Hangar “Caquot” - Ministère de l`écologie et du développement
Transcription
Hangar “Caquot” - Ministère de l`écologie et du développement
1932 - 2012 Aéroport de Lyon-Bron Hangar “Caquot” histoire du premier hangar avions à “double auvent” réalisé en France Dossier réalisé avec le soutien de la Mission Mémoire (DGAC) et de l’association Anciens Aérodromes Guilhem Labeeuw (DGAC/SNIA) - octobre 2012 Reconstitution virtuelle du hangar “Caquot” de Bron dans son état de 1932 Réalisation : HB Concepts L’auteur tient à remercier : - la mission mémoire de la DGAC et le SNIA - l’association Anciens Aérodromes - la SLHADA - + personnes ressources : Paul Mathevet à compléter 2012 Les derniers jours du hangar “Caquot” de Lyon-Bron chapitre 1 remerciements Hangar en béton armé du port aérien de Bron - 1932 d’après le concept novateur de l’ingénieur Albert Caquot introduction 1932 - 2012 Une page de l’histoire du patrimoine aéronautique français s’est tournée le 28 juin 2012 sur l’aéroport de Lyon-Bron. Construit tout juste après la première aérogare de Bron il y a quatre-vingts ans, il n’aura pourtant fallu que quelques jours pour démolir cet édifice considéré comme le premier exemplaire français de hangar avion en béton armé de type “double auvent”. Les perspectives de développement de la plateforme aéronautique de Bron, les contraintes d’exploitation et son état de dégradation ont eu raison de ce vestige de l’architecture aéronautique des années 30. Depuis un nouveau hangar pour l’entretien des véhicules d’intervention du SSLIA de l’aéroport est venu s’intercaler entre l’aérogare et le restaurant de l’aéroport. Surnommé localement “le Caquot”, ce hangar à la forme atypique, avec sa proue en forme de vigie et ses auvents rappelant des ailes d’avion, avait sû conserver quelques traces d’un passé plus glorieux. En 1931, la Chambre de Commerce de Lyon décidait de doter la plateforme d’un hangar avions de “nouvelle génération”. Sur un programme directement inspiré des études du service des Bases du Ministère de l’air, rattaché à l’époque à la direction d’Albert Caquot, les architectes Chomel & Verrier, auteurs de la première aérogare de Bron, furent chargés d’en exécuter les travaux. L’entreprise Limousin, avec pour ingénieur Gaston Le Marec (successeur d’Eugène Freyssinet dans cette entreprise), remporta le marché de construction. Le hangar fut livré en 1932, le premier d’une série de hangars du même type construits sur différentes plateformes aéronautiques, en France comme au Maroc ou au Brésil. Cependant, le travail mené conjointement par la mission mémoire de la Direction générale de l’Aviation civile (DGAC), le Service National d’Ingénierie Aéroportuaire (DGAC/ SNIA) et les Aéroports de Lyon a permis la réalisation de supports oeuvrant à sa mémoire. A côté des maquettes et outils de reconstitution virtuelle, le présent ouvrage se veut, à son tour, apporter une pierre au maintien de la mémoire de cette réalisation historique. Hangar “Caquot” de Bron en 1932 Extrait de la revue “L’architecture, 1932” Hangar “Caquot” de Bron en 2011 Photo G. Labeeuw Démolition du hangar “Caquot” de Bron en juin 2012 Photo : SLHADA Démolition du hangar “Caquot” de Bron en juin 2012 Photo : SLHADA Vue aérienne du hangar “Caquot” en juin 2011 source : bing.fr Lourdement bombardé en 1944, le hangar fut reconstruit quasiment à l’identique, avant de connaître quelques années plus tard des modifications importantes, lui faisant perdre sa destination aéronautique première au profit d’un garage pour les véhicules d’intervention et de sécurité de la plateforme (SSLIA). La nouvelle caserne du SSLIA de Bron inaugurée en juin 2012, juste avant la démolition du hangar Caquot. Architectes : HB Concepts . Source : Aéroports de Lyon Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 4 5 Maquette d’ensemble du hangar “Caquot” de Bron (échelle 1/72ème), dans l’état de 1932 Réalisation : Maquettes HP Extraits de la visite virtuelle réalisée par le SNIA (C. Morand) sur la base d’une modélisation numérique commandée à l’agence d’architecture ayant réalisé la nouvelle caserne SSLIA (HB Concepts). Réalisation : SNIA & HB Concepts Maquette de détail de la structure (échelle 