Quand choisir la méthanisation ?

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Quand choisir la méthanisation ?
Quand choisir la méthanisation ?
1. Contexte de la méthanisation
des déchets solides
En application des dispositions législatives1, les collectivités sont responsables de la gestion de l’ensemble des déchets ménagers et assimilés. De façon
simplifiée, la gestion collective des déchets ménagers
se décompose en deux phases majeures :
• la collecte proprement dite, depuis le lieu d’abandon (bacs mobiles en porte à porte, containers situés
sur des zones d’apport volontaires ou déchetterie),
jusqu’au lieu de regroupement, de traitement et/ou
d’élimination,
• le traitement stricto sensu, opération qui s’effectue
sur une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE).
Pour une collectivité donnée, le gisement de déchets
ménagers et assimilés considéré est spécifique,
compte tenu des habitudes de la population concernée en termes de consommation et de consignes de
tri, mais également des moyens de collecte mis en
œuvre.
Comme le disait Lavoisier, père de la chimie moderne, à la fin du 18e siècle, “rien ne se perd, rien ne
se crée, tout se transforme”, et la gestion des déchets
ménagers obéit à ce principe. C’est pourquoi, seule
une approche globale de l’ensemble des flux de déchets ménagers et assimilés permet d’apprécier les solutions en matière de collecte et de traitement.
Dans l’objectif de mettre en place un traitement par
méthanisation, solution basée sur l’action de fermentations naturelles en l’absence d’oxygène qui dégradent les matières organiques biodégradables, il
convient de distinguer dans le gisement potentiel des
déchets ménagers et assimilés :
1 L'article L2224-13 (section 3 : Ordures ménagères et autres
déchets) du code général des collectivités territoriales stipule
que "les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale assurent, éventuellement en liaison avec
les départements et les régions, l'élimination des déchets des
ménages".
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- une fraction rapidement biodégradable, constituée
de matière organique, d’eau et d’éléments minéraux,
qui constitue en général 40 à 70 % des flux d’ordures
ménagères (déchets de cuisine, déchets alimentaires,
papiers et cartons, tontes et déchets verts au sens
large) ;
- une fraction combustible qui intègre une part de déchets lentement biodégradables, des déchets ligneux
et des matériaux synthétiques (plastiques plats, flacons, blisters…) ;
- une fraction inerte composée de verres, métaux et
minéraux (cailloux, sable…).
Établir les bases de dimensionnement d’un outil de
traitement par méthanisation des déchets n’est pas
une tâche aisée car les technologies dépendent des
flux et de la qualité des intrants.
En outre, chaque année, en France comme à l’étranger, de nouvelles expériences et de nouvelles technologies tendent à remettre en question les connaissances industrielles du moment. Enfin, l’évolution
réglementaire (française et communautaire) impose
également une mise à jour régulière des contraintes
administratives.
Pour les collectivités responsables de la gestion de
l’ensemble des déchets ménagers et assimilés, le choix
d’étudier telle alternative plutôt que telle autre est
orienté par divers critères :
- la capacité de l’outil de traitement adapté aux besoins,
- les structures et les modes de gestion envisageables
pour la construction et l’exploitation de l’unité,
- l’application de la réglementation,
- le coût lié à la mise en place de l’outil de traitement
(collecte comprise),
- la flexibilité du système par rapport aux différentes
typologies mises en œuvre sur le territoire concerné
(rural/urbain, type de collectes déjà mises en place...),
- les nuisances potentielles qui risquent d’affecter les
riverains situés à proximité du site retenu pour installer l’outil de traitement,
- les contraintes induites au quotidien sur les comportements des usagers,
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- et enfin, ce qu’il est convenu de désigner sous le
nom “d’acceptabilité sociale du projet global”.
Pour une collectivité qui envisage la méthanisation,
il importe également de savoir qu’il existe, dans le
parc d’installations en fonctionnement recensées2 sur
17 pays, une grande variabilité dans la nature des déchets solides organiques traités par méthanisation et
dans le devenir des résidus organiques (compost ou
excédents hydriques).
Il est ainsi possible d’appliquer la méthanisation pour
traiter, d’une part, des déchets ménagers collectés en
vrac, d’autre part, des fractions fermentescibles issues
2 Synthèse 2004 de l’International Energy Agency, Task 37,
Groupe de travail sur les bio-énergies.
de collecte sélective en porte à porte, ou pour assurer une stabilisation biologique des déchets ménagers
résiduels avant mise en centre de stockage.
Le traitement des déchets ménagers résiduels avant
admission en centre de stockage de déchets ultimes
connaît un relatif développement avec la notion de
traitement mécano-biologique (mechanical biological treatment ou MBT en anglais).
Il faut ainsi comprendre que la méthanisation s’applique aussi bien aux déchets ménagers triés mécaniquement sur le site (issus de collectes en mélange)
qu’à ceux triés à la source. En fonction des situations,
la méthanisation trouve sa complémentarité avec les
autres types de traitement, par exemple avec l’incinération des refus combustibles, le développement des
Figure 1. Place de la méthanisation dans la gestion des déchets ménagers
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collectes sélectives (porte à porte ou apport volontaire) comme pour les emballages verres, plastiques,
métaux, ou les journeaux-magazines...
La méthanisation des déchets organiques doit donc
être considérée comme une activité industrielle, dont
l’équilibre de gestion est fortement conditionné par
ses bonnes raisons d’être locales, selon des considérations socio-économiques, urbanistiques, voire culturelles.
Enfin, compte tenu des tensions sur les cours du pétrole, l’exploitation énergétique du biogaz prend une
place à l’importance croissante au sein des pays de
l’Union européenne.
La pertinence économique, énergétique et financière
de cette filière est ainsi en fort développement avec
une production estimée à plus de 4 millions de
tonnes équivalent pétrole en 2004 en Europe.
Le schéma de principe de la figure 1, adapté d’après
[Ademe, 2000], précise la place de la méthanisation
des ordures ménagères et de la fraction fermentescible dans la chaîne de traitement.
2. État des lieux de la méthanisation
des déchets
Si l’objet de ce guide est centré sur les déchets ménagers et assimilés, il faut souligner que la méthanisa-
tion est un traitement fréquent et performant pour de
nombreux autres déchets3.
Ainsi, la méthanisation est-elle fréquemment mise en
œuvre pour réaliser l’épuration des eaux usées de
nombreuses industries (papier, agroalimentaire, chimie…) et également des déjections des animaux
d’élevage (lisier, fumier, fientes…). Enfin, la digestion des boues des stations d’épuration est une technique ancienne et très fréquemment pratiquée sur les
installations des villes moyennes et importantes.
Selon une récente étude4 menée sur 17 pays, une forte
variabilité est observée dans le parc des installations
(en fonctionnement) de traitement des déchets solides organiques par méthanisation. La gamme couverte par les 150 installations industrielles en matière
de capacité de traitement (tonnes entrantes), de type
de méthanisation (humide ou sec) et surtout de nature des déchets organiques admis, est grande.
La diversité des déchets admis intègre des ordures
ménagères brutes5 (OM), des ordures ménagères rési3 Étude ANDI-ACONSULT “Le marché de la méthanisation industrielle en France (Gaz de France, Ademe, 2003-2004). Enquêtes
qualitatives et quantitatives auprès des acteurs (collectivités et
industriels), prospective à 15 ans”. http://www.ademe.fr/htdocs/
publications/publipdf/synth_marche_meth.pdf
4 Synthèse 2004 de l’International Energy Agency, Task 37,
Groupe de travail sur les bio-énergies.
5 De moins en moins depuis la généralisation des collectes
sélectives du verre et des emballages.
Figure 2. Évolution de la capacité de méthanisation en Europe par pays
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duelles (OMR), la fraction fermentescible des ordures
ménagères triée à la source (FFOM) ou biodéchets,
mais aussi du lisier, du fumier et de nombreux déchets organiques industriels.
Au niveau historique, la méthanisation des déchets
solides a fait son apparition en France (Amiens,
1988) et en Italie où fonctionnent toujours les unités
les plus anciennes. En 2004, la moitié des unités de
méthanisation, soit 125 unités, se répartissent dans
une quinzaine de pays. Le rythme de construction a
longtemps stagné avec quelques unités par an, mais
en 2001, année-charnière, une rapide évolution est
notée avec plus d’une dizaine d’unités inaugurées
annuellement. La capacité s’accroît ainsi d’environ
600 000 t/an en Europe comme l’illustre la figure 2.
En nombre, environ 70 % des unités du parc étudié
méthanisent des biodéchets alors que le ratio est de
25 % pour les installations recevant des ordures ménagères résiduelles (“ordures grises”). En revanche,
en termes de capacité de traitement, les tonnages méthanisés sont équivalents en biodéchets (3 millions
de tonnes) et en ordures ménagères (3,3 millions de
tonnes). La figure 3 met en évidence, pour l’année
2002, les tendances en termes de substrat traité sur
les installations de méthanisation en Europe6.
Le parc se caractérise par un nombre élevé d’installations de méthanisation de biodéchets de petites capacités (90 % des unités biodéchets) comprises entre
3 000 et 40 000 t/an pour une méthanisation avec un
seul gisement.
Au niveau géographique, l’Allemagne7 concentre plus
de 40 % des unités, suivie par la Suisse (15 %), mais
uniquement sur des biodéchets. La plus importante
unité de méthanisation de biodéchets sera française
avec Lille, dont la construction a débuté en 2006, et qui
traitera 106 000 t/an de biodéchets et de déchets verts.
Les plus grosses unités de méthanisation d’ordures ménagères en fonctionnement sont très récentes et sont
localisées en Espagne, avec notamment les trois “Écoparcs” de Barcelone qui cumulent une capacité de traitement de 830 kt/an (entrée tri mécanique8). D’autres
usines récentes sont en activité à Cadix (210 kt/an), La
Corogne (182 kt/an) et Pampelune (100 kt/an).
De grosses unités se trouvent également aux Pays-Bas
à Groningen (230 kt/an) et Friesland (180 kt/an), en
Allemagne à Hanovre (100 kt/an) et en France, à
Amiens (85 kt/an, Varennes-Jarcy (100 kt/an) et prochainement Montpellier (200 kt/an).
6 Dans ce schéma, les déchets gris sont analogues aux ordures
ménagères résiduelles.
7 En Allemagne, méthanisation et collecte sélective de la FFOM
ont débuté en 1986 avec la loi sur le recyclage (Kreislaufwirtschafts und Abfallgesetz) et se sont développés avec la “TA
Siedlungsabfall” [Ademe, 1998 : “Le compostage des déchets
organiques des ménages en Allemagne”].
8 Le taux de déchets admis en méthanisation après le tri sur le
site Écoparc I est de 150 pour 350, sur le site II de 120 pour 300 ;
et enfin, sur le site III de 90 pour 180.
Figure 3. Évolution de la capacité de méthanisation par nature de déchet [Solagro, 2002]
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Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
Entreprise
Pays
ProcŽdŽ
Nombre
dÕunitŽs
CapacitŽ (t/an)
Linde-KCA-Dresden GmbH
Allemagne
Linde BRV
20
Veolia Environnement
France
Krueger
14
990 000
950 000
Valorga International SAS
France
Valorga
11
850 000
Biotechnische Abfall. GmbH & Co KG
Allemagne
BTA
22
406 000
Kompogas AG
Suisse
Kompogas
29
777 000
Citec Environment
Finlande
Wassa
10
288 000
Organic Waste Systems
Belgique
Dranco
Schmack Biogas AG
Allemagne
Euro/Coccus
Ros Roca Internacional
Espagne
BioStab
13
195 000
non renseignŽe
170
13
528 000
10
Tableau I. Entreprises majeures de méthanisation des déchets ménagers
Il existe également, au Royaume-Uni et au Danemark, de très volumineuses unités (capacités supérieures à 130 000 t/an) pratiquant la co-méthanisation (ou co-digestion) de biodéchets avec des déchets
agroalimentaires et des effluents d’élevage.
Dans ce contexte varié, environ la moitié des unités
de méthanisation, soit 64, sont réparties dans une
quinzaine de pays pour environ 25 constructeurs9.
Dans le domaine stricto sensu des déchets ménagers,
le tableau I présente les caractéristiques des principales entreprises de construction actives en Europe.
3. Mécanismes biologiques
de la méthanisation
Sur le plan biochimique, le processus de fermentation
anaérobie se décompose en quatre phases qui peuvent
se dérouler dans des réacteurs séparés ou non.
- Phase d’hydrolyse
Le déchet solide est liquéfié, les macromolécules organiques (protéines, polysaccharides…) sont décomposées en éléments simples (acides gras mono et disaccharides, peptides, acides aminés…). Cette étape est
rendue possible par l’activité d’enzymes extracellulaires
secrétées par des bactéries hydrolytiques (Clostridium,
Bacillus, Bacteroides). Cette phase est nécessaire pour
rendre assimilable le déchet par les bactéries.
- Phase d’acidogénèse
Les bactéries transforment les molécules simples en
acides gras volatils (AGV, c’est-à-dire entre autres,
9 ANM, BIOCEL, HEIDEMIJ, BKS NORDIC, BTA, ROEDIGER, CITEC,
DRANCO, ALPHA UT, ENTEC, FARMATIC, HAASE, IMK, IONICS
ITALBIA, ISKA, KOMPOGAS, LINDE, BRV, PAQUES, PROJEKTRÖ, ROS
ROCA, SNAMPROGETTI, VALORGA, VINCI Environnement, WAASAWABIO, WEHRLE WERK, YIT-VMT.
10 Adapté d’après la revue Systèmes Solaires n°167 - Baromètre
du biogaz, juin 2005.
28
l’acide acétique, l’acide propionique, l’acide butyrique…) et en alcools (méthanol, éthanol…) de faible
poids moléculaire. On observe également la production d’hydrogène et de gaz carbonique résultant de la
conversion des sucres, lipides et des protéines. Les
bactéries responsables de l’acidogénèse peuvent être
anaérobies strictes ou facultatives (Clostridium, Klebsiella, Enterobacter, Erwinia et Streptococcus…).
- Phase d’acétogénèse
Au cours de cette seconde phase, les produits de l’acidogénèse sont convertis en acétates (CH3COO–) et en
hydrogène (H2) par d’autres bactéries (Pelobacter carbinolicus, Synthrophobacter wolinii ou Synthrophomonas wolfei…). Le métabolisme de ces bactéries n’est
possible que si l’hydrogène produit est éliminé au fur
et à mesure de la réaction et la pression partielle en
hydrogène du milieu doit être comprise entre 10-6 et
10-4 atmosphère, car il est nécessaire de conserver un
minimum d’hydrogène afin de réduire le CO2 en CH4.
Durant cette phase, plusieurs groupes de bactéries
sont coordonnées ensemble pour assurer la formation de l’acétate, du H2 et du CO2. Les réactions biochimiques des unes ne pouvant s’effectuer sans la réaction biochimique d’autres bactéries, c’est ce qu’on
appelle une relation syntrophique.
- Phase de méthanogénèse
Dans cette dernière phase, les bactéries méthanogènes
hydrogénophiles (Methanobrevibacter et Methanobacterium) sont majoritaires dans le milieu, et utilisent
l’hydrogène présent pour réduire le gaz carbonique en
méthane. L’acétate présent est également réduit par
d’autres bactéries méthanogènes acétoclastes (Methanosarcina, Methanococcus et Methanosaeta) qui décomposent et réduisent l’acétate en méthane.
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La figure 4 résume les principales étapes biologiques
de la méthanisation.
Figure 4. Décomposition biologique de la méthanisation
Le savoir-faire d’une bonne gestion du biogaz tient à
la maîtrise des différentes phases afin d’assurer une
décomposition la plus avancée possible du substrat.
4. Produits et sous-produits
Comme pour tout type de traitement de déchets, divers flux de sous-produits sont engendrés par la méthanisation qu’il convient de gérer, depuis la phase
de production, jusqu’à celle de l’élimination et/ou de
valorisation. Cette ultime phase, en fonction du
contexte local, peut effectivement être considérée ou
non comme une valorisation. Les sous-produits de la
méthanisation des déchets ménagers et assimilés sont
classés en 3 phases principales.
• Une phase gazeuse : le biogaz
Ce mélange gazeux riche en méthane et en gaz carbonique constitue une énergie stockable et maîtrisée
techniquement, utilisable sans porter préjudice à l’environnement. Le pouvoir calorifique du biogaz produit par méthanisation industrielle des déchets issus
des ménages est de 20-25 MJ/m3, soit 5,8 kWh/Nm3.
Les composants du biogaz issu de la méthanisation
d’ordures ménagères11 sont de diverses natures :
- le méthane (CH4) dans une proportion comprise
entre 55 et 85 % qui dépend du pouvoir méthanogène
des déchets et des conditions de méthanisation (température, temps de séjour, présence d’agents inhibiteurs, humidité…),
- le dioxyde de carbone (C02) à des teneurs comprises
entre 25 et 45 % (CH4 et CO2 composent à eux seuls
99 % du biogaz),
- de l’eau à saturation11,
- et enfin, éléments en traces, l’hydrogène sulfuré
(H2S) à des teneurs comprises entre 300 à 5 000
mg/m3, et l’ammoniac NH3.
• Une phase solide : les refus solides et le compost
Un premier groupe de composés solides est constitué
par les refus solides extraits au niveau de la phase de
préparation des déchets, avant la méthanisation stricto
sensu. La quantité et la qualité de ces refus sont variables. Ainsi, ils peuvent représenter 10 % à 20 % du
tonnage dans le cas de déchets de type FFOM issu de tri
à la source, mais peuvent atteindre 50 % en cas de tri
mécanisé des ordures ménagères brutes. Ces refus sont
“relativement” inertes, à l’image des plastiques d’emballage qui peuvent être souillés avec des taux de matière organique de l’ordre de 10 à 20 %. Ces refus doivent être éliminés par stockage, incinération ou servir à
la production de combustible de substitution industriel.
Le second type de résidus solides à considérer est le
“compost” obtenu directement en sortie de méthanisation ou après un post-traitement. Le compost peut
représenter jusqu’à 35 % en poids du tonnage de déchets admis en entrée de méthanisation (cf. figure 1).
• Une phase liquide
En fonction de l’humidité des déchets admis, du type
de process en méthanisation et éventuellement en
compostage s’il est mis en œuvre, les volumes de
rejets liquides issus du process de méthanisation sont
compris entre 0 et 20 % du tonnage admis en traitement. Si la Suisse considère les effluents liquides produits lors de la méthanisation des biodéchets comme
un engrais utilisable en agriculture biologique, la valorisation n’est pas systématique et dépend de la réglementation13 et des débouchés locaux. Ainsi, selon
la localisation et le fonctionnement de l’unité, le traitement obligatoire de ces effluents peut devenir une
contrainte forte s’ils ne peuvent être recyclés sur place.
11 Cf. Cahier de prescriptions techniques minimales relatives à
la valorisation du biogaz téléchargeable sur le site de l’ATEE,
www.atee.fr onglet biogaz.
“Le Biogaz et sa valorisation, guide méthodologique”, aux Éditions Ademe.
12 Il faut noter que la présence d’oxygène ou d’azote dans le
biogaz de façon significative est signe d’un défaut de fonctionnement de l’installation.
13 En 2006 en France, compte tenu de l’actuelle rédaction de la
norme NFU44051 sur les amendements organiques, la valorisation sous forme de matières fertilisantes de ces effluents
impose un plan d’épandage.
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Gestion de l’amont et des entrées
1. Identification des déchets admis
en méthanisation
La collectivité, qui assume la responsabilité de la
collecte et du traitement des déchets des ménages,
peut également prendre en charge, si elle le souhaite,
les déchets d’autres producteurs, comme ceux des
commerces et industries1.
