LES INTERACTIONS PERTURBATEURS ENDOCRINIENS
Transcription
LES INTERACTIONS PERTURBATEURS ENDOCRINIENS
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 LES INTERACTIONS PERTURBATEURS ENDOCRINIENSMICROORGANISMES ET MATIERES ORGANIQUES, MOTEURS DE L’ECODYNAMIQUE ET DE L’IMPACT DES POLLUANTS AU SEIN D’ECOSYSTEMES EPURATOIRES PECMICMOG 05 février 2013 Contrat n° 0906C0008 Guillaume BASTIDE, Direction Consommation Durable et Déchets (DCDD), Service Prévention et Gestion des Déchets (SPGD), Angers ADEME 1 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 MEMBRES DU PROJET ISM-LPTC UMR 5255 Université Bordeaux I : Marie-Ange Cordier, Karyn Le Menach, Hélène Budzinski, Edith Parlanti, INERIS Verneuil en Halatte : Selim Ait-Aissa, Nicolas Creusot, Emmanuelle Maillot-Maréchal IRSTEA Antony : Carolina Hoyos-Hernandez, Angeline Guenne, Céline Madigou, Théodore Bouchez, Laurent Mazeas INRA LBE Narbonne : Florence Braun, Glenda Cea-Barcia, Liliana Delgadillo-Mirquez, Nadine Delgenès, Gaelle Gevaudan-Santa Catalina, Anais Bonnafous, Jérôme Hamelin, Hélène Carrère, Dominique Patureau L’ADEME en bref L’Agence de l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie (ADEME) est un établissement public sous la tutelle conjointe du ministère de l’Ecologie, du Développement et de l’Aménagement durables, et du ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche. Elle participe à la mise en œuvre des politiques publiques dans les domaines de l’environnement, de l’énergie et du développement durable. L’agence met ses capacités d’expertise et de conseil à disposition des entreprises, des collectivités locales, des pouvoirs publics et du grand public et les aide à financer des projets dans cinq domaines (la gestion des déchets, la préservation de sols, l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables, la qualité de l’air et la lutte contre le bruit) et à progresser dans leurs démarches de développement durable. www.ademe.fr Copyright : Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayant cause est illicite selon le Code de la Propriété Intellectuelle (art. L122-4) et constitue une contrefaçon réprimée par le Code pénal. Seules sont autorisées (art. 122-5) les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé de copiste et non destinées à une utilisation collective, ainsi que les analyses et courtes citations justifiées par le caractère critique, pédagogique ou d’information de l’œuvre à laquelle elles sont incorporées, sous réserve, toutefois, du respect des dispositions des articles L 122-10 à L 122-12 du même Code, relatives à la reproduction par reprographie. ADEME 2 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 SOMMAIRE RESUME 11 SUMMARY 13 CONTEXTE et OBJECTIFS 14 MATERIEL ET METHODES 19 1. La solution de dopage 19 2. Les boues 19 3. Les dispositifs expérimentaux 21 3.1 Les réacteurs discontinus ou batch 21 3.2 Les réacteurs continus 22 3.2.1 Les réacteurs continus de 5 L : impacts de différentes boues/substrats sur les performances de digestion anaérobie des perturbateurs endocriniens 22 Les réacteurs continus de 400 mL : impacts des communautés microbiennes sur les performances de digestion anaérobie des perturbateurs endocriniens 23 L’extraction des communautés microbiennes issues de trois environnements contrastés 24 L’analyse des matrices 26 5.1 Préparation des échantillons 28 5.2 Paramètres globaux 28 5.2.1 Mesure de la matière sèche et de la matière organique 28 5.2.2 Mesure de la DCO, demande chimique en oxygène 28 5.2.3 L’analyse des gaz de fermentation 28 5.2.4 Mesure de la concentration en Acides Gras Volatils (AGV) 30 5.2.5 Dosage des protéines 30 5.2.6 Dosage des sucres 31 5.2.7 Dosage des lipides 31 5.2.8 Analyse de la densité des boues 31 3.2.2 4. 5. ADEME 3 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires 5.3 Février 2013 Fractionnement du compartiment aqueux 31 5.3.1 Fractionnement par filtration-ultrafiltration 31 5.3.2 Fractionnement par couplage flux/force avec flux asymétrique (Asymmetrical Flow Field-Flow Fractionation-AF4) 32 Analyse fonctionnelle par fluorescence tridimensionnelle du compartiment aqueux 33 6. Extraction et quantification des perturbateurs endocriniens dans les différents compartiments de la boue 35 5.4 7. 6.1 Extraction des PE de la boue totale et du compartiment particulaire 35 6.2 Quantification des HAP 36 6.3 Quantification des NP 37 6.4 Quantification des PCB 37 6.5 Analyse des HAP et des PCB dans le compartiment aqueux 37 L’analyse des communautés microbiennes 40 7.1 Préparation et conservation des échantillons 40 7.2 Extraction de l’ADN total 40 7.2.1 La lyse cellulaire 41 7.2.2 Le lavage 41 7.2.3 L’élimination des impuretés 41 7.2.4 La purification 41 7.3 7.4 ADEME Amplification de l’ADN par PCR 42 7.3.1 Amplification de la région V3 de l’ADNr 16S 42 7.3.2 Amplification du gène de la benzylsuccinate synthase 42 7.3.3 Vérification de l’efficacité d’amplification 43 La CE-SSCP Polymorphism) (Capillary Electrophoresis Single Strand Conformation 45 7.5 Quantification des communautés par PCR quantitative 45 7.6 Pyroséquençage 45 4 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires 7.7 Etude de la dégradation des PE par isotopie au carbone 13 7.7.1 7.7.2 8. 9. Février 2013 45 Maintien des communautés microbiennes adaptées aux conditions de digestion et de dégradation des PE 45 Etude en microcosme 45 L’évaluation des activités « perturbateur endocrinien » 47 8.1 Génération de lignées cellulaires 47 8.1.1 La lignée cellulaire MELN 47 8.1.2 La lignée cellulaire MDA-kb2 47 8.1.3 La lignée cellulaire PLHC-1 48 8.2 Exposition 48 8.3 Lecture des plaques 48 8.3.1 Plaques MELN et MDA-kb2 48 8.3.2 Plaques PLHC-1 48 8.3.3 Analyses des données in vitro 49 Calculs et analyse des données 49 9.1 Le calcul des abattements des PE sur les réacteurs continus et batch 49 9.2 Le calcul des coefficients de partage 50 9.3 Les tests statistiques 50 RESULTATS ET DISCUSSION 52 1. Effet de matrices « boue » différentes sur les propriétés de sorption et sur la dégradation des perturbateurs endocriniens : lien disponibilité-sorptionbiodégradation 1.1 1.2 ADEME 52 Etudes menées en réacteurs continus : influence de matrices « boue » différentes sur les performances de dégradation des PE 52 Etudes menées en réacteurs batch : influence de matrices « boue » différentes sur les performances de dégradation des PE et sur leur distribution dans les compartiments « matière « de la boue 55 1.2.1 Les performances globales de dégradation 56 1.2.2 Distribution des PE dans les compartiments « matière » des boues et lien avec les performances de dégradation des PE 59 5 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 1.2.2.1 Cas des HAP 59 1.2.2.2 Cas des PCB 63 1.2.3 Lien caractérisation du compartiment DCM et distribution des HAP 64 1.2.4 Lien caractérisation du compartiment DCM-distribution des HAPperformances de dégradation 70 2. Evaluation de la composante microbiologique : identification des acteurs microbiens de la dégradation des PE et étude de marqueurs fonctionnels de la dégradation 74 2.1 Les performances globales et de dégradation des PE 74 2.1.1 Les HAP 74 2.1.2 Les PCB 76 2.1.3 Le NP 77 2.2 Les changements d’abondance des communautés microbiennes 79 2.3 Les changements de diversité et de structure des communautés microbiennes 80 2.4 L’expression potentielle des fonctions de dégradation des PE 87 2.4.1 2.4.2 3. Etude du potentiel de dégradation du phénanthrène par les microorganismes issus d’un réacteur de méthanisation 87 Etude du potentiel de dégradation de molécules aromatiques 90 Evaluation du potentiel toxique : lien entre dégradation des PE, leur distribution dans les compartiments « matière » des boues et l’expression de leur toxicité 93 3.1 Distribution des PE dans les compartiments « matière » 93 3.1.1 Influence des caractéristiques des molécules sur la distribution des PE 93 3.1.2 Influence des paramètres de fonctionnement des réacteurs sur la distribution des PE dans les compartiments 94 3.2 Activité des PE dans les différents compartiments « matière » des boues 96 CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES ADEME 103 6 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 LISTE DES TABLEAUX ET FIGURES Tableau 1 : Caractéristiques des molécules étudiées. Tableau 2 : Temps de rétention (min) des HAP par HPLC et couples de longueurs d’onde d’excitation/émission (nm) utilisés pour leur détection par fluorescence. Tableau 3 : Rendements de quantification des HAP en SPME obtenus suivant les différentes méthodes de calcul. Tableau 4 : Composition des échantillons standards (eau ou surnageant). Tableau 5 : Amorces utilisées lors de l'étude des différentes communautés microbiennes. Tableau 6 : Conditions expérimentales des tests isotopiques. Tableau 7 : Ligands de référence et concentrations (en nM) effectives (EC50) et saturantes (témoin positif dans le bioessai). Tableau 8 : Performances de digestion des 5 bioréacteurs anaérobies alimentés avec des boues différentes. Tableau 9 : Caractéristiques des 5 boues/substrats. Tableau 10 : Distribution du pyrène, chrysène et indéno(1,2,3,c,d)pyrène dans les compartiments des trois mélanges initiaux en ng/L. Tableau 11 : les variables PLS utilisées pour le modèle KDCM. Bloc X, variables explicatives, bloc Y variable à expliquer le KDCM pour 13 HAP dans chaque mélange. Temps initial, t0, temps final, tf. Tableau 12 : les variables PLS utilisées pour le modèle explicatif de la dégradation des HAP. Bloc X, variables explicatives, bloc Y variable à expliquer, l’abattement total des 13 HAP dans chaque mélange. Tableau 13 : les variables PLS utilisées pour le modèle prédictif de la dégradation des HAP. Bloc X, variables explicatives, bloc Y variable à expliquer, l’abattement total des 13 HAP dans chaque mélange. Tableau 14 : Performances globales (matière et biogaz) mesurées sur les réacteurs inoculés par les trois communautés microbiennes différentes. Moyenne à l’état d’équilibre sur les triplicats. Tableau 15 : Abattements en PCB à l'équilibre dans les différents réacteurs. Tableau 16 : Données de diversité obtenues par pyroséquençage du gène d’ADNr 16S sur les 9 réacteurs inoculés avec les 3 inocula à l’état d’équilibre (TSH 5). Nb : nombre, Nb seq: nombre de séquences. Tableau 17 : Comparaison entre concentrations en HAP et activité HAP-like dans les boues digérées DSol et DBoue. Tableau 18 : Activités HAP-like calculées et mesurées (en BaP-EQ) dans la boue totale et dans les compartiments (particulaire et aqueux) à l’état d’équilibre Figure 1 : La tri-interaction matrice-microorganisme-polluant(PE) au sein d’un bioréacteur. Figure 2 : Programme de travail Figure 3 : Les différentes matrices « boues » utilisées au cours de l’étude et les dispositifs expérimentaux associés. Figure 4 : Représentation des expérimentations menées en batch pour un mélange substrat/inoculum. Figure 5 : Représentation des réacteurs de 5 L alimenté en continu automatiquement. Figure 6 : Représentation des réacteurs de volume utile de 400 ml alimentés et soutirés tous les jours manuellement sous conditions stériles. Figure 7 : Schéma des étapes d'établissement du gradient (Barra Caracciolo et al., 2005). Figure 8 : Les analyses réalisées sur les échantillons de boue. Figure 9 : (a) Technologie des flux croisés. (b) Elution, x: petites particules; y: grosses particules. Figure 10 : Coordonnées des régions de fluorescence obtenues grâce au logiciel Image J et les groupes fonctionnels des régions selon Chen et al. (2003). Figure 11: Système SPME (Cea-Barcia, 2012). Figure 12 : Analyses en bioessais in vitro. Figure 13 : Les différents compartiments de la matrice séparés selon la taille des particules les constituant. Le compartiment « particulaire » avec des particules de taille supérieure à 1,2 µm obtenu après centrifugation de l’échantillon de boue (culot). Le compartiment « dissous colloïdale » ou « DCM » avec des particules de taille inférieure à 1,2 µm obtenu après centrifugation de la boue et filtration du surnageant à 1,2 µm. Par filtration et ultrafiltration du surnageant, obtention des fractions F1 à F4. Présence du PE (HAP) sous forme libre ou associé à la DCM, la somme de ces deux compartiments donnant le compartiment aqueux déterminé par extraction liquide-liquide ou SPE ou SPME. Présence du polluant associé au particulaire déterminé par extraction sous solvant. La somme des trois compartiments donne la teneur totale qui est mesurée par extraction sous solvant sur l’échantillon brut. ADEME 7 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 14 : Performances de dégradation des polluants (HAP, PCB, NP) obtenues sur 5 réacteurs continus alimentés avec 5 substrats différents. Pour chaque composé, la p-valeur entre 5 jeux de données (3 pour PCB) est indiquée en italique. Les abattements sont considérés comme statistiquement différents pour une p-valeur inférieure à 0.05. Figure 15 : (a) Les performances ‘polluant’ mesurées versus les performances modélisées par la PLS (régression linéaire des moindres carrés) établissant un lien entre les performances de dégradation des polluants et les caractéristiques des boues/substrats et des polluants. Les coefficients centrés et réduits des variables ‘boue’ (noirs) et ‘polluant’ (gris) donnés par l’analyse PLS (b).VFA : acides gras volatils, n6C : nombre de cycles à 6 carbone, n5C : nombre de cycles à 5 carbone, nOH : nombre de groupement OH, nCl, nombre de chlore. Figure 16 : Production de méthane au cours des tests batch avec un ratio inoculum-boue de 80/20 en poids avec et sans polluant. HLSS=boue secondaire forte charge. Figure 17 : Pertes abiotiques observées dans un réacteur batch avec un ratio inoculum-boue de 80/20 en poids. Aucune activité biologique n’est observée, absence de production de biogaz et aucune réduction de la matière sèche. Figure 18 : Performances ‘digestion’ (A et B, production de méthane et abattement en MS) et ‘polluants’ (C et D, abattements mesurés via les concentrations totales) dans les réacteurs batch en fonction de 3 substrats différents, comparés deux à deux. HLSS=boue secondaire forte charge, HLSS-1KDa (HLSS avec présence uniquement de colloïdes inférieurs à 1kDa) et boue secondaire faible charge-LLSS. Pour chaque composé, la p-valeur entre les 2 jeux de données est indiquée en noir. Les abattements peuvent être considérés comme significativement différents pour des p-valeurs inférieures à 0.05. Figure 19 : Cinétique de dégradation de l’indéno(1,2,3cd)pyrène (concentration totale) au cours de la digestion de la boue HLSS. Figure 20 : Abattements totaux pour la somme des 7 PCB et pour le PCB180 mesurés sur les réacteurs batch en fonction des 3 substrats. Figure 21 : Distribution des HAP dans les compartiments des boues HLSS, HLSS-1KDa et LLSS au temps initial. A et B ratio CPE,free sur CPE,total, B et C ratio CPE,aq sur CPE,total. Figure 22 : Evolution des concentrations libre, DCM et totale sur la boue LLSS. A : phénanthrène. B : pyrène. C : indéno(1,2,3,c,d)pyrène. L’écart type est calculé sur les duplicats réacteurs. Figure 23 : logKDCM des HAP. A : mélange initial, B : mélange final (53 jours). Figure 24 : logKpart des HAP. A : mélange initial, B : mélange final (53 jours). Figure 25 : Evolution des concentrations totale et aqueuse du PCB180 pour le mélange HLSS-1KDa (A) et LLSS (B). Figure 26 : Spectre de fluorescence 3D des phases aqueuses des trois boues HLSS, HLSS-1KDa et LLSS au temps initial. Figure 27 : Le modèle PLS pour le KDCM. Valeurs prédites en fonction des valeurs mesurées, validation croisée de facteur 4 (a). Coefficients centrés et réduits des variables explicatives (b). Figure 28 : Log KDCM en fonction du log Kow pour chaque HAP présents dans les sous-compartiments F1 (0,1-1,2 µm), F2 (10 kDa-0,1 µm), F3 (1-10 kDa) et F4 (<1 kDa). Figure 28 : Figure 29 : Figure 30 : Abattement moyen (triplicat) du phénanthrène au cours du temps dans les réacteurs continus ensemencés avec les trois communautés microbiennes extraites de la boue (gris clair), du sédiment PCB (gris moyen) et du sol HAP (noir). Dynamique similaire pour tous les HAP. Figure 31 : Abattement moyen (triplicat) à l’équilibre pour chaque groupe de HAP séparé selon leur poids moléculaire, dans les réacteurs continus ensemencés avec les trois communautés microbiennes extraites de la boue (gris clair), du sédiment PCB (gris moyen) et du sol HAP (noir). Figure 32 : Dégradation des PCB tout inoculum confondu en fonction de leur degré de chloration. Figure 33 : Dynamique des abattements en NP au cours du temps (indiqué en Temps de Séjour Hydraulique) pour les trois écosystèmes sol (blanc), sédiment (gris) et boue (noir). Figure 34 : Evolution des concentrations en NP mesurées en µg/L de boue. Figure 35 : Abondance des Bactéries et des Archées au cours du temps pour les trois communautés microbiennes extraites de la boue (noir), du sédiment PCB (gris moyen) et du sol HAP (blanc). Figure 36 : Corrélation entre le ratio archées/bactéries (%) et la production de méthane calculés à l’équilibre sur l’ensemble des 9 réacteurs. Figure 37 : Empreintes moléculaires CE-SSCP des bactéries (gauche) et des Archées (droite) pour chaque écosystème (profil moyen des triplicats) à l’équilibre. Figure 38 : Influence de l’origine de l’inoculum (sol , sédiment , boue ) sur les différences de structure génétique des communautés bactéries (gauche) et archées (droite). L’ACP explique 65,4 % ADEME 8 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 de la variance des empreintes moléculaire de bactéries et 74,3 % de la variance des empreintes moléculaire d’Archées obtenues par CE-SSCP. Figure 39 : Les corrélations entre la structure des communautés bactéries (gauche) et archées (droite) et les paramètres de fonctionnement des réacteurs. Figure 40 : Représentation des variables discriminantes sur les analyses en composantes principales (ACP) obtenues à partir des données de CE-SSCP (à gauche) et des espèces par pyroséquençage (à droite). L’ACP explique 92.0 % de la variance des empreintes moléculaire de bactéries (CE-SSCP) et 92,3 % de la variance des proportions d’espèces obtenues par pyroséquençage. Les réacteurs dont l’inoculum provient du sol, du sédiment, de la boue sont représentés, respectivement par les symboles suivant : , , . A gauche les flèches représentent les pics les plus discriminants et à droite les espèces les plus discriminantes parmi les 20 plus abondantes. Figure 41 : Représentation des paramètres de fonctionnement discriminants sur les analyses en composantes principales (ACP) obtenues à partir des données de SSCP (à gauche) et des proportions des différentes espèces obtenues par pyroséquençage (à droite). L’ACP explique 92 % de la variance des empreintes moléculaire de bactéries (SSCP) et 92,3 % de la variance des proportions d’espèces obtenues par pyroséquençage. Les réacteurs dont l’inoculum provient du sol, du sédiment, de la boue sont représentés, respectivement par les symboles suivant : , , . Les flèches représentent les paramètres de fonctionnement les plus discriminants. Figure 42 : Proportion de chaque espèce d’Archées par rapport au nombre total d’Archées présentes dans les réacteurs. Figure 43 : Proportion dans chaque réacteur des 20 espèces les plus abondantes. 13 Figure 44 : Fractionnement isotopique (δ C en ‰) du biogaz produit au cours du temps par les microcosmes aux trois concentrations différentes de phénanthrène. Les symboles représentent le fractionnement du CO2, les celui du CH4. En bleu, sont présentés les résultats des dupliqua des 13 incubations avec le phénanthrène marqué au C, en orange ceux obtenus avec le phénanthrène non marqué. Figure 45 : Répartition des HAP dans le compartiment particulaire et aqueux de la boue et dans les fractions libre et DCM du compartiment aqueux. Les proportions sont calculées par rapport au total des concentrations en polluant. Les polluants sont représentés de gauche à droite (du plus foncé au plus clair) par ordre croissant de log Kow. Figure 46 : Répartition des HAP dans la fraction libre et DCM au sein du compartiment aqueux. Les proportions sont calculées par rapport au total des concentrations en polluant dans le compartiment aqueux. Figure 47 : Comparaison de quatre activités "perturbateur endocrinien" représentatives mesurées dans des extraits de micropolluants issus des différents compartiments de chaque réacteur à l’équilibre. Activité mesurée dans la boue d’alimentation des réacteurs dopés (barre hachurée), dans les boues digérées par les réacteurs inoculés par des microorganismes provenant du sol (barre blanche), des sédiments (barre grise) et de la boue (barre noire). n.a., non analysée, ; n.d., non détectée. ADEME 9 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 LISTE DES ABBREVIATIONS ACP : analyse en composantes principales AF4 : fractionnement par couplage flux / force avec flux asymétrique AGV : acides gras volatils ASE : système accéléré d’extraction haute température, haute pression CE-SSCP : Capillary Electrophoresis-Single Strand Conformation Polymorphism DCO : demande chimique en oxygène DCM : compartiment dissout/colloïdal MS/MV : matière sèche/matière volatile HAP : hydrocarbure polycyclique aromatique HLSS : boue secondaire forte charge HLSS-1kDa : boue secondaire forte charge dont le surnageant a été filtré et ultrafiltré jusqu’à 1 kDa LLSS : boue secondaire faible charge NP : nonylphénol PCB : polychlorobiphényls PCR : réaction de polymérisation en chaîne PE : perturbateur endocrinien PLS : régression linéaire des moindres carrés SPME : microextraction sur phase solide ADEME 10 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 RESUME Contexte : La pollution de l’atmosphère, des sols et des eaux par les activités humaines (industrielles, agricoles..) fait l’objet d’une prise de conscience récente mais de plus en plus accentuée au regard de près de deux siècles de développement économique. Si beaucoup de données existent sur la présence des polluants dans notre environnement, leur dynamique et impact sur le long terme restent cependant difficilement prévisibles. Les systèmes de dépollution ne dérogent pas à cette constatation : depuis une vingtaine d’années, il est fréquent d’avoir des publications sur la présence des polluants dans les eaux résiduaires ou industrielles polluées, dans les eaux traitées et dans les boues, mais rares sont celles décrivant les mécanismes gouvernant le devenir de ces composés. Or, ces systèmes épuratoires constituent de bons modèles car ils sont à la fois un point de convergence d’une multitude de polluants faiblement concentrés vers notre environnement, mais aussi ils sont le siège d’une somme de processus qu’il est possible de mieux décrire, de gérer et d’optimiser en jouant sur divers paramètres biotiques et abiotiques. Objectifs : le présent projet vise à contribuer à l’évaluation et à la réduction des risques environnementaux de pollution chimique de l’environnement, associés aux perturbateurs endocriniens (PE) présents dans des produits résiduaires utilisés en agriculture. Cet objectif général se décompose en objectifs spécifiques liés à l’une des composantes du risque, l’exposition. Cette exposition sera caractérisée via le développement et la validation d’indicateurs de la disponibilité des polluants. Ces indicateurs seront identifiés au travers de l’observation multi-échelle des interactions entre les polluants, les microorganismes (le vivant) et l’environnement matriciel dans lequel ils évoluent. En effet, c’est de l’interaction de ces trois composantes que naît la dynamique des polluants dans un environnement tel que celui des procédés de traitement. Une meilleure compréhension de ces interactions et des processus qui y sont liés nous permettra de mieux appréhender la dynamique des polluants, de la modéliser et contribuera significativement à l’évaluation des risques (indicateurs de disponibilité) et à leur réduction au travers de la proposition de stratégies de traitement. Pour ce faire, nous proposons de développer une approche intégrée combinant les visions des microbiologistes, chimistes-géochimistes et écotoxicologues au cœur d’un procédé modèle de digestion anaérobie traitant des boues urbaines multi- et faiblement contaminées en PE. Cibles : acteurs du traitement et de la gestion des déchets Sorties : -Outils de caractérisation des compartiments matière des boues (aqueux, sous compartiments aqueux et particulaire) : utilisation de la méthode de f ractionnement par filtration/ultrafiltration et par couplage flux / force avec flux asymétrique (AF4) afin de subdiviser le compartiment aqueux des boues en sous-compartiments selon une large gamme de taille des éléments les constituant. Utilisation de la fluorescence tridimensionnelle pour caractériser la nature des molécules présentes dans les compartiments et sous-compartiments aqueux des boues. -Outils de spéciation (localisation) des polluants organiques : utilisation de la technique de microextraction sur phase solide (SPME) afin de quantifier les PE dans le compartiment aqueux des boues. Quantification possible des fractions libre et sorbée à la matière dissoute et colloïdale des compartiments et sous-compartiments aqueux des boues pour les HAP seulement. -Lien spéciation/dégradation/disponibilité des micropolluants : le compartiment aqueux (libre et sorbé à la matière dissoute et colloïdale) des boues semble être le compartiment disponible pour la dégradation anaérobie des HAP et dans ce compartiment, les HAP sont très affins des colloïdes de grosse taille dont la nature serait proche de molécules type mélanoïdines, acides humiques, lignocellulose. -Développement d’un modèle prédictif pour la disponibilité des micropolluants (HAP) dans les boues : la caractérisation du compartiment aqueux par fluorescence tridimensionnelle permet d’évaluer l’affinité de ce compartiment pour les HAP et l’affinité du compartiment particulaire pour les petits et moyens HAP. A partir des affinités, il est possible de connaitre la répartition des HAP dans les compartiments de la boue et donc d’évaluer le compartiment disponible. - Développement d’un modèle prédictif pour l’élimination des micropolluants (HAP) par digestion anaérobie : en couplant les données de spéciation/localisation des micropolluants aux données de caractérisation par fluorescence tridimensionnelle du compartiment aqueux, il est possible d’évaluer a priori l’abattement en HAP au cours de la digestion. ADEME 11 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 -Développement d’une méthode originale et efficace d’extraction des communautés microbiennes sur matrice complexe. -Etablissement d’un lien implicite entre l’élimination anaérobie des HAP et la réalisation des premières étapes de la digestion anaérobie des boues (hydrolyse, acidogénèse, acétogénèse) via un cométabolisme. -Elimination anaérobie des HAP indépendante de la structure génétique des communautés microbiennes majoritaires. -Difficulté d’identification des microorganismes responsables de la biodégradation des PE en condition anaérobie : la méthodologie SIP utilisée pour identifier des communautés dégradant un HAP n’a pas abouti par l’absence d’observation de la minéralisation du composé. Ceci vient confirmer la difficulté d’étudier des fonctions dites minoritaires dans un écosystème complexe ou des fonctions qui sont peut être réalisées par des communautés majoritaires mais de façon non spécifiques (lien avec le cométabolisme observé pour la dégradation de HAP sous condition anaérobie). -Evaluation de la biodégradabilité des PE en condition anaérobie par utilisation de marqueurs fonctionnels existants : absence de détection du gène impliqué dans la dégradation anaérobie de molécules mono-aromatiques. -Intérêt des approches couplées de chimie et d’évaluation d’activité type « perturbateur endocrinien » dans tous les compartiments et sous-compartiments des boues (total, aqueux, particulaire) : pas de lien entre élimination des HAP et perte d’activité supposant l’existence de composés actifs pour les modèles cellulaires, soit sous-produits de dégradation des HAP ou de la matière organique, identification potentielle des PE ou toxiques résiduels à suivre dans le cadre de l’optimisation de procédés de dépollution et dans les procédures de réglementation de composés Mots-clés : micropolluants organiques, biodégradation, sorption, spéciation, multipollution, digestion anaérobie, communauté microbienne ADEME 12 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 SUMMARY The overall goal of this project is to better understand mechanisms driving the dynamics of pollutants during solid waste treatment, particularly anaerobic systems. The released quantity in the environment and the impact of pollutants on biota will deeply depend on this treatment dynamic. For this dynamic evaluation, an integrated study will be developed using combined and complementary approaches coming from the geochemical, chemical, microbial and ecotoxicology scientific domains integrated within a mathematical modelling framework. Indeed, it appears nowadays important to consider the triple interaction between the pollutants, the matrix components and the biota (target organisms like microorganisms) in order to efficiently evaluate the fate and impact of pollutants. In contrast to usual approaches, we will define or develop common tools to deeply characterise the matrix (in relation with pollutants interaction), the pollutants (total and available fraction) and the target organisms (with markers of activity). One of the main breakthroughs will be to combine the different scientific points of view of the overall scientific disciplines. Apart from this, any methodological development requires some extent of unlocking. Regarding biomarkers of degrading activity for microorganisms, particularly under anaerobic condition, it is a big challenge because very little is known and we need to overcome this. Regarding the speciation/localisation, we aim to propose unambiguous relationships between speciation/location of contaminants and biota response in term of degradation and toxicity. It implies to apply or develop analytical protocols allowing describing the speciation/location of contaminant in a complex matrix and its fate after ageing. Keywords : organic pollutant, biodegradation, sorption, speciation, multipollution, anaerobic digestion, microbial community, ADEME 13 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 CONTEXTE et OBJECTIFS Dans le contexte de mise en conformité avec les exigences européennes de 2015 (DCE 2000/60/EC), l’élimination des micropolluants organiques est devenue aujourd’hui un objectif de santé publique et de protection des milieux récepteurs fragiles pour un développement durable. Les procédés de traitement, s’ils sont un point de dissémination potentielle, sont aussi un point d’action où la richesse des procédés microbiologiques et/ou physicochimiques peut permettre d’agir sur les concentrations et les formes des PE avant rejet. Or, les recherches menées actuellement montrent que les procédés de traitement participent avec une efficacité variable à l’élimination de ces PE : certains composés traversent les systèmes sans modification et persistent dans les eaux traitées (composés pharmaceutiques tels que l’acide clofibric et la carbamazépine), ou s’accumulent par sorption sur les boues (PCB, HAP, dioxines, esters de phthalate, nonylphénols, éthinylœstradiol), ou sont biodégradés (17β-œstradiol, nonylphénols éthoxylés, esters de phthalate), certains sont aussi transformés en sous-produits plus toxiques (les nonylphénols éthoxylés en nonylphénols). A ce stade, il semble très difficile de relier les propriétés physico-chimiques et le devenir (un même composé ayant des abattements variables d’une station à une autre), voire même de relier le type de système épuratoire et le devenir, ceci souligne la limitation des approches QSAR/QSBR (Okey et Stensel, 1996). Clara et al. (2005) font cependant l’hypothèse que la biodégradation est favorisée par des temps de séjour des solides importants et des conditions de potentiel d’oxydo-réduction larges. Il semblerait donc que les capacités d’élimination de ces composés (par biodégradation ou adsorption) soient à la fois liées au potentiel microbiologique et au type de matrice (boues d’épuration, matières en suspension, colloïdes) au sein de laquelle évoluent ces processus. Les travaux menés au Laboratoire de Biotechnologie de l’Environnement (INRA, Narbonne) sur le devenir des micropolluants au cours de la digestion anaérobie de boues et sur le continuum boue-solplante convergent vers la même hypothèse. En effet, il a été constaté lors des expériences menées en digestion anaérobie sur des boues contaminées en nonylphénols éthoxylés, que la dégradation de ces composés est intimement