Fantasmes sexuels : êtes

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Fantasmes sexuels : êtes
Fantasmes sexuels : êtes-vous normal ?
Une étude de l’Université du Québec à Trois-Rivières et de l’Institut Philippe-Pinel de Montréal
s'intéresse à la définition des paraphilies
MONTRÉAL, le 31 octobre 2014 -Bien que plusieurs théories de la déviance sexuelle intègrent
la notion de fantasmes atypiques (paraphilies), la littérature scientifique ne décrit pas ce que
représente concrètement ce type de fantasme. En Amérique du Nord, la 5e édition du manuel
statistique et diagnostique des troubles mentaux (DSM-5) réfère à des fantasmes « anormaux »,
alors que l’Organisation mondiale de la santé parle de fantasmes « inhabituels » pour définir les
paraphilies. Mais qu’est-ce qu’un fantasme sexuel anormal ? Le prestigieux Journal of Sexual
Medicine publie aujourd'hui les résultats d'une étude sur la nature des fantasmes sexuels de la
population générale réalisée à l’Université du Québec à Trois-Rivières et à l’Institut PhilippePinel de Montréal, affilié à l'Université de Montréal et associé au Centre de recherche de
l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal.
« Cliniquement, on sait bien ce qu’est un fantasme sexuel pathologique : il implique des
partenaires non consentants, il induit une souffrance ou encore il est absolument nécessaire
pour obtenir satisfaction. Mais à part cela, qu'est-ce qu'un fantasme anormal ou atypique au
juste ? Pour le savoir, nous avons demandé à des gens de la population générale, aussi simple
que ça! », affirme Christian Joyal, auteur principal de l'étude et professeur titulaire au
Département de psychologie de l’Université du Québec à Trois-Rivières. « Notre principal
objectif était de spécifier la norme en matière de fantasmes sexuels, étape essentielle aux
définitions de pathologie », rapporte monsieur Joyal. « Et comme on le soupçonnait, il y a
beaucoup plus de fantasmes communs que de fantasmes atypiques. On retrouve donc une
bonne part de jugement de valeurs dans le DSM-5. »
La majorité des études sur les fantasmes ayant été réalisées auprès d’étudiants universitaires,
cette recherche nécessitait donc de trouver un échantillon d'adultes qui accepteraient de décrire
leurs fantasmes. Ainsi, mille cinq cent dix-sept adultes (718 hommes et 799 femmes; âge moyen
de 30 ans) québécois ont répondu à un questionnaire décrivant leurs propres fantasmes
sexuels, en plus de décrire en détail leur fantasme favori (devis de recherche hybride quantitatif
et qualitatif). Les résultats sont plus qu'intéressants.
Résultats
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La nature des fantasmes sexuels est variée parmi la population générale. Très peu de
fantasmes peuvent être considérés comme statistiquement rares, inhabituels ou typiques
(voir lexique).
Néanmoins, sans surprise, cette étude confirme que les hommes ont plus de fantasmes
et les rapportent avec une plus grande intensité que les femmes. Cette recherche nous
apprend également qu'une proportion importante de femmes (30% à 60%) évoque des
thèmes associés à la soumission (ex. être attachée, être tapée sur les fesses, être forcée
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à avoir une relation sexuelle, etc.).
Fait important, contrairement aux hommes, les femmes, en général, distinguent bien les
fantasmes des souhaits. Ainsi, plusieurs d'entre elles qui expriment des fantasmes de
soumission plus extrêmes (ex. : se faire prendre par un inconnu dominant) spécifient ne
jamais vouloir qu’ils se réalisent. Tandis que les hommes, en majorité, voudraient bien
réaliser leur fantasme (ex. : triolisme).
Tel qu’attendu, la présence du partenaire amoureux est significativement plus grande au
sein des fantasmes féminins que masculins. De façon générale, les hommes en couple
fantasment beaucoup plus à propos de relations extraconjugales que les femmes en
couple.
« Un des résultats les plus intrigants concerne le nombre non négligeable de fantasmes
masculins particuliers, concernant par exemple les shemales, le sexe anal chez les
hétérosexuels et l’idée de regarder sa partenaire avoir une relation sexuelle avec un autre
homme. Les théories biologiques évolutionnistes expliquent mal ces fantasmes qui, chez
l’homme, sont habituellement des souhaits » explique Christian Joyal.
« Globalement, ces résultats nous permettent d’élucider quelques phénomènes sociaux, tels
que la popularité sans précédent du livre 50 Shades of Grey auprès des femmes », affirme
monsieur Joyal. « Le sujet est passionnant! Nous sommes en train de mener des analyses
statistiques avec les mêmes données afin de démontrer l’existence de sous-groupes
homogènes de personnes en fonction de combinaisons de fantasmes. Par exemple les gens qui
ont des fantasmes de soumission rapportent souvent aussi des fantasmes de domination. Ces
deux thèmes ne sont donc pas exclusifs, bien au contraire. Ils semblent aussi associés à un
niveau plus élevé de satisfaction générale. » De nouveaux résultats qui risquent d'être très
prometteurs.
Lexique
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Fantasmes rares
Par exemple : avoir une relation sexuelle avec un jeune enfant ou avec un animal
Fantasmes inhabituels
Par exemple : uriner sur son partenaire sexuel; porter des vêtements du sexe opposé; avoir une
relation avec un prostitué; abuser d’une personne en état d'ébriété
Fantasmes typiques
Par exemple : avoir des relations sexuelles dans un endroit romantique (féminin); recevoir du
sexe oral ou avoir une relation avec deux femmes (masculin).
-30Source : Joyal, Christian. Cossette, Amélie et Vanessa Lapierre. What exactly is an unusual sexual fantasy, Journal of
Sexual Medicine, 2014.
Christian Joyal est professeur titulaire au Département de psychologie de l’Université du Québec à TroisRivières. Il est chercheur à l’Institut Philippe-Pinel et au Centre de recherche de l’Institut universitaire en
santé mentale de Montréal, affiliés à l'Université de Montréal. Une partie de cette étude constitue la thèse
d’honneur en psychologie d’Amélie Cossette (UQTR), qui lui a valu le prix annuel de Best Study Award au
congrès international de l’Association for the Treatment of Sexual Abusers (ATSA, Chicago, 2013).
Renseignements
Catherine Dion
Service des communications – Institut universitaire en santé mentale de Montréal
Téléphone : 514 251-4000, poste 2986 - Cellulaire : 514 235-4036
[email protected]