titre intégral dans la langue de publication (caractères latins) et d'un point ; suivi de: À propos d'un article extrait de revue: – nom de la revue suivi de l'année de parution, puis d'un point virgule; – tome, pouvant être suivi du numéro entre parenthèses, puis deux points; – numéros de la première page et de la dernière abrégée au plus petit chiffre explicite, séparés par un trait d'union et point final. À propos d'un livre: – ville de l'éditeur puis deux points; – éditeur suivi d'un point virgule; – année d'édition et éventuellement du nombre de pages suivi d'un point final. À propos d'un chapitre extrait d'un livre: – titre du chapitre et point; – puis « in : » suivi du ou des noms et initiales des prénoms du ou des coordinnateurs suivis de « ed » ou « eds » et d'un point; – titre du livre et point; – ville de l'éditeur puis deux points; – maison d'édition et virgule; – année d'édition et deux points; – numéros de la première page et de la dernière abrégée au plus petit chiffre explicite, séparés par un trait d'union et point final. À propos d'une thèse: – ville suivie de deux points et de l'université puis d'un point virgule; – année de la thèse et nombre de pages et point final. COMITÉ DE LECTURE Les articles sont soumis anonymement pour approbation à la lecture de deux lecteurs membres du comité ou de deux lecteurs choisis pour leur compétence en la matière. Le comité de lecture se réserve le droit de demander un complément de bibliographie. Les textes, publiés ou non, ne sont pas retournés à l'auteur, à l'exception des illustrations. CORRECTION DES ÉPREUVES Les auteurs reçoivent, avant publication, les épreuves d'imprimerie sous forme papier ou fichier PDF via Internet ou Lotus qu'ils devront vérifier dans les délais indiqués dans la lettre d'accompagnement et conformément aux observations précisées. Le retour dans les huit jours est impératif. Passé ce délai, le texte sera publié tel quel sous la responsabilité de son auteur. OBLIGATIONS LÉGALES Les manuscrits originaux ne doivent avoir fait l'objet d'aucune publication antérieure, ni être en cours de publication dans une autre revue. Les opinions, exprimées dans les articles ou reproduites dans les analyses, n'engagent que leurs auteurs, notamment pour les médicaments. Les règles concernant l'exercice du droit d'expression dans les armées doivent être observées, particulièrement lorsqu'il s'agit d'informations nominatives ou protégées. En outre, le respect des dispositions de la loi du 11 mars 1957 modifiée, relative à la propriété littéraire et artistique, s'impose. Toute correspondance doit être adressée à : M. le rédacteur en chef, secrétariat « Médecine et Armées » 1, place Alphonse Laveran, 75230 Paris Cedex 05 – Tél. : 01 40 51 47 44 – Fax : 01 40 51 51 76 – Email : [email protected] 82 Mise au point HYPOTENSION INTRACRÂNIENNE SPONTANÉE DU LIQUIDE CÉRÉBROSPINAL Une cause méconnue de céphalée A. FAIVRE, J. BORDES, A. RIMBOT, P. ALLA, J. GRAPPERON, J. VALANCE. RÉSUMÉ L’hypotension intracrânienne spontanée du liquide céphalo-rachidien est une cause rare de céphalée. Son mécanisme étiopathogénique exact est inconnu mais les symptômes semblent résulter d’une brèche durale le plus souvent spontanée, parfois déclenchée par un traumatisme mineur. Nous rapportons deux observations qui illustrent le polymorphisme clinique de cette affection, l’intérêt diagnostique de l’Imagerie par résonance magnétique (IRM) et l’efficacité thérapeutique du blood-patch épidural, technique actuellement recommandée qu’il faut savoir proposer précocement avant la survenue de complications neurologiques plus graves. Mots-clés : Blood-patch épidural. Céphalée orthostatique. Hypotension intracrânienne. Liquide céphalo-rachidien. Pseudo-pachyméningite. ABSTRACT SPONTANEAOUS INTRACRANIAL HYPOTENSION, AN UNUSUAL CAUSE OF HEADACHE. Spontaneous intracranial hypotension is an unusual cause of headache. The pathogenetic mechanism is unknown but it is thought to result from spontaneous leakage of cerebrospinal fluid due to an occult dural tear. It could occur after minor trauma. We report two such patients and would like to emphasize three main points 1) the polymorphism of the clinical syndrome 2) the diagnostic utility of Magnetic Resonance Imaging 3) the efficacy of epidural blood patch in treatment of symptoms and prevention of neurological complications. Keywords: Cerebrospinal fluid. Epidural blood patch. Intracranial hypotension. Orthostatic headache. Pseudopachymeningitis. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 83-88) I. INTRODUCTION. L’Hypotension intracrânienne spontanée (HICS) du Liquide céphalo-rachidien (LCR) se définit comme l’ensemble des manifestations cliniques inhérentes à l’existence d’une hypovolémie intracrânienne sans brèche durale préalablement connue (1). L’avènement de l’Imagerie par résonance magnétique (IRM) a considérablement amélioré la compréhension physiopathologique et le dépistage de cette pathologie auparavant sous-diagnostiquée. Réputée bénigne, l’HICS peut toutefois engendrée des complications neurologiques graves. Le traitement actuellement A. FAIVRE, médecin principal, praticien confirmé. J. BORDES, médecin, praticien confirmé. A. RIMBOT, médecin principal, praticien confirmé. P. ALLA, médecin en chef, professeur agrégé du SSA. J. GRAPPERON, médecin en chef, praticien certifié. J. VALANCE, médecin chef des services, praticien certifié. Correspondance : A. FAIVRE, service de neurologie, HIA Sainte-Anne, BP 600, 83800 Toulon Armées. médecine et armées, 2008, 36, 1 recommandé consiste en la réalisation d’un blood-patch épidural. Nous rapportons ici deux cas observés dans le service de neurologie de l’HIA Sainte-Anne. II. OBSERVATIONS. A) OBSERVATION N° 1. Une femme, âgée de 32 ans, droitière, consulte suite à la survenue de céphalées violentes et inhabituelles installées brutalement sans facteur déclenchant évident. Ces céphalées apparaissaient uniquement en station debout, cédent quasi immédiatement au passage en décubitus et s’associent parfois à des vertiges lors des changements de position. Il n’existe pas d’antécédents médicaux, chirurgicaux ou familiaux notables ni aucune habitude toxique. À l’entrée, la patiente est apyrétique, sans syndrome méningé ni signe de focalisation neurologique. L’examen de l’extrémité 83 céphalique est normal, la marche et la station debout stables sans signe vestibulaire ou cérébelleux. Le reste de l’examen clinique est sans particularité. Le scanner cérébral réalisé en urgence pour éliminer une hémorragie méningée était normal. La ponction lombaire ramena un liquide clair avec 10 lymphocytes par ml, une discrète hyperprotéinorachie (0,47 g/l) sans hypoglycorachie ni germe à l’examen direct ou sur les cultures. Il n’existe pas de rupture de la barrière hémato-méningée ou de synthèse intrathécale d’immunoglobuline. L’IRM cérébrale (fig. 1) montre un épaississement diffus homogène et régulier des méninges de tout le névraxe. On note également un effacement du troisième ventricule avec un aplatissement des ventricules latéraux. Les sinus veineux sont dilatés ainsi que les veines cervicales notamment en regard de la charnière cranio-cervicale. Il existe au niveau cervical une ptose des amygdales cérébelleuses qui restent conf inées dans