liée au type de matrice : une boue mixte est plus favorable à la dégradation qu’une boue secondaire. L’hypothèse est ici double : de par leur différence de propriétés physico-chimiques, soit les matrices présentent des potentiels d’adsorption différents permettant une disponibilité différente aux microorganismes, soit elles influent sur le développement différentiel de métabolismes de dégradation (HernandezRaquet et al., 2007 ; Patureau et al., 2008) ou bien une combinaison des deux mécanismes. De plus, les études menées en lysimètres avec des plantes, des sols et des produits résiduaires différents (boues « naturellement » contaminées en micropolluants) ont montré l’importance du type de matières organiques dans le transfert des dits polluants vers les plantes (Mougin et al., 2006). Que l’on se positionne à l’échelle du procédé ou à celle du continuum, il semble alors important de considérer la triple interaction matricemicroorganismes-micropolluants afin d’améliorer la compréhension du devenir de ces composés. Cette tri-interaction est schématisée sur la figure 1. ADEME 14 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Matrice UTILISATION DE LA MATRICE COMME SUBSTRAT METABOLISME BASAL DE LA COMMUNAUTE SORPTION COMETABOLISME par rapport au métabolisme des CTO COMPETITION SUBSTRAT BIODISPONIBILTE BIODEGRADATION DES COMPOSES Toxicité Structure du consortium PE Microorganismes POTENTIEL de BIODEGRADATION Présence des fonctions et caractéristiques des acteurs Figure 1 : La tri-interaction matrice-microorganisme-polluant(PE) au sein d’un bioréacteur. La matrice joue à la fois (i) sur le développement d’un métabolisme microbien basal souvent nécessaire à l’expression d’un métabolisme vis à vis des composés (co-métabolisme) et (ii) sur les interactions avec le micropolluant. Ces interactions matrice-micropolluant sont souvent abordées sous l’angle de l’établissement d’équilibres et cinétiques d’adsorptiondésorption, que l’on relie d’une part aux propriétés physico-chimiques des composés, particulièrement le coefficient de partage octanol-eau (Kow) et d’autre part à celles de la matrice (présence de groupes fonctionnels, tension de surface…). De cette interaction, nait la disponibilité des PE, disponibilité envers les microorganismes capables de les dégrader ou disponibilité envers tout autre organisme cible pouvant présenter une réaction toxicologique envers ces PE. Ces interactions matrice-micropolluant sont aussi abordées selon le type de chimie utilisé (méthodes d’extraction et de dosage), chimie souvent très drastique afin d’avoir accès à une quantité « totale » et donc éloignée de la fraction dite disponible aux microorganismes. De plus, les microorganismes interagissent avec la matrice en la transformant et en modifiant du même coup les relations matrice-micropolluant. Pour finir, une fraction des microorganismes développe un métabolisme particulier vis à vis des polluants permettant ainsi leur dégradation. Ces différentes interactions sont souvent abordées dans la littérature mais de façon indépendante. Les géo-chimistes s’intéressent aux interactions matrice-polluant sans se soucier de l’existence d’un compartiment biologique, acteur ou cible, qui pourrait interagir et modifier ces interactions. A l’inverse, les auteurs s’intéressant à la biodégradation (potentiel microbiologique, flore microbienne..) soulignent les problèmes de disponibilité comme facteur limitant, jouent sur des paramètres de type procédé (ajout de surfactant, de solvant, augmentation de la température) pour l’améliorer sans pour autant comprendre les mécanismes intrinsèques sur lesquels ils jouent. ADEME 15 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Certains auteurs ont cependant relié biodégradabilité et biodisponibilité dans le cas particulier de la dégradation d’HAP sur milieu hypercontaminé en utilisant des méthodes chimiques telles les extractions TENAX (Cornelissen et al., 1998) ou cylcodextrine (Reid et al., 2000). De plus, très peu de données existent sur une matrice type boue qui contient une multitude de polluants présents à faible concentration, qui n’est ni un solide (sol), ni un liquide, mais dans lequel les fractions organiques dissoutes, colloïdales et particulaires se côtoient en permanence, évoluent et interagissent avec les polluants et les microorganismes. Ce projet vise à développer une approche intégrée reliant disponibilité-biodégradationtoxicité en combinant les visions des microbiologistes, des chimistes, des géo-chimistes et des écotoxicologues ainsi qu’une approche génie ou ingénierie des procédés afin (i) de mieux comprendre les processus qui gèrent le devenir des composés et (ii) de déterminer le ou les critères pertinents permettant d’évaluer a priori ce devenir pour enfin (iii) orienter ce devenir dans un contexte de réduction des risques. L’une des originalités de ce projet repose sur la prise en compte de la multicontamination à faible teneur des boues, représentative des conditions réelles. Nous proposons de travailler avec des familles chimiques représentatives des principaux PE présents dans les boues, ciblant dans chaque famille des composés spécifiques. Nous travaillons sur : des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP dont fluorène, phénanthrène, anthracène, fluoranthène, pyrène, benzo(a)anthracène, chrysène, benzo(b)fluoranthène, benzo(k)fluoranthène, benzo(a)pyrène, dibenzo(a,h)anthracène, benzo(g,h,i)perylène, indéno(1,2,3,cd)pyrène), des polychlorobiphényls (PCB dont PCB28, PCB52, PCB101, PCB118, PCB138, PCB153, PCB180), un composé phénolique (le nonylphénol -NP). Sur les études en bioréacteur, toutes ces molécules seront présentes simultanément à des teneurs représentatives de conditions réelles. Par contre, dans le cas des études de population et de fonction microbiennes, nous serons amenés à faire des choix qui seront guidés par les performances épuratoires obtenues sur les différents PE et par la disponibilité de ces molécules marquées au carbone 13. De plus, ces familles ont été choisies car : - elles nous permettent d’avoir une large gamme de paramètres physico-chimiques : solubilité, Kow, masse molaire, substituants, nombre de cycles aromatiques, chaîne aliphatique, isomérie et charge, ce qui dans l’élaboration des modèles permettra d’être le plus exhaustif possible ; - les molécules de références sont toutes ciblées par des normes européennes et des arrêtés nationaux ; - la quantification exhaustive (extraction des matrices solides et liquides) est bien maîtrisée par les différents partenaires, les analyses sont souvent multirésidus et permettent donc d’avoir une somme de composés en même temps ; - d’un point de vue microbiologique, nous avons déjà des pistes de recherche quant à l’expression de la biodégradation sous diverses conditions anaérobies selon le type de matrice. En effet, il a été montré que certains composés tels que les HAP, PCB, et NP (Trably et al., 2003; Christensen et al., 2004; Patureau et Trably, 2006; Benabdallah ElHadj et al., 2006; Patureau et al., 2008) pouvaient se dégrader en condition anaérobie méthanogène et que les caractéristiques des procédés (mésophile ou thermophile, temps de séjour hydraulique, type de boue...) avaient une influence non négligeable sur leur biodégradation. Par contre, les PE appartenant à des familles de polluants organiques très diverses, il est difficile d'énoncer des règles générales quant à leur biodégradation lors de la digestion anaérobie. Très peu de données existent dans la littérature sur les microorganismes et les voies métaboliques mis en jeu pour la dégradation anaérobie des PE étudiés dans ce projet (Patureau et Hernandez-Raquet, 2008), ce qui souligne l’enjeu et l’importance de telles études. Le projet a pour objet central le procédé de digestion anaérobie en tant que réaction support de la dégradation de micropolluants organiques et consistera en des allers et retours entre ADEME 16 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 les échelles procédés (performances épuratoires sur bilan massique) et processus (adsorption et biodégradation). Afin de pouvoir comparer les systèmes entre eux, les polluants seront ajoutés aux diverses matrices à des teneurs proches de la réalité, soit entre 5 et 10 µg/gMS. Les objectifs sont de : - caractériser au mieux matrices, polluants et microorganismes, - faire varier la nature de l’un d’entre eux et en observer l’impact sur la disponibilitébiodégradabilité-toxicité des PE : faire varier la nature de la matrice et donc la disponibilité des PE à potentiel microbien constant ou faire varier les populations microbiennes pour une matrice donnée à disponibilité constante, - de croiser et d’intégrer l’ensemble de ces informations (par technique de régression des moindres carrés partiels-PLS) et d’en faire ressortir des critères pertinents de disponibilité. Il est ici nécessaire de rendre générique les informations obtenues sur notre écosystème modèle à d’autres écosystèmes ouverts comme le sol, les sédiments. Les caractéristiques à évaluer des acteurs de la tri-interaction sont : - une caractérisation de la matière organique en relation avec ses capacités d’adsorption des PE : caractérisation chimique, physique et fonctionnelle des différents compartiments de la matrice, le particulaire, le colloïdal et le soluble, par utilisation des méthodologies classiques (sucres, protéines, lipides, acides humiques) et spectrométriques (fluorescence 3D) couplée à une caractérisation physique (porosité, charge de surface, granulométrie), - un panel de PE caractérisés selon des gammes larges de solubilité, Kow, masse molaire, substituants, nombre de cycles aromatiques ou chaînes aliphatiques, isomérie, charge, et pour lesquels seront évalués des cinétiques et équilibres de sorption. Ces PE seront analysés à la fois avec les méthodes d’extraction permettant l’analyse de leurs quantités totales, mais on évaluera aussi la spéciation/localisation dans les différents compartiments matriciels, - une évaluation d’un potentiel à biodégrader via l’identification des acteurs microbiens (par SIP et nanosims) et l’expression de fonctions spécifiques de dégradation déjà connues. Le métabolisme des polluants organiques sous anaérobiose est largement moins fourni que celui sous aérobiose. Cependant, deux types d’enzymes sont actuellement utilisés comme biomarqueurs d’activité dans des écosystèmes hypercontaminés par des composés aromatiques : la benzylsuccinate synthase et les déhalogénases (Winderl et al., 2007 ; Lee et al., 2006). Cette évaluation sera corrélée à la mesure des performances d’abattement en micropolluants par bilan matière sur les procédés de digestion anaérobie. Le programme de recherche se décompose comme suivant (résumé sur figure 2) : 1. Evaluation de la composante physique : étude des phénomènes de sorption sur différentes matrices boues. 2. Evaluation de la composante microbiologique : identification des acteurs microbiens (microorganismes et gènes) de la dégradation et étude de marqueurs fonctionnels de dégradabilité. 3. Evaluation du potentiel métabolique : impact des caractéristiques de la matrice boue sur la biodégradation des PE 4. Evaluation du potentiel toxique ADEME 17 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Potentiel métabolique Etudier l’impact des caractéristiques de la matrice sur la biodégradation des CTO en réacteurs : Février 2013 Composante physique LBE ISM LBE ISM Matrice de la matrice : approches physique + biochimique + fonctionnelle Boue I / boue II UTILISATION DE LA MATRICE COMME SUBSTRAT Pré-traitement thermique METABOLISME BASAL DE LA COMMUNAUTE Définir un modèle de biodisponibilité en fonction des caractéristiques : du micropolluant SORPTION COMETABOLISME par rapport au métabolisme des CTO COMPETITION SUBSTRAT BIODISPONIBILTE BIODEGRADATION DES COMPOSES Toxicité Structure du consortium PE Microorganismes Potentiel toxique Composante microbienne Mesurer l’abondance des micro-organismes possédant les fonctions de biodégradation des CTO = Biomarqueurs fonctionnels HBAN LBE POTENTIEL de BIODEGRADATION Présence des fonctions et caractéristiques des acteurs Détecter la présence et identifier la nature de substances à activité de perturbateurs endocriniens Approche bio-analytique ISM INERIS Figure 2 : Programme de travail ADEME 18 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 MATERIELS ET METHODES 1. La solution de dopage L’un des objectifs des travaux menés dans le cadre de ce travail est d’explorer l’influence des caractéristiques des boues et des PE sur le devenir de ces derniers lors de la digestion anaérobie de boues contaminées. Dans ce contexte, il est primordial de pouvoir étudier les PE ensemble dans une boue donnée, mais aussi dans plusieurs boues. Or si une même boue contenant tous les HAP/PCB/NP dans des concentrations quantifiables était déjà difficile à trouver, trouver plusieurs boues remplissant ces conditions relèverait de l’impossible. C’est pourquoi la stratégie de dopage de boues a été utilisée pour la mise en œuvre de la digestion anaérobie. Afin de réaliser le dopage, un cocktail concentré en HAP/PCB/NP (liste des composés tableau 1) est préparé à partir de solutions concentrées en chaque composé. L’injection d’un petit volume de ce cocktail dans la boue permet d’atteindre les concentrations souhaitées en micropolluants organiques sans modifier les propriétés de la boue. Les 13 HAP et les 7 PCB étudiés sont commercialisés sous formes de poudre (Dr Ehrenstorfer GmbH). Ces poudres sont individuellement dissoutes à 2 ou 4 g/L dans du dichlorométhane selon les molécules (1 g/L pour l’indéno(1,2,3,c,d)pyrène). Le mélange commercial des isomères du nonylphénol (Interchim) a pour forme un liquide visqueux, qui est dilué dans de l’hexane pour obtenir une solution à 20 g/L. Ensuite un volume donné de ce cocktail de dopage est obtenu par ajout de 1/20 ou 1/40 de ce volume de chacune des solutions individuelles de HAP et PCB, de 1/10 pour le nonylphénol. Après évaporation sous flux sec d’azote, le mélange est repris dans le volume souhaité d’acétonitrile. Les concentrations obtenues dans la solution de dopage sont de 2 g/L de nonylphénol, 100 mg/L de PCB et d’HAP sauf l’indéno(1,2,3,c,d)pyrène présent à 25 mg/L. Ce dernier est présent en concentration moindre car il est très peu soluble dans l’eau et est donc susceptible de se retrouver en condition de saturation lors des opérations de dopage, de plus il est très coûteux. Le dopage est réalisé sous agitation pour permettre une dispersion homogène de la solution de dopage dans l’ensemble de la boue. Le volume de la solution de dopage ajoutée à la boue représente moins de 1/1000 du volume de boue préparée. La concentration de dopage de référence pour les expérimentations est de 5 mgHAP/kgDM, 1,25 mgindeno(1,2,3,c,d)pyrene/kgDM, 5 mgPCB/kgDM et 100 mgNP/kgDM. Cette concentration peut être modulée en fonction des besoins spécifiques d’une expérience. 2. Les boues Trois types de boue, a priori de composition très contrastée, ont été utilisés en tant que substrat tout au long de cette étude. Ces boues ont été prélevées sur trois sites différents. Une boue primaire (PS) est échantillonnée dans la station d’épuration de Muret traitant 33 000 équivalents habitant-EH (Haute-Garonne). Une boue secondaire (HLSS) est obtenue sur la station de Cergy-Pontoise traitant 250 000 EH (Val d’Oise), elle provient d’un procédé à boue activée à très forte charge. Une autre boue secondaire est prélevée sur la station d’épuration de Narbonne traitant 120 000 EH (LLSS), elle est issue d’un procédé à boue activée à très faible charge (temps de séjour hydraulique de 3-5 jours, temps de séjour des solides de 20 jours). Ces trois boues sont congelées avant leur utilisation. Toutes les caractérisations biochimiques se font après cette étape de congélation/décongélation. PS et HLSS ont aussi été diluées avec de l’eau distillée pour avoir une concentration en DCO avoisinant les 20 g/L. ADEME 19 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Tableau 1 : Caractéristiques des molécules étudiées Molécules Fluorene Phenanthrene Anthracene Fluoranthene Pyrene Benzo(a)anthracene Chrysene Benzo(b)fluoranthene Benzo(k)fluoranthene Benzo(a)pyrene Dibenzo(a,h)anthracene Benzo(g,h,i)perylene Indeno(1,2,3,c,d)pyrene Nonylphenol PCB28 PCB52 PCB101 PCB118 PCB138 PCB153 PCB180 Log Kow 4.18 4.57 4.45 5.1 5.32 5.85 5.89 6.57 6.84 6.00 6.70 6.73 6.60 5.76 5.66 5.95 6.38 6.65 7.19 6.86 7.15 M 166 178 178 202 202 228 228 252 252 252 278 276 276 220 257 292 327 327 364 364 399 log S 0,301 0,079 0,114 -0,585 -0,886 -1,959 -2,699 -1,921 -3,097 -2,523 -3,301 -3,523 -1,208 0,778 -0,64 -0,904 -1,475 -1.575 -2,137 -1,959 -2.167 n5C 1 0 0 1 0 0 0 1 1 0 0 0 1 0 0 0 0 0 0 0 0 n6C 2 3 3 3 4 4 4 4 4 5 5 6 5 1 2 2 2 2 2 2 2 nCl 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 3 4 5 5 6 6 7 nOH 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 0 0 0 0 0 0 0 La boue PS est hydrolysée à 160°C pendant 30 min dans un autoclave type Zipperclave pour obtenir TTPS (figure 3). A partir de la boue secondaire HLSS, trois nouvelles boues sont générées en laboratoire (figure 3). La boue HLSS est mélangée à des particules de cellulose (20 µm, Sigma-Aldrich), en proportions DCO/DCO de 50/50, afin de créer la boue secondaire supplémentée en cellulose C-HLSS. La boue HLSS est aussi diluée avec sa propre phase aqueuse préalablement séparée dans des proportions 3V:1V (boue:surnageant), de façon à augmenter le ratio matière dissoute et colloïdale / matière particulaire dans la boue nommée Sup-HLSS. Enfin, la boue composite HLSS-1kDa est fabriquée à partir de HLSS comme suit : HLSS est centrifugée (12500g, 20 min) puis le surnageant est filtré à 1,2 µm (Whatman GF/C) puis à 0,1 µm (membrane PVDF) puis ultrafiltré sur une cellule Amicon (Millipore, membrane cellulose régénérable seuil de coupure 1 kDa), cette fraction est ensuite mélangée avec le culot de la centrifugation afin de reconstituer un mélange boue. La boue HLSS a aussi été utilisée comme substrat des réacteurs anaérobies pour les études portant sur les communautés microbiennes. Pour cela, elle a été stérilisée à 121°C pendant 20 minutes après avoir été diluée avec de l’eau distillée (figure 3). ADEME 20 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires réacteurs continus 5L PS réacteurs batch réacteurs continus 5L HLSS réacteurs batch lyse thermique TTPS ajout de cellulose Février 2013 réacteurs continus 5L C-HLSS réacteurs continus 5L dilution avec son surnageant Sup-HLSS reconstitution particulaire et surnageant filtré et ultrafiltré à 1kDa HLSS-1kDa réacteurs batch diluée et stérilisée HLSS-stérile réacteurs continus 400 mL réacteurs continus 5L LLSS Figure 3: Les différentes matrices « boues » utilisées au cours de l’étude et les dispositifs expérimentaux associés. 3. Les dispositifs expérimentaux Deux types de dispositifs sont utilisés, l’un mené en mode discontinu ou batch et l’autre en continu. Ces dispositifs batch ou continus ont été réalisés et suivis au Laboratoire de Biotechnologie de l’Environnement. 3.1 Les réacteurs discontinus ou batch En mode batch, les expériences de digestion anaérobie sont réalisées dans des fioles à plasma de 300 ml contenant 250 ml d’un mélange défini de boue-substrat et d’un inoculum (figure 4). Cet inoculum est issu d’un digesteur anaérobie continu mésophile de laboratoire alimenté avec HLSS et dopé aux PE (cf § 3.2), il est donc adapté à la fois aux conditions de digestion anaérobie et à la présence de PE. Les fioles sont agitées (100 rpm) et maintenues à 35°C dans une chambre thermostatée. Pour ces expériences, le ratio substrat/inoculum est de 0,5 gDCO-substrat/gOM-inoculum. L’inoculum est concentré de 8 à 18 g/L de matière sèche (DM) pour obtenir un mélange substrat/inoculum avec une concentration totale en DM de 20 g/L. Pour ces expériences, le mélange substrat/inoculum est dopé à 15 mgHAP/kgDM, 3 mgindeno(1,2,3,c,d)pyrene/kgDM, 15 mgPCB/kgDM et 300 mgNP/kgDM. Trois substrats sont testés dans ces conditions : HLSS, BN et HLSS-1kDa. Chaque mélange substrat/inoculum est mené en duplicat. A chaque pas de temps, deux réacteurs sont sacrifiés afin de suivre en fonction du temps l’évolution des concentrations en PE dans les compartiments matière du mélange (total et aqueux). L’analyse de la concentration au temps initial (T0) est faite en duplicat. Des réacteurs témoins sont aussi suivis : un premier réacteur avec le mélange HLSS/inoculum mais non dopé aux PE afin d’observer l’influence de la présence des PE sur la digestion anaérobie et un second réacteur abiotique avec le mélange HLSS/inoculum dopé aux PE et stérilisé par autoclavage à 121°C pendant 20 min. Les paramètres de digestion suivis sur ces réacteurs sont : le volume et la composition du biogaz, les AGV et la matière sèche (DM). ADEME 21 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 4 : Représentation des expérimentations menées en batch pour un mélange substrat/inoculum. Sacrifice de deux fioles à chaque pas de temps. 3.2 Les réacteurs continus Deux types de réacteurs continus sont utilisés, de volume et de conduite différents 3.2.1 Les réacteurs continus de 5 L : impact de différents substrats sur les performances de digestion anaérobie des PE Ces réacteurs de digestion anaérobie sont proches de réacteurs infiniment mélangés en mode de fonctionnement continu et avec cellules libres, similaires aux procédés industriels. Ils possèdent un volume utile de 5L dont le mélange est assuré par un agitateur magnétique (figure 5). Leur double enveloppe permet la régulation de température. Les pompes d’alimentation et de soutirage sont programmées de façon à opérer 6 cycles de soutiragealimentation par jour. Le volume pompé par cycle est calculé par pesée hebdomadaire des réservoirs d’alimentation et de soutirage. Le temps de marche des pompes est ensuite ajusté de façon à appliquer un temps de séjour hydraulique (TSH) donné. Environ 100 cycles se succèdent au cours d’un TSH : ce mode semi-continu est donc assimilable à un mode continu. Les boues d’alimentation sont continuellement agitées dans un souci d’homogénéité et de stabilité de l’alimentation. De même que les boues digérées (soutirage), elles sont maintenues dans une enceinte réfrigérée (4°C) afin de limiter leur évolution entre le renouvellement de l’alimentation et le prélèvement du soutirage effectués à fréquence hebdomadaire. Une sonde Mettler Toledo reliée à un microordinateur permet l’acquisition en ligne du pH. L’effluent gazeux est réfrigéré de manière à limiter les pertes des composés évaporés ou volatilisés depuis le mélange réactionnel. Un septum disposé en aval du réfrigérant permet le prélèvement pour analyse hors ligne de la composition du biogaz. Le biogaz produit traverse ensuite une cartouche ORBO en polyuréthanne (Supelco) dont le garnissage adsorbe les PE volatilisés. Le biogaz atteint ensuite le compteur volumique qui permet de suivre en ligne le volume de biogaz produit. A chaque volume Vimp le traversant, ce compteur génère une impulsion électrique acquise par le microordinateur. Vimp est mesuré au cours de l’étalonnage préalable du compteur. Ce dispositif a permis l’étude de la digestion anaérobie des boues PS, TTPS, HLSS, CHLSS et Sup-HLSS dopées à 5 µgHAP/gDM durant 4 TSH chacune, en conditions mésophiles (35°C, TSH : 20 jours) et pour une charge de 1,2 ± 0.2 gCOD/L/jour. Au démarrage, les réacteurs sont ensemencés avec un digestat industriel mésophile traitant des boues naturellement contaminées en HAP (inoculum). ADEME 22 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Mesure du débit de biogaz Septum de prélèvement du biogaz Cartouche ORBO 4°C Réfrigérant Sonde pH Pompe d’alimentation Pompe de soutirage 35°C Agitateur magnétique Réservoir d’alimentation Enceinte à 4°C Flacon de soutirage Agitateur magnétique Figure 5 : Représentation des réacteurs de 5 L alimenté en continu automatiquement. 3.2.2 Les réacteurs continus de 400 ml : impact des communautés microbiennes sur les performances de digestion anaérobie des PE. Ces réacteurs de digestion anaérobie sont aussi proches de réacteurs infiniment mélangés en mode de fonctionnement continu et avec cellules libre. Ils possèdent un volume utile de 400 ml dont le mélange est assuré par un agitateur magnétique (figure 6). Ils sont maintenus dans une chambre thermostatée à 35°C. Ils sont fermés par un bouchon à trois sorties : une sortie gaz fermée par un septum à jupe retournée, une sortie permettant l’alimentation et enfin une troisième prolongée dans le flacon par un tube permettant le prélèvement de la boue digérée. Ils sont soutirés (20 ml) et alimentés (20 ml) manuellement tous les jours sous une hotte stérile. Cette configuration a été utilisée pour tester l’influence sur la dégradation des PE de trois communautés microbiennes à historique contrasté et qui ont servi d’inoculum. Quatre réacteurs sont menés pour chaque inoculum : un réacteur est alimenté avec la boue HLSS non dopée et les trois autres avec la boue HLSS dopée à 100 mgNP/kgDM et 5 mgHAP-PCB/kgDM. Les répliqua nous permettent de pallier les phénomènes de divergence des communautés microbiennes. La boue HLSS est stérilisée (121°C, 30 min) afin de n’observer que l’effet des communautés apportées au temps initial. Pour ce faire, deux grands volumes de boue HLSS sont préparés, l’un est non dopé et l’autre est dopé avec les PE (tel que décrit au 1), puis ces lots sont répartis dans des bidons puis stérilisés et congelés. Avant leur utilisation comme alimentation, les aliquots de boue sont transférés pendant une nuit à 4°C afin de décongeler, et le pH est ajusté à 7 sous hotte stérile à l’aide d’une solution stérile de NaHCO3- à 52 g/l. ADEME 23 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Dans un premier temps les réacteurs sont conduits en fedbatch pour éviter l’orientation vers des voies fermentaires et permettre aux communautés de s’adapter plus facilement aux conditions opératoires. Chaque échantillon de microorganismes extraits d’un écosystème d’intérêt (sol contaminé en HAP, sédiment contaminé en PCB et boue de STEP) sert d’inoculum à un volume de 100 ml de boue stérilisée dopée (ou non) diluée à 1 g DCO/l (cf paragraphe suivant pour l’extraction des communautés). Les fioles sont soumises à un flux d’azote (stérilisé par filtration) pendant quelques minutes pour permettre la mise en place de l’anaérobiose. La production de biogaz est suivie à la fois quantitativement et qualitativement. En fonction des quantités de méthane produit, la charge est progressivement augmentée jusqu’à obtenir un volume réactionnel de 400 ml et une charge volumique appliquée de 1gDCO/l/j (période d’environ 100 jours). Une fois ce volume atteint, les réacteurs sont menés en régime semi continu avec un TSH de 20 jours. Le régime semi-continu appliqué peut être assimilé à un régime continu. Les sorties de chaque réacteur sont conservées séparément à 4°C sur une période de 10 jours (correspondant à un demi TSH). Tous les 10 jours les différents réservoirs de sortie servent aux analyses de suivi de réacteurs décrites dans le §5, aux analyses de suivi des micropolluants organiques décrites dans le §6 et aux analyses de biologie moléculaire décrites dans le §7. Ces mêmes analyses sont effectuées à chaque changement de flacon d’alimentation. Les différents prélèvements se font sous hotte stérile. Les expériences sont menées simultanément pour chaque inoculum jusqu’à obtention et maintien d’un équilibre de dégradation de la matière (100 jours). Figure 6 : Représentation des réacteurs de volume utile de 400 ml alimentés et soutirés tous les jours manuellement sous conditions stériles. 4. L’extraction des communautés microbiennes issues de trois environnements contrastés Ces expériences ont été menées au Laboratoire de Biotechnologie de l’Environnement. Pour extraire les communautés microbiennes des trois écosystèmes d’intérêt (sol contaminé en HAP, sédiment contaminé en PCB et boue de STEP), une stratégie d’extraction de cellules par gradient de densité (inspirée des protocoles d’extraction de cellules de sol) a été appliquée. Dans le cas de la boue, un prétraitement enzymatique de l’échantillon a été nécessaire et a fait l’objet d’un développement méthodologique spécifique. Prétraitement enzymatique de la boue : 250 ml de boue anaérobie (correspondant à 10g de matière sèche) provenant de la STP de Lunéville ont été centrifugé à 15000 g pendant 20 ADEME 24 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 min à une température de 4°C. Le culot obtenu est suspendu dans 250 ml de tampon phosphate 80 mM avec du MgCl2 à une concentration finale de 20 mM. Pour optimiser l’hydrolyse des exopolymères de la boue, du triphosphate pentasodique (STPP, Sigma) a été ajouté au tampon à une concentration finale de 50 mM. Une succession d’enzymes est ensuite appliquée ; il s’agit d’ α-amylase, de pectinase, de cellulase et de DNase. Chaque enzyme est ajoutée en excès pour prévenir la possible inhibition de l’activité de l’enzyme par des phénomènes de sorption. Les quantités d’enzymes sont basées sur une estimation générale de la composition en polysaccharides, sucres complexes, cellulose et ADN de la boue (Simon et al. 2009). 20 U d’ α-amylase (provenant de Bacillus sp., Duramyl® 300 U.g-1, Sigma), 330 U de pectinase (provenant d’Aspergillus niger, 1000 U g-1, Sigma), 5600 U de cellulase (provenant d’Aspergillus sp., Carezyme® 1000 U.g-1, Sigma) et 250 U de DNase (RQ1 RNase-Free DNase, Promega) sont ajoutés successivement et incubés 1h, à 37°C. Pour obtenir une activité optimale de chaque enzyme, le tampon est d’abord ajusté à un pH de 5 lors de l’ajout de α-amylase puis de la pectinase, puis à un pH de 7, lors de l’ajout de la cellulase et de DNase. La suspension est ensuite centrifugée à 15000 g pendant 20 min à une température de 4°C et le culot obtenu est suspendu dans une solution saline de NaCl (80%) pour lavage avant que la suspension ne soit à nouveau centrifugée selon les mêmes conditions. Application d’un gradient de densité : dans un erlenmeyer stérile de 100 ml, préalablement placé dans un bac à glace, 10 g d’échantillon (sol, sédiment, culot de centrifugation de la boue prétraitée enzymatiquement) et 50 ml d’une solution de tampon PVPP sont mixés à vitesse maximum et pendant 90s (Maron et al. 2006) à l’aide d’un UltraTurax (T15 basic) avant d’être agité (~100 rpm) pendant une nuit à 37°C. Le tampon PVPP est composé de tampon PBS 1× (130 mM NaCl, 7 mM Na2HPO4, 3 mM NaH2PO4, 5 mM Na2EDTA, pH 7.3), de PVPP (3.5 mg.ml-1), et d’1 % of Tween 20. La sonde de l’ultraturax aura préalablement été lavée 30 min dans un bain d’acétone placé dans un bain à ultrasons. 20 ml de la solution obtenue sont ensuite prélevés et répartis dans 2 tubes à centrifuger stériles, de 50 ml, en polycarbonate. Sous cette solution, 16 ml de solution de Gentodenz (Gentaur, France) stérile (de densité 1,3 g/ml) sont déposés, à l'aide d'une pipette stérile, comme indiqué sur la figure 7 (Barra Caracciolo et al. 2005). La solution de Gentodenz est préparée en dissolvant 40 g de Gentodenz (composé similaire au Nicodenz, soluble dans l’eau, non ionique, non toxique et dérivé de l’acide benzoique) dans 50 ml d’eau distillée stérile, comme recommandé par Lindahl et al. (1996). Les suspensions sont ensuite centrifugées à 10.000 x g pendant 40 min à une température de 4°C pour procéder à la séparation de phase entre les particules de l’échantillon et les cellules. Après centrifugation, on obtient dans le tube la séparation de phase (figure 7). La couche de cellules d’intérêt est prélevée à l’aide d’une micropipette avec un peu du surnageant et un peu de la phase qui contient le Gentodenz dans un bécher stérile de 100 ml. Cette suspension est ensuite répartie dans plusieurs tubes en polyallomère stériles (environ 10 ml par tube). Le volume est ajuster à 30 ml avec du l’eau saline stérile (NaCl 80%) et centrifugée à 16.000 x g pendant 60 min à 4°C pour éliminer les résidus de Gentodenz. Pour chaque écosystème, les culots obtenus à partir des 10 g de matières sont regroupés et récupérés dans 20 ml une solution saline stérile (NaCl 80%). ADEME 25 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 7 : Schéma des étapes d'établissement du gradient (Barra Caracciolo et al., 2005). 5. L’analyse des matrices Les différents échantillons de boue prélevés sur les réacteurs ont été traités comme présenté sur la figure 8. Sur cette figure, les interactions entre les différents partenaires du projet sont soulignées. ADEME 26 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 8 : Les analyses réalisées sur les échantillons de boue.1 Analyses effectuées au Laboratoire de Physico- et Toxico-Chimie de l'environnement (LPTC) de Bordeaux (dosage des PCB sur le compartiment particulaire, dosage SPME HAP et PCB sur le surnageant, fractionnement AF4 et dosage SPME HAP). 