Pour étudier son projet, la collectivité peut chercher
à constituer un gisement important et varié de
déchets à méthaniser, ce qui peut offrir divers intérêts. Ainsi, sur le plan financier d’une part, les économies dites “d’échelle” permettent d’obtenir un
coût à la tonne souvent plus attractif avec des flux
plus importants2. D’autre part, en termes de risque
de nature “politique”, la prise en compte par la collectivité de l’ensemble de la “filière organique”
– c’est-à-dire de la totalité des déchets fermentescibles sur son territoire – permet de constituer une
assise plus large, et donc mieux justifiée et mieux
admise. Mais il convient de faire attention à la
pérennité du gisement et à la régularité des apports.
Il importe également, pour assurer la faisabilité d’un
projet d’installation, de vérifier sa compatibilité
avec le “Plan départemental d’élimination des
déchets ménagers et assimilés” (PDEDMA), document d’orientation validé après enquête publique et
opposable au tiers au tribunal administratif.
2. Typologie des déchets admissibles
en méthanisation
Pour assurer une bonne méthanisation et préciser le
type de traitement dans ses grandes opérations
1 En fait, la gestion des déchets admis en méthanisation dépend
également du mode de gestion de l’installation (cf § 5). Ainsi, en
DSP (délégation de service public), le rôle du délégataire est
essentiel pour admettre des intrants d’origine industrielle.
2 Schématiquement, une usine de méthanisation plus grosse
coûtera moins cher en frais d’exploitation qu’une de taille plus
modeste et le surcoût à l’investissement est plus vite amorti sur
la durée.
3 “La méthanisation des déchets ménagers et assimilés, recycler les déchets organiques et valoriser leur potentiel énergétique”, rapport Solagro, 2000 - www.solagro.org
30
(étape de définition et d’études préalables), la définition des déchets et des flux à traiter est indispensable3. En effet, divers types de déchets sont susceptibles d’être traités suivant différentes options et il
convient dans un premier temps de considérer les
déchets qui relèvent de la responsabilité des collectivités, puis dans un second temps, les autres
déchets à pouvoir méthanogène susceptibles d’améliorer la faisabilité du projet.
Il faut néanmoins souligner que la prise en compte
de déchets non ménagers et assimilés est complexe
à organiser pour une collectivité (elle peut cependant passer par la mise en place d’une redevance
spéciale pour les DIB produits par les commerçants
et artisans).
2.1. Déchets municipaux dont l’élimination relève
de la compétence des collectivités
- Ordures ménagères brutes (OMB) et résiduelles
(OMR)
Pour une collectivité, le gisement d’ordures ménagères constitue un flux à collecter et à traiter de
l’ordre de 200 à 500 kg/habitant par an suivant l’habitat et la proportion de déchets dits “assimilés”.
Même si la nature des OMR a changé depuis la mise
en place des collectes sélectives d’emballages et de
papier de journaux-magazines, c’est un gisement
riche en matière organique qu’il est intéressant de
valoriser en méthanisation.
La part de déchets de jardin dans les OMR apparaît
variable et peut être plus faible du fait d’interdictions locales et du développement d’exutoires spécifiquement mis en place (collecte en porte à porte,
déchetterie).
La figure 1 présente les relations entre les différentes
fractions des déchets ménagers.
- Fractions putrescible et fermentescible
des ordures ménagères
Depuis la fin des années 1990, plusieurs collectivités ont mis en place une collecte sélective de cette
fraction contenue dans les ordures ménagères et
assimilés. Traditionnellement, la distinction est faite
entre les “biodéchets”, qui sont constitués de
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Gestion de l’amont et des entrées
Figure 1. Relations entre les différentes fractions des déchets ménagers (d’après Solagro)
déchets de cuisine et de jardin, et la fraction fermentescible des ordures ménagères (FFOM) qui
englobe les biodéchets et la fraction “papier-carton”.
Capter la FFOM nécessite de mettre en place une collecte sélective généralement en porte-à-porte même
si l’apport volontaire est parfois pratiqué.
Au niveau des ménages, le flux et la qualité des biodéchets par habitant sont fonction de la nature du
gisement réellement collecté. La part en déchets de
cuisine est souvent marginale par rapport aux flux
de déchets de jardin.
Les flux et la qualité du gisement collecté dépendent du volume du contenant, du type de collecte
imposée ou volontaire, de l’implication du personnel de collecte, de l’information faite par la collectivité.
Un cas particulier est celui du carton, tout à fait traitable en méthanisation, mais également concerné
par les collectes sélectives d’emballages. Un message clair devra être recherché, ce qui n’est pas évident…
Le changement de comportement des usagers et la
gestion domestique sont également à prendre en
compte lors de la mise en place de la collecte sélective de biodéchets. La collecte se limite générale-
Figure 2. Composition des biodéchets admis en méthanisation (Genève,
Suisse - photo EREP)
ment aux zones pavillonnaires (éventuellement le
petit collectif avec diverses expériences en habitat
vertical) et nécessite une fréquence minimale d’une
fois par semaine, toujours complémentaire à une
collecte d’ordures ménagères résiduelles. La figure 2
présente un exemple de déchets admis en méthanisation.
- Déchets verts des particuliers et des espaces
verts publics
Le gisement des déchets verts des particuliers peut
être collecté en porte-à-porte ou en points d’apport
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Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
volontaire mais aussi provenir des déchetteries. Les
flux à traiter dépendent des surfaces des jardins des
particuliers et des espaces verts publics ainsi que de
la fréquence de l’entretien.
Il faut souligner que la méthanisation des déchets
verts présente un intérêt limité, car, d’une part, les
matériaux ligneux présentent un potentiel méthanogène médiocre, et d’autre part, de fortes variations saisonnières et des problèmes d’homogénéisation dans le réacteur doivent être pris en compte.
En revanche, les déchets verts (qui peuvent être
compostés seuls) sont très précieux pour réaliser
une stabilisation aérobie par maturation du résidu
solide après méthanisation (ou compostage).
- Déchets issus de l’assainissement des eaux usées
Comme l’a montré l’état des lieux de la méthanisation industrielle, les déchets produits lors de l’assainissement des eaux usées, plus ou moins riches en
matière organique fermentescible peuvent, dans
certains cas, être admis en méthanisation avec les
ordures ménagères (sous contrôle de la réglementation des matières fertilisantes – cf. chapitre
“Contexte réglementaire”).
Ces déchets de l’assainissement sont constitués par
les matières de vidange des dispositifs d’épuration
autonome, par les produits du curage des égouts,
par les graisses issues des bacs à graisse alimentaire
ou des dégraisseurs des stations d’épuration, et
enfin par les boues des stations d’épuration
urbaines ou industrielles.
Il faut cependant considérer certains points avant
d’étudier l’intégration de ces déchets exogènes car :
- la présence de boues d’épuration urbaines dans le
résidu solide stabilisé obtenu en fin de traitement
impose de respecter la réglementation qui s’applique aux boues (plan d’épandage, norme NFU
44095 relative au compost de boues, homologation) ;
- le traitement des graisses (hors norme NFU
44095) impose des équipements supplémentaires
sur l’unité (module de lavage des fûts, de réchauffage et d’homogénéisation) ;
- la présence de déchets relativement liquides augmente les volumes d’effluents à traiter, ce qui peut
éventuellement s’avérer problématique ;
32
- les déchets de l’assainissement des eaux usées relèvent de la compétence “assainissement” des collectivités et le périmètre de ces établissements publics
à caractère commercial et industriel (EPCI) ne coïncide pas toujours avec celui de l’EPCI en charge du
traitement des déchets.
2.2. Déchets organiques des commerces, artisans, agriculteurs et industries
La capacité de traitement de l’usine de méthanisation peut être augmentée considérablement par des
apports d’autres déchets organiques tels que :
- les déchets d’origine commerciale comme les résidus de fruits et légumes (en provenance des marchés ou d’entreprises), les invendus, les produits
périmés ou avariés, les papiers/cartons souillés des
grandes surfaces…
- les déchets d’origine agricole comme les fruits et
légumes en surproduction, les effluents d’élevages
(lisiers, fumiers, fientes…),
- les déchets d’origine industrielle (agroalimentaire,
laiterie, confiture, plats cuisinés, conserveries,
papeterie, textile, pharmacie, cosmétique, brasseries, boissons, distilleries, coopératives vinicoles,
sucreries…),
Les biodéchets alimentaires en provenance des gros
producteurs comme les cantines, restaurants d’entreprises ou privés, les hôpitaux et les maisons de
retraite, ou les marchés, sont des gisements importants et facilement identifiables.
Leur collecte nécessite des aménagements en
termes d’équipement individuel (contenant,
local…), de circuit et de fréquence de collecte, parfois de jour ou d’heure de collecte.
Ces déchets, qui ne relèvent pas directement de la
compétence des collectivités, imposent la mise en
place d’outils de financement particuliers (par
exemple, la redevance spéciale) pour la collecte et
pour le traitement.
Par ailleurs, ces déchets ne constituent pas des gisements captifs et leurs producteurs n’ont d’intérêt à
s’engager dans des contrats avec les collectivités que
si les conditions économiques proposées sont
attractives, c’est-à-dire, plus favorables que les
autres solutions à leur disposition sur le marché.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Gestion de l’amont et des entrées
À cet égard, l’estimation quantitative des gisements
et flux n’est pas suffisante, et il est nécessaire d’effectuer une analyse globale de l’équilibre technicoéconomique dans la durée de la collecte et du traitement sur la zone géographique considérée.
Enfin, la nature du gisement, sa teneur en eau
(déchet liquide ou solide), sa variabilité temporelle
en quantité et en composition, sont des éléments
essentiels qu’il convient de préciser pour établir le
potentiel méthanogène de dimensionnement de
l’unité de méthanisation. La proximité, l’accessibilité du gisement sont des facteurs qui conditionnent
la pérennité indispensable à l’équilibre financier et
technique de l’installation.
3. Paramètres à considérer
pour cadrer un projet
La méthanisation s’applique à de nombreux déchets
organiques soumis à des contraintes industrielles
spécifiques qui doivent être prises en compte dès la
mise en place d’un projet. Les paramètres qui permettent de maîtriser ces contraintes sont divers.
Sans exhaustivité, il faut déterminer :
- les flux à traiter,
- la qualité physique des gisements (granulométrie,
taux de matières sèches, de carbone organique, d’indésirables et d’inertes…),
- la qualité biologique et chimique des gisements
(critères d’innocuité en pathogènes, éléments
traces, inhibiteurs…),
- l’évolution saisonnière des déchets à traiter (quantité et qualité),
- le mode de méthanisation retenu (liquide, solide),
- la technologie de méthanisation (mésophile, thermophile, temps de séjour…),
- le devenir du résidu solide final (compost en valorisation agronomique, enfouissement, incinération…),
- plus généralement les valorisations possibles localement pour les sous-produits (utilisateurs identifiés pour le compost, le digestat liquide, le biogaz
valorisé en chaleur, la production “d’électricité
verte”, etc.)
La connaissance de la variabilité dans la qualité et la
quantité de déchets admis en méthanisation est un
paramètre nécessaire pour dimensionner convenablement toute installation (présence d’opérateurs
5 jours sur 7, en 2 x 8 h…).
En effet, d’importantes variations sont toujours
observées comme l’illustre la figure 3 qui présente la
composition et l’évolution sur l’année 2004 des
déchets organiques collectés et traités sur la communauté urbaine de Lille4.
Enfin, soulignant la complexité de tout projet,
le caractère spécifique des déchets admis au traitement (tri, méthanisation, maturation, recyclage matière…) est illustré par les tableaux I et II
(source : Syctom de l’agglomération parisienne).
4 Communauté urbaine de Lille - “Rapport sur le prix et la qualité du service public d’élimination des déchets - Résidus
urbains, bilan 2004”. La communauté urbaine de Lille distingue
quatre types de déchets : ① “flaconnage” (en verre, plastique ou
métal) ; ② “fibreux” (papiers, cartons, journaux, magazines) ;
③ “fermentescible” (épluchures, fleurs fanées, tonte, petits élagages) et ④ reste des déchets ou « queue de tri ».
Figure 3. Variabilité des déchets organiques collectés sur la communauté urbaine de Lille (en tonnes)
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
33
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
Sur brut
Humidité
Ratio
Sec
C
H
Col sél.
%
%
kg/hab
kg/hab
kg/hab
kg/hab
kg/hab
Putrescibles
18,8
65,1
92
32
15,0
0,15
Papiers
18,8
17,6
92
76
35,5
0,36
26
Carton
10,8
23,8
53
40
18,9
0,19
11
C
H
Sec
Humide
kg/hab
kg/hab
32
92
15,0
0,2
49
60
23,3
0,2
29
39
13,8
0,1
Complexes
1,0
25,8
5
4
1,7
0,02
4
5
1,7
0,0
Textiles
2,4
21,0
12
9
4,3
0,04
9
12
4,3
0,0
Textiles sanitaires
5,8
51,9
28
14
6,4
0,06
14
28
6,4
0,1
Plastiques
11,2
22,5
55
42
32,3
3,50
38
49
29,1
3,2
Combustibles
3,2
20,0
16
12
5,9
0,06
12
16
5,9
0,1
Verres
10,5
1,5
51
50
0
0,00
35
15
16
0,0
0,0
Métaux
2,9
17,0
14
12
0
0,00
2,4
9
11
0,0
0,0
Incombustibles
0,9
1,5
4
4
0
0,00
4
4
0,0
0,0
4,2
Spéciaux
0,8
0,0
4
4
0
0,00
4
4
0,0
0,0
Fines
12,8
45,9
62
34
15,9
0,08
34
62
15,9
0,0
Bilan
100
31,6
488
333
120
4,4
255
398
100
3,9
Tableau I. Caractérisation des ordures ménagères de Paris (1999)
Type de déchets
Entrée tri
Ordures ménagères résiduelles
325 kt/an
Entrée méthanisation
(fraction fermentescible du déchet)
130 kt/an
Biodéchets et déchets verts
10 kt/an
10 kt/an
Refus de tri des collectes sélectives
7,5 kt/an
4,95 kt/an
Total
342 kt/an
145 kt/an
Tableau II. Caractérisation des déchets admis ; projet d’unité de méthanisation de Romainville (2005)6
4. Organisation de la pré-collecte
et de la collecte
Dans un système complet de gestion des déchets, le
traitement par méthanisation se situe après la collecte,
laquelle détermine les flux et la qualité des intrants.
Pour l’usager, le choix imposé par la collectivité,
tout d’abord du type de collecte (sélective ou en
mélange), du récipient de pré-collecte (bacs, sacs,
conteneurs…) et de son volume, est déterminant
pour garantir que le gisement est bien en adéquation avec les demandes de la collectivité. En particulier, dans le cas de collecte de biodéchets, l’information et la communication auprès des usagers, par
exemple lors de la distribution des contenants, sont
primordiales.
Les coûts de pré-collecte peuvent être majorés par
la fourniture, l’entretien et le remplacement des
contenants.
34
Résiduel (kg/hab)
78
5
Par ailleurs, il convient de décider du type de collecte (porte à porte, point d’apport volontaire,
déchetterie) et du mode de collecte (benne simple,
bi-compartimentée, spécifique…) qui doit être en
cohérence avec le mode de pré-collecte et les caractéristiques du gisement ciblé.
La fréquence de collecte, le choix d’augmenter la
fréquence de collecte pour les biodéchets, le jour et
l’heure de passage sont des éléments de l’organisation qui pèsent sur les coûts des équipements, du
matériel et du personnel éventuellement engagé
pour le surplus de travail.
Les actions de communication et de sensibilisation
autour du projet pour la pré-collecte et la collecte
sont à programmer dans la durée, c’est-à-dire que
des programmes pluriannuels sont indispensables7.
5 Tableau extrait de l’étude “Les capacités d’incinération
en Ile-de-France, Détermination du gisement incinérable
et ajustement des capacités” - Série Études, Observatoire
régional des déchets d’Ile-de-France (ORDIF). La production unitaire d’ordures est de 488 kg/hab, calculée selon la
méthode dite MODECOM, par le Syctom.
6 “Projet d’unité de traitement biologique des déchets :
adoption du programme de réaménagement du centre de
transfert et de tri de Romainville” – Rapport au comité
syndical du 29 juin 2005.
7 S’il est essentiel d’accorder une grande importance aux
outils relationnels (communication et sensibilisation) avec
le public sur l’amont du projet (pré-collecte et collecte), sa
réalisation impose réglementairement une enquête
publique dans laquelle cet enjeu est crucial pour une
acceptation par les riverains du site de méthanisation.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Gestion de l’amont et des entrées
Enfin, la qualité du tri des déchets chez l’usager est
un facteur influant à la fois le coût de la collecte et
celui du traitement.
La figure 4 situe (sous une forme distincte de celle
adoptée pour la figure 1 du chapitre « Quand choisir la méthanisation ») la place de la méthanisation
dans la gestion globale des déchets ménagers.
La figure 5 illustre, avec l’exemple réel de la communauté urbaine de Lille8, les proportions des différents déchets collectés en fonction des types de collecte.
8 Communauté urbaine de Lille - « Rapport sur le prix et la qualité du service public d’élimination des déchets - Résidus urbains
bilan 2004 ».
Figure 4. Place de la méthanisation dans la gestion globale des déchets
Figure 5. Détails d’un exemple de gestion globale des déchets (Lille, 2004)
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
35
Process mis en œuvre
1. Paramètres du procédé
de méthanisation
technologies se distinguent ainsi au niveau du traitement mécanique qui peut mettre en œuvre différentes variantes, en particulier au niveau :
1.1. Analyse du procédé industriel
La méthanisation des déchets ménagers se réalise
dans une unité de traitement des déchets qui met en
œuvre de façon combinée, d’une part, un processus
biologique de dégradation de la matière biodégradable et d’autre part, des étapes mécaniques situées
en amont et en aval des méthaniseurs afin de préparer les déchets en vue de la fermentation et d’améliorer la qualité du produit fini.
Au niveau des technologies proposées par les différents constructeurs présents sur le marché hexagonal, des variantes permettent d’améliorer les bilans
matières et énergétiques sur les étapes biologiques
et mécaniques.
Classiquement (cf. § 2), une usine de méthanisation
se décompose en huit modules comme l’illustre le
schéma de la figure 1.
- des pré-traitements des déchets entrants (criblage,
broyage éventuel),
1.2. Paramètres du traitement mécanique
Dans un premier temps, certains paramètres définissent le traitement mécanique. Les différentes
- des post-traitements des sous-produits issus de la
méthanisation (devenir des jus et des lixiviats, affinage de la fraction solide du digestat),
- et des performances générales de l’installation
(souplesse et robustesse, facilité d’entretien, traitement de l’air vicié…).
Le choix des paramètres du traitement mécanique
est essentiel pour la méthanisation d’ordures ménagères résiduelles.
1.3. Paramètres du traitement biologique
Dans un second temps, d’autres paramètres définissent le traitement biologique (humidité, température,
temps de séjour, nombre de réacteurs en série, préensemencement…). Sur le plan pratique, les unités
de méthanisation se différencient au niveau du traitement anaérobie de méthanisation principalement
sur la base des quatre paramètres.
Figure 1. Décomposition d’une usine de méthanisation en modules (source GIRUS)
36
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Process mis en œuvre
• Le premier paramètre est l’humidité du substrat
organique dans le méthaniseur. C’est en effet un élément clef qui permet de distinguer les procédés par
voie sèche de ceux par voie humide. L’humidité est
inversement proportionnelle à la teneur en matière
sèche qui conditionne pour partie la viscosité du
substrat et par conséquent, influe sur le mode d’homogénéisation et de mélange mis en œuvre dans le
méthaniseur.