la citerne cérébelleuse médullaire (fig. 2). L’IRM médullaire ne montre pas de diverticule méningé. Le bilan biologique ne met pas en évidence d’anomalie de l’hémogramme, de trouble ionique, de syndrome biologique inflammatoire ou d’anomalie de la coagulation. Les recherches des anticorps antinucléaires, anticorps anticytoplasme des polynucléaires et anticorps anticoagulants circulants sont négatives. Le taux d’angioconvertase est normal. Les sérologies VIH, CMV, EBV, syphilis, Lyme et des hépatites A, B, C sont négatives. Figure 2. Observation N° 1. IRM crânienne en coupe sagittale. Ptose des amygdales cérébelleuses avec aspect de pseudo-Chiari. Le diagnostic d’hypotension intracrânienne spontanée du LCR est retenu. La patiente bénéficie d’un bloodpatch épidural par injection autologue de 20 ml de sang. Les céphalées régressèrent dès la f in de l’injection et la patiente peut sortir de l’hôpital le lendemain du geste. Après six mois de surveillance, elle est totalement asymptomatique alors qu’il persiste une prise de contraste méningée sur l’IRM de contrôle réalisée à trois mois. B) OBSERVATION N° 2. Figure 1. Observation N° 2. IRM crânienne en coupe axiale, séquence T1 avec gadolinium. Rehaussement pachyméningé intense avec aplatissement des ventricules latéraux. 84 Un homme, âgé de 80 ans, droitier, consulte suite à l’apparition depuis six mois de céphalées pulsatiles en casque, survenant essentiellement lors des efforts de défécation et de toux et qui s’associent à des vertiges a. faivre horizonto-rotatoires concomitants. Les céphalées ne sont pas calmées par la prise d’antalgiques simples, mais par le décubitus. Le patient est en bon état général, sans aucun antécédent notable. Il n’est pas migraineux, n’a aucune habitude toxique et ne prend aucun médicament. L’examen neurologique est strictement normal, sans signe de focalisation ni syndrome méningé. On arrive à déclencher des céphalées lors de la réalisation de la manœuvre de Valsalva et lors du passage de la station couchée à la station debout. Le scanner cérébral est normal. L’IRM encéphalique (fig. 3) met en évidence un épaississement global des méninges de la convexité sans anomalie parenchymateuse adjacente. Les ventricules latéraux sont aplatis et réduits en volume. Il n’existe, par ailleurs, aucune anomalie vasculaire artérielle ou veineuse à l’injection de produit de contraste. La ponction lombaire ramene un liquide clair avec un élément nucléé et sans germe à l’examen direct. La protéinorachie est augmentée à 0,61 g/l sans hypoglycorachie. La pression du LCR est normale estimée à 11 cm d’eau. Les cultures du LCR restent stériles. Le bilan biologique ne montre pas d’anomalie de l’hémogramme, de trouble ionique ou de syndrome biologique inflammatoire. Le diagnostic d’hypotension intracrânienne spontanée du LCR est retenu. Un blood-patch épidural est proposé au patient, il le refuse. Il est actuellement traité par des antalgiques de classe II (OMS), sans efficacité. Figure 3. Observation N° 2. IRM crânienne en coupe axiale, séquence T1 avec gadolinium. Rehaussement méningé avec aplatissement des ventricules latéraux. hypotension intracrânienne spontanée du liquide cérébrospinal III. DISCUSSION. A) ÉPIDÉMIOLOGIE. Il existe peu de données épidémiologiques disponibles sur l’HICS depuis sa première description faite en 1938 par Schaltenbrand (2). Il s’agit toutefois d’une pathologie rare et probablement sous-diagnostiquée qui aura par exemple concerné en 2000 au Centre d’urgence céphalée de l’hôpital Lariboisière 25 patients sur 10 510 consultants, soit 0,2 % des patients (1). Il semble que l’HICS touche plutôt l’adulte jeune au prof il longiligne. L’âge moyen se situe autour de 40 ans avec une prédominance féminine (deux femmes pour un homme) (3). Des observations à des âges plus extrêmes, de 19 à 76 ans, ont également été rapportées (4). B) PHYSIOPATHOLOGIE. 1. Physiologie du LCR. Le LCR provient d’une part de la sécrétion des plexus choroïdes situés au niveau du plancher des ventricules latéraux et du toit des troisièmes et quatrièmes ventricules, mais également directement du système nerveux central par des phénomènes de diffusion à partir des espaces extra-cellulaires. Il est réparti en deux secteurs, l’un ventriculaire et l’autre sous-arachnoïdien communicant entre eux par les trous de Luschka et de Magendie. Le LCR circule entre la pie-mère et l’arachnoïde et est résorbé au niveau des granulations de Pacchioni. Son volume moyen est de 150 ml, il est renouvelé en moyenne quatre fois par jour (5). La pression normale du LCR en décubitus dorsal est de 10 mm de mercure (ou hg). L’équilibre volémique du cerveau est régit par le modèle de Monro-Kellie, décrit initialement en 1 783 (6) puis affiné par Abercrombie (7) et Burrows (8). Son énoncé princeps définit le crâne comme une boite inextensible où la somme volumique du cerveau du sang et du LCR est une constante. 2. Mécanismes physiopathologiques de l’HICS. La réduction pathologique du secteur liquidien du LCR pourrait s’expliquer par trois mécanismes, un défaut de production, un excès de résorption ou encore une fuite du LCR hors du compartiment physiologique. Les analogies entre HICS et les syndromes post-ponction lombaire ont rapidement orienté les recherches vers la dernière hypothèse. L’utilisation de méthodes radio-traçantes (marquage isotopique du LCR) ont permis de confirmer l’existence de fuites spinales du LCR hors de l’espace sous-arachnoïdien chez des patients atteints d’HICS (9). Cette fuite engendre une hypovolémie du LCR qui semble être le déterminant principal des manifestations cliniques et radiologiques de la maladie. Toute hypovolémie du LCR va donc d’après le théorème de Monro et Kellie engendrer une augmentation du secteur vasculaire intracrânien puisque le volume cérébral est lui invariable. L’inflation volémique cérébrale va s’effectuer au dépend des 85 structures veineuses cérébrales. Cette hyperhémie veineuse va se traduire radiologiquement par un épaississement et la prise de contraste des pachyméninges, par la dilatation des veines corticales et des plexi péri-médullaires, par l’élargissement de la tige pituitaire et enfin par la survenue d’épanchements sous-duraux (10). Les variations volémiques du LCR vont provoquer une descente cranio-caudale du névraxe majorée à l’orthostatisme, générant une traction sur les structures algogènes d’ancrage du cerveau et expliquant ainsi les céphalées et leur caractère positionnel (1). L’étirement des nerfs crâniens par la ptose encéphalique rendrait également compte des divers signes sensoriels (visuels, auditifs ou vestibulaires) qui peuvent accompagner les céphalées. 