2 Analyses réalisées par le LPTC (extraction liq/liq au DCM et extraction ASE Mtoh/DCM) et l’unité « Écotoxicologie in vitro et in vivo » de l’INERIS à Verneuil-en-Halatte (tests cellulaires). 3 Analyses effectuées par l’unité de recherche « Hydrosystèmes et bioprocédés » de l’IRSTEA d’Antony (isotopie carbone 13). Les autres analyses ont été effectuées par le Laboratoire de Biotechnologie de l’Environnement de l’INRA de Narbonne. ADEME 27 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires 5.1 Février 2013 Préparation des échantillons Une centrifugation à 15 000 g pendant 20 min, suivi d’une filtration à 1,2 µm permet de séparer la phase particulaire de la boue de sa phase aqueuse. La phase aqueuse contient alors les matières colloïdales et dissoutes. Entre 100 ml (réacteur batch) et 300 ml (réacteur continu) de boues totales ou bien de leur phase particulaire sont tout d’abord congelés à -20°C. Grâce au module HetoPowerDry PL 3000 (ThermoElectron Corporation), ces échantillons sont lyophilisés. Les parois du piège à glace sont maintenues à -55°C, le vide est poussé à 1 mbar, et les étagères portant les plateaux sont équipées de résistances chauffantes, de manière à accélérer la sublimation de la glace. Le chauffage est programmé selon des paliers de 2h à -20°C, -5°C, 5°C, 15°C puis les échantillons sont maintenus à 25°C jusqu’à arrêt de l’appareil. La lyophilisation dure environ 24 h. De manière à garantir des échantillons homogènes et obtenir une poudre fine, les échantillons lyophilisés sont broyés. Pour cela, un microbroyeur (Culatti) équipé d’un tamis de 1 mm est utilisé. La vitesse de rotation de la tête de broyage est fixée entre 3000 et 4500 rpm. L’échantillon broyé est récupéré dans un flacon pyrolysé ambré et conservé à température ambiante. 5.2 Paramètres globaux 5.2.1 Mesure de la matière sèche et de la matière organique Dans un creuset en céramique séché et pesé (masse T), environ 30 ml d’échantillon (boue totale) sont introduits. Le creuset est ensuite pesé afin de déterminer la masse exacte introduite (m0), puis placé à l’étuve à 105°C durant 24 h afin d’évaporer l’eau. A sa sortie du four, le creuset est placé dans un dessiccateur pour refroidissement avant d’être pesé à nouveau (m105). Cette étape nous permet d’obtenir la concentration en matière sèche de l’échantillon par le calcul suivant : MS (g/kg) = m105 ( g ) T ( g ) * 1000 m0 ( g ) T ( g ) Le creuset est, enfin, déposé dans un four à 550°C pendant 2 h, et pesé à nouveau (m 550) après refroidissement dans un dessiccateur. A la fin de cette étape, il ne reste dans le creuset que la matière minérale et la concentration en matière volatile (MV) ou matière organique (MO) est obtenue par le calcul suivant : MV = MO (g/kg) = m105 ( g ) m550 ( g ) * 1000 m0 ( g ) T ( g ) 5.2.2 Mesure de la DCO, demande chimique en oxygène La DCO des boues totales ou de leur phase aqueuse (méthode de séparation décrite § 5.1) est mesurée à l’aide de kits Spectroquant (Merck), en accord avec la norme ISO 15705. La DCO de la phase particulaire est déduite de la différence de ces deux mesures. Les tubes commercialisés contiennent un excès de bichromate de potassium (K2Cr2O7) qui permet l’oxydation totale de la matière de l’échantillon après 2 h en conditions acides et à 150°C. 2 ml d’échantillon sont introduits par tube. La détection par spectrophotométrie s’applique dans la gamme 0 à 1500 mgO2/l. 5.2.3 L’analyse des gaz de fermentation ADEME 28 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 La quantification du biogaz total et l’analyse de la composition de celui-ci nous ont permis de pouvoir quantifier les volumes produits pour chaque gaz produits (H2, CO2, CH4). La composition du biogaz produit par les systèmes anaérobies est déterminée par chromatographie en phase gazeuse (CPG). 0,5 ou 1 ml d’échantillon gazeux est prélevé dans le ciel gazeux du réacteur à l’aide d’une seringue et injecté dans un chromatographe (GC-8A , Shimadzu). Deux colonnes en série permettent la séparation des différents gaz. La première colonne (Hayesep Q, Touzart & Matignon), garnie de Silicagel (d’une longueur de 2 m, d’un diamètre de 3,175 mm, d’une granulométrie de 80 à 100 mesh), permet la séparation du CO2. Les autres gaz sont séparés grâce à la seconde colonne, qui est un tamis moléculaire de 5 Ǻ (Touzart & Matignon) de même longueur, diamètre et granulométrie que la colonne précédente. Les deux colonnes sont séparées par une colonne à vide de 10m de long qui ralenti le passage du gaz au niveau du tamis moléculaire. Les molécules sont entrainées par un gaz vecteur, de l’argon à 2,8 bars. La détection est réalisée à l’aide d’un catharomètre dont le courant est fixé à 80 mA. Le four à colonne est régulé à 30°C, alors que l’injecteur et le détecteur opèrent à 100°C. La composition de l’échantillon est déterminée par un étalonnage externe. Le gaz étalon utilisé est composé de 25 % volumique de CO2, 2 % d’O2, 5 % d’H2, 10 % de N2 et 58 % de CH4. Pour mesurer le biogaz produit au cours des fermentations, deux méthodes ont été utilisées, l’une utilisant un système d’éprouvette renversée (réacteur batch), l’autre par différentiel de pression (réacteur continu de 400 ml). Sur les réacteurs continus de 5 l, un capteur volumétrique (sonde de niveau), relié à une centrale d’acquisition a été utilisé. Par éprouvette : le volume de biogaz produit est mesuré en piquant le septum de la sortie gaz du flacon à l’aide d’une aiguille. Cette aiguille est reliée à un tuyau dont l’autre extrémité est placée dans une éprouvette renversée remplie d’eau acidifiée (pH<2). La surpression s’évacue de la bouteille et entraîne une diminution du volume d’eau dans l’éprouvette ce qui permet de mesurer le volume de gaz en surpression dans le flacon. Pour calculer le gaz produit entre deux prélèvements les équations suivantes sont appliquées : ΔNj = (yj Psalle (j) Vh / R Tj)-(yj-1 Psalle (j-1) Vh / R Tj-1) ΔVj = ΔNj R T0 / P0 = ΔNj * 8.314*273.15/105 (*106 ml pour l’avoir en ml) Avec : - yj et yj-1, les teneurs du gaz étudié dans le gaz total, exprimées en pourcentage, mesurées respectivement le jour du prélèvement et lors du prélèvement précédent. - Psalle (j) et Psalle (j-1), les pressions en Pa mesurées dans la salle, le jour du prélèvement et après le prélèvement précédent. - P0= 105 Pa, condition normale de pression - T0= 273,15 K, condition normale de température - Vh, le volume du ciel gazeux dans le flacon en m3 - R, la constante des gaz parfaits - T, température en Kelvin Par différentiel de pression : la pression Pj à l’intérieur du système est mesurée le jour du prélèvement, à l’aide d’un manomètre piqué dans la bouteille. Le volume de gaz produit (ΔVj) est alors calculé aux conditions normales de pression et température (CNTP) de la manière suivante via la détermination du nombre de moles (ΔNj) : ΔNj = (yj Pj Vh / R Tj)-(yj-1 Pj-1 Vh / R Tj-1) ADEME 29 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 ΔVj = ΔNj R T0 / P0 = ΔNj * 8.314*273.15/105 (*106 ml pour l’avoir en ml) Avec : - yj et yj-1, les teneurs du gaz étudié dans le gaz total, exprimées en pourcentage, mesurées respectivement le jour du prélèvement et lors du prélèvement précédent. - Pj et Pj-1, les pressions en Pa mesurées le jour du prélèvement et après le prélèvement précédent. - P0= 105 Pa, condition normale de pression - T0= 273,15 K, condition normale de température - Vh, le volume du ciel gazeux dans le flacon en m3 - R, la constante des gaz parfaits - T, température en Kelvin 5.2.4 Mesure de la concentration en Acides Gras Volatils (AGV) Le dosage des concentrations en AGV est réalisé sur la phase aqueuse de la boue (méthode de séparation décrite § 5.1) par CPG. Cette analyse permet de mesurer les concentrations en acétate, propionate, butyrate, iso-butyrate, valérate et iso-valérate d’un échantillon liquide grâce à une table d’identification préprogrammée dans le système d’analyse. Une solution d’acide éthyl 2 butyrique à 1g/l, servant d’étalon interne, doit être ajoutée à l’échantillon à analyser (volume à volume). L’analyse des échantillons s’effectue sous un gradient de température par un chromatographe (Varian GC 3900) équipé d’un détecteur à ionisation de flammes. Un passeur automatique complète l’ensemble, permettant l’analyse en série des échantillons. Une seringue prélève automatiquement le liquide et le place dans l’injecteur qui est chauffé à une température de 210°C. Le liquide se volatilise et les produits gazeux de cette volatilisation migrent dans la colonne semi-capillaire FFAP de 15 m de long et de 0,52 mm de diamètre, Phase ECTM 1000. Le four est soumis à un gradient de température de 80°C à 120°C (rampe de 10°C par minute). L’injecteur est maintenu à 210°C et le détecteur à 280 °C. Le gaz vecteur, l’azote, est maintenu à un débit 6 ml/min. Les pressions en hydrogène et air sont de 50 kPa et 100 kPa, respectivement. L’acquisition des données est réalisée grâce au logiciel Galaxie Work Station de Varian (version 1.9.3.2). 5.2.5 Dosage des protéines Les protéines contenues dans les boues totales ou leur phase aqueuse sont dosées par la méthode spectrophotométrique de Lowry (Lowry, et al. 1951) basée sur la détection des liaisons peptidiques. La solution de réactifs est un mélange de solution basique (4 g NaOH/l) de Na2CO3 (20 g/l), de solution de CuSO4, 5H20 à 10 g/l, et de solution de tartrate double de potassium et de sodium à 20 g/l, en proportions volumiques 100/1/1. L’étalonnage est réalisé grâce à des solutions de sérum d’albumine bovine (SAB) à 20, 40, 60, 80 et 100 mg/l. Dans des tubes à essai, 1 ml d’échantillon ou de standard, 3 ml de solution de réactifs et 0,3 ml de réactif de Folin sont introduits puis placés à l’obscurité durant 2 h. Dans ce milieu alcalin, les ions Cu2+ réagissent avec les atomes d’azote des liaisons peptidiques et sont réduits en Cu+. Les ions Cu+ réduisent ensuite le complexe acide phosphotungsitique / acide phosphomolybdique contenu dans le réactif de Folin, ce qui confère une coloration bleutée ADEME 30 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 aux mélanges réactionnels. L’absorbance à 750 nm est finalement mesurée pour obtenir la concentration des échantillons en équivalents gSAB/l. 5.2.6 Dosage des sucres Le dosage des glucides, dans les boues totales ou leur phase aqueuse est basé sur leur réaction avec l’anthrone (Dreywood 1946). La solution de réactif est préparée par dilution d’anthrone dans de l’acide sulfurique à 98% à raison de 2 g/l. L’étalonnage est réalisé grâce à des solutions de glucose à 20, 40, 60, 80 et 100 mg/l. 75 µl d’échantillon ou de standard ainsi que 150 µl de solution de réactifs sont disposés dans des puits d’une microplaque 96 puits, puis placés à l’étuve à 105°C durant 10 min. A cette température et en milieu acide, les glucides réducteurs sont déshydratés pour donner des dérivés furfuraliques. Ceux-ci se condensent avec l’anthrone, générant une couleur verte pour les hexoses. Après refroidissement dans de la glace, l’absorbance à 625 nm permet d’obtenir la concentration en glucides en équivalents gGlu/l. 5.2.7 Dosages des lipides Le dosage des lipides dans les échantillons lyophilisés et broyés est mené grâce à l’appareil ASE 200 (Dionex), qui permet de réaliser l’extraction par l’éther de pétrole à hautes température et pression. Les cellules contenant 1 g d’échantillon sont chauffées à 105°C et portées à la pression de 67 bars, maintenues dans ces conditions pendant 10 min, puis purgées de la totalité du solvant. Chaque cellule subit trois cycles de ce type. Les extraits sont récupérés dans des vials préalablement tarés. L’éther de pétrole est évaporé à l’aide d’un Multivapor (Büchi) dans lequel les échantillons sont agités, chauffés à 45°C, mis sous vide (500 mbar), et l’éther de pétrole est condensé à 4°C. Les traces de solvant restantes sont ensuite éliminées à l’étuve à 105°C avant pesée du vial. La différence par rapport à la tare permet de mesurer la masse de matière extractible à l’éther de pétrole par unité de masse de l’échantillon, à 5% prêt (gEEP/g). 5.2.8 Analyse de la densité La densité de la matière totale ou de la matière minérale des boues est mesurée sur échantillons lyophilisés et broyés. Dans un appareil Ultra Pycnometer 1000, une masse précise d’échantillon est introduite. De l’azote ou de l’hélium est introduit dans la chambre de l’échantillon dont le volume est connu, jusqu’à atteindre la pression de 17 psi. La vanne reliant la chambre de l’échantillon à la chambre d’expansion (de volume connu aussi) est alors ouverte. La différence de pression alors mesurée est directement reliée au volume occupé par l’échantillon. Le ratio entre la masse d’un échantillon (en g) et le volume qu’il occupe (en ml) donne sa densité. Une sphère métallique de masse et volume connus, utilisée à la place de l’échantillon, permet de calibrer l’appareil. La densité de la matière organique est déduite des densités de la matière totale et de la matière minérale. 5.3 Fractionnement du compartiment aqueux 5.3.1 Fractionnement par filtration-ultrafiltration Le critère physique choisi pour la caractérisation de la matière dissoute et colloïdale est sa répartition en classes de taille. Quatre fractions sont définies : F1 concerne les molécules comprises entre 0,1 et 1,2 µm, F2 entre 10 kDa et 0,1 µm, F3 entre 1 et 10 kDa et F4 en dessous de 1 kDa. La DCO est choisie comme référence pour cette répartition en raison du faible volume que cette analyse nécessite. ADEME 31 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 La matière dissoute et colloïdale a subi une étape de filtration lors de sa séparation des particules. La DCO initiale de l’échantillon (DCO<1,2µm) est mesurée. L’échantillon subit alors une étape de filtration sous vide sur une membrane en PVDF de 0,1 µm de seuil de coupure (Millipore), et la DCO du filtrat (DCO<0,1µm) est mesurée. Le filtrat subit ensuite une ultrafiltration sous 3 bars dans une cellule Amicon (Millipore) munie d’une membrane en cellulose régénérée de 10 kDa de taille de pores (Millipore). Cet ultra-filtrat (DCO<10kDa) est de nouveau ultra-filtré à 1 kDa de taille de pores pour donner la fraction représentée par DCO<1kDa. F1, F2, F3 et F4 sont calculées comme suit : F1 F3 DCO1, 2 µm DCO0,1µm DCO1, 2 µm F2 *100 , DCO10kDa DCO1kDa *100 DCO1, 2 µm et DCO0,1µm DCO10kDa DCO1, 2 µm F4 *100 , DCO1kDa *100 DCO1, 2 µm 5.3.2 Fractionnement par couplage flux / force avec flux asymétrique (Asymmetrical Flow Field-Flow Fractionation AF4) La phase aqueuse des boues a été fractionnée par AF4 et chaque fraction caractérisée par diffusion de lumière laser multiangulaire et UV (figure 9). Le système AF4 utilisé est un Eclipse 3 de Wyatt Technology Europe et permet de séparer les objets d’un milieu selon une large gamme de tailles (de 1 nm à quelques 10 µm). Il est équipé d’un détecteur miniDAWN TREOS (Wyatt Technology Europe), détecteur à diffusion de lumière statique multi-angles (3 angles de mesure). L’AF4 est équipé d’un canal de séparation court Eclipse avec un espaceur de 490 µm d’épaisseur et d’une membrane Pall Omega en polyethersulfone de seuil de coupure 1 kDa. Le débit au détecteur est maintenu constant à 0,5ml/mn. Après équilibre du débit, 50 µl d’échantillon (environ 300 mg/l de carbone organique dissous) est injecté à un débit de 0.2 ml/min pendant 5min avec un flux de focus de 2 ml/min. Les paramètres d’élution ont été optimisés en testant un cross-flow constant à 3,5 ml/mn et différents gradients de cross-flow (de 3,5 à 0 ml/mn) linéaires ou exponentiels. Les paramètres retenus pour le fractionnement des échantillons sont présentés sur la figure 9c avec un cross-flow constant à 3,5 ml/mn pendant 15 mn suivi d’un gradient exponentiel jusqu’à 0ml/mn en 26 mn. Channel Flow and Sample Injection Focus Flow Channel Flow Out a Cross Flow ADEME 32 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 b Channel f low Membrane X Y Frit Crossf low (out) c Detector flow : 0,5 ml/mn - Focus flow : 2ml/mn - Inject flow: 0,2ml/mn Elution 4 Elution Focus + cross-flow injection constant Cross-flow 3.5 3 2.5 Elution - gradient exponentiel de cross-flow 2 1.5 1 0.5 0 Rinçage: élution + injection -0.5 0 10 20 30 40 50 60 70 Figure 9 : (a) Technologie des flux croisés. (b) Elution, x: petites particules; y: grosses particules. (c) Paramètres retenus pour le fractionnement des échantillons. 5.4 Analyse fonctionnelle par fluorescence tridimensionnelle du compartiment aqueux Le spectrofluorimètre utilisé est un spectrofluorimètre Perkin Elmer LS55. Il possède une lampe au xénon émettant un rayonnement pulsée entre 200 et 600 nm. Sur cet appareil, une partie du rayonnement d’excitation est récupérée comme référence pour corriger la réponse enregistrée par le détecteur en cas de variation énergétique de la source. La présence de monochromateurs en excitation et émission permet l’acquisition de spectres d’excitation, d’émission et 3D. Dans les cas de spectres 3D, les longueurs d’onde d’excitation varient de 200 à 600 nm avec des incréments de 10 ou 20 nm. La largeur de fente des monochromateurs d’excitation et d’émission est fixée à 10 nm. La vitesse de balayage du monochromateur d’émission est de 1200 nm/s. Les valeurs de fluorescence sont enregistrées tous les 0,5 nm, entre 200 et 600 nm. Les signaux enregistrés par le détecteur sont traités par un micro-ordinateur via le logiciel PerkinElmer FL WinLab 4.00.02. Les échantillons de surnageant de boue sont dilués plusieurs fois (1/50, 1/100, 1/200) avec de l’eau milliQ afin de déterminer l’intensité maximum d’émission pour différentes longueurs d’onde d’excitation. La dilution de travail est choisie dans la zone linéaire de réponse, puis le spectre 3D est acquis. Très brièvement, la propriété de fluorescence de certaines molécules est liée à la présence de fluorophores dans leur structure chimique. Ces fluorophores sont des entités chimiques capables de passer d’un état d’énergie électronique fondamental à un état excité, par ADEME 33 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 absorption de photons d’énergie donnée. Ils restituent ensuite une partie de l’énergie absorbée par émission de photons : c’est la fluorescence. La capacité de fluorescence est liée à la présence d’électrons pi délocalisés : les doubles liaisons conjuguées, les noyaux aromatiques et les hétérocycles insaturés caractérisent les fluorophores. L’environnement électronique varie d’une molécule fluorescente à l’autre, du fait de leur structure chimique primaire et de leur structure tri-dimensionnelle. Ainsi, pour un fluorophore donné, l’énergie du rayonnement (liée à λex) capable de provoquer l’excitation est caractéristique, tout comme l’énergie du rayonnement émis (liée à λem), qui dépend de la part de l’énergie absorbée qui est ré-emise. Ainsi, le plan défini par λex et λem peut être divisé en zones spécifiques de familles de fluorophores. Chen et al. (2003) ont ainsi défini 7 régions : les zones I à III, caractéristiques des protéines contenant respectivement les acides aminés aromatiques (tyrosine et tryptophane), la zone IV spécifique des structures similaires aux acides fulviques, les zones V et VI aux sous-produits protéiques microbiens et la zone VII des fluorophores analogues aux acides humiques (Figure 10). Au sein de ces zones, les massifs résultent d’une multitude de fluorophores, chacun contribuant en position et en intensité selon sa structure et sa concentration. Pour l’exploitation des spectres présentes en figure , les volumes de fluorescence de chaque zone ont donc été déterminés, et normalisés par la concentration en carbone organique et aussi par l’aire de la zone. Pour cela, les spectres sont transformés au format ASCII afin de générer une image en noir et blanc grâce à un algorithme développé au LBE sous matlab. Puis l’image est traitée avec le plugin Sync measure 3D du logiciel Image J afin d’obtenir l’intensité de fluorescence en unité arbitraire (I), l’aire de chaque région (exprimé en volume) de fluorescence et les coordonnées du barycentre. Les deux paramètres calculés sont : Avec Ai,région, aire de chaque région et At l’aire totale, NI l’intensité normalisée. ADEME 34 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 10 : Coordonnées des régions de fluorescence obtenues grâce au logiciel Image J et les groupes fonctionnels des régions selon Chen et al. (2003). 6. Extraction et quantification des perturbateurs endocriniens dans les différents compartiments de la boue Le dosage des HAP/PCB/NP est effectué dans les différentes fractions de la boue (particulaire et aqueuse) ainsi que sur les échantillons totaux de boue. Le dosage des HAP et NP, des échantillons totaux et de la phase particulaire, est réalisé au Laboratoire de Biotechnologie de l’Environnement (LBE) par chromatographie liquide à haute performance-HPLC couplée à un détecteur de fluorescence ; le dosage des PCB est réalisé à l’INRA d’Arras par chromatographie gazeuse couplée à un détecteur à capture d’électrons (GC-ECD) pour les réacteurs continus et par GC-ECD au Laboratoire de Physico- et Toxico-Chimie de l'environnement (LPTC) de Bordeaux pour les réacteurs batch ; le dosage des HAP dans la phase aqueuse est réalisé par micro-extraction sur phase solide (SPME) suivi d’une analyse en chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse (CG-MS) au Laboratoire de Physico- et Toxico-Chimie de l'environnement (LPTC) de Bordeaux. 6.1 Extraction des PE de la boue totale et du compartiment particulaire L’extraction des HAP/PCB/NP contenus dans les échantillons de boue totale ou du particulaire de la boue se fait de manière conjointe sur des échantillons lyophilisés et broyés (cf § 5.1). Elle est réalisée par extraction accélérée par solvant avec l’ « Accelerated solvent ADEME 35 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Extractor » (ASE 200, Dionex) selon la méthodologie proposée par Trably et al. (2004). Cet appareil accélère l’extraction des composés organiques en utilisant des solvants à des températures élevées. Une pression est appliquée à la cellule (contenant l’échantillon) pour maintenir le solvant chauffé à l’état liquide pendant l’extraction. Après chauffage, l’extrait est rincé de la cellule de l’échantillon vers un flacon de récupération. Dans des cellules comportant un filtre en fibre de verre (Whatman), surmonté de 1 g d’alumine (rétention des composés polaires, Sigma Aldrich) et de 1 g d’hydromatrix (dispersant et asséchant, Varian), 0,5 g d’échantillon sont introduits puis mélangés à l’hydromatrix présent. Enfin, le volume restant est comblé d’hydromatrix. Le solvant utilisé pour l’extraction est un mélange d’hexane et d’acétone à 50/50 volumique. Une extraction consiste à chauffer la cellule remplie de ce mélange jusqu’à atteindre la température de 120°C (au bout de 6 min), à maintenir cette température et une pression de 100 bars pendant 5 min, puis à purger 60 % du volume de solvant pour le remplacer par du solvant neuf. L’opération est réitérée une seconde fois. Deux extractions sont opérées par cellule, et l’extrait est récupéré dans deux vials séparés. L’évaporation du solvant est réalisée à l’aide du Multivapor Buchi P12 couplé à un vacuum controller V-855. Dans ce Multivapor, les échantillons sont agités, chauffés à 45°C, mis sous vide (500 mbars), et les solvants sont condensés à 4°C. Le séchage complet des extraits est obtenu sous flux d’azote. 2 ml d’acétonitrile sont introduits dans chaque vial de récupération. Après agitation et repos, les deux volumes de 2 ml et 1 ml additionnel d’acétonitrile utilisé pour le rinçage sont rassemblés dans un vial de reprise préalablement taré. Le volume exact de reprise est déterminé par pesée. Les extraits sont conservés à -20°C. 6.2 Quantification des HAP Les HAP extraits par ASE sont quantifiés par chromatographie liquide à haute performance. Cette chaîne analytique est composée d’un passeur d’échantillons (Waters 717 plus Autosampler), d’un système de pompes péristaltiques (Waters 600 Controller) et d’un détecteur fluorimétrique (Waters 2475). La colonne greffée en C18 (BakerbondTM PAH 16-Plus) est maintenue à température constante de 25°C, à l’aide d’un four à effet Pelletier (CIL Cluzeau). Après l’injection de 20 µl d’échantillon, le système de pompes permet de générer une première phase isocratique à 0,25 ml/min de mélange acétonitrile/eau (60/40 v/v) pendant 30 min, puis un gradient jusqu’à atteindre une élution d’acétonitrile à 100 % au bout de 35 min, et le débit est finalement augmenté à 0,5 ml/min pour la phase de rinçage sous acétonitrile/eau (60/40 v/v). Le système de détection optimisé au laboratoire est programmé de façon à quantifier chaque HAP à son couple longueur d’excitation (λex) / longueur d’onde d’émission (λem) optimal (tableau 2). Tableau 2 : Temps de rétention (min) des HAP par HPLC et couples de longueurs d’onde d’excitation/émission (nm) utilisés pour leur détection par fluorescence. HAP tR λex λem Flu 22 266 312 Phe 26 250 370 Ant 31 250 400 Fluora 36 280 430 Pyr 39 260 410 BaA 49 280 430 Chr 51 268 384 BbF 57 234 420 BkF 60 270 400 BaP 63 270 400 DBA 67 300 407 BghiP 69 300 407 Ind 71 300 500 L’étalonnage est réalisé par six niveaux de standard (10 à 1 000 µg/l) obtenus à partir de la dilution d’une solution mère PAH Mix 9 (CIL Cluzeau) à 10 mg/l. Après chaque série d’environ 10 échantillons, un standard est injecté de façon à vérifier la stabilité du signal au fil des injections et à corriger les données. ADEME 36 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 6.3 Quantification des NP Le NP extrait par ASE est analysé selon la méthode mise au point par Ahel et al. (2000). Le dispositif de dosage du NP par HPLC est composé d’un passeur d’échantillon ASI 100 (Dionex), d’un système de pompe P580 (Dionex) et d’un détecteur fluorimétrique RF2000 (Dionex). La colonne LiChroCART® Purospher® STAR NH2 est maintenue à 30°C à l’aide d’un four (CIL Cluzeau). L’éluant utilisé est un mélange hexane/isopropanol (98,5/1,5 v/v), ce qui nécessite un transfert des extraits (obtenus dans de l’acétonitrile) dans de l’hexane, par une étape d’évaporation de 100 µl d’extrait et reprise dans un volume adéquat d’hexane. L’élution s’effectue en mode isocratique à 2 ml/min, et le nonylphénol (t R : 13 min) est détecté au couple λex/ λem de 228/305 nm. A partir d’une solution standard commerciale à 10 mg/l (CIL Cluzeau), quatre niveaux de concentrations sont préparés (0,5, 1, 2 et 4 mg/l). Le volume injecté est de 20 µl. Une série d’injection de ces quatre niveaux est intercalée entre chaque série de 10 échantillons. 6.4 Quantification des PCB Les PCB extraits par ASE des échantillons des réacteurs continus (5 l ou 400 ml) ont été analysés à l’INRA d’Arras par chromatographie gazeuse (colonne DB5 : 30 m*0.25 mm*0.25 µm) couplée à un détecteur à capture d’électrons (GC-ECD). Pour ce faire, un volume des extraits ACN (issus de l’ASE) est repris dans du dichlorométhane et est purifié (élimination du soufre). La limite de détection est de 100 ng/kgMS. L’étalonnage est réalisé grâce à l’injection de solution étalon (2 à 50 µg/l) et par ajout d’un étalon interne (PCB202 à 50 µg/l). Pour les échantillons issus des réacteurs batch, la purification et l’analyse des PCB ont été réalisées au Laboratoire de Physico- et Toxico-Chimie de l'environnement (LPTC) de Bordeaux. La purification est réalisée sur micro-colonne de silice et cuivre activé. Après conditionnement de la colonne avec 5 ml de n-pentane, un volume précis des extraits ACN est déposé sur la colonne. L’élution se fait sous vide avec 3*5 ml d’un mélange npentane/dichlorométhane (90/10 v/v). Les 15 ml sont ensuite évaporés sous flux d’azote jusqu’à 1 ml et 2 ml d’isooctane sont ensuite ajoutés. Le mélange est de nouveau évaporé jusqu’à un volume de 300 µl. HB/KLM : GC-EDC conditions ou référence 6.5 Analyse des HAP et des PCB dans le compartiment aqueux Le dosage des HAP et des PCB est aussi réalisé dans la phase aqueuse. Dans le cas des HAP, ce dosage permet de dissocier les HAP libres de ceux sorbés sur le compartiment dissout/colloidal. Le dosage des HAP et des PCB dans la phase aqueuse est réalisé par SPME suivi d’une analyse en GC-MS et GC-ECD, respectivement, au LPTC de Bordeaux. Les analyses SPME sont réalisées sur 9 ml d'échantillon de phase aqueuse de boue, avec des fibres Supelco (Bellefonte, USA) recouvertes de polydiméthylsiloxane (PDMS) et polydiméthylsiloxane-divinylbenzène (PDMS-DVB) (Figure 11). Après immersion de la fibre dans l'échantillon, celle-ci est introduite dans l’injecteur de la GC où les composés sont alors immédiatement désorbés. Les analyses sont effectuées automatiquement avec un CombiPAL (CTC Analytics, Zwingen, Suisse). ADEME 37 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 11: Système SPME (Cea-Barcia, 2012). La quantification des HAP se fait grâce à un GC (Agilent 6890) équipé d'un détecteur sélectif de masse (modèle 5972) avec une énergie d'ionisation de 70eV. La colonne utilisée est une HP-5MS ((5%-phényl)-méthylpolysiloxane, 30 m x 0,25 mm id, film de 0,25 pm; Agilent Technologies). L'injection d'échantillons SPME est réalisée en mode pulse splitless (pulse d’une minute à 30 psi, puis application d’un débit de purge 55 ml/min de pendant 2 min et enfin l'économiseur de gaz est fixé à un flux de 20 ml/min pendant 15 minutes) et la température d'entrée est de 250°C. L’hélium est utilisé comme gaz vecteur à un débit constant de 1,3 ml/min et une vitesse linéaire de 42 cm/s. La température de la colonne est maintenue pendant 2 min à 60°C, puis différents paliers de température sont atteints. Le premier palier est à 150°C (rampe de 20°C par minute), le second à 250°C à (rampe de 15°C par minute) et enfin le troisième est à 310°C (rampe de 10°C par minute) et cette température finale est enfin maintenue pendant 3 min. La GC-MS est utilisée suivant le mode d’acquisition SIM (Selected Mode Aquisition). La mesure des concentrations en HAP se fait en utilisant les correspondants HAP-deutérés et le naphtalène-d8 comme étalons internes de la quantité de HAP dans la phase aqueuse et sous état libre, respectivement. A partir d’échantillon d’eau milliQ et de surnageant de boue, dopés à des concentrations connues en HAP et en leur correspondants deutérés, le facteur de réponse Ki de chaque HAP est calculé. Pour la détermination des Ki de la fraction libre, le naphtalène-d8 a été choisi comme étalon interne (Hawthorne et al. 2005), car sa réponse est la même avec ou sans matière dissoute et colloïdale (DCM). La méthode de calcul des concentrations en HAP dans la phase aqueuse et la fraction libre est validée en déterminant les valeurs de Ki et Ci (rendement de quantification) dans de l'eau milliQ et dans des échantillons phase aqueuse (DCM) de boue non dopée en utilisant les équations suivantes : md= Ad* Kd mi= Ai* K Ki=Kd/K= (Ai/Ad)*(md/mi) - md = quantité du composé (deutéré ou naphtalène-d8) étalon interne rajouté dans l’échantillon. - mi = quantité du composé (i) présent dans l’échantillon. - Ad = aire du pic chromatographique correspondant au composé (deutéré ou naphtalène-d8) étalon interne - A i = aire du pic chromatographique correspondant au composé (i) à doser - (Kd/K) = Ki coefficient de réponse du composé (i) quantifié par rapport au composé (deutéré ou naphtalène-d8). ADEME 38 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Six échantillons (trois d’eau milliQ et 3 de DCM) de 9 ml sont dopés à des concentrations connues des 13 HAP étudiés, avec leurs correspondants HAP-deutéré. Les échantillons sont analysés par SPME-GC-MS, et le Ki est déterminé pour l'eau milliQ et pour les échantillons de DCM. Puis, les Ci des échantillons DCM sont calculés en utilisant les valeurs de Ki obtenues dans de l'eau milliQ, ainsi il est possible de connaître le pouvoir d’interférence de la matrice sur la quantification des HAP en phase aqueuse. Si les valeurs de Ci pour chaque HAP sont proches de 100%, la méthodologie est validée. Au vu des résultats présentés dans le tableau 3, la méthode de calcul n’a pas d’influence sur la concentration totale de la phase aqueuse, par contre, cette méthode a un impact sur le calcul des concentrations dans la phase libre. Calculer les concentrations dans le surnageant à partir des Ki obtenus sur l’eau milliQ entraine des erreurs d’autant plus grandes que les molécules sont hydrophobes. Nous avons donc choisi de calculer les concentrations dans nos échantillons en utilisant les Ki obtenus dans le surnageant de boue. Les standards utilisés pour mesurer la concentration des HAP, ont donc été réalisés avec les surnageants d’une boue qui ont été dopés. Les Ki sont mesurés au début, régulièrement entre les échantillons et à la fin de chaque séquence SPME-GC-MS afin d’être sûr qu’ils n’évoluent pas au cours de l’analyse. Dans chaque 9 ml d’échantillon, 50 µl de la solution d’étalon interne (mélange de chaque HAP deutéré ou solution de naphtalène-d8 à une concentration de 200 ng/g solvant) est ajouté. La quantification des PCB sur la phase aqueuse se fait grâce à un GC couplé à un détecteur à capture d’électron. La mesure des concentrations en PCB se fait en utilisant des étalons internes (tableau 4). Ceux-ci ont été choisis suffisamment proches en masse molaire des congénères à analyser et de même que pour les HAP, la méthodologie a été validée en utilisant de l’eau milliQ ou du surnageant de boue auxquels ont été ajoutés les 10 étalons internes et les 7 PCB afin de déterminer les facteurs de réponse (Ki) et les rendements de quantification (Ci). Le tableau montre la composition de ces échantillons standards avec les 7 PCB recherchés et les 10 standards internes. Dans les séries analysées, ces échantillons standards sont répartis comme suit : 2 au début, 2 à chaque 8 échantillons et 2 à la fin afin de déterminer les Ki et Ci au cours de la série d’analyse. Seuls les PCB de la phase aqueuse totale sont quantifiés. Tableau 3 : Rendements de quantification des HAP en SPME obtenus suivant les différentes méthodes de calcul. Ci, Rendements de quantification en % Phase aqueuse Phase libre Composés aqu/aqu Phénanthrène 103 100 118 102 100 110 Anthracène 106 102 112 108 102 128 Fluorène 106 101 121 107 101 125 Fluoranthène 103 101 101 87 101 66 Pyrène 99 99 98 84 99 58 Benzo(A)Anthracène 104 101 94 80 101 28 Chrysène 103 102 98 78 102 25 Benzo(b)Fluoranthène 105 100 85 85 100 9 ADEME DCM/DCM DCM/aqu aqu/aqu DCM/DCM DCM/aqu 39 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Benzo(k)Fluoranthène 104 102 96 88 102 9 Benzo(A)Pyrène 104 111 100 89 111 8 Indéno(1,2,3,c,d)Pyrène 111 93 103 110 93 2 Dibenzo(a,h)Aanthracène 109 115 119 105 115 3 Benzo(g,h,i)perylèneP 108 79 104 111 79 3 aqu/aqu : rendement calculé dans l’eau milliQ dopée par rapport à l’ensemble des composé deutérés (ou au naphthalène d8 pour la phase libre), avec les Ki calculé dans l’eau milliQ DCM/DCM : rendement calculé dans le surnageant dopé par rapport à l’ensemble des composé deutérés (ou au naphthalène d8 pour la phase libre), avec les Ki calculé dans le surnageant. DCM/aqu : rendement calculé dans le surnageant dopé par rapport à l’ensemble des composé deutérés (ou au naphthalène d8 pour la phase libre), avec les Ki calculés dans l’eau milliQ Tableau 4 : Composition des échantillons standards PCB (eau ou surnageant). PCB recherchés PCB 28 PCB 52 PCB 101 PCB 118 PCB 153 PCB 138 PCB 180 Concentration en PCB (ng/g solution) 11.5 12.3 9.7 10.5 7.2 7.3 13.2 Standards Internes PCB 20 PCB 30 PCB 103 PCB 155 PCB 79 PCB 77 PCB 87 PCB 128 PCB 159 PCB 198 Concentration des standards (ng/g solution) 22.59 7.36 6.43 6.72 18.64 22.20 21.05 21.61 15.01 8.35 7. L’analyse des communautés microbiennes Ces analyses ont été réalisées au Laboratoire de Biotechnologie de l’Environnement. Dans un premier temps, une vision globale de l’influence des communautés microbiennes est obtenue par amplification PCR de la région V3 de la sous unité ribosomale de l’ADN 16S, suivi d’une méthode d’empreinte moléculaire par CE-SSCP sur des ADN génomiques totaux. Cette première analyse permet d’obtenir la structure, la diversité et la dynamique des populations bactériennes et archées. Cette analyse est complétée par des PCR quantitatives permettant d’estimer les proportions de bactéries et d’archées et de suivre leur évolution. Ces données de structure et de diversité ont été complétées par des données de pyroséquençage sur les régions V4-V5 de l’ADNr 16S. Enfin, une étude SIP (Stable Isotope Probing) basée sur l’utilisation de molécules marquées au carbone 13 a été menée afin d’identifier de façon spécifique les communautés impliquées dans la dégradation des PE marqués. 