1/50ème), montrant l’appui central en béton, une section de la poutre longitudinale et la structure triangulée supportant les auvents en béton. Réalisation : Maquettes HP Vue intérieure de la maquette, portes ouvertes. Réalisation : Maquettes HP La réalisation des maquettes d’ensemble et de structure a été confiée par Aéroports de Lyon à la société Maquettes HP. Un travail préalable sur les quelques documents d’époque (plans et cartes postales) a été réalisé afin de consolider la véracité de certains détails (pavés de verre, portes, escaliers intérieurs). Les avions représentés sur la maquette ont été choisis au regard de leur présence à un moment donné sur la plateforme de Bron. La réalisation d’un outil de visualisation virtuelle est un choix de la mission mémoire de la DGAC et du SNIA, dans l’optique d’une mise à disposition du grand public sur le site internet du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, section transport aérien. Cet outil de visualisation à 360° autorise une navigation à l’intérieur du hangar, à partir de plusieurs points de vue prédéfinis mais également depuis la toiture pour mieux apprécier l’ingéniosité des structures triangulées en béton supportant les auvents. Il est accessible en ligne sur le site internet du ministère. Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 6 7 chapitre 2 1932 Repères historiques autour de la construction du premier hangar avions à “double auvent” en béton armé Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 8 9 L’apport d’Albert Caquot à la production architecturale aéronautique 1928 : A. Caquot est rappelé au ministère de l’Air Albert Caquot (Vouziers 1881-Paris 1976) Ingénieur (X- P&C promotion 1899) Hangars avions Dans les débuts de l’aviation, la construction de hangars pour le stationnement et la maintenance des avions répond à plusieurs objectifs. Les hangars doivent être clos, couverts et permettre d’y déplacer plusieurs appareils de taille variable. Ces exigences conduisent après 1918 à l’utilisation des structures de portée plus importante que le type de hangar le plus répandu alors : les “Bessonneau”. L’implantation des hangars est déterminée par le plan de masse des terrains. A quelques exceptions près, comme le premier hangar avion en béton conçu par Freyssinet en 1916 sur le camp d’Avord, les hangars ne comportent bien souvent qu’une grande porte ouvrant sur le côté des pistes en herbe. Quand au plan des hangars, si les formes polygonales ou circulaires sont tout à fait fonctionnelles, les raisons précédentes ont conduit à privilégier les dispositifs rectangulaires avec un seul pan ouvert. Avec les progrès réalisés sur les portes de grandes dimensions, il a été possible d’élargir les longs-pans côté ouvrant afin de permettre la sortie directe des avions sans déplacer les voisins, conduisant à des formats de hangars plus larges que profonds. Albert Caquot fut considéré comme « le plus grand des ingénieurs français vivants » pendant un demi-siècle. Doté d’une faculté d’invention féconde et variée, son génie mécanicien et visionnaire s’appliqua aussi bien à la construction aéronautique naissante qu’à la réalisation d’ouvrages en béton armé, avec plus de 300 ponts et barrages de tous types, dont plusieurs furent des records du monde, et des œuvres de génie civil les plus variées. (Extrait de la notice biographique d’A. Caquot sur Wikipedia) 1928 : Directeur général des Services techniques et industriels de l’Aéronautique au ministère de l’Air Les liens entre Caquot et l’aviation commencèrent dès son service militaire en 1901-1902 au sein du bataillon de sapeurs aérostiers du génie. C’est ainsi qu’en 1914, s’inspirant des observations qu’il a pu faire sur les dirigeables du colonel Renard, “il conçoit un nouveau modèle de ballon captif destiné à emporter des observateurs de l’armée de terre, qu’il adapte pour répondre aux besoins de la flotte anglaise. De nombreux ballons Caquot seront utilisés par les flottes anglaise et française pendant le premier conflit mondial. Le 11 janvier 1918, Albert Caquot est nommé Directeur technique de la Section technique de l’aviation militaire ; dans l’exercice de cette responsabilité il donne une impulsion nouvelle à la