3. Facteurs favorisants la fuite de LCR. La survenue spontanée d’une fuite de LCR reste inexpliquée. Un certain nombre de facteurs favorisants extrinsèques ou intrinsèques ont toutefois pu être identifiés. Un traumatisme rachidien modéré peut être parfois rattaché au début des symptômes (mouvement brusque du rachis, port de charges lourdes) mais sa valeur étiopathogénique reste discutée (11). Certaines anomalies méningées pourraient favoriser la survenue d’un HICS, le plus fréquemment, il s’agit d’anomalies focales comme les kystes de Tarlov (4). Plus rarement l’HICS s’associe à une maladie du collagène (maladie de Marfan, maladie d’Elhers-Danlos ou pseudoxantholoma elasticum), dont elle peut être le mode de révélation (12). Des études histologiques de biopsie méningée chez des patients atteints d’HICS sans collagénose ont été réalisées (13). Elles ont pu montrer chez ces patients qu’il n’existait pas d’altération fondamentale de la dure-mère à l’origine de la maladie qui n’est donc pas une maladie primitive de la méninge. C) DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE. 1. Clinique. Le signe cardinal de l’hypotension intracrânienne du liquide céphalo-rachidien est la céphalée orthostatique. Typiquement elle apparaît dans les minutes suivant le passage à la station debout et disparaît quasiimmédiatement au passage en décubitus. Elle siège plus volontiers au niveau des zones postérieures du crâne avec une irradiation nucale fréquente. Il s’agit plutôt d’une douleur sourde et continue que d’une céphalée pulsatile et paroxystique. Les céphalées peuvent toutefois être beaucoup plus trompeuses notamment dans les formes vieillies ou le caractère postural peut être relégué au second plan. Exceptionnellement, les céphalées peuvent être absentes (14), les cas rapportés semblent plutôt alors survenir chez le sujet âgé et dans des formes chroniques de la maladie. Comme dans l’observation N° 1, des tableaux d’installation brutale avec céphalée ictale ont été 86 rapportés (15). Ils miment alors d’autres urgences neurologiques en particulier l’hémorragie méningée ou la thrombophlébite cérébrale qui devront rapidement être recherchées. D’autres signes fonctionnels peuvent exister dans l’HICS du LCR, ils peuvent prendre aussi un caractère postural. Des signes visuels fluctuants sont retrouvés dans 12 % à 40 % des cas (1). Il s’agit le plus souvent de flou visuel ou de diplopie transitoire. L’atteinte chiasmatique a pu être observée, se traduisant alors par des amputations du champ visuel dans les secteurs bitemporaux objectivées à l’étude campimétrique. Des cas d’ophtalmoparésie ont été anecdotiquement rapportés (16). L’existence de signes auditifs semble être observée dans 20 % des cas. Il s’agit le plus souvent d’acouphènes ou de baisse d’acuité auditive. Ces signes acoustiques pourraient résulter des variations de pression labyrinthique provoquée par l’hypovolémie du LCR (17). Des sensations vertigineuses sont également fréquemment rapportées comme dans nos deux observations. Elles s’associent souvent à des nausées ou des vomissements ici aussi très influencées par la posture. Exceptionnellement, des tableaux neurologiques plus bruyants ont été rapportés qu’il s’agit d’ataxie, de syndrome parkinsonien (17), de démence (18), ou d’encéphalopathie (19). De façon générale, l’examen clinique neurologique est normal chez ces patients. Le test au décubitus devra être systématiquement réalisé en cas de suspicion clinique, le patient constatant classiquement la disparition des céphalées dans les minutes suivant le passage en position allongée. On peut également faire réaliser une manœuvre de Valsalva au patient, qui comme dans notre deuxième observation fera réapparaître la céphalée. L’existence de signe de focalisation à l’examen neurologique devra faire rechercher en urgence une complication de l’HICS du LCR principalement la thrombophlébite cérébrale ou un hématome sous-dural qui peuvent mettre en jeu le pronostic vital (20, 21). 2. Examens paracliniques. a) Imagerie. L’IRM cérébrale est l’examen clef du diagnostic (1) et devra être systématiquement réalisée devant toute suspicion d’HICS du LCR. Elle montrera typiquement deux types de signes qui témoignent de la descente rostro-caudale du névraxe et de l’hyperhémie veineuse centrale. On note ainsi sur les coupes sagittales une ptose amygdalienne avec aspect de pseudo-Chiari comme dans l’observation N° 1 et un effacement des citernes du tronc cérébral. L’existence d’une prise de contraste diffuse méningée est l’autre signe radiologique le plus fréquemment rencontré (21). Cet aspect « de trop belles méninges » ou pseudo-pachyméningite correspond à une prise de contraste intense des pachyméninges en séquence T1-Gadolinium alors que les méninges sont normalement quasi-invisibles à l’IRM. Cette prise de a. faivre contraste méningée inhabituelle n’est pas spécifique à l’HICS du LCR et peut se retrouver dans d’autres pathologies méningées, le contexte clinique faisant alors la différence. D’autres anomalies moins fréquentes peuvent être observées comme la présence d’un effacement ventriculaire comme dans nos deux observations, ou encore l’existence d’hygromes ou d’un élargissement de la tige pituitaire (22). Ces anomalies radiologiques précieuses au diagnostic peuvent être absentes, notamment si l’examen est pratiquer très précocement. Ainsi dans la série de Lariboisière, la prise de contraste pachyméningée à l’IRM est absente dans 39 % des cas (1). L’IRM médullaire est intéressante à double titre. Elle peut tout d’abord montrer des signes d’engorgement veineux médullaire à type de dilatation des plexi veineux apparaissant alors en asignal T2, très fortement rehaussé par l’injection de produit de contraste (23). Elle peut, par ailleurs, directement mettre en évidence la fuite de LCR sous la forme d’une collection péridurale ou encore mettre en évidence une anomalie méningée comme un kyste de Tarlov. b) Ponction lombaire. La ponction lombaire permet de mettre en évidence la diminution de pression du LCR mesurée en décubitus qui est alors inférieure à 7 cm d’eau. Lorsque l’hypotension est marquée, la ponction peut être blanche nécessitant le recours au passage assis du sujet voire l’aspiration du LCR (15). Le liquide est habituellement eau de roche mais peut être xanthochromique. Une pléiocytose leucocytaire modérée et une hyperprotéinorachie peuvent être retrouvées comme dans notre première observation, mais la glycorachie est constamment normale (1). c) Autres examens. La réalisation d’examens dynamiques peut être discutée pour essayer de localiser la fuite de LCR. Le transit isotopique du LCR peut alors être proposé. Il permettra de visualiser directement la brèche durale ou plus fréquemment apportera des éléments indirects comme un retard d’ascension et d’élimination du marqueur. Le myéloscanner est à l’heure actuelle l’examen de référence pour localiser la fuite. De nouvelles techniques prometteuses d’IRM à haute définition sont à l’étude et devraient permettre d’analyser plus finement les structures méningées médullaires. 