7.1 Préparation et conservation des échantillons Un millilitre de boue est prélevé puis centrifugé à 13400 rpm pendant 10 min et le surnageant est éliminé. Le culot est suspendu dans 500 µl d’un mélange composé d’1 ml de tampon guanidine thiocyanate 4 M Tris-Cl pH 7,5 0,1 M et de 300 µl de N-lauryl sarcosine 10 % (N-LS). 7.2 ADEME Extraction de l’ADN total 40 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Le but de l’extraction d’ADN est d'isoler l'ADN chromosomique des microorganismes présents dans l’échantillon en appliquant différentes méthodes de lyses (thermique, chimique et mécanique) sans le dénaturer. Cette procédure se divise en 4 étapes : lyse des cellules, lavage du support permettant la lyse des cellules, élimination des impuretés et précipitation de l’ADN, et enfin purification de l’ADN. 7.2.1 La lyse cellulaire A l’échantillon encore congelé sont ajoutés 500 μl de LS 5%-tampon phosphate pH 8 0.1 M. Après 1 h d’incubation à 70°C l’échantillon est placé dans de la glace. 500 μl de billes de zirconium stériles de 0,1 mm de diamètre sont ajoutées avant de soumettre l’échantillon à une agitation de 10 min à vitesse maximale par un vribrobroyeur. 15 mg de PVPP (polyvinylpolypyrrolidone) sont ajoutés puis l’échantillon est vortexé 30 s avant d’être centrifugé à 13400 rpm pendant 3 min. Le surnageant résultant de cette centrifugation est récupéré dans un tube de 2 ml. 7.2.2 Le lavage Le culot de centrifugation est remis en suspension dans 500 μl de TENP (Tris-Cl pH8 50 mM, EDTA pH8 20 mM, NaCl 100 mM, PVPP polyvinylpolypyrrolidone 1%) avant d’être centrifugé à 13400 rpm pendant 3 min. Le surnageant est ensuite récupéré et additionné dans le tube de 2 ml à celui précédemment obtenu. Cette étape est réitérée sur le culot encore deux fois, puis une dernière centrifugation à 13400 rpm de 3 min est effectuée sur le tube contenant les surnageants pour éliminer les matières en suspensions restantes. 7.2.3 L’élimination des impuretés Le surnageant est réparti dans 2 tubes de 2 ml. Un volume d'isopropanol est ajouté dans chaque tube avant de l’agiter doucement en le balançant afin d'obtenir une pelote d'ADN puis de le laisser 10 min à température ambiante. L’échantillon est ensuite centrifugé 13400 rpm pendant 15 min et les 2 culots sont récupérés dans 100 μl d'eau et réunis. Après avoir ajouté 20 μl de RNAse à 1 mg/ml, l’échantillon est vortexé 15 s puis incubé 10 min à 37°C 7.2.4 La purification Pour cette étape, le matériel du kit commercial kit QIAamp DNA Mini Kit est utilisé. Un volume de 200 μl de tampon AL est ajouté à l’échantillon qui est ensuite vortexé 15 s puis incubé 10 min à 70°C. Après incubation, 200 μl d'éthanol absolu pour biologie moléculaire sont ajoutés à l’échantillon qui est à nouveau vortexé 15 s. Le contenu du tube est alors transvasé sur la colonne QIAamp avant une centrifugation à 13400 rpm d’1 min. L’ADN se fixe alors sur la colonne. Le filtrat est éliminé et 500 μl de tampon AW1 sont ajoutés avant une centrifugation à 13400 rpm d’1min. L’étape ci-dessus est réitérée avec le tampon AW2. Après élimination du filtrat, une nouvelle centrifugation à 13400 rpm d’1min est appliquée pour éliminer toute contamination avec le tampon. La colonne est ensuite transférée dans un tube de 1,5 ml et 50 μl d’eau ppi sont ajoutés puis l’échantillon est laissé à incuber 5 min à température ambiante avant d’être centrifugé une dernière fois à 13400 rpm pendant 1 min. Dans un premier temps, avant congélation et conservation de l’extrait obtenu, le bon fonctionnement de l’extraction est vérifié par électrophorèse sur un gel d’agarose à 0,7 % contenant du bromure d'éthidium (BET). Le résultat de la migration est visualisé par fluorescence UV. Dans un deuxième temps, dans un souci de limiter l’exposition des agents à des produits CMR, l’emploi du BET a été supprimé du laboratoire. La pureté et la quantité d’ADN extrait sont dès lors vérifiées par mesure des absorbances à 260 et 280 nm à l’aide d’un ADEME 41 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 spectromètre Infinite M 200 Nanoquant (Tecan). Le ratio DO260nm/DO280nm permet de vérifier la pureté de l’ADN et doit être compris entre 1,8 et 2. 7.3 Amplification de l’ADN par PCR La PCR (Polymerase Chain Reaction) est une méthode permettant l’amplification in vitro d’un fragment d’ADN grâce à l’utilisation d’amorces spécifiques, d’une polymérase et des désoxyribonucléotides (dNTPs). Chaque cycle de température permet une dénaturation du brin d’ADN devenant monocaténaire, puis une hybridation des amorces et fixation de la polymérase, et enfin une élongation (copie) du brin ciblé par cette dernière. 7.3.1 Amplification de la région V3 de l’ADNr 16S Dans le but d’analyser la structure des communautés bactérienne et archées, la région V3 de l’ADNr 16S est amplifiée par PCR. Les bactéries sont ciblées spécifiquement par le couple d’amorce W49 (amorce spécifique des bactéries) et W104 (amorce universelle). Les archées quant à elles sont ciblées spécifiquement par les amorces W274 et W275 (tableau 5). Les amorces W104 et W275 sont marquées par un fluorochrome pour permettre la détection, par le laser de la CE-SSCP, du fragment amplifié. L’amplification des séquences bactériennes est réalisée dans 50 µl de mélange PCR contenant 5 µl de tampon 10x Pfu Turbo, 0,2 mM de dNTP, 8mM de chaque amorce, 1,25 U d’ADN polymérase Pfu Turbo (Stratagene, La Jolla, CA) et 1 µl d’ADN (dilué si nécessaire), complétés avec de l’eau ppi pour obtenir le volume réactionnel souhaité. Les cycles PCR sont réalisés dans un Mastercycler Epgradiant S (Eppendorf). Le programme de température appliqué est de 94°C pendant 2 min (dénaturation initiale), 25 cycles de 30 s à 94°C (dénaturation), 30 s à 61°C (hybridation), et 30 s à 72°C (élongation), suivis finalement de 10 min d’élongation à 72°C. L’amplification des séquences archéennes est réalisée dans 25 µl de mélange PCR contenant 2,5 µl de tampon 10x Pfu Turbo, 0,2 mM de dNTP, 8 nM de chaque amorce, 0,625 U d’ADN polymérase Pfu Turbo (Stratagene, La Jolla, CA), 1 µl d’ADN (dilué si nécessaire), complétés avec de l’eau ppi pour obtenir le volume réactionnel souhaité. Les cycles PCR sont réalisés dans un Mastercycler Epgradiant S (Eppendorf). Le programme de température appliqué est de 94°C pendant 2 min (dénaturation initiale), 30 cycles de 30 s à 94°C (dénaturation), 30 s à 65°C (hybridation), et 30 s à 72°C (élongation), suivis finalement de 10 min d’élongation à 72°C. 7.3.2 Amplification du gène de la benzylsuccinate synthase Pour amplifier les versions du gène bssA contenues dans les extraits d’ADN, des amorces spécifique W243 et W244 (tableau 5), dessinées au laboratoire (Barret, 2009), sont utilisées. L’amplification des versions du gène bssA présent dans les microorganismes de nos échantillons est réalisée dans 50 µL de mélange PCR contenant 5 µL de tampon 10x Pfu Turbo, 0,2 mM de dNTP, 8 nM de chaque amorce, 1,25 U d’ADN polymérase Pfu Turbo (Stratagene, La Jolla, CA) et 1 µL d’ADN (dilué si nécessaire), complétés avec de l’eau ppi pour obtenir le volume réactionnel souhaité. Les cycles PCR sont réalisés dans un Mastercycler Epgradiant S (Eppendorf). Le programme de température appliqué est de 94°C pendant 2 min (dénaturation initiale), 30 cycles de 30 s à 94°C (dénaturation), 30 s à 51°C (hybridation), et 30 s à 72°C (élongation), suivis finalement de 10 min d’élongation à 72°C. Le témoin positif utilisé pour cette amplifaction est de l’ADN d’Azoarcus sp. CIB. ADEME 42 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Tableau 5 : Amorces utilisées lors de l'étude des différentes communautés microbiennes. Amorce PCR/ PCR-Q Séquence (5’ – 3’) W49F PCR AGGTCCAGACTCCTACGGG W104R PCR TTACCGCGGCTGCTGGCAC W274F PCR CCCTACGGGGCGCAGCAG W275R PCR TTACCGCGGCGGCTG W243F PCR/ PCR-Q AARTGGCAAYGACGACGA (Barret 2009) W244R PCR/ PCR-Q TTCTGGTTTTTCTGCACTTT (Barret 2009) BAC338F PCR-Q ACTCCTACGGGAGGCAG (Yu et al. 2005) BAC805R PCR-Q GACTACCAGGGTATCTAATCC (Yu et al. 2005) BAC16F PCR-Q TGCCAGCAGCCGCGGTAATAC ARC787F PCR-Q ATTAGATACCCSBGTAGTCC (Yu et al. 2005) ARC1059R PCR-Q GCCATGCACCWCCTCT (Yu et al. 2005) ARC915F PCR-Q AGGAATTGGCGGGGGAGCAC Fluorochrome Référence (Zumstein et al. 2000) 3’- 6 - FAM 3’- 6 - FAM (Zumstein et al. 2000) (Braun 2011) et al. (Braun 2011) et al. 5’-Yakima yellow (Yu et al. 2005) 3’-TAMRA 5’-6-FAM 3’-TAMRA (Yu et al. 2005) 7.3.3 Vérification de l’efficacité d’amplification Après avoir stoppé toutes les réactions PCR en maintenant les échantillons à 4°C, l’efficacité des différentes PCR est vérifiée par électrophorèse. L’électrophorèse permet de séparer les brins d’ADN en fonction de leur poids moléculaire. Les acides nucléiques, chargés négativement, migrent électrophorétiquement à travers la matrice d’un gel sous l’effet d’un champ électrique. Plus le pourcentage d’agarose du gel est important, plus le maillage est serré. Plus le poids moléculaire des molécules est faible, plus elles migrent rapidement. Dans un premier temps, l’efficacité d’amplification PCR est vérifiée par électrophorèse sur un gel d’agarose à 2 % contenant du bromure d'éthidium (BET). Le résultat de la migration est visualisé par fluorescence UV. Dans un deuxième temps, toujours dans le but de limiter l’utilisation de produit CMR comme le BET, l’efficacité de l’amplification par PCR est vérifiée à l’aide du Bioanalizer 2100 (Agilent). Cet appareil permet une analyse des produits PCR par électrophorèse sur des puces en microfluidique. L’ajout d’un marqueur fluorescent permet de détecter les fragments d’ADN par fluorescence aux UV induite par un laser. ADEME 43 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires 7.4 La CE-SSCP Polymorphism) (Capillary Electrophoresis-Single Strand Février 2013 Conformation La CE-SSCP est une technique d’empreinte moléculaire qui permet de visualiser rapidement une image représentative de la communauté microbienne présente dans un échantillon. Cette méthode sépare les fragments d’ADN simple brin de même taille mais de séquence nucléotidique différente. Les fragments d’ADN amplifiés à l’aide d’amorces marquée lors de la PCR, sont préalablement dénaturés. Chaque fragment adopte ensuite une structure secondaire spécifique de sa séquence qui lui confère une vitesse de migration précise. Lors de la migration le brin marqué est détecté par un laser et visualisé sous forme de pic. Chaque espèce est représentée par un pic. La surface des pics est proportionnelle à la quantité d’ADN détecté et correspond donc à l’abondance relative d’une espèce au sein de l’écosystème (Delbès et al. 2001). 1 μl de chaque produit PCR amplifié à l’aide du couple d’amorces W49/W104-marqué en 5’ (fluorophore FAM) est dilué dans de l’eau ppi de manière à ce que l’intensité de fluorescence émise par l’échantillon ne dépasse pas la limite de détection du laser. 1 µl de chacune de ces dilutions est ensuite déposé dans une plaque 96 puits auquel est ajouté 18,8 μl de formamide et 0,2 μl de standard interne GeneScan ROX (Applied Biosystems). Ce dernier permet d’attribuer à chaque fragment une position de migration spécifique de sa structure secondaire, donc de sa séquence. Les échantillons sont ensuite dénaturés par chauffage (5 min à 95 °C), puis refroidis rapidement (10 min dans de la glace). L’électrophorèse est réalisée en séquenceur par l’ABI Prism 3130 genetic analyser (Applied Biosystems). Les fragments d’ADNr 16S migrent dans un capillaire (47cm×50μm) rempli à 5,6% d’un polymèred’analyse de conformation (GeneScan polymer, Applied Biosystems). Chaque amorce marquée par un fluorophore est détectée par le laser de l’appareil, qui transcrit le signal sous la forme d’un pic où chaque pic correspond à un fragment d’ADN. La migration de chaque échantillon est réalisée à 32°C pendant 30min sous une intensité de courant de 12kV. Chaque profil CE-SSCP est aligné avec un standard interne ROX pour corriger toute modification de la mobilité électrophorétique entre les différents passages. La somme des surfaces des pics a été normalisée avant l'analyse statistique. La complexité des communautés microbiennes a été estimée en utilisant l’indice de Simpson (D) à partir des profils (Simpson 1949). Cet indice est calculé à partir du nombre de pic et de leur abondance relative (air sous les pics) grâce à la formule suivante : D = -ln(∑(aire des pics)2). Ces étapes de traitement des profils ont été réalisées à l’aide du package StatFingerprints (Michelland et al. 2009) sur la version 2.11.1 de R (R. Develpment Core Team 2010). 7.5 Quantification des communautés par PCR quantitative La PCR quantitative permet de suivre en continu (« en temps réel ») le processus d’amplification PCR en détectant la fluorescence émise par le produit PCR formé. La quantification se fait en comparant un échantillon de référence à un échantillon à tester. En utilisant comme référence un échantillon où le nombre de molécule est connu, une quantification absolue de l’échantillon testé pourra être obtenue en nombre de copies. La réaction de PCR quantitative (PCR-Q) de quantification des bactéries et des archées est réalisée dans des plaques RT-PCR 96 puits (Eppendorf) par un Mastercycler ep realplex2S (Eppendorf). L’amplification est réalisée dans 25 µl de mélange PCR contenant 12,5 µl d’Express qPCR Supermix pré-mélangé à du ROX (Invitrogen), 5 µl d’ADN dilué, 10 nM de chaque amorce, et 8 nM de sonde TaqMan, complétés avec de l’eau pure pour obtenir le ADEME 44 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 volume réactionnel souhaité. Le programme de température appliqué est de 95°C pendant 2 min, suivi de 40 cycles de 15 s à 95°C, 1 min à 60°C. Pour chaque essai, une courbe de référence est générée en utilisant 10 degrés de dilution d’un produit PCR provenant de clones connus. Les clones DF10 et LC103 sont utilisés comme standard de référence pour les bactéries et les archées, respectivement. Pour chaque échantillon, trois dilutions sont testées. 7.6 Pyroséquençage Cette méthode consiste à séquencer un ADN monobrin par synthèse du brin complémentaire, base par base, en détectant à chaque étape le nucléotide qui a été ajouté. Des échantillons d’ADN totaux ont été envoyés à la société Molecular Research Laboratory (Texas, USA). Le séquençage des régions V4-V5 de l’ADNr 16S des bactéries et des archées a été réalisé sur GS-FLX 454 Titanium de Roche et les analyses bioinformatiques standard (contrôles qualité du process, qualité des séquences, groupement en OTU) ont été réalisées par cette même société. 7.7 Etude de la dégradation des PE par isotopie au carbone 13 7.7.1 Maintien des communautés microbiennes adaptées aux conditions de digestion et de dégradation des PE A partir de deux des triplicats des réacteurs continus (400 ml) inoculés par les microorganismes extraits de la boue, un réacteur semi continu de 800 ml est démarré en conditions stériles. Le mélange est assuré par un agitateur magnétique. Le réacteur est un réacteur à double enveloppe qui permet la régulation de la température à 35°C. Les pompes d’alimentation et de soutirage sont programmées de façon à opérer 4 cycles de soutiragealimentation par jour. Le volume pompé par cycle est calculé par pesée hebdomadaire des réservoirs d’alimentation et de soutirage. Le temps de fonctionnement des pompes est ajusté à partir de ce calcul, de façon à appliquer un TSH de 20 jours. 80 cycles se succèdent au cours d’un TSH ; ce mode semi-continu est donc assimilable à un mode continu. La boue d’alimentation (stérile et dopée) est continuellement agitée par un agitateur magnétique. Tout comme la boue de soutirage, elle est maintenue dans une enceinte réfrigérée pour limiter leur évolution. Un septum placé sur la sortie gaz permet le prélèvement pour une analyse de la composition du biogaz. La sortie gaz du réacteur est reliée à un système d’éprouvette renversée permettant la mesure du biogaz produit. 7.7.2 Etude en microcosmes L’étude en microcosme est réalisée dans l’unité de recherche « Hydrosystèmes et bioprocédés » de l’IRSTEA d’Antony. La boue de sortie du réacteur précédemment décrit est utilisée pour des tests isotopiques en microcosme. Le principe est de suivre la dégradation d’un substrat marqué isotopiquement avec du Carbone (lourd) 13. Des analyses en GC-C-IRMS permettent de détecter un enrichissement du biogaz produit en 13C, preuve d’une minéralisation du substrat étudié. Compte tenu du coût des molécules marquées au 13C, il n’est pas envisageable d’effectuer ses tests sur un cocktail de molécules. Le phénanthrène est retenu comme substrat d’étude. Les concentrations en phénanthrène marqué au 13C et le volume de boue à incorporer dans le microcosme, sont calculées de manière à produire suffisamment de biogaz isotopique 13C pour être détecté par les méthodes de mesure employées et être dans une fourchette de détection au-dessus des enrichissements naturels, sans pour autant apporter par la biomasse une quantité trop importante de Carbone 12 qui diluerait le carbone 13 (Tableau 6). ADEME 45 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Tableau 6 : Conditions expérimentales des tests isotopiques. Concentration en Volume de Facteur de dilution de la phénanthrène boue boue Condition 1 0,1 mg/l 0,5 ml 100 Condition 2 1 mg/l 5 ml 10 Condition 3 3 mg/l 5 ml 10 Afin de réaliser le dopage en phénanthrène marqué au 13C, une solution concentrée est préparée. Le phénanthrène (dont tous les carbones sont marqués au 13C) commercialisé sous forme de poudre (Cortecnet) est dissout dans de l’éthanol. La solution obtenue a une concentration calculée de 1,4 g/l. Un volume de solution concentrée (correspondant aux conditions expérimentales choisies (tableau 6) est introduit à l’aide d’une seringue dans une fiole pénicilline pyrolysée et stérilisée de 50 ml. Après évaporation du solvant, 5 ou 0,5 ml de boue de sortie de réacteur sont ajoutées ainsi que du surnageant de cette même boue de sortie pour obtenir un volume d’essai de 50 ml. 2 répliqua sont réalisés par condition. Une troisième fiole est réalisée dans les mêmes conditions mais la solution de dopage utilisée n’est pas marquée. Enfin une quatrième fiole, dite abiotique, est préparée pour chaque condition selon la même procédure en ajoutant de l’HgCl2 (méthode de stérilisation couramment utilisée pour stériliser des échantillons de sol) dans la solution à une concentration finale de 1,5 g/l. Les fioles sont ensuite fermées à l’aide d’un septum et scellées par une bague métallique. L’anaérobiose est obtenue en remplaçant l’air présent dans le ciel gazeux des microcosmes par de l’azote à l’aide d’une rampe à vide réalisée à la demande de l’IRSTEA par la société Swagelo. Les incubations sont réalisées dans une enceinte thermostatée à 35°C. Condition La composition isotopique du CH4 et du CO2 est analysée à l’aide d’un couplage en GC (Trace GC Ultra, Thermo Electron Corporation), un four de combustion (C) (Finnigan GC combustion II, Thermo Electron Corporation) et un spectromètre de masse isotopique (IRMS). 100 µl d’échantillon gazeux sont injectés dans l’injecteur grâce à une seringue à gaz. Le CH4 et le CO2 sont séparés par une colonne (Paraplot). L’injecteur est utilisé en mode split avec un ratio de 20 et est maintenu à une température de 150°C. Le four de la GC est programmé pour maintenir la température à 35° pendant 3 min, avant un montée en température (rampe de 60°C/min) jusqu’à un palier de 180°C, maintenu pendant 24 s. L’hélium est utilisé comme gaz vecteur à un flux de 1,8 ml/min. Les gaz traversent le four capillaire de combustion de l’appareil (tube de quartz rempli d’oxyde de cuivre porté à 940°C, où ils sont transformés en CO2). D’autres composés comme de l’eau ou des oxydes d’azote peuvent également être formés. Les oxydes d’azote sont réduits en N2 en traversant un four capillaire rempli de cuivre porté à 600°C. L’eau quant à elle, est piégée par une membrane hydroscopique. Le CO2, produit de la combustion de chaque composé carboné ainsi purifié, est introduit dans la source de l’IRMS, où il est chargé positivement. Les ions CO2+ sont accélérés et projetés sous forme d’un faisceau très fin dans un tube soumis à un champ magnétique. Les différentes formes isotopiques sont dérivées sur des trajectoires circulaires en fonction de leur masse. Trois collecteurs distincts (3 cages de Faraday) permettent leur détection. Les particules sont de masse m/z 44, 45 et 46. Des signaux électriques sont générés et dépendent de la quantité d’ions collectés. L’amplificateur, relié aux collecteurs, permet d’amplifier ces signaux qui sont ensuite transmis à un ordinateur. Là, ces données sont analysées et les rapports isotopiques 45/44 et 46/45 sont déterminés et comparés à ceux d’un gaz de référence introduit en début et fin d’analyse. Ces données permettent de calculer le rapport 13C/12C de chaque composé du mélange. La répétabilité de la mesure est testée en effectuant chaque analyse 3 fois. ADEME 46 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 8. L’évaluation des activités « perturbateur endocrinien » L’activité « perturbateurs endocriniens » est évaluée grâce à des bioessais in vitro sur différentes lignées cellulaires. Ces expériences sont réalisées à l’unité « Écotoxicologie in vitro et in vivo » de l’INERIS à Verneuil-en-Halatte. Les lignées cellulaires utilisées sont la lignée MELN, la lignée MAD-kb2 et la lignée PLHC1 qui permettent d’évaluer les activités œstrogénique, androgénique et /ou glucocorticoïde et enfin dioxin-like et HAP-like, respectivement. Les tests cellulaires sont réalisés sur des extraits d’échantillon provenant de boue totale, de phase particulaire et aqueuse. Les extraits sur la boue totale et le particulaire sont obtenus à partir des échantillons lyophilisés. L’extraction est réalisée à l’ASE. Le solvant utilisé pour l’extraction est un mélange volumique de dichlorométhane et de méthanol à 50/50 et les extraits sont repris dans du méthanol. Les échantillons de surnageant subissent une extraction liquide-liquide avec 100% de dichlorométhane. Avant d’effectuer les tests cellulaires, les échantillons sont repris dans du diméthylsulfoxyde (DMSO). Le mode opératoire des bioessais est divisé en trois grandes étapes, l’exposition des cellules à l’échantillon à analyser, la mesure de l’intensité de luminescence ou de fluorescence induite par l’activation des récepteurs et enfin le traitement des résultats permettant de calculer l’activité de l’échantillon testé (Figure 12). Figure 12 : Analyses en bioessais in vitro. 8.1 Génération de lignées cellulaires 8.1.1 La lignée cellulaire MELN La lignée cellulaire MELN, fournie par Patrick Balaguer de l’Institut de Recherche en Cancérologie de Montpellier (INSERM U896), dérive d’une lignée cellulaire humaine de cancer du sein (lignée MCF-7) qui exprime de manière endogène le récepteur aux œstrogènes ERα. Cette lignée a été produite en transfectant de façon stable le gène codant pour la luciférase placé sous le contrôle d’un élément de réponse aux œstrogènes (ERE) et du promoteur du gène de la β-Globine (Balaguer et al. 1999). 8.1.2 La lignée cellulaire MDA-kb2 La lignée cellulaire MDA-kb2, fournie par l’American Tissue Cell Collection (ATCC, N° CRL2713), dérive d’une lignée de cellules épithéliales humaines de cancer du sein (lignée MDA-MB-453) qui exprime de manière endogène le récepteur des androgènes (AR). Elle exprime également le récepteur des glucocorticoïdes (GR) alors que les récepteurs de la progestérone (PR) et des œstrogènes (ER) ne sont pas ou peu présents. Cette lignée a été établie en transfectant de façon stable le gène de la luciférase, placé sous le contrôle ADEME 47 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 transcriptionnel du promoteur viral MMTV (Mouse Mammary Tumor Virus) (Wilson et al. 2002). Ce promoteur est activé par les récepteurs AR, GR et PR activés. 8.1.3 La lignée cellulaire PLHC-1 La lignée cellulaire PLHC-1 utilisée dans cette étude a été obtenue à partir d’un hépatome de vairon tropical Poeceliopsis lucida induit par le dimethylbenzoanthracène (Ryan et Hightower 1994). Cette lignée présente l’intérêt d’avoir conservé certaines capacités métaboliques hépatiques et exprime notamment un fort taux de récepteurs AhR. 8.2 Exposition des cellules aux échantillons à analyser Deux jours avant l’exposition aux échantillons, les cellules sont ensemencées dans des plaques de culture à 96 puits blanches (MELN et MDA-kb2) et transparentes (PLHC-1) à une concentration de 103 cellules/µl de milieu de culture. Pour les activités hormonales, du milieu de culture sans rouge phénol complémenté par du sérum préalablement dé-stéroïdé (par prétraitement sur dextran et charbon actif) est utilisé afin de minimiser l’interférence du signal basal avec les stéroïdes apportés par le milieu nutritif et augmenter ainsi la sensibilité de détection du test. Afin de tester l’activité d'extraits d’échantillon à des concentrations Xi, un volume de chaque extrait est séché puis repris par du diméthylsufoxide (DMSO). Cette solution à 200X 1 est utilisée pour préparer, par dilutions successives, une gamme de solutions dont les concentrations sont : 200X2 (X2 = X1/3), 200X3 (X3 = X1/10), 200X4 (X4 = X3/10),….etc. 3 µl de chacune de ces solutions est ensuite dilué dans 200 µl du milieu de culture blanc pour obtenir une concentration de 3Xi. 50 µl de chacune des solutions ainsi réalisées sont introduits dans les puits contenant les cellules dans 100 µl de milieu. La concentration finale en échantillon dans chaque puits est de Xi. Dans ces conditions, le pourcentage en solvant est de 0,5 %. A cette concentration en solvant, les tests n’ont montré aucune altération de la viabilité cellulaire ou problème d’expression non spécifique de la luciférase ou de l’EROD. Les cellules sont ensuite incubées avec les extraits de boue, phase particulaire ou phase aqueuse pendant 16 heures (MELN et MDA-kb2) ; pour les cellules PLHC1, deux durées sont testées, 4h (activité HAP-like) et 20 heures (activité dioxin-like). 8.3 Lecture des plaques 8.3.1 Plaques MELN et MDA-kb2 A la fin de l’incubation, le milieu contenant les échantillons à tester est remplacé par 50 µl du milieu de culture blanc contenant la luciférine (0,3 mM). L’activation des différents récepteurs par les ligands contenus dans les extraits induit la synthèse de luciférase qui transforme la luciférine en oxyluciférine avec production de lumière. Le signal luminescent est stable au bout de 5 min. Les plaques de 96 puits sont ensuite placées dans un luminomètre lecteur de plaque (Microbeta Wallac Luminometer) et la luminescence est mesurée à une vitesse de 2 s/puits. Les résultats bruts sont exprimés en unité relative de luminescence (RLU : Relative Luminescence Unit) puis convertis en pourcentage d’activité luciférase. La valeur de 100 % correspond à l’activité induite par le ligand de référence à une concentration saturante. 8.3.2 Plaques PLHC-1 A la fin de l’incubation, le milieu de culture est remplacé par 100 µl de milieu sans rouge phénol contenant la 7-ERF à la concentration de 2 µM. Juste après le remplissage de tous les puits par la 7-ERF, la formation de la résorufine est mesurée dans les cellules vivantes, toutes les 30 s pendant au moins 20 min, à l’aide d’un spectrofluorimètre lecteur de plaque (Victor, Perkin Elmer, France). La longueur d’onde d’excitation utilisée est de 530 nm pour une longueur d’onde d’émission de 590 nm. Les résultats bruts enregistrés sont en unité de ADEME 48 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 fluorescence par minute. Ces résultats sont ensuite convertis en pourcentages relatifs de l’activité EROD maximale induite par un ligand de référence (BaP ou TCDD) à une concentration saturante. 