Guide stabilité des écluses - Direction technique Eau, mer et fleuves
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Guide stabilité des écluses - Direction technique Eau, mer et fleuves
direction de l’Infrastructure et de l’Environnement outils Guide stabilité des écluses Centre d’Études Techniques Maritimes Et Fluviales Sommaire Sommaire Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse . . . . . . . . . . . 3 Éléments de fonctionnement d’une écluse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 8 Principes de fonctionnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 8 Types d’écluse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 8 Description de quelques éléments constituant une écluse . . . . . . . . . . . . 6 Éléments de dimensionnement d’une écluse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 8 Circulations hydrauliques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 8 Éléments de dimensionnement des bajoyers . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 8 Éléments de dimensionnement des radiers . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 8 Conclusion 16 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Éléments d’évaluation de l’état et du comportement d’une écluse avant et pendant . . 8 Dégradation naturelle et physico-chimique des matériaux 17 . . . . . . . . . . . 17 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 8 Les actions de l’eau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 8 Les sollicitations mécaniques Réalisation d’une vidange d’entretien . . . . . . . . . . . 29 Définition des étapes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 8 Géométrie générale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 8 Données du site . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 Synthèse n°1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 8 Travaux antérieurs - Archives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 Expériences précédentes de vidanges 34 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34 8 Observations sur l’état de l’écluse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34 Synthèse n°2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 8 Réflexion – Faisabilité de la vidange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 8 Investigations complémentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 8 Travaux de confortement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40 8 Déroulement de la vidange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45 Fiche de suivi de la méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46 Exemple d’application de la méthodologie « vidange du sas d’une écluse » . . . . . . . . . . . . . . 49 Fiche n°1 : Écluse de Port à l’Anglais . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50 Fiche n°2 : Écluse n°2 de Damery . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54 Fiche n°3 : Écluse des Quatre Cheminées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58 Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 1 > > Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse. Cette partie est constituée de trois chapitres et aborde de manière générale le fonctionnement d’une écluse. 8Le premier chapitre présente les schémas type d’écluses et les différentes configurations qu’elles peuvent avoir par rapport à la voie d’eau. 8Le second chapitre comporte quelques éléments permettant d’appréhender le dimensionnement de certaines parties de l’écluse. 8Le troisième détaille les éléments à observer en particulier afin d’établir un prédiagnostic concernant l’état de l’écluse. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 3 Éléments de fonctionnement d’une écluse Principes de fonctionnement Les écluses à sas, dont la première fut construite au XIVe siècle aux Pays-Bas, permettent aux bateaux de franchir des dénivelés du plan d’eau (permanents sur les voies d’eau intérieures, temporaires et liés à la marée sur les voies d’eau littorales en liaison avec la mer). Les dénivelés (« hauteur de chute ») varient dans de grandes proportions et peuvent atteindre 35 m (34,5 m à Carrapatelo sur le Douro au Portugal) voire plus (42 m à Ust-Kamenogorsk en Russie). En France, c’est l’écluse de Bollène sur le Rhône qui est la plus grande avec 23 m de hauteur de chute. Le développement de la voie d’eau au XIXe siècle (gabarit « Freycinet ») s’est accompagné de la création de nombreux ouvrages de ce type avec des hauteurs de chute de l’ordre de quelques mètres. Actuellement ce sont ces ouvrages qui sont les plus nombreux. D’autres écluses plus importantes ont été construites par la suite, les dernières sur le canal du Nord, dans les années 60, dont la hauteur de chute varie de 4 à 8 m. Le fonctionnement d’une écluse consiste à moduler le niveau d’eau dans le sas de façon gravitaire : 8 Fermé et mis en relation avec le bief amont (par vantelles ou aqueducs), son niveau monte jusqu’au niveau amont et l’ouverture des portes amont permet soit à un bateau « avalant » d’entrer dans le sas, soit à un bateau « montant » de sortir. 8 Fermé et mis en relation avec le bief aval (par vantelles ou aqueducs) son niveau descend jusqu’à celui du bief aval et l’ouverture des portes aval permet soit à un bateau « montant » d’entrer dans le sas, soit à un bateau « avalant » de sortir. Types d’écluse Dans la suite du rapport, le type d’écluse n’est pas un paramètre majeur dans l’analyse de la stabilité durant la mise à sec. Toutefois, en guise d’exemple et afin de synthétiser le vocabulaire nécessaire, la structure générale d’une écluse de type Freycinet est présentée (figure 1). Ces écluses présentent une longueur de 39 à 42 m et une largeur de 5,2 à 6 m. Les dimensions du bateau Freycinet sont quant à elles de 38,5 m de long, 5,05 m de large et 2, 2 m d’enfoncement maximal. 4 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Tableau 1 : Voie \ Ecluse Largeur (m) Hauteur de chute (m) Moselle canalisée Longueur (m) 176 12 4.3 3,50 Canal latéral à l’Oise 100 12 3.1 3,50 Deûle 144,6 12 __ 4,20 91,6 6 4à8 3,00 Canal du Nord Mouillage* (m) 8 Mouillage = enfoncement + pied de pilote 8 Enfoncement = profondeur du bateau 8 Tirant d’eau = enfoncement Figure 1 : Schéma d’une écluse de type Freycinet. Berge Bief amont Facteurs Contre-fosse de drainage Estacade de guidage Vantelle Tête amont Crémaillère Cabine de commande Porte busquée (deux vantaux) Entretoise Faux-busc Mur de chute Busc 8 Un des facteurs importants est l’emplacement de l’écluse par rapport au cours d’eau ou au canal. On peut ainsi distinguer (figure 2) : 4les écluses en canal. 4Les écluses en rivière accolées au barrage. 4Les écluses en rivière implantées en dérivation. Radier Bajoyer Chardonnet Sas Bitte d'amarrage Rainure à batardeau Tête aval Echelle limnimétrique Enclave de vantail Mur de garde Chambre des vantaux Faux-busc Perré La distinction est nécessaire car suivant l’emplacement de l’écluse, les écoulements hydrauliques ainsi que les efforts transmis à la structure sont différents. 8 Le second facteur est la hauteur de chute qui conditionne ensuite la hauteur des bajoyers. 8 Le troisième facteur est le mouillage qui conditionne les efforts dus à la masse d’eau intérieure au sas qui s’exercent sur les bajoyers et le radier et qui s’annulent lors de la vidange Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse Le tableau 1 synthétise quelques exemples d’écluses sur le territoire français. Musoir Mur de fuite Estacade de guidage Bief aval Figure 2 : Position de l’écluse Figure 2a : Écluse en canal Figure 2b : Écluse en rivière en dérivation Figure 2c : Écluse en rivière accolée à un barrage. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 5 Description de quelques éléments constituant une écluse il est nécessaire de rappeler que sauf conception exceptionnelle, une écluse constitue une structure étanche. Un plan détaillant précisément la structure d’une écluse à sas est présenté figure 3. La suite de cette partie permet de revenir sur 5 éléments particuliers : les bajoyers, le radier, les têtes et leur rainure de batardeau, les portes et le système d’alimentation. Cette description est bien-sûr incomplète puisque des parties comme les bassins d’épargne ou les stations de pompage ont été volontairement omises, mais elle se focalise avant tout sur les éléments mécaniques de l’écluse qui jouent un rôle dans la stabilité de celle-ci. Bajoyers Les bajoyers sont fonctionnellement conçus comme des soutènements et peuvent donc être soit des murs poids, soit des rideaux. Ils présentent donc des formes diverses et variées. Ils sont dans la majorité des cas en maçonnerie mais ils peuvent être en béton armé ou non ou encore en acier dans le cas de rideaux de palplanches. Ils peuvent présenter un fruit plus ou moins important. Leur épaisseur dépend de la hauteur et de la nature de terrain qu’ils soutiennent, de la hauteur d’eau minimale qui a été prise en compte dans le dimensionnement et du fait qu’ils peuvent être tirantés ou non. La manière dont ils sont liés ou non au radier est encore une autre variable. Ces deux structures peuvent être totalement encastrées l’une dans l’autre ou inversement être entièrement disjointes. La liaison bajoyer-radier influe fortement sur le comportement mécanique du sas. Radier L’absence de radier peut se rencontrer en cas de fondation au rocher (imperméable) ou de volonté particulière impliquant alors l’impossibilité de vidange complète du sas. Le radier joue le rôle d’étanchéité et éventuellement de répartition des efforts sur le sol sous-jacent (semelle) et/ou de buton aux bajoyers. En cas de liaison aux bajoyers, il participe au soutènement des terres. L’absence de radier peut se rencontrer en cas de fondation au rocher (imperméable) ou de volonté particulière impliquant alors l’impossibilité de vidange complète du sas.Les radiers possèdent aussi des natures et des formes variées. Ils peuvent être plans ou en forme de voûte inversée, munis ou non d’évents. Le radier peut constituer une fondation superficielle. Dans d’autres cas, le radier peut être mis en œuvre sur des pieux. Le radier est le plus souvent en maçonnerie, en bois ou en béton armé ou non. La manière dont il peut être relié aux bajoyers est une caractéristique importante : encastré, appuyé, disjoint voire flottant. Portes Les différents types de portes qui peuvent être distingués dépendent surtout de la manière dont elles fonctionnent (en rotation et suivant quel axe ou en translation et suivant quelle direction) : 8 axe de rotation vertical : portes busquées, portes à un seul vantail, portes secteurs, 8 axe de rotation horizontal : portes tournantes et portes segments, 8 translation horizontale : portes levantes, 8 translation verticale : portes roulantes. Les portes busquées sont les plus courantes. Il est à noter que le type de porte conditionne la forme des têtes et donc de manière indirecte le comportement mécanique de ces dernières. 6 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Les têtes amont et aval de l’écluse ont le même type de comportement et les mêmes caractéristiques (nature des matériaux, forme) que les bajoyers. Ce sont des soutènements reprenant en plus les efforts dus aux portes. Les rainures de batardeau permettent d’insérer les batardeaux dans la structure de l’écluse. L’interaction entre le batardeau, la rainure et la tête est extrêmement sensible car des efforts relativement importants s’exercent sur des surfaces de contact relativement restreintes. En particulier, il faut veiller à tout défaut géométrique qui pourrait entraîner une concentration de contrainte susceptible de dégrader l’écluse. Figure 3 : Écluse à sas (D’après le rapport final de la Commission Internationale pour l’Étude des Écluses, 1982). AA Plan. BB Coupe longitudinale. SAS 28. Chambre de porte. 29. Enclave de porte. 30. Mur de chute. 31. Mur de masque. 32. Parafouille. 12. Bajoyer. 13. Couronnement. 14. Arête de couronnement. 15. Joint de dilatation. 16. Radier du sas. 17. Avant-radier. 18. Arrière-radier. DONNÉES CARACTÉRISTIQUES 1. Niveau de flottaison du bief amont. 2. Niveau de flottaison maximum du bief amont. 3. Niveau de flottaison du bief aval. 4. Niveau des plus hautes eaux navigables. 5. Hauteur de chute. 6. Mouillage sur busc amont. 7. Mouillage sur busc aval. 8. Tirant d’air entre les plus hautes eaux navigables aval et le mur de masque. 9. Largeur utile du sas. 10. Longueur utile du sas. 11. Revanche. PORTES 33. Porte amont. 34. Ventelle. 35. Porte de garde. 36. Porte aval. TÊTES D’ÉCLUSE 19. Tête d’amont. 20. Tête d’aval. 21. Radier de tête. 22. Bajoyer de tête. 23. Mur en retour. 24. Musoir. 25. Rainure pour batardeau. 26. Appui de porte (battée) ; dans le cas de portes busquées : chardonnet. 27. Busc (seuil). ÉQUIPEMENT DES BAJOYERS 37. Bollard de couronnement. 38. Bollard flottant. 39. Organeau (bollard encastré). 40. Échelle et rainure d’échelle. 41. Échelle d’extrémité. 23 23 25 22 26 12 22 24 Il est nécessaire d’entretenir réguliérement les têtes et rainures de batardeau afin de pouvoir reprendre tous les efforts transmis par le batardeau sur les têtes amont ou aval. Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse Les têtes et rainures de batardeau 26 30 41 29 41 14 13 25 41 25 41 25 9 10 24 25 41 28 13 40 22 2 25 41 25 22 12 19 20 23 23 35 33 15 37 13 11 1 25 34 6 27 32 30 41 12 40 5 17 32 31 15 15 39 41 38 8 21 32 16 25 3 4 36 7 7 32 27 21 32 18 32 Alimentation L’alimentation en eau peut être effectuée suivant plusieurs principes 8 Par les têtes : ouvertures des portes (faible chute et petit gabarit), vantelles sur les portes (faible chute jusqu’à 5 à 6 m), par contournement de têtes (un ou deux aqueducs en tête, jusqu’à 6 m). 8 Par aqueducs longitudinaux : aqueducs et larrons dans les bajoyers (chute jusque 12 m), aqueducs longitudinaux et larrons sous le radier (fortes chutes). 