conception et à la construction en série de nouveaux appareils. “(1) Suite à la création du ministère de l’Air en 1928, A. Caquot renoue avec le monde de l’aviation après s’être brillamment illustré pendant plus d’une décennie dans l’étude et la construction de ponts mais aussi, dans le développement de hangars pour l’aviation Collection Musée de l’Air et de l’Espace militaire au sein du bureau d’étude PelnardConsidère-Caquot . Nommé directeur général des Services Techniques et Industriels de l’Aéronautique au ministère de l’Air le 18 octobre 1928, Caquot innove en créant de nouvelles institutions (Ecole Sup’aéro) et des laboratoires (Soufflerie de Chalais Meudon). Durant les six années passées au poste de directeur général, il développe particulièrement les réflexions autour d’une architecture spécifique à l’aviation. C’est ainsi qu’il est à l’origine de la conception des hangars en béton armé à double auvent, dont le concept ne s’inspire plus seulement des techniques éprouvées sur les ouvrages d’art mais témoigne d’une véritable réponse fonctionnelle aux contraintes de stationnement des avions. Les plans retrouvés et articles de presse de l’époque donnent un aperçu de ces hangars d’un genre nouveau et voués à une généralisation sur de nombreux aérodromes. (1) A la recherche d’un nouveau type de hangar avions Hangar “traversant” conçu par Freyssinet en 1916, sur le camp d’aviation d’Avord. Collection personnelle Hangars à double auvent Avant d’être rappelé au ministère de l’Air en 1928, Caquot avait déjà réalisé avec ses associés Pelnard et Considère de nombreuses études de hangars pour l’aviation militaire. Les formes étudiées s’inspiraient pour une grande part des techniques des ouvrages d’art, telles les structures de hangars à poutre bow-string développées tout au long des années 20. Vers la fin des années 1920, A. Caquot développe une idée de structure entièrement nouvelle pour l’époque, en prenant pour exemple à nouveau le retour sur expérience acquis sur les réalisations d’ouvrages d’art. Extraits de la biographie de Jean et Thierry Kerisel Schémas issus de la revue l’Architecture de 1936 (n°9) Source : Institut Français d’Architecture Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 10 11 Un article de la revue l’Architecture de 1936 revient quelques années après sur les principaux avantages de ce type de hangar à double auvent : [Les hangars à auvent] consistent à réaliser la couverture du rectangle, exactement comme dans les portiques-parapluies des chemins de fer, au moyen d’une file de points d’appui simples ou jumelés, implantés dans l’axe longitudinal, la toiture étant constituée par deux encorbellements. Les progrès de la technique ont même permis, dans certaines réalisations, de supprimer la file des points d’appui et de remplacer ces derniers par une poutre-caisson, reposant sur les seuls points d’appui subsistant aux extrémités, dans laquelle viennent s’encastrer les nervures d’encorbellement. Dans le cas du hangar à double auvent, on utilise intégralement les bénéfices du dispositif en implantant la plus grande dimension de ces édifices normalement aux limites du terrain. On peut ainsi, en équipant en portes les deux longs pans, dégager simultanément les deux faces et, si l’on a la précaution d’écarter suffisamment l’un de l’autre deux hangars voisins, on réserve ainsi un espace de manoeuvre qui permet de déplacer les appareils sans encombrer les pistes de circulation. [...] Le hanqar en béton armé présente les avantaqes d’un entretien à peu près nul et aussi d’une grande sécurité en cas d’incendie. Extraits d’un fac similé d’un album de plans du service des années aériennes (~ années 1930) Collection Service Historique de la Défense La production d’A. Caquot au sein du ministère de l’Air Le «Service des Bases» du ministère de l’Air, rattaché au service dirigé par A. Caquot, édite en décembre 1930 un album de plans de bâtiments aéronautiques, dont un fac-similé a été retrouvé récemment dans le fonds du musée de la base aérienne d’Avord et versé en 2011 aux archives du Service Historique de la Défense (SHD) Parmi les planches de l’album, deux d’entre elles illustrent le travail exploratoire mené par les services