8.3.3 Analyses des données in vitro L’activation des récepteurs par les extraits de boue (totale, phase particulaire et phase aqueuse) est exprimée en pourcentage de l’activation maximum induite par le ligand de référence à concentration saturante. Les ligands de référence de chaque test et leurs concentrations effectives sont représentées dans le Tableau 7. Tableau 7 : Ligands de référence et concentrations (en nM) effectives (EC50) et saturantes (témoin positif dans le bioessai). Récepteur Lignée cellulaire ER MELN AR AhR-4h Ligand de référence EC50 ECsaturante 17β-E2 0,018 10 MDA-kb2 DHT 0,1 10 PLHC-1 BaP 4 100 AhR-24h PLHC-1 TCDD 0,1 1 Des courbes dose-réponse sont établies pour chaque échantillon et analysées à l’aide d'une "macro" Excel Regtox 7.5 développée par Vindimian et al. (1983) librement disponible sur le site http://www.normalesup.org/~vindimian/fr_index.html. Cette macro, basée sur le modèle de Hill, permet de déterminer la concentration en échantillon pour laquelle 20, 25 ou 50% de l’activation maximale est obtenue (EC20, EC25 ou EC50, EC : effective concentration). Ainsi, en comparant les valeurs des EC20 du ligand de référence à celles de l’échantillon analysé, on détermine l’activité de l’échantillon exprimée en masse d’équivalent de ligand de référence par masse d’échantillon (Ref-EQ). En théorie, le calcul de l'équivalent implique que les courbes dose-réponse aient le même minimum, le même maximum et la même pente, ce qui est rarement le cas. Un éloignement du modèle de référence est fréquemment constaté avec l'augmentation de la concentration, lié notamment à des interférents et des effets de mélange. Utiliser l’EC20 permet de se placer dans les conditions les plus proches possible du modèle de référence. L’activité toxique-équivalent (TEQ) de l’échantillon testé est donnée par la formule : TEQ= Ref-EQ = EC20 REF / EC20 échantillon avec Ref, le ligand de référence du test. 9. Calculs et analyse des données 9.1 Le calcul des abattements des PE sur les réacteurs continus et batch La comparaison des paramètres d’entrée et de sortie des réacteurs permet de déterminer le taux d’abattement, que ce soit pour les paramètres macroscopiques des réacteurs (matières sèches, matières volatiles, DCO…) ou pour les micropolluants. Le taux d’abattement est calculé après avoir atteint l’état stationnaire, soit après 3 à 4 TSH, dans notre cas, entre 60 et 80 jours de digestion. Le calcul des taux d’abattement sur les données macroscopiques est basé sur un calcul de taux d’abattement pour chacune des 5 dernières semaines de chaque phase d’étude, c’està-dire entre 40 et 60 jours après le démarrage des réacteurs. ADEME 49 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Abattement Février 2013 moyenne( sortie) moyenne(entrée ) 100 moyenne(entrée ) avec moyenne(sortie), la moyenne des concentrations en sortie sur les 5 dernières semaines et moyenne(entrée), la moyenne des concentrations en entrée sur les 5 dernières semaines. Ainsi, le taux d’abattement moyen et l’écart-type correspondant sont obtenus. Sur les réacteurs batch, la vitesse d’élimination des PE (µg/l/j) est mesurée par différence de concentration entre deux réacteurs sacrifiés à chaque pas de temps de la cinétique. De la même façon, les vitesses de production de méthane (mlCH4/gDCO/j) et d’accumulation d’AGV (g/l/j) sont calculées. 9.2 Le calcul des coefficients de partage L’analyse des PE s’est faite sur la boue totale (CPE,tot), sur le compartiment particulaire (CPE,part) et sur la phase aqueuse (CPE,aq), concentrations exprimées respectivement en µg/gMS, µg/gMS,PART, µg/l. Seulement pour les HAP, dans la phase aqueuse, nous avons aussi accès à la concentration libre (CPE,free), exprimée en µg/l et qui permet de déduire la concentration sur le compartiment organique dissous/colloidal (CPE,DCM), exprimée en (µg/gMS,DCM), selon la formule suivante : CPE,aq = CPE,free + (CPE,DCM × [MS,DCM]) Avec [MS] = [MS,PART] + [MS,DCM] Ainsi, les coefficients de partage, qui représentent l’affinité des PE pour les matières organiques du compartiment particulaire et du compartiment dissous/colloidal (DCM) sont respectivement: K part C PE , part C PE , free 9.3 (l/gMS,PART) et K DCM C PE , DCM C PE , free (l/gMS,DCM). Les tests statistiques Des tests statistiques sont utilisés lors de cette étude pour rechercher des liens entre les paramètres étudiés (test de corrélation et Analyse en Composante Principale, PCA) ou pour vérifier si les différences en terme de performance de dégradation des polluants, performance des réacteurs anaérobies, paramètres caractéristiques des communautés microbiennes, sont significatives ou non (Analyse de variance, ANOVA) et d’identifier quels groupes sont différents (test de Student Newman Keuls, SNK). Ces différents tests statistiques sont réalisés à l’aide du logiciel R version 2.11.1 (R. Develpment Core Team 2010). L'analyse de la variance (ANOVA) est un test statistique permettant de vérifier que plusieurs échantillons sont issus d'une même population, c'est à dire qu'ils ont statistiquement une même moyenne. C'est une généralisation du test de Student. Ainsi pour ce test, l'hypothèse nulle (H0) correspond au cas où les distributions suivent la même moyenne et l'hypothèse alternative est qu'il existe au moins une distribution dont la moyenne s'écarte des autres moyennes. Le rejet ou non de l’hypothèse nulle est décider en étudiant la p-value (probabilité critique). Si la p-value est inférieur à 0,05 alors H0 est rejetée avec 5 % de risque. Si elle est supérieure à 0,05, le risque est trop grand pour rejeter H 0, l’hypothèse « nulle » est donc validée. ADEME 50 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Le test student Newman Keul (SNK) est un test de comparaison a posteriori qui permet, lorsqu’un test de type ANOVA révèle des différences entre échantillons, de savoir quels sont les échantillons qui diffèrent entre eux. Dans notre étude, il est réalisé en utilisant la fonction snk de la librairie R mutoss (MuToss coding Team et al. 2010) Le coefficient de corrélation de Pearson est un coefficient de corrélation linéaire simple qui permet d’appréhender le degré de liaison qui peut exister entre deux variables, en mettant en évidence le sens de la liaison et son intensité. En effet s’il est nul les variables sont indépendantes, plus il se rapproche de 1 plus les variables sont liées. S’il est positif les variables évoluent dans le même sens, s’il est négatif elles évoluent dans des sens opposées. L’Analyse en Composante Principale (ACP) permet l’examen des corrélations entre de nombreuses variables. Elle permet de visualiser et d’analyser rapidement les corrélations entre les variables et de visualiser et d’analyser les différents échantillons décrits par les variables sur un graphique à deux dimensions (construit de manière à maximiser les différences entre échantillons). Elle permet aussi de représenter sur le même plan, échantillons et variables et ainsi d’identifier des tendances. Des corrélations entre la distribution des échantillons sur l’ACP avec d’autres paramètres (fonctionnement du procédé, conditions opératoires, inoculum source) ont été réalisées. La librairie R vegan (Oksanen et al. 2010) a été utilisée. La régression linéaire des moindres carrés partiels (Partial Least Squares, PLS) est appliquée lorsque une variable (bloc de Y) est à expliquer/prédire en fonction de plusieurs variables explicatives/prédictives (bloc des X). L’hypothèse de l’existence d’une relation linéaire entre Y et chaque prédicteur est posée. Cette technique de régression est basée sur la construction de facteurs (également nommés composantes principales) en minimisant la covariance entre le bloc de Y et le bloc des X. Le premier facteur contient le pourcentage le plus élevé de variance, et les facteurs suivants des pourcentages décroissants. Le nombre de facteurs à inclure (dimension) est déterminé en minimisant la moyenne des carrés des erreurs de prédiction (PRESS) par une procédure de validation croisée. Une régression multivariée du bloc de Y en fonction des facteurs (et donc du bloc des X) est ensuite réalisée. Cette technique présente l’avantage de pouvoir considérer des variables explicatives liées. Les régressions PLS sont mises en œuvre grâce à la version 1.2.2 du logiciel libre R, et en employant des fonctions préalablement développées. Le modèle obtenu peut être utilisé en tant que prédiction. Pour réaliser des prédictions de Y à partir d’un bloc de X contenant des variables explicatives indéterminées, une version de démonstration du logiciel The Unscrambler 9.6 est utilisée. Grâce à ce logiciel, les variables manquantes sont estimées à partir de leurs coordonnées, déterminées lors de la construction des facteurs. Le bloc de X ainsi « complété » permet d’appliquer le modèle pour prédire les Y correspondant. ADEME 51 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 RESULTATS ET DISCUSSION Tout au long de ce travail, nous avons considéré : (i) la digestion anaérobie comme un procédé modèle permettant de transformer la matière organique et donc de jouer à la fois sur les propriétés de sorption des PE mais aussi sur l’expression de métabolismes microbiens variables, (ii) notre substrat « boue » comme un système à plusieurs compartiments physiques, séparés selon la taille des particules les constituant et pouvant héberger les PE (figure 13). Boue F3 F4 HAP,libre 1 kDa HAP, DCM F2 10 kDa Particulaire F1 0,1 µm 1,2 µm HAP,part Matière dissoute colloïdale DCM Figure 13 : les différents compartiments de la matrice séparés selon la taille des particules les constituant. Le compartiment « particulaire » avec des particules de taille supérieure à 1,2µm obtenu après centrifugation de l’échantillon de boue (culot). Le compartiment « dissous colloïdal » ou « DCM » avec des particules de taille inférieure à 1,2 µm obtenu après centrifugation de la boue et filtration du surnageant à 1,2 µm. Par filtration et ultrafiltration du surnageant, obtention des fractions F1 à F4. Présence du PE (HAP) sous forme libre ou associé à la DCM, la somme de ces deux compartiments donnant le compartiment aqueux déterminé par extraction liquide-liquide ou SPE ou SPME. Présence du polluant associé au particulaire déterminée par extraction sous solvant. La somme des trois compartiments donne la teneur totale qui est mesurée par extraction sous solvant sur l’échantillon brut. Ainsi, les PE peuvent se retrouver dans les différents compartiments de la boue selon l’affinité qu’ils vont développer avec les matières organiques présentes dans ces compartiments. Cette affinité peut être transcrite sous la forme de coefficients de partage, Kpart et KDCM, respectivement affinité pour le compartiment particulaire et affinité pour le compartiment DCM, tels que décrits dans le § 9.2. 1. Effet de matrices « boue » différentes sur les propriétés de sorption et sur la dégradation des perturbateurs endocriniens : lien biodisponibilité-sorption-biodégradation. Les parties 1 et 3 du projet portant sur « Evaluation de la composante physique : étude des phénomènes de sorption sur différentes matrices boues » et « Evaluation du potentiel métabolique : impact des caractéristiques de la matrice boue sur la biodégradation des PE » ont été traitées simultanément (cf schéma de projet, figure 2). Elles s’intègrent pleinement dans les objectifs de la thèse de Glenda Cea Barcia (bourse Chilienne Conicyt). L’objectif était ici de travailler à populations microbiennes constantes et de ne faire varier que l’environnement matriciel, afin d’observer l’effet d’une disponibilité variable des polluants (matrice variable sorption variable disponibilité variable) sur la dégradation des polluants. En effet, les résultats de Barret et al. (2010a) montrent que la composition physico-chimique d’une boue influe sur l’affinité des polluants pour les différents compartiments de cette boue (particulaire et dissous/colloïdale). 1.1 Etudes menées en réacteurs continus : influence de matrices « boue » différentes sur les performances de dégradation des perturbateurs endocriniens. Les premières études ont été menées en réacteurs continus, inoculés avec une boue industrielle anaérobie qui connaît une contamination aux HAP depuis de longues années, et ADEME 52 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 alimentés avec des boues différentes. Pour obtenir des caractéristiques d’alimentation différentes, deux boues réelles ont été tout d’abord échantillonnées sur site (boue primaire PS et boue secondaire HLSS). Etant donné l’intérêt porté sur les pré-traitements en amont de la digestion anaérobie, et à la vue des résultats intéressants obtenus en matière de sorption (Barret et al., 2010a), un pré-traitement thermique a aussi été appliqué à la boue PS avant sa méthanisation (TTPS). Toutefois, ces trois substrats n’ont pas permis de générer des performances de digestion anaérobie très différentes. La stratégie d’alimentation s’est alors orientée vers la fabrication de substrats composites. Ainsi, la boue HLSS a été mélangée à de la cellulose micro-cristalline pour obtenir C-HLSS. La cellulose étant un substrat entièrement biodégradable, le substrat C-HLSS devrait induire un haut cométabolisme. De plus, le pourcentage de matière dissoute et colloïdale (DCM) dans l’alimentation étant divisé par un facteur 2, des répercussions sur la concentration en DCM et donc sur la fraction aqueuse des polluants sont attendues. Enfin, la cinquième boue d’alimentation a été fabriquée par dilution de la boue HLSS avec son propre surnageant, de façon à augmenter la proportion de DCM sans modifier les propriétés ni des particules ni de la DCM. La DCM étant également plus facilement biodégradable que la matière particulaire, et permettant de déplacer les polluants vers la fraction aqueuse par sorption, la boue SupHLSS a été conçue de façon à favoriser un fort co-métabolisme et une forte biodisponibilité des polluants. Ces 5 bioréacteurs ont été suivis sur 5 temps de séjour hydraulique afin d’atteindre l’état stationnaire et les performances de digestion et de dégradation des polluants ont été évaluées (figure 14 et tableau 8) et confrontées aux caractéristiques physico-chimiques des 5 substrats (figure 15). Figure 14 : Performances de dégradation des polluants (HAP, PCB, NP) obtenues sur 5 réacteurs continus alimentés avec 5 substrats différents. Pour chaque composé, la p-valeur entre 5 jeux de données (3 pour PCB) est indiquée en italique. Les abattements sont considérés comme statistiquement différents pour une p-valeur inférieure à 0.05. ADEME 53 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Tableau 8 : Performances de digestion des 5 bioréacteurs anaérobies alimentés avec des boues différentes. Substrat PS TTPS HLSS C-HLSS Sup-HLSS % Abattement MS 49 9 60 10 58 10 79 5 52 11 Ratio méthane/dioxyde de carbone 69/31 71/29 70/30 60/40 70/30 Les 5 réacteurs présentent des performances différentes de digestion et de dégradation des polluants : les caractéristiques des boues/substrats influent donc à la fois sur le métabolisme général du système et sur le métabolisme spécifique des polluants. Tableau 9 : Caractéristiques des 5 boues/substrats. Boues DCO gO2/L MS gMS/L DCM % MS Protéines geqSAB/gMS Sucres geqGlu/gMS Sucres cellulose geqGlu/gMS Lipides gPEEM/gMS AGV gAGV/gMS PS TTPS HLSS C-HLSS SupHLSS 28 ±4 27 ±3 22 ±2 27 ±2 19 ±2 24 ±2 20 ±2 19 ±1 21 ±4 16 ±2 5 ±1 11 ±2 4 ±4 8 ±7 14 ±4 0.27 ±0.03 0.3 ±0.1 0.25 ±0.02 0.16 ±0.03 0.29 ±0.05 0.29 ±0.09 029 ±0.15 03 ±0.1 0.2 ±0.19 0.26 ±0.06 0 0 0 0.46 0 0.13 ±0.05 0.15 ±0.06 0.1 ±0.04 0.06 ±0.04 0.1 ±0.05 0.03 ±0.02 0.04 ±0.01 0.04 ±0.04 0.02 ±0.04 0.1 ±0.02 La boue primaire est plus riche en protéines et en lipides que la boue secondaire (tableau 9). Ces différences pourraient expliciter les performances moindres avec PS. Le pré-traitement thermique de PS réduit considérablement les performances ‘polluant’ alors que les performances ‘digestion’ sont largement accrues. Lorsque la cellulose est ajoutée à HLSS, les performances ‘polluant’ sont réduites alors que les performances ‘digestion’ sont ellesmêmes fortement augmentées. Ceci signifie que la synergie co-métabolique avec les polluants n’est pas déterminée uniquement par le métabolisme général. Cette synergie est peut-être liée à un métabolisme plus spécifique ou bien le co-métabolisme n’est pas ici le facteur limitant la dégradation des polluants. Les performances ‘polluant’ et ‘digestion‘ les plus faibles sont obtenues avec le réacteur Sup-HLSS alors que les fortes proportions de DCM de ce substrat étaient supposées améliorer la disponibilité des polluants et donc leur dégradation. Dans ce cas là, l’effet co-métabolisme est prédominant sur l’effet biodisponibilité. Pour conclure, les performances ‘polluant’ peuvent donc être expliquées soit par des variations de co-métabolisme ou par des niveaux de disponibilité différents. Ceci suggère qu’il est très difficile de savoir quel est le facteur limitant ou quel poids relatif on peut donner à l'un ou l'autre des deux facteurs. Cependant une caractérisation précise de la boue/substrat permet de prédire les performances ‘polluant’ (figure 15a) au moyen d’une analyse statistique type PLS (établir une relation linéaire entre des variables explicatives, les caractéristiques des boues, et une variable à expliquer, l’abattement en polluants dans les réacteurs anaérobies). Le modèle de régression est le suivant (unité du tableau 9 pour les variables): Abattement(%) = 151 + 0.41logKow – 0.077M – 1.94n5C – 3.08n6C – 1.86nCl – 11.8nOH + 0.08logH + 131DCM – 24Protéine -45.7Sucre -336Lipide – 54.2Cellulose – 577AGV avec un coefficient de corrélation de 0.78, ce qui suggère une bonne prédiction des abattements en polluants via les caractéristiques des boues/substrats. ADEME 54 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 15 : (a) Les performances ‘polluant’ mesurées versus les performances modélisées par la PLS (régression linéaire des moindres carrés) établissant un lien entre les performances de dégradation des polluants et les caractéristiques des boues/substrats et des polluants. Les coefficients centrés et réduits des variables ‘boue’ (noirs) et ‘polluant’ (gris) donnés par l’analyse PLS (b).VFA : acides gras volatils, n6C : nombre de cycles à 6 carbone, n5C : nombre de cycles à 5 carbone, nOH : nombre de groupement OH, nCl, nombre de chlore. (Barret et al., 2010b) Le poids des caractéristiques ‘boue’ et ‘polluant’ peut être comparé via les coefficients centrés et réduits donnés par la PLS (figure 15b). La teneur en AGV a le plus de poids négatif sur l’abattement en polluants car la concentration la plus élevée a été mesurée dans la boue Sup-HLSS et ce réacteur présente les abattements les plus faibles en polluant et en MS et DCO. Or, les AGV dans ce réacteur sont intégralement dégradés, ils ne sont donc pas directement impliqués dans la baisse du potentiel à dégrader les polluants, mais par contre il est possible qu’un autre inhibiteur ait été présent lors de la supplémentation avec le surnageant, ce qui réduit le potentiel global et celui des polluants. La teneur en lipides est le second facteur ayant le plus d’importance (influence négative). D’une part, les lipides sont difficilement accessibles aux microorganismes et donc abaissent le métabolisme général. D’autre part, ils favorisent la sorption des polluants sur les particules et diminuent alors leur disponibilité. Ces deux effets agonistes contribuent à cet effet fortement négatif des lipides sur les performances ‘polluant’. Le seul paramètre ayant une influence positive est la teneur en DCM. Cette dernière doit jouer à la fois sur la proportion de polluants présents dans ce compartiment qui est selon l’hypothèse la plus couramment admise le compartiment le plus disponible aux microorganismes (Artola-Garicano et al., 2003 ; Urase and Kikuta, 2005 ; Dionisi et al., 2006), mais aussi parce que cette DCM est un compartiment plus accessible aux microorganismes de la digestion anaérobie et permet d’activer le métabolisme général. 1.2 Les études menées en réacteur batch : influence de différentes matrices « boue » sur les performances de dégradation des perturbateurs endocriniens et sur leur distribution dans les compartiments « matière » de la boue Ces expériences en réacteurs continus à l’équilibre montrent clairement l’influence des caractéristiques physico-chimiques de la matrice sur les performances de dégradation des polluants, mais il reste très difficile de dissocier les divers effets : à savoir de distinguer entre un effet sur la sorption/disponibilité et un effet via le métabolisme microbien général. Forts de ces expériences, nous avons conduit des expérimentations en réacteurs discontinus où l’objectif était de réduire l’effet population microbienne et donc le métabolisme général en ADEME 55 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 mesurant des performances ‘polluant’ instantanées (vitesses initiales). Pour cela, les tests ont été effectués avec 80% (en poids) d’inoculum adapté aux polluants modèles provenant d’un digesteur anaérobie de laboratoire (digestat issu du réacteur alimenté avec HLSS), et mis en présence avec 20% de diverses boues, avec une quantité de DCO initiale équivalente. 1.2.1 Les performances globales de dégradation Un premier test a été effectué dans ces conditions de mélange et permet de mesurer la dégradation des polluants tout en observant une activité de production de biogaz et de dégradation de la matière sèche avec un léger temps de latence par rapport au témoin sans polluant (figure 16). 250 mL CH4/gDCO initiale SS SS sans polluant 200 12%MS 150 100 50 0 0 20 40 60 Jours Figure 16 : Production de méthane au cours des tests batch avec un ratio inoculum-boue de 80/20 en poids avec et sans polluant. HLSS=boue secondaire forte charge. Un réacteur batch mené dans les mêmes conditions que précédemment décrites mais qui a été autoclavé 30 minutes à 120°C afin de supprimer l’activité biologique montre que des pertes abiotiques sont observables pour les trois plus petits HAP (figure 17). Abiotique SS 30 20 10 Indeno B(ghi)P DBA B(a)P B(k)F B(b)F Chrys B(a)A Pyr Fluorant Anthra -10 Phenant 0 Fluorène Pertes en HAP totaux (%) 40 -20 Figure 17 : Pertes abiotiques observées dans un réacteur batch avec un ratio inoculum-boue de 80/20 en poids. Aucune activité biologique n’est observée : absence de production de biogaz et aucune réduction de la matière sèche. De plus, les mélanges inoculum-boue testés présentent des capacités de sorption différentes (évaluées via le modèle développé par Barret et al. (2010a) grâce à la caractérisation biochimique des mélanges) et donc des distributions supposées différentes dans les compartiments « matière ». Les matrices boues ont été choisies afin d’avoir une distribution initiale des composés dans les compartiments la plus diverse possible : (1) boue secondaire ADEME 56 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 faible charge-LLSS (fortement stabilisée), (2) boue secondaire forte charge-HLSS (très réactive)), (3) cette dernière dont on a modifié la phase dissoute-colloïdale-HLSS-1KDa (présence uniquement de colloïdes inférieurs à 1kDa). Ces 3 systèmes ont été caractérisés au temps initial et ont été suivis sur 7 pas de temps afin d’évaluer les vitesses de dégradation des polluants ajoutés au temps initial. Pour ces 3 systèmes, nous avons des données sur les teneurs totales en polluants (HAP, NP, PCB), les teneurs dans la phase aqueuse (HAP, PCB), les teneurs des polluants libres et sorbés à la matière dissoutecolloïdale (HAP) à T0 (temps initial) et au cours du temps (cf § 6.5 matériel et méthodes). B A 250 HLSS HLSS 200 200 12% DM 12% DM 150 150 6% DM 100 9% DM 100 HLSS-1kDa LLSS 50 50 0 0 10 20 30 40 50 0 60 0 C 20 30 40 50 60 Days D 60 HLSS 60 HLSS-1kDa 0.047 HLSS LLSS < 0.01 50 50 40 40 0.15 30 0.05 0.05 30 < 0.01 < 0.01 < 0.01 < 0.01 < 0.01 < 0.01 < 0.01 NP Indeno B(ghi)P < 0.01 < 0.01 DBA < 0.01 B(a)P NP Indeno DBA B(ghi)P B(a)P B(k)F B(b)F Chrys Pyr B(a)A Anth 0 0.54 B(k)F 0.1 0 Fluor < 0.01 Chrys < 0.01 10 Phe 0.01 Pyr < 0.01 Fluor < 0.01 < 0.01 10 Phe 0.038 < 0.01 20 0.02 B(a)A 0.77 Anth 0.018 Fluo 20 Fluo OPs total removal (%) 10 Days B(b)F m L C H 4/gC O D initial 250 Figure 18 : Performances ‘digestion’ (A et B, production de méthane et abattement en MS) et ‘polluants’ (C et D, abattements mesurés via les concentrations totales) dans les réacteurs batch en fonction de 3 substrats différents, comparés deux à deux. HLSS=boue secondaire forte charge, HLSS-1KDa (HLSS avec présence uniquement de colloïdes inférieurs à 1kDa) et boue secondaire faible charge-LLSS. Pour chaque composé, la p-valeur entre les 2 jeux de données est indiquée en noir. Les abattements peuvent être considérés comme significativement différents pour des p-valeurs inférieures à 0.05. Les systèmes ainsi mis en œuvre nous permettent d’observer des abattements en polluants totaux (analyses réalisées sur la totalité de la boue) à mettre en lien avec une activité de méthanisation (production de biogaz et abattement de la matière sèche), ces performances sont significativement différentes pour les trois substrats (figure 18). La boue HLSS présente les meilleures performances tandis que la boue LLSS les moins bonnes, ce qui s’explique par la nature même des boues forte et faible charge, respectivement. De plus, les cinétiques sur polluants totaux nous montrent que l’abattement des polluants est intimement lié à la production d’acides gras volatils, intermédiaires de la digestion anaérobie, soit donc lié aux premières étapes d’acidogenèse et d’acétogenèse (figure 19). ADEME 57 160 1 150 0,8 140 0,6 130 0,4 120 110 0,2 100 0 0 rIndéno: 20 J ours 1,45 µg/L/jour 40 A c étate g /L C H4 L /L HA P ug /L Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Indéno(1,2,3,c,d) P yrène-batch1 Indéno(1,2,3,c,d) P yrène-batch2 Acétate C H4 60 rAcetate: 0,032 g/L/jour Figure 19 : Cinétique de dégradation de l’indéno(1,2,3cd)pyrène (concentration totale) au cours de la digestion de la boue HLSS. Pour les PCB, les résultats sont très différents : les abattements totaux pour la somme des 7 PCB ne sont pas significativement différents pour les trois mélanges (figure 20). Cela semble signifier que les abattements des PCB ne sont pas affectés ni par l’abattement de la matière sèche, ni par une disponibilité des PCB différente. Les PCB ne sont pas dégradés comme les HAP. En effet, les premières étapes de dégradation consistent en une déhalogénation réductrice (échange des atomes de chlore pour des atomes d’hydrogène) où les PCB jouent le rôle d’accepteurs d’électrons (Smidt and deVos, 2004). Ainsi les plus gros PCB vont donner des plus petits PCB, ceux-ci sont donc à la fois produits et dégradés. Afin de s’affranchir de ce biais, nous ne considérerons que le PCB180, le plus substitué, qui ne pourra être que dégradé au cours de nos incubations. Ce PCB présente les abattements les plus élevés mais statistiquement non différents selon les trois conditions (figure 20) 30 Total removal % 25 20 HLSS 15 HLSSF4 HLSS LLSSHLSS-1kDa 10 LLSS 5 0 PCBs Sum PCB 180 Figure 20 : Abattements totaux pour la somme des 7 PCB et pour le PCB180 mesurés sur les réacteurs batch en fonction des 3 substrats. ADEME 58 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 1.2.2 Distribution des PE dans les compartiments « matière » des boues et lien avec les performances de dégradation des PE 1.2.2.1 Cas des HAP L’analyse de la distribution des HAP dans les différents compartiments de la boue au temps initial (figure 21) montre que : -quelle que soit la boue, la fraction aqueuse (figure 21 B et D) est très faible, inférieure à 1,5 % pour LLSS, 1% pour HLSS et 0,5 % pour HLSS-1KDa, et ce quel que soit le HAP, seule la fraction aqueuse du fluorène, le plus petit HAP, est plus élevée autour de 2%, -dans cette fraction aqueuse, les HAP légers se retrouvent principalement dans la fraction libre mais aussi un peu dans la fraction DCM tandis que les HAP lourds sont uniquement dans la fraction DCM, -la distribution est différente entre les trois boues : les fractions libre et aqueuse de HLSS1KDa sont les plus faibles des trois boues alors que la fraction DCM de LLSS est la plus élevée, même pour les HAP légers. Pour illustrer cette distribution différente dans les trois boues, la concentration de trois HAP dans les compartiments libre et DCM est donnée dans le tableau 10. Pour le chrysène (HAP de poids moléculaire moyen), elles sont de 251 et 867 ng/L respectivement pour HLSS-1KDa contre 671 et 5188 ng/L pour LLSS avec une concentration totale de 373 701 ng/L. A B 3,0 HLSS-1kDa HLSS % Cfree/C Total HLSS HLSS HLSS LLSS 2,0 2,0 Indeno B(ghi)P DBA B(a)P B(k)F B(b)F Chrys B(a)A Pyr Anthra 2,5 Fluorant HLSSF4 HLSS-1kDa HLSS HLSS Fluorene D 3,0 Phenant Indeno B(ghi)P B(k)F DBA 0,0 B(a)P 0,0 B(b)F 0,5 Chrys 0,5 B(a)A 1,0 Fluorant 1,0 Pyr 1,5 Phenant 1,5 Anthra % C aqueous/C total 3,0 2,5 2,5 Fluorene C HLSSF4 3,0 HLSS Indeno B(ghi)P B(a)P DBA B(b)F B(k)F B(a)A Chrys Pyr Anthra Fluorant Fluorene Phenant Indeno B(ghi)P DBA B(a)P 0,0 B(k)F 0,0 B(b)F 0,5 Chrys 0,5 B(a)A 1,0 Fluorant 1,0 Pyr 1,5 Phenant 1,5 Anthra 2,0 Fluorene 2,0 LLSS HLSS 2,5 Figure 21 : Distribution des HAP dans les compartiments des boues HLSS, HLSS-1KDa et LLSS au temps initial. A et B ratio CPE,free sur CPE,total, B et C ratio CPE,aq sur CPE,total. ADEME 59 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Tableau 10 : Distribution du pyrène, chrysène et indéno(1,2,3,c,d)pyrène dans les compartiments des trois mélanges initiaux en ng/L. Sludge mixture HLSS HLSS-1kDa LLSS CHAP,free CHAP,DCM CHAP,aq Pyr Chrys Indeno Pyr Chrys Indeno Pyr Chrys Indeno 1871 926 36 497 2289 401 2368 3215 437 727±24 251±13 12±2 540 867 281 1266±32 1127±254 293±98 2117±62 671±11 30±6 3460 5188 1012 5578±402 5859±81 1042±169 Si l’on compare cette répartition initiale des HAP dans les compartiments avec les abattements mesurés (figure 18 et 21) sur HLSS et HLSS-1KDa, les abattements en polluants les plus élevés sont observés pour HLSS (plus grande différence observée pour les HAP du chrysène à l’indénopyrène) où les concentrations dans le compartiment DCM sont les plus élevées : l’interaction HAP et DCM améliorerait la biodisponibilité des polluants. Ajoutons que ce compartiment DCM est aussi très différent en quantité et en nature biochimique entre HLSS et HLSS-1Kda, puisque ce dernier est dépourvu des gros colloïdes et que sa concentration en DCO est bien plus faible. Il peut donc aussi jouer sur l’expression d’un métabolisme global moindre, ce qui est observé par la réduction de la matière sèche qui n’est que de 9% contre 12% pour HLSS. Dans ce cas, les deux aspects biodisponibilité et co-métabolisme jouent en faveur du mélange HLSS et entrainent pour ce mélange l’observation des meilleures performances. Si de la même façon, on compare HLSS et LLSS, les conclusions sont différentes. En effet, les performances les plus élevées sont observées sur HLSS, alors que le compartiment DCM de LLSS est le plus élevé et le plus largement consommé (figure 22). Dans ce cas, le co-métabolisme est le facteur limitant, la nature même de la boue LLSS, faible charge et donc largement stabilisée, entraîne un flux co-métabolique plus faible (l’abattement matière n’est que de 6%) avec une étape d’hydrolyse du compartiment particulaire qui doit être limitée, limitant du même coup les transferts polluants de ce compartiment vers le compartiment aqueux. Ces observations sont largement confirmées par les suivis au cours du temps de l’évolution de cette répartition des polluants dans les compartiments. En effet, cette distribution évolue au cours de la cinétique de dégradation des polluants (figures 22 pour LLSS) : les concentrations en phase aqueuse diminuent au cours du temps puis se stabilisent, elles sont la résultante d’une consommation par les microorganismes (selon l’hypothèse couramment admise que le compartiment aqueux est celui qui est disponible pour les bactéries) et d’une recharge du compartiment aqueux par désorption des polluants du compartiment particulaire. Les cinétiques sont variables selon le poids moléculaire du HAP considéré. Pour les HAP légers, la fraction libre est la fraction consommée, pour les HAP de PM moyen, les deux compartiments libre et DCM sont consommés. A l’opposé, c’est le compartiment DCM qui disparait pour les HAP lourds. L’abattement le plus élevé en phase aqueuse est obtenu pour la boue LLSS avec 70 % pour 11 HAP sur 13. Pour la boue HLSS, les abattements sont beaucoup plus faibles (entre 20 et 60 %) et plus variables d’un HAP à l’autre. Pour la boue HLSS-1KDa, les abattements sont élevés pour les HAP légers (60-70 %), et équivalents à ceux de HLSS pour les plus lourds. Il faut souligner aussi que les seuls abattements mesurés dans le compartiment aqueux ne suffisent pas à expliquer les abattements totaux et donc que le compartiment particulaire contribue aussi et très largement à cette mesure soit directement (consommation des HAP sorbés aux particules durant l’hydrolyse de celles-ci), soit indirectement en rechargeant le compartiment aqueux. ADEME 60 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 22 : Evolution des concentrations libre, DCM et totale sur la boue LLSS. A : phénanthrène. B : pyrène. C : indéno(1,2,3,c,d)pyrène. L’écart type est calculé sur les duplicats réacteurs. L’ensemble de ces données montrent que nos trois systèmes se comportent différemment à la fois en composition initiale et en cinétique. ADEME 61 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 A partir des concentrations dans les différents compartiments, il est possible de calculer les coefficients de partage entre libre et particulaire (Kpart) et libre et DCM (KDCM), représentant respectivement les affinités pour le particulaire et le dissout/colloidal (cf § 9.2). Les figures 23 et 24 représentent ces affinités en fonction du logKow des HAP pour les trois mélanges au temps initial et final des réacteurs batch. Quelles que soient les conditions, les affinités augmentent avec le poids moléculaire des HAP, ce qui est couramment observé. Le compartiment DCM du mélange LLSS présente la plus forte affinité pour les HAP et le mélange HLSS la plus faible. Par contre, au temps final, la tendance s’inverse avec une nette diminution de l’affinité pour le compartiment DCM de LLSS (diminution de 2 log environ) alors que l’affinité pour le compartiment DCM de HLSS reste identique. L’affinité initiale pour le compartiment particulaire des mélanges HLSS et LLSS est identique, alors qu’elle est plus élevée pour le mélange HLSS-1KDa (figure 24); au temps final, les tendances restent identiques mais toutes les affinités sont augmentées (1 log de plus) ce qui a aussi été observé par Barret et al. (2010a) lors de l’analyse comparée des affinités d’une boue/substrat et d’un digestat. La digestion anaérobie permet de transformer la matière organique (particulaire et soluble) vers une matière plus stable et plus complexe structurellement et présentant une affinité plus élevée aux polluants. Figure 23 : logKDCM des HAP. A : mélange initial, B : mélange final (53 jours). ADEME 62 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 24 : logKpart des HAP. A : mélange initial, B : mélange final (53 jours). 