3. Stratégie diagnostique. Les critères diagnostiques de l’International Headache Society (IHS) incluent encore la réalisation de la ponction lombaire et des examens à la recherche de fuite de LCR (transit isotopique du LCR, myélographie ou myéloscanner). Il semble toutefois d’après la série française de 2004 de Lariboisière (1) que la réalisation de ces examens soit peu utile voire possiblement délétère. Ainsi, la réalisation d’examens invasifs pourrait d’une part majorer l’hypovolémie du LCR et par ailleurs hypotension intracrânienne spontanée du liquide cérébrospinal s’avérer peu rentable dans le dépistage d’une fuite. Il apparaît donc raisonnable de s’arrêter dans les formes typiques à la réalisation d’une IRM de tout le névraxe sans ponction lombaire ni transit isotopique, et d’inclure comme critère diagnostique majeur la réponse rapide à la réalisation d’un blood-patch épidural. Devant un tableau clinique atypique ou en cas de doute diagnostique, la ponction lombaire et les examens dynamiques pourront alors être proposés. D) THÉRAPEUTIQUE. De part sa faible incidence, aucune étude standardisée en double aveugle n’a encore été réalisée dans l’HICS et les pratiques actuelles s’appuient surtout sur l’expérience d’équipes spécialisées (1, 11, 24). L’objectif du traitement de cette pathologie est triple, tout d’abord soulager eff icacement et rapidement le patient, prévenir les complications de l’HICS et également éviter la récidive. Les moyens physiques simples sont ceux communs à tout patient présentant une brèche duremèrienne, on préconise ainsi l’alitement prolongé et l’hyperhydratation. D’autres mesures comme la corticothérapie, le bandage abdominal ou encore l’utilisation de caféine ont été proposées. Ces mesures sont globalement très décevantes et ne peuvent que rarement se suff ire à elles-mêmes. Le traitement de choix repose sur l’injection de sang autologue dans l’espace épidural ou « blood-patch » (BP) (1). Son mécanisme exact est débattu, qu’il agisse en tarissant directement la fuite, en majorant le flux ascendant de LCR vers l’encéphale ou en induisant une vasoconstriction plus globale du névraxe. Le choix de l’étage d’injection reste discuté. Pour certaines équipes il serait souhaitable de visualiser la fuite et de réaliser l’injection in situ (25, 26). Toutefois, d’autres auteurs (24) ont rapportés le succès de BP lombaires alors qu’une fuite cervicale était formellement identifiée. C’est cette attitude qui prévaut actuellement et il est proposé en première intention un BP en région lombaire haute. La prise d’antithrombotiques, en particulier d’aspirine souvent consommée spontanément par le patient céphalalgique, est une contre-indication temporaire à la réalisation du geste qu’elle repousse de dix jours comme ce fut le cas dans l’observation N° 1. Un état septique ou le refus du patient (cf. observation N° 2) sont autant d’obstacles à la réalisation du geste. La technique consiste à repérer l’espace épidural par la technique dite du « mandrin liquide » puis à injecter lentement une quantité de 20 à 40 ml de sang selon les auteurs, l’apparition d’une lombalgie ou d’une radiculalgie faisant immédiatement interrompre l’injection. Il est recommandé de rester allongé deux heures après le geste et de ne pas exercer d’activité physique intense pendant les trois semaines suivantes. L’eff icacité durable du premier BP dans la série de la Mayo Clinic était de 36 % alors qu’elle est de 57 % dans celle de Lariboisière (1). Dans cette même 87 série, la réalisation d’un deuxième BP aura été efficace dans 20 % portant le résultat à 77 % de succès après deux gestes. La persistance d’une prise de contraste méningée après le BP alors que le patient est redevenu asymptomatique est classique, elle ne doit en aucun cas faire réaliser un nouveau geste dont la seule indication est la récidive de signes neuro-logiques (1). Après échec de plusieurs BP, l’attitude thérapeutique reste débattue. Un BP centré sur la fuite par guidage scanner peut être discuté, voire une chirurgie de colmatage (26) dont la réalisation est devenue exceptionnelle. En pratique, il est donc légitime de proposer en l’absence de contre-indication la réalisation d’un BP épidural lombaire, puis de le renouveler une ou deux fois en cas d’échec. Le taux de rechute à moyen ou à long terme reste imprécis en raison du peu de recul actuel sur ces techniques (27). IV. CONCLUSION. L’hypotension intracrânienne spontanée du LCR est une pathologie rare mais dont l’incidence est probablement sous-estimée. Il faut savoir l’évoquer devant la survenue de céphalées inhabituelles et de signes neurosensoriels sensibles à l’orthostatisme et disparaissant au simple test de passage au décubitus. L’IRM est l’examen clef du diagnostic et devra être réalisée précocement avant la survenue de complications cérébrales potentiellement graves. Le traitement de choix est le blood-patch épidural en région lombaire qui semble efficace dans environ 75 % des cas après une ou deux injections (1). La réalisation prochaine d’études multicentriques sur l’HICS s’avère indispensable. Elles devront permettre, d’une part, d’évaluer l’efficacité à moyen et long terme du blood-patch épidural et également de développer de nouvelles pistes thérapeutiques encore expérimentales (27). RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. S Berroir, MG Bousser. Hypotension spontanée du liquide cérébrospinal. Encycl Med Chir. 2004 ; 17-023-A-90. 2. G Schaltenbrand. Normal and pathological fluid circulation. Lancet. 1953 ; 805-9. 3. B Mokri, DG Piepgras, GM Miller. Syndrome of orthostatic headaches and diffuse pachymeningeal gadolinium enhancement. Mayo Clin Proc 1997 ; 72 : 400-13. 4. GA Christoforidis, BA Mehta, JL Landi, EJ Czarnecki, RA Piaskowski. Spontaneaous intracranial hypotension: report of four cases and review of the literature. Neuroradiology 1998 ; 40 : 636-43. 5. La boîte crânienne et son contenu. In J Cambier, M Masso, H Dehen. eds. Neurologie. Paris : Masson, 2000 : 423. 6. A Monro. Observations and structure and functions of the nervous system. Edinburgh: Creech and Jonhson, 1 783. 7. J Abercrombie. Pathological and practical researches on disease of a brain and spinal cord. Edinburgh, 1 828. 8. G Burrows. On disorders of the cerebral circulation and on the connection between affections of the brain and diseases of the heart. Philadelphia: Lea & Blanchard, 1 848. 9. SJ Chung, JS Kim, M Lee. Syndrome of cerebral fluid hypovolemia. Clinical and imaging features outcome. Neurology 2000 ; 55 : 1 321-7. 10. B Mokri. The Monro-Kellie hypothesis: applications in CSF volume depletion. Neurology 2001 ; 56 : 1 746-8. 11. B Mokri. Headaches caused by decreased intracranial pressure: diagnosis and management. Curr Opin Neurol 2003 ; 16 : 319-26. 12. B Mokri. 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L’enquête épidémiologique comportait un interrogatoire par questionnaire des autres membres du commando et une sérologie de dépistage de leptospire ainsi qu’une visite de la base. L’enquête animale consistait à capturer des rongeurs et à rechercher l’infection par leptospire sur tissu rénal murin par Polymerase chain reaction (PCR). L’analyse statistique n’a pas permis d’identifier le moment de la contamination. Les sérologies de dépistage et la recherche de leptospires sur tissus murins étaient toutes négatives. Cependant, les enquêtes ont permis de réunir un faisceau d’arguments en faveur d’une contamination lors d’un entraînement comportant une immersion dans le canal traversant la base. Des mesures à court et moyen terme ont été proposées au commandement. La survenue d’un cas de leptospirose est un phénomène rare dans les armées françaises, surtout dans cette région de France métropolitaine, ce qui justifiait la réalisation d’une investigation. Mots-clés : France métropolitaine. Leptospirose. Militaire. I. INTRODUCTION. Le 28 juin 2006, le Service de médecine interne de l’Hôpital d’instruction des armées (HIA) Laveran alertait le département d’épidémiologie et de santé publique de la survenue d’un cas de leptospirose chez un commando d’une Base aérienne (BA) du Sud-est de la France. Compte tenu de la gravité de la maladie et de l’existence possible d’autres cas, il était décidé, le jour même, de L. OLLIVIER, médecin principal, praticien certifié. O. ROMAND, vétérinaire principal. J.