La lumière fait la différence
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La lumière fait la différence
AVICULTURE SUISSE Programmes d’éclairage pour les poules pondeuses La lumière fait la différence Les oiseaux perçoivent la lumière autrement que les êtres humains. Il faut en tenir compte en choisissant des sources de lumière artificielle et en concevant les programmes d’éclairage pour les poulettes et les poules pondeuses. Car un programme d’éclairage adapté permet d’influencer aussi bien la maturité sexuelle et le taux de ponte que le nombre d’œufs et le poids des œufs. La lumière joue un rôle important pour la vie de nombreux organismes. La vue des oiseaux diffère de celle des mammifères et également de celle de l’homme. Il vaut la peine de mentionner notamment la capacité d’identifier des suites très rapides de 150 à 250 images par seconde ainsi que la perception tétrachromatique des couleurs (4 couleurs de base). En comparaison: l’homme reconnaît seulement 25 à 30 images par seconde et a une perception trichromatique de la couleur (3 couleurs de base). Les photorécepteurs de la rétine bien plus différenciés des oiseaux leur permettent de percevoir les spectres de 360 à 400 nanomètres et de 600 à 700 nanomètres de longueur d’ondes. Ils voient ainsi également dans le spectre UV qui ne nous est pas accessible. Dans les poulaillers d’élevage des poulettes et dans les poulaillers de poules pondeuses, on utilise des lampes à incandescence, des tubes fluorescents ou des lampes à économie d’énergie. La technique moderne et avantageuse des LED va gagner en importance à l’avenir, en particulier si son développement est poussé au point que sa lumière permette de générer un spectre plus étendu. La technique de lumière à haute fréquence, qui génère de la lumière presque dans le spectre naturel, ce que l’on appelle technique «true light» est parfois déjà utilisée en pratique. Choisir soigneusement la source de lumière Pour éviter des anomalies de comportement chez les animaux, l’intensité de l’éclairage est limitée à 5 Lux dans les poulaillers sombres et étendue à 10 jusqu’à 15 Lux dans les poulaillers de ponte (en CH: 5 Lux d’après l’OPAn; 15 Lux pour SST; note de la réd). La fréquence de la lumière dépend de la source de lumière. Les tubes fluorescents et les lampes 10 à économie d’énergie, qui fonctionnent dans une plage de basse fréquence (50 Hz courant alternatif), ne conviennent pas aux galliformes. Les poules décèlent les vibrations de la lumière, ce qui peut avoir des conséquences négatives sur leur comportement. Il est donc préférable de choisir des lampes à incandescence, qui ne sont pas identifiées comme générant des vibrations malgré la fréquence de 50 Hz du courant alternatif, ou des tubes fluorescents qui travaillent à haute fréquence (> 2000 Hz). Comme les lampes à incandescence ont une efficacité énergétique bien plus faible que les autres techniques, elles sont actuellement interdites dans de nombreux pays. Pour les poules qui peuvent se mouvoir dans des poulaillers avec des fenêtres ou dans le jardin d’hiver et des parcours extérieurs à la lumière du jour naturelle, il y a une différence considérable de qualité entre la lumière artificielle et la lumière naturelle que la poule peut percevoir. Les lampes traditionnelles ne peuvent pas couvrir le spectre UV inférieur à 350 nanomètres de longueur d’onde. Ce spectre semble pourtant important pour certains stimuli, qui jouent un rôle dans la recherche de nourriture et le comportement d’accouplement des oiseaux par exemple. La maturité sexuelle et le taux de ponte sont influencés de manière décisive par le programme d’éclairage (durée du jour et intensité lumineuse) auquel les poules sont soumises durant la phase d’élevage et de production. En détenant des poulettes dans des poulaillers sans fenêtres, il est possible de concevoir des programmes d’éclairage qui garantissent que l’élevage prépare de façon optimale à la période de ponte, ceci complètement indépendamment de la saison. Respecter la «règle d’or» La «règle d’or» d’un programme d’éclairage est la suivante: ne pas prolonger la longueur de la phase de lumière jusqu’au moment choisi pour déclencher la stimulation de la maturité sexuelle des poules, puis ne pas raccourcir la phase de lumière durant la période de ponte. Suivant ce principe, la longueur de la phase de lumière est progressivement raccourcie après la mise en place des poussins, afin, après une période de durée de jour constante, de pouvoir exercer une influence stimulante sur le début de l’activité de ponte en augmentant progressivement la phase de lumière. Les programmes dits «step down» sont utilisés pour les poussins en bas âge afin d’obtenir une sensibilité élevée des animaux au facteur lumière. Après avoir atteint une longueur de la phase de lumière de dix à huit heures, les animaux sont maintenus pour quelques semaines à cette durée constante de phase de lumière. La longueur de la phase de lumière durant cette période constante détermine le degré du programme «step