Par voie sèche (cas le plus fréquent), le méthaniseur
est alimenté par un substrat dont la concentration en
matières sèches est comprise entre 15 et 40 %. Par
voie humide en revanche (procédé en développement sur de grosses installations), les déchets sont
préalablement liquéfiés pour présenter un taux maximum de matières sèches de 10 à 15 %, ce qui
implique souvent un recyclage des jus récupérés en
sortie du méthaniseur. Le tableau I illustre les différences entre méthanisation par voie sèche et humide.
• La température de fermentation dans le méthaniseur est un autre paramètre essentiel. En effet, la
méthanisation peut être mésophile (autour de
35°C) ou thermophile (environ 55°C). Les premières installations ont été conçues sur le mode
mésophile, puis le procédé thermophile plus efficace en termes d’hygiénisation, s’est développé1.
Le chauffage des réacteurs s’effectue généralement
par circulation d’eau chaude sous différentes formes
(enveloppe périphérique, paroi chauffante ou serpentins immergés).
Une fraction de l’énergie thermique produite par la
méthanisation est consommée sur l’usine elle-même
pour assurer la bonne température. Le tableau II
illustre les différences entre méthanisation mésophile et thermophile.
• Pour assurer une fermentation efficace, le substrat
doit être ensemencé de façon homogène en flore
microbiologique.
Il convient également, pour assurer une bonne
dégradation de la matière, de maintenir un temps de
séjour minimal. En sortie de méthaniseur, une partie du substrat est donc réintroduite en tête pour
augmenter le temps de séjour et recycler la biomasse épuratrice. Dans les méthaniseurs dits “infiniment mélangés”, l’homogénéisation est réalisée
1 Une méthanisation “psychrophile” peut également être distinguée pour les centres de stockage (CSD), là où l’élévation de
température est uniquement due à l’échauffement de la fraction
organique des déchets sans apport extérieur de chaleur.
Tableau I. Comparaison de la méthanisation par voie sèche et par voie humide
Régime mésophile (≈ 35 °C)
Avantages
Inconvénients
Régime thermophile (≈ 55 °C)
Faible énergie mise en œuvre
Faible production d’ammoniaque
Degré d’hygiénisation élevé
Rendement élevé de dégradation
Fermentation rapide (2 à 3 semaines)
Hygiénisation limitée
Rendement de dégradation moyen
Fermentation lente (4 à 6 semaines)
Consommation énergétique élevée
Production forte d'ammoniaque
Pilotage plus délicat
Tableau II. Comparaison de la méthanisation mésophile et thermophile
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
37
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
Méthaniseur infiniment mélangé
(en batch)
Méthaniseur piston
(flux piston ou séquentiel)
Avantages
Bonne homogénéité du substrat.
Bonne dégradation.
Forte production de biogaz.
Absence de pièces mécaniques.
Temps de séjour maîtrisé.
Traitement par "volumes" du substrat dans
le réacteur, assimilable à un procédé en
plusieurs étapes.
Inconvénients
Difficulté de maîtriser le temps de séjour.
Risque de sédimentation en fond de cuve .
Consommation énergétique forte.
Nécessité d’avoir un taux de matière sèche
élevé dans le réacteur.
Moins bonne homogénéité du substrat.
Tableau III. Comparaison de la méthanisation en batch et en flux piston
Méthaniseur mono-phasique
Méthaniseur duo-phasique
Avantages
Procédé simple.
Investissement moins important (cuverie
plus limitée).
Adaptation aux conditions du processus,
optimisation de chacune des phases.
Réduction de séjour en méthanisation.
Inconvénients
Difficulté de réunir dans le même
méthaniseur toutes les conditions optimales
pour l’ensemble des phases de
méthanisation.
Machines et équipements plus coûteux.
Contrôle commande du processus plus
sophistiqué.
Tableau IV. Comparaison de la méthanisation mono-phasique et duo-phasique
par injection de biogaz ou par pompage périphérique. L’alimentation des méthaniseurs peut être
continue (24 h/24 h) ou séquentielle (sur la journée
par exemple).
En revanche, pour les méthaniseurs de type “piston”, le substrat brut introduit agit en “poussant” la
matière en cours de traitement vers l’autre extrémité du réacteur. Le tableau III illustre les différences
entre méthanisation par batch et par piston.
• Enfin, la dégradation anaérobie des matières biodégradables peut être réalisée en une seule phase,
ou en dissociant les phases d’hydrolyse et de méthanogénèse. Dans le cas d’une fermentation en deux
phases, la cuverie est généralement conçue de
manière à réaliser l’hydrolyse et la méthanogénèse
dans deux réacteurs distincts en série. Ce dispositif
permet, en théorie, d’optimiser les cinétiques biochimiques, c’est-à-dire d’augmenter la production
de biogaz. Cependant, il semble que les performances observées réservent cet investissement
additionnel pour des unités qui traitent des déchets
susceptibles de provoquer des phénomènes d’inhibition, comme certains résidus agro-alimentaires ou
de restauration.
38
Le tableau IV illustre les différences entre méthanisation en une ou deux étapes.
Enfin, peuvent également être distingués les méthaniseurs horizontaux avec agitation mécanique
(Kompogas, Linde…) et verticaux sans agitation
mécanique (Dranco, Valorga).
2. Fonctionnement de l’unité
de méthanisation
2.1. Décomposition en modules de base
Une usine de méthanisation peut être divisée selon
les huit modules suivants.
❶ Module de réception (stockage, alimentation de
la chaîne de préparation) ;
❷ Module de préparation (tri, criblage) ;
❸ Module de méthanisation (digestion anaérobie
stricto sensu) ;
❹ Module de maturation (stabilisation du digestat
par compostage intensif) ;
❺ Module d’affinage et de stockage du produit fini ;
❻ Module de traitement des effluents ;
❼ Module de gestion du biogaz ;
❽ Module pour le captage et la désodorisation de
l’air vicié collecté sur l’ensemble du site.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Process mis en œuvre
Figure 2. Maquettes d’ensembles d’unités de méthanisation
Les deux schémas de la figure 2 illustrent la disposition des différents modules sur des unités industrielles en fonctionnement.
2.2. Module de réception
L’unité de réception permet de gérer le déchargement des déchets et d’assurer leur stockage. Ce premier module dispose en général d’un pont-bascule
pour la pesée des camions de collecte déchargeant à
l’usine.
Les déchets sont déversés dans une fosse de réception
ou sur une aire spécifique dont la superficie est fonction de la capacité de traitement souhaitée en régime
de pointe. Pour assurer une maîtrise des nuisances
olfactives, la réception des déchets s’opère de préférence en bâtiment clos avec mise en dépression continue et système d’aspiration et désodorisation de l’air
vicié.
En fonction des projets, la zone de réception peut
recevoir de façon indépendante 4 ou 5 types de
déchets distincts dont les flux sont gérés de façon
séparée avec des durées de stockage plus ou moins
longues.
Pour les biodéchets ménagers issus de la collecte
sélective en porte-à-porte et ceux des collectes spécifiques de la restauration commerciale et collective
(milieu hospitalier et scolaire), en raison de leur
pouvoir putrescible, il est généralement conseillé de
les traiter dans un délai d’environ 10 à 24 heures
après leur livraison.
En fonction de la température ambiante, car la cinétique de décomposition est proportionnelle à la
température, les ordures ménagères résiduelles peu-
vent être stockées jusqu’à 36 heures après leur
livraison.
Les papiers/cartons souillés peuvent être stockés
plus ou moins longtemps sur place en fonction de
leur mode de conditionnement et leur degré de
souillure.
Pour les déchets verts, il convient de distinguer la
fraction ligneuse (branches, écorces…), qui peut
être stockée en plein air, et la fraction azotée (tonte
de gazon, fleurs...) qui doit être traitée comme les
biodéchets très fermentescibles.
Dans l’hypothèse d’une collecte de graisses alimentaires et d’huiles usagées auprès de restaurateurs ou
d’établissements agroalimentaires, un dispositif de
réception doit être prévu. En fonction de la nature des
déchets graisseux, une fosse à graisses, munie d’une
grille, devra être prévue. La figure 3 indique les formes
possibles de réception des déchets.
2.3. Module de préparation
Le module de préparation a notamment pour objectif de réduire la granulométrie des déchets entrants
en méthanisation afin d’augmenter les surfaces
d’échange et de faciliter leur dégradation.
Cette étape peut permettre d’extraire les inertes
(verre, plastique et métaux) de la fraction biodégradable des déchets et ainsi d’augmenter le taux d’organique. La préparation vise également à obtenir la
siccité optimale pour le bon fonctionnement du
méthaniseur. Ce module peut également favoriser
l’ensemencement intime des matières fraîches par
mise en contact avec les matières recyclées extraites
en sortie du méthaniseur. Enfin, il réalise une mise
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
39
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
Figure 3. Exemples de disposition du module de réception (graphisme GIRUS)
à température des matières brutes avant admission
dans le méthaniseur. La figure 4 en détaille les caractéristiques.
En fonction de la composition moyenne2 attendue
des divers flux de déchets (biodéchets, OMR,
déchets verts…), le constructeur adoptera les dispositifs de séparation adéquats pour limiter au maximum la présence d’inertes dans les déchets envoyés
vers les méthaniseurs. De toute évidence, le tri
mécanique est plus poussé dans le cas d’OMR que
pour les biodéchets ou déchets verts, en raison du
taux d’impuretés plus élevé.
2 Il convient de souligner le rôle de la caractérisation des ordures
ménagères par la méthode MODECOM de l’Ademe, en cours de
révision en 2006.
Au niveau du tri mécanique, les technologies suivantes peuvent être mises en œuvre mais de nombreuses variantes sont possibles.
- Pour la chaîne de pré-traitement des OMR
Un “ouvre-sac” est installé en tête au niveau de l’admission des déchets ménagers (le broyage est en
général peu recommandé en cas de valorisation
agronomique du compost). Une calibration granulométrique par trommel rotatif permet de retirer les
inertes, puis, un tri balistique par tapis à rebond
assure l’élimination des petits inertes lourds
(cailloux, verre). Cette extraction d’indésirables
s’achève avec la séparation magnétique par overband des métaux ferreux.
Figure 4. Décomposition du module de préparation (photo GIRUS)
40
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Process mis en œuvre
- Pour la chaîne de pré-traitement des biodéchets/
déchets verts
Un déchiqueteur permet, sans en broyer le contenu,
d’ouvrir les sacs plastiques qui contiennent les
déchets de cuisine (la collecte peut aussi s’effectuer
en sacs biodégradables et l’ouvre-sac est alors inutile). Les déchets sont ensuite déferraillés par l’overband avant une calibration granulométrique par
trommel rotatif.
Il est important de noter que les modifications et
améliorations apportées à la chaîne de pré-traitement ont une influence sur le taux d’inertes envoyés
vers les méthaniseurs. En particulier, c’est la qualité
du matériau admis en méthanisation qui conditionne
la production de biogaz, mais également le fonctionnement de l’installation3. Les risques de sédimentation dans le réacteur d’éléments lourds (verre,
sable, métaux) ou encore de blocage des pompes
(films plastiques) peuvent ainsi être prévenus par
une bonne gestion du pré-traitement.
Des problèmes peuvent affecter le module de prétraitement en raison des contraintes exercées sur les
équipements (usure, abrasion, bouchage, casse,
poussières, débordements), ce qui risque de réduire
les performances de l’installation (arrêt de la chaîne,
délais d’approvisionnement) et d’augmenter les
coûts d’exploitation (maintenance, entretien et
réparation).
3 À ce propos, l’installation de méthanisation d’Amiens a fait l’objet de nombreux travaux sur le module de pré-traitement afin
d’améliorer la digestion anaérobie.
Afin de ne pas mélanger les flux de déchets (OMR
et biodéchets) de qualités différentes, ces flux peuvent être traités par alternance sur la même ligne de
pré-traitement, dont une partie des équipements est
commune au traitement des deux flux (bande transporteuse, trommel, overband, tri balistique…) ou
sur des lignes séparées.
Dans l’optique d’une valorisation agronomique des
résidus solides et dans le cas d’un fonctionnement
par alternance, la maintenance doit permettre d’assurer une propreté “relative” des équipements afin
d’éviter une possible “contamination” par des
inertes extraits de flux traités précédemment.
Afin d’atteindre la siccité nécessaire pour méthaniser, les déchets admis sont homogénéisés au niveau
du malaxeur, avec les effluents clarifiés et une part
de matières fermentées extraites et recyclées. Le
taux de dilution varie d’un procédé à un autre et
influence les performances de l’installation.
En outre, les déchets peuvent être éventuellement
réchauffés par injection de vapeur dans le malaxeur
(vapeur produite par la chaudière process fonctionnant le plus souvent au biogaz), mais certains
constructeurs injectent directement le mélange
dans le méthaniseur sans passer par une mise à température préalable.
2.4. Module de méthanisation
Le module de méthanisation est le cœur du procédé.
L’alimentation des méthaniseurs peut être réalisée
séquentiellement, pendant les heures de travail par
exemple, ou en continu, grâce à un stockage intermédiaire qui permet l’alimentation 7 jours sur 7.
Figure 5. Exemples de modules de méthanisation
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
41
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
Certains constructeurs estiment à ce propos que
l’efficacité de l’activité biologique du méthaniseur
n’est pas perturbée en cas de rupture d’alimentation
tandis que d’autres estiment que le risque de rupture
existe, se traduisant par des variations dans la production de biogaz.
La méthanisation met en jeu diverses flores microbiennes spécialisées qui se développent dans des
conditions particulières (température, potentiel
d’oxydo-réduction, concentration des acides gras
volatils, charge organique, pH, taux d’ammoniac,
rapport C/N...).
Le constructeur et l’exploitant doivent donc veiller
à respecter, pour un bon fonctionnement du méthaniseur, un ensemble de conditions physiques et chimiques.
Divers dispositifs d’agitation permettent en effet de
maintenir l’homogénéité du digestat et son brassage
nécessaire pour optimiser le processus biologique.
En outre, divers dispositifs permettent de capter et
d’extraire le biogaz produit. La figure 5 présente
deux types de méthaniseurs industriels.
2.5. Module de maturation ou compostage
La matière extraite du méthaniseur (digesteur),
nommée digestat, est déshydratée mécaniquement
(par presse à vis ou autre). Cette opération produit
une phase liquide (ce sont les excédents hydriques)
et une phase solide plus ou moins pâteuse (siccité
de 35 % à 50 %). Les caractéristiques de ces fractions liquides et solides dépendent du taux de
matière sèche à l’intérieur du méthaniseur, donc du
procédé utilisé, du matériel de déshydratation et de
l’utilisation possible de polymères qui en améliorent
l’efficacité.
La fraction solide peut être transférée (par
convoyeur ou à préciser) vers une étape de maturation aérobie, tandis que la phase liquide peut être
centrifugée, produisant alors elle-même deux nouvelles phases liquide et solide recyclables au niveau
du pré-traitement.
La maturation des phases solides vise à stabiliser le
produit final, c’est-à-dire à garantir son innocuité
biologique ou sa relative constance de composition.
Il s’agit également d’une phase de recomposition de
la matière organique.
42
Le compostage est un procédé biologique qui dégrade les matières biodégradables au même titre que la
méthanisation mais en présence d’oxygène, et la
matière dégradée engendre la production de gaz
carbonique CO2, et de non de méthane CH4.
Cette étape de maturation achève la biodégradation
de certains composés organiques qui ne sont pas
décomposés en conditions anaérobies et permet
également d’oxyder l’ammoniac, source de mauvaises odeurs.
L’échauffement de la phase solide doit être contrôlé
par des sondes ainsi que la montée en température
(de l’ordre de 60°C) qui assure une hygiénisation du
digestat, désormais composté (l’hygiénisation a
cependant pu être réalisée en méthanisation). Par
ailleurs, le compostage permet de sécher le produit
et donc de faciliter son criblage pour en extraire les
inertes restants, notamment en vue d’une valorisation agronomique (c’est l’affinage).
Les facteurs qui influencent le compostage sont
l’humidité, la température, la nature du produit et
l’aération. Les résidus solides en sortie de méthanisation ont une humidité relativement importante et
une porosité faible, ce qui rend leur oxygénation
plus difficile. C’est pourquoi on a parfois recours à
des déchets verts broyés pour augmenter cette porosité et faciliter l’aération du produit. L’oxygénation
des andains est parfois réalisée par ventilation forcée couplée à l’adjonction de produits structurants.
Cette phase de maturation est équivalente à celle
mise en œuvre sur les unités de compostage, la
phase de méthanisation proprement dite étant similaire à la phase de compostage intensif. Ce sont
donc les mêmes technologies de traitement, depuis
les traitements très rustiques (andains retournés au
chargeur) jusqu’au technologies les plus sophistiquées (tunnels entièrement automatisés), en passant par les silos ou casiers. Cependant, les unités
de méthanisation ayant un caractère fortement
“industriel”, les constructeurs mettent le plus souvent en œuvre des techniques de compostage accéléré avec ventilation forcée.
Le compostage peut ainsi être réalisé en silos alimentés de façon homogène en produit à composter
et équipés au sol d’une gaine de ventilation afin de
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Process mis en œuvre
distribuer l’air sur toute la surface de la base de l’andain.
Deux modes d’aération sont possibles car la ventilation permet soit une aspiration de l’air de l’extérieur
vers le cœur du produit (aspiration forcée négative),
soit une insufflation du cœur vers l’extérieur (aspiration forcée positive).
Afin d’éviter la formation de canaux préférentiels du
passage de l’air dans l’andain, des systèmes à retournement automatisé sont disponibles sur le marché.
Le retournement améliore l’homogénéité du produit
et son oxygénation, réduisant ainsi le risque de formation de “poches anaérobies” non oxygénées dans
le compost.
En raison du dégagement important d’ammoniaque
en cours de maturation, il est parfois conseillé, en
fonction de la sensibilité des riverains aux nuisances olfactives et de l’éloignement des habitations, d’opérer en bâtiment fermé en dépression
continuelle, avec système d’aspiration et de désodorisation de l’air vicié comme pour la phase de maturation.
Enfin, au terme de 3 à 6 semaines environ de compostage industriel, le compost est stable, sec (environ 60 % de MS), homogène, désodorisé et prêt
pour l’affinage. Dans les contextes où la surface de
terrain disponible peut être un facteur limitant, il
est conseillé d’étudier avec soin la mise en œuvre de
la phase de compostage, contraignante en matière
de superficie au sol.
La figure 6 présente un exemple de module de maturation.
2.6. Module d’affinage et de stockage
Le compost maturé est affiné afin de garantir l’homogénéité du produit (granulométrie constante) et
l’extraction des derniers inertes contenus dans le
compost. Cette opération peut s’effectuer en criblant le compost dans un trommel4 (maille fine de
l’ordre de 10 à 20 mm), éventuellement suivi par
une table densimétrique par tri balistique.
Le criblage ainsi réalisé concentre les refus plastiques (dur et souple) d’une part, et les matières
ligneuses d’autre part, éventuellement utilisées
comme agents structurants pour le compostage.
Figure 6. Exemple de module de maturation par aération forcée
Il est ainsi intéressant de noter que les refus ligneux
extraits peuvent être recyclés en tête de maturation
et faire l’économie du coût d’élimination.
Le produit fini, criblé au diamètre nécessaire, peut
être stocké en bâtiments couverts ou en plein air
avant sa commercialisation. La gestion du compost
impose en effet souvent des périodes de stockage
relativement longues (6 à 8 mois) et cela pour plusieurs raisons. Les périodes d’utilisation doivent
tout d’abord correspondre aux périodes des besoins
agronomiques des cultures en éléments fertilisants.