-M. BOVIS médecin en chef. P. KRAEMER, médecin en chef, praticien certifié. P. HANCE, médecin en chef, praticien certifié. C. ROQUEPLO, vétérinaire. J.-L. MARIÉ, praticien confirmé, vétérinaire en chef. A. TODESCO, médecin en chef, praticien certifié. R. MIGLIANI, médecin en chef, professeur agrégé du SSA. B. DAVOUST, vétérinaire chef des services, praticien certifié. J.P. BOUTIN, médecin chef des services, professeur agrégé du SSA. Correspondance : L. OLLIVIER, IMTSSA, DESP sud, BP 46, 13 998 Marseille Armées. médecine et armées, 2008, 36, 1 ABSTRACT A LEPTOSPIROSIS CASE OCCURING IN AN AIRCRAFTMAN. A case of leptospirosis occurred in a commando working on an Air Force base in the southeast of France. Epidemiological and veterinary surveys were realized. The epidemiological survey consisted in a questionnaire for the commando unit, a leptospirosis serology and an inspection of the air base. The veterinary survey consisted in catching rodents and researching leptospirosis in their kidney. Data analysis was unable to identify the moment of the contamination. Serology and rodent samples were negative to leptospirosis. Yet, those surveys showed that the contamination occurred during training with an immersion in a channel crossing the air base. Immediate measures and further measures were proposed to the command. Leptospirosis is a rare phenomenon in the French Forces especially in continental France. But military on duty are at risk because of their occupational activities. Key words: Continental France. Leptospirosis. Military. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 89-92) réaliser une enquête. Les objectifs de l’enquête étaient (i) d’identifier d’autres cas de leptospirose ; (ii) d’identifier le lieu de contamination et les facteurs de risque et (iii) de proposer des mesures à court et moyen termes. II. RAPPELS ÉPIDÉMIOLOGIQUES. La leptospirose est une zoonose largement répandue dans le monde due à une bactérie Leptospira interrogans, actuellement regroupée en 23 sérogroupes. En France, Leptospira icterohaemorragia est le sérogroupe prédominant (1, 2). Le réservoir est essentiellement constitué par les rongeurs. La contamination se fait, soit directement par exposition à l’urine d’animaux infectés, soit indirectement dans l’eau souillée par ces mêmes urines. Chez l’homme, la contamination est le plus souvent indirecte à travers les muqueuses, les 89 excoriations cutanées ou par inhalation. Cliniquement, la leptospirose est responsable de manifestations variées allant d’un syndrome pseudo-grippal bénin à une atteinte hépato-rénale potentiellement létale. Classiquement, après une phase d’incubation d’environ 10 jours (5 à 21 jours), une fièvre élevée apparaît brutalement algique accompagnée parfois d’un syndrome associant conjonctivite, éruption cutanée et troubles digestifs. Une méningite lymphocytaire et une hémorragie alvéolaire sont fréquentes. Sur le plan biologique, hyper leucocytose et thrombopénie sont fréquentes. Certains auteurs ont décrit des lymphopénies (3). Dans les cas les plus graves (20 % à 40 %), la réanimation est nécessaire. La létalité varie de 2 % à 10 % selon la virulence de la souche (Leptospira icterohaemorragia) et la précocité de la prise en charge (4). Actuellement, la leptospirose est plus fréquemment associée à des activités de loisirs en eau douce et en particulier au canoë-kayak qu’à des circonstances professionnelles (employés de voirie, égoutiers, pisciculteurs)(1). III. MATÉRIEL ET MÉTHODES. A) ENQUÊTE ÉPIDÉMIOLOGIQUE. Le malade appartenait à l’escadron de protection de la base aérienne constitué de quatre groupes de commandos (Codo 10, 20, 30 et 40) et d’un peloton cynophile. Compte tenu de la durée d’incubation de la leptospirose, une étude de cohorte rétrospective a été réalisée parmi les militaires du Codo 40 (auquel appartenait le malade), du Codo 10 et des maîtres-chiens du peloton cynophile présents entre le 29 mai et le 19 juin 2006 sur la BA et lors du passage des enquêteurs. Les membres des autres Codo ont été exclus, car, absents pendant la période d’incubation ou lors du passage des enquêteurs. L’interrogatoire a été réalisé à l’aide d’un questionnaire standardisé, élaboré à partir du « questionnaire pour une enquête exploratoire de la leptospirose » mis au point par l’Institut de veille sanitaire et adapté aux spécificités militaires. Le questionnaire a été administré en tête-à-tête par les enquêteurs les 29juin, 5 et 11juillet. Les questionnaires ont été saisis et analysés à l’aide du logiciel EPI INFO 6.04e. Un cas de leptospirose a été défini par la présence de signes évocateurs de leptospirose (fièvre ≥ 38,5 °C avec un syndrome algique) et une sérologie par test de micro-agglutination positive à un titre supérieur ou égal à 100 ou présence d’IgM à un titre supérieur ou égal à 800. Trois postes de garde, le canal qui traverse la BA et les locaux du peloton cynophile ont été visités pour évaluer le risque de transmission de la leptospirose. B) ENQUÊTE ANIMALE. Le Secteur vétérinaire de Marseille a réalisé des piégeages de rongeurs afin d’objectiver la présence de leptospires. Durant le mois d’août 2006, 24 pièges à rongeurs ont été déposés sur la BA et des appâts étaient déposés le soir. Les pièges étaient relevés le matin. Lorsqu’un rongeur était 90 capturé, le piège était ramené au Secteur vétérinaire de Marseille où le rongeur était anesthésié, prélevé et euthanasié. Une Polymerase chain reaction (PCR) a été réalisée sur des prélèvements de tissu rénal à l’aide d’une amorce spécifique du fragment de gène codant pour la sous-unité ß du RNA polymérase (5). Les PCR ont été réalisées par l’unité des rickettsies de la faculté de médecine d’Aix Marseille (Pr D. Raoult). IV. RÉSULTATS. A) DESCRIPTION DU CAS. Le malade, âgé de 18 ans, n’avait pas d’antécédent particulier et ne suivait pas de traitement au long cours. Le 19 juin 2006, il a présenté des nausées, des courbatures et des céphalées. Il a consulté le jour-même son médecin traitant civil qui a diagnostiqué un syndrome pseudogrippal. Le 21 juin, devant l’absence d’amélioration, il a de nouveau consulté son médecin traitant qui lui a prescrit un traitement symptomatique. Le 24 juin, il a été admis à l’hôpital d’Istres pour un syndrome associant un ictère et une hématurie. Il a été transféré dans le service de réanimation de l’HIA Laveran le 25 juin. Le 26 juin, le diagnostic de leptospire a été évoqué devant la positivité du test de dépistage (agglutination Ag TR) et une première sérologie positive au seuil (1/100) pour Leptospira hebdomadis. Trois semaines plus tard, le diagnostic a été conf irmé devant la positivité de la technique de référence (microagglutination de Martin et Petit, MAT) au 1/400 pour L. icterohaemorragiae. La présence d’agglutinines pour plusieurs sérogroupes est fréquente au début de la maladie et explique les réactions croisées avec Leptospira hebdomadis. L’augmentation significative des anticorps lors du second prélèvement