1.2.2.2 Cas des PCB La figure 25 montre l’évolution au cours du temps des concentrations totale et aqueuse du PCB180 pour les deux mélanges LLSS et HLSS-1KDa (pas de suivi sur HLSS). Nous pouvons observer des dynamiques un peu différentes avec une diminution des concentrations totale et aqueuse dans les deux cas sur les 20 premiers jours, suivie d’une recharge du compartiment aqueux. La consommation dans le compartiment aqueux du mélange LLSS est de loin la plus importante par contre tout comme pour les HAP cette seule consommation ne suffit pas expliquer l’abattement total mesuré, soulignant de nouveau l’importance du compartiment particulaire dans cet abattement total soit directement soit indirectement. ADEME 63 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 25 : Evolution des concentrations totale et aqueuse du PCB180 pour le mélange HLSS-1KDa (A) et LLSS (B). 1.2.3 Lien caractérisation du compartiment DCM-distribution des HAP Les trois mélanges présentent des comportements différents en abattement « matière », « polluant » et en distribution des polluants dans les compartiments matière. Il était donc intéressant de faire le lien avec la caractérisation des compartiments : quel type de molécules présentes dans la matrice interagit avec les polluants (nature et taille) ? Pour cela, nous avons utilisé la fluorescence 3D, spectres acquis sur les compartiments aqueux des échantillons initiaux (figure 26) et finaux des trois mélanges. Les signatures de fluorescence sont effectivement différentes pour les trois échantillons et permettent d’envisager d’utiliser ces données pour décrire les phénomènes de sorption. Sept régions de fluorescence (NI) sont extraites des spectres et normalisées pour chaque échantillon. Ces données couplées à celles de caractérisation biochimique, ont été utilisées pour expliquer et prédire les affinités KDCM et Kpart grâce à une analyse statistique de type PLS (cf § 9.3). ADEME 64 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Les variables explicatives utilisées sont listées dans le tableau 11. Les données de concentrations dans les différents compartiments n’ont pas été utilisées car le coefficient de partage KDCM est directement calculé à partir de ces concentrations. HLSS HLSS1kDa B B A A D D LLSS B A E D Figure 26 : Spectre de fluorescence 3D des phases aqueuses des trois boues HLSS, HLSS-1KDa et LLSS au temps initial. Tableau 11 : les variables PLS utilisées pour le modèle KDCM. Bloc X, variables explicatives, bloc Y variable à expliquer le KDCM pour 13 HAP dans chaque mélange. Temps initial, t 0, temps final, tf. Mélanges HLSS t0 HLSS-1kDa t0 LLSS t0 HLSS tf HLSS-1kDa tf LLSS tf X bloc Caractéristiques des PE Zones de fluorescence Log Kow RI M RII Log S RIII RIV RV RVI RVII Y bloc KDCM L’équation (eq. 1) donnée par la régression PLS est la suivante pour le coefficient de partage KDCM : (eq.1) logKDCM = -1.68 + 0.25 logKow + 0.46M – 0.11 logS – 0.18RI – 0.17RII – 0.38RIII + 0.18RIV + 0.38RVI + 0.55RVII avec un coefficient R2 de 0.96 (validation croisée) et un REMSEC/MAX de 0.03 confirmant respectivement la capacité de ce modèle à bien expliquer et bien prédire ce coefficient de partage KDCM. La figure 27 montre les coefficients centrés réduits des variables qui ont le ADEME 65 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 plus d’influence sur KDCM. Le log Kow, la masse molaire M et les régions de fluorescence III, VI et VII ont le plus d’influence sur ce KDCM. Pour les paramètres « molécules », plus M et log Kow sont élevés, plus l’affinité pour un compartiment matière sera forte. La région de fluorescence III est dite protéine-like, et les autres régions I et II, dites aussi protéine-like, ont une influence ou positive ou négative mais peu significative. A l’inverse, les régions VI et VII ont une influence positive et significative sur le KDCM. Ces régions correspondent à des zones dites mélanoïdine-like, lignocellulosique-like et acide humique-like. Ceci confirme des résultats observés dans la littérature par Lee and Farmer (1989) et Perminova et al (1999) qui identifient les acides humiques de phase aqueuse comme des molécules très affines de polluants hydrophobes comme le sont les HAP. Log Kdoc predicted Y (Factor 4) 7 6 RMSE = 0,2 5 R² = 0,9617 Kow, 4 M R IV Log S R V R VI R VII 3 R II 2 1 RI 0 0 1 2 3 4 5 R III 6 Log Kdoc measured Y (Factor 4) Figure 27 : Le modèle PLS pour le KDCM. Valeurs prédites en fonction des valeurs mesurées, validation croisée de facteur 4 (a). Coefficients centrés et réduits des variables explicatives (b). Grâce à ce modèle statistique, il est donc possible de prédire de façon assez précise l’affinité et indirectement la sorption des polluants sur le compartiment aqueux d’une boue. Un modèle PLS a été construit pour prédire l’affinité des polluants pour le compartiment particulaire (Kpart). Il utilise de la même façon les caractéristiques de la phase aqueuse (données de fluorescence et données biochimiques) en faisant l’hypothèse que la phase aqueuse est une représentation en terme qualitatif du compartiment particulaire. Si l’on considère l’ensemble des HAP (13), ce modèle ne dépend alors que des caractéristiques des molécules et non de celles de la matrice. Par contre si l’on établit des modèles selon les classes de poids moléculaire pour les HAP (petit, moyen et gros), il est possible de prédire le Kpart des petits et des moyens HAP à partir des caractéristiques des matrices avec une très bonne précision (cf équations 2 et 3). (eq.2) avec R2 de 0.98 et REMSEC/MAX de 0.009 et (eq.3) avec R2 de 0.92 et REMSEC/MAX de 0.02. ADEME 66 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Dans ces deux cas, les régions I et II (acide aminé-like) et la concentration en protéines totales ont une influence négative alors que la région III a une influence positive. Ceci suggère que l’affinité des polluants pour le compartiment particulaire est régie par la présence de structures protéiques assez denses à forte biodégradabilité qui fluoresceraient en région III (Baker, 2001). Comme pour le KDCM, la région VII présente une influence très positive sur les valeurs de Kpart, confirmant l’importance des acides humiques dans les phénomènes d’interaction polluants-matrice. Pour les HAP les plus gros, la description du compartiment aqueux est insuffisante pour prédire l’affinité des polluants au compartiment particulaire. Il serait dans ce cas-là intéressant d’approfondir la caractérisation de ce compartiment en essayant d’atteindre par exemple des compartiments d’accessibilité croissante via l’utilisation d’extractants de force croissante. Fort de la caractérisation du compartiment aqueux par fluorescence et de sa capacité à prédire le KDCM, nous nous sommes intéressés à savoir dans quels sous-compartiments se retrouvaient les molécules de HAP. Pour ce faire, nous avons utilisé deux méthodes pour subdiviser notre phase aqueuse, l’une basée sur une succession de filtration-ultrafiltration et l’autre par Asymmetrical Flow Field-Flow Fractionation (AF4). Le compartiment aqueux du mélange HLSS a été fractionné par filtration-ultrafiltration (§ 5.3.1) avec récupération des fractions F1 à F4 sur les filtres. Ces fractions ont été analysées par SPME afin de quantifier les HAP libres et sorbés à ces sous-compartiments. A partir de ces données, nous avons calculé les KDCM pour chaque HAP (figure 28). Figure 28 : Log KDCM en fonction du log Kow pour chaque HAP présents dans les sous-compartiments F1 (0,1-1,2 µm), F2 (10 kDa-0,1 µm), F3 (1-10 kDa) et F4 (<1 kDa) du mélange initial HLSS. La plus forte affinité est observée pour le compartiment F1 qui contient des colloïdes de grosse taille. Plus la taille des colloïdes est faible, moins il y a d’affinité entre polluants et ce compartiment. Dans les sous-compartiments F3 et F4, il a d’ailleurs été impossible de calculer un KDCM pour les plus petits HAP (fluorène au pyrène) car on ne les quantifie que dans la fraction libre. La seconde approche a consisté en un fractionnement par couplage flux/force avec flux asymétrique (AF4) afin de déterminer plus finement la distribution en taille des constituants des échantillons et de caractériser les différentes fractions isolées. Les échantillons HLSS, LLSS et HLSS-1kDa ont ainsi été fractionnés par AF4 en utilisant les conditions opératoires décrites figure 9c. Les résultats de ce fractionnement sont présentés figure 29. ADEME 67 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 10 HLSS HLSS-1kDa LLSS Crossflow Absorbance à 280 nm 18 17 9 8 7 6 16 5 4 15 3 14 Cross-flow (ml/mn) 19 2 1 13 0 12 -1 12 17 22 27 32 37 42 47 52 temps (min) 10 HLSS HLSS-1kDa LLSS Cross-flow Laser - diffusion détecteur 90° 0.6 0.5 9 8 7 6 0.4 5 4 0.3 3 0.2 Cross-flow (ml/mn) 0.7 2 1 0.1 0 0 -1 12 17 22 27 32 37 42 47 52 temps (min) Figure 29 : Fractogrammes des échantillons. (A) signal UV. (B) diffusion de lumière. On peut noter tout d’abord une grande similitude des signaux obtenus par absorbance UV et par diffusion de lumière. Cela signifie que l’ensemble des composés constituant le compartiment DCM de ces échantillons sont chromophoriques. On observe des distributions différentes pour les échantillons HLSS et LLSS dans des gammes de tailles comparables indiquant la présence d’un matériel de nature différente dans chaque échantillon ou de même type mais en proportions différentes. L’analyse par fluorescence des fractions isolées devrait nous permettre de confirmer l’une ou l’autre de ces deux hypothèses. ADEME 68 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Si l’on compare les fractogrammes des échantillons HLSS et HLSS-1kDa, on remarque que pour le mélange HLSS-1KDa on a perdu à la fois les plus petites molécules (1er pic entre 14 et 16 min.) et les plus grosses molécules (dernier pic entre 30 et 40 min.). Autant ce dernier point paraît logique puisque cet échantillon correspond au mélange du filtrat (donc les molécules de taille < 1kDa) du surnageant et du culot de centrifugation de l’échantillon HLSS, autant il est plus surprenant de ne pas retrouver les molécules de plus petite taille. Cela pourrait être expliqué de deux façons. Soit les « petites molécules » de ce mélange sont de taille très inférieure à 1 kDa et pourraient avoir été perdues lors du fractionnement AF4. L’analyse de la fraction éliminée par le flux croisé permettra de valider ou non cette hypothèse. Soit les plus petites molécules ont formé des agrégats et précipité au cours des différentes étapes de filtration/ultrafiltration et ne seraient donc plus présentes dans ce mélange. Les plus petites molécules pourraient également avoir formé des agrégats avec d’autres molécules remises en suspension lors du mélange avec le culot de centrifugation. Les pics observés pour l’échantillon HLSS et absents de HLSS-1kDa pourraient correspondre aux bandes de fluorescence A et D bien plus intenses pour HLSS que pour HLSS-1kDa (figure 26). Une dizaine de fractions ont ensuite été isolées pour chacun des 3 échantillons afin de caractériser par fluorescence chaque phase colloïdale et déterminer les polluants qui y sont associés par SPME. La figure 30 présente les différentes fractions collectées pour 3 injections successives de chacun des échantillons. Suite à plusieurs pannes instrumentales, les analyses par fluorescence de l’ensemble de ces fractions sont encore en cours actuellement. Les fractions seront ensuite analysées par SPME/GC-MS afin de déterminer les HAP libres et associés aux phases colloïdales. HLSS Laser - diffusion détecteur 90° 7 8 9 11 10 17.4 0.26 16.4 0.21 15.4 0.16 14.4 0.11 Absorbance à 280 nm 1 23 4 5 6 0.31 13.4 0.06 0.01 12.4 12 17 22 27 32 37 42 47 52 temps (min) ADEME 69 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 HLSS-1kDa 1 2 3 4 5 6 7 9 8 17.4 0.26 16.4 0.21 15.4 0.16 14.4 0.11 Absorbance à 280 nm Laser - diffusion détecteur 90° 0.31 13.4 0.06 0.01 12.4 12 17 22 27 32 37 42 47 52 temps (min) LLSS 2 1 3 4 5 6 7 8 9 10 19.4 11 0.7 18.4 0.6 17.4 0.5 16.4 0.4 15.4 0.3 14.4 0.2 Absorbance à 280 nm Laser - diffusion détecteur 90° 0.8 13.4 0.1 0.0 12.4 12 17 22 27 32 37 42 47 52 temps (min) Figure 30 : Fractions collectées. (A) HLSS. (B) HLSS-1kDa. (C) LLSS. 1.2.4 Lien caractérisation du compartiment DCM-distribution des HAP-performances de dégradation L’objectif est ici d’aller plus loin que prédire les phénomènes de sorption au travers d’une caractérisation fine de la matrice, mais de voir s’il est possible de mieux comprendre les mécanismes qui régissent la dégradation des PE (ici uniquement les HAP) à partir des ADEME 70 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 connaissances acquises précédemment. Il semble que cette dégradation soit fortement influencée par à la fois la présence de co-substrats et le développement d’un métabolisme couplé et par la disponibilité des HAP qui semble être assez bien représentée par la distribution des composés dans les compartiments « matière ». Pour tenir compte de cet ensemble de variables influentes, nous avons construit un modèle PLS, considérant comme variables explicatives, la distribution initiale des HAP dans les compartiments du mélange, les caractéristiques des HAP et les performances de dégradation de la matière (tableau 12). Tableau 12 : les variables PLS utilisées pour le modèle explicatif de la dégradation des HAP. Bloc X, variables explicatives, bloc Y variable à expliquer, l’abattement total des 13 HAP dans chaque mélange. Mélange HLSS HLSS1kDa LLSS Caractéristiques des HAP Log Kow M Log S n5C n6C X bloc Abattement substrat (%) MS MV Y bloc Distribution initiale (%) COP,free COP,DCM Abattement total des HAP (%) eqGlu EqSAB eqEEP DCODCM L’équation obtenue est la suivante : (eq. 4) %abattement HAP = 76.68 - 0.11LogKow + 0.08M + 0.06n5C + 0.11n6C + 0.27LogS + 0.12DCODCM + 0.09eqGlu + 0.18eqSAB + 0.17MV + 0.18MS + 0.23eqEEP + 0.35 COP,free + 0.14 COP,DCM avec R2 de 0.83 et REMSEC/MAX de 0.11. Le modèle montre que les variables représentant le co-métabolisme (abattement substrat) ont un effet positif sur l’abattement des HAP conjointement avec les variables représentant la disponibilité, la concentration dans le compartiment libre présentant l’effet positif maximal. Ce type de modèle conforte donc nos hypothèses de couplage de la dégradation de la matière avec la dégradation des HAP et de la forte influence du compartiment aqueux (libre et DCM) sur la dégradation des HAP. A l’instar de ce qui a été présenté dans le § 1.1, nous avons aussi envisagé de proposer un modèle prédictif de l’abattement des HAP en fonction uniquement des caractéristiques initiales des mélanges. Nous avons choisi de travailler avec les variables explicatives suivantes : les caractéristiques de fluorescence du compartiment aqueux, les caractéristiques des HAP et la distribution initiale des HAP dans les compartiments « matière » (tableau 13). Tableau 13 : les variables PLS utilisées pour le modèle prédictif de la dégradation des HAP. Bloc X, variables explicatives, bloc Y variable à expliquer, l’abattement total des 13 HAP dans chaque mélange. Mélange HLSS ADEME Caractéristiques des HAP X bloc Caractéristiques des mélanges (fluorescence) Log Kow RI Y bloc Distribution initiale (µgOP/gTOC) COP,free 71 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires HLSS-1kDa LLSS M Log S n5C n6C RII RIII RIV RV RVI RVII Février 2013 COP,DCM Abattement total des HAP (%) L’équation obtenue est la suivante : (eq. 5) %abattement HAP = avec R2 de 0.8 et REMSEC/MAX de 0.11. Les variables qui ont le plus d’influence sur la dégradation des HAP sont : les concentrations libre et DCM et les régions III, VI et VII. L’influence positive des concentrations libre et DCM souligne de nouveau l’importance de ce compartiment aqueux dans la dégradation et renforce l’idée que ce compartiment est le compartiment disponible aux microorganismes. La région de fluorescence III a une influence positive sur la dégradation ce qui pourrait être expliqué par la nature même des molécules qui fluorescent dans cette région qui sont des molécules type protéines assez biodégradables (Baker, 2001) et qui soulignerait là un effet co-métabolisme. A l’inverse les régions VI et VII ont une influence négative, les molécules type de cette région sont des molécules beaucoup plus complexes (mélanoïdines-like, acides humiques-like, lignocellulose-like), elles reflètent la maturité et la stabilité de la matière organique de l’échantillon et donc influenceraient négativement à la fois le cométabolisme et la disponibilité. Par rapport au modèle présenté dans le § 1.1, ce modèle permet d’identifier des variables à influence positive. Pour conclure sur cette première partie : Nous avons montré qu’une diversité des matrices « boue » entrainait une diversité de performances de dégradation pour les PE. Ceci s’explique par une combinaison d’effets : la matrice et sa transformation au cours du procédé de digestion jouent (i) en tant que cosubstrat pour aider à la dégradation des PE, c’est l’effet co-métabolisme et (ii) aussi sur la nature des interactions avec les PE, c’est l’effet disponibilité. Les résultats semblent montrer que le compartiment disponible est le compartiment aqueux et que dans ce compartiment les PE (ici les HAP) sont très affins des colloïdes de grosse taille dont la nature serait proche de molécules type mélanoïdines, acides humiques, lignocellulose. Si prédire la distribution des PE dans les compartiments « matière » de la boue au travers d’une caractérisation fine de ceux-ci semble être aisé (obtention d’un excellent modèle), la prédiction des performances de dégradation reste chose difficile car les deux effets sont très interdépendants. Ainsi, le seul fait de maximiser le compartiment disponible (cas du mélange LLSS) n’est pas suffisant pour maximiser la dégradation totale, certes cela contribue significativement à maximiser la dégradation dans le compartiment aqueux. Ce n’est pas suffisant car 99% de nos composés sont sorbés sur le compartiment particulaire et si ce compartiment est réfractaire à la dégradation alors l’effet co-métabolisme prédomine donc il faut maximiser la sorption sur le compartiment aqueux tout en maintenant un niveau de co-métabolisme suffisant pour agir simultanément sur les deux effets co-métabolisme et disponibilité. Les boues secondaires fortes charge répondent pleinement à ces deux critères et sont donc des boues de nature favorable pour permettre de maximiser à la fois co-métabolisme et disponibilité. ADEME 72 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Si la caractérisation du compartiment aqueux est suffisante pour décrire les interactions PEmatrice dans ce compartiment, elle ne l’est pas pour décrire celles liant PE et compartiment particulaire surtout pour les HAP de haut poids moléculaire. Il semble donc important de poursuivre notre effort de caractérisation de ce compartiment et d’établir un lien entre ses fractions de matières organiques plus ou moins accessibles et la distribution des composés dans ces dites fractions. Il est peu aisé de conclure sur les deux autres familles PCB et NP, car les résultats acquis ne vont pas aussi loin que ceux sur HAP. Il faudrait donc poursuivre les investigations sur ces deux familles. Dans le cas des PCB, la dégradation commence par une déhalogénation où les PCB jouent le rôle d’accepteurs d’électrons, l’implication ou le couplage avec le fonctionnement global de la digestion anaérobie ne semble donc pas aussi prégnant qu’avec les HAP. Pour le NP, il faut tenir compte du fait que ce composé est à la fois produit et consommé au cours de la digestion, il est donc indispensable de regarder l’ensemble des molécules précurseurs à la synthèse de cette molécule. Dans toutes les expériences présentées précédemment, deux types de matrices sont mélangées : la matrice « boue » qui sert de substrat est toujours en présence d’une matrice « boue » qui sert d’inoculum, soit pourvoie le système en une microflore dite adaptée au niveau de contamination en PE. Or, ces deux types de boue contiennent systématiquement des microorganismes et de la matière organique qui se mêlent, il est alors difficile de faire la part entre les microorganismes apportés pour leurs capacités à dégrader de ceux présents dans la boue/substrat. Dans l’objectif de dissocier ces deux communautés et afin de piloter ce paramètre communauté, il a été envisagé une stratégie d’extraction de diverses communautés microbiennes à partir d’écosystème à historique contrasté de pollution et de les ré-introduire dans une matrice boue/substrat stérilisé. ADEME 73 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 2. Evaluation de la composante microbiologique : identification des acteurs microbiens de la dégradation des PE et étude de marqueurs fonctionnels de la dégradation. Cette partie du projet porte sur « Evaluation de la composante microbiologique ». Elle fait partie intégrante du projet de thèse de Florence Braun, thèse Ademe/INRA. L’enjeu est ici de faire varier les communautés microbiennes (potentiel métabolique/cométabolique) tout en maintenant l’environnement matriciel constant et d’en observer l’impact sur la biodégradation en terme de communautés et de gènes impliqués. La matrice choisie commune entre les deux parties du projet est la boue secondaire forte charge-HLSS qui a été stérilisée par une méthode ne modifiant pas trop ses propriétés et ensemencée uniquement avec des microorganismes extraits de divers écosystèmes. Les premiers tests ont donc porté sur les méthodes de stérilisation efficaces et sur les méthodes d’extraction de microorganismes de matrices complexes. La méthode de stérilisation finalement adoptée est un autoclavage à 121°C pendant 30 minutes. Des microorganismes ont été spécifiquement extraits de trois écosystèmes différents par l’adaptation/amélioration d’une procédure originellement développée pour le sol couplant un gradient de densité et une pré-extraction avec un cocktail enzymatique (Braun et al., 2011). Il a été vérifié que cette procédure n’affecte en rien le nombre, la diversité et l’activité des microorganismes extraits. Les trois consortiums microbiens proviennent d’écosystèmes contrastés : un sol fortement contaminé en HAP (g/kg), un sédiment fortement contaminé en PCB (g/kg) et une boue historiquement contaminée en HAP/PCB/NP (et sûrement autres polluants) à des teneurs de l’ordre de la dizaine de mg/kg. La tourbe, le 4eme écosystème envisagé, n’a pu être traité efficacement par la procédure, les microorganismes restant intimement liés à leur gangue matricielle. Ces trois communautés microbiennes extraites ont servi d’inoculum pour des réacteurs continus (afin d’acclimater progressivement les communautés) alimentés avec la boue secondaire forte charge stérilisée et dopée en PE : 3 réplicats par inoculum et un réplicat non complémenté en micropolluants (vérifier si la présence des polluants influe sur les communautés et leur évolution). En pratiquant ainsi, nous nous affranchissions de l’effet matriciel de l’inoculum et de l’effet d’apport constant de microorganismes via le substrat et donc d’observer uniquement l’effet des communautés microbiennes à matrice constante sur la dégradation des polluants. Sur ces écosystèmes ont été suivies les populations microbiennes et les vitesses de dégradation des polluants au cours des temps de séjour. Les méthodes de caractérisation des populations se font par suivi de l’ADNr 16S et de gènes fonctionnels (ciblant des gènes spécifiques soit pour la dégradation des mono et polyaromatiques, soit pour la déhalogénation des organochlorés) pour avoir une idée de la diversité totale et fonctionnelle et répondre à la question du rôle et de l’impact des communautés microbiennes sur l’expression de la dégradation de polluants. 2.1 Les performances globales et de dégradation des polluants 2.1.1 Les HAP Les données acquises montrent une convergence des trois écosystèmes en termes d’abattement des polluants et de réduction de la matière sèche (figure 30 et tableau 14) quelle que soit la communauté microbienne : les abattements moyens (sur les triplicats) à l’équilibre (soit 4-5 TSH) pour les polluants sont de 10-30% selon les poids moléculaires des HAP (figure 31) et pour les MS de 11%. Les abattements varient donc selon le poids moléculaire mais pas selon l’origine de l’inoculum. Les abattements des MS et des MV sont aussi très fortement corrélés aux abattements des polluants (corDM=0.580, corVS=0.568), cette corrélation est d’autant plus forte que les HAP sont lourds (avec corDM=0.445, corVS=0.445 pour les petits HAP, corDM=0.614, corVS=0.602 pour les moyens et corDM=0.639, corVS=0.613 pour les lourds). ADEME 74 Abattement du Phénanthrène (%) Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 100 80 60 40 20 0 0 1 2 3 Temps (TSH) 4 5 Figure 30 : Abattement moyen (triplicat) du phénanthrène au cours du temps dans les réacteurs continus ensemencés avec les trois communautés microbiennes extraites de la boue (gris clair), du sédiment PCB (gris moyen) et du sol HAP (noir). Dynamique similaire pour tous les HAP. Figure 31 : Abattement moyen (triplicat) à l’équilibre pour chaque groupe de HAP séparé selon leur poids moléculaire, dans les réacteurs continus ensemencés avec les trois communautés microbiennes extraites de la boue (gris clair), du sédiment PCB (gris moyen) et du sol HAP (noir). Pourtant les trois écosystèmes ne présentent pas les mêmes comportements métaboliques avec l’écosystème « sol » qui produit beaucoup de CO2 et peu de méthane (60/40), accumule les acides gras volatils (AGV), soit un comportement plutôt fermentaire, l’écosystème « boue » qui présente un comportement typiquement méthanogène (20/80), et l’écosystème « sédiment » présentant un comportement mixte avec deux réacteurs tendant vers le comportement méthanogène et un vers le comportement fermentaire, d’où des écarttypes élevés sur tous les paramètres (tableau 14). ADEME 75 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Tableau 14 : Performances globales (matière et biogaz) mesurées sur les réacteurs inoculés par les trois communautés microbiennes différentes. Moyenne à l’état d’équilibre sur les triplicats . 2.1.2 Les PCB Il est souvent difficile d’interpréter les résultats d’abattement en PCB car une des premières étapes de la dégradation des PCB est leur déchloration. Il en résulte que les PCB les plus chlorés peuvent être déchlorés en molécules suivant les schémas : (PCB180 → PCB153 → PCB 101 →PCB 52 et PCB 180 → PCB 138 → PCB 118 → PCB 28). On peut alors observer une accumulation des molécules les moins chlorées, les PCB 52 ou 28, si par exemple les rendements de formation sont supérieurs aux rendements de dégradation de ces molécules. Les abattements ainsi mesurés pour chaque molécule résultent de la différence entre formation via les molécules plus fortement chlorées et dégradation en molécules moins chlorés ou en biphényls. Ces abattements ont été calculés pour chaque réacteur (Tableau 15). Seuls les échantillons correspondant au TSH 4,5 ont été analysés. A ce TSH, l’état d’équilibre est atteint. L’absence de réplicat des mesures rend l’interprétation des résultats peu aisée. Pour chaque inoculum, deux réacteurs sur trois révèlent des abattements positifs (dégradation supérieure à formation) pour chacun des PCB mais un réacteur révèle à chaque fois des abattements négatifs (formation supérieure à dégradation). En l’absence de répétitions des mesures, exclure les échantillons ayant des abattements négatifs peut s’avérer risqué. Tableau 15 : Abattements en PCB à l'équilibre dans les différents réacteurs. Réacteurs Inoculum sol 1 Inoculum sol 2 Inoculum sol 3 Inoculum sédiment 1 Inoculum sédiment 2 Inoculum sédiment 3 Inoculum boue 1 Inoculum boue 2 Inoculum boue 3 PCB 28 PCB 52 PDB 101 PCB 118 PCB 138 PCB 153 PCB 180 21 16 11 39 2 29 27 -9 29 15 14 10 14 -6 28 26 -10 32 9 9 -1 27 -10 20 16 -8 24 5 6 -1 23 -8 21 12 -13 17 4 4 -6 22 -11 16 10 -15 16 3 6 -5 20 -13 16 10 -16 14 2 5 -5 18 -13 15 5 -17 9 PCB total 7 8 -1 23 -9 20 14 -13 19 Au vu de ces résultats, plusieurs observations peuvent toutefois être faites. Pour les PCB les moins chlorés (PCB 28 et 52), il semblerait que l’origine de l’inoculum n’ait pas d’influence sur les capacités de dégradation du système. L’écosystème sol pour lequel les abattements des PCB les plus chlorés sont très faibles, n’induisant donc que très faiblement la production de PCB légers, est donc capable de dégrader des PCB faiblement chlorés. A l’inverse, les abattements des PCB 28 et 52 sont légèrement plus élevés pour l’écosystème sédiment, avec des abattements élevés mesurés aussi sur les PCB lourds, induisant donc potentiellement la formation de PCB légers. Il semblerait donc que pour cet écosystème provenant d’un sédiment adapté à une contamination aux PCB, la communauté microbienne ADEME 76 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 présente une activité de déchloration plus importante déployée pour l’ensemble des molécules PCB du plus léger au plus lourd. Pour les PCB de 5 à 6 chlores, l’inoculum sol présente les moins bons abattements. Enfin pour le PCB 180, les meilleurs abattements sont obtenus avec l’inoculum provenant de sédiments contaminés. De plus, de manière générale, on peut observer une diminution des abattements en PCB avec l’augmentation du degré de chloration des molécules (Figure 32). Ces résultats sont en opposition avec d’autres études qui montrent qu’en condition anaérobie mésophile, les PCB les plus chlorés sont ceux pour lesquels de meilleurs abattements sont observés (Benabdallah El-Hadj et al. 2007; Barret, Barcia, et al. 2010;). Par analogie, on peut supposer que dans notre système les rendements de dégradation des PCB les moins chlorés sont suffisamment supérieurs à ceux des PCB les plus chlorés pour observer une dégradation des PCB 28 et 52 malgré leur formation due à la déchloration des autres congénères. Si l’on observe l’abattement moyen sur l’ensemble des PCB suivant l’inoculum, l’inoculum provenant des sédiments enregistre les meilleurs abattements. Or, cet inoculum provient d’un sédiment contaminé en PCB, on peut émettre l’hypothèse que les populations provenant de ces sédiments possèdent une activité spécifique vis-à-vis de ces polluants qui est plus forte que dans le cas des deux autres inocula. Pour confirmer ces observations et permettre une étude statistique fiable des données, il aurait été préférable de mesurer les concentrations en PCB pour les trois demi-TSH formant l’état d’équilibre (TSH 4/4,5/5). Cela nous aurait entre autre permis d’exclure ou non les résultats obtenus à TSH 4.5 pour les réacteurs sol-3, sédiment-2 et boue-2. Figure 32 : Dégradation des PCB tout inoculum confondu en fonction de leur degré de chloration. 