Ensuite, en grandes cultures, l’accessibilité des parcelles est réduite car la récolte des productions
végétales en place doit être achevée pour épandre le
compost. Enfin, les conditions d’accessibilité des
terres agricoles par temps humide imposent des restrictions pour le passage d’engins agricoles.
Le volume de stockage à prévoir peut imposer des
surfaces importantes sur le site même de traitement,
ce qui, dans certains cas, peut inciter au développement de site(s) de stockage décentralisé(s).
La figure 7 présente des installations industrielles de
mise en œuvre de criblage et de stockage de compost.
2.7. Module de traitement des eaux excédentaires
Les effluents produits lors du process proviennent
de la déshydratation du digestat en sortie de méthanisation.
En sortie d’un méthaniseur à procédé sec5, la matière
est déshydratée mécaniquement (par presse à vis ou
4 Ou par un crible de type flip-flow avec grilles en plastique
(acceptant des produits relativement humides).
5 Pour les méthaniseurs à procédé humide, la déshydratation
est en général effectuée par centrifugation.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
43
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
Figure 7. Installations industrielles de criblage et de stockage de compost
à préciser) afin d’isoler, d’une part, un sous-produit
solide dont la siccité est comprise entre 35 et 70 %
(et qui est dirigé vers la maturation) et d’autre part,
un sous-produit liquide de siccité comprise entre 8
et 17 % selon l’équipement de déshydratation (ce
sont les jus).
La majeure partie de ces effluents est recyclée en
tête du module de méthanisation (même pour les
procédés secs). Une seconde partie est utilisée pour
humidifier le digestat en cours de maturation.
Dans certains procédés, les jus recueillis lors de la
déshydratation du digestat, relativement concentrés
(charge organique en DCO de 60 à 120 g/l, de 5 à
10 g/l en DBO, et de 3 à 5 g/l en N total) et difficilement dégradables par voie biologique, peuvent
faire l’objet d’une clarification par cyclonage ou centrifugation afin de séparer au maximum la phase
solide de la phase liquide.
Cet excédent d’eau de process doit être géré conformément à l’arrêté du 2 février 19986 relatif aux prélèvements et à la consommation d’eau ainsi qu’aux
émissions de toute nature des installations classées
pour la protection de l’environnement soumises à
autorisation.
L’hypothèse la plus favorable, à défaut d’une utilisation sur site pour humidifier les déchets, est celle
d’un pré-traitement7 de l’effluent avant rejet dans le
réseau d’assainissement public.
Ce raccordement est possible dans le cadre d’une
convention de rejet signée entre les gestionnaires de
la station d’épuration et de l’usine de méthanisation,
les valeurs indiquées dans la convention pouvant
44
alors, sous réserve de l’approbation de la DRIRE, se
substituer à celles de l’arrêté du 2 février 1998.
Mais si le syndicat d’assainissement, en raison du degré
de saturation8 de la station d’épuration en aval, n’autorise pas l’usine de méthanisation à se raccorder au
réseau, il faut alors envisager un traitement sur place.
Les valeurs limites réglementaires dans ce dernier
cas sont plus exigeantes que celles nécessaires au
pré-traitement et nécessitent donc un investissement plus important.
Sous réserve d’une implantation de l’usine en zone
sensible9, l’arrêté du 2 février 1998 fixe les valeurs
seuils10 comme suit (tableau V).
De toute évidence, le coût de traitement des eaux
usées doit être pris en considération au moment de
6 http://aida.ineris.fr/textes/arretes/text3105.htm
7 Ce pré-traitement consiste en une épuration partielle sur site
avant rejet au réseau et dépollution plus poussée sur la station
d’épuration de la collectivité.
8 Ce taux est obtenu en calculant le rapport moyen de la capacité nominale sur le flux moyen exprimé en kg/j de DBO ou DCO.
9 Des dispositions particulières peuvent en effet s’appliquer pour
les rejets dans une zone sensible telle que définie en application
de l’article 6 du décret n° 94-469 du 3 juin 1994 relatif à la collecte
et au traitement des eaux usées mentionnées aux articles
L 2224-8 et L 2224-10 du code général des collectivités territoriales.
10 Toutefois, des valeurs limites différentes de concentration peuvent être fixées par l’arrêté d’autorisation lorsqu’il existe une valeur
limite exprimée en flux spécifique de pollution, lorsque la station
d’épuration de l’installation a un rendement au moins égal à 95 %
pour la DCO, la DBO5 et les MEST, et enfin, lorsque la station d’épuration de l’installation a un rendement au moins égal à 85 % pour
la DCO, sans toutefois que la concentration dépasse 300 mg/l, et à
90 % pour la DBO5 et les MEST, sans toutefois que la concentration
dépasse 100 mg/l. Pour l’azote et le phosphore, des valeurs limites
différentes de concentration peuvent être fixées lorsque le rendement de la station d’épuration de l’installation atteint au moins 80 %
pour l’azote pour les installations nouvelles (70 % pour les installations modifiées) et 90 % pour le phosphore.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Process mis en œuvre
Tableau V. Valeurs réglementaires de rejet des eaux usées
l’analyse des bilans matières et hydriques prévisionnels.
Cette remarque est d’autant plus vraie que le gisement sera constitué de déchets humides (biodéchets, DIB fermentescibles, déchets de la restauration collective), avec comme conséquence, un faible
recyclage interne des eaux de process.
Pour cette raison, certains constructeurs proposent
de bénéficier des synergies de traitement entre la
méthanisation et le compostage (cf. méthanisation
excédentaire en eau, compostage déficitaire d’eau)
pour traiter sur le même site des flux de déchets différents par ces deux modes de traitement.
Par exemple, l’aménagement d’une plateforme de
compostage des déchets verts à côté de l’usine de
méthanisation permet de “consommer” les jus de
process excédentaires et également, d’absorber les
pics saisonniers de déchets verts dont la fraction
ligneuse est difficilement méthanisable.
Enfin, dans une perspective de maîtrise des coûts
d’exploitation (réduction de la consommation en
eau de réseau ou de captage et gestion des excédents hydriques) et pour pallier la variation des
besoins et des ressources hydriques, certaines plateformes de méthanisation disposent de réserves de
stockage d’eau.
La figure 8 présente un exemple de stockage des
eaux sur le site.
2.8. Module de gestion du biogaz
Pour mettre en œuvre une valorisation du biogaz
produit dans le méthaniseur, celui-ci doit être épuré
avant toute utilisation. L’épuration est plus ou
Figure 8. Exemple de stockage des eaux de percolation (photo EREP)
moins poussée selon le mode de valorisation retenue. Ainsi la qualité est plus exigeante en cas d’injection dans le réseau public que pour la fabrication
de biogaz carburant. Et, en cas de valorisation électrique ou de valorisation thermique, la qualité du
biogaz est moins contraignante.
Les fines particules de poussières que contient le
biogaz sont extraites par un ensemble de filtres
composé de graviers, de sable et de matériau céramique. Cette épuration assure également le refroidissement du gaz et la production d’eau de condensation qu’il faut gérer.
Une fois épuré, le biogaz est stocké dans un gazomètre
ou bâche de stockage (volume de 300 à 600 m3), constitué d’une membrane souple sans pression, ce qui permet de disposer d’une capacité tampon permettant
une valorisation en aval indépendante de la production proprement dite. La sécurité du système est assurée par une évacuation du “trop plein” à l’atmosphère
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
45
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
Figure 9. Filières de gestion du biogaz (schéma GIRUS)
par une torchère. Ainsi en cas de surpression, par
exemple suite à une panne de moteurs, le biogaz est
séparé du processus et éliminé par combustion.
Le biogaz épuré peut être brûlé pour produire de la
chaleur, de l’électricité ou du carburant (cf. paragraphe 1 du chapitre : « Valorisation des produits
issus de la méthanisation »).
La figure 9 illustre les filières de gestion du biogaz.
2.9. Module de captage et de désodorisation
de l’air vicié
L’air des bâtiments de réception, de tri, de méthanisation est capté par un système d’aspiration d’air.
L’air aspiré, chargé d’odeurs, est généralement dirigé dans un premier temps vers l’unité de maturation
pour assurer la ventilation du process de compostage. Puis, dans un second temps, l’air extrait du
module de maturation, sous dépression, est dirigé
vers l’unité de désodorisation.
Cette étape de désodorisation peut s’effectuer par
deux méthodes.
Par voie chimique, la désodorisation est en général
réalisée en deux étapes successives. Une tour de
lavage à l’acide neutralise l’air avec précipitation de
l’ammoniac sous la forme d’un sel. Puis, un second
étage assure l’élimination des composés aminés et
soufrés nauséabonds (H2S, mercaptans).
46
Par voie biologique, la filtration est mise en œuvre
sur un support appelé “biofiltre” constitué par un
matériau filtrant de type tourbe ou billes d’argile, au
sein duquel des micro-organismes spécifiques
dégradent les molécules odorantes.
Ce dispositif est souvent équipé d’un système d’humidification et de contrôle de température afin de
garantir les conditions optimales nécessaires au bon
développement des micro-organismes fixés sur le
support filtrant.
À l’issue d’un traitement des gaz viciés par l’un de
ces deux modes de désodorisation, l’air ainsi traité
peut alors être rejeté à l’atmosphère sans risque de
mauvaise odeur.
La figure 10 illustre par deux exemples divers équipements du module de captage et de désodorisation
de l’air vicié.
3. Bilans techniques d’unités
de méthanisation en fonctionnement
Sur la base d’une investigation menée à l’échelle
européenne11, divers ratios ont été calculés qui permettent de donner des ordres de grandeurs de
11 “Réalisation d’un référentiel technique et économique d’unités de traitement de déchets organiques par méthanisation avec
ou sans valorisation du biogaz”, 2004 – Étude réalisée pour
l’Ademe par le bureau d’études EREP avec le Cabinet Merlin.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Process mis en œuvre
Figure 10. Filières de traitement des odeurs
dimensionnement et de fonctionnement de la
méthanisation.
Procédés liquides : de 37 à 66 m3/t traitée (moyenne : 49 m3/t).
• Dimensionnement du réacteur de méthanisation
• Rendement en énergie électrique du traitement
Procédés secs : de 0,06 à 0,22 m /t traitée (moyenne
à 0,10 m3/t).
Sur les 13 installations étudiées, 7 produisent de
l’électricité et de la chaleur, 4 produisent de l’électricité et font de l’injection dans le réseau gaz naturel
ou du biogaz carburant, 2 envoient le biogaz pour
une valorisation hors site.
3
Procédés liquides : de 0,09 à 0,17 m3/t traitée
(moyenne à 0,12 m3/t).
• Temps de séjour en phase de méthanisation
Procédés secs : de 20 à 47 jours (moyenne : 30
jours).
Procédés liquides : ne peut être calculé, fonction de
la dilution.
• Charge organique en phase de méthanisation
Procédés secs : de 5,2 à 13,0 kg MSV/m3.j (moyenne : 10,5 kg MSV/m3.j).
Pour les installations qui valorisent le biogaz en
électricité (hors injection dans le réseau et carburant), le rendement en électricité du traitement est :
- procédés secs : moyenne à 126 kWh/t,
- procédés liquides : moyenne à 114 kWh/t.
• Auto-consommation électrique du traitement
Procédés liquides : une seule valeur disponible.
Procédés secs : moyenne à 46 kWh/t.
• Production de biogaz
Procédés liquides : moyenne à 67 kWh/t (84 kWh/t
pour bi-étape et 50 kWh/t pour mono-étape).
Procédés secs : de 0,8 à 4,8 m /m de digesteur. jour
(moyenne : 3,1 m3/m3.j).
3
3
Procédés liquides : de 1,7 à 2,0 m /m de digesteur.
jour (moyenne : 1,9 m3/m3.j).
3
3
• Rendement en biogaz
Procédés secs : de 74 à 114 m3/t traitée (moyenne :
92 m3/t).
Procédés liquides : de 60 à 110 m /t traitée (moyenne : 79 m3/t).
• Rendement en énergie électrique de la valorisation du biogaz
Tous procédés confondus : de 1,12 à 2,00 kWh/m3
(moyenne à 1,57 kWh/m3 de biogaz).
4. Bilan masse
3
• Rendements en méthane
Procédés secs : de 34 à 69 m3/t traitée (moyenne :
54 m3/t).
Au niveau de la conception comme en période de
fonctionnement, la réalisation d’un bilan masse présentant les flux de matières entre les différents
modules est indispensable.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
47
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
Figure 11. Exemple de bilan masse qualitatif
Si une approche globale qualitative constitue une
première étape en amont, la précision des flux est
essentielle dans un second temps.
La figure 11 présente ainsi un bilan masse qualitatif,
la suivante permettant d’illustrer une démarche
quantitative.
Comme cela a été exposé précédemment, il existe
de très nombreux schémas de fonctionnement des
unités de méthanisation des déchets ménagers.
C’est pourquoi, à titre illustratif, la figure 12 (groupe Tiru) présente un cas fictif de bilan masse d’une
unité en OMR et d’une autre en biodéchets.
Figure 12. Exemples de bilan masse quantitatif (en haut unité en biodéchets, en bas unité recevant des OMR)
48
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Valorisation des produits issus
de la méthanisation
1 Gestion du biogaz
1.1. État des lieux
Comme le précise une récente analyse1 à l’échelle de
l’Union européenne : «… depuis la fin des années
1990, l’exploitation énergétique du biogaz a pris une
place importante au sein des pays de l’Union européenne. La pertinence économique, énergétique
et financière de la filière se développe d’ores et déjà
dans 20 pays européens pour une production totale
(UE 25) de l’ordre de 4,265 millions de tep (tonne
équivalent pétrole) en 2004 ».
En France, la part de l’énergie produite par le biogaz,
en comparaison avec celle produite par incinération,
est certes réduite, mais en progression comme
l’illustre le tableau I.
2002
2003
2004
Total énergie primaire d'origine thermique
- dont déchets urbains solides
- dont bois et déchets de bois
- dont biogaz
11 722
2 043
8 495
329
12 346
2 088
9 002
343
12 651
2 133
9 180
353
Total énergie primaire d'origine électrique*
5 739
5 614
5 676
Total énergie primaire
17 461
17 959
18 327
* 1 GWh = 0,086 ktep, excepté pour la géothermie (0,86 ktep).
Tableau I. Production d’énergie primaire d’origine renouvelable en ktep
(source : Observatoire de l’énergie2, 2005)
L’importance d’une bonne gestion de l’énergie potentielle du biogaz est essentielle à la réussite du projet.
Ainsi, le tableau II [Kampogas, 1999]3 présente un
bilan énergétique sur une installation de méthanisation d’environ 100 000 habitants traitant des biodéchets.
1.2. Devenir du biogaz
Il est très vivement conseillé de ne pas négliger la
question du biogaz, qui ne peut être émis directement
à l’atmosphère, mais qui, correctement géré, présente
beaucoup d’intérêt.
À défaut de valorisation calorique, énergétique ou
électrique du biogaz, toujours recommandée quand
elle est économiquement rentable, une torchère doit
permettre d’assurer son évacuation de l’installation.
Le biogaz est alors détruit dans une torchère de caractéristiques similaires à celle utilisée pour les
centres d’enfouissement technique4.
Des lâchers de biogaz peuvent être autorisés sous
conditions dans des scénarios de pannes d’installations de valorisation ou de défaillance de la torchère.
La zone explosive créée ne doit cependant pas être
source de danger.
Production
Unité
Rendement
Unité
Production de biogaz
5 700
m3/j
139
m3 /t
Énergie disponible
33 000
kWh/j
805
kWh/t
414
kW élec
Puissance centrale électrique
Production électricité
10 300
kWh/j
- dont consommation procédé
2 800
kWh/j
8%
- dont surplus valorisable
7 500
kWh/j
23 %
Production de chaleur
18 300
kWh/j
- dont consommation procédé
6 300
kWh/j
18 %
- dont surplus valorisable
12 000
kWh/j
36 %
Pertes
4 700
kWh/j
14 %
Tableau II. Bilan énergétique d’une plateforme de méthanisation de 15 kt/an (source :
Kompogas, 1999)
1 Synthèse 2004 de l’International Energy Agency, Task 37 –
Groupe de travail sur les bioénergies.
2 http://www.industrie.gouv.fr/energie/renou/textes/se_bilan2.htm
3 Cité dans le rapport « Quelle place pour la méthanisation des déchets
organiques en Ile-de-France ? » Solagro-Arene IdF, juillet 2003.
4 Sur les torchères, voir l’opuscule réalisé par l’IEA (Agence
Internationale de l’énergie, en anglais) http://www.novaenergie.ch/
iea-bioenergy-task37/publications.htm
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
49
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
1.3. Modes de valorisation du biogaz
Le biogaz peut être valorisé sous quatre formes principales :
- production de chaleur en chaudière,
- production d’électricité par combustion dans un
moteur ou une turbine, avec ou sans cogénération5,
- production de carburant,
- injection dans le réseau de gaz naturel (modalités
réglementaires en cours de définition).
La valorisation en chaudière, réalisée sur place ou à
proximité dans un rayon de 2 à 3 km, est la plus fréquente. Différents types de brûleurs sont envisageables6 :
- brûleur gaz naturel si le biogaz est injecté dans le
réseau de gaz naturel à l’entrée de la chaufferie et si
le biogaz constitue une faible part, en permanence,
des besoins thermiques du site,
- brûleur polycombustibles,
- brûleur à flamme pilote, la permanence de la combustion étant garantie par une “veilleuse” utilisant un
combustible fossile,
doit être mûrement étudiée pour garantir la maîtrise
des coûts de maintenance.
De facto, les moteurs dual-fuel sont interdits compte
tenu de la limite d’énergie fossile utilisable de 20 %
de l’énergie électrique produite.
La valorisation sous forme de carburant7 est également une possibilité comme l’illustrent à l’étranger
de nombreuses plateformes scandinaves8 et Suisse.
En France, une expérience en cours de mise en
œuvre est menée par la Communauté urbaine de
Lille. Pour assurer la production de GNV, le biogaz
est en premier lieu épuré, puis comprimé aux alentours de 300 bars.
Au début de l’année 2006, le statut fiscal du biogaz
carburant n’est pas encore résolu, mais ce point ne
constitue pas un obstacle pour les utilisations pour
lesquelles les carburants sont détaxés, comme pour
les autobus urbains de Lille. La figure 1 illustre une
utilisation (en Suisse) du biogaz de méthanisation de
déchets sous forme de carburant.
- brûleur “biogaz”.
La valorisation électrogène est assez courante en
dépit des conditions actuelles de rachat de l’électricité peu favorables et qui rendent ce type d’opération
rarement rentable en France. En 2005, le prix de rachat de l’électricité était de 0,046 €/kWh et la rentabilité de la cogénération est souvent meilleure puisqu’elle permet de bénéficier d’une prime qui peut atteindre 0,012 €/kWh sans compter la valeur du kWh
thermique cédé. La valorisation thermique en cogénération peut s’effectuer hors du site dans un rayon
de 2 à 3 kilomètres.
La continuité de l’activité de production d’électricité
doit être garantie en cas de cessation d’activité du site
consommateur d’énergie thermique. L’opérateur a le
choix entre une usure assez rapide du moteur ou un
traitement du biogaz.
Le traitement minimal est une dévésiculation (enlèvement des gouttes d’eau) à effectuer au plus près des
moteurs.
Les canalisations de biogaz soumises aux valorisations climatiques doivent être isolées lorsque le biogaz n’a pas été déshydraté. Enfin la réduction des siloxanes, H2S et autres composants à l’état de traces
50
Figure 1. Exemple de valorisation du biogaz carburant
(photo EREP)
5 La cogénération est un système de production simultanée
d’électricité et de chaleur dont l’intérêt est de récupérer la chaleur dégagée par la combustion, ce qui n’est pas le cas de la production électrique classique où la chaleur est perdue. Sont ainsi
produits simultanément du travail (sous forme d’énergie électrique) et de la chaleur (voire éventuellement dans certains cas
du froid) sous forme de vapeur d’eau à pression élevée ou sous
forme d’eau chaude. La cogénération permet un excellent rendement énergétique.