d’A. Caquot. La structure de ces hangars à auvents, en béton armé, se compose d’une poutre centrale en cantilever, reposant sur un nombre limité de portiques. Cette poutre supporte de fins auvents en béton, dont la forme n’est pas sans rappeler les structures des avions de l’époque. In L’Architecture de 1936, n°9 chapitre 5 Dans les archives du bureau d’études Pelnard Considère-Caquot, on retrouve des plans, notes de calcul et correspondances pour des hangars à double auvent sur les bases d’Orléans et Fréjus. Pour autant, il est difficile de déterminer si A. Caquot a travaillé directement à la construction d’un de ces hangars. Ceux d’Orléans sont attribués à l’ingénieur B. Laffaille, dont des échanges de correspondance avec le service des Bases sont conservés à l’Institut Français d’Architecture dans le fonds Laffaille. Extraits d’un fac similé d’un album de plans du service des années aériennes (~ années 1930) Collection Service Historique de la Défense La note de calcul ci-dessus relative aux efforts du vent sur les hangars à double auvent est conservée au centre d’archives du monde du travail à Roubaix. Les documents d’époque font référence à une norme 9961 spécifique à l’aviation (non retrouvée) et portent généralement le logo du service des Bases du ministère de l’Air et la signature de M.Garbe, directeur du Service des Bases à l’époque. Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 12 13 Bron : La première réalisation du type Octobre 1931 : démarrage des travaux Extrait de l’article du Génie Civil de 1932 : Le concours organisé par la Chambre de Commerce de Lyon 1931 - Les études Le 10 septembre 1932 paraît dans la revue du Génie Civil un article sur le «hangar à auvents en béton armé type «Caquot»» écrit par Gaston Le Marec, ingénieur des Ets Limousin adjudicataire du marché de construction. Cet article permet de retrouver quelques informations relatives au déroulement des études et de la phase de travaux. Début 1931, la Chambre de Commerce de Lyon confie aux architectes Chomel et Verrier le soin de construire un hangar de 40x50 mètres destiné au stationnement des avions. Ces derniers, auteurs de l’aérogare de Bron, inaugurée le 14 décembre 1930, dressent un avant-projet sur la base d’un programme général établi par le Service des Bases qui devait servir de base à un appel d’offres. Sans en avoir retrouvé la trace, il est néanmoins fort probable que ce programme s’inspire directement des recherches de Caquot. Dans une construction de ce genre, toute la difficulté réside évidemment dans la réalisation des auvents et de leur support. Ces auvents sont, en effet, soumis à des efforts multiples : ils doivent être capable de supporter leur poids propre et les surcharges de vent et de neige ; ils sont, d’autre part, soumis à des conditions de dilatation très dures, car leur grande portée conduit à l’emploi de faibles épaisseurs, plus sensibles aux variations de la température et de l’état hygrométrique de l’atmosphère. Des hourdis plans ne pouvaient constituer une solution acceptable qu’à la condition d’être coupés par des joints de dilatation très rapprochés. L’appel d’offres a dû se dérouler durant le premier semestre 1931, car les archives de Roubaix conservent dans le fonds Paindavoine les traces de plans d’appel d’offres pour un hangar avions à Bron daté de juin 1931. Il n’est donc pas impossible que d’autres entreprises en dehors des Ets Limousin aient répondu à cette consultation. Le marché a été attribué aux Ets Limousin, entreprise connue dans pour la réalisation d’ouvrages d’art mais également de hangars avions, parmi lesquels les plus connus sont les hangars à dirigeables d’Orly conçus par Freyssinet au début des années 20 . L’ingénieur Le Marec, au départ de Freyssinet de l’entreprise Limousin, saura mettre à profit les enseignements des hangars voûtes d’Orly en proposant des améliorations des voûtes des auvents. [Le hangar à double auvent] comporte essentiellement une poutre-caisson centrale, reposant sur une série de portiques qui soutient de part et d’autre de grands auvents en porte à faux ; [...]