nous a donc permis de confirmer l’infection à L. icterohaemorragiae. Le malade a bénéficié d’un traitement par pénicilline G en intraveineuse puis par amoxicilline per os. Il a guéri sans séquelles. Il a bénéf icié d’un mois de congé maladie à l’issu duquel il a rejoint son unité. Compte tenu de la durée d’incubation de la leptospirose, le recueil d’information a porté sur les trois semaines ayant précédé l’apparition des signes cliniques, soit du 29 mai au 19 juin. Au cours des 21 jours qui ont précédé l’apparition des signes cliniques, le malade a été présent sept jours à la BA. Le 30 mai, le malade a participé avec six autres militaires du Codo 40 à un exercice de « rusticité ». Cet exercice consistait entre autre à s’immerger dans le canal qui traverse la base et à passer sous un pont. La tenue était la même pour les sept commandos et leur instructeur : un tee-shirt et un pantalon de treillis. Le malade, contrairement à ses camarades, ne s’est pas douché immédiatement après la fin de l’exercice mais environ une heure plus tard. Les jours où le malade n’était pas présent à la BA, il était, soit en repos après une garde, soit en récupération à son domicile. Pendant ces périodes, le malade n’a pratiqué l. ollivier aucune activité pouvant l’avoir mis en contact avec des rongeurs ou avec de l’eau susceptible d’être souillée par leurs déjections. En particulier, le malade n’a pratiqué aucune autre activité aquatique en eau douce. Il a eu des contacts quotidiens et directs avec son chien et ceux de son amie. Il n’a pas effectué de séjour à l’étranger pendant la période incriminée. B) ENQUÊTE ÉPIDÉMIOLOGIQUE. 1. Enquête auprès des personnels. Sur les 44 membres du Codo 40, dix étaient absents pendant toute la période allant du 29 mai au 19 juin. Sur les 34 militaires restants, 21 (61,8 %) ont été interrogés. Sur les 41 membres du Codo 10, cinq étaient absents pendant toute la période incriminée. Sur les 36 militaires restants, 16 (44,4 %) ont été interrogés. Au total, 52,8 % (37/70) des commandos de l’armée de l’Air présents pendant la période incriminée ont été interrogés (tab. I). Les onze maîtres-chiens ont été par ailleurs interrogés. Au total, 48 militaires ont été interrogés, 1 malade et 47 non malades ou témoins. Tableau I : Caractéristiques des militaires interrogés dans le cadre de l’investigation du cas de leptospirose (Base aérienne, juin-juillet 2006). Caractéristiques Figure I : Canal de pont utilisé pour l’exercice de rusticité. l’exercice de « rusticité », le passage sous le pont et les abords du canal ont été examinés (fig. 1, 2). La présence de roseaux sur les berges, l’existence de puits perdus à proximité des berges constituaient des niches pour les rongeurs et favorisaient leur pullulation. Sur les trois postes de garde visités, un seul présentait des risques d’exposition à la transmission de la leptospirose. Dans ce poste de garde, un local était utilisé pour la confection des sandwiches consommés pendant les nuits de garde. Lors de la visite de ce local, des déchets alimentaires étaient présents sur les câbles électriques situés à même le sol. Le local présentait des orifices susceptibles de laisser pénétrer des rongeurs. n % Masculin 47 97,9 Féminin 1 2,1 Total 48 100,0 Groupe 40 21 43,8 Groupe 10 16 33,3 Maître chien 11 22,9 V. DISCUSSION. Total 48 100,0 L’analyse statistique n’a pas permis d’identifier le lieu de contamination et les facteurs de risque. Cependant, Genre C) ENQUÊTE ANIMALE. Unité d’appartenance Pendant la première semaine de piégeage, sept surmulots ont été capturés : quatre mâles et trois femelles. Aucun autre rongeur n’a été piégé par la suite. Les examens par PCR sur tissu rénal étaient négatifs. L’âge moyen au moment de l’interrogatoire était de 24,2 ans (IC95 % = (20-27), médiane = 23,5 ans, extrêmes = (18-40)). Une recherche active d’autres cas a été réalisée par interrogatoire auprès des commandos de la BA, aucun n’a été malade. Une sérologie de dépistage de la leptospirose a été proposée à tous les militaires inclus dans l’étude. Les sérologies étaient toutes négatives vis-à-vis de la leptospirose. Par manque de puissance, l’analyse statistique n’a pas permis d’identifier le lieu de contamination et les facteurs de risque. 2. Enquête sur les lieux de travail. Les investigations ont eu lieu le 29 juin et le 5 juillet 2006. Le lieu d’immersion des militaires dans le cadre de investigation autour d’un cas de leptospirose chez un commando de l’armée de l’air Figure 2. Abord du canal montrant une végétation dense. 91 l’analyse de l’emploi du temps du malade et la visite des différents lieux fréquentés par le malade entre le 29 mai et le 19 juin font suspecter l’immersion dans le canal au cours de l’exercice de « rusticité » du 30 mai. En effet, c’est le seul moment où le malade a été en contact avec de l’eau douce non traitée. Par ailleurs, le malade n’avait pas séjourné dans le poste de garde où il existait un risque réel d’exposition à la leptospirose. Toutes les PCR sur tissu rénal murin étaient négatives mais elles avaient été effectuées sur un échantillon de surmulots trop faible pour exclure la présence de leptospires pathogènes dans l’environnement et la contamination d’eau douce. En effet, dans une enquête réalisée dans la région nantaise en 2003, 5 des 26 surmulots capturés (19,2 %) avaient une PCR positive (IC95 % = (6,6-39,4)) (6). Des mesures ont été proposées au commandement. À court terme, il a été conseillé d’interdire les baignades et les exercices dans le canal et de faire réaliser son curage ainsi que le faucardage des berges. À moyen terme, il a été conseillé de réaliser des travaux de rénovation du local où étaient confectionnés les sandwiches. En France métropolitaine, le taux d’incidence de la leptospirose à L. icterohaemorrhagia est en diminution. Depuis 1998, la leptospirose à L. icterohaemorrhagia a touché moins d’une centaine de personnes par an soit un taux d’incidence annuel inférieur à 0,5 cas sur 100 000 habitants. Plus de la moitié des cas déclarés sont survenus au sein de la population inactive française : les étudiants ou les retraités. Les loisirs aquatiques pour les étudiants et les activités de pêche et de chasse sont probablement à l’origine de ces contaminations (1, 2). D’après les données disponibles, neuf cas de leptospirose ont été déclarés chez des personnes habitants dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) en 1995-1996 ; six cas entre 1998 et 2000, et un cas en 2003 (cellule interrégionale d’épidémiologie Sud, données non publiées). Sur le plan géographique, le centre national de référence des leptospires distingue les régions sèches (PACA et Languedoc-Roussillon) où le taux d’incidence moyen calculé entre 1991 et 2003 était faible (respectivement 0,09 et 0,19 cas pour 100 000) des régions plus humides (Franche-Comté, Champagne-Ardenne, Aquitaine et Poitou-Charentes) où les taux d’incidence moyens étaient supérieurs à 1,09 cas pour 100 000 pour la même période (2). La survenue d’un cas de leptospirose est donc rare en région PACA. Dans les armées, l’incidence déclarée de la leptospirose a diminué passant de neuf cas en 1998 à un cas en 2006. La diminution du taux d’incidence était signif icative (passant de 2,0 à 0,3 cas pour 100 000 entre 1998 et 