6 Voir le dossier “Le biogaz et sa valorisation, guide méthodologique”, Ademe et Gaz de France, 2000.
7 Les véhicules qui fonctionnent au biogaz sont identiques à ceux
fonctionnant au gaz naturel pour véhicules (GNV).
8 La Suède est un pays pionnier en la matière, avec plus de 800
bus, 4 500 voitures et 1 train (une voiture de 54 passagers) qui
relie la ville de Linköping, l’une des “capitales” suédoises du biogaz, à la ville de Vätesrvik située à 80 km. L’autonomie du train
est de 600 km, la vitesse maximale de 130 km/h.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Valorisation des produits issus de la méthanisation
Dans le cadre de la transposition de la directive gaz,
la valorisation par injection dans le réseau de gaz
naturel est une opération autorisée par l’article 1 de
la loi du 3 janvier 2003. Cependant, des normes de
qualité minimales du gaz transporté en canalisations
publiques doivent encore être publiées et le statut du
vendeur du biogaz épuré doit également faire l’objet
de précisions, ce qui rend cette voie encore incertaine.
La production nette d’énergie, après autoconsommation, est inférieure à celle d’un incinérateur. Le solde
est d’environ 100 kWh électrique/t d’OM en intégrant
l’énergie utilisée pour le tri mécanique, contre 350 à
500 kWh électrique/t pour l’incinération (tout électrique) et 550 à 650 kWh/t en cogénération (moins
pour des biodéchets).
À signaler que la Communauté européenne a soutenu
l’initiative d’une équipe espagnole (Catalogne), suédoise et allemande engagée dans le projet BIOCOMM
(Regulation Draft of BIOgas COMMercialisation in
Biogas Grid), composant du programme
Altener, qui vise à étudier les conditions de valorisation du biogaz en réseau public.
2. Valorisation du compost obtenu
à partir du digestat
Le compost obtenu après la maturation des digestats
présente des propriétés agronomiques certaines
(amendement organique et teneur en éléments fertilisants : azote, phosphore et potasse). La valorisation
agricole doit être mise en œuvre si un certain nombre
de critères d’innocuité sont respectés en éléments
traces métalliques, micropolluants organiques, éléments pathogènes (virus, bactéries et parasites) et
inertes (verre, plastiques…). L’opération d’affinage
permet en général d’atteindre ces critères d’innocuité.
Dans sa formulation en projet, la norme NFU44051
(Amendements organiques - Dénominations, spécifications et marquage) impose une phase de “compostage caractérisé” du digestat pour être commercialisé.
À défaut, le digestat est soumis à plan d’épandage.
3. Valorisation des effluents liquides
Comme cela a été vu (cf. chapitre “Process mis en
œuvre”, paragraphe 2.7), les effluents liquides géné-
rés par un procédé de méthanisation proviennent de
la déshydratation du digestat effectuée en sortie de
méthaniseur9.
Si une partie ou la totalité des effluents liquides peut
être recyclée au niveau d’une étape de compostage, la
question du solde hydrique, dont le volume dépend
des caractéristiques des déchets traités et du process,
constitue une charge excédentaire difficile et coûteuse à dépolluer.
Les effluents sont en général recyclés en agriculture
dans le cadre d’un plan d’épandage. Cependant, la valorisation de l’effluent sous forme d’engrais liquide
est une hypothèse possible et il faut alors obtenir une
“homologation” en qualité de matières fertilisantes.
Les excédents hydriques sont en effet riches en fertilisants (N, P, K, Ca, Mg). Comme l’illustre l’exemple
suisse, le produit liquide de méthanisation de biodéchets est inscrit sur la liste des intrants autorisés et
recommandés en agriculture biologique.
L’association sur le même site, de la filière méthanisation excédentaire en eau, et de la filière compostage
de déchets verts déficitaire en eau présente un intérêt certain.
L’effluent permet en effet d’humidifier les déchets
verts en phase de compostage. Le choix judicieux des
types et flux de déchets affectés aux deux filières permet de recycler la totalité des effluents de méthanisation, voire des autres effluents du site (par exemple
les purges de l’unité de désodorisation). Il permet en
outre de produire deux amendements organiques
(compost déchets verts par exemple et compost digestat).
Ce concept a ainsi été mis en place sur le “Centre de
valorisation organique” de la Martinique.
Ce même principe est également exploité quand la
méthanisation est associée à une stabilisation de déchets triés mécaniquement ou à un co-compostage de
digestat déshydraté et de déchets structurants, fermentescibles et relativement sec (déchets verts broyés,
papiers broyés…). Dans ce dernier cas, une partie du
digestat peut être by-passé de la déshydratation.
9 Sous certaines conditions, tout (petites unités) ou une partie du
digestat est envoyé directement en compostage, le plus souvent
en mélange avec un produit structurant.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
51
Construction et exploitation
1. Complexité et délais des projets
Compte tenu de l’objet de ce guide, seuls les points
spécifiques aux projets de construction d’unités de
méthanisation des déchets ménagers sont abordés.
En termes de compétence, compte tenu du faible
nombre d’unités réalisées en France, seuls quelques
bureaux d’études apparaissent compétents pour assurer la maîtrise des enjeux de construction d’installation de méthanisation industrielle de déchets ménagers. En outre, le nombre de constructeurs est relativement restreint. La procédure de mise en concurrence pour la construction comme pour l’exploitation
doit intégrer ces caractéristiques du marché.
Il est également nécessaire de considérer que la
construction de l’installation impose la constitution
d’un groupement associant, au minimum, une entreprise de process, un génie civiliste et un architecte.
En outre, les entreprises de process spécialisées sont
des ingénieristes qui doivent faire appel à de nombreux sous-traitants (jusqu’à 40 !). Dans ce cas, il importe de préciser les limites de fourniture des entreprises.
Quelle que soit l’organisation du projet, le planning
prévisionnel est un élément impératif, la figure 1 illustrant les délais moyens à considérer pour réaliser un
projet, au minimum de 3 ans à compter de la consultation des constructeurs (la phase d’étude n’est pas
prise en compte).
Enfin, à titre d’exemple, le programme présenté en
figure 2 illustre la complexité d’un projet mené depuis le choix de l’assistant à maître d’ouvrage jusqu’à
la mise en service1.
2. Paramètres à considérer
Figure 1. Exemple de programme prévisionnel simplifié
(source : Trivalor)
lecte chez l’habitant jusqu’à l’utilisation des produits
et le traitement des refus et des excédents.
Toute modification importante au niveau des rythmes
et des modes de collecte des déchets doit être soigneusement étudiée. En effet, les variations de qualité des intrants peuvent avoir des répercussions sur
les conditions d’exploitation de l’installation.
Les interfaces entre les différents modules (préparation du produit-digestion-compost-énergie) sont importants et peuvent être sources de dysfonctionnements graves. Il importe ainsi de réserver un temps
suffisant à l’analyse des offres et à la mise au point du
marché. Il est également recommandé de vérifier que
les différentes entreprises associées dans un projet ont
l’habitude de travailler ensemble, ou “pour le moins”,
une volonté clairement affichée.
Il peut être judicieux d’imposer un groupement
conjoint et solidaire.
Par ailleurs, les impasses ou économies sur certains
équipements sont souvent sources de dysfonctionnements ou de difficultés d’exploitation et exigent donc
une attention particulière lors de l’examen des offres.
2.1. Construction
Pour assurer une bonne construction de l’installation
de méthanisation, il est nécessaire que le cahier des
charges précise les objectifs du projet, depuis la col-
52
1 La mise en service industrielle (MSI) est une étape clef de la vie
de l’installation dont la durée de vie est en général de l’ordre de
20 ans. Considérant les figures 1 et 2, la MSI s’étend sur une
période comprise entre 6 mois et 1 an, à préciser dans les
termes des marchés.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Construction et exploitation
Figure 2. Exemple de programme détaillé prévisionnel
Au niveau de la conception de l’unité, les dispositions
doivent être prévues pour que l’arrêt d’un équipement
n’impose pas l’arrêt total de l’usine (stockages intermédiaires, by-pass, équipements doublés…).
En outre, la durée de mise en service industrielle ne
doit pas être trop courte et sera au moins égale à un
an. Pendant cette phase délicate de rodage, le contrat
doit prévoir la disponibilité de l’équipe de construction. Et enfin, il est judicieux de prévoir de faire appel
aux conseils et à l’expérience du constructeur pendant les premières années d’exploitation.
2.2. Exploitation
Pendant les premières années de fonctionnement de
l’installation, l’équipe de construction doit pouvoir
être sollicitée afin de donner un avis sur des propositions d’amélioration ou sur des modifications
du programme de maintenance. Cette équipe de
construction peut également s’engager à faire profiter le maître d’ouvrage de son expérience sur d’autres
sites. Enfin, il est primordial de respecter scrupuleusement ce programme de maintenance afin d’éviter
les arrêts d’exploitation soudains.
2.3. Réflexions sur le montage juridique
Il est fondamental pour le maître d’ouvrage de bien
définir le type de montage qu’il souhaite mettre en
place et le degré de maîtrise de la filière dont il souhaite disposer, avec les responsabilités et garanties associées. Les différentes étapes du projet peuvent ou
non être confiées à des entreprises spécialisées.
• Définition du programme
La définition du programme reste une prérogative indissociable du maître d’ouvrage qui comprend la définition des déchets entrants à traiter, le choix du site,
le choix du montage et du mode de consultation pour
la conception, la construction, l’exploitation, le choix
des valorisations souhaitées, le choix du mode de
financement, etc.
Ces orientations fondamentales conditionnent toute
la vie du projet et doivent être adaptées au contexte
du maître d’ouvrage. Pour l’aider dans tout ou partie
de ses choix, celui-ci peut faire appel à des cabinets
spécialisés, qui prennent alors le rôle “d’assistant à
maîtrise d’ouvrage” ou AMO. Cette prestation peut
faire l’objet d’une mission attribuée pour un accompagnement sur toute la durée du projet (phase admi-
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
53
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
nistrative, consultation, choix du constructeur ou du
maître d’œuvre, construction, mise en service et
exploitation).
• Conception technique de la filière
La conception technique de la filière est une partie
essentielle de la réussite du projet. Cette étape a pour
objet de préciser, au niveau “projet”, le choix du process de traitement et des installations périphériques,
le dimensionnement des infrastructures et des équipements électromécaniques, l’implantation des ouvrages, les dispositifs annexes au fonctionnement de
l’installation, etc.
Compte tenu de la complexité des installations et de
l’aspect novateur des techniques de méthanisation, la
collectivité confie en général la conception à un prestataire extérieur qui est ainsi soumis à des engagements en termes de garantie de résultat.
Le partenaire extérieur qui assiste les élus peut être
de différentes natures et sa mission plus ou moins importante.
Une première solution est de confier cette conception
technique à un cabinet spécialisé qui prend alors le
rôle de “maître d’œuvre”, travaillant en relation avec
le maître d’ouvrage et éventuellement son assistant
pour définir précisément le projet. Même si la loi du
12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique, (circulaire n°86-24 du 4 mars 1986 relative
aux conditions d’entrée en vigueur de la loi relative
à la maîtrise d’ouvrage publique) ne s’applique pas
aux installations de traitement de déchets, il y est
souvent fait référence pour définir les missions et les
responsabilités du maître d’œuvre.
À noter que le maître d’œuvre n’a que peu de surface
financière pour assurer des travaux de garantie importants en cas de dysfonctionnements graves de
l’installation. Le choix d’une technique de traitement
en amont de la consultation des constructeurs réduit
le champ de la concurrence, les techniques disponibles étant le plus souvent brevetées.
Il faut également rappeler que le découpage en lots
pour la construction implique une gestion attentive
des interfaces.
Une autre solution est de confier cette conception détaillée aux constructeurs et d’utiliser cette conception
en critère d’analyse des offres.
54
Le constructeur est sélectionné à l’issue d’une procédure spécifique du code des marchés publics dite de
“dialogue compétitif”, qui a remplacé “appel d’offres
sur performances”. La consultation porte sur les performances contractuelles sans définir les moyens et
les outils pour y parvenir. Le champ de la concurrence
est alors élargi, avec les risques que cela comporte,
mais d’importantes pénalités associées aux garanties
de résultats doivent permettre de financer les éventuels travaux d’ajustement et de mise à niveau.
• Mise en service et exploitation
La séparation des rôles et responsabilités entre
constructeur et exploitant doit être clairement définie pour éviter les litiges et plusieurs montages sont
envisageables.
Ainsi, la collectivité peut faire le choix d’une régie et
assurer en direct l’exploitation. Compte tenu de la
technicité du procédé de méthanisation, une assistance
technique du constructeur apparaît néanmoins indispensable, notamment en phase de mise en service.
La collectivité peut également confier l’exploitation
à un prestataire privé désigné par un marché public
de prestations de services distinct du marché de travaux. Dans ce cas, la collectivité conserve une “visibilité” et une “maîtrise” de l’installation et de son utilisation, elle assume notamment les risques liés à
l’approvisionnement en déchets et à la valorisation
des produits et coordonne ainsi la passation de relais
entre construction et exploitation. Dans certains cas,
la collectivité peut également inclure la gestion de
l’amont et de l’aval dans le marché.
En outre et comme l’autorise le nouveau code des marchés publics (art. 10 du CDM), l’exploitant peut également être désigné par un marché public de type
conception-construction-exploitation. Dans ce cas, la
coordination entre l’exploitant et le constructeur est
confiée au groupement d’entreprises. Ce montage permet d’intégrer la prise en compte du coût d’exploitation
dans le choix du constructeur, mais peut compliquer le
renouvellement du marché d’exploitation du fait des
relations étroites entre constructeur et exploitant.
L’exploitant peut également être désigné par une procédure de délégation de service public. Dans ce cas, la
collectivité maîtrise moins l’utilisation qui est faite de
l’installation (la construction de l’unité pouvant faire
partie de la consultation) mais peut transférer tout ou
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Construction et exploitation
partie des risques liés à l’approvisionnement en déchets entrants et à la valorisation des sous-produits.
En résumé, l’éventail des montages possibles est
important, c’est pourquoi la réussite du projet de
méthanisation des déchets ménagers impose une
réflexion préalable pour prendre en compte la technicité du procédé de méthanisation, les capacités
internes de la collectivité et la maîtrise qu’elle souhaite conserver pour son obligation de service public.
2.4. Synthèse
En synthèse, pour assurer une bonne planification
des procédures administratives, un ensemble de paramètres, présentés ci-dessous sous forme de checklist, doit être étudié pour prévenir des désordres en
cours de construction.
• Appels d’offres pour les études puis pour les travaux.
• Appels d’offres divers (assurances, communication…)
Il importe d’intégrer les délais nécessaires pour les délibérations des conseils municipaux ou syndicaux, pour
élaborer et voter les crédits, pour constituer la commission d’appel d’offres… En outre, il faut impérativement
tenir compte des élections des collectivités.
Site
Capacité
kt/an
Investissement
M€ (2003)
• Enquêtes publiques.
• Disponibilité des dossiers.
• Dépôts des dossiers.
• Information – communication.
• Délais de procédure interne et externe.
• Choix de la procédure administrative.
Il importe d’intégrer dans son projet les besoins en moyens
humains, en compétences et leurs évolutions. Les réalités
de la concurrence ne doivent pas non plus être oubliées…
• Maîtrise des choix de contractualisation avec les prestataires (étude, construction, exploitation, assistance…)
• Suivi du chantier (délais, qualité, coûts…)
• Suivi des contrats (délais, qualité, coûts…)
• Moyens de contrôle.
3. Économie de la filière
3.1. Retours d’expériences sur des opérations
réalisées
En France en 2006, il est relativement difficile de disposer de données globales, c’est-à-dire générales et précises, sur l’économie de la filière et cela, en raison d’un
parc très jeune avec de nombreux projets en cours.
Procédé
Remarque
Baden Baden
5
3
BTA
Chaîne amont
Bassum
15
4
DRANCO
Coût complet
Braunschweig
20
8
KOMPOGAS
Coût complet
Salzburg
20
11
DRANCO
Kaiserslautern
23
10
DRANCO
Alzey Worms
24
11
KOMPOGAS
Heppenheim
33
15
BRV
Engelskirshen
35
6
VALORGA
Compris centrale énergie
Hors prétraitement
Coût complet
Tableau I. Coûts d’investissement de plateformes de méthanisation
Figure 3. Économie d’échelle et décomposition des coûts d’exploitation des plateformes de méthanisation (à gauche, investissement ;
à droite, exploitation)
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
55
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
C’est pourquoi, c’est à partir de deux études bibliographiques que sont extraites les données suivantes
qui permettent de présenter des coûts.
Ainsi, le tableau I et la figure 3 [Solagro, 2003]2 présentent les coûts d’investissement de diverses unités
en service en Allemagne.
Par ailleurs, une seconde étude récente fournit
d’autres données (tableau II) également issues d’installations en fonctionnement (en Suisse et en Allemagne).
3.2. Bilan des opérations réalisées ou en projet
en France
Pour les besoins de ce vade-mecum, une enquête a
été menée fin 2005 sur la base d’une liste de projets
en études ou en opération, et les données collectées
permettent une approche grossière des coûts de la
méthanisation comme le présente la figure 4.
Le détail des données ainsi collectées auprès des acteurs de ces projets, complété par une récente synthèse menée en début 20063, fait l’objet du tableau en
annexe 1 qui permet de “se faire une idée” de ce qui
se pratique dans l’hexagone.
Enfin et pour mémoire, le projet de Metz (30 000 t/an
de FFOM + 60 000 t/an d’OMR, maîtrise d’œuvre
GIRUS/Awiplan/Biomasse Normandie) est reporté.
2 Cité dans le rapport “Quelle place pour la méthanisation des
déchets organiques en Ile-de-France ?” Solagro-Arene IdF,
Juillet 2003.
3 Cf. l’article d’Olivier GUICHARDAZ “Méthanisation ou comment
tirer le meilleur parti de la FFOM”, Environnement & Technique
n° 254, mars 2006.
Procédés secs
Procédés
liquides
Fourchette
Moyenne
Investissement global
par tonne traitée
555
469
434 à 677
512
Investissement global
par m3 de méthaniseur
6 625
5 100
4 175 à 6 808
5 867
Investissement global
par kW électrique
18 458
18 230
17 365 à 19 109
18 340
Coût global de
traitement calculé (par t)
184
(1 donnée)
132
(2 données)
96 à 184
149
Coût global de
traitement annoncé (par t)
92
88
55 à 120
90
Tableau II. Décomposition de coûts de plateformes de méthanisation (en € HT)
Figure 4. Coûts des unités et projets de méthanisation des déchets ménagers en France
56
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Construction et exploitation
3.3. Pistes pour améliorer la connaissance des
coûts
Dans une démarche de progrès pour optimiser de
façon globale la gestion des déchets ménagers, le tableau III propose de comparer des coûts théoriques
moyens décomposés par capacité d’installation et par
type de déchet à traiter.
NB : ces coûts peuvent apparaître élevés au regard des
projets réalisés (80 à 100 €/HT/tonne de déchet entrant pour les OMR).
Enfin, il est proposé, pour comparer finement les
structures des coûts d’investissement et d’exploitation des différentes options et en distinguant les
OMR des biodéchets, le tableau en annexe 2 susceptible d’être renseigné dans le cadre des propositions
commerciales des entreprises qui soumettent une
offre pour la construction d’un projet de méthanisation de déchets ménages lancé par une collectivité.
