La schizophrénie, une maladie du système immunitaire ?
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La schizophrénie, une maladie du système immunitaire ?
Date : 08/12/2015 Heure : 06:32:12 Journaliste : Anne Jeanblanc www.lepoint.fr Pays : France Dynamisme : 434 Page 1/2 Visualiser l'article La schizophrénie, une maladie du système immunitaire ? Le Dr Groc reçoit le prix Marcel Dassault pour ses travaux sur les liens entre les altérations immunologiques et certains troubles psychotiques. Bientôt de nouveaux traitements pour les patients schizophrènes ? © BONESS/IPON-BONESS/SIPA Il existe des « liaisons dangereuses » entre le dérèglement du système immunitaire et certaines affections psychiatriques. C'est ainsi que le Dr Laurent Groc, directeur de recherche au CNRS à l'Institut interdisciplinaire de neurosciences (Université de Bordeaux), a commencé les explications sur ces travaux qui ont été récompensés lundi par le prix Marcel Dassault * pour la recherche sur les maladies mentales (Prix « Projet d'innovation »). Son équipe appartient au réseau de la fondation FondaMental , menée avec beaucoup d'énergie et de ténacité par le Pr Marion Leboyer. Neurophysiologiste de formation, Laurent Groc est à la tête de l'équipe "Développement et adaptation des circuits neuronaux". Le cœur de son activité de recherche consiste à décrypter, à l'aide d'outils innovants, les mécanismes cellulaires et moléculaires impliqués dans le développement physiologique des connexions neuronales ainsi que dans des troubles neuropsychiatriques majeurs comme la schizophrénie. « Les premiers liens entre le système immunitaire et les maladies mentales ont été établis chez un patient qui a développé une psychose, ressemblant fort à une forme de schizophrénie, à la suite d'une encéphalite d'origine infectieuse », rappelle-t-il. C'est ainsi qu'a été envisagée une question jusqu'alors totalement inconcevable : certaines maladies psychiatriques ne seraient-elles pas « des maladies immunologiques comme les autres » ? En d'autres termes, des dysfonctionnements du système immunitaire pourraient être à l'origine de ces affections ou participer à leur développement. Des retombées diagnostiques et thérapeutiques potentiellement considérables Désormais, un lien a pu être établi entre certaines infections (comme la grippe ou la toxoplasmose) et les troubles psychotiques. Dans ces cas, les agents infectieux serviraient de déclencheurs de l'auto-immunité (un fonctionnement anormal, au cours duquel les défenses immunitaires s'attaquent à l'organisme qu'ils sont censés protéger). Ce mécanisme « déviant » peut être identifié grâce à la présence – en très faibles quantités - d'auto-anticorps dans le sang des malades. « Les études que nous avons menées nous ont montré que 20 % des schizophrènes étaient porteurs de tels anticorps », explique le Dr Groc. « Ils sont dirigés contre des récepteurs indispensables à la bonne circulation de l'info dans le cerveau. » Ces premiers résultats, très prometteurs, doivent être consolidés, Tous droits réservés à l'éditeur FONDAMENTAL 264970413 Date : 08/12/2015 Heure : 06:32:12 Journaliste : Anne Jeanblanc www.lepoint.fr Pays : France Dynamisme : 434 Page 2/2 Visualiser l'article essaie de tempérer le Pr Leboyer, même si elle ne cache pas sa foi en cette piste mise à jour par les équipes de FondaMental. Car ces travaux ouvrent la voie à des retombées potentiellement considérables, à la fois diagnostiques et thérapeutiques. Pour préciser la « révolution » thérapeutique potentielle, Laurent Groc prend l'exemple de l'automobile. « Les laboratoires ont d'abord tenté de contrer les effets des auto-anticorps en agissant sur les récepteurs. Mais ce n'est pas en boostant le moteur que la voiture nous amène à destination, si elle ne connaît pas le chemin. Aujourd'hui, nous travaillons sur le GPS, pour que l'info emprunte le bon itinéraire. » Cette voie de recherche est d'autant plus enthousiasmante qu'il existe déjà des médicaments destinées à traiter d'autres maladies auto-immunes. Certes, il faudra un peu de temps pour les « repositionner », mais les premiers résultats sont envisageables dans les années à venir. * L'autre lauréat, pour le prix "Chercheur de l'année", est le Pr Philip Gorwood, chef de service à l'hôpital Sainte-Anne et professeur à l'université Paris Descartes, il est récompensé pour ses travaux sur les addictions et l'identification de la vulnérabilité génétique aux addictions. Tous droits réservés à l'éditeur FONDAMENTAL 264970413