8 Solution mixte. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 7 Éléments de dimensionnement d’une Classiquement, la stabilité générale d’une écluse résulte de l’équilibre des efforts suivants : 8 Pressions hydrostatiques : nappe, rivière ou canal adjacent (sur les bajoyers, les têtes et le radier) 8 Efforts dynamiques dus aux mouvements d’eau (entrée/ sortie du bateau, hélices, batillage, écoulements dus à la vidange et au remplissage du sas) 8 Pressions du sol (sur les têtes, les bajoyers et le radier) 8 Efforts dus aux équipements : portes, vannes d’alimentation en eau 8 Efforts d’exploitation : amarrage, accostage, superstructures, surcharges … 8 Séismes (dans les zones à risque sismique). écluse Les écluses sont des ouvrages qui présentent un comportement mécanique relativement complexe. En effet, les conditions auxquelles elles sont soumises sont sévères. Les bajoyers et les têtes amont et aval des écluses sont soumis d’une part aux poussées des terrains adjacents et d’autre part aux montées et descentes cycliques du niveau d’eau. Ces conditions particulières d’exploitation font que les efforts s’exerçant sur des structures de ce type sont assez difficiles à appréhender. Les différents types d’efforts sont associés à des fonctionnements spécifiques de l’écluse. Comme ce guide traite avant tout de la stabilité des écluses pendant les vidanges d’entretien, seuls quelques aspects de l’étude de l’équilibre d’une écluse vont être abordés. Ce chapitre est donc constitué de trois parties. La première est une présentation succincte des circulations d’eau autour d’une écluse et des phénomènes qu’ils peuvent induire. Les deux suivantes sont respectivement consacrées au dimensionnement des bajoyers et des radiers en mettant en avant les éléments d’hydraulique des sols présentés précédemment. L’effet des pressions hydrostatiques est notamment primordial durant les vidanges nécessaires à l’entretien des écluses. En effet, le fait de vider totalement le sas induit des contraintes supplémentaires sur la structure ainsi que des circulations d’eau qui peuvent mettre en péril la stabilité de l’écluse. Circulations hydrauliques Par définition, une écluse permet de relier deux plans d’eau ayant des cotes différentes. Sur le plan hydraulique, ceci se traduit par des circulations d’eau entre le bief amont et le bief aval, entre la rive gauche et la rive droite ou plus généralement entre deux zones de l’écluse où la charge hydraulique est différente. La charge hydraulique H (en m) est définie en un point par : H=z+u/Yw+v2/2g avec : z, la cote en m de ce point u, la pression interstitielle en kPa en ce point 8 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France En général, la vitesse v de l’eau dans les sols est négligée étant donné les conductivités hydrauliques plutôt faibles qui peuvent être mesurées. La charge hydraulique en un point ne dépend alors que de la cote de ce point et de la pression interstitielle en ce point. On a donc la définition suivante : H=z+u/Yw La vitesse d’écoulement de l’eau entre 2 points dans un sol peut être alors définie par la loi de Darcy : v=k ΔH/ΔL avec : k le coefficient de perméabilité en m/s ΔH la différence de charge hydraulique entre les points amont et aval ΔL la longueur séparant ces deux points, mesurée le long de l’écoulement. On vérifie en appliquant cette relation que la vitesse est toujours négligeable dans le calcul de la charge hydraulique. 8 Le coefficient de perméabilité dépend de la granulométrie du sol et de son état de compacité. En général, il convient de retenir les valeurs suivantes : 8 Argiles : k<10 -8 m/s. 8 Limons : 10 -6<k<10 -8 m/s. 8 Sables et graves : 10 -3 m/s>k>10 -6 m/s. Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse Yw, le poids volumique de l’eau en kN/m3 (Yw=g.w avec la masse volumique de l’eau w=1000 kg/m3) v, la vitesse de l’écoulement en m/s en ce point g, l’accélération de la pesanteur en m/s2 ( g=9,8 m/s2 ). Les efforts dus à l’écoulement sont donc plus importants dans les sables et les graves. Le schéma figure 4 représente la diminution des pressions interstitielles sous une écluse. À la cote z=0 m, la charge hydraulique diminue d’une valeur H1 vers une valeur H2. Comme l’altitude est constante, la différence entre les charges hydrauliques amont et aval provient d’une différence de pressions interstitielles. Figure 4 : Diminution des pressions interstitielles sous une écluse. La différence de charge hydraulique entre deux points induit un écoulement entre ces deux points. Cet écoulement génère à son tour des efforts sur les sols ou les structures à travers lesquels il transite. Les efforts sont d’autant plus importants que la différence de charge entre ces deux points est importante et que la distance entre ces deux mêmes points est faible. La valeur de l’effort induit par l’écoulement est aussi proportionnelle à la perméabilité du sol. Les efforts sont d’autant plus importants que la différence de charge entre ces deux points est importante et que la distance entre ces deux mêmes points est faible. La valeur de l’effort induit par l’écoulement est aussi proportionnelle à la perméabilité du sol. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 9 Avant d’examiner plus en détail l’effet de l’eau sur les éléments composant l’écluse, il convient de distinguer les différents types d’écoulement susceptibles d’exister aux abords d’une écluse : 8 Ceux dans le plan longitudinal à l’écluse qui résultent de la différence de hauteur entre le bief amont et le bief aval (figures 5 et 6). 8 Ceux dans le plan transversal à l’écluse qui résultent de la différence de hauteur entre la nappe d’eau présente dans les remblais s’appuyant sur les bajoyers et le niveau d’eau existant dans le sas (figure 7). Malgré les précautions prises lors du dimensionnement et la construction des écluses, certaines d’entre elles sont encore soumises à des écoulements hydrauliques parasites. Les efforts induits déstructurent le sol de fondation, les remblais adjacents aux bajoyers et imposent des efforts supplémentaires à l’ensemble de la structure. Les écoulements peuvent provoquer une érosion interne qui peut elle-même provoquer des désordres plus ou moins importants, allant parfois jusqu’à la ruine de l’écluse. Il est donc primordial d’identifier les divers mouvements d’eau susceptibles d’entraîner des matériaux. Dans tous les cas de circulation d’eau, le phénomène qui va mettre en péril l’ouvrage est l’érosion : celle-ci peut être interne ou externe. Les sollicitations dues à l’érosion tant interne qu’externe ont la caractéristique d’être cycliques et par conséquent une fois la structure fragilisée, il est fort à craindre que les dommages ne cessent de s’amplifier. L’érosion interne est associée au transport des matériaux sous l’effet d’écoulements internes. On distingue habituellement les phénomènes de renard et de suffusion. 8 Le renard est l’apparition de conduits dans un ouvrage en terre sous l’action de l’eau. 8 La suffusion correspond à un entraînement sélectif des particules : les particules les plus petites sont mises en suspension au passage de l’eau, puis entraînées et il ne reste à la fin que le squelette du sol. Ces deux actions correspondent globalement au même phénomène mais ne se déroulent pas à la même échelle : de l’ordre du centimètre pour le renard et de l’ordre du dixième de millimètre pour la suffusion (on parle aussi de boulance dans le cas de sols sableux et de débourrage dans le cas de sols argileux). L’érosion externe est due aux effets dynamiques de l’eau générés aux abords et dans l’écluse. Il est donc nécessaire de protéger les parties de l’écluse pouvant être soumises aux courants les plus violents. Ces effets dynamiques sont d’autant plus importants que la hauteur de chute est élevée et que le temps d’éclusage est court. 10 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse Figure 5 : Écoulements hydrauliques dans le sens longitudinal (sous le sas). Tête de l’écluse Niveaux d’eau Bief amont Bief aval Radier Écoulements hydrauliques Terrain naturel Figure 6 : Écoulements hydrauliques dans le sens longitudinal (parallèlement aux bajoyers). Écoulements hydrauliques Bief amont Bief aval Remblais Terre-plein Portes de l’écluse Figure 7 : Écoulements hydrauliques dans le sens transversal. Bajoyers Niveaux d’eau Remblais Terre-plein Radier Terrain naturel Écoulements hydrauliques La pluie fragilise la structure et notamment les terrains mis à nu par l’érosion qu’elle cause mais son action reste très limitée. Le gel est quant à lui beaucoup plus néfaste. En effet, l’eau, lorsqu’elle passe de l’état liquide à l’état solide, augmente de volume et impose par conséquent des contraintes supplémentaires aux terrains ainsi qu’aux structures retenant ces terrains. Des systèmes de drainage doivent donc être réalisés pour évacuer l’eau située derrière les bajoyers. Il convient de ne pas négliger l’action du gel ou de la pluie. Les concepteurs d’écluses protègent leurs ouvrages des écoulements en allongeant les distances que doit parcourir l’eau (en effet, le gradient hydraulique d’un écoulement est inversement proportionnel à la longueur de celui-ci). Dans le cas des écoulements longitudinaux, des parafouilles sont disposés sous les têtes amont et aval. Dans le cas des écoulements transversaux, ces parafouilles prolongent les bajoyers. Ces écoulements sont aussi influencés par la position de l’écluse par rapport au cours d’eau (figure 2). Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 11 Figure 8: Écoulement hydraulique au travers d’un bajoyer juste après une sassée (écluse n°2 de Damery, Venteuil, 51, Canal de la Marne canalisée). Figure 9 : Écoulement hydraulique entre la Seine et le sas de l’écluse (écluse de Port à l’Anglais, Vitry-sur-Seine, 94, Seine). Éléments de dimensionnement des bajoyers Les bajoyers ont pour objectif de contenir l’eau du sas et de retenir les terres. Ils sont donc soumis à deux types d’efforts : 8 Les efforts dus à l’eau à l’intérieur du sas : ces efforts varient de manière cyclique avec les bassinées et compensent, au moins en partie, les efforts générés par le milieu extérieur. 8 Les efforts liés au milieu extérieur au sas : 4Les « terres retenues » ; 4Les surcharges ; 4La poussée hydrostatique qui peut être générée : Par la nappe phréatique ; Par des cours d’eau adjacents dans le cas d’écluse en dérivation ou accolées à un barrage ; • • 12 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France 4Les efforts d’amarrage ; Ce schéma simple peut être compliqué par des dispositions constructives particulières liées à des aménagements spécifiques (aqueducs dans les bajoyers, élargissements, tirants, systèmes de drainage, murs parafouilles etc.) ou encore à des choix constructifs délibérés (remblaiement avec des matériaux évolutifs). Figure 10 : Représentation simplifiée des efforts s’exerçant sur un bajoyer. Bajoyer Terre-plein Ligne piézométrique Niveau d’eau dans l’écluse Radier Poussée hydrostatique Force de butée Force de poussée (Poussée des terres) Poussée hydrostatique Le schéma présenté figure 10 permet de mettre en évidence les quatre problèmes qui peuvent affecter la stabilité d’un bajoyer : 8 Une différence non prise en compte dans le dimensionnement initial entre les niveaux piézométriques dans le sas et dans le terre-plein. 8 Une évolution des caractéristiques mécaniques du terrain qui modifierait les valeurs des forces de poussée ou de butée. 8 Un vieillissement du bajoyer qui entraînerait une diminution de la rigidité de celui-ci et donc un risque d’instabilité. 8 Une modification des surcharges d’exploitation. Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse • Par des fuites au travers du bajoyer ; • Par des circulations longitudinales entre la tête amont et la tête aval ; Les bajoyers se comportent comme des soutènements classiques (palplanches, murs poids, paroi moulée etc.). Ils doivent résister à la poussée des remblais adjacents quels que soient le niveau d’eau dans le sas et la position de la nappe dans les terres. Dans toutes les situations, le cas le plus critique est celui où le sas est vide. La contrainte d’une différence de niveau d’eau entre le terre-plein et le sas doit, a priori, être prise en compte lors de la conception de l’ouvrage. Toutefois, la présence d’écoulements hydrauliques parasites aboutit à l’existence de pressions interstitielles qui induisent des efforts supplémentaires. Plus concrètement, cela signifie que les bajoyers ne sont en général pas conçus pour résister à la poussée des sols saturés lorsque le niveau d’eau dans le sas diminue trop. En effet, bien que les sols situés à l’arrière des bajoyers n’aient aucune raison d’être saturés, les écoulements entre les biefs amont et aval ainsi que des apports non prévus du bassin versant ou de sources proches peuvent y contribuer. L’existence non prise en compte de pressions interstitielles à l’arrière des bajoyers ou des têtes de l’écluse peut provoquer la ruine de ces derniers. Le problème des pressions interstitielles à l’arrière de ces structures peut aussi se manifester d’une autre manière. Ces pressions peuvent être prises en compte dans la conception ou lors d’une réparation par l’ajout de drains (figure 11) permettant un écoulement entre les remblais et le bief aval (en veillant à ce qu’il n’y ait pas de fuite de matériaux). Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 13 Figure 11 : Système de drainage dans un bajoyer (écluse de Méricourt, 80,Canal de la Somme). Un mauvais entretien peut rendre inefficaces les éléments de drainages ce qui entraîne à terme l’existence de pressions interstitielles à l’arrière des bajoyers qui sont incompatibles avec la stabilité de ces derniers. Figure 12 : Différence de charge entre le sas et le terre-plein entraînant des déformations du bajoyer. Déformations due aux pressions interstitielles Plate-forme Niveau d’eau dans le sas Bajoyer Terre-plein – Matériaux naturels ou remblais anthropiques Les bajoyers ou les têtes amont et aval sont plus ou moins sensibles à ces problèmes. En effet, suivant que les radiers sont liés ou non mécaniquement aux bajoyers et aux têtes de l’écluse, les efforts ne sont pas transmis de la même manière et la structure résiste alors plus ou moins bien. Il est facilement compréhensible que dans le cas où toutes les parties de l’écluse sont liées, des effets de voûte se développent notamment dans le radier ce qui permet aux efforts d’être répartis. Le problème lié aux fuites de matériaux est provoqué par les différences de charge hydraulique. Des tassements peuvent alors être observés et l’équilibre qui pouvait exister entre les forces de poussée et de butée peut être rompu. Dans tous les cas, ces phénomènes ne peuvent que destabiliser l’ouvrage. Il faut donc être particulièrement attentif à tout départ de matériaux lors de montées et descentes d’eau dans le sas, que ce soit au niveau des bajoyers ou des têtes amont et aval, ainsi qu’aux signes extérieurs, en particulier les tassements, qui pourraient en être la 14 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Par ailleurs, ce problème de fuite de matériau peut être amplifié par des augmentations brusques des différences de charge hydraulique. Il faut donc être particulièrement vigilant durant les vidanges où des écoulements inhabituels risquent de se produire. Figure 13 : Reprise des efforts supportés par les bajoyers dans le radier. Poussée des terres Efforts repris par le radier Poussée des terres Le vieillissement de la structure est bien sûr lié aux efforts que celle-ci doit reprendre mais aussi à toutes les attaques qu’elle peut subir (chocs de bateau, travaux de « râclage » inconsidérés lors d’opérations de curage mal conduites, réaction entre l’eau et les matériaux constituant la structure). Les défauts qui peuvent alors être constatés sur la structure concernent le plus souvent les liaisons mécaniques entre les différentes parties composant cette structure : décollement entre les moellons pour les murs en maçonnerie, desserrement entre palplanches, fissuration du béton. Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse manifestation. L’observation de la turbidité de l’eau des fuites peut aussi constituer un indice. Figure 14 : Départ de matériaux à proximité d’un bajoyer. Départ de matériau Dalle en béton – quai Zones susceptibles de tasser Niveau d’eau dans le sas Bajoyer Terre-plein – Matériaux naturels ou remblais Éléments de dimensionnement des radiers Comme les bajoyers, les radiers ont pour objectif de séparer l’eau contenue dans le sas du milieu extérieur. On retrouve ici les mêmes types d’efforts. Les cas sont cependant beaucoup plus diversifiés que dans les cas des Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 15 Les objectifs assignés au radier d’une écluse sont d’interdire les écoulements d’eau depuis et vers le terrain naturel et parfois de soulager les bajoyers de la poussée des remblais adjacents (il joue en quelque sorte le rôle de buton). Le radier supporte donc deux types de charges : 8 Le poids de l’eau et les différences de pressions associées au fonctionnement de l’écluse ainsi qu’aux écoulements intermittents. 8 Les efforts transmis par les bajoyers (éventuellement). bajoyers car les dispositions constructives sont beaucoup plus variées : radier indépendant ou lié aux bajoyers, radier poids, radier épinglé ou à tirants passifs, radiers contenant le système d’alimentation en eau, murs ou écrans parafouille, absence de radier etc. Le dimensionnement du radier vis à vis d’un cas considéré comme le plus critique dépend de la position de la nappe. Dans le cas où celle-ci est située au dessus du radier, le cas le plus critique est celui où le sas est vide. 8 En effet, si le radier est totalement imperméable, les pressions interstitielles existant sous le radier ne sont plus compensées par l’eau contenue dans le sas. Le radier ainsi que les liaisons radier-bajoyers doivent alors être dimensionnés pour résister aux efforts induits par ces pressions. 8 Si le radier est perméable, un écoulement est amorcé entre les terrains sous-jacents et le sas. Si le gradient associé à cet écoulement est trop important, il risque de déstructurer le terrain et de provoquer un phénomène de renard. 8 Ces deux cas ne peuvent être totalement dissociés. En effet, dans le cas d’un radier imperméable, les efforts imposés au radier peuvent provoquer l’apparition de fissures et par conséquent le radier initialement imperméable devient perméable. Le risque de renard devient alors réel car l’écoulement a lieu dans des sections de petit diamètre d’où l’existence de forces élevées. Dans le cas où la nappe est située sous le radier, le cas le plus critique est celui où le sas est plein. Le radier et les sols de fondations doivent présenter des caractéristiques mécaniques suffisantes pour résister au poids de l’eau. Figure 15 : Diminution des pressions interstitielles sous le radier dans le sens longitudinal. La vidange du sas a tendance à accentuer ces phénomènes et c’est pourquoi cette tâche nécessaire à l’entretien d’une écluse peut mettre en danger la stabilité de l’ouvrage. Toutefois, les divers phénomènes qui sont décrits dans cette section et qui peuvent causer la ruine de la structure sont en général précédés de signes (pathologies de la structure, dysfonctionnements) qu’il faut savoir reconnaître. Cet objectif sera donc l’objet du prochain chapitre. Il s’agit donc lors d’une mise à sec de diminuer le niveau d’eau le plus lentement possible. 16 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Partie amont Partie aval Conclusion Les phénomènes qui menacent le plus sûrement la stabilité des écluses sont très souvent associés aux écoulements hydrauliques que l’on ne peut pas contrôler. Ils se manifestent de deux manières : 8 Un endommagement du terrain sous l’action des gradients hydrauliques trop importants 8 Le développement de pressions interstitielles dans des zones où celles-ci avaient été mal prises en compte. Lors de la vidange du sas, les deux paramètres majeurs qui doivent être mis en évidence sont : 8 La baisse de la hauteur d’eau dans le sas qui conditionne la diminution des efforts résistants. 8 La vitesse de vidange qui conditionne le rééquilibrage des pressions interstitielles dans les terrains à l’arrière du bajoyer par circulation d’eau. d’évaluation de l’état et du comportement d’une écluse avant et pendant la mise à sec Ce chapitre est principalement destiné à familiariser les gestionnaires d’écluses avec les différents dommages ou pathologies qu’ils peuvent être amenés à rencontrer sur les structures et matériaux de ces ouvrages. Un certain nombre d’illustrations photographiques sont donc présentées en indiquant, chaque fois que possible, les causes principales et souvent concomitantes de ces dommages. Les aspects relatifs au risque engendré par un dommage sont abordés au § 5.6. En général, le risque associé à un dommage dépend de son occurrence et de la vulnérabilité qu’il représente pour la structure. Les problèmes induits par le vieillissement d’une écluse peuvent être abordés selon trois aspects : 8 ceux résultant d’une dégradation naturelle et physico–chimique des matériaux exposés aux milieux dans lesquels ils se trouvent, 8 ceux résultant des sollicitations mécaniques s’exerçant sur les différentes structures constitutives de l’ouvrage, 8 Ceux résultant de l’action érosive de l’eau et des agents agressifs qu’elle transporte, amenés aux contacts des sols et des parois extérieures. Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse Éléments Matériels et matériaux : Les maçonneries, le béton armé et le métal (principalement les fers et les aciers). Dégradation naturelle et physico-chimique des matériaux Les observations qui vont pouvoir être faites dépendent essentiellement de la nature des matériaux. De manière générale, il convient de distinguer trois grands types de matériaux entrant dans la constitution du génie civil d’une écluse : Pathologies des maçonneries La maçonnerie est un matériau essentiellement composite avec des éléments d’origines naturelles ou artificielles. Tous les composants d’une maçonnerie sont susceptibles de subir des dégradations au cours du temps. Il n’est pas envisagé dans les descriptions qui suivent, de donner tous les détails possibles sur les différents processus d’altération qui sont très nombreux, complexes et souvent concomitants. De la même façon, les différents procédés de fabrication, de préparation et de pose relèvent de la technologie pure des maçonneries. Pour plus de détails, nous renvoyons les gestionnaires de ces constructions aux nombreux et divers documents scientifiques établis sur ces sujets. Cependant, la reconnaissance précise des différents types de dommages affectant une structure en maçonnerie oblige de les identifier avec un langage commun et donc de s’intéresser aux différents constituants de cette maçonnerie. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 17 Pathologies des pierres L’altérabilité de celles-ci résulte d’un certain nombre de facteurs : 8 Leur composition minérale, la solubilité de certains minéraux constitutifs, la structure des différentes couches qui les composent et en assure plus ou moins la dureté et la gélivité. 8 Des réactions entre le terrain, l’eau, l’air et les pierres peuvent également dégrader ces dernières. Ces réactions peuvent être amplifiées par la présence de végétaux (algues, lichens, mousses), d’organismes vivants (bactéries, mollusques, vers) ou d’une eau de percolation agressive (chlorures, sulfates, pH). 8 Un mauvais traitement ou préparation de la pierre : mauvais choix en carrière (pierres avec clivages, inclusions solubles ou expansives), méthodes d’extraction ou de taille défectueuses entrainant des endommagements favorables aux dégradations par le gel. 8 Des erreurs de mise en œuvre et notamment de pose (épaisseur trop faible ou parfois l’absence des mortiers créant des contraintes locales excessives aux contacts entre les élements…) Tableau n°1 : Dommages et pathologies de la maçonnerie (pierres). Types de dégradation Desquamation profonde de la pierre Érosion prononcée des angles des pierres de taille avec amorce de destabilisation géométrique de l’appareillage de la chaîne d’angle Simple érosion éolienne et / ou hydraulique 18 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Illustrations Observations Bajoyer recevant une culée de pont. Pierre tendre et poreuse, de qualités physique et mécanique trop faibles pour être utilisée dans cette zone plus fortement sollicitée de l’ouvrage Dommages classiques sur les chaînes d’angles des enclaves de portes et / ou des chardonnets et / ou des rainures de batardeau Altération non rédhibitoire pour la tenue de la structure, dont l’apparition et l’évolution est favorisée par la texture particuliére du matériau (inclusion, porosité) Usure prononcée du matériau avec ou sans réduction sensible d’épaisseur Appareillage défectueux Illustrations Observations Dommages classiques sur les élements constitutifs des pieds de bajoyers et / ou en radier, consécutifs au traffic ou par suite de travaux de curage mal conduits Mauvais choix de matériaux ou mauvaise mise en oeuvre Pathologies de la brique Tout matériau de fabrication artificielle et industrielle, constitué d’un mélange d’argiles ne peut prétendre à l’appellation de brique de pays. Le mode industriel par pressage ou filage et tranchage suivi d’une cuisson au four traditionnel au charbon dit « Four HOFFMANN » et d’une production essentiellement d’origine française, correspond à cette qualité d’appellation. Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse Types de dégradation Composante parfois essentielle d’un volume important de l’ouvrage (surtout pour certains ouvrages du Nord de la France), elles peuvent générer des désordres conséquents et d’évolution rapide en raison soit de leur mauvaise composition et fabrication (gélives, poreuses, pourvues d’inclusions fragilisantes, de caractéristiques mécaniques hétérogènes et insuffisantes) de dispositions constructives, de poses maladroites (appareillages anormaux, absences de harpage ou de chaînage) ou encore de l’exposition prolongée aux sollicitations d’exploitation sans entretien préventif. Néanmoins, la brique peut être un bon matériau si elle est bien entretenue et si son vieillissement est maîtrisé. Les écluses sur le Canal du Nord en sont la preuve. Ces désordres vont ainsi rapidement passer de la simple disparition d’élements du parement à la formation de cavités d’ordre métrique. Dans certains cas, il a été constaté sur des maçonneries de briques datant de 1850 et ayant perdu toute cohésion interne , des phénomènes d’effondrement de parement vers le sas sous l’action des hélices de bateaux voire d’entraînement complet de la paroi par simple déplacement de bateaux avalants. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 19 En règle générale ces désordres se situent le plus souvent : 8 Sur les premiers lits supérieurs situés sous les pierres de couronnement des bajoyers et des têtes. 8 Aux débouchés des aqueducs et larrons. 8 En tête des enclaves de portes. 8 Aux clefs et pieds de voûtes. 8 Entre les niveaux haut et bas de sassée. 