3.4. Éléments de coûts pour la phase de compostage
S’il est délicat de fournir des coûts pour la méthanisation
stricto sensu compte tenu du faible nombre de réalisation
en France, des ordres de grandeur sont également disponibles pour l’étape de maturation et d’affinage.
Ainsi, le tableau IV (réalisation Jean-Luc DEFOSSEZ)
propose, par type de compostage, des fourchettes de
coûts d’investissement et d’exploitation.
Pour illustrer ces données et à titre d’exemple, une
unité de méthanisation de capacité totale 90 kt de déchets ménagers (OM résiduelles) dont le méthaniseur
serait dimensionné pour 75 kt de déchets organiques
à fermenter, devrait disposer d’un module de maturation (stabilisation) de capacité 45 kt si l’affinage se
pratique après stabilisation.
Ainsi, au niveau financier, la maturation en tunnel
aurait un budget d’investissement d’environ
6 M€ HT et un coût annuel de fonctionnement (hors
remboursement d’emprunt) de 0,9 M€ HT.
Tableau III. Comparaison financière théorique de divers projets de méthanisation
Type de maturation
Andains
Aération forcée en
milieu ouvert
Capacité optimale
< 10 kt/an
10 à 20 kt/an
Co-compostage
(ajout de structurants
ou déchets verts)
I = 50 à 75 €/t
E = 15 à 20 €/t
I = 60 à 100 €/t
E = 15 à 20 €/t
I = 40 à 65 €/t
E = 10 à 15 €/t
I = 50 à 10 €/t
E = 15 à 25 €/t
Aspiration forcée en
milieu fermé
> 20 kt/an
Digestat de biodéchets + déchets verts broyés
Aération forcée en
milieu confiné
> 60 kt/an
-
I = 90 à 135 €/t
E = 20 à 25 €/t
Digestat d'ordures ménagères résiduelles
Compostage (déchets
verts uniquement)
I = 85 à 130 €/t
E = 15 à 20 €/t
I = 125 à 220 €/t
E = 20 à 30 €/t
I = investissement initial relatif aux tonnes de capacité annuelle de traitement
E = coût d’exploitation hors amortissements relatif aux tonnes traitées dans l’unité
Tableau IV. Éléments financiers relatifs à l’étape de compostage
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
57
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
Annexe 1
Caractéristiques des unités et projets de méthanisation en France
Référence
Coût global en € HT
Capacité
Investissement
Amiens
(80 - 174 000 hab.)
Mise en service : 1988
SIVOM de
Varennes-Jarcy
(77 - 160 000 hab.)
Mise en service : 2001
OMR 70 kt/an
FFOM 30 kt/an
À terme :
OMR : 55 kt/an
FFOM : 45 kt
27 M€
Calais
(62 - 156 000 hab.)
Mise en service : 2006
FFOM 27 kt/an
17 M€
Lille
(59 - 500 000 hab.)
Mise en service :
mars 2007
FFOM : 108 kt/an
54 M€
Martinique
(972 - 350 000 hab.)
Mise en service :
en 2005
FFOM : 20 kt/an
(méthanisation)
Déchets verts :
20kt/an
(compostage)
22 M€ HT
Montpellier
(34 - 400 000 hab)
Mise en service :
mars 2007
58
50 €/t
OMR 85 kt/an
FFOM : 33 kt/an
OMR : 170 kt/an
68 M€
Caractéristiques
Exploit.
60 €/t
60 €/t
Réalisation : Valorga.
Compost : 44 600 t/an valorisé en agriculture.
Excédents liquides : bilan zéro (recyclé en process).
Assistance à maîtrise d’ouvrage :
Beture (mandataire) + GIRUS.
Audit technique pour l’Ademe : Polden-Trivalor.
Réalisation Babcock-Urbaser, procédé Valorga.
Compost : valorisé en agriculture.
Excédents liquides : mini-station d'épuration.
Biogaz : énergie et chaleur (cogénération).
Interlocuteurs techniques : Urbasys (M. Lotti), Sivom
(M. Peres).
Assistance à maîtrise d’ouvrage: Amodiac et Biologic.
Réalisation : Valorga.
Biogaz : 110 - 120 Nm3/t entrant en méthanisation,
valorisé en énergie et chaleur. Compost : valorisé en
agriculture
Assistance à maîtrise d'ouvrage : Cadet International
(pas de maîtrise d'oeuvre en AO sur performances).
Réalisation : Linde avec Ramery-Sogea et Luc
Delemazure, architecte.
Compost : valorisé en agriculture
Excédents liquides : pas de rejets liquides, sulfate
d'ammonium issu du traitement de l'air valorisé en
filière amendement agricole
Biogaz : 100 % méthane-carburant pour alimenter
une flotte de 100 bus au gaz stationnés à proximité
(7% pour chauffage méthaniseurs et bâtiments).
Interlocuteurs techniques : Pierre Hirtzberger, chef de
service
et François Flamant, chef de projet, Direction des
Résidus urbains.
Exploitant non connu à ce jour.
Assistance à maîtrise d'ouvrage : GIRUS/BERIM/VALBON.
Réalisation : Vinci Env. (Procédé Kompogas).
Compost : valorisé en agriculture.
Excédents liquides : évaporés sur compost déchets
verts.
Biogaz : énergie et chaleur.
Interlocuteur technique : M. Jeannet, SMITOM.
Assistance à maîtrise d'ouvrage : GIRUS (Mandataire) +
BCEOM + IFBTP
Réalisation : Vinci Env. avec Sogea Sud et AT&E
(Architecture Technologie et Environnement).
Compost: 32 100 t/an valorisé en agriculture.
Excédents liquides : bilan zéro a priori, mais site
branché sur un réseau d'assainissement public.
Biogaz : énergie et chaleur.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Construction et exploitation
Annexe 1 (suite)
Caractéristiques des unités et projets de méthanisation en France4
Conducteur d'opération : DDE de la Manche.
Réalisation : Vinci Environnement (procédé Kompogas).
Compost : valorisé en agriculture.
Excédents liquides : bilan zéro (recyclé en process).
Biogaz : cogénération, électricité et chaleur.
Interlocuteur technique : M. Grappe, Directeur SMPF.
Assistance à maîtrise d'ouvrage : Sage Service.
Assistance à maîtrise d'œuvre : à choisir par délégataire.
Contrat en DSP avec incinération attribué à NOVERGIE.
Compost : valorisé en agriculture.
Biogaz : énergie et chaleur.
Saint-Lô Syndicat Mixte
du Point Fort (SMPF)
(50 - 95 000 hab.)
Avancement : phase
admi.
OMR : 60 kt/an
Déchets verts :
12 kt/an
Valtom
(63 - 635 000 hab.).
Niveau projet.
FFOM et déchets
verts : 27 kt/an
Forbach (57 - 400 000
hab.). Niveau projet.
FFOM : 21 kt/an
OMR : 45 kt/an
-
-
Digestat en valorisation agricole
Organom
(01 - 270 000 hab.).
Niveau projet.
OMR : 80 kt/an
Déchets verts :
10 kt/an
DIB triés
-
-
Maîtrise d'œuvre relancée début 2006
Angers Loire Métropole
(270 00 hab.).
Niveau projet.
90 kt/an dont
FFOM : 45 kt
-
-
Digestat en valorisation agricole
SMET Châlon sur Saône
(71 - 230 000 hab).
Niveau projet
OMR : 70 kt
-
-
AMO en cours
27 M€ HT
Marseille Provence
Métropole
(1 M hab.) à Fos.
Niveau projet
FFOM : 110 kt/an
-
-
Procédé Valorga
Digestat en valorisation agricole
Délégataire : Urbaser-Valorga
(délégation de 23 ans)
Syctom région
parisienne à
Romainville (1,3 M
hab.). Niveau projet.
OMR : 325 kt/an
-
-
Digestat en couverture de CSD
(a minima)
Syctom région
parisienne
Le Blanc-Mesnil
(1,3 M hab.).
Niveau projet.
FFOM : 60 kt/an
(éventuellement
boues)
-
-
Digestat en couverture de CSD
(a minima)
SMEVOM CharolaisBrionnais Autunois
(71 - 130 000 hab.).
OM : 34 kt/an
-
-
Digestat en valorisation agricole
4 Abréviations utilisées dans le tableau : OMR (ordures ménagères résiduelles) ; FFOM (fraction fermentescible des ordures ménagères) ; DIB (déchets industriels banals).
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
59
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
Annexe 2
Éléments de comparaison financière des projets de méthanisation
60
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Contexte réglementaire
1. Typologie des sous-contextes
Le traitement des déchets est encadré sur le plan
réglementaire et législatif par un corpus complexe,
au niveau de la Communauté européenne et au niveau national.
Car dans le domaine de l’environnement, ce sont
essentiellement les décisions communautaires qui
orientent le marché et la méthanisation des déchets
ménagers obéit à cette règle.
Pour définir le contexte réglementaire de la méthanisation des déchets ménagers, il convient de distinguer quatre types de “sous-contextes” comme suit :
- la gestion des déchets,
- le droit des installations classées pour la protection
de l’environnement,
- la gestion des matières fertilisantes pour le compost
et les excédents hydriques,
- les énergies renouvelables.
2. Gestion des déchets
En premier lieu au niveau européen, il faut principalement considérer la directive 1999/31/CE du 26
avril 1999 relative à la mise en décharge des déchets1,
qui impose aux États membres la réduction des déchets biodégradables mis en décharge, comme suit :
- horizon 2006 : mise en décharge de 75 % au maximum des flux de déchets biodégradables produits en
1995,
- horizon 2009 : mise en décharge de 50 % au maximum des flux de déchets biodégradables produits en
1995,
- horizon 2016 : mise en décharge de 32 % au maximum des flux de déchets biodégradables produits en
1995.
En France, les articles L2224-13 et 14 du code général des collectivités territoriales spécifient que « les
communes ou les établissements publics de coopération intercommunale assurent, éventuellement en
liaison avec les départements et les régions, l’élimination des déchets des ménages. Ces collectivités as-
surent également l’élimination des autres déchets
définis par décret, qu’elles peuvent, eu égard à leurs
caractéristiques et aux quantités produites, collecter
et traiter sans sujétions techniques particulières ».
En outre, les déchets des collectivités font l’objet
d’une planification administrative et territoriale. En
application des articles L541-11 à L541-15 du code
de l’environnement, la gestion des déchets fermentescibles doit être détaillée dans le plan départemental d’élimination des déchets ménagers et assimilés
(PDEDMA), outil fédérateur de la gestion des déchets
placés sous la responsabilité des conseils généraux.
À ce titre, l’autorisation ICPE (cf. ci-après) ne peut être
délivrée que si le projet est compatible avec le PDEDMA
approuvé.
Par ailleurs, la circulaire du 28 avril 1998 relative à la
mise en œuvre des plans départementaux de gestion
des déchets avait fixé un objectif à terme de collecte
séparée pour valorisation de 50 % des déchets par recyclage, traitement biologique ou épandage agricole.
Et enfin, la circulaire du 28 juin 2001 sur la gestion des
déchets organiques, a rappelé les principes et objectifs
de valorisation biologique des déchets organiques.
3. Droit des installations classées
pour la protection de l’environnement
En application du code de l’environnement, les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) de traitement des déchets ménagers
relèvent de l’arrêté du 2 février 1998 qui réglemente
les consommations et rejets des ICPE.
En fonction des nuisances et des risques potentiels,
les ICPE font l’objet d’une autorisation préfectorale ou
d’une simple déclaration en préfecture2. En dessous
de certains seuils, les installations ne sont pas classées, mais soumises aux prescriptions du “Règlement
sanitaire départemental” (RSD).
1 http://aida.ineris.fr/textes/directives/text0574.htm
2 http://aida.ineris.fr/sommaires_textes/sommaire_
thematique/index.htm
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
61
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
Pour les ICPE qui mettent en œuvre une méthanisation des déchets, il n’existe pas à ce jour (2006) de
rubrique ICPE ni de texte réglementaire spécifique,
des réflexions étant cependant en cours au niveau du
ministère de l’Écologie. Par défaut, ce sont donc généralement les rubriques “traitement de déchets”,
“compostage” et “biogaz” qui sont utilisées, sous
contrôle des services de l’État (en général la DRIRE,
mais parfois la DDAF, la DSV ou la DDASS en fonction
des préfectures de département).
Ainsi, les contraintes réglementaires qui s’imposent
sont liées à la nature de l’activité et au type de déchets
concernés.
- Les installations qui traitent des déchets végétaux,
des matières organiques d’origine animale (fumiers,
lisiers), des boues d’épuration ou de la FFOM3 relèvent
de la rubrique 2170 “Fabrication d’amendement et
support de culture”.
L’installation est soumise à autorisation, à déclaration
ou relève simplement du RSD selon la capacité de
production de compost.
- Les installations qui traitent des ordures ménagères
(résidus urbains) relèvent toutes de la rubrique 322
et sont toutes soumises à autorisation (322-A1 : transit, 322-B1 : broyage, 322-B2 : enfouissement, 322B3 : compostage4, 322-B4 : incinération).
D’autres rubriques, considérées comme “annexes”,
s’appliquent également aux unités de méthanisation :
- stockage : rubrique 2171 des ICPE relative aux dépôts de fumier, engrais et supports de culture n’étant
pas l’annexe d’une exploitation agricole,
- broyage : rubrique 2260, broyage, concassage, ensachage, pulvérisation, mélange et décortication des
substances végétales…,
- gestion du biogaz : rubrique 2910 pour la combustion (hors incinération) et 2920 pour la compression.
Compte tenu du seuil technico-économique de rentabilité de la méthanisation des déchets ménagers, la
procédure d’autorisation est quasi-obligatoire. C’est
pourquoi, compte tenu de la procédure administrative, le maître d’ouvrage doit intégrer dans son projet un délai d’obtention de l’autorisation d’exploiter
compris entre 6 mois et 1 an à partir de son instruction (recevabilité du dossier).
Le tableau I résume les principales rubriques ICPE qui
concernent les usines de méthanisation de déchets
ménagers.
3 L’arrêté-type du 7 janvier 2002 précise les prescriptions des
installations soumises à déclaration. Par ailleurs, la circulaire du
5 janvier 2000 a précisé que la rubrique 2170 correspond à une
activité de fabrication de produit, c’est-à-dire que le compost doit
être conforme aux prescriptions de mise sur le marché (norme
ou homologation). Par conséquent, une installation traitant par
compostage des produits non conformes sera classée dans la
rubrique 322, qui correspond à une activité de traitement de
déchets.
4 En 2006, il n’existe pas “d’arrêté type” pour l’activité compostage de déchets.
Seuils (en tonnes sortantes)
N° rubrique
Champs d'application
Texte de référence
Autorisation
322 B3
Compostage ou méthanisation
d’OM et autres résidus urbains
2170
Fabrication d'engrais et
supports de culture à partir des
matières organiques (déchets
verts, boues, FFOM) par
compostage ou méthanisation
2171
Dépôt de fumier, engrais et
supports de culture
-
2260
Broyage de matières organiques
-
2910
Combustion du biogaz
-
Arrêté du 7/01/02
Avis du 23/01/02
Circulaire du 10/12/03,
Directive n°2001/80/CE
Décret n° 98-833
Déclaration
RSD
de 1 à 10 t/j de
compost produit
(de 1 à 10 kt/an
traitées)
< 1 t/j de
compost
produit
(< 1 kt/an
traité)
> 200 m3
≤ 200 m3
> 500 kW
de 40 à 500 kW
< 40 kW
≥ 20 MW
de 2 à 20 MW
≤ 2 MW
Sans seuil
>10 t/j de
compost produit
(env. 10 kt/an
traitées)
Tableau I. Caractéristiques des rubriques ICPE relatives à la méthanisation des déchets ménagers
62
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Contexte réglementaire
Enfin, il convient de rappeler que la gestion des excédents hydriques est susceptible d’être soumise à des
contraintes au titre de l’arrêté du 2 février 1998
(cf. paragraphe 2.7 du chapitre “Process mis en
œuvre”).
Les ICPE de traitement de déchets soumises à autorisation doivent respecter des contraintes spécifiques
en matière d’information du public. Ainsi, au niveau
de la construction de l’usine (ou lors de modifications
substantielles), l’autorisation d’exploitation impose
une enquête publique préalable. La création d’une
“Commission locale d’information et de surveillance”
(CLIS) peut également être imposée par le préfet.
4. Gestion des matières fertilisantes
4.1. Avertissement
Si l’objectif de la méthanisation est avant tout, de réduire le volume et la masse des déchets, elle s’accompagne aussi de la production de matière organique.
Cet amendement peut être valorisé en agriculture, ce
qui assure ainsi un équilibre du projet à double titre :
❶ financier, car il est en général plus économique de
pratiquer un épandage qu’un enfouissement en décharge ;
❷ de “bon sens écologique” parce que le développement durable considère bénéfique de retourner au sol
ce qu’il a produit.
Et, au-delà des spécificités de toute plateforme de méthanisation, la valorisation du compost ou des jus de
digestat (terme préférable aux “excédents hydriques”
ou “effluents pollués”) est un élément essentiel pour
justifier son projet5.
La loi française distingue deux voies pour le recyclage
des déchets en agriculture. En fonction du statut des
matières fertilisantes, des dispositions pratiques s’appliquent de façon sélective.
4.2. Logique “produits”
La logique “produit” présente des contraintes d’utilisation plus souples que celles de la logique “déchet”,
car un produit doit respecter des critères particuliers
d’efficacité et d’innocuité strictement définis dans les
5 Voir à ce propos “Trois années de chroniques de l’organique,
2003-2005”, Emmanuel ADLER – Éditions DPE, 2006.
articles du code rural relatifs aux “matières fertilisantes”. Ainsi, l’article L255-1 du code rural précise
que :
« 1- les matières fertilisantes comprennent les engrais, les amendements et, d’une manière générale,
tous les produits dont l’emploi est destiné à assurer
ou à améliorer la nutrition des végétaux ainsi que les
propriétés physiques, chimiques et biologiques des
sols ;
2- les supports de culture sont des produits destinés
à servir de milieu de culture à certains végétaux ».
L’article L255-2 définit les conditions de mise sur le
marché des matières fertilisantes. Ainsi :
« il est interdit d’importer, de détenir en vue de la
vente, de mettre en vente, de vendre, d’utiliser ou de
distribuer à titre gratuit, sous quelque dénomination
que ce soit, des matières fertilisantes et des supports
de culture lorsqu’ils n’ont pas fait l’objet d’une homologation ou, à défaut, d’une autorisation provisoire
de vente, d’une autorisation de distribution pour expérimentation ou d’une autorisation d’importation.
Toutefois, sous réserve de l’innocuité des matières fertilisantes ou supports de culture à l’égard de l’homme,
des animaux, ou de leur environnement, dans des
conditions d’emploi prescrites ou normales, les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables :
1- aux produits dont la normalisation, au sens de la
loi du 24 mai 1941, a été rendue obligatoire ;
2- aux produits mis sur le marché dans les conditions
prévues par les dispositions réglementaires prises en
application de directives des communautés européennes, lorsque ces dispositions ne prévoient ni
homologation ni autorisation préalable à la mise en
vente ;
3- aux rejets, dépôts, déchets ou résidus dont l’évacuation, le déversement ou l’épandage sur des terrains agricoles est réglementé, cas par cas, en application de la loi nº 64-1245 du 16 décembre 1964
relative au régime et à la répartition des eaux et à la
lutte contre leur pollution ou du livre V (titre I) du
code de l’environnement ou de la loi nº 92-3 du 3 janvier 1992 sur l’eau, eu égard à la conservation de la
fertilité des sols ;
4- aux produits organiques bruts et aux supports de
culture d’origine naturelle non mentionnés au 3º,
livrés en l’état ou mélangés entre eux, lorsqu’ils sont
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
63
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
obtenus à partir de matières naturelles sans traitement chimique, qu’ils constituent des sous-produits
d’une exploitation agricole ou d’un établissement non
agricole d’élevage ou d’entretien des animaux et sont
cédés directement, à titre gratuit ou onéreux, par l’exploitant ».