down» et du programme «step up» consécutif. Plus cette phase constante est longue, plus les animaux mangent et grandissent. Dans les situations où les éleveurs rencontrent des difficultés à atteindre les poids vifs visés, une durée de phase de lumière constante aide à améliorer la qualité des poulettes. A l’âge de 14 à 15 semaines, toute prolongation de la phase de lumière stimule la maturité sexuelle des poules – une progression rapide stimule une maturité de ponte précoce, une progression lente la retarde. La combinaison d’un «step down» rapide et d’un «step up» rapide est reconnue comme étant la méthode la plus efficace pour stimuler un début de ponte précoce. Un «step down» lent combiné à un «step up» modéré va retarder le début de ponte. Influencer le nombre et le poids des œufs De nombreux essais ont confirmé que le nombre et le poids des œufs peuvent être influencés par le programme d’éclairage. Pour obtenir un début de ponte précoce ainsi qu’un nombre élevé d’œufs pondus avec un poids moyen, il est reAS 9/10 AVICULTURE SUISSE commandé de raccourcir rapidement la phase de lumière au début du programme d’éclairage, puis de la prolonger rapidement pour stimuler l’activité de ponte. On obtient un poids de l’œuf plus élevé avec moins d’œufs pondus par poule avec la variante diminution lente/augmentation lente. Les animaux de souche parentale ne devraient jamais être exposés à la variante «turbo», car les œufs plus petits pondus au début de la période de ponte ne peuvent pas être utilisés comme œufs à couver. Après qu’un troupeau ait commencé à pondre, la phase de lumière ne doit pas être prolongée au-delà de 14 heures. En fonction de la longueur de la phase de lumière durant la période constante qui a précédé, une durée de douze heures peut suffire pour obtenir une très bonne performance de ponte. Des programmes d’éclairage intermittents ont été développés pour influencer de manière positive la productivité par une réduction des besoins d’entretien des poules pondeuses. Mais ces programmes ne peuvent être utilisés que dans les détentions en batterie, sinon la proportion d’œufs pondus au sol serait plus élevée. (Ces programmes ne sont pas autorisés en Suisse, note de la réd.). La maîtrise de la stimulation lumineuse des poules ne se limite pas aux poulaillers fermés. Les poulaillers munis de fenêtres devraient être équipés de dispositifs permettant de maîtriser l’entrée de la lumière du jour naturelle, de manière à ne pas influencer le programme d’éclairage. Dans les poulaillers ouverts, un «programme d’assombrissement» permet d’améliorer de manière substantielle la performance des poules pondeuses. Lorsque les poules sont détenues dans des maisonnettes ouvertes ou si elles ont accès à des jardins d’hiver ou à des parcours extérieurs, il faut en tenir compte en établissant les programmes d’éclairage. ventilation ou que les animaux ont libre accès aux jardins d’hiver ou aux parcours extérieurs, le programme d’éclairage doit être adapté à la durée de la lumière du jour au moment de la mise en place dans le poulailler. Il faut alors faire la différence entre les poulettes qui ont été élevées respectivement en poulailler sombre, en poulailler avec fenêtres obscurcies ou en poulaillers ouverts. Au moment de transférer des poulettes qui ne sont pas adaptés à la lumière du jour naturelle ou à la durée de la phase de lumière dans un poulailler de ponte ouvert, il faut éviter une prolongation brusque de la phase de lumière. La prolongation ne doit pas excéder deux à trois heures. Dans maintes situations, cela peut signifier que la durée du jour durant la phase constante préalable ne peut pas être abaissée à huit ou neuf heures. Si l’on cherche à obtenir un développement régulier de la maturité sexuelle des poulettes au moment désiré, c’està-dire à environ 19 à 20 semaines, ainsi qu’une performance de ponte élevée durant toute la période de ponte, il y a lieu de considérer l’élevage des poulettes et la période de ponte comme une sorte de joint venture. Dans cette joint venture, il ne suffit pas que chaque spécialiste comprenne les principes des programmes d’éclairage. Les poulettes doivent être élevées de manière à être adaptées aux conditions spécifiques de l’unité de production. Source: H.-H. Thiele (2009): LOHMANN Information 44, 39-48 Adapter les programmes d’éclairage En Europe centrale, la lumière du jour naturelle atteint une durée maximale de 17 heures à fin juin et une durée minimale de huit heures à fin décembre. Lorsque les poules sont détenues dans des poulaillers dont les fenêtres ne peuvent pas être obscurcies ou si la lumière naturelle peut pénétrer par les installations de AS 9/10 11 AVICULTURE SUISSE Essai sur la source et l’intensité de la lumière Chez la volaille, l’importance de la lumière ne se limite pas à la durée d’éclairage. La luminosité et le spectre de couleurs jouent également un rôle important. Un essai de l’Université de Hohenheim (D) a examiné quelles étaient leurs influences sur le comportement des poules pondeuses. La lumière