8 En parement des radiers. Tableau n°2: Dommages et pathologies de la maçonnerie (briques). Types de dégradation Désorganisation plus ou moins profonde et généralisée des élements constitutifs du radier Abrasion du matériau le plus exposé et le plus erodable aux frottements Dégradation localisée du matériau le plus tendre Désorganisation plus prononcée de la maçonnerie, avec formation de cavité 20 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Illustrations Observations Conséquence de l’exploitation (action localisée d’un « laminage » abrasif sous la coque des bateaux chariant des débris) et de l’absence de nettoyage périodique du radier Conséquence de l’exploitation et dans une moindre mesure de l’absence de cuirassement Conséquence du choix de la « mixité » des matériaux, avec interposition d’un matériau tendre entre deux autres plus durs Conséquence des sollicitations mécaniques et des contournements de l’étanchéité des chardonnets au sein du massif par des infiltrations Les mortiers utilisés dans les maçonneries des parties d’écluses sont des mélanges de liant hydraulique (chaux et / ou ciment portland), de sables et d’eau. Un mortier dont le liant est un assemblage de ciment et de chaux hydraulique (le plus souvent en proportions égales) est dit mortier bâtard. Dans une maçonnerie, on distingue d’une part le mortier de hourdage qui assure la liaison entre les gros éléments constitutifs du massif et du parement et d’autre part, le mortier des joints qui, en comblant les volumes entre les éléments appareillés et hourdés, assure l’étanchéité du parement. Le rôle des mortiers est double : 8 Rôle mécanique en donnant de la cohésion à l’ouvrage pour résister aux sollicitations mécaniques extérieures et en répartissant les efforts de compression entre les blocs. 8 Rôle d’imperméabilisation en assurant l’étanchéité et en limitant les circulations d’eau au sein du massif de maçonnerie. La chaux hydraulique confère au mélange une meilleure « ouvrabilité » et limite son retrait, tout en lui gardant des propriétés de prise et de résistance satisfaisantes. La chaux dite « aérienne » n’est en revanche pratiquement plus utilisée. Différentes réactions physico-chimiques peuvent endommager les mortiers sous l’influence de conditions d’expositions extérieures ou de réactions intérieures. Elles aboutissent en général à la formation de sels insolubles, solubles ou à des composés gonflants : 8 Les sels insolubles (exemple le carbonate de calcium) sont plutôt protecteurs en surface. 8 Les sels solubles entraînés sous l’action de l’eau donnent une porosité au mortier qui s’érode ainsi progressivement. 8 Les composés gonflants peuvent aller jusqu’à provoquer un éclatement des maçonneries (gonflements significatif des parements). Dans des cas plus rares et non identifiables de façon uniquement visuelle, des réactions internes (de type alcali-réaction par exemple) peuvent avoir lieu entre la pierre et les mortiers ou au sein de ces derniers et aboutir à l’expansion ou la fissuration des joints voire à l’éclatement des pierres de la maçonnerie. Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse Pathologies des mortiers de hourdage et de joints Tableau n° 3 : Dommages et pathologies de la maçonnerie (joints). Types de dégradation Décollement et expulsion du mortier de pose Illustrations Observations Situation concomittante à des réactions internes et à l’action des eaux (pression interstitielle, érosion puis entraînement…) Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 21 Tableau n° 3 : Dommages et pathologies de la maçonnerie (joints). Types de dégradation Illustrations Observations À ce stade, on ne perçoit pas encore d’anomalie particulière sur l’appareillage des pierres (la destruction des joints verticaux est très fréquente mais ne présente pas de danger important tant que les joints horizontaux sont préservés et que des déformations ou des fuites ne sont pas observées) Disjointoiement profond des joints de pose et/ou de hourdage Cette dégradation est la conséquence d’un vieillissement en exploitation, aggravé par l’effet « pesant » et « destabilisant » permanent des pierres Disjointoiement et décohésion de la maçonnerie des premiers lits sous le courronnement en pierres Pathologies du béton armé Celles-ci résultent d’une action sur le béton, les armatures et de l’interaction entre le béton et les armatures. Des phénomènes de gonflement, d’érosion peuvent affecter le béton tandis que les armatures vont subir la corrosion induite par les différentes réactions. Tableau n°4 : Dommages et pathologies du béton armé. Types de dégradation Fissuration biaises ou verticales en dehors des joints de fractionnement, avec passage d’eau (en faible débit) Armatures apparentes - Treillis armé déterioré 22 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Illustrations Observations Résultant du retrait naturel différentiel du béton entre parties horizontale et verticale, ces désordres n’entraînent pas de conséquence particulière sur la stabilité. L’importance des infiltrations doit cependant être le facteur déterminant du choix de leur injection lors du chômage Conséquence d’une réalisation et/ou d’une conception vraisemblablement défectueuse du béton projeté choisi pour la réparation Types de dégradation Illustrations Observations Conséquence d’une part des dispositions constructives ayant privilégié les reprises et d’autre part de l’absence de drainage et de protection contre les infiltrations en terre-plein Infiltrations et dépots de calcite soulignant les passages d’eau au travers des plans de reprises horizontaux Pathologies de l’acier Le principal problème est la corrosion qui induit une diminution de la section des pièces de charpente et de leurs soutènements et donc de leur rigidité, ce qui entraîne une augmentation des déformations et des dysfonctionnements mécaniques voire dans certains cas la ruine par rupture des assemblages. Il est important de souligner le fait que les peintures peuvent souvent masquer des désordres qu’il convient cependant d’attester. Tableau n°5 : Dommages et pathologies de l’acier. Types de dégradation Illustrations Observations Corrosion localisée et plutôt superficielle de la tôle de bordé sur vantail de porte aval (coté sas) Conséquence de l’effet d’aération différentielle du métal due à l’alternance immersion / emersion de l’élement, ce stade de dégradation n’est pas préjudiciable mais justifie une reprise totale du complexe anti-corrosion Corrosion intense de profilés entraînant leur rupture et une instabilité des assemblages Conséquence d’une absence totale d’entretien sur des dispositions constructives au demeurant compliquées à entretenir Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse Tableau n°4 : Dommages et pathologies du béton armé. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 23 Les sollicitations mécaniques Les actions mécaniques Il s’agit avant tout, de comprendre comment et pourquoi les sollicitations mécaniques affectant l’ouvrage ont pu évoluer depuis sa réalisation. Outre les chocs et érosions dus à la circulation fluviale et aux interventions pour travaux à l’aide d’engins mécanisés, diverses actions mécaniques peuvent avoir entraîné des désordres dans le génie civil de l’ouvrage. En général, les pathologies issues des sollicitations mécaniques se manifestent le plus souvent par des déformations des profils en long et en travers de la structure (bajoyers et têtes). Elles peuvent être accompagnées localement d’une fissuration voire d’une fracturation complète des éléments constitutifs de l’ouvrage (pierres, briques,…) et pas seulement des joints qui les unissent. Si les phénomènes se poursuivent, les dégradations évoluent rapidement, notamment en présence de circulations d’eau importantes consécutives à des pertes d’étanchéité. Des décollements du parement apparaissent, des affaissements du terreplein se forment, le radier peut ne pas être épargné avec l’apparition de bombements ou de cavités localisées ainsi que d’une fissuration / fracturation avec désagrégation sous l’effet d’un soulèvement. Dans un cas extrême on a même pu constater l’effondrement en eau d’un parement de bajoyer. Les désordres consécutifs à des sollicitations mécaniques peuvent être classés en deux catégories suivant que leurs manifestations soient relativement récentes (désordres à court terme), ou que leur évolution soit très lente et étalée sur plusieurs années voire plusieurs dizaines d’années (désordres à long terme). Les causes possibles de désordres à court terme Toute modification du contexte d’équilibre général apportée à l’ouvrage luimême ou à son environnement (milieu hydraulique, terrains adjacents) peut conduire à l’apparition de désordres plus ou moins importants à court terme. Parmi les causes les plus courantes on peut citer de manière non limitative : Tableau n°6 : Désordre à court terme. Causes La modification de la poussée hydrostatique derrière l’ouvrage 24 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Illustrations Types de dégradation Déformation globale du profil en long du bajoyer avec ou sans désordres concomittants Causes Illustrations Types de dégradation La modification inconsidérée des surcharges verticales pemanentes sur l’ouvrage lui-même Déformation localisée ayant entrainé une rupture qui a necessité des reprises localisées de la stabilité (battage d’un rideau) L’augmentation de la poussée sur l’ouvrage suite à des travaux de remblaiement défectueux ou de chômage mal conduits Destabilisation complète du perré de l’éclusette et risque de rupture et d’entraînement sous la pression des eaux du bief arrière Déplacement horizontal d’une partie de la maçonnerie selon un plan de cisaillement passant par la section la plus sollicitée par ce type de chargement non prévu à l’origine L’augmentation temporaire et inconsidérée des charges sur les berges et les terrepleins (remblais, dépôts, charges de chantier...) Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse Tableau n°6 : Désordre à court terme. Les causes possibles de désordres à long terme On distingue principalement : Tableau n°7 : Désordre à long terme. Causes La modification des sols en place (affouillement,…) Illustrations Types de dégradation Destabilisation du retour de tête aval consécutif à des affouillements (contournement de tête) ayant nécessité un confortement par rideau de soutènement Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 25 Tableau n°7 : Désordre à long terme. Type de dégradation Illustrations Observations Conséquence des phénomènes de sous-pression insuffisamment maîtrisés lors d’opérations de chômage antérieures L’altération au cours du temps et sous l’ouvrage lui-même d’un matériau D’apport (remblai immergé servant d’assise…) La modification d’un matériau en place consécutivement à une opération de terrassement (curage, dragage…) Ruine du perré – bajoyer de l’éclusette par un départ de matériau et la perte de la butée de pied Les actions physiques : le gel Dans certaines régions de France, la durée des périodes de gel intense sans dégel, la fréquence des cycles gel/dégel et l’amplitude des variations de températures sont importantes et ont une incidence directe sur l’altération des matériaux et leurs stabilités physique et mécanique. Le gel peut se manifester de deux manières : Tableau n°8 : Le gel. Causes Altération des caractéristiques superficielles des matériaux par le gel : le béton Altération des caractéristiques superficielles des matériaux : les pierres 26 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Illustrations Types de dégradation Sur un béton de composition et de mise en œuvre peu satisfaisantes Endommagement plus profond sur des moellons de pierre tendre (craie) en zone d’immersion, lors d’un épisode de gel en cours de chômage Causes Illustrations Types de dégradation Altération des caractéristiques superficielles des matériaux : la brique Endommagement en zone de marnage sur des élements de qualité médiocre. Altération profonde des caractéristiques des matériaux par le gel : le béton Endommagement profond, susceptible de compromettre à terme la stabilité de l’ouvrage porté et le batardage de mise en sécurité de l’écluse Modification physique des sols gelés et du fonctionnement des dispositifs de drainage, entrainant des poussées non négligeables derrière les soutènements Déformation sensible du parement sous la poussée des eaux et des effets du gel Pour tenter de s’affranchir de ces problèmes ou, plus simplement pour mieux les appréhender avant de lancer les opérations de chômage, les éléments à prendre en compte concernent l’utilisation des données disponibles en termes de climatologie et d’hydrologie tels que : prévisions météorologiques, augmentation du niveau de la nappe, augmentation des surcharges mises en place sur les quais ou la réalisation de travaux (remblaiement, approfondissement du sas, impacts induits par des travaux précédents : vibration, modification des écoulements). Éléments de fonctionnement, de dimensionnement et d’évaluation de l’état d’une écluse Tableau n°8 : Le gel. En période de chômage, le gel, surtout si les conditions de durée et d’intensité se trouvent réunies ne serait-ce que durant quelques jours, peut entraîner de profonds endommagements sur des matériaux fragiles tels que les maçonneries de pierres tendres (craies …). Ce phénomène est d’autant plus sensible que ces matériaux se sont trouvés plus ou moins imprégnés d’eau de par leur immersion. Le cas s’est rencontré sur des ouvrages anciens de la rivière canalisée de la Somme et n’a pas pu être résolu de façon satisfaisante en raison du trop faible temps disponible pour le traiter. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 27 Les actions de l’eau Les principaux dangers inhérents aux actions de l’eau sont associés aux surpressions interstitielles et aux départs de matériaux générés par les écoulements. L’action de l’eau dans les discontinuités des maçonneries peut être particulièrement nocive en raison de trop brutales variations de son niveau dans le sas lors de séquences de fonctionnement ou d’opération de chômage. Dans la zone de marnage, ceci peut se traduire par une érosion interne par entraînement des fines, une dégradation puis un enlèvement des joints provoquant une circulation plus intense. On a été jusqu’à constater dans certains ouvrages, une fracturation hydraulique se traduisant par l’éclatement de la maçonnerie sous l’effet de pressions interstitielles internes importantes. Un contournement intempestif de l’ouvrage par l’eau se traduit par des venues d’eau importantes en aval, dans les maçonneries et/ ou les perrés. Il peut en découler une érosion régressive provoquant des affouillements ou des sapements en avant et / ou des affaissements locaux de terre-plein. Quelques conséquences de ces phénomènes sont illustrées par les photographies suivantes. Tableau n°9 : Désordres dus à l’eau. Causes 28 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Illustrations Observations Indice d’un début de contournement d’un massif de tête. Conséquence des surpressions interstitielles et des départs de matériaux générés par les écoulements. Zone de marnage, fracturation hydraulique se traduisant par l’éclatement de la maçonnerie sous l’effet de pressions interstitielles internes Erosion interne par entraînement des fines, suivie d’un enlèvement des joints provoquant une circulation plus intense et ainsi de suite…. jusqu’à la chute de moellons. Réalisation d’une vidange d’entretien > Réalisation d’une vidange d’entretien Cette partie est composée de deux chapitres. 8Le premier présente un logigramme décisionnel permettant de décider de la faisabilité de la réalisation de la vidange d’un sas d’écluse. 8Le second présente la méthodologie qui permet l’évaluation de l’état de l’écluse (qui se rapproche par certains aspects de la méthode VSC) en suivant un cheminement logique où l’ensemble des données (rassemblées et analysées au cours de 9 étapes) concernant l’ouvrage est synthétisé. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 29 Définition des étapes Le logigramme peut donner réponse à la question : « La vidange est-elle réalisable ?» sur la base des résultats obtenus au terme des étapes 1 à 5 décrites dans la suite.En fonction de la réponse à cette question, différentes suites sont à envisager : 4 oui : mise à sec des sas est possible en mettant en œuvre différents niveaux de surveillance 4 non : besoin d’entreprendre des travaux de confortement afin de permettre à l’écluse de supporter la mise à sec 4 ne sait pas : signifie que on ne dispose pas de données suffisantes pour mener correctement la réflexion et par conséquent on à besoin d’investigation complémentaires. D’une manière plus globale, la réponse à la faisabilité de la vidange s’obtient en rassemblant et en analysantles différents élèments recueillis au cours des 9 étapes suivantes : 1 : Géométrie générale 2 : Données du site 3 : Travaux antérieurs - Archives 4 : Expériences précédentes de mises à sec 5 : Observations sur l'état de l'écluse 6 : Réflexion – faisabilité de la vidange 7 : Investigations complémentaires 8 : Travaux de confortement 9 : Déroulement de la vidange A l’issue des étapes 1 et 2 puis des étapes 3, 4 et 5, deux synthèses respectivement 1 et 2 sont réalisées. Ces dernières doivent permettre d’avoir une approche systématique dans l’analyse de la faisabilité d’une vidange. 30 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Réalisation d’une vidange d’entretien Figure n°16 : Logigramme décisionnel. Vidange du sas de l'écluse - Méthodologie de prise de décision Géométrie générale 1 Données du site Tableau de synthèse n°1 : Listes des caractéristiques de l'écluse et des risques induits 8 Travaux de confortement Non 2 3 Travaux antérieurs Archives Expériences précédentes de vidanges 4 Observations 5 Tableau de synthèse n°1 : Listes des dommages constatés et des rsiques induits Réflexion Faisabilité de la vidange Ne sais pas Investigations complémentaires 7 6 Oui (avec différents dégrés de surveillance) 9 1 Géométrie générale Cette étape doit permettre de compiler les plans et coupes types de l’ouvrage (longueur, largeur, hauteur de chute…). 8 Le premier but est de relier ces données aux caractéristiques du sol pour avoir une idée de la sensibilité des bajoyers. Plus le bajoyer a une grande hauteur et plus le sol présente des caractéristiques médiocres alors plus le risque d’instabilité est important. Il est assez difficile de donner des ordres de grandeur concernant ces valeurs sans rentrer dans une trop grande complexité. Chaque cas doit être considéré comme particulier et mérite par conséquent une analyse spécifique. 8 Le second objectif est de quantifier le gradient hydraulique autour de l’écluse. Plus le rapport entre la hauteur de chute et la longueur de l’écluse est important, plus les forces d’écoulement sont importantes et donc plus le risque de fragiliser le radier est grand du fait des souspressions. Dans tous les cas, des sondages doivent être réalisées si un doute existe (cf. n°9). Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 31 2 Données du site Il s’agit de mettre trois points en évidence : 8 La géologie (carte topographique, carte géologique, géomorphologie,…). 8 L’hydrogéologie (niveau de la nappe en période de crue ou d’étiage, coefficients de perméabilité). 8 Les données géotechniques (coupes de sondages, résultats d’essais, rapports d’études). L’objectif est d’estimer l’état mécanique des sols retenus par les bajoyers et la position de la nappe. Remarques relatives aux niveaux de la nappe Il a été indiqué plus haut que le niveau de la nappe est le point le plus important à évaluer or, sauf le cas particulier où des piézomètres ou des puits sont situés à proximité et se prêtent à la mesure directe du niveau de la nappe, celui-ci ne peut pas être évalué avec suffisamment de précision. Il faut en particulier se méfier des suintements ou écoulements au travers des bajoyers qui, s’ils témoignent le plus souvent de la présence d’une nappe, ne peuvent permettre d’en évaluer précisément le niveau. Les cotations ne doivent en aucun cas être additionnées. La position de l’écluse par rapport au cours d’eau doit aussi être un élément important à considérer. 8 Dans le cas de canaux construits dans des sites artificiels (comme le canal du Nord) où la nappe n’est présente qu’en profondeur, les risques sont moindres car la présence d’eau dans les terrains ne peut être due qu’à des circulations d’eau entre les biefs amont et aval. 8 Dans le cas de canaux construits dans des fonds de vallée à proximité de fleuves ou de dérivations, la nappe est dans de nombreux cas au niveau des cours d’eau et impose des efforts non négligeables aux bajoyers lors des vidanges. 8 Enfin dans les cas où un bassin d’épargne est présent, il est absolument essentiel de préciser les circulations hydrauliques éventuelles entre celui-ci et l’écluse. Remarques relatives aux types de sol Il a déjà été précisé que l’influence de sol sur le bajoyer est assez complexe à interpréter. Toutefois, voici quelques règles générales qui peuvent être appliquées. 8 Écluses en rivière : le terrain est constitué d’une couche d’alluvions plus ou moins importante. Ces terrains sont le plus souvent limoneux, argileux voire tourbeux et présentent par conséquent des caractéristiques mécaniques plutôt médiocres. 8 Écluses en canal : si le canal a été construit dans un fond de vallée, l’analyse pour des écluses en rivière reste valable. Si le canal a été construit dans un site totalement artificiel (comme le canal du Nord), il faut savoir si le terrain aux abords de l’écluse a été rapporté ou non. Dans le cas de terrains en place, la carte géologique ou d’anciens sondages peuvent être consultés pour estimer qualitativement leurs caractéristiques. Dans le cas de terrains non rapportés, même si l’on peut a priori s’attendre à rencontrer des terrains avec des caractéristiques mécaniques correctes, des sondages de reconnaissance s’imposent. 32 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Les données rassemblées au cours des étapes 1 et 2 peuvent être transcrites dans le tableau ci-dessous. Pour chacune des cinq catégories définies, il convient d’adopter la signalétique suivante : 8 -1 : situation à risque : il convient de mener la réflexion de manière plus appronfie ou directement d’entreprendre une étude permettant le confortement de l’écluse. 8 0 : ne sait pas : uniquement destinés aux catégories « type de sols » et « caractéristiques conues des sols » et implique des investigations complémentaires. 8 1 : situation favorable : il s’agit d’examiner chacun des paramètres présentés ou de manière plus pratique de remplir chacune des cases. Ecluse Longueur L en m Hauteur de chute H en m Largeur e en m Profondeur de la nappe à proximité des bajoyers Type de sols Réalisation d’une vidange d’entretien Synthèse n°1 Caractéristiques connues des sols (résistance mécanique, perméabilité…) Notation : -1, 0, 1 Les sondages à réaliser en priorité sont de deux sortes : 8 Le sondage pressiométrique (pour tous les types de sol) : il doit permettre d’établir un profil des pressions limites pl en fonction de la profondeur. On peut considérer que le sol est plutôt médiocre si des pressions limites inférieures à 0.45 MPa sont mesurées. 8 Le sondage scissométrique. (pour les sols plutôt argileux) : il doit permettre d’établir un profil des cohésions non drainées Cu en fonction de la profondeur. On peut considérer que le sol est plutôt médiocre si des cohésions non drainées inférieures à 75 kPa sont mesurées. D’autres essais in situ ou en laboratoire peuvent être réalisés même s’il faut alors demander l’assistance de spécialistes. En effet, s’il y a mouvement ou rupture des bajoyers, le mécanisme en jeu est extrêment compliqué du fait des nombreuses interactions entre le sol saturé ou non en eau, le bajoyer, l’eau dans le sas et la vitesse avec laquelle les phénomènes ont lieu. L’analyse de ces données peut être la suivante : 8 Plus la longueur L est grande, moins le gradient hydraulique est important et donc plus le risque d’instabilité est faible. 8 plus la hauteur de chute H est petite moins les efforts s’exerçant sur le bajoyer sont importants et plus le gradient hydraulique est faible et donc plus le risque d’instabilité est faible. 8 Plus la largeur e est faible, plus l’interaction entre les bajoyers est importante et plus les efforts s’exerçant sur ces derniers se neutralisent ce qui augmente la stabilité d’ensemble. 8 Plus la nappe est haute, plus les poussées s’exerçant sur les bajoyers sont fortes et plus le risque durant la vidange est important. 8 Le type de sols intervient dans la stabilité mais il est assez difficile de le prendre en compte (une analyse spécifique réalisée par un spécialiste s’impose). Il est nécessaire de considérer à la fois les caractéristiques mécaniques et hydrauliques du sol. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 33 Le tableau ci-dessous synthétise cette analyse. Effets sur l’écluse Type de données Variation Largeur e en m ≥ Hauteur de la nappe à proximité des bajoyers ≥ ≥ ≥ ≥ ≥ Effets sur la stabilité d’ensemble ≥ ≥ ≥ Hauteur H de chute en m Effet de voûte ≥ ≥ Gradient hydraulique ≥ Longueur L en m Efforts sur les bajoyers Il est nécessaire de rappeler que cette analyse est avant tout qualitative. Le manque de retour d’expérience ne permet pas d’établir des statistiques fiables. 3 Travaux antérieurs - Archives Deux éléments sont à considérer : 8 La réalisation de travaux antérieurs (leur nature, leur cause) qui peut mettre en évidence des zones fragiles. 8 Les événements antérieurs qui peuvent être des guerres, des crues, des chocs qui avaient entraîné des surcharges ponctuelles sur l’ouvrage et éventuellement une fragilisation de la structure. 4 Expériences précédentes de mises à sec Il s’agit surtout de savoir si l’écluse a subi des dommages lors de précédentes vidanges et si ces derniers ont été réparés ou s’ils constituent une zone de fragilité. Cette étape oblige encore à s’intéresser à l’historique de l’écluse et donc à mieux appréhender son comportement face aux divers événements qu’elle a pu subir. Des retours d’expériences sur des écluses proches sont aussi intéressants à recueillir car ils peuvent donner des indications sur le comportement de structures en général assez similaires et implantées dans des zones présentant des caractéristiques géologiques, hydrogéologiques et géotechniques voisines. 5 Observations sur l’état de l’écluse Le principe d’observation adopté s’inspire des méthodes VSC et IQOA. Il consiste donc pour chaque type de structure susceptible d’être identifié d’examiner non seulement les dommages et pathologies qu’elle présente mais aussi l’évolution de son environnement. Il convient de se reporter aux différents tableaux du chapitre « Éléments d’évaluation de l’état et du comportement d’une écluse avant et pendant » et aux principes de dimensionnement mentionnés au chapitre « Éléments de dimensionnement d'une écluse » pour lister les différents dommages et pathologies observables et évaluer la vulnérabilité qu’ils représentent, leur occurrence et enfin leur risque réel. 34 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Réalisation d’une vidange d’entretien Synthèse n°2 Les différentes informations et observations recueillies au cours des étapes 3, 4 et 5 peuvent être synthétisées dans le tableau suivant : Comme pour le premier tableau de synthèse, un système de cotation intervient : 8 Risque faible : 1. 8 Risque moyen : 2. 