Enfin, l’article L255-3 précise par ailleurs que :
« les homologations prévues à l’article L255-2 ne peuvent être accordées qu’aux produits qui ont fait l’objet d’un examen destiné à vérifier leur efficacité et
leur innocuité à l’égard de l’homme... Cette vérification peut notamment être effectuée par un contrôle
de leur composition physique, chimique, biologique,
éventuellement complété par des essais culturaux.
Les autorisations provisoires de vente ou d’importation peuvent être délivrées pour les produits en instance d’homologation. Elles cessent d’avoir effet à
l’expiration d’un délai de 4 ans ; toutefois, ce délai
peut être prorogé avant son expiration pour une
durée maximale de 2 ans ».
Ainsi, dans cette logique “produit”, les matières fertilisantes élaborées à partir de déchets ménagers doivent soit être conformes à une norme d’application
obligatoire, soit avoir fait l’objet d’une homologation.
L’homologation, délivrée par le ministère de l’Agriculture (comité d’experts près de la Direction générale de l’alimentation6) se rapporte ainsi à un produit
précis, de provenance déterminée (usine et producteur). Elle exige donc de la part de l’industriel
concerné la constitution d’un dossier en conséquence.
Les composts de déchets ménagers entrent dans la catégorie des produits quand ils sont conformes à la
norme NFU4451 qui s’applique, sous conditions7,
aux sous-produits de la méthanisation des déchets
ménagers (homologation de la norme par l’AFNOR
prévue sur 2006-2007, suivie par un arrêté interministériel d’application obligatoire).
Cette norme établit des seuils pour différents éléments :
- des éléments en traces (Cu, Zn, As, Cd, Cr, Hg, Ni,
Pb et Se),
- des agents pathogènes biologiques (œufs d’helminthes viables, Salmonella),
- des substances présentes dans les matières premières sans intérêt agronomique (inertes et impuretés : films plastiques + PSE (polystyrène expansé) >
5 mm, autres plastiques (norme XP U44-164) >
5 mm, verres + métaux > 2 mm),
- et enfin, des composés organiques en traces (fluoranthène, benzo (b) fluoranthène et benzo (a) pyrène).
En marge de la réglementation, divers cahiers des
charges, qui supposent une démarche volontaire de
la part des exploitants d’unités de traitement, peut
permettre d’accéder à certains marchés et peuvent
être cités :
- l’Écolabel européen pour les amendements pour
sols,
- la charte Bonduelle et la charte CERAFEL (Bretagne),
spécifiques aux productions légumières,
- les cahiers des charges AOC, en cours de définition,
- le cahier des charges ASF (autoroutes)…
Enfin, en ce qui concerne l’utilisation non agricole
des déchets organiques de produits ni normalisés, ni
homologués, l’arrêté prévu dans le cadre de l’épandage des boues8 n’a fait l’objet d’aucun texte en 2006.
Toute opération de végétalisation avec emploi de
déchets organiques doit donc faire l’objet d’une demande préalable en préfecture. Il existe cependant un
guide Afnor, issu de travaux européens9, sur les
“bonnes pratiques pour la valorisation des boues en
reconstitution de sol”.
6 En application de la loi d’orientation agricole de 2005, c’est
l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFFSA) qui
assurera à compter de la fin 2006 la responsabilité de l’expertise
des matières fertilisantes.
7 La norme n’est pas applicable aux matières fertilisantes organiques qui contiennent au moins 3 % sur matière brute de l’un
des éléments majeurs (N, P2O5, K2O) et qui sont alors considérées comme engrais. Les amendements organiques doivent respecter N + P2O5 + K2O < 7 % sur MB. Enfin sauf pour les amendements organiques avec engrais, la somme des formes
nitrique, ammoniacale et uréique ne doit pas dépasser 33 % de
l’azote total, et le rapport C/N doit être supérieur à 8.
4.3. Logique “déchets”
La logique “déchets” s’applique aux matières fertilisantes qui sont soumises à plan d’épandage, c’est-à-
64
8 Arrêté du 8 décembre 1997.
9 Fascicule de documentation FD CEN/TR 13983, septembre
2003.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Contexte réglementaire
dire quand elles ne sont ni normalisées, ni homologuées.
C’est en particulier le cas des effluents liquides des
installations de méthanisation des déchets ménagers
pour lesquels et par défaut, c’est l’arrêté du 2 février
1998 qui s’applique.
L’interdiction d’épandage s’applique aux déchets dont
la composition ne respecte pas les valeurs seuils de la
réglementation et qui sont donc potentiellement dangereux. Sous certaines conditions, ces matières organiques, pour être valorisées en fertilisation, doivent
être transformées avant épandage.
Il convient également, dans une perspective de salubrité publique, de protection des cultures, des sols et
de la ressource en eau, de mentionner le règlement
sanitaire départemental qui régit depuis 1978 les matières organiques “susceptibles de constituer un danger direct pour la santé publique”. Cette réglementation s’applique aux effluents d’industries et d’élevage
non soumis à la loi sur les ICPE. Dans ce cas, l’épandage est autorisé, sous réserve d’observer quelques
règles élémentaires.
La figure 1 résume les diverses voies d’utilisation des
matières fertilisantes élaborées à partir de déchets.
Enfin, pour mémoire car hors de notre champ
d’étude, il faut souligner que la méthanisation pourrait s’appliquer à des sous-produits animaux dans de
rares conditions. Ainsi, le lisier, le contenu de l’appareil digestif séparé de l’appareil digestif, le lait et le
colostrum ainsi que toutes les matières de catégorie
3 (déchets de cuisine, anciennes denrées alimentaires,
sang, plumes…), conformément au règlement (CE)
n°1774/2002 établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux non destinés à la
consommation humaine (RSPA), peuvent être méthanisés en vue de produire un engrais ou un amendement organique.
Conformément à la circulaire du 29 décembre 2003,
les installations de traitement de sous-produits animaux sont réglementées par la rubrique 2730 de la
nomenclature des ICPE, à l’exception des installations
de traitement des déchets de cuisine et des lisiers, du
lait et du colostrum.
En application du RSPA, les installations de méthanisation doivent être agréées conformément à l’arrêté
du 1er septembre 2003 relatif aux modalités de délivrance de l’agrément sanitaire et de l’autorisation de
certains établissements visés par le RSPA. Cette obligation d’agrément ne s’applique pas aux installations
traitant uniquement, comme sous-produits animaux,
des déchets de cuisine. Dans tous les autres cas, des
exigences spécifiques aux installations de méthanisation sont alors à considérer.
Figure 1. Voies de valorisation des matières fertilisantes
(source : D. PLUMAIL/S. DUCOTTET, Environnement et Technique n° 205, avril 2001)
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
65
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
5. Énergies renouvelables
Pour favoriser le développement de la méthanisation,
l’Union européenne, au travers de son plan d’actions
communautaire de 1997 avec le Livre Blanc “Énergie
pour l’avenir : les sources d’énergies renouvelables”,
a préconisé de doubler la part des énergies renouvelables dans son bilan énergétique d’ici 2010.
Plusieurs actions ont ainsi été engagée dont le “programme cadre énergie” (arrivé à échéance fin 2002),
suivi du programme “énergie intelligente pour l’Europe (2003 - 2006)”, doté d’un budget de 215 M€.
Appuyés par ce cadre communautaire, la majorité des
pays européens se sont engagés dans le développement des énergies renouvelables et également de la
réduction des gaz à effet de serre.
Mais, comme le souligne une récente étude10, certains
pays ont mis plus de moyens que d’autres avec le
développement du concept “d’électricité verte”, soit
avec un tarif de rachat garanti pour le producteur (Allemagne, Suisse, Pays-Bas), soit avec un quota de production obligatoire (Danemark).
Les principaux textes officiels relatifs aux énergies renouvelables sont les suivants.
• Directive 2001/77/CE du Parlement européen et du
Conseil du 27 septembre 2001 relative à la promotion de l’électricité produite à partir de sources d’éner10 “Réalisation d’un référentiel technique et économique d’unités de traitement de déchets organiques par méthanisation avec
ou sans valorisation du biogaz”, 2004 – Étude réalisée pour
l’Ademe par le bureau d’études Erep avec le Cabinet Merlin.
66
gie renouvelables sur le marché intérieur de l’électricité,
• Communication de la Commission au Parlement
européen, au Conseil, au Comité économique et social et au Comité des régions concernant les carburants de substitution pour les transports routiers et
une série de mesures visant à promouvoir l’utilisation
des biocarburants.
• Proposition de directive du Parlement européen et
du Conseil visant à promouvoir l’utilisation des biocarburants dans les transports.
À propos de la réduction des émissions dans l’air, la
directive 88/609/CEE du 24 novembre 1988 limite
les émissions de certains polluants dans l’atmosphère
en provenance des grandes installations de combustion. Les directives 89/369/CEE et 89/429/CEE de
juin 1989 concernent les installations d’incinération
des déchets existantes et nouvelles et ont été complétées par la directive du 4 décembre 2002.
Par des impositions sévères sur la qualité des rejets,
ces mesures imposent un traitement poussé des fumées, ce qui augmente significativement le coût de
l’incinération des déchets.
Il faut enfin noter que le stockage du biogaz est soumis au niveau européen comme au niveau français à
deux réglementations complémentaires, touchant
d’une part la construction des réservoirs et leur
contrôle en service (directive 97/23/CE relative aux
équipements sous pression, transposée par le décret
99-1046 du 13 décembre 1999) et d’autre part, leur
exploitation, pour lequel la réglementation ICPE s’applique.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Conclusion
Avec plus d’une quinzaine d’opérations en cours en France en 2006, la méthanisation des déchets connaît un succès indéniable. Mais, comme le rappelait un article à l’intention des élus1 soulignant l’intérêt
récent des collectivités pour la méthanisation des déchets, cette technique impose en général, pour
s’appliquer à un contexte spécifique, quatre conditions préalables, à savoir :
- un gisement de déchets ménagers et assimilés suffisamment important compte tenu du seuil de
rentabilité des installations (de l’ordre de 80 000 habitants environ),
- une filière de valorisation agronomique des amendements organiques produits (compost et jus de
digestat),
- un site d’implantation permettant la valorisation énergétique (chaleur ou électricité) du biogaz produit
pour satisfaire des besoins industriels ou alimenter un réseau de chaleur domestique,
- et enfin, une volonté politique de promotion des énergies renouvelables et du retour au sol des
matières organiques résiduaires.
Par ailleurs, la méthanisation doit être mise en œuvre en étroite relation avec les autres procédés
disponibles sur un territoire (valorisation matière, compostage, incinération, stockage…) dans le cadre
d’une gestion globale des déchets.
Et pour ces procédés, “la concurrence n’est pas exclusive de la complémentarité” [Solagro, 2003]. Dans
la plupart des cas, il convient donc de ne pas raisonner “procédé contre procédé”, mais dans une
logique d’optimisation d’une chaîne de traitement ou d’un plan de gestion territorial des déchets. La
méthanisation peut en effet intervenir en complémentarité avec l’incinération, ou en alternative. Il est
possible d’optimiser les équipements en détournant les déchets les plus humides vers la méthanisation et en renvoyant les refus combustibles vers l’incinération.
Pour les déchets municipaux, la méthanisation trouve sa “place” dans un contexte adapté, contexte qui
se définit à partir des flux à traiter, du développement du tri, des modes de collecte, des tensions sur
l’énergie, des besoins du monde agricole, des attentes des administrés, contribuables et riverains du
site retenu, etc.
Compte tenu des recettes générées par la valorisation énergétique du biogaz, la méthanisation des
déchets ménagers peut présenter un intérêt par rapport au compostage stricto sensu à partir d’un
seuil de 20 kt/an (entrée usine). Cette technique est particulièrement bien adaptée aux zones périurbaines denses, là où l’emprise au sol est réduite, là où il est impératif de maîtriser les odeurs et enfin,
là où la production d’une énergie locale et renouvelable présente un grand intérêt.
En résumé, la filière méthanisation mérite d’être prise en considération au niveau national comme un
des outils qui permettront d’atteindre les objectifs de réduction des quantités de déchets organiques
mis en décharge fixés par la directive 1999/31/CE.
Au niveau d’une collectivité, elle peut constituer la réponse dans les cinq cas suivants :
- collectivité dont les déchets bruts sont encore actuellement enfouis et qui conduisent une politique
orientée par la circulaire du 28 juin 2001 sur la gestion des biodéchets,
1 Voir l’article “La méthanisation, à quand un vrai démarrage ?” de Jérôme Campra publié dans la revue “Maires de France”,
janvier 2005.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
67
Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
- collectivité qui s’engage dans la modernisation ou l’extension de plateformes de compostage (déchets
verts/et résiduels) confrontée à des problèmes de nuisances olfactives ou d’emprise foncière…
- collectivité qui s’engage dans des collectes spécifiques de déchets des entreprises (restauration, industries agroalimentaires) ou de l’assainissement (boues, matières de vidange, graisses),
- collectivité qui s’engage dans des politiques ambitieuses de promotion des énergies renouvelables et qui fait face à une pénurie d’outil de traitement,
- et enfin, collectivité qui dispose de sites de traitement de déchets situés à proximité de réseaux
de chaleur et là où sont présentes des industries avec de forts besoins en énergie.
68
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
Lexique
AMENDEMENTS
Les amendements sont des matières fertilisantes
apportées aux sols et dont la fonction principale est
d’améliorer leurs propriétés physiques et/ou chimiques et/ou biologiques (définition norme NFU
42041, mars 1985). Les amendements organiques ont
une action positive sur l’aération et la cohésion du sol
ainsi que sur sa capacité à retenir les éléments fertilisants. Les teneurs en N, P2O5 et K2O ne doivent
pas dépasser chacune 3 % sur produit brut. Ils répondent aux normes NFU 44051, 44095 (amendements
organiques) ou NFU44071 (amendements organiques avec engrais). On trouve deux définitions
réglementaires des amendements dans le décret
n° 80-478 du 16 juin 1980. Ainsi, l’amendement calcique ou magnésien est une matière fertilisante contenant du calcium ou du magnésium, généralement sous
forme d’oxydes, d’hydroxydes ou de carbonates, destinés
principalement à maintenir ou à élever le pH du sol et à
en améliorer les propriétés. Un amendement organique
est une matière fertilisante composée principalement de
combinaisons carbonées d’origine végétale, fermentée
ou fermentescible, destinée à l’entretien ou à la reconstitution de la matière organique du sol.
ARRÊTÉ D’AUTORISATION OU RÉCÉPISSÉ
DE DÉCLARATION ICPE
Arrêté ou récépissé émis par la préfecture du département où est prévu l’unité qui fixe les conditions de
fonctionnement dans le cadre de la réglementation
des ICPE
AZOTE ORGANIQUE TOTAL NTK
(AZOTE KJELDAHL)
L’azote dit NTK (azote total Kjeldahl) mesure les
formes organiques (urée, acide urique, créatinine,
aminoacides, protéines) et ammoniacale mais pas les
formes minérales nitreuse et nitrique. Souvent, la dénomination NGL (azote global) est utilisée pour exprimer la somme NTK plus l’azote nitreux et nitrique.
BIODÉCHETS
La notion de biodéchets n’est pas explicitement définie par la réglementation française et communautaire
et varie en fonction des contextes et des acteurs. Dans
la pratique, les biodéchets représente l’ensemble des
déchets organiques biodégradables, collectés séparativement ou non. Les boues d’épuration, les déjections, les ordures ménagères, les papiers-cartons et
les boues industrielles putrescibles sont donc des biodéchets. Les déchets biodégradables solides des ménages comprennent les déchets alimentaires, les déchets verts des ménages ou déchets de jardin, et enfin,
les papiers et cartons, souvent recyclés. Les biodéchets peuvent aussi provenir des industries agroalimentaires, des déchets verts de professionnels, supermarchés, cantines scolaires et restaurants. Dans le
vade-mecum, les biodéchets sont assimilés aux déchets putrescibles.
BIODÉGRADABLE
La notion de biodégradable renvoie à la biodégradation, décomposition/dégradation de matières organiques par des micro-organismes (bactéries, enzymes,
champignons et algues). Les matériaux sont convertis en gaz carbonique, eau et en biomasse (cellules
des micro-organismes qui utilisent le matériel comme
une source de carbone pour se développer). Les procédés de traitements biologiques (biodégradation)
sont souvent utilisés pour le traitement des eaux et
des déchets (lagunage, méthanisation, lombricompostage, filtration lente…). Il existe en France plus
de 22 normes (17 françaises et 5 internationales)
relatives à la biodégradabilité, dont un peu moins de
la moitié relatives aux plastiques et emballages.
BIOGAZ
Gaz résultant de la fermentation en l’absence d’air des
déchets putrescibles (boues d’épuration, ordures ménagères, effluents industriels, déjections animales).
Essentiellement composé de méthane (gaz naturel)
et de gaz carbonique, le biogaz est produit par l’activité des bactéries dont l’efficacité est fonction de la
température et de la digestibilité des déchets.
TSM numéro 4 - 2006 - 101e année
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Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
BOUES D’ÉPURATION
COMPOSÉS TRACES ORGANIQUES - CTO
Ces boues sont produites au cours de l’épuration des
rejets liquides rejetés dans les réseaux d’assainissement par l’ensemble des habitants (effluents domestiques) et des activités commerciales et industrielles.
D’autres sous-produits sont issus de la gestion des
eaux usées (graisses, déchets de dégrillage et matières
résultant du curage des réseaux d’égouts).
Substances actives de synthèse (phytosanitaires, hydrocarbures, détergents…) ou issues de la dégradation de ces substances, et présents en quantité infinitésimale dans un milieu.
CENTRE DE STOCKAGE DE DÉCHETS (CSD)
Classiquement appelé décharge, ou dénommé CET
pour centre d’enfouissement technique, le CSD est
une installation qui a pour vocation de traiter et de
stocker les déchets dans des conditions réglementaires. Dans l’Union européenne, il existe trois classes
de CSD et sont distingués les installations recevant
des déchets dangereux stabilisés ou inertés (dits de
classe 1 en France), les centres qui reçoivent les déchets non dangereux (ou ordures ménagères ou déchets municipaux et assimilés), dits de classe 2, et
enfin les centres qui reçoivent les déchets inertes (dits
de classe 3).
COLLECTE
La collecte peut être réalisée en porte-à-porte ou en
apport volontaire. La collecte est dite “sélective”
quand certains flux de déchets sont préalablement
triés selon leur matière constitutive par les producteurs pour un traitement spécifique. Il existe des collectes sélectives pour le verre, les journaux-magazines, les emballages ménagers, la fraction fermentescible des ordures ménagères (FFOM), les déchets
verts, les déchets ménagers spéciaux, les encombrants.
La pré-collecte est l’ensemble des opérations d’évacuation des déchets depuis leur lieu de production
jusqu’au site de prise en charge par le service de collecte.
La collecte est dite “multi-matériaux” quand plusieurs produits sont collectés en une seule opération.
L’usager dépose les différents déchets dans un ou plusieurs contenants spécifiques (bacs cloisonnés par
exemple) et ces déchets sont ensuite triés par catégories ou sous-catégories dans un centre de tri, puis
conditionnés et dirigés vers les filières de recyclage.