2006 ; p = 0,05). Pour autant, le risque persiste dans les armées. En effet, en 2001, cinq cas de leptospirose à L. tarrassovi ont été déclarés au sein d’une même section effectuant une mission de courte durée en Martinique. Le taux d’attaque était de 20 %. L’enquête épidémiologique avait permis d’identifier les circonstances de survenue. La section avait effectué un raid de deux jours dans le sud de la Martinique. Suite à une erreur topographique, elle avait traversé une ravine inondée pendant plusieurs heures. L’immersion prolongée dans cette ravine a été mise en cause puisque aucun cas de leptospirose n’était survenu dans les autres sections qui avaient participé à ce raid en respectant le parcours (7). VI. CONCLUSION. De part, leurs activités professionnelles, susceptibles de les exposer, directement ou indirectement aux urines de rongeurs, les militaires constituent une population exposée. Il convient donc d’être vigilant. Enf in, même si les enquêtes épidémiologiques et animales n’ont pas identif ié de façon formelle le lieu et le moment de contamination, elles ont réuni un faisceau d’arguments mettant en cause le canal traversant la BA comme lieu probable de la contamination. Ces enquêtes témoignent de l’importance d’une collaboration étroite entre médecins d’unités, infectiologues, épidémiologistes et vétérinaires. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Conseil supérieur d’hygiène publique de France. Nouvelles recommandations relatives à la prévention du risque chez les personnes exposées à la leptospirose. Rapport du groupe de travail présenté et adopté lors de la séance du 18 mars 2005. Disponible sur : URL : http://www.sante.gouv.fr/htm/pointsur/zoonose/4z.htm 2. Baranton G, Postic D. 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La confirmation diagnostique est surtout histologique par la présence de cellules de Mikulicz et bactériologique par l’isolement du germe. Nos trois cas ont été traités par ciprofloxacine, pendant au moins six semaines, avec une évolution favorable. Mots-clés : Diagnostic. Rhinosclérome. Traitement. I. INTRODUCTION. Le rhinosclérome est une infection granulomateuse chronique due au Klebsiella Rhinoscleromatis. Elle atteint essentiellement les voies aériennes supérieures. C’est une pathologie qui pose des diff icultés diagnostiques à l’étape clinique et anatomopathologique. Nous rapportons trois observations, suivies dans le service d’ORL et de chirurgie cervico-faciale de l’hôpital militaire Avicenne de Marrakech au Maroc, avec revue de la littérature. ABSTRACT RHINOSCLEROMA. A THREE-CASE REPORT AND REVIEW OF THE LITERATURE. Rhinoscleroma is a chronic granulomatous infection, with lesions most frequently affecting the respiratory tract mucosa. This infection is due to an enterobacteria of the family of klebsiella: Klebsiella rhinoscleromatis. We report three clinical observations and review of the literature. The diagnosis is not easy. The diagnostic confirmation is mainly histological by the presence of Mikulicz cells and bacteriological by isolation of germ. Our patients were treated with Ciprofloxacin during six weeks. The evolution was favorable. Key words: Rhinoscleroma, diagnosis, treatment. (Médecine et Armées, 2008, 36, 1, 93-96) hypertrophique mamelonnée, surtout au niveau de la narine gauche, le reste de l’examen ORL étant sans particularité. Une Tomodensitométrie (TDM) laryngotrachéale a montré une sténose sous glottique concentrique (f ig. 1). La laryngoscopie directe en suspension sous anesthésie générale a montré une II. OBSERVATION N° 1. Patient, âgé de 28 ans, originaire du sud-est du Maroc (Erfoud), sans aucun antécédent pathologique, vu en consultation ORL pour dyspnée chronique, d’aggravation progressive et raucité de la voix. L’examen clinique a montré un élargissement de la pyramide nasale. La rhinoscopie antérieure a montré une muqueuse nasale H. AMMAR, médecin commandant. F. BENARIBA, médecin commandant. M. TOUATI, médecin capitaine. I. ZRARA, médecin commandant, professeur agrégé du SSA. M. ALOUANE, médecin colonel. Correspondance : H. AMMAR, médecin commandant, spécialiste en ORL et CCF, hôpital militaire Avicenne, 40 000 Marrakech Maroc. médecine et armées, 2008, 36, 1 Figure 1. Tomodensitométrie laryngo-trachéale en coupe axiale montrant une sténose concentrique sous glottique. 93 muqueuse laryngée saine, un épaississement des deux cordes vocales mobiles. La région sous glottique est le siège d’une sténose circulaire étendue sur environ 6 mm, le reste de la muqueuse trachéale étant saine. Des biopsies ont été faites au niveau de la muqueuse nasale, des cordes vocales et de la zone sous glottique sténosée. L’étude histologique des biopsies a montré un infiltrat inflammatoire où prédominent des plasmocytes et des histiocytes. Le cytoplasme de ces derniers présente des corps figurés pas positifs évoquant un rhinosclérome (fig. 2). L’examen bactériologique du broyat de la biopsie a isolé le Klebsiella Rhinoscleromatis. Le diagnostic de rhinosclérome est retenu et le patient est mis sous antibiothérapie prolongée à base de ciprofloxacine pendant six mois à la dose de 1,5 g par jour. Une nette amélioration a été notée, clinique et scanographique au bout de deux mois ; le patient n’est plus dyspnéique mais garde une légère raucité de la voix. Figure 3. Ensellure nasale par destruction du cartilage de la cloison nasale. L’évolution est favorable avec nettoyage des lésions nasales sans gêne respiratoire. Une rhinoseptoplastie esthétique a été réalisée après deux ans de surveillance rigoureuse affirmant l’absence de récidive de l’affection initiale. Figure 2. Infiltrat inflammatoire où prédominent les plasmocytes et histiocytes. Le cytoplasme de ces derniers présente des corps figurés PAS positifs, devant faire évoquer en premier lieu un rhinosclérome. Figure 4. Infiltrat massif riche en histiocytes. (HE x 10). III. OBSERVATION N° 2. Il s’agit d’un patient, âgé de 42 ans, originaire du sud-est du Maroc (Ouarzazat) et qui présentait depuis quatre ans une obstruction nasale intermittente et une rhinite chronique croûteuse pour lesquelles il a été traité médicalement sans succès. L’interrogatoire a noté une sœur traitée pour tuberculose pulmonaire. À l’admission, le patient présentait une ensellure de la pyramide nasale (fig.3). La rhinoscopie antérieure a montré une muqueuse nasale polypoïde à surface ulcérée et une perforation large du cartilage septal. Le reste de l’examen ORL est sans particularité. Les diagnostics évoqués à ce stade sont : polychondrite chronique atrophiante, tuberculose, lèpre, syphilis et maladie de Wegener. Le bilan biologique et la biopsie nasale avec étude histologique ont éliminé tous ces diagnostics et ont évoqué un rhinosclérome (fig. 4), confirmé par l’étude bactériologique. Le patient est mis sous ciprofloxacine pendant six semaines. 