. Il présente une largeur totale de 50 mètres, répartis en deux auvents de 20 mètres de portée chacun, et un caisson central de 10 mètres. Sa longueur totale est de 40 mètres, divisé en deux travées de 20 mètres ; la hauteur libre aux extrémités des auvents est de 8,30 m. La fermeture est assurée sur les deux longs pans par des portes roulantes, et aux deux autres extrémités par deux pignons, dont l’un est provisoire, ce qui permettra l’allongement ultérieur du hangar. L’emploi d’une série de voûtes transversales résout parfaitement le problème de la dilatation ; il constitue, d’autre part, la solution spécifiquement la plus légère et la plus satisfaisante. L’ensemble des constructions des hangars [...] par la Société des Entreprises Limousin, montre qu’une surface ondulée conserve parfaitement sa continuité et son étanchéité, malgré les dilatations et les retraits, aussi la Société des Entreprises Limousin n’hésita pas à proposer cette solution pour le hangar de Bron. La couverture des auvents est ainsi constituée par une série de voûtes de 5 cm. d’épaisseur, de 6,66 m de portée, et de 0,63 m de flèche, dont les poussées sont absorbées par des tirants. Ces voûtes, se réunissant deux à deux aux retombées, constituent une poutre en forme de V d’une très grande inertie. Les auvents sont attachés sur la poutre-caisson à l’aide de suspentes en béton armé, au nombre de trois, disposées en éventail au droit de chaque poutre-noue. llustration de l’opération de décintrement réalisée en quatre phases le 30 mars 1932. source : Le Génie Civil du 10 septembre 1932 Paindavoine Hangar à dirigeables d’Orly conçu par Freyssinet et l’entrepise Limousin (détruits en 1944). Collection personnelle Coupe transversale d’un projet de hangar à Bron non réalisé (Paindavoine). Collection Centre des Archives du Monde du Travail à Roubaix Non retenu lors de l’appel d’offres, le projet de l’entreprise de charpentes métalliques fondée à Lille en 1960 respectait la forme des hangars à auvents mais avec une poutre longitudinale triangulée pour reprendre les auvents. Les auvents n’étaient donc pas suspendus à la poutre caisson centrale. Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 14 15 automne 1932 : achèvement des travaux Achevé à l’automne 1932, le hangar à double auvent de Bron sera finalement le premier du genre à être construit. Mais, dans le même temps, d’autres projets du même type sont en préparation sur les bases d’Orléans puis Marignane et Fréjus. Un aperçu de ces hangars se trouvent dans le chapitre 3. Vue aérienne du hangar en juin 1938 Source : Photothèque de l’IGN Façade principale avec la première vigie Source : Revue l’Architecture 1932 Vue intérieure depuis le centre du hangar Source : Revue l’Architecture 1932 Vue transversale, portes ouvertes Source : Revue l’Architecture 1932 Coupe transversale sur le pilier central (collection Les Constructions Modernes) Le pignon arrière Source : Revue l’Architecture 1932 Vue depuis les auvents Source : Revue l’Architecture 1932 Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 16 17 De 1932 aux démolitions de1944 La reconstruction du hangar et sa transformation en garage 1932 - 1944 Dès sa construction et jusqu’en 1939, le hangar abrite des avions civils, appartenant à des aéroclubs. On peut voir sur certaines photos d’époque les avions suivants : Farman 190 Collection personnelle - Farman 190 de l’Aéro-Club du Rhône et du Sud Est (ACRSE) immatriculé F-AJJG en service jusqu’en 1936 - Caudron C-59 immatriculé F-AIHB vu de l’arrière sur la première photo - Morane 230 immatriculé F-ALHB appartenant au président Lumière de l’ACRSE Le hangar Caquot en 1950, avec sa nouvelle vigie Collection personnelle Les travaux de réhabilitation Caudron C-59 Source : Les constructions modernes Malgré son état de ruine suite aux bombardements de 1944, le hangar sera finalement réparé dans les années 1947, dans un état quasiment identique à celui de 1932 : seuls les pavés de verre dans les voûtes semblent ne pas avoir été conservés. Une nouvelle vigie a été installée sur le toit du hangar. Réhabilité, le hangar peut à nouveau accueillir des avions de tourisme. En 1960 (1), la décision est prise d’aménager le hangar pour les besoins du fret d’Air France. Les portes sont dès lors supprimées et remplacées par des maçonneries