70
COMPOST
Le mot compost, sur le plan étymologique, renvoie à
compote. Le terme compote a d’abord été écrit “composte” (v. 1100), mot emprunté au latin composita
“ mets composé de plusieurs éléments ”, participe
passé substantivé, au féminin, de componere “ composer ”. L’ancien adjectif compost, oste “ mêlé, composé ”, représentant le participe passé adjectivé de
compositus, a été substantivé en compost, spécialisé
en agriculture comme le nom d’un engrais composé
d’un mélange de fumier et de détritus”. En fertilisation agricole, Le compost est un mélange de résidus
divers d’origine végétale ou animale, mis en fermentation lente afin d’assurer la décomposition des matières organiques, et utilisé comme engrais ou amendement.
COMPOSTAGE
Transformation en présence d’eau et d’oxygène des
déchets organiques, par des micro-organismes
(champignons microscopiques, bactéries...) en un
produit comparable à l’humus.
CONTRATS DES COLLECTIVITÉS
Pour gérer les services publics industriels et commerciaux de l’eau, de l’assainissement ou des déchets municipaux, les communes et établissements publics de
coopération intercommunale ont le choix entre marchés publics et délégations de service public. Il est
également possible de distinguer les contrats en fonction de la gestion qui peut être directe, déléguée, ou
indirecte. Ces services doivent disposer, sauf pour les
petites communes, d’un budget distinct. En gestion
directe, ou régie, la collectivité assume le risque du
financement de l’équipement et de son exploitation,
l’intervention d’entreprises spécialisées faisant l’objet de marchés publics (travaux ou diverses prestations de service). La collectivité peut aussi faire gérer
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Lexique
l’ensemble du service par un contrat de gérance, assimilé à un marché public, le gérant étant rémunéré
au forfait. La délégation de service public (DSP)
confie tout ou partie du service public à une entreprise privée rémunérée par l’usager. La loi n° 20011168 du 11 décembre 2001, dite loi MURCEF, définit
la délégation de service public comme un contrat par
lequel une personne morale de droit public confie la gestion d’un service public dont elle a la responsabilité à un
délégataire public ou privé, dont la rémunération est
substantiellement liée au résultat de l’exploitation du
service. Le délégataire peut être chargé de construire des
ouvrages ou d’acquérir des biens nécessaires au service.
Deux formes de DSP sont couramment rencontrées
avec l’affermage (85 % des contrats) et la concession.
Dans le cadre d’un contrat d’affermage, la collectivité
décide, finance et fait réaliser les équipements en tant
que maître d’ouvrage (c’est le client, personne physique ou morale, auquel le maître d’œuvre fournit son
service), l’entreprise (le fermier) exploitant le service
à ses risques et périls. Une surtaxe communale dont
le produit revient à la collectivité affermante ainsi
qu’un prix qui revient au fermier sont facturés à l’usager pour financer, respectivement, l’investissement et
le fonctionnement du service. L’affermage est donc
une délégation de gestion du service portant seulement sur l’exploitation du service. Dans la concession, le délégataire est responsable de la construction,
du financement et de l’exploitation des équipements
à ses risques et périls. La durée du contrat est, en
principe, assise sur la durée d’amortissement des ouvrages financés par le délégataire.
DANGER
La notion de danger est essentielle dans l’approche
dite “analyse des risques”. Le danger est un événement de santé indésirable (tel qu’une maladie, un
traumatisme, un handicap, un décès). Par extension,
le danger désigne tout effet toxique, c’est-à-dire un
dysfonctionnement cellulaire ou organique, lié à l’interaction entre un organisme vivant et un agent chimique, physique ou biologique. En matière de gestion des déchets, et plus particulièrement pour les
épandages de matières fertilisantes, il existe des dangers de contamination pour l’homme, les animaux
domestiques et plus largement, le milieu naturel.
DÉCHETS
Au sens de l’article L541-1 du code de l’environnement (loi nº 2003-591 du 2 juillet 2003) est un déchet
tout résidu d’un processus de production, de transformation ou d’utilisation, toute substance, matériau, produit
ou plus généralement tout bien meuble abandonné ou
que son détenteur destine à l’abandon. Le déchet est défini en droit communautaire (directive n°75-442 du
15 juillet 1975 relative aux déchets) comme “toute
substance ou tout objet qui relève des catégories de
l’annexe I, dont le détenteur se défait ou dont il a l’intention ou l’obligation de se défaire”.
Dans le cas de matières fertilisantes, les déchets
concernés sont les sous-produits issus d’activités industrielles (déjections animales, tourteaux de coopérative…) ou domestiques (ordures ménagères, boues
de station d’épuration, déchets verts…).
DÉCHETS SPÉCIAUX DES MÉNAGES (DMS)
Les DMS sont les produits qui sont utilisés par les ménages et qui ne doivent pas être éliminés par les mêmes
voies que les ordures ménagères (produits d’entretien,
de jardinage, piles, huiles moteur usagées).
DBO5
La “demande biochimique en oxygène sur 5 jours”
est un indicateur de la pollution organique des eaux
usées qui mesure la quantité d’oxygène nécessaire
aux micro-organismes pour assurer une décomposition de la pollution organique dans des conditions
d’incubation données et en 5 jours. Elle s’exprime en
milligramme d’oxygène par litre (mg O2/l).
DCO
La “demande chimique en oxygène” est la quantité
d’oxygène nécessaire pour oxyder, à partir d’un puissant oxydant chimique et dans des conditions définies, les matières réductrices contenues dans l’eau,
en particulier les matières organiques biodégradables
ou non en 5 jours. Le rapport DCO/DBO peut donner une indication sur la biodégradabilité d’une eau
usée. Ce rapport est généralement proche de 2,5 pour
des eaux usées d’origine domestique.
DÉCHETS ASSIMILÉS AUX DÉCHETS MÉNAGERS
Déchets issus du commerce, de l’artisanat, des bureaux, et de l’industrie collectés en même temps et
dans les mêmes conditions que les déchets ménagers.
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Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
DÉCHETS FERMENTESCIBLES
C’est la FFOM, fraction des ordures ménagères qui englobe à la fois les putrescibles, les papiers et les cartons.
DÉCHETS MUNICIPAUX
Ensemble des déchets dont l’élimination (au sens du
titre IV, livre V du code de l’environnement) relève de
la compétence des communes (article L2224-13 et
L2224-14 du code général des collectivités territoriales). Parmi les déchets municipaux, on peut distinguer les catégories suivantes : les ordures ménagères, les déchets encombrants des ménages, les déchets dangereux des ménages, les déchets du nettoiement, les déchets de l’assainissement collectif, les
déchets verts des collectivités locales.
DÉCHETS ORGANIQUES
Ensemble des résidus ou sous-produits organiques
engendrés par l’agriculture, les industries agroalimentaires ou les collectivités. Les collectivités peuvent
ainsi produire des déchets verts, boues et graisses de
station d’épuration, déchets alimentaires, algues
vertes. Les industries peuvent ainsi produire des
boues agroalimentaires, déchets de transformation
des industries végétales, animales et du bois. Enfin,
les déchets organiques de l’agriculture sont constitués de déjections animales excédentaires, invendus
fruits et légumes…
DÉCHETS PUTRESCIBLES
Parmi les 12 catégories descriptives de la composition des ordures ménagères, le déchet putrescible est
composé par les déchets de cuisine et les déchets de
jardin. Les 12 catégories sont : putrescibles, papiers,
cartons, complexes, textiles, textiles sanitaires, plastiques, combustibles, verre, métaux, incombustibles,
déchets ménagers spéciaux. Pour faire la composition
d’une poubelle d’OMR, on place chaque produit
constituant la poubelle dans une des catégories. On
peut être plus précis car il y a environ 57 sous-catégories. Par exemple 2 sous-catégories pour la catégorie putrescibles lorsque l’on sépare les déchets de jardin de ceux de la cuisine.
72
DÉCHETS ULTIMES
Déchet non valorisable, ni par recyclage, ni par valorisation énergétique et donc réglementairement apte
à être stocké en “centre de stockage des déchets ultimes”. L’article L541-1 du code de l’environnement
précise : est ultime au sens du présent chapitre un déchet, résultant ou non du traitement d’un déchet, qui
n’est plus susceptible d’être traité dans les conditions
techniques et économiques du moment, notamment par
extraction de la part valorisable ou par réduction de son
caractère polluant ou dangereux.
DÉCHETS INDUSTRIELS BANALS (DIB)
Les DIB sont constitués par les déchets non dangereux issus généralement des activités des artisans,
commerçants et administrations : papier, verre…
DÉCHETS INERTES
Déchets qui ne subissent aucune modification physique, chimique ou biologique importante. Les déchets inertes ne se décomposent pas, ne brûlent pas
et ne produisent aucune autre réaction physique ou
chimique, ne sont pas biodégradables et ne détériorent pas d’autres matières avec lesquelles ils entrent
en contact, d’une manière susceptible d’entraîner une
pollution de l’environnement ou de nuire à la santé
humaine (directive 1999/31/CE du Conseil du 26
avril 1999 - JOCE du 16 juillet 1999).
ÉLÉMENTS TRACES MÉTALLIQUES (ETM)
En science du sol, il est convenu de parler “d’éléments trace métalliques” (ETM) pour désigner des
composés naturels présents à très faible concentration. Les 7 ETM principaux sont le cadmium, le
chrome, le cuivre, le mercure, le nickel, le plomb et
le zinc.
ENGRAIS
Le décret n°80-478 du 16 juin 1980 définit un engrais
comme une matière fertilisante dont la fonction principale est d’apporter aux plantes des éléments directement utiles à leur nutrition (éléments fertilisants majeurs : azote, phosphore, potassium ; éléments fertilisants secondaires : calcium, magnésium, sodium, soufre ;
oligo-éléments : bore, cobalt, cuivre, fer, manganèse, molybdène, zinc). Selon la législation, tout produit dont
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Lexique
une des teneurs en N, P2O5 ou K2O dépasse 3 % (sur
produit brut) doit être considéré comme engrais.
Dans le cadre des produits pouvant contenir des matières organiques issues éventuellement de déchets
organiques, la norme à considérer est la NFU 42 001
(engrais).
HYGIÈNISATION
Mot employé dans le traitement des déchets fermentescibles dérivé du concept d’hygiène, fréquemment
utilisé dans le sens de “traiter des boues, du lisier ou
du compost, de façon à réduire significativement (en
conformité avec la réglementation) les teneurs en
agents pathogènes.
ENQUÊTE PUBLIQUE
L’enquête publique s’impose pour tous les projets
d’usines de traitement de déchets classées pour l’environnement. Le dossier mis à l’enquête contient les
documents explicatifs (présentation, règlements, impact) et un registre d’enquête est destiné à recevoir
les observations écrites du public. Dans ce cadre, le
public formule ses observations et donne son opinion
au commissaire-enquêteur (CE) indépendant nommé
par le tribunal administratif. Le projet peut alors être
amendé suite à des observations portées au cours de
l’enquête. Le CE peut organiser des réunions publiques et prolonger la durée de l’enquête et, en fin
de mission, il donne par écrit un avis qui peut être favorable, favorable avec recommandations, favorable
sous réserves ou défavorable. Après remise du rapport, il appartient alors à l’autorité compétente dont
relève le projet de prendre sa décision, laquelle est
susceptible de recours devant le tribunal administratif. Le rapport et les conclusions du commissaireenquêteur sont indissociables et rendus publics par
mise à disposition du public pendant un an en mairie et en préfecture.
Une enquête publique est également imposée lorsque
des boues sont utilisées en agriculture sans être homologuées ou conformes à la norme NFU44095.
INSTALLATION CLASSÉE POUR LA PROTECTION
DE L’ENVIRONNEMENT (ICPE)
Les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) sont les usines, ateliers, dépôts,
chantiers, opérations et d’une manière générale toutes
les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, pouvant présenter des dangers ou des inconvénients pour
la commodité, la santé, la sécurité, la salubrité publique, l’agriculture, l’environnement, la conservation
des sites et des monuments, ainsi que des éléments du
patrimoine archéologique. Le régime des ICPE est codifié aux articles L 511-1 et suivants du code de l’environnement. Les installations et activités, qui sont
inscrites dans la nomenclature, doivent obtenir une
autorisation préfectorale, ou être déclarées avant leur
mise en service, suivant la gravité des dangers ou inconvénients qu’elles peuvent présenter. Pour chacune
des rubriques de la nomenclature figurent le rayon
d’affichage, périmètre au sein duquel doit être organisée l’information préalable du public, ainsi que le régime dont relève l’activité ou le produit (A pour autorisation soumis à enquête publique et D pour déclaration en préfecture, la catégorie S concernant les installations devant faire l’objet des servitudes, qui sont
essentiellement les installations SEVESO).
INNOCUITÉ
ÉTUDE PRÉALABLE À L’ÉPANDAGE
Au sens de l’arrêté du 17 août 1998, art. 1 , l’étude
préalable vise à montrer l’innocuité (dans les conditions d’emploi) et l’intérêt agronomique des effluents
ou des déchets que l’on voudrait épandre, l’aptitude
du sol à les recevoir, le périmètre et les modalités de
l’épandage. Cette étude justifie la compatibilité de
l’épandage avec les contraintes environnementales
recensées ou les documents de planification existants
et doit être conforme à la réglementation en vigueur.
er
Pour assurer le recyclage à la terre des matières fertilisantes, la notion d’innocuité est essentielle. Elle est
définie dans l’article L255-2 du code rural (voir au
chapitre “Contexte réglementaire”, paragraphe 4.2)
Dans la pratique, l’innocuité est établie pour les composts, dans la norme NFU44051.
MATIÈRES FERTILISANTES
La définition des matières fertilisantes telle que donnée par l’article L 255-1 du code rural ainsi que les
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Vade-Mecum du porteur de projet de méthanisation des déchets des collectivités
conditions d’homologations sont données au chapitre
“Contexte réglementaire”, paragraphe 4.2 du vademecum.
MATIÈRE ORGANIQUE
La matière organique est la matière carbonée provenant des êtres vivants ou non, végétaux et animaux.
Cette matière peut être facilement recyclée en compost ou en biogaz.
MATIÈRES SÈCHES (MS)
Les matières sèches, en général exprimées en mg/l ou
bien sous forme de flux en kg/j, sont composées par la
somme des matières en suspension et des sels dissous.
Les MS sont mesurées à partir du résidu sec à 105° C.
La différence en masse de la valeur obtenue par séchage à 175-185° C et de celle à 105° C donne la teneur en sels. Le résidu à 550° donne la teneur en matières volatiles, utilisée pour quantifier la teneur en matière vivante et donc en “principe actif”. La teneur en
MV des boues biologiques domestiques en sortie de
clarificateur est souvent de l’ordre de 60 à 80 %. Les
matières en suspension (MES), peuvent être mesurées
par centrifugation (à 4-5 000 tours/minutes pendant
10 minutes) suivie, en fin d’opération, du séchage du
surnageant à 105° C pendant 12 heures. Une mesure
par filtration est possible pour des boues peu concentrées (de 1 à 20 g/l), le résidu étant séché à 105° C.
MÉTABOLISME
Le métabolisme est l’ensemble des transformations
moléculaires et des transferts d’énergie qui se déroulent de manière ininterrompue dans la cellule ou l’organisme vivant. C’est un processus ordonné, qui fait
intervenir des processus de dégradation (catabolisme) et de synthèse organique (anabolisme).
MÉTHANISATION
Procédé de traitement des déchets organiques par
voie anaérobie, la méthanisation met en œuvre une
biomasse épuratrice en l’absence d’oxygène qui décompose les matières organiques, principalement
sous forme d’eau, de méthane et de gaz carbonique.
Le biogaz ainsi produit est une source d’énergie
renouvelable qui permet de chauffer le réacteur anaérobie, de produire de l’électricité ou du carburant.
74
OLIGO-ÉLÉMENTS
Éléments (corps simples) présents dans les organismes vivants à dose extrêmement réduite et pourtant indispensables à la vie humaine, animale, végétale. Ils sont constitués par des éléments métalliques
ou métalloïdes jouant un rôle précis et essentiel dans
les processus biologiques. Ils peuvent être cofacteurs
enzymatiques, hormonaux, être nécessaires à des protéines structurales (tubulines membranaires...), stabiliser la structure de nucléotides ou d’acides nucléiques.
ORDURES MÉNAGÈRES RÉSIDUELLES
Déchets restant après collectes sélectives. Cette fraction de déchets est parfois appelée “poubelle grise”
et sa composition varie selon les lieux en fonction des
types de collecte.
PLAN DÉPARTEMENTAL D’ÉLIMINATION
DES DÉCHETS MÉNAGERS ET ASSIMILÉS
La loi de 1992 modifiant celle de 1975 relative à l’élimination des déchets impose à tout département un
“Plan département d’élimination des déchets ménagers et assimilés” (PDEDMA). Depuis l’automne 2005,
la loi confie aux conseils généraux la compétence de
la révision de ce plan qui oriente et coordonne les actions à mettre en œuvre pour la gestion des déchets
ménagers. Les différentes actions sont déterminées
sur l’ensemble des thématiques de la gestion des déchets, de la prévention à la collecte jusqu’au traitement. À partir d’un état des lieux, le plan a vocation
de prévoir des aménagements à court, moyen et long
terme. Les aménagements des maîtres d’ouvrage doivent être compatibles avec le plan, qui fait l’objet
d’une enquête publique et qui est donc opposable au
tiers. Au 30 juin 2005, l’État achevait la procédure
d’élaboration des plans dans 14 départements. Pour
10 d’entre eux, les préfets concernés devraient approuver le projet avant la fin de l’année 2005. Enfin,
plus de la moitié des plans approuvés en 2004 ont
moins de 5 ans, seuls 9 plans ont été approuvés avant
fin 1996, et 23 entre 1997 et fin 2000.
RISQUE
La notion de risque est étroitement liée à celle de danger et d’exposition. Le risque est la probabilité de sur-
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Lexique
venue d’un danger. L’exposition désigne, dans le domaine de la santé environnementale, le contact entre
une situation ou un agent dangereux et un organisme
vivant. Le risque est donc le produit du danger par
l’exposition.
SICCITÉ
La siccité définit le pourcentage pondéral de matières
sèches (MS) contenue dans une boue, en général
mesuré après un chauffage à 110°C pendant deux
heures. Égale à 0 %, elle caractérise un liquide sans
MS, mais supérieure à 90 %, elle s’applique à un produit sec dont la teneur en MS est de 900 g/kg, l’humidité étant alors de 10 %.
SUPPORT DE CULTURE
En application de l’article L 255-1 du code rural, un
support de culture est tout produit destiné à servir de milieu de culture à certains végétaux ou dont la mise en
œuvre aboutit à la formation de milieux possédant une
porosité telle qu’ils sont capables à la fois d’ancrer les organes absorbants des plantes et de leur permettre d’être
en contact avec les solutions nécessaires à leur croissance.
TRAITEMENTS
De nombreux types de traitement des déchets organiques sont disponibles, avec leurs avantages et inconvénients respectifs. Classiquement, les techniciens distinguent les traitements biologiques de ceux
qui mettent en œuvre des réactions physico-chimiques (réactifs pour séparation de phase ou pour
oxydoréduction, incinération, vitrification, inertage,
chaulage…). Il convient de distinguer les procédés
appliqués aux effluents liquides de ceux appliqués
aux déchets solides. En matière de traitements biologiques, la cinétique de réaction (process intensif ou
extensif), la présence d’air (process aérobie ou anaérobie) et la qualité des résidus après traitement (ainsi
que les émissions de toutes sortes) permettent de différencier les technologies.
TRI-COMPOSTAGE
Mode de traitement des déchets ménagers qui associe un tri des déchets en fonction de leur nature, avec
un compostage de la fraction fermentescible des ordures ménagères.
586 €
70 €
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