est définie par la source de lumière, l’intensité (luminosité), le spectre de longueur d’ondes, la fréquence et la durée de la période lumineuse. La lumière est en général le domaine visible du rayonnement électromagnétique. Ce dernier s’étend d’environ 380 à 780 nanomètres (nm) de longueur d’onde. Les connaissances sur les effets de la durée d’éclairage et de l’intensité lumineuse sur les poules pondeuses sont bien documentées, mais l’influence de la source de lumière et du spectre de longueur d’ondes est relativement peu étudiée. Or la volaille perçoit la lumière différemment que l’homme, ce dont il faut tenir compte en choisissant les sources de lumière. Structure des essais On a examiné dans deux essais dans quelle mesure quatre sources de lumière et des intensités lumineuses différentes influençaient le comportement de poules pondeuses. On a utilisé les quatre sources de lumière suivantes (entre parenthèses le spectre de longueur d’ondes et la fréquence de la lumière): • ampoule à incandescence (600 - 700 nm, 50 Hz) • tubes néons (570 - 700 nm; 50 Hz) • lampes à lumière du jour à haute fréquence (400 - 750 nm; 2000 Hz) • tubes néons bleus (420 - 490 nm, 50 Hz) Pour l’intensité de la lumière, on a comparé entre une intensité faible (5 Lux) et élevée (50 Lux). Dans les deux essais, les poules étaient détenues dans des compartiments de garde au sol ne laissant pas passer la lumière. Plusieurs fois par semaine, on a répertorié et consigné des modes normaux de comportement tels que l’activité, le repos, la prise de nourriture, et des comportements indésirables tels que le picage des plumes et l’agression. Dans le premier essai, on a réparti 80 poules (Lohmann Brown Classic) âgées de 35 semaines en quatre groupes de 20 poules. L’éclairage a ensuite été changé toutes les deux semaines, passant d’une source lumineuse aux autres. L’essai a ainsi duré huit semaines en tout. L’intensité lumineuse des quatre sources de lumière était de 25 Lux. Du point de vue de sa conception, le deuxième essai était un peu plus astreignant, car on a réparti au total 256 poules âgées de 40 semaines en huit groupes de 32 poules chacun dans des compartiments ne laissant pas passer la lumière. Là aussi, les groupes ont été chaque fois exposés pendant deux semaines aux différentes sources de lumière. Mais contrairement au premier essai, l’intensité lumineuse a été réglée à 5 Lux durant la première semaine et à 50 Lux durant la deuxième semaine, avec la même source de lumière. 5 Lux Picage de plumes 50 Lux 20 Plus de picage de plumes avec la lumière claire et la lumière bleue L’essai 1 n’a pas montré de différence significative de comportement normal entre les quatre sources de lumière. Mais avec des tubes néons bleus, on a pu observer une augmentation du picage de plumes et du comportement agressif. C’est avec les tubes néons que l’on a observé le moins de picage de plumes et de comportements agressifs. Dans l’essai 2, des différences significatives ont pu être constatées. Avec une intensité lumineuse élevée, l’activité était en général accrue, d’où moins de phases de repos observées. Avec les ampoules à incandescence et les tubes néons, associés simultanément à une intensité lumineuse élevée, les poules ont mangé nettement plus souvent, mais aucune différence n’a été constatée avec les lampes à lumière du jour et les tubes à lumière bleue. Avec une intensité lumineuse élevée, la fréquence de picage de plumes et de comportement agressif était significativement plus élevée (voir graphique). De manière similaire, les poules étaient plus actives avec la lumière bleue, et il y avait plus de picage de plumes, aussi bien avec une faible intensité lumineuse qu’avec une intensité lumineuse élevée. Conclusion Les deux essais ont montré qu’il ne faudrait pas utiliser les sources de lumière avec principalement des spectres de lumière à ondes courtes (plage violette-bleue) comme unique source de lumière >> 5 Lux Agression 50 Lux 14 18 12 16 10 14 12 8 10 8 6 6 4 4 2 2 0 0 ampoule à incandescence tubes néons lampes à lumière du jour HF tubes néons bleus ampoule à incandescence tubes néons lampes à lumière du jour HF tubes néons bleus Graphique: Influence de la luminosité et de la source de lumière sur le picage de plumes (à gauche) et l’agression (à droite) dans l’essai 2 (% de poules dans la période d’observation). 12 AS 9/10 AVICULTURE SUISSE au poulailler. L’essai 2 a en outre montré que des intensités de lumière élevées dans les poulaillers de poules pondeuses provoquent une augmentation du picage des plumes et du comportement agressif. Cela confirme donc qu’il est possible d’influencer le comportement agressif et le picage de plumes en choisissant la source de lumière et l’intensité de lumière. En pratique, les interrupteurs de lumière permettant de régler l’intensité lumineuse rendent de précieux services. Source: Mohammed et al., «The effects of lighting conditions on the behavior of laying hens», Arch. Geflügelk., 74 (3), 2010. Résumé et traduit par Peter Pfulg, Belpberg AS 9/10 13