sur toute la longueur des longs-pans. Seuls les rails de guidage haut seront conservés. Lourdement bombardé par l’aviation alliée le 14 août 1944, le hangar subit des dommages importants. On voit bien que les structures en béton, prônée par les constructeurs pour leur résistance, n’aura pas mieux résisté aux destructions de guerre que les hangars métalliques. Le hangar en 1944 Collection personnelle Le hangar en 1944 Collection personnelle Ces travaux marquent la fin de la destination aéronautique du hangar, les avions ayant été transférés sur d’autres hangars de la plateforme. Quelques années plus tard, le hangar sera transformé de l’intérieur avec la création de cloisonnements et mezzanine pour les besoins du service des pompiers (SSLIA) de l’aéroport. On trouve la trace de ces aménagements dans le plan de la DDE 69 ci-dessous. Le hangar conservera jusqu’en 2012 sa destination de garage pompiers. : informations issues du bulletin de la SLHADA (Tableau de bord) n°5 du janvier 2002, texte de P. Mathevet (1) Plan des aménagements intérieurs du hangar dressé par la DDE 69. Fonds de la SLHADA Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 18 19 La couverture Etat des lieux en 2011 2011 Le pignon nord et sa vigie en 2011 Photo : G. Labeeuw La façade ouest Photo : G. Labeeuw Le hangar Caquot, tel qu’on pouvait encore le voir en 2011, présentait donc un aspect assez différent de celui d’origine ou de son état après guerre. L’enduit épais de couleur marron a été appliqué il y a quelques années, laissant par endroit apparaître les maçonneries en mâchefer. Ce choix de teinte sombre a conduit à mettre en exergue ce bâtiment au sein d’un paysage architectural de tendance plutôt claire, mais à son détriment, les opérations d’entretien réalisées ne pouvant remplacer une nécessaire réhabilitation. Le hangar en 1944 Collection : SLHADA La couverture en coques de béton est restée quasiment dans son état de la réhabilitation d’après guerre. Seules quelques traitements de fissures et la présence de lichens témoignent de l’agression des éléments climatiques. Pour mémoire, ces coques de 5 cm de béton (dans la construction d’origine), larges de 6,66m constituaient une des réponses les plus efficaces dans les années 30 au regard de l’étanchéité et de l’absorption de la dilatation. Les “haubannages” Les coques de béton, reliées entre elles par des poutres noues servant d’évacuation, étaient reliées à la poutre caisson centrale via des suspentes en béton armé disposées en éventail au droit des poutres noues. Ce procédé de haubannage extrêment audacieux posera problème dans le temps, les enrobages des aciers des suspentes n’étant pas suffisant pour protéger durablement les aciers des agressions du gel. C’est ainsi qu’en 1987, la DDE 69 réalisa une campagne de renfort en ajoutant des tirants en torons d’acier. Faute de décision forte prise pour sa pérennité dans les schémas directeurs de la plateforme des années 70, le bâtiment s’est progressivement dégradé, surtout au niveau de sa couverture. Un rapport du bureau d’études JPGen Facilities en a dressé un bilan très inquiétant en 2010, sans toutefois s’appuyer sur des analyses et expertises concernant le vieillissement intrinsèque des bétons. Néanmoins, devant les coûts annoncés pour sa réhabilitation et son état de dégradation avancée, peu de projets de réutilisation ont été raisonnablement étudiés. Les suspentes en béton Photo : G. Labeeuw C’est ainsi que la décision de sa démolition a été actée dans le dernier schéma directeur de l’aéroport de Bron. Vue des sous-faces des coques en béton. D’anciennes infiltrations d’eaux pluviales ont généré des coulures ternissant l’aspect des sous-faces Photo : G. Labeeuw Le pignon arrière. On aperçoit encore les structures des rails des portes. Photo : G. Labeeuw Les bureaux à l’étage. La disposition de la poutre caisson centrale permettait de dégager des surfaces importantes de bureau bénéficiant d’un large accès à la lumière naturelle Photo : G. Labeeuw Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 20 21 chapitre 3 autres réalisations de hangars avions à “double auvent” Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 22 23 L’appropriation du type