94 IV. OBSERVATION N° 3. Il s’agit d’un patient, âgé de 47 ans, originaire de Casablanca, hospitalisé dans le service ORL pour dyspnée chronique évoluant depuis 18 mois, associée à une obstruction nasale chronique prédominant à gauche. À l’admission, l’examen a montré une ensellure nasale avec chute de la pointe du nez. La rhinoscopie antérieure a montré un processus tumoral rosâtre occupant les deux narines et prédominant à gauche, sans saignement au contact. L’examen bucco-dentaire montre une mobilité des incisives prises dans une tuméfaction gingivale s’étendant du vestibule sous labial supérieur jusqu’au palais dur (fig. 5). L’examen au nasofibroscope a montré un larynx normal et mobile et une sténose sous glottique circulaire étendue sur environ 10 mm, confirmée par la TDM laryngo-trachéale (f ig. 6). Sous anesthésie générale, des biopsies ont été faites au niveau nasal, h. ammar Figure 7. Infiltrat inflammatoire composé de lymphocytes, de plasmocytes et de rares histiocytes abritant des corps figurés devant faire évoquer en premier lieu, un rhinosclérome. d’un préjudice esthétique au niveau de la pyramide nasale et de l’arcade dentaire. Après deux ans de surveillance, une rhinoseptoplastie et une prothèse dentaire ont été réalisées. V. DISCUSSION. Figure 5. Rhinosclérome nasal étendu au vestibule sous labial supérieur et au palais dur avec chute des incisives supérieures. gingival et sous glottique. L’étude histologique a éliminé un processus tumoral malin et a fortement évoqué le diagnostic de rhinosclérome (fig. 7) qui est confirmé par la bactériologie. Le patient est mis sous ciprofloxacine pendant huit semaines à la dose 1,5 g par jour. Le patient a bénéficié d’une désobstruction nasale par voie endoscopique. L’évolution est marquée par une amélioration nette de la dyspnée mais avec persistance Figure 6. TDM laryngo-trachéale en coupe axiale montrant une sténose concentrique sous glottique. le rhinosclérome Le rhinosclérome est une affection granulomateuse chronique et spécifique, due à une entérobactérie de type klebsiella (klebsiella rhinoscleromatis) qui possède un tropisme pour les voies aériennes supérieures (1). Les lésions se développent habituellement dans les fosses nasales mais peuvent s’étendre vers toute la filière respiratoire jusqu’aux bronches (cas de notre première et troisième observations). Les lésions sont souvent discontinues avec des intervalles de muqueuse saine. Cette infection est endémique en Afrique noire, en Égypte, en Asie (Inde et Indonésie), en Europe centrale et en Amérique du sud et centrale. Au Maghreb, il existe des foyers au Maroc et en Algérie et à un moindre degré en Tunisie (1, 2). La revue de la littérature a montré des cas de rhinosclérome, dans des zones non endémiques, ce qui s’explique par l’importance des mouvements d’immigration (3). Le rhinosclérome sévit dans les populations pauvres (3) à grande promiscuité et se trouve potentialisé par des terrains d’immunodépression. La transmission du germe se fait par contact direct avec les sécrétions nasales. Des cas familiaux sont notés dans 20 % des cas (1, 4). Sur le plan clinique, il est difficile de porter le diagnostic au stade de début sauf dans les zones endémiques. On décrit à la lésion quatre stades : exsudatif, catarrhal, atrophique, infiltrant et le stade de fibrose. Nos trois malades sont vus au stade d’infiltration. La dyspnée et la dysphagie par atteinte laryngo-trachéale sont notées par les auteurs dans 15 % à 80 % des cas (5, 6). Ainsi, l’épiglotte peut être déviée, atrophique ou détruite. La glotte prend un aspect ovalaire avec des tuméfactions nodulaires ou des synéchies commissurales. L’atteinte de la sous glotte est très fréquente, sous forme d’une 95 inf iltration concentrique, diffuse évoluant vers la sténose (7). C’est le cas de notre première et troisième observations. Certains auteurs rapportent des extensions naso sinusiennes (8), cutanées (9) et du palais dur (9, 10) ce qui est le cas de notre troisième patient. L’imagerie clinique, notamment, TDM et l’Imagerie par résonance magnétique (IRM), ainsi que l’endoscopie sont indispensables, pour préciser le siège et l’extension des lésions muqueuses et cartilagineuses, pour apprécier l’importance de la sténose laryngo-trachéale et pour permettre la surveillance après traitement (régression, stabilité ou évolutivité des lésions). Le diagnostic différentiel se pose, surtout au stade d’infiltration et de fibrose, avec la tuberculose d’autant que le Maroc est un pays d’endémie tuberculeuse. Le diagnostic différentiel se pose aussi avec la syphilis, la lèpre et la granulomatose de Wegener (1). Pour notre deuxième cas, nous avons évoqué aussi une polychondrite chronique atrophiante devant la présence d’une ensellure nasale. Le diagnostic positif est posé par l’anatomopathologie et la bactériologie. L’aspect histologique caractéristique est une inf iltration sous muqueuse avec de grands histiocytes spumeux vacuolés, dénommés cellules de Mickulicz qui sont pathognomoniques du rhinosclérome et qui contiennent dans leur cytoplasme des Klebsiella rhinoscleromatis (11). Il existe un inf iltrat lympho plasmocytaire avec des corps de Russel correspondant à des plasmocytes dégénérés (1). La culture de Klebsiella rhinoscleromatis, en milieu usuel et spécif ique des entérobactéries est plus lente que celle des autres bactéries. Dans notre étude, la conf irmation bactériologique n’est obtenue que dans le deuxième cas. Le traitement de rhinosclérome est essentiellement médical. Plusieurs antibiotiques ont été utilisés : tétracycline, streptomycine, gentamycine, kanamycine, thiomphénicol, céphalosporine, sulfamide et ciprofloxacine. Des auteurs ont noté la supériorité de la ciprofloxacine et de la rifampicine (12). Au Maroc, la streptomycine et la rifampicine sont réservées au traitement de la tuberculose puisque nous sommes un pays d’endémie et sont donc rarement utilisées pour le traitement de rhinosclérome. Nos trois patients ont été traités de façon prolongée pendant plus de six semaines par ciprofloxacine. L’exérèse chirurgicale des bourgeons tumoraux s’adresse aux lésions f ibroscléreuses inaccessibles au traitement médical et la chirurgie réparatrice aux destructions ostéocartilagineuses (13). Le laser peut être utilisé pour désobstruer les voies aériennes supérieures dans les formes étendues (4, 7). Deux de nos patients ont bénéf icié d’une rhinoseptoplastie pour corriger l’ensellure nasale. Le geste chirurgical a été réalisé deux ans après guérison de la maladie. VI. CONCLUSION. Le rhinosclérome est une affection granulomateuse chronique des voies aériennes supérieures, due à klebsiella rhinoscleromatis. En dehors des zones endémiques, le diagnostic est difficile à porter au stade de début. Le diagnostic positif est posé par l’étude anatomopathologique par la présence de cellules de Mickulicz et bactériologique par l’isolement du germe. Le traitement repose essentiellement sur l’antibiothérapie adaptée et prolongée. Le pronostic est souvent bon et le contrôle de guérison nécessite une surveillance rigoureuse et prolongée. La prévention passe par une amélioration socio-économique de la population dans les zones endémiques. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Ennouri A HH, El Mezni F. Sclérome et rhinosclérome. Encycl Med. Chir Oto-Rhino-Laryngologie 1991 ; 20380A10 : 6 p. 2. Ben Zekri L JR, El Ouazzani T, Rolier R et al. Sclérome au Maroc. À propos de 11 cas. J.F.ORL 2000 ; 49 (6) : 338-42. 3. Fernandez-Vozmediano JM, Armario Hita JC, Gonzalez Cabrerizo A. Rhinoscleroma in three siblings. Pediatr Dermatol 2004 ; 21 (2) : 134-8. 4. 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