8 Risque fort : 3. Tableau de synthèse n°2 : liste des dommages constatés et des risques induits. Type de structure Pathologies ou dommages observés – Évolution de l’environnement HISTORIQUE Expériences précédentes de mise à sec Crues, guerres, événements exceptionnels Desquamation Description du dommage Vulnérabilité de la structure par rapport au dommage - Localisation Occurrence du dommage sur la structure Risque Si un risque fort est mis en évidence, il convient de mener la réflexion de manière plus approfondie ou directement d’entreprendre une étude permettent le confortement de l’écluse. Disjointement Érosion Usure Problème Maçonnerie d’appareillage EFFETS DES DÉSORDES Décohésion Bajoyer – Radier – Tête amont ou aval – Rainure de batardeau Désorganisation Abrasion Décollement Béton armé Acier Fissuration verticale ou biaise Armatures apparentes Infiltrations – Dépôts de calcite Corrosion locoalisée Corrosion intense Déformations globales CAUSES DES DESORDRES Modification de la poussée hydrostatique Mise en place définitive de surcharges Réalisation de travaux Actions du gel Fuites et suintement Actions de l’eau (érosion, mise en évidence de surpressions interstitielles, affouillement) Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 35 Figure 17 : Appréciation du niveau de risque induit par un dommage en fonction de son occurrence et de la vulnérabilité de la structure vis-à-vis de ce risque. Vulnérabilité de la structure par rapport au dommage observé Augmentation du risque Occurence du dommage sur la structure La vulnérabilité du dommage sur la structure observée s’estime à partir de considérations concernant le fonctionnement mécanique de cette structure. Ces considérations sont issues pour partie du chapitre « Éléments de dimensionnement d'une écluse » mais aussi de l’expérience de chacun dans le domaine des structures. 8 Par exemple, des fissures sur une zone ponctuelle d’une structure en béton armé qui travaille en traction ne sont pas forcément alarmantes car de par son fonctionnement, le béton armé se fissure lorsqu’il travaille en traction. Par contre, si ces fissures mettent à nu les armatures et que celles-ci se corrodent, un risque existe. De plus, si de l’eau sort de ces fissures alors que le niveau d’eau dans le sas est depuis un certain temps égal à celui du bief aval, cela signifie qu’il existe une nappe à l’arrière des bajoyers et si le sas est mis à sec, les efforts sur le bajoyer vont augmenter. 8 Pour une maçonnerie, on considère que les éléments qui la composent ne peuvent travailler qu’en compression. Si des fissures apparaissent sur les joints liant les éléments de la maçonnerie, cela signifie que la structure subit des déformations induites par des contraintes de traction ou de cisaillement. Dans ce cas, il faut observer la taille et éventuellement l’évolution avec le temps de ces fissures pour voir si elles sont dues à des contraintes prises en compte lors du dimensionnement (et dans ce cas, elles ne doivent pas évoluer) ou si elles proviennent de contraintes parasites qui pourraient traduire le début d’un désordre. L’endroit où est observé le dommage est aussi important. Si un moellon est décalé au milieu du bajoyer, cela a sans doute peu d’importance, par contre, si ce moellon se situe au niveau des rainures de batardeau alors le risque est réel car lors de la mise en place des batardeaux, ce défaut d’alignement géométrique peut entraîner une augmentation de contraintes incompatibles avec la résistance des éléments constituant la structure. L’occurrence du dommage est aussi une information intéressante car elle peut traduire une malfaçon, un vieillissement de la structure ou un fonctionnement anormal généralisé. Il faut à nouveau analyser l’occurrence à partir de considérations concernant le fonctionnement mécanique de cette structure. 36 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France La collecte des différentes données doit permettre de juger de la faisabilité d’une mise à sec de l’écluse. L’analyse des différentes informations peut être réalisée par le gestionnaire ou par un spécialiste du comportement de ce genre de structures. En général, l’état de connaissance du gestionnaire est suffisante pour établir l’absence de risque. La décision de la faisabilité d’une vidange résulte de l’analyse par un expert simultanée des deux tableaux de synthèse présentés ci-dessus. En particulier, si des dommages auquels la structure peut être très sensible sont constitués (vulnérabilité forte), même lorsque les occurrences sont faibles, il convient de s’attacher à un niveau d’expertise, éventuellement pour une analyse contradictoire des éléments identifiés lors de la première phase. Réalisation d’une vidange d’entretien 6 Réflexion - Faisabilité de la vidange 7 Investigations complémentaires Cette étape doit être menée quand la décision de réaliser la vidange du sas ne peut pas être prise compte tenu des dommages mis en évidence et de l’incertitude quant à l’opportunité de travaux de confortement. Les éléments nécessitant des informations supplémentaires sont : 8 Hydrogéologie : 4 Mesure du niveau de la nappe : mise en place de piézomètres ouverts ou fermés. Les piézomètres ouverts sont les plus courants et sont des puits de petit diamètre permettant la mesure du niveau stabilisé de la nappe. Ces appareils font l’objet de normes qu’il est impératif de consulter. 4 Mesure de la perméabilité du terrain : réalisation d’essais d’eau. La panoplie est vaste et doit être déterminée, exécutée et analysée par des spécialistes. Il convient de se reporter aux normes en vigueur. 8Données géotechniques : sondages et essais en laboratoire ou in situ. Les mêmes remarques que précédemment peuvent être formulées. Il faut donc se reporter aux normes en vigueur et ne pas hésiter à contacter des spécialistes. La recherche de cavités peut aussi être entreprise. 8 État des structures : des moyens spécifiques peuvent être mis en œuvre (vidéo, bathymétrie…). Dans la majorité des cas, il s’agit d’observer plus en détail les éléments présentés au paragraphe chapitre « Éléments d’évaluation de l’état et du comportement d’une écluse avant et pendant ». Il est aussi possible de mesurer les déplacements de la structure et les battements de la nappe lors de sassées habituelles afin de pouvoir éventuellement extrapoler les résultats pour déterminer le comportement de la structure lors d’une vidange. Mesures de la piézométrie Ces mesures (qui nécessitent la mise en place de piézomètres ouverts ou fermés) permettent de suivre le niveau d’eau dans les terrains adjacents. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 37 Elles sont intéressantes car elle permetent de voir si la nappe présente dans les terres retenues suit vraiment le niveau de l’eau contenue dans le sas. Dans le cas où leurs évolutions sont similaires, il s’agit de déterminer la vitesse de décalage qui peut exister. En effet, comme cela a déjà été précisé, une des raisons de l’instabilité des bajoyers durant les mises à sec des sas, est le fait que les pressions interstitielles présentes dans les terrains adjacents ne sont plus équilibrées par celles pouvant exister dans le sas. Il s’agit donc de veiller à ce que les niveaux d’eau soient sensiblement identiques de part et d’autre des bajoyers afin de préserver une situation d’équilibre. Exemple : Deux expérimentations ont été réalisées sur les écluses de Daours (80) et Méricourt (80) sur le Canal de la Somme en prévision de travaux de réfection. Le principe de ces expérimentations est de mesurer en effectuant des bassinées successives l’évolution du niveau d’eau dans le sas et dans le terrain proche afin d’avoir une idée sur le comportement dans la nappe dans un plan transversal au sas de l’écluse. Quatre capteurs de pressions interstitielles sont disposés suivant la configuration de la figure 18 (le capteur dans l’écluse n’est pas représenté). Cette expérimentation à permis de faire les remarques suivantes (figure 19). Pour Daours, le niveau de la nappe est relativement bas par rapport au niveau du terrain naturel puisqu’il est présent vers 4.5 m de profondeur. Deux bassinées ont été réalisées à deux vitesses différentes. Le niveau d’eau dans les bajoyers (PZ1 et 2) a légèrement augmenté mais semble écrété à un certain niveau. Cette observation permet de mettre en évidence un drain dans le sens longitudinal qui limite le niveau d’eau dans les terrains adjacents aux bajoyers. Par ailleurs, il apparaît clairement que l’eau circule librement entre le sas et les terrains adjacents ce qui prouve la perméabilité des bajoyers du sas. Cette expérimentation met en évidence que la mise à sec ne risque pas de mettre en péril la stabilité de l’écluse. En effet, le niveau de la nappe est relativement bas même en hiver et même s’il venait à monter les terrains sont suffisamment perméables pour évacuer l’eau dans le sas ou directement dans le bief aval. Pour Méricourt, la situation est quelque peu différente. Les niveaux d’eau sont beaucoup plus hauts puisque la nappe est présente dès 1.6 m de profondeur. Initialement, le sas de l’écluse est plein. La réalisation d’une bassinée montre que les niveaux d’eau dans les bajoyers (PZ1 et 2) suivent le niveau d’eau dans le sas avec un décalage tel qu’une différence de plus de 1 m est constatée au cours de l’expérience. Un calcul permettant d’estimer le facteur de sécurité pourrait être réalisé. On peut en déduire que lors de la mise à sec du sas, il faudra aller particulièrement lentement pour ne pas induire une trop grande différence entre le niveau d’eau dans le sas et le niveau dans les terrains adjacents. Lors des travaux, une remontée de la nappe n’apparaît pas comme être un facteur de dangerosité car les terrains sont a priori suffisamment perméables pour évacuer l’eau. 38 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Réalisation d’une vidange d’entretien Figure 18 : Implantation des différents piézomètres. Piézomètre de référence dans l'écluse PZ1 Bief amont Bief aval PZ2 L>5 m PZ3 PZ2 PZ1 L>5 m PZ3 Piézomètre de référence dans l'écluse 0,5 m 0,5 m Figure 19 : Évolution de la profondeur du niveau d’eau dans les terres et dans le sas. Ecluse de Daours : le 12 janvier 2005 Heure Profondeur de l’eau en m 12:00 12:30 0 13:00 13:30 14:00 14:30 15:00 15:30 16:00 1 2 Ecluse PZ1 3 PZ2 PZ3 4 5 6 Ecluse de Méricourt : le 24 janvier 2005 Heure Profondeur de l’eau en m 12:00 12:30 0 13:00 13:30 14:00 14:30 15:00 15:30 16:00 0,5 1 1,5 2 Ecluse PZ1 PZ2 PZ3 2,5 3 Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 39 Détection de vides La détection des vides doit permettre d’avoir un avis sur l’état structurel des bajoyers. Plusieurs techniques sont disponibles. Elles reposent essentiellement sur l’utilisation d’ondes radar. L’envoi de ces ondes dans le sol puis la mesure de leur vitesse de retour suite à leur réflexion et à leur réfraction permet d’avoir une idée sur la nature du sous-sol. Mesures des déplacements Trois systèmes de mesures permettent de détecter les déplacements d’une structure. Les types de systèmes dépendent de la précision de la mesure et de la période de temps séparant deux mesures successives. 8 Le premier type est basé sur le relevé topographique de certains points. De simples jalons métalliques peuvent être mis en place afin de suivre les déplacements relatifs de la structure. Ces mesures peuvent révéler des déplacements de certains points de la structure et justifier la mise en place d’appareils de mesure plus précis permettant de suivre l’évolution des déplacements sur des périodes de temps plus courtes. 8 Le second type de mesure est basé sur la pose d’inclinomètres et d’extensomètres. Ils permettent de suivre plus précisément l’évolution de certains points et de réduire l’intervalle de temps entre les mesures. Ils ont une précision de l’ordre de 10-3m pour l’inclinomètre et de l’ordre de 10-4m pour l’extensomètre. 8 Le troisième type repose sur les mêmes appareillages que précédemment auxquels on peut ajouter le tachéomètre. Dans ce cas, le relevé des mesures est automatisé et permet d’effectuer des séries de mesures en grand nombre sur des périodes de temps réduites. Ils ont une précision de l’ordre de 10-4m. La mise en place de tels appareils peut être instructive au sens qu’elle doit permettre de donner des indications sur l’état de stabilité des bajoyers. Si des déplacements assez importants sont mesurés pendant une sassée classique (l’importance des déplacements doit être déterminée par un spécialiste sur la base des données collectées précédemment), il est à craindre qu’une vidange totale du sas induise des dommages. Dans le cas inverse, ces mesures peuvent permettre de justifier la vidange du sas. Durant la vidange, le relevé des mesures peut aussi être un élément annonciateur d’une rupture du bajoyer et indiquer qu’une vidange totale est impossible à réaliser. La mise en œuvre de tels types d’instrumentation doit faire l’objet d’une réflexion basée sur les données disponibles et les résultats souhaités. 8 Travaux de confortement Les méthodes qui vont être présentées dans cette section peuvent être réparties en deux ensembles. 8 Les premières consistent à agir sur la stabilité du bajoyer ou sur la rigidité du radier. 40 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Réalisation d’une vidange d’entretien 8 Les secondes sont fondées sur le fait qu’une grande partie des problèmes présentés dans le chapitre "Éléments d’évaluation de l’état et du comportement d’une écluse avant et pendant" proviennent d’une mauvaise maîtrise des écoulements et par conséquent elles proposent d’agir sur l’étanchéité des structures constituant l’écluse et des terrains à proximité. Actions sur les structures Les types de travaux qui vont être présentés consistent à augmenter la rigidité du bajoyer ou du sas. Les techniques classiques sont : 8 les tirants actifs ou non 8 les clous 8 les micropieux 8 le jet-grouting. © CETE Figure 20 : Tirant d’ancrage 8 Un tirant actif est constitué de deux parties : une partie libre et une partie injectée qui sert d’ancrage. La tête du tirant est précontrainte pour appliquer une force s’opposant aux efforts de poussée. Le tirant est composé de torons semblables à ceux utilisés dans le domaine du béton précontraint ou d’un unique câble de diamètre variable (20 à 50 mm). Dans le cas de maçonneries, on utilisera une très faible précontrainte, voire des tirants passifs. 