2.1.3 Le NP Comme pour les HAP, la dégradation des nonylphénols a été suivie au cours du temps (Figure 33). Contrairement aux HAP, dès le début du régime continu, les NP ont le même comportement quel que soit l’inoculum étudié. Au bout de 80 jours, au TSH 4, on calcule des abattements ADEME 77 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 négatifs en NP ce qui pourrait suggérer un phénomène d’accumulation ou de production de ces molécules à partir des dérivés nonylphénol polyéthoxylés (NPEO). Cependant la ponctualité de ce phénomène, le fait qu’il se produise dans tous les réacteurs et la valeur particulièrement basse de NP mesurée dans la boue d’alimentation laisse supposer une erreur de mesure pour ce point et une sous-estimation de la concentration en NP dans l’alimentation (Figure 34). Si on exclut les valeurs obtenues au quatrième temps de séjour, pour les derniers temps de séjour (4.5 et 5), on constate un abattement très faible, voire nul de ces molécules. Les NP ne sont pas (voire que très faiblement) abattus dans nos systèmes ou sont produits autant qu’il sont consommés. Chang et al. (2005) montrent que la dégradation du NP en condition méthanogène est l’une des conditions les moins favorables des conditions anaérobies et Hernandez-Raquet et al. (2007) n’observent pas de dégradation de cette molécule, il n’est donc pas surprenant d’enregistrer des abattements en NP faibles dans nos systèmes. La digestion anaérobie peut entraîner la dégradation de NPEO qui produisent ainsi du NP (Patureau et al. 2008; Paterakis et al. 2012). Il existe donc au sein des systèmes de digestion anaérobie, un équilibre entre les phénomènes de production du NP (via la dégradation des NPEO) et la dégradation du NP. Suivant l’efficacité de l’un ou de l’autre, des abattements en NP peuvent être mesurés ou non. L’absence d‘abattement de NP tel que nous le mesurons ou sa ponctuelle accumulation peut être due au fait que la dégradation de NPEO est aussi importante ou ponctuellement plus importante que la dégradation du NP. Dans nos expériences, les NPEO n’ont pas été dosés mais des pics pouvant correspondre à ces molécules ont été identifiés sur nos spectres d’analyse HPLC aussi bien dans l’alimentation que dans les sorties de réacteur. Etablir un bilan, sur l’ensemble des molécules (NP+NPEO), nous permettrait de mieux appréhender les phénomènes de production/dégradation au sein de nos systèmes. Observons cependant que tout comme pour les HAP, le comportement des NP (tel que nous le mesurons dans nos systèmes), est similaire quelle que soit la voie métabolique empruntée. Les populations méthanogènes ne semblent pas particulièrement impliquées dans la dégradation de ces molécules. Figure 33 : Dynamique des abattements en NP au cours du temps (indiqué en Temps de Séjour Hydraulique) pour les trois écosystèmes sol (blanc), sédiment (gris) et boue (noir). ADEME 78 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 34 : Evolution des concentrations en NP mesurées en µg/L de boue 2.2 Les changements d’abondance des communautés microbiennes Cette abondance des bactéries et des archées est mesurée par PCRq (figure 35). Figure 35 : Abondance des Bactéries et des Archées au cours du temps pour les trois communautés microbiennes extraites de la boue (noir), du sédiment PCB (gris moyen) et du sol HAP (blanc). L’abondance « bactéries » évolue au cours du temps surtout pour l’écosystème sol. A l’équilibre, ces abondances « bactéries » sont assez similaires et élevées quel que soit l’écosystème. A l’équilibre, les abondances « archées » sont différentes entre les trois écosystèmes avec l’abondance la plus élevée pour l’écosystème « boue ». La présence de polluants ne modifie pas les abondances « bactéries » (comparaison des triplicats et des témoins par ANOVA; pour le sol P=0.609, le sédiment P=0.521 et la boue P=0.844) mais modifie celle des archées pour les écosystèmes sol et boue (ANOVA; P<0.001). Il est possible de calculer un ratio archées/bactéries (%) qui est à l’équilibre de 9,7, 14 et 19,9 pour respectivement les écosystèmes sol, sédiment et boue. Ce ratio est fortement corrélé à la production de méthane (figure 36) ADEME 79 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 36 : Corrélation entre le ratio archées/bactéries (%) et le rendement en méthane calculé à l’équilibre sur l’ensemble des 9 réacteurs. 2.3 Les changements de diversité et de structure des communautés microbiennes La diversité et la structure des communautés microbiennes sont évaluées grâce aux empreintes moléculaires en CE-SSCP réalisées au cours du temps et à l’équilibre sur chacun des triplicats et les réacteurs témoins (figure 37). L’index de Simpson « bactéries » calculé à partir des empreintes réalisées diminue de 3 à 1,9 sur les écosystèmes sol alors qu’il augmente de 2,7 à 3,2 sur les écosystèmes boue et est stable (2,3) pour les écosystèmes sédiment. Concernant la diversité « archées », l’index de Simpson diminue pour les écosystèmes sédiment et augmente pour les écosystèmes boue. A l’équilibre, la diversité « bactéries » et « archées » est la plus élevée pour les écosystèmes boue, mais chaque écosystème maintient sa propre diversité alors que les conditions opératoires appliquées sont les mêmes pour tous les réacteurs. ADEME 80 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 37 : Empreintes moléculaires CE-SSCP des bactéries (gauche) et des Archées (droite) pour chaque écosystème (profil moyen des triplicats) à l’équilibre. Ces changements de diversité ont été analysés par ACP. Cette analyse montre effectivement que si les communautés sont diverses au temps initial, elles maintiennent leur divergence au cours du temps : les deux structures de communautés bactéries (P<0,001, r2=0,245) et archées (P<0,001, r2=0,351) peuvent être discriminées par l’origine de l’inoculum (figure 38). Une corrélation est alors trouvée avec les paramètres globaux d’évolution du système, à savoir le pourcentage de méthane dans le biogaz (cor=0,393, P=0,005) et l’accumulation d’AGV (cor=-0,678, P<0,001) mais aucune corrélation n’est trouvée ni avec l’abattement des polluants, ni avec la dégradation de la MS (figure 39). ADEME 81 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 38 : Influence de l’origine de l’inoculum (sol-triangle, sédiment-carré, boue-cercle) sur les différences de structure génétique des communautés bactéries (gauche) et archées (droite). L’ACP explique 65,4 % de la variance des empreintes moléculaire de bactéries et 74,3 % de la variance des empreintes moléculaire d’Archées obtenues par CE-SSCP. Figure 39 : Les corrélations entre la structure des communautés bactéries (gauche) et archées (droite) et les paramètres de fonctionnement des réacteurs. Le pyrosequençage (gène ADNr 16S) effectué à l’équilibre sur l’ensemble des réacteurs nous permet d’identifier quelles sont les espèces qui permettent de discriminer nos échantillons. Le nombre de séquences détectées par échantillon varie de 3364 à 15538 séquences suivant l’échantillon étudié. Comme le nombre de séquences obtenues par échantillon est très hétérogène (Tableau 16), les analyses de diversité ont été réalisées sur un sous-échantillon de séquences de même taille. Nous avons égalisé la taille de l’inventaire de chaque échantillon à la valeur minimale (ici 3364). ADEME 82 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Tableau 16 : Données de diversité obtenues par pyroséquençage du gène d’ADNr 16S sur les 9 réacteurs inoculés avec les 3 inocula à l’état d’équilibre (TSH 5). Nb : nombre, Nb seq: nombre de séquences. Réacteurs Nb Séquences Nb OTU Nb seq Bactéries Nb seq Archées Nb Phyla Nb Genre Nb Espèces DSol1 4409 116 4392 16 8 28 41 DSol2 4717 133 4608 27 7 27 42 DSol3 3364 154 3295 10 7 25 39 DSed1 6303 149 6140 35 6 28 43 DSed2 14052 260 13627 58 7 38 58 DSed3 15538 367 14035 192 12 50 76 DBoue1 11902 475 10199 240 15 60 103 DBoue2 14168 510 12831 151 19 66 107 DBoue3 11839 469 10413 238 17 59 100 Des analyses en composantes principales (ACP) ont été réalisées à partir des données de pyroséquençage en utilisant les proportions de chaque espèce, pour discriminer nos échantillons. Il s’avère que cette représentation est très proche de celle obtenue en réalisant une ACP à partir des données de CE-SSCP. La très grande robustesse des comparaisons entre échantillons observée avec les deux techniques moléculaires (CE-SSCP et pyroséquençage) est encourageante. En effet, il se pose toujours cette question de biais imputables à chacune des techniques et de représentativité des résultats lorsqu’ils sont obtenus à partir de plusieurs méthodes moléculaires différentes (Smalla et al 2007), en particulier si un même échantillon est analysé via deux méthodes qui ne ciblent pas la même région de l’ADN 16S (Bowen De León et al. 2012). L’ACP nous a permis de mettre en évidence 57 espèces (dont quatre Archées parmi lesquelles trois sont absentes des échantillons DSol) dont les abondances permettent de discriminer statistiquement nos échantillons (12 espèces p ≤ 0.001 ; 19 espèces p ≤ 0.01 ; 26 espèces p ≤ 0.05). Si l’on considère les 20 espèces les plus abondantes, 7 d’entre elles sont très hautement discriminantes, 7 sont hautement discriminantes et 2 sont discriminantes. Une ACP sur la base des 20 espèces les plus abondantes nous offre la même représentation des données. Qu’il s’agisse de l’ACP avec les données CE-SSCP ou de l’ACP obtenue par pyroséquençage, nos échantillons sont bien discriminés selon l’origine de l’inoculum (Figure 40). L’ACP obtenue à partir des données CE-SSCP nous permet de mettre en évidence 4 pics qui permettent d’expliquer la discrimination des échantillons. L’ACP obtenue à partir des données de pyroséquençage nous permet de mettre en évidences des espèces permettant de discriminer nos échantillons. ADEME 83 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 40 : Représentation des variables discriminantes sur les analyses en composantes principales (ACP) obtenues à partir des données de CE-SSCP (à gauche) et des espèces par pyroséquençage (à droite). L’ACP explique 92.0 % de la variance des empreintes moléculaire de bactéries (CE-SSCP) et 92,3 % de la variance des proportions d’espèces obtenues par pyroséquençage. Les réacteurs dont l’inoculum provient du sol, du sédiment, de la boue sont représentés, respectivement par les symboles suivant : triangle, carré, cercle. A gauche les flèches représentent les pics les plus discriminants et à droite les espèces les plus discriminantes parmi les 20 plus abondantes. Les échantillons DSol sont caractérisés par la présence d’un pic majoritaire en CE-SSCP mais de trois espèces bactériennes proches de trois espèces bactériennes du genre Clostridium. Ces bactéries anaérobies sont capables de transformer par fermentation de nombreux monomères en éthanol, CO2, H2 et acétate (Madden et al. 1982; Sukhumavas et al. 1988; Hethener et al. 1992). Le fait que les échantillons Dsol soient discriminés par des bactéries appartenant exclusivement au genre Clostridium est cohérent avec le fait que ce groupe de réacteurs est caractérisé par l’accumulation d’AGV (Figure 41). L’abondance du genre Clostridium dans nos échantillons est par ailleurs assez bien corrélé avec les concentrations en AGV mesurées (cor = 0.851, p-value =0.003). Les échantillons DSed 2 et 3 sont caractérisés par la présence de trois espèces bactériennes (deux du genre Parabacteroides et une du genre Dysgonomonas) appartenant toutes au phylum des Bacteroides. Enfin les échantillons de boues sont caractérisés par la présence de 5 espèces différentes (Clostridium ultunense, Anaerobaculum mobile, Thiohalomonas denitrificans, Pseudomonas stutzeri et op9), appartenant au phyla des Firmicutes, Synergitetes, Proteobacteria et op9. Les phyla Bacteroides, Firmicutes et Proteobacteria sont des phyla fréquents dans les réacteurs de digestion anaérobie (Nelson et al. 2011) et le phyla des Synergitetes apparait comme un phyla caractéristique des environnements anaérobies (Godon et al. 2005). ADEME 84 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 41 : Représentation des paramètres de fonctionnement discriminants sur les analyses en composantes principales (ACP) obtenues à partir des données de SSCP (à gauche) et des proportions des différentes espèces obtenues par pyroséquençage (à droite). L’ACP explique 92 % de la variance des empreintes moléculaires de bactéries (SSCP) et 92,3 % de la variance des proportions d’espèces obtenues par pyroséquençage. Les réacteurs dont l’inoculum provient du sol, du sédiment, de la boue sont représentés, respectivement par les symboles suivant : triangle, carré, cercle. Les flèches représentent les paramètres de fonctionnement les plus discriminants. Les échantillons de DBoue et DSed 3 se caractérisent aussi par la présence d’au moins 5 espèces d’Archées différentes alors que seulement une ou deux espèces sont présentent dans les autres réacteurs (Figure 42). Ces espèces appartiennent toutes au phylum des Euryarchaeota majoritairement présent dans les réacteurs de digestion anaérobie (Nelson et al. 2011). La diversité des Archées et les ratios Archées/Bactéries plus importants dans ces réacteurs DBoue et DSed 3 concordent avec une production plus forte de méthane. Aucun des genres d’Archées présents dans nos échantillons ne correspondent aux genres Methanosaeta et Methanoculleus que Berdugo-Clavijo et al. (2012) suggèrent comme pouvant jouer un rôle important dans le métabolisme de HAP léger (à deux noyaux aromatiques) en condition méthanogène. ADEME 85 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 42 : Proportion de chaque espèce d’Archées par rapport au nombre total d’Archées présentes dans les réacteurs. Les principaux phyla bactériens représentés dans nos réacteurs sont les Firmicutes, les Bacteroides, les Synergitetes et les Protobacteria (Figure 43). Par rapport aux travaux de (Nelson et al. 2011) et de (Werner et al. 2011), le phylum des Chloroflexi est sousreprésenté dans nos systèmes. Absent des échantillons DSol et DSed, il n’est présent que dans les échantillons DBoue et représente moins de 1 % des séquences trouvées. En particulier, aucune séquence du genre Dehalococcoides, bactéries connues pour leur aptitude à dégrader les PCB en conditions anaérobies (Adrian et al. 2009; Fennell et al. 2004) n’a été retrouvée. Le phylum des Firmicutes est le plus présent dans nos systèmes. Pour les réacteurs DSol, il se compose essentiellement des bactéries du genre Clostridium alors que dans les réacteurs Dboue, il se compose majoritairement de l’espèce Clostridium ultunense, capable d’oxyder l’acétate en association synthrophique avec des bactéries hydrogénotrophes méthanogènes (Schnurer et al. 1996) et des bactéries du genre Synthotrophomonas, capables de dégrader les acides gras en présence entre autre de consortium bactérien méthanogène ou consommateur d’hydrogène (McInerney et al. 1981; Zhang et al. 2004; McInerney et al. 2008). Les proportions de bactéries appartenant au genre Synthrophomonas sont d’ailleurs anti-corrélées aux concentrations en acides gras volatils trouvés dans nos systèmes (cor =-0.860 , p-value = 0.003). Bien que majoritairement présente dans les réacteurs DSol, la famille des Clostridiceae est présente dans l’ensemble de nos systèmes. Berdugo-Clavijo et al. (2012) suggèrent que cette famille peut jouer un rôle important dans la dégradation de HAP léger en condition méthanogène. Par ailleurs, la famille des Desulfatobacteracea, impliquée selon Musat et al. (2009) dans la dégradation des HAP, en condition sulfato-réductrice n’est retrouvée que dans les groupes Dsol et DSed. L’espèce Pseudomonas stutzeri potentiellement impliqué dans les processus de dégradation des HAP (Rockne et al. 2000) et NP (De Weert et al. 2011) en condition dénitrifiante, est retrouvée dans nos trois groupes de réacteur DSol, DSed et DBoue et de manière plus abondante dans DBoue. Les variations d’abondances de ces familles et espèces ne peuvent expliquer à elles seules l’homogénéité des abattements en HAP et NP mesurés dans nos systèmes. ADEME 86 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Figure 43 : Proportion dans chaque réacteur des 20 espèces les plus abondantes. En observant le profil des proportions des espèces bactériennes majoritaires dans chaque réacteur, encore une fois, il apparait que les répliqua DSol et DBoue forment 2 groupes homogènes distincts. Par contre le groupe DSed est hétérogène avec DSed1 dont le profil est très proche de Dsol, DSed 3 plus proche de DBoue et DSed2 un peu à part. L’ensemble de ces résultats obtenus par pyroséquençage, confirme d’une part les résultats obtenus par empreintes moléculaire et Q-PCR et d’autre part confirme bien à différents niveaux une discrimination de nos populations microbiennes selon l’origine et les métabolismes mis en jeu au sein de nos systèmes. 2.4 L’expression potentielle des fonctions de dégradation des PE Dans cette partie, nous avons développé une approche liée au potentiel microbiologique de dégradation des micropolluants organiques. Pour ce faire, nous avons utilisé une méthodologie permettant de suivre les populations dégradant les HAP et plus spécifiquement le phénanthrène par marquage isotopique du polluant utilisé comme substrat. Nous nous sommes ensuite intéressés aux communautés impliquées dans la dégradation des molécules aromatiques en utilisant comme indicateur fonctionnel un des gènes identifiés dans la littérature comme intervenant dans l’ouverture des cycles aromatiques, le gène bssA. 2.4.1 Etude du potentiel de dégradation du phénanthrène par les microorganismes issus d’un réacteur de méthanisation Dans le but de suivre la dégradation d’un polluant et d’identifier les populations microbiennes impliquées dans sa dégradation, des tests en microcosmes sont réalisés à partir de phénanthrène marqué en 13C, utilisé comme substrat (§ 7.7 matériel et méthode). Une fois dégradé, il est alors possible d’identifier les produits de dégradation car ces derniers présenteront une composition isotopique non naturelle. Couplée à des méthodes de microbiologie, l’étude du devenir d’un substrat marqué peut également permettre d’identifier les microorganismes actifs impliqués dans la dégradation de la molécule. L’assimilation du ADEME 87 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 ou d’une partie du substrat marqué va entrainer l’enrichissement des constituants cellulaires des microorganismes responsables de sa dégradation. La technique de « stable isotope probing » (SIP) permet par ultracentrifugation, de séparer les acides nucléiques de composition isotopique naturelle de ceux enrichis en 13C après incorporation du substrat dans la biomasse. Il est alors possible de pré-identifier les microorganismes responsables de la dégradation de la molécule marquée, utilisée comme substrat. Pour pouvoir fournir suffisamment de boue pour les tests d’assimilation du phénanthrène 13C, deux réacteurs de 400 ml effectuant efficacement la méthanisation ont été réunis dans un réacteur semi automatisé de 800 ml. Les réacteurs produisant le plus de méthane étant les réacteurs inoculés à partir des communautés issues de la boue, ce sont deux d’entre eux qui ont été choisis. La boue de sortie de ce réacteur a ensuite été utilisée pour des tests en microcosmes anaérobies contenant du phénanthrène 13C (§ 7.7). Plusieurs microcosmes ont été réalisés : - Deux fioles de 50 ml contenant du phénanthrène marqué au 13C sur tous les atomes de carbone à des concentrations de 0.1, 1 et 3 mg/L ont été inoculées avec respectivement 5, 50 et 50 mg de MV. La composition isotopique du biogaz produit a été analysée régulièrement par « Isotope-ratio mass spectrometry » (IRMS). Ce dispositif permet de mettre en évidence la dégradation du substrat en condition de croissance par enrichissement en 13C du méthane produit. - Une fiole contenant du phénanthrène marqué au 13C aux mêmes concentrations, mais avec ajout d’un agent biocide (HgCl2), permet de vérifier si la dégradation potentiellement observée est la résultante de phénomènes biotiques. - Une fiole avec du phénanthrène non marqué aux mêmes concentrations sert de témoin négatif en vue de l’utilisation de la technique SIP. Les résultats de suivi de la composition isotopique du biogaz au cours du temps sont présentés en figure 44. Aucune production de méthane n’a été enregistrée dans les témoins contenant le biocide. Dans les microcosmes contenant une concentration en phénanthrène de 0.1 mg/l et possédant la plus faible teneur en biomasse aucun enrichissement n’est observé dans les fioles contenant le phénanthrène marqué par rapport à celle contenant le phénanthrène non marqué. Dans les fioles contenant, 1 et 3 mg/l de phénanthrène 13C, un léger enrichissement est observable dans les incubations contenant le phénanthrène 13C après 100 jours d’incubation. Cependant, l’enrichissement observé est très faible et la composition isotopique mesurée est très proche de celle des incubations avec le phénanthrène non marqué, situé dans une fourchette basse par rapport aux valeurs des compositions isotopiques mesurées naturellement en digestion anaérobie (Keppler et al. 2010). Il semble donc que le phénanthrène ne soit pas dégradé sous forme de biogaz dans les conditions testées. L’absence de minéralisation complète du composé n’entraîne pas forcément une absence de dégradation. En fin d’incubation, il ne restait plus de phénanthrène dissout, ce qui suggère qu’il est fortement sorbé aux matières en suspension. Dans le but d’identifier une dégradation partielle du phénanthrène dans les incubations, une recherche de métabolites dans la phase dissoute par GC-IRMS et RMN a été réalisée. Aucun produit de dégradation n’a pu être mis en évidence. La même démarche est en cours sur la phase particulaire par GC-IRMS, LC-IRMS et RMN afin d’identifier d’éventuels métabolites. ADEME 88 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 13 Figure 44 : Fractionnement isotopique (δ C en ‰) du biogaz produit au cours du temps par les microcosmes aux trois concentrations différentes de phénanthrène. Les symboles représentent le fractionnement du CO2, les celui du CH4. En bleu, sont présentés les résultats des dupliqua des 13 incubations avec le phénanthrène marqué au C, en orange ceux obtenus avec le phénanthrène non marqué. Afin d’identifier les microorganismes impliqués dans la dégradation du phénanthrène, il était initialement prévu de mettre en œuvre l’approche Stable Isotope Probing (SIP) sur des échantillons prélevés lors des incubations avec le phénanthrène marqué en carbone 13. Les ADEME 89 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 microorganismes dégradant le phénanthrène vont assimiler les atomes de carbone 13 dans l’ensemble de leurs constituants cellulaires dont l’ADN. L’approche SIP repose sur la séparation de l’ADN présentant un enrichissement isotopique en carbone 13 non naturel (%13C >1,1) de l’ADN de composition isotopique naturelle. L’ADN marqué isotopiquement ainsi isolé peut alors être séquencé spécifiquement afin d’identifier les microorganismes impliqués. Cette méthodologie n’a pu être mise en place dans le cadre de ces expériences en l’absence de mise en évidence d’un processus de biodégradation. Dans le § 2.1, nous avons vu que la dégradation des HAP n’est pas reliée directement à la méthanogenèse ; de même, d’autres travaux menés en batch (Cea-Barcia, 2012) ou en réacteur (Delgadillo-Mirquez, 2011) suggéraient que la dégradation des HAP pouvait être liée aux premières étapes d’hydrolyse, d’acidogenèse et d’acétogenèse de la digestion anaérobie, et notamment par des phénomènes de co-métabolisme. Or, nos expérimentations utilisant le phénanthrène marqué sont conçues de telle manière qu’elles ne favorisent ou permettent pas l’expression d’un tel co-métabolisme (travail à forte concentration en molécule marquée et avec une biomasse diluée afin de ne pas diluer le carbone 13 dans le carbone 12). Si l’expression d’un co-métabolisme est nécessaire à la minéralisation partielle ou totale du phénanthrène, pour favoriser sa réalisation, une autre source de carbone doit être introduite dans le milieu réactionnel. L’ajout d’un co-substrat (ex. cellulose ou glucose) pour favoriser la dégradation de la molécule marquée a été donc envisagé. Une fois la dégradation observée, l’analyse spatiale par spectrométrie de masse d’ion secondaire (NanoSIMS) pourrait permettre de co-localiser les bactéries ayant incorporé l’isotope stable avec celles qui auraient incorporé les co-substrats si celui-ci est lui-même marqué sur un autre atome que le carbone (Li et al. 2008). 2.4.2 Etude du potentiel de dégradation de molécules aromatiques Afin d’étudier le potentiel microbien de dégradation de micropolluants organiques, nous avons choisi d’utiliser comme marqueur fonctionnel le gène bssA utilisé normalement comme marqueur de la dégradation anaérobie des molécules mono-aromatiques. Ce gène code pour une sous-unité de l’enzyme benzyl-succinate synthase qui permet l’ouverture des cycles aromatiques par addition d’une molécule de succinate. Les premières étapes du processus d’ouverture des cycles aromatiques lors de la dégradation des molécules polyaromatiques ne sont actuellement pas décrites dans la littérature. Dans ce travail, nous avons recherché la présence du gène bssA par analogie avec les connaissances sur les voies de dégradation des molécules mono-aromatiques. Le nonylphénol présentant un seul noyau aromatique pourrait potentiellement être dégradé selon ce même type de voie. Les quelques connaissances acquises sur la dégradation de poly-aromatiques non substitués, comme les HAP, montrent que des méthylations ou carboxylations ont lieu sur les noyaux afin de les ouvrir, ce qui si la dégradation est avancée pourrait aboutir à des métabolites mono-aromatiques. Le système de détection du gène bssA, mis point au laboratoire (Barret, 2009), a été mis en œuvre sur les extraits d’ADN obtenus à partir des sorties de réacteurs au TSH 5 et sur un témoin positif. Les conditions d’amplification sont les mêmes que celles utilisées pour l’amplification de la région V3 de l’ADNr 16S à la différence près que la température d’hybridation est abaissée à 51°C pour tenir compte de la température de fusion des amorces utilisées Barret, 2009). Aucune amplification du gène bssA n’a été observée mis à part pour le témoin positif. L’échec de la détection du gène bssA dans nos échantillons peut s’expliquer par différentes hypothèses : - Le gène bssA n’est pas présent chez les microorganismes de nos échantillons. Le choix de ce gène comme marqueur d’une dégradation de molécule aromatique repose sur l’hypothèse forte que la dégradation des noyaux aromatiques des HAP, NP et PCB ADEME 90 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 étudiée en conditions méthanogènes est liée à l’activité benzyl-succinate synthase. Or à ce jour, aucune expérience ne nous permet de valider cette hypothèse. Les abattements mesurés dans nos réacteurs font peut-être intervenir d’autres enzymes ou alors ils sont la résultante d’une dégradation partielle de la molécule mère et ne font donc pas intervenir le gène bssA, marqueur de la dégradation de molécule monoaromatique. - Le gène bssA peut aussi être présent, mais à des niveaux inférieurs à la limite de détection. Les polluants étudiés représentent une source très faible de carbone et d’énergie dans nos systèmes. On peut donc supposer qu’un très faible pourcentage de l’ADN génomique extrait possède le gène bssA. Les concentrations en polluants utilisées dans nos systèmes, choisies pour être proches de la réalité des systèmes épuratoires ne permettent peut-être pas d’appliquer une pression de sélection suffisante qui aurait permis d’enrichir nos systèmes en microorganismes capables d’utiliser les polluants comme source principale (et unique) de carbone et d’énergie. Pour conclure sur cette partie 2 : L’étude de l’influence de communautés microbiennes anaérobies et complexes différentes sur la dégradation des PE, soumises à la même pression de sélection imposée par la matrice et la charge en polluants est un sujet important car dans ces conditions, les acteurs et voies métaboliques impliquées sont largement inconnues. La stratégie originale développée lors de cette étude, basée sur l’extraction spécifique de microorganismes d’écosystèmes différents et leur re-introduction dans une unique matrice stérile, nous a permis de répondre à ces enjeux. Les réacteurs anaérobies inoculés avec ces communautés extraites ont préservé et même augmenté les différences génétiques existantes entre les communautés en fonction de l’origine de l’inoculum. Les suivi des HAP, la production de biogaz, l’accumulation des AGV d’une part et les analyses de communautés d’autre part, nous ont permis de démontrer l’indépendance des changements de structure des communautés avec l’abattement des HAP. Ces changements sont par contre fortement corrélés aux activités métaboliques exprimées par ces communautés. La forte corrélation entre l’abattement des HAP et la réduction de la matière sèche est de nouveau soulignée par cette étude et renforce les résultats de la littérature. De la même façon, il est montré que la dégradation des HAP est plus faible lorsque le poids moléculaire des composés augmente. Il semble donc que la dégradation des HAP soit liée à la dégradation de la matière totale quelle que soit l’activité métabolique finale exprimée (fermentaire ou méthanogène) et que les communautés se développent en fonction de ces activités métaboliques exprimées et non vis-à-vis d’un potentiel à dégrader les HAP. Certes les outils de caractérisation des communautés utilisés ici ne permettent de regarder que les communautés dominantes et il est possible que la dégradation de ces molécules soit assurée par une/des communauté(s) microbienne(s) minoritaire(s). Il faudrait alors travailler sans a priori avec des outils de métagénomique et/ou métatranscriptomique afin d’identifier l’ensemble des gènes et/ou protéines sur ces trois communautés. L’étude des communautés microbiennes par pyroséquençage a confirmé les données obtenues par empreinte moléculaire et Q-PCR. A savoir ; (i) une discrimination des communautés microbiennes selon les activités métaboliques exprimées avec la distinction de deux groupes homogènes distincts, DSol et DBoue, et un groupe DSed plus hétérogène ; (ii) une faible proportion d’archée méthanogène mais dont les variations d’abondance relative expliquent bien les différences de production de méthane enregistrée entre les réacteurs ; (iii) la présence de tous les groupes phylogénétiques connus dans les microbiomes de digestion anaérobie ; (iv) l’absence de séquences affiliées au genre ADEME 91 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Dehalococcoides qui auraient pu signer la présence de bactéries potentiellement impliquées dans la dégradation des PCB. Etudier les fonctions de dégradation de micropolluants organiques dans nos systèmes se révèle être assez compliqué. En effet, la dégradation des micropolluants organiques semble être une fonction minoritaire de nos écosystèmes et la détection des acteurs de cette fonction se heurte alors à des problèmes de seuil de détection. Les difficultés rencontrées peuvent être dues (i) à la faible pression de sélection appliquée sur nos systèmes par des concentrations en micropolluants organiques faibles (mais, rappelons-le, réalistes par rapport à celles rencontrées dans les systèmes épuratoires), (ii) au manque de connaissances et donc d’outils moléculaires permettant de détecter la présence des gènes codant pour les enzymes impliqués dans les processus de dégradation des molécules aromatiques en condition méthanogène. Même si elle n’a pas permis de mettre en évidence une minéralisation du phénanthrène, l’approche par marquage isotopique de micropolluant utilisé comme substrat pourrait nous permettre (i) d’identifier les compartiments dans lesquels les microorganismes ont assimilé le micropolluant marqué, (ii) d’identifier des intermédiaires métaboliques de dégradation de la molécule, et enfin (iii) de présélectionner les microorganismes ayant incorporé le substrat marqué en vue de les identifier. Pour cela, il est peut-être nécessaire de favoriser, dans nos incubations, les processus de co-métabolismes, suspectés de jouer un rôle important dans la dégradation des HAP, en ajoutant dans le milieu réactionnel un co-substrat. Une autre stratégie serait de travailler avec des microorganismes provenant d’enrichissement à de plus fortes concentrations sur phénanthrène. ADEME 92 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires 3. Février 2013 Evaluation du potentiel toxique : lien entre dégradation des PE, leur distribution dans les compartiments matière et l’expression de leur toxicité Les systèmes expérimentaux décrits dans le chapitre 2 des résultats ont été utilisés pour mener à bien cette partie. Dans ces systèmes, si l’origine des populations microbiennes, utilisées comme inocula, n’influence pas le devenir global des HAP, elle entraine la réalisation de voies métaboliques majeures différentes (fermentaire et méthanogène). Ces voies métaboliques peuvent influencer les caractéristiques de la matière et peuvent potentiellement induire un effet sur (i) la répartition des micropolluants au sein des différents compartiments de la boue, (ii) une expression différente de la toxicité selon les compartiments et (iii) sur les voies métaboliques mineures de dégradation et la production de métabolites à activité perturbatrice endocrinienne variable. Dans ce chapitre, nous étudierons donc à l’état d’équilibre, la répartition des HAP au sein des compartiments matière des boues digérées ainsi que l’activité toxique qu’eux ou leurs métabolites peuvent générer. Nous avons définis 4 types de boue : Alim : boue servant d’alimentation pour tous les réacteurs continus de 400 ml DSol : boues digérées provenant des réacteurs inoculés par les microorganismes extraits du sol DSed : boues digérées provenant des réacteurs inoculés par les microorganismes extraits du sédiment DBoue : boues digérées provenant des réacteurs inoculés par les microorganismes extraits de la boue 3.1 Distribution des PE dans les différents compartiments de la boue Les concentrations pour chacun des HAP sont mesurées ou calculées dans le compartiment particulaire (Ci part), le compartiment aqueux (Ci aqu), la fraction dissoute et colloïdale (Ci DCM), dans la fraction libre (Ci libre) et dans la boue totale (Ci total). 