Robert Camelot, architecte Beaudouin & Lods, architectes Ce projet de hangar à double auvents, datant des années 1932, est issu de la collaboration entre l’ingénieur Laffaille et l’architecte Robert Camelot. On aperçoit sur les pignons du hangar les poteaux en forme de V, que l’ingénieur Laffaille concrétisera sur de nombreuses réalisations pour l’aviation ou la SNCF. source : Institut Français d’Architecture Robert Camelot, Grand prix de Rome en 1933, devient architecte en chef des bâtiments civils et Palais Nationaux et sera un des architectes du CNIT à la Défense. Il faut également signaler que l’ingénieur B. Laffaille avait participé au concours du CNIT, qui sera finalement réalisé avec le concours de l’ingénieur N. Esquillan. source : Institut Français d’Architecture Dans le cadre du concours organisé par l’OTUA (Office technique pour l’utilisation de l’acier) en 1933, les architectes Beaudouin et Lods imaginèrent un projet de hangar avions à appui central unique dont les auvents circulaires étaient prévus en béton armé. Si la forme s’éloigne des hangars à double auvent, ce projet pousse l’idée du hangar à auvents encore plus loin en imaginant un stationnement des avions tout autour du pilier central. A. Hardy, ingénieur On ignore à ce stade si cette réalisation de hangars à auvent circulaire en béton a pu s’inspirer du projet non réalisé de Beaudoin et Lods. Les deux hangars ont été construits en 1947 par l’ingénieur Alfred Hardy sur l’aérodrome de Grimbergen, près de Bruxelles. Les auvents ont environ 25 m de portée et ont une épaisseur variant de 6 à 12 cm. Réalisation peu connue en France, ces hangars sont pourtant devenus une référence internationale. source : Institut Français d’Architecture Perspective (ci-dessus) et esquisses (en haut) d’un projet de hangar “Caquot” réalisé par l’architecte Robert Camelot (architecte du C.N.I.T à la Défense (92)). Collection Institut Français d’Architecture source : Institut Français d’Architecture source : Institut Français d’Architecture Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 24 25 L’appropriation du type Bernard Laffaille, ingénieur Esquisse (en haut) et croquis d’étude (en bas) d’un projet de hangar “Caquot” réalisé par l’ingénieur B. Laffaille. Collection Institut Français d’Architecture, fonds Laffaille. L’ingénieur Laffaille ne limitera pas ses réflexions sur les structures en béton, bien au contraire. Ses recherches sur les coques en acier ont fait l’objet de publication scientifiques dans les annales des Ponts et Chaussées et nombreuses sont les esquisses de hangars métalliques conservées dans le fonds Laffaille à l’IFA. Parmi celles-ci, on note plusieurs types de hangars à auvents, simples ou doubles, toutes basées sur une couverture composée de demi-cylindres métalliques. Des hangars utilisant ce type de couverture ont été construits sur les bases de Cazaux et Dijon et détruits pendant la dernière guerre. Projet (non réalisé) de hangar métallique à double auvent pour le ministère de l’Air établi par B. Laffaille en 1936. Collection : Institut Français d’Architecture Bureau d’Etudes Techniques Hennebique Le BET Hennebique, un des tous premiers bureaux d’études à avoir développé les structures en béton en France, a réalisé ou participé à de nombreux appels d’offres de hangars pour l’aviation. Pour ce projet de hangar à auvents en béton sur la base aérienne d’Orléans, le fonds d’archive conservés à l’Institut Français d’Architecture permettent de comparer les différentes réponses techniques des BET Hennebique et de l’ingénieur Laffaille. On retrouve également dans ce même fonds un projet pour le hangar double auvent de Port-Lyautey (aujourd’hui Kenitra au Maroc). Bernard Laffaille, ingénieur de l’Ecole Centrale, s’appuie sur les concours de hangars du ministère de l’air pour développer ses recherches sur les structures en coques de béton. Certaines de ses réalisations sont toujours visibles, comme le hangar à doubles auvents sur la base aérienne d’Orléans. Le fonds d’archives de l’Institut Français d’Architecture conserve également de nombreuses études préalables sur les structures à auvents. Fiche descriptive d’une étude de hangar à avions pour la base d’Orléans, établie