8 Un tirant passif est un simple câble qui est généralement associé à un contre-rideau. Il se met en tension du fait d’un léger déplacement de la structure. L’effort dans le tirant est repris par le contre-rideau. Les clous sont des barres scellées dans le sol sur toute leur longueur. Ils se mettent en action du fait du déplacement de la structure. 8 Les micropieux sont assez proches des tirants dans la phase de mise en œuvre. Ils sont constitués d’un profilé en acier scellé dans le sol par l’injection d’un coulis. Leur diamètre est généralement voisin de 200 mm. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 41 Figure 21 : Réalisation d’un forage pour la mise en place d’une épingle (écluse de Port à l’Anglais, Vitry-sur-Seine, 94, Seine) Des méthodes plus simples sont quelquefois mises en œuvre comme sur l’écluse de Frise (80) où l’un des bajoyers s’était déplacé de plusieurs centimètres suite à une mise à sec. Un profilé métallique avait alors été battu dans l’urgence pour éviter la destruction totale de la structure. Les dispositifs de buttonage provisoire peuvent être envisagés lorsque : 8 La vidange n’a pas à être renouvelée 8 Les travaux de confortement définitif exposés avant nécessitent une intervention dans les parties continuellement immergées en exploitation. 42 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France 3.00 2.15 1.60 30.50 1.20 RN amont : 29.65 Seine Micropieu Épingles Maçonnerie 23.45 23.30 Réalisation d’une vidange d’entretien Figure 22 : Renforcement d’un bajoyer : épinglage et mise en en place d’un micropieu (Port à l’Anglais, 94, Seine). Alluvions Mamo Calcaire Calcaire Micro pieux Figure 23 : Renforcement du bajoyer par palplanches (écluse de Frise, 80, Canal de la Somme) Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 43 Actions sur les écoulements et l’étanchéité Les problèmes d’étanchéité sont la plupart du temps dus à une érosion interne du terrain sous l’action de gradients hydrauliques trop importants. Les techniques de jet-grouting ou d’injection permettent de combler ces vides. Le jet-grouting consiste à réaliser des inclusions plus rigides dans le terrain en place. La technique consiste à réaliser un forage puis à injecter à haute pression un coulis de ciment bentonite. En remontant l’outil, une colonne de matériaux plus rigides est mise en œuvre. Dans certains cas, il est possible d’agir sur le radier. L’objectif est d’éviter tous les problèmes de soulèvement dus aux phénomènes de renard ou de sous-pressions. Des opérations de clouage et de tirantage peuvent être réalisées. Les travaux de confortement peuvent consister à drainer les terrains situés à l’arrière des bajoyers. On peut imaginer par exemple la mise en place d’un système de faisceaux de drains sub-horizontaux depuis la tête aval qui permettrait de rabattre le niveau piézométrique à une hauteur choisie. Des systèmes plus simples comme les barbacanes peuvent aussi être mis en place. 9 Déroulement de la vidange Une fois la décision de mise à sec prise, il est nécessaire de réaliser celle-ci dans les meilleures conditions de sécurité. La surveillance des déplacements de l’ouvrage et des mouvements d’eau doit être effectuée le plus souvent possible. Dans la grande majorité des sinistres, les gestionnaires ne font que constater les dégâts et n’assistent quasiment jamais à leur déroulement en temps réel. Très peu d’informations sont donc disponibles sur la durée des phénomènes induisant des dégradations sur l’ouvrage. Comme ceux-ci sont susceptibles de se dérouler sur des périodes de temps comprises entre quelques secondes et quelques heures, il est nécessaire de multiplier au maximum les informations disponibles sur le comportement de l’ouvrage en temps réel. Cette surveillance peut être visuelle ou basée sur des moyens de mesures plus perfectionnés (extensomètres par exemple pour les déplacements). Il s’agit de détecter tout comportement anormal qui pourrait traduire un début de rupture. 44 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Parallèlemement à ces règles de surveillance, des procédures peuvent être envisagées au niveau de la vidange : 8 Le niveau d’eau doit être abaissé le plus lentement possible (dans les limites permises par les conditions d’exploitation) afin de diminuer le gradient de l’écoulement et donc de limiter les fuites de matériaux mais aussi pour permettre aux pressions interstitielles de se rééquilibrer. 8 L’écluse peut ne pas être entièrement vidée si les travaux ne le nécessitent pas absolument. Dans ce cas, il est impératif de veiller à la bonne étanchéité des batardeaux. 8 Pour les écluses sur des cours d’eau, il est préférable de réaliser la mise à sec lors d’une période de basses eaux. 8 La surveillance doit être maintenue jusqu’au retour du niveau d’eau dans l’écluse à un niveau habituel. Cette surveillance peut être visuelle ou basée sur des moyens de mesures plus perfectionnés (extensomètres par exemple pour les déplacements). Il s’agit de détecter tout comportement anormal qui pourrait traduire un début de rupture. Réalisation d’une vidange d’entretien La détection de ces mouvements doit permettre de prendre des décisions permettant de stopper l’évolution de ces derniers. La première peut consister à augmenter la hauteur d’eau dans le sas jusqu’à un niveau garantissant la sécurité de l’ouvrage. Ceci peut être possible avec des pompes. La seconde est de mettre en œuvre des moyens de confortement provisoire (comme des butons par exemple) afin de soulager la structure d’une partie des efforts auxquels elle est soumise. La détection de ces mouvements doit permettre de prendre des décisions permettant de stopper l’évolution de ces derniers. La première peut consister à augmenter la hauteur d’eau dans le sas jusqu’à un niveau garantissant la sécurité de l’ouvrage. Ceci peut être possible avec des pompes. La seconde est de mettre en œuvre des moyens de confortement provisoire (comme des butons par exemple) afin de soulager la structure d’une partie des efforts auxquels elle est soumise. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 45 Fiche de suivi de la méthodologie Service Navigation : ................................................................................................................. Fleuve, rivière ou canal : ......................................................................................................... Écluse : ........................................................................................................................................... Date de début des études de faisabilité : ........................................................................ 1. Géométrie générale Commentaires ........................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................... 2. Données du site Commentaires ........................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................... Synthèse n°1 Ecluse Longueur L en m Hauteur de chute H en m Largeur e en m Profondeur de la nappe à proximité des bajoyers Type de sols Caractéristiques connues des sols (résistance mécanique, perméabilité…) Notation : -1, 0, 1 Notations : 8 -1 : situation à risque. 8 0 : ne sait pas. 8 1 : situation favorable. Pas d’addition des notations Analyse du tableau 3.Travaux antérieurs – Archives Commentaires ........................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................... 4. Expériences précédentes de mise à sec Commentaires ........................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................... 5.Observations sur l’état de l’écluse Commentaires ........................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................... 46 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Tableau de synthèse n°2 Type de structure Pathologies ou dommages observés – Évolution de l’environnement Description du dommage Vulnérabilité de la structure par rapport au dommage - Localisation Occurrence du dommage sur la structure Risque Réalisation d’une vidange d’entretien Synthèse n°2 HISTORIQUE Expériences précédentes de mise à sec Crues, guerres, événements exceptionnels Desquamation Disjointement Érosion Usure Maçonnerie Problème d’appareillage EFFETS DES DÉSORDES Décohésion Bajoyer – Radier – Tête amont ou aval – Rainure de batardeau Désorganisation Abrasion Décollement Béton armé Acier Fissuration verticale ou biaise Armatures apparentes Infiltrations – Dépôts de calcite Corrosion locoalisée Corrosion intense Déformations globales CAUSES DES DESORDRES Modification de la poussée hydrostatique Mise en place définitive de surcharges Réalisation de travaux Actions du gel Fuites et suintement Actions de l’eau (érosion, mise en évidence de surpressions interstitielles, affouillement) Cotation du risque (pas d’addition) : 1 : risque faible 2 : risque moyen 3 : risque fort Analyse du tableau Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 47 6. Réflexion – Faisabilité de la vidange Analyse des tableaux 1 et 2 7. Investigations complémentaires Commentaires si nécessaire 8. Travaux de confortement Commentaires si nécessaire Décision de vidange OUI Qualité et signature de l’autorité compétente NON Qualité et signature de l’autorité compétent Réserves : 9. Mise en place d’un dispositif de surveillance Description Suivi de vidange Date de début de vidange : Observations durant la mise à sec : Travaux effectués : Date fin de vidange : 48 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Réalisation d’une vidange d’entretien > Exemples d’application de la méthodologie « vidange du sas d’une écluse » Cette partie a pour objectif, au travers de fiches d’exemples, d’appliquer la méthodologie présentée précédemment à trois écluses : 8Port à l’Anglais sur la Seine (Vitry-sur-Seine, 94). 8Damery sur la Marne canalisée (Damery, 51). 8Les Quatre Cheminées sur la Meuse (Givet, 08). Les trois exemples choisis couvrent des situations les plus différentes possibles : le premier est celui où des dommages importants ont été causés par la vidange, le second est celui d’une situation de vidange sans problème apparent et le troisième est celui d’une écluse où la vidange a été précédée de travaux de confortement. Dans chaque cas, l’exemple d’application est précédé d’une présentation de l’écluse,des dommages qu’elle a éventuellement subis et d’une analyse succincte de leurs causes. Les fiches reprennent le modèle proposé page 46 mais ne comportent pas tous les éléments définis dans la méthodologie car il a été impossible de suivre pour des raisons de temps et d’organisation la mise à sec d’une écluse depuis l’étude de faisabilité jusqu’au rétablissement du trafic une fois les travaux réalisés. Par ailleurs, il a été impossible d’examiner en détail l’ensemble des dommages existant sur l’écluse. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 49 FICHE N°1 : Écluse de Port à l’Anglais (Vitry-sur-Seine, Seine, 94) (Service Navigation de la Seine, Arrondissement Seine Amont, Subdivision de Joinville-le-Pont) Présentation du contexte – Analyse des dommages Cette écluse est située sur la Seine en amont de Paris et permet aux embarcations d’entrer ou de sortir dans le bief de Suresnes. Elle est constituée de deux sas de part et d’autre du fleuve. Le sas en question est celui de la rive gauche. Il est en maçonnerie et sa construction date du milieu du XIXème siècle. Le bajoyer côté terre avait déjà subi des déformations de l’ordre de quelques centimètres lors d’une précédente vidange à la fin de la Seconde Guerre Mondiale dans le cadre de la mise à sec du bief de Suresnes. Lors d’une mise à sec en décembre 2003, un effondrement partiel du bajoyer côté fleuve est survenu. Les travaux de confortement ont consisté à renforcer le bajoyer par des micropieux. La déformation du bajoyer n’a pas été corrigée car cela nécessitait trop de travaux si bien que celle-ci est encore visible actuellement. Tassement vertical du quai induit par un phénomène de glissement. Déformation du bajoyer après la réalisation des travaux. L’observation de ces désordres et l’analyse qui a pu être effectuée par un bureau d’études spécialisé conduisent à mettre en évidence un mouvement de glissement plutôt que de renversement ou de basculement. 50 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Il s’agit de suivre la démarche proposée dans le logigramme. 1. Géométrie générale L’écluse a une longueur de 180 m et une largeur de 11.4 m. La hauteur maximale des bajoyers est un peu supérieure à 6 m. La hauteur de chute est de l’ordre de 3 m. L’écluse est en maçonnerie. Les bajoyers sont des murs poids autostables de 3 m de large possédant grossièrement une forme rectangulaire. Le radier du sas n’est pas revêtu. Réalisation d’une vidange d’entretien Application de la méthodologie 2. Données du site Il s’agit d’un écluse en rivière. La nappe est à peu de chose près au niveau du lit de la Seine. Le terrain est très hétérogène. On trouve un mélange d’alluvions de 1 à 2 m d’épaisseur, de matériaux rapportés plus ou moins traités aux liants hydrauliques et enfin le substratum marno-calcaire sur lequel est fondée l’écluse. Analyse : La collecte de ces données montre que cette écluse est un ouvrage relativement sensible vis-à-vis d’une baisse du niveau d’eau dans le sas. L’extrême proximité de la Seine induit un fort gradient, dans le sens transversal à l’écluse, entre le lit du fleuve et le sas. Par ailleurs, le radier non revêtu constitue un élément défavorable sur le plan mécanique. Synthèse n°1 Tableau de synthèse n°1 Ecluse Port à l’Anglais Cotation : Longueur L en m Plutôt favorable Hauteur de chute H en m Moyenne 1 1 Largeur e en m Profondeur de la nappe à proximité des bajoyers Type de sols Sans incidence 0m Gros risque sur le bajoyer côté Seine. Gradient transversal très important Alluvions (caractéristiques mécaniques faibles) Sols remaniés 1 -1 0 Analyse : La collecte de ces données montre que cette écluse est un ouvrage relativement sensible vis-à-vis d’une baisse du niveau d’eau dans le sas. L’extrême proximité de la Seine induit un fort gradient dans le sens transversal à l’écluse entre le lit du fleuve et le sas. Par ailleurs, le radier non revêtu constitue un élément défavorable sur le plan mécanique. 3. Travaux antérieurs - Archives Aucune donnée faisant référence à des travaux d’importance n’est disponible. 4. Expériences précédentes de mises à sec Le seul retour d’expérience date de la fin de la Seconde Guerre Mondiale quand le bief de Suresnes fut mis à sec. Des déplacements de quelques centimètres furent alors observés sur le bajoyer côté terre. Cet élément aurait pu éventuellement orienter les gestionnaires vers une étude de diagnostic et la réalisation de travaux de renforcement. 5. Observations sur l’état de l’écluse Il semble que celles-ci n’ont pas permis la mise en évidence d’éléments susceptibles d’anticiper les phénomènes décrits précédemment. L’écluse présentait bien évidemment des dommages, toutefois, le fait que le bajoyer côté fleuve soit relativement étroit et que le niveau d’eau dans celui-ci soit constant (puisqu’il est alimenté en permanence par la Seine) aurait pu être un élément exigeant les plus grandes précautions. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 51 Synthèse n°2 Tableau de synthèse n°2 HISTORIQUE Type de structure Pathologies ou dommages observés – Évolution de l’environnement Expériences précédentes de mise à sec Crues, guerres, événements exceptionnels Description du dommage Vulnérabilité de la structure par rapport au dommage - Localisation Occurrence du dommage sur la structure Déformation du bajoyer côté terre en 1945 Risque 2 Sans commentaire Desquamation Trés léger 1 Disjointement Trés léger 1 Trés léger 1 Trés léger 1 Érosion Usure Maçonnerie Problème d’appareillage EFFETS DES DÉSORDES Décohésion Bajoyer – Radier – Tête amont ou aval – Rainure de batardeau Désorganisation Abrasion Décollement Béton armé Acier Fissuration verticale ou biaise Armatures apparentes Infiltrations – Dépôts de calcite Corrosion locoalisée Corrosion intense Déformations globales CAUSES DES DESORDRES Modification de la poussée hydrostatique Déformation du bajoyer côté terre Déformation du bajoyer côté terre lors de la vidange du bief Evolution possible avec une prochaine mise à sec Sans commentaire 2 Une seule fois 2 Mise en place définitive de surcharges Réalisation de travaux Actions du gel Fuites et suintement Ponctuellement 2 Actions de l’eau (érosion, mise en évidence de surpressions interstitielles, affouillement) Analyse : Hormis le déversement observé sur l’écluse dans les années 40, aucun élément ne semblait indiquer des zones de fragilité. 52 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Ces éléments sont apparus suffisants pour effectuer la baisse du niveau d’eau dans le sas. Dans cet exemple, les éléments disponibles étaient assez faibles et ne permettaient pas de réaliser une analyse fine du comportement du sas. Dans le logigramme, les éléments classés dans les étapes « expériences précédentes de vidanges » et « observations » n’ont pas permis de mettre en évidence des zones fragiles. Toutefois, les déformations observées en 1945 et la proximité de la Seine auraient dû être un signal d’alerte. La description de l’enchaînement des événements laisse penser que le problème majeur a aussi été un défaut de surveillance. Le diagnostic du bureau d’études spécialisé montre que le niveau minimum qui avait été fixé dans le marché garantissait la stabilité du bajoyer. Cette surveillance aurait pu consister en un simple contrôle visuel. Réalisation d’une vidange d’entretien 6. Réflexion – faisabilité de la vidange 9. Mise en place d'un dispositif de surveillance Fin décembre 2003, lors de travaux de rénovation, le niveau d’eau dans le sas a été abaissé mais un défaut d’étanchéité des batardeaux a entraîné une diminution du niveau d’eau plus importante que prévue. Celle-ci a bien été repérée par l’éclusier en fin de soirée mais l’entreprise n’a pas jugé opportun d’y remédier et a préféré attendre le lendemain (ce temps de réaction peut s’expliquer par la période de l’année qui correspondait la fin du mois décembre et par l’instant où le problème a été signalé qui correspondait quant à lui à une fin de soirée). Ce délai a été très préjudiciable au bajoyer côté fleuve qui a commencé à se fissurer. Le temps de rétablir le niveau d’eau dans le sas, les fissures ont évolué jusqu’à produire les dégâts suivants : 8 Une fissure longitudinale de plusieurs centimètres de large parcourant le bajoyer sur plusieurs mètres jusqu’à la tête amont. 8 Des fissures inclinées sur la face intérieure du bajoyer. 8 Un tassement du perré d’environ 50 cm à environ 1 m en arrière de la crête du bajoyer. Celui-ci est accolé au bajoyer et constitue la berge de la Seine. 8 Un déplacement de la tête du bajoyer de 30 cm vers le sas. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 53 FICHE N°2 : Écluse n°2 de Damery (Venteuil, Canal de la Marne canalisée, 51) (Service Navigation de la Seine, Arrondissement Champagne, Subdivision de Château-Thierry) Présentation du contexte – Analyse des dommages Cette écluse construite en 1890 est située sur la Marne canalisée entre les communes de Venteuil et Damery dans le département de la Marne (51). Elle est conçue en maçonnerie. Il est à noter qu’une partie des bajoyers a été renforcée par un treillis en béton armé. Elle présente des dommages qui ne permettent pas d’envisager sa vidange sans études complémentaires. Vue générale de l’écluse de Damery 54 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France 1. Géométrie générale L’écluse est relativement courte (50 m) et la hauteur de chute est faible (2.15 m) si bien que les gradients hydrauliques entre l’amont et l’aval sont peu importants. Les bajoyers sont inclinés à 45°. 2. Données du site L’écluse se situe au fond de la vallée de la Marne dans une zone alluviale. Une nappe doit donc être présente et son niveau doit correspondre au niveau de la Marne qu’elle soit canalisée ou libre. Synthèse n°1 Réalisation d’une vidange d’entretien Application de la méthodologie Ces éléments montrent que l’écluse a une configuration géométrique relativement favorable pour sa stabilité. Tableau de synthèse n°1 Ecluse Écluse n°2 de Damery Cotation : Longueur L en m Hauteur de chute H en m Largeur e en m Profondeur de la nappe à proximité des bajoyers Type de sols 50 m 2m 7,8 m 0m Alluvions 1 1 1 1 1 Analyse : Le risque est relativement faible compte-tenu de l’inclinaison des bajoyers (45°) et de leur forte perméabilité qui permet d’évacuer les surpressions interstitielles (il est par ailleurs possible de remplir le sas d’écluse uniquement par les venues d’eau du terrain naturel). 3. Travaux antérieurs - Archives Des travaux ont déjà été réalisés en 1967 et consistaient à ferrailler partiellement les bajoyers. 4. Expériences de vidange A priori, aucune donnée n’est disponible. 5. Observations sur l’état de l’écluse De nombreuses pathologies peuvent être mises en évidence tant au niveau des parties en maçonnerie que de celle en béton armé. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 55 Synthèse n°2 Tableau de synthèse n°2 HISTORIQUE Type de structure Pathologies ou dommages observés – Évolution de l’environnement Expériences précédentes de mise à sec Crues, guerres, événements exceptionnels EFFETS DES DÉSORDES Maçonnerie Bajoyer – Radier – Tête amont ou aval – Rainure de batardeau Béton armé Acier Vulnérabilité de la structure par rapport au dommage - Localisation Déformation du bajoyer côté terre en 1945 Peu d'informations Occurrence du dommage sur la structure Risque 2 Sans commentaire Desquamation Importante Moyenne Importante 2 Disjointement Importante Moyenne Importante 2 Érosion Importante Moyenne Importante 2 Usure Importante Moyenne Importante 2 Problème d’appareillage Importante Moyenne Importante 2 Décohésion Importante Moyenne Importante 2 Désorganisation Importante Moyenne Importante 2 Abrasion Importante Moyenne Importante 2 Décollement Importante Moyenne Importante 2 Fissuration verticale ou biaise Importante Moyenne Importante 2 Armatures apparentes Importante Moyenne Importante 2 Importante Moyenne Importante 2 Déformation du bajoyer côté terre Evoluition possible avec une prochaine mise à sec Sans commentaire 2 Une seule fois 2 Infiltrations – Dépôts de calcite Corrosion locoalisée Corrosion intense Déformations globales CAUSES DES DESORDRES Description du dommage Modification de la poussée hydrostatique Mise en place définitive de surcharges Réalisation de travaux Actions du gel Dégradation de la maçonnerie Moyenne Importante Fuites et suintement Dégradation de la maçonnerie Moyenne Importante Actions de l’eau (érosion, mise en évidence de surpressions interstitielles, affouillement) Dégradation de la maçonnerie Moyenne Importante 2 Analyse : L‘écluse est en mauvais état mais les efforts qu’elle doit reprendre sont assez faibles si bien que le risque de l’endommager plus au cours de la vidange est faible. 56 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Les éléments rassemblés au cours des différentes étapes permettent d’envisager la vidange de l’écluse sans risque majeur mais avec des précautions dues aux fuites observées. 9. Mise en place d'un dispositif de surveillance La mise à sec du sas est donc possible à ce stade de l’analyse. Toutefois des précautions devront être prises lors de la vidange. La première réside dans une observation attentive du comportement de l’écluse et la seconde dans la mise à disposition de moyens permettant de remplir le sas (une grue permettant de lever le batardeau amont est prévue). Réalisation d’une vidange d’entretien 6. Réflexion – faisabilité de la vidange Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 57 FICHE N°3 : Écluse des Quatre Cheminées (Givet, Meuse, 08) (Service Navigation Nord-Est, Subdivision de Givet) Présentation du contexte – Analyse des dommages Cette écluse en maçonnerie est située sur la Meuse juste avant la frontière belge. C’est une écluse en dérivation accolée à un barrage. Elle a été mise à sec au cours de l’année 2005 pour être approfondie d’environ 60 cm. Du fait de l’approfondissement, elle a subi d’importants travaux de confortement préalables. Application de la méthodologie 1. Géométrie générale L’écluse est relativement courte (50 m) et la hauteur de chute est faible (2.15 m) si bien que les gradients hydrauliques entre l’amont et l’aval sont peu importants. Les bajoyers sont inclinés à 45°. 2. Données du site La nappe est à peu de chose près au niveau de la Meuse. Le terrain est constitué des alluvions de la Meuse puis du substratum schisteux. Le radier de l’écluse est fondé sur les schistes. En général, les matériaux alluvionnaires présentent des caractéristiques mécaniques moyennes donc leur présence constitue un élément défavorable dans l’analyse de la stabilité. Le bras de dérivation sur lequel est construit l’écluse est relativement éloigné (au moins une dizaine de mètres) de la Meuse donc les gradients hydrauliques entre le cours d’eau et le sas vide sont a priori peu importants. Synthèse n°1 Tableau de synthèse n°1 Ecluse Les Quatre Cheminées Longueur L en m Hauteur de chute H en m Largeur e en m Profondeur de la nappe à proximité des bajoyers 125 m 5m 12 m 0-1 m Alluvions Remblais rapportés Schistes au niveau des fondations 1 1 1 1 1 Cotation : Type de sols La collecte de ces données montre que cette écluse est un ouvrage dont la géométrie ne pose pas de problème à la réalisation d’une vidange. La présence de la nappe n’est pas un fait interdisant la vidange car il est possible de rabattre celle-ci autour de l’écluse. En effet, elle est alimentée par la Meuse mais son influence est moins importante que dans d’autres situations (cf. fiche n°1). 3. Travaux antérieurs - Archives Aucune donnée faisant référence à des travaux d’importance n’est disponible hormis pour ceux réalisés l’année précédente. 4. Expériences de vidange Aucune information ne ressort des vidanges précédentes. 58 | Guide stabilité des écluses - Voies navigables de France Cette écluse en maçonnerie est de manière générale dans un excellent état. Les seules dégradations constatées affectent les chaînes d’angle qui sont constituées d’une pierre plus tendre que le reste de la structure. Cependant, aucun défaut d’étanchéité n’est constaté. Réalisation d’une vidange d’entretien 5. Observations sur l’état de l’écluse Détail des chaînes d'angle en maçonnerie. Synthèse n°2 Aucune zone de fragilité ne peut être mise en évidence. Le tableau de synthèse n°2 n’a donc pas besoin d’être établi. 6. Réflexion – faisabilité de la vidange Le site de l’écluse, sa configuration géométrique et son état structurel permettent la mise à sec du sas sans précaution particulière. Seules les règles habituelles doivent être mises en application (surveillance humaine continue). 8. Travaux de confortement Un confortement de l’écluse par clous verticaux avec vidange partielle de l’écluse avait précédé la vidange totale. Ce confortement préventif montre qu’un maximum de précautions avait été pris. Ce système de clouage avait été réalisé afin de préserver la stabilité des bajoyers durant la destruction partielle du radier et l’approfondissement du sas. Le dimensionnement de ce système intégrait en outre l’éventualité d’une crue. Toutes les conditions étaient donc réunies pour que la vidange se passe dans les meilleures conditions. Voies navigables de France - Guide stabilité des écluses | 59 division Restauration et Développement du Réseau 175, rue Ludovic Boutleux, boîte postale 820, 62408 Béthune cedex téléphone 03 21 63 29 87 télécopie 03 21 63 24 58 www.vnf.fr avril 2007 Réalisation : Parimage - Crédits photos et figures : VNF/P. Lemaître, CETE Lille et SNS