par le BET Hennebique. Collection Institut Français d’Architecture Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 26 27 Aperçu des réalisations connues de hangar relevant du type “Caquot” Kénitra (Port-Lyautey) - Maroc Rio de Janeiro - Brésil Le hangar en 2012 source : googlemap.fr Projet de hangar à auvent à Rio de Janeiro source : Techniques et Architecture 1947 n°9-12 Intérieur du hangar en 1947 source : dafina.net Le hangar en 2012 source : googlemap.fr Le fonds d’archive du BET Hennebique à l’IFA conserve la trace d’un projet de hangar à auvents daté de 1932. Mais l’attribution reste à confirmer. Ce hangar construit vers 1934-1937 existait toujours en 2012. Conçu par l’ingénieur A. de Mello-Flores probablement vers 1939, ce hangar mesure 126 m de long et 60 m de large. En 2012, Il semblait encore conserver une destination aéronautique. Hangars conçus par Bernard Laffaille Marignane (13) La façade principale dessinée par B. Laffaille Collection : DGAC / SNIA Le hangar d’Orléans en 2012 source : googlemap.fr Détruit pendant la dernière guerre, ce hangar a été vraisemblablement conçu par l’ingénieur B. Laffaille en 1936, d’après les notes de calcul conservées à l’Institut Français d’Architecture. Le hangar de Marignane Collection : Photothèque nationale (IGN) Orléans-Bricy (45) Trois hangars étaient prévus sur cette base, dont deux seulement ont été réalisés. Suite aux bombardements, un seul a été conservé puis agrandi vers 1960 pour accueillir, encore aujourd’hui, les TRANSALL. Il est l’oeuvre de l’ingénieur B. Laffaille. La datation de ce dernier hangar est difficile à déterminer de façon sûre, mais remonterait aux années 1933 à 1936. Les versions métalliques Collection personnelle Hangar attribué à Albert Caquot Fréjus-Saint-Raphaël (83) Construit dans les années 19331934 par la Société des Grands Travaux en béton armé, ce hangar a été endommagé lors de la catastrophe du barrage de Malpasset et transformé depuis en base de loisirs. Hangar métallique à double auvent, Saint-Etienne/ Bouthéon. source : L’architecture 1936 n°9 Hangar métallique à double auvent, Los Angeles 1959. Deux exemples parmi d’autres de hangars métalliques à double auvent s’inspirant de l’invention d’A. Caquot. Le premier construit en 1934 par la Société générale d’entreprises sur l’aéroport de Saint-Etienne-Bouthéon existe toujours. La portée des auvents reste assez limitée. Le deuxième est un hangar à Los Angeles (vers 1959) de portée beaucoup plus significative, témoignant de la possibilité d’utilisation de ce principe pour des avions d’envergure plus grande. On retrouve des plans de ce hangar dans les archives du fonds Pelnard Considère Caquot au Centre des Archives du Monde du Travail à Roubaix Collection : CAMT Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 28 29 chapitre 4 annexes Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 30 31 articles de presse de l’époque L’Architecture, 1932 L’architecture, 1936, n°9 . Collection Institut Français d’Architecture Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 32 33 article de presse contemporaine Le Progrès, 11 mars 2012 Hangar en béton armé du port aérien de Bron. 1932 - 2012 Architectes : Chomel et Verrier - Entreprise : Ets. Limousin (ingénieur : Le Marec) 34 35 Hangar “Caquot” de Lyon Bron 1932 - 2012 Une page de l’histoire du patrimoine aéronautique français s’est tournée le 28 juin 2012 sur l’aéroport de Lyon-Bron. Construit tout juste après la première aérogare de Bron il y a quatre-vingts ans, il n’aura pourtant fallu que quelques jours pour démolir cet édifice considéré comme le premier exemplaire français de hangar avion en béton armé de type “double auvent” inventé par l’ingénieur Albert Caquot. Cet ouvrage, disponible en lecture libre, revient sur l’histoire du hangar «Caquot» de Bron et esquisse les nombreuses réalisations de hangars avions suscitées par l’invention d’Albert Caquot. Guilhem Labeeuw Ingénieur - architecte au département Bâtiments du Service National d’Ingénierie Aéroportuaire (DGAC/SNIA). Vice Président de l’Association « Anciens aérodromes ». Hangar “Caquot” histoire du premier hangar avions à “double auvent” réalisé en France Avec le soutien de :