3.1.1 Influence des caractéristiques des molécules sur la distribution des PE Etudions dans un premier temps la répartition des micropolluants dans les différents compartiments par rapport à la concentration totale en polluant dans la boue (Figure 47). La majorité des polluants présents dans la boue se retrouve dans le compartiment particulaire, quel que soit le composé étudié. La concentration en polluants dans la phase aqueuse varie suivant les molécules étudiées. Les proportions de polluant dans la phase aqueuse sont faibles (inférieur à 6%) quel que soit le composé. Dans le compartiment aqueux, les molécules les plus hydrophobes sont majoritairement retrouvées dans la fraction dissoute et colloïdale du compartiment alors qu’à l’inverse les composés de poids moléculaire plus petit sont majoritairement présents sous forme libre. ADEME 93 C aqu (%) Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires 5 4 3 2 1 0 Février 2013 Figure 45 : Répartition des HAP dans le compartiment particulaire et aqueux de la boue et dans les Alim et DCM du compartiment DSol DSed fractions libre aqueux. Les proportions sont calculées DBoue par rapport au total des concentrations en polluant. Les polluants sont représentés de gauche à droite (du plus foncé au plus clair) par ordre croissant de log Kow: Flu Ant Phe Fluor Pyr BaA Chr BaP BbF Ind BkF DBA BghiP 3.1.2 Influence des paramètres de fonctionnement des réacteurs sur la distribution des PE dans les différents compartiments De la même manière que les caractéristiques des molécules n’influencent pas la proportion de HAP sorbés à la matière particulaire, le fonctionnement des réacteurs n’induit pas de différence sur ces proportions. Qu’il s’agisse de la boue d’alimentation ou de n’importe quelles boues digérées, la majorité des polluants est retrouvée dans le compartiment particulaire. Par rapport à la concentration totale, toute molécule confondue, la proportion de polluant présent dans la phase aqueuse est supérieure dans les boues digérées par rapport à la boue d’alimentation. La proportion de polluants présents dans la phase aqueuse est croissante entre Dsol, Dsed et Dboue. Les proportions en polluants dans la phase libre et dans la DCM augmentent conjointement selon le même classement. ADEME 94 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 L’étude de la répartition des HAP dans la phase aqueuse, révèle que dans toutes les boues digérées, les polluants sont présents de manière plus importante dans la fraction DCM que dans la fraction libre (Figure 48). Là encore le phénomène est accentué entre les trois types de réacteurs. La digestion anaérobie de la boue entraine donc un réarrangement de la répartition des polluants. Les effets de ce réarrangement sont plus importants dans la phase aqueuse. Ce réarrangement est influencé par le fonctionnement des réacteurs. Si l’on compare les réacteurs où la méthanisation se déroule normalement (Dboue) aux réacteurs où d’autres voies métaboliques sont impliquées dans la dégradation de la matière (DSol), on peut émettre l’hypothèse que plus la digestion de la matière est poussée, plus les polluants se retrouvent dans la phase aqueuse. Dans cette phase, le processus de digestion va entrainer une accumulation des polluants sur la fraction DCM. C aqu (%) Les réacteurs étant tous alimentés avec le même type de boue (Alim), la disponibilité initiale des polluants est identique quels que soient les écosystèmes étudiés. Les bactéries sont soumises à une répartition en polluant similaire dans tous les écosystèmes, induite par les caractéristiques de la boue d’alimentation. Les polluants sont essentiellement présents dans le compartiment particulaire. Au cours de la digestion, le compartiment particulaire et les HAP sorbés dessus sont transformés, les molécules HAP non dégradées vont par la suite se répartir différemment dans les compartiments suivant différentes affinités développées vis-àvis de la composition physico-chimique de chacun des compartiments. 5 4 3 2 1 0 Alim DSol DSed DBoue Figure 46 : Répartition des HAP dans la fraction libre et DCM au sein du compartiment aqueux. Les proportions sont calculées par rapport au total des concentrations en polluant dans le compartiment aqueux. Flu ADEME Ant Phe Fluor Pyr BaA Chr BaP BbF Ind BkF DBA BghiP 95 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires 3.2 Février 2013 Activité des perturbateurs endocriniens dans les différents compartiments « matière » des boues Les activités « perturbateur endocrinien » sont évaluées dans la boue totale, dans le compartiment particulaire et dans le compartiment aqueux. Les activités œstrogéniques, androgéniques, dioxin-like et HAP-like pouvant toutes quatre être modulées par la présence de HAP, PCB ou NP, sont évaluées à partir de tests sur différentes lignées cellulaires (cf § 8 matériel et méthode). Les activités ciblées font partie de celles classiquement trouvées dans la littérature pour décrire l’action de molécules pouvant induire une activité de perturbateur endocrinien, à la fois dans des études sur des procédés de traitement et de valorisation (Combalbert et al. 2012; Patureau et al. 2012) mais aussi dans des études sur des échantillons environnementaux (Kinani et al. 2010). Chaque activité est mesurée par rapport à une molécule de référence. Il s’agit du 17β-œstradiol (E2) pour l’activité œstrogénique, de la dihydrotestostérone (DHT) pour l’activité androgénique, de la 2,3,7,8-tétrachlorodibenzo-pdioxine (TCDD) pour l’activité dioxin-like et le Benzo(a) Pyrène (BaP) pour l’activité HAP-like. Les différentes activités mesurées sont présentées sur la figure 49. De façon générale, les activités mesurées dans le compartiment « boue totale » sont plus élevées ou équivalentes à celles mesurées dans le compartiment particulaire ; ces dernières sont à chaque fois supérieures à celle mesurée dans le compartiment aqueux, ce qui coïncide bien avec le fait que les micropolluants organiques soient sorbés majoritairement au compartiment particulaire. Mise à part l’activité androgénique pour laquelle aucune activité « boue totale » n’est mesurée et l’activité dioxin-like, il est difficile de différencier l’activité « boue totale » de la boue d’alimentation, de celle des boues digérées. Par contre des différences sont observables à la fois dans le compartiment particulaire et dans le compartiment aqueux entre boue d’alimentation et boues digérées avec soit une augmentation, soit une diminution d’activité entre alimentation et sortie. Dans le compartiment particulaire, la boue des réacteurs provenant des inocula « boue » (DBoue) possède des activités œstrogénique, androgénique et HAP-like proches de la boue d’alimentation, alors que la boue provenant des réacteurs inoculés avec des microorganismes venant du sol (DSol) possède à chaque fois une activité supérieure. La boue provenant de l’inoculum « sédiment » (DSed) possède un comportement intermédiaire entre DBoue et DSol. Ces résultats suggèrent que, dans le cas d’une digestion incomplète de la boue, il se forme des composés intermédiaires qui interagissent avec les différents récepteurs de nos modèles cellulaires. Dans le compartiment aqueux, il est difficile de différencier les types de boue selon leur activité œstrogénique. Par contre, les activités androgéniques et HAP-like sont différentes selon le type d’inoculum étudié. L’activité androgénique de DBoue est similaire à celle mesurée dans l’alimentation alors qu’elle est supérieure dans DSol. Par opposition, l’activité HAP-like mesurée dans l’alimentation est similaire à celle mesurée dans DSol et nettement inférieure à celle mesurée dans DBoue. Peu d’activité dioxin-like est mesurée dans le compartiment aqueux. L’activité androgénique est la seule pour laquelle, des activités sont mesurées dans les compartiments particulaire et aqueux, sans que des activités soient mesurées dans le compartiment total. Ce phénomène peut être dû à des actions agonistes (effet positif sur le récepteur) et antagonistes (effet négatif sur le récepteur) qui mènerait à une absence d’activité générale mesurée dans la boue. Des tests pour déterminer la possible présence d’action antagoniste sont en cours d’analyse. ADEME 96 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Dans le cas de l’activité dioxin-like, certaines activités mesurées dans le compartiment particulaire sont supérieures à celles mesurées dans le compartiment total. Ici aussi des actions agonistes et antagonistes peuvent survenir. Les PCB notamment peuvent jouer des rôles différents sur le récepteur AhR suivant la conformation des molécules (Chen and Bunce, 2004). Dans le cas des activités œstrogéniques, en combinant les analyses chimiques, qui nous renseignent sur les concentrations en NP obtenues dans la boue totale, avec les analyses biologiques, nous pouvons comparer les équivalents toxiques donnés par les analyses chimiques et biologiques. Nos calculs (données non présentées) nous révèlent que pour tous les échantillons seuls 0.1 à 0.3% de l’activité mesurée biologiquement sont expliqués par les concentrations en NP mesurées. A concentration égale cette molécule induit une activité presque un million de fois plus faible que le 17β-œstradiol. Ce dernier composé (non dosé dans notre étude) peut être retrouvé dans les boues dans des concentrations allant de 10 à 20 µg/kg (Muller et al. 2010) ce qui représenterait 15 à 30% de l’activité mesurée. Figure 47 : Comparaison de quatre activités "perturbateur endocrinien" représentatives mesurées dans des extraits de micropolluants issus des différents compartiments de chaque réacteur à l’équilibre. Activité mesurée dans la boue d’alimentation des réacteurs dopés (barre hachurée), dans les boues digérées par les réacteurs inoculés par des microorganismes provenant du sol (barre blanche), des sédiments (barre grise) et de la boue (barre noire). n.a., non analysée, ; n.d., non détectée. ADEME 97 ADEME 98 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 De nombreux composés peuvent agir sur le récepteur ER comme, par exemple des hormones œstrogènes (naturelles ou synthétiques), des métabolites des HAP ou du Bisphénol-A (Kinani et al. 2010). L’activité HAP-like est sans conteste l’activité la plus présente dans nos échantillons (avec des valeurs jusqu’à 1000 fois supérieures aux autres valeurs d’activités « perturbateur endocrinien »). Dans la suite de ce paragraphe, nous mettons volontairement à part les réacteurs inoculés avec des microorganismes issus de sédiments qui ont un comportement métabolique hétérogène et intermédiaire par rapport aux réacteurs inoculés par des microorganismes de sol et de boue. De manière générale sur les échantillons totaux, si l’on compare les échantillons de boue digérée à l’échantillon d’alimentation, bien que nous mesurions des abattements en HAP, nous n’enregistrons ni perte, ni surplus d’activité HAP-like. Des molécules mères HAP ayant pourtant été éliminées de la boue, cela peut suggérer une activité HAP-like des produits de dégradation. D’un point de vue qualitatif, si l’on compare donc les réacteurs ayant les comportements les plus différents (à savoir DSol et DBoue), les activités biologiques, observées sur les échantillons, semblent bien liées aux concentrations totales en HAP quantifiées dans les différents compartiments (Tableau 17). En effet dans la boue totale les concentrations en HAP sont similairement élevées quel que soit le type de boue (t-test, p>0.05) et les activités HAP-like le sont aussi (t-test, p>0.05). Dans le compartiment aqueux, les concentrations les plus fortes en micropolluants sont mesurées dans les échantillons DBoue et c’est là aussi que les activités HAP-like les plus fortes sont mesurées (cor=0.909, p-value=0.012). Par opposition dans ce même compartiment, dans les échantillons DSol, les concentrations en HAP sont les plus faibles, et les activités HAP-like les sont aussi. Dans le compartiment particulaire où les concentrations en HAP sont plus fortes dans DSol que dans DBoue, là encore les activités suivent les tendances des concentrations (cor=0.947, p=0.004) et l’on mesure des activités plus fortes dans le particulaire de DSol que dans le particulaire de DBoue. Tableau 17 : Comparaison entre concentrations en HAP et activité HAP-like dans les boues digérées DSol et DBoue. Réacteur C ech totale HAP-like ech total C part HAP-like part C aqu HAP-like aqu DSol + + + + - - DBoue + + + + En combinant les analyses chimiques, qui nous renseignent sur les concentrations en HAP dans chaque compartiment, avec les analyses biologiques, nous pouvons comparer les équivalents toxiques donnés par les analyses chimiques et biologiques. Pour ce faire nous calculons pour chaque réacteur les équivalents toxiques théoriques mesurés grâce aux dosages chimiques. Pour calculer ces équivalents toxiques, nous utilisons les coefficients de toxicité de chaque molécule sur la lignée cellulaire PLHC1 (Louiz et al., 2008). Pour chaque réacteur, une valeur correspondant à l’activité toxique générée théoriquement par l’ensemble des 13 HAP (Chem-BaP) est calculée et comparée à la valeur mesurée biologiquement (BioBaP-EQ). A partir de ces données, le pourcentage d’activité mesurée expliqué par les mesures chimiques peut être calculé. 99 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Quelle que soit la boue étudiée, les concentrations en HAP mesurées dans la boue totale expliquent 36 ±3 % de l’activité HAP-like (tableau 18). Ces pourcentages sont cohérents avec ceux trouvés dans la littérature sur la mesure d’activité HAP-like dans des échantillons contaminés par un cocktail de molécules (Kinani et al. 2010). Les ligands naturels de AhR sont peu connus mais d’autres molécules peuvent interagir avec ce récepteur tels que des HAP méthylés, des PCB ou des acides humiques (Brack et al. 2008; Louiz et al. 2008; Kinani et al. 2010). Par ailleurs, d’autres HAP (ou d’autres isomères), non mesurés dans notre étude, peuvent aussi être présents dans la boue et donc induire une activité toxique. Dans le compartiment particulaire, de manière générale, les données de la chimie expliquent mieux l’activité mesurée biologiquement que dans la boue totale. Les autres molécules pouvant agir sur le récepteur AhR pourraient donc être plus présentes dans le compartiment aqueux. Le pourcentage d’activité expliquée par les concentrations en HAP mesurée est différent suivant le type de boue étudiée (tableau 18). Si l’on compare les deux types de réacteurs, ayant des comportements fermentaires les plus éloignés (soit DSol et DBoue), l’activité HAP-like calculée à partir des mesures chimiques explique mieux celle mesurée biologiquement dans le cas de DBoue que dans le cas de DSol. La digestion est plus poussée dans DBoue que dans DSol. Notre hypothèse serait donc que dans le cas d’une digestion incomplète de la boue, la dégradation des HAP ne se fait pas non plus de manière complète et des métabolites intermédiaires de cette dégradation (comme des HAP méthylés) se formeraient. Ils resteraient sorbés au particulaire et pourraient donc induire une activité du récepteurs AhR. Dans le cas d’une digestion complète, la dégradation des HAP serait plus poussée et les produits de dégradation ne seraient pas sorbés au compartiment particulaire, ne pouvant donc induire une activité du récepteur AhR. La grande majorité des molécules mères HAP restant dans le particulaire expliqueraient donc la grande majorité de l’activité biologique mesurée. Une analyse des métabolites présents dans chacune des boues, nous permettrait d’infirmer ou non cette hypothèse. Le fait que les concentrations chimiques surestiment l’activité mesurée dans la boue d’alimentation peut être due à la présence de molécules antagonistes du récepteur AhR dans la boue d’alimentation. Ces molécules seraient alors transformées lors de la digestion ou leur action inhibée. Les activités mesurées dans le compartiment aqueux sont plus faibles que dans le compartiment particulaire, de manière générale. Ces activités HAP-like sont plus faiblement expliquées dans ce compartiment que dans la boue totale (Tableau 18). Cela renforce notre hypothèse que d’autres molécules capables d’induire l’activité HAP-like mesurée dans la boue totale seraient donc préférentiellement présentes dans le compartiment aqueux. Conclusion partie 3 : Les micropolluants sont majoritairement répartis dans le compartiment particulaire quel que soit le type de boue (digérée ou non) et quel que soit le mode de digestion. La répartition des HAP dans le compartiment aqueux varie d’une boue non digérée à une boue digérée mais aussi entre boues digérées. La digestion augmente la proportion des HAP présents dans le compartiment aqueux et plus particulièrement DCM. La digestion entraine donc un réarrangement de la répartition des HAP dans le compartiment aqueux. L’affinité des HAP pour le compartiment DCM augmente avec le degré de digestion de la boue, il est donc logique de retrouver des proportions plus importantes de HAP sorbés à la DCM. Cette modification de l’affinité des HAP pour le compartiment DCM peut être expliqué par les modification physico-chimiques et fonctionnelles de la nature de la DCM qui surviennent lors de la digestion (Barret 2009; Cea-Barcia, 2012). Des analyses permettant de caractériser la composition biochimique du compartiment aqueux et ses transformations, notamment la fluorescence 3D, semble une perspective intéressante. 100 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Les activités « perturbateur endocriniens » ne permettent pas de différencier les différents types d’échantillons de boue si l’on considère l’échantillon de boue brut. D’un point de vue qualitatif, les activités HAP-like mesurées dans les compartiments suivent bien les variations des concentrations en HAP dans le compartiment particulaire et aqueux. La comparaison des activités biologiques HAP-like mesurées, à celle des activités théoriques calculées, nous permet de conclure quant à la présence d’autres molécules capables d’agir sur le récepteur cellulaire. Les résultats obtenus sur le compartiment particulaire en comparant deux boues (DSol et DBoue) résultant d’une activité microbienne différente laissent supposer la présence dans ce compartiment d’intermédiaires de dégradation des HAP sorbés à la matière particulaire et pouvant induire une activité biologique sur les récepteurs AhR (il pourrait s’agir par exemple de HAP méthylés). Ces intermédiaires métaboliques pourraient être de caractéristiques chimiques différentes suivant la voie de dégradation empruntée par le système. Notre hypothèse est que dans le cas des réacteurs DSol, ces intermédiaires, aux caractéristiques encore proches de la molécule mère, resteraient sorbés au compartiment particulaire. Dans le cas des réacteurs DBoue, où la digestion est plus poussée, on peut supposer une dégradation plus avancée des molécules mères HAP, formant ainsi des métabolites plus solubles ou ayant plus d’affinité pour le compartiment DCM, ce qui engendrerait les activités plus fortes mesurées dans le compartiment aqueux de DBoue. Par ailleurs, les modifications physico–chimiques induites par la digestion sur la nature des compartiments entrainent une affinité plus forte des HAP non dégradés pour le compartiment DCM. Ceci explique aussi l’augmentation d’activité mesurée dans ce compartiment dans les échantillons DBoue. Selon les profils d’activités obtenus, une approche « Effect-Directed Analysis » (EDA), intégrant des analyses chimiques, guidées par les tests sur lignée cellulaire, peut être mis en œuvre dans le but d’identifier les molécules responsables des effets toxiques observés. Des échantillons d’intérêt (DSol et DBoue, représentants les deux voies fermentaire observées) pourraient être fractionnés en fonction de la polarité ou de la masse des composés présents. L’activité de chaque fraction, ainsi obtenue, pourrait être mesurée ce qui permettrait d’identifier celles induisant une perturbation endocrinienne. Ces dernières seraient alors isolées et analysées, par différentes techniques de spectrométrie de masse à haute résolution (GC-TOF et/ou LC-TOF). Ceci permettrait la détection d’éventuels composés actifs, non ciblés par notre démarche d’analyse classique. In fine, le couplage des analyses chimiques et toxicologiques devrait permettre d’identifier les composés ainsi que les classes chimiques, responsables d’une activité de perturbation endocrinienne, dans les échantillons de boue et leurs compartiments et/ou fractions. Cela permettrait aussi d’appréhender l’effet de la digestion et des voies métaboliques des communautés microbiennes, sur ces éléments. L’analyse de l’activité induite par les échantillons issu des réacteurs non dopés, nous permettrait de vérifier si le processus de dégradation même de la matière, entraîne ou non une activité sur les différents récepteurs. Notre analyse s’est essentiellement focalisée sur les HAP, mais analyser la répartition des PCB et des NP dans les différents compartiments, nous permettraient de mieux comprendre les activités « perturbateur endocrinien » mesurées en lien avec la dynamique de répartition de ces micropolluants dans les compartiments en fonction des voies métaboliques empruntées par les trois communautés microbiennes. 101 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Tableau 18 : Activités HAP-like calculées et mesurées (en BaP-EQ) dans la boue totale et dans les compartiments (particulaire et aqueux) à l’état d’équilibre. 102 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES L’objectif du présent projet, visait à (i) mieux comprendre les processus qui pilotent la dynamique des micropolluants organiques (ici des perturbateurs endocriniens-PE) au sein d’écosystèmes épuratoires, (ii) déterminer le ou les critères pertinents permettant a priori d’évaluer ce devenir pour enfin (iii) orienter ce devenir dans un contexte de réduction des risques (lié au rejet des micropolluants dans notre environnement soit par le biais du rejet des eaux usées traitées soit par le biais de l’épandage des boues sur sol agricole). Nous avons pour ce faire choisi de travailler (i) avec des perturbateurs endocriniens types, HAP, PCB et NP qui se retrouvent de façon systématique dans les boues issues du traitement des eaux usées et (ii) sur un procédé modèle de digestion anaérobie, procédé utilisé lors des traitements de stabilisation des boues avant leur utilisation comme amendement ou fertilisant sur sol agricole. La méthodologie utilisée fut la suivante : (1) nous avons travaillé sur des boues de nature différente (soit naturelles, soit modifiées au laboratoire) afin d’observer l’effet de cette variabilité matricielle sur le potentiel à dégrader les PE et ainsi faire le lien entre caractérisation des boues-disponibilité des PE-sorption-biodégradation mais aussi à l’inverse (2) nous avons utilisé trois écosystèmes microbiens différents que nous avons mis en présence d’une même matrice boue afin d’observer l’effet de cette diversité microbienne sur l’expression de la biodégradation des PE et sur l’expression d’activités « perturbateur endocrinien ». Pour étudier le lien entre caractérisation des boues-disponibilité des PE-sorptionbiodégradation, deux systèmes expérimentaux ont été utilisés, soit des réacteurs continus, soit des réacteurs batch, dans les deux cas, des boues de nature différente ont été utilisées et caractérisées finement. Le panel de boues sélectionnées était suffisamment large pour a priori obtenir des comportements et des cinétiques de réaction divers pour les PE. De plus, les rendements de transformation de la boue dépendent également de sa composition initiale, de son accessibilité et de sa biodégradabilité. Ainsi, biodisponibilité et cométabolisme des PE sont de fait confrontés dans ce type d’expérience. Les résultats ont montré que les abattements des PE par digestion anaérobie varient considérablement en fonction des caractéristiques des boues d'alimentation. Selon le réacteur, l'élimination plus ou moins grande peut être expliquée soit par des variations de cométabolisme ou par différents niveaux de biodisponibilité des PE. Cependant, les résultats suggèrent qu'une caractérisation détaillée des boues d'alimentation, en particulier de la fraction aqueuse, pourrait aider à prédire l’élimination des PE. Pour aller plus loin, les abattements des PE ont été mesurés dans des réacteurs batch alimentés avec différents mélanges de boues, mais inoculés avec le même consortium anaérobie adapté aux PE. L’objectif était ici de mieux comprendre l'influence de la biodisponibilité sur les abattements des PE au travers de l'étude du rôle de la concentration et de la nature de la matière dissoute et colloïdale sur la distribution des PE dans les trois compartiments physiques de la boue, soit le compartiment libre, sorbé à la matière dissoute et colloïdale et sorbé aux particules. Les concentrations totale, aqueuse et libre des PE ont été mesurées tout au long des expériences en utilisant la technique SPME-solid phase microextraction. Ainsi, les cinétiques des abattements des PE dans les trois compartiments physiques de la boue ont été obtenues pour chaque mélange de boues. Ces cinétiques dans les réacteurs batch ont montré que les abattements des PE sont couplés aux premières étapes d’hydrolyse et d’acidogenèse de la digestion anaérobie. Ces abattements sont conjoints à un transfert des PE du compartiment particulaire vers le compartiment aqueux lors de l’hydrolyse des particules. Ce transfert des PE permet l'élimination apparente et simultanée des concentrations libre, sorbée à la matière dissoute et colloïdale et sorbée aux particules. De plus, les résultats soulignent l'importance de la matière dissoute et colloïdale sur l'élimination des PE de haut poids moléculaire qui est 103 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 directement liée à la concentration initiale des PE sorbés à ce compartiment. Cependant, même si un niveau élevé de cette concentration implique un fort abattement de cette concentration, l’élimination totale des PE n’est pas uniquement régie par le compartiment dissout et colloïdale, mais l’est également par le flux cométabolique généré par l’hydrolyse de la matrice et par les phénomènes de transfert des PE d’un compartiment à l’autre. Pour étudier les interactions PE-matrice et leur influence sur l’élimination des PE, les coefficients de partition KDOC et Kpart, c'est à dire les affinités respectives des PE pour la matière dissoute et colloïdale et les particules, ont été calculés en utilisant les résultats SPME. Ces coefficients sont bien corrélés avec les Kow des PE, mais sont différents entre les boues. Ils ont donc été utilisés pour construire un modèle explicatif et prédictif de ces interactions PE-matrice avec la méthode statistique de régression partielle des moindres carrés (PLS). Les autres données explicatives choisies sont des données biochimiques et de caractérisation fonctionnelle par fluorescence tridimensionnelle (3D) de la fraction aqueuse. Il a été constaté que les compartiments de type acides humiques-like et mélanoïdines-like ont un grand rôle dans les interactions PE-matrice dans la phase aqueuse. De plus en couplant SPME et filtration/ultrafiltration, il a été montré que les colloïdes de grande taille contribuent principalement à la sorption des PE dans le compartiment aqueux. La caractérisation de la phase aqueuse par fluorescence 3D a également été utilisée pour expliquer et prédire l'affinité des PE pour le compartiment de particules. Pour ce compartiment, en plus du compartiment matière de type acides humiques-like, les protéines complexes régissent les interactions PE-matrice. Cependant, cette caractérisation fonctionnelle de la phase aqueuse n'est pas suffisante pour expliquer les interactions entre tous les PE et la fraction particulaire, ce qui rend nécessaire une caractérisation plus détaillée de cette fraction afin de déterminer quel type de matière organique particulaire interagit avec les PE. Le modèle prédictif de KDOC présente quant à lui une très bonne précision en utilisant cette méthode simple et non-destructive de caractérisation fonctionnelle de fluorescence 3D. Des modèles PLS explicatifs et prédictifs des abattements totaux des PE ont aussi été construits. Il en ressort que l’élimination des PE est favorisée par tous les paramètres cométaboliques (élimination des substrats). La variable « concentration aqueuse des PE » est elle aussi très fortement corrélée aux abattements, ce qui tend à confirmer que ce compartiment correspond au compartiment biodisponible. Le modèle prédictif PLS a été construit à partir d'une caractérisation plus détaillée initiale et en tenant compte de l'influence de la biodisponibilité (via la distribution initiale des PE dans les trois compartiments matriciels). Les distributions initiales des PE ont été identifiées comme les variables les plus importantes qui permettent de prédire les abattements totaux des PE, avec une influence positive des concentrations « libre » et « matière dissoute et colloïdale » et négative de la concentration « particules ». Parmi les paramètres de caractérisation des boues, les compartiments matière de type protéines-like, acides humiques-like et mélanoïdines-like présentent les plus grandes influences. Ces paramètres peuvent influer soit sur la biodisponibilité par affinités variables des PE pour les différents compartiments soit indirectement sur le flux cométabolique. De façon générale, si prédire la distribution des PE dans les compartiments « matière » de la boue au travers d’une caractérisation fine de ceux-ci semble être aisé, la prédiction des performances de dégradation reste chose difficile car les deux effets (co-métabolisme et biodisponibilité) sont très interdépendants. Ainsi, le seul fait de maximiser le compartiment aqueux/disponible n’est pas suffisant pour maximiser la dégradation totale, certes cela contribue significativement à maximiser la dégradation dans ce compartiment. Mais, ce n’est pas suffisant car 99% de nos composés sont sorbés sur le compartiment particulaire et si ce compartiment est réfractaire à la dégradation alors l’effet co-métabolisme prédomine donc il faut maximiser la sorption sur le 104 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 compartiment aqueux tout en maintenant un niveau de co-métabolisme suffisant pour agir simultanément sur les deux effets co-métabolisme et disponibilité. Les boues secondaires fortes charge répondent pleinement à ces deux critères et sont donc des boues de nature favorable pour permettre de maximiser à la fois co-métabolisme et disponibilité. Si la caractérisation du compartiment aqueux est suffisante pour décrire les interactions PEmatrice dans ce compartiment, elle ne l’est pas pour décrire celles liant PE et compartiment particulaire surtout pour les HAP de haut poids moléculaire. Il semble donc important de poursuivre notre effort de caractérisation de ce compartiment et d’établir un lien entre ses fractions de matières organiques plus ou moins accessibles et la distribution des composés dans ces dites fractions. Dans toutes les expériences présentées précédemment, deux types de matrices sont mélangées : la matrice « boue » qui sert de substrat est toujours en présence d’une matrice « boue » qui sert d’inoculum, soit pourvoie le système en une microflore dite adaptée au niveau de contamination en PE. Or, ces deux types de boue contiennent systématiquement des microorganismes et de la matière organique qui se mêlent, il est alors difficile de faire la part entre les microorganismes apportés pour leurs capacités à dégrader de ceux présents dans la boue/substrat. Dans l’objectif de dissocier ces deux communautés et afin de piloter ce paramètre communauté, il a été envisagé une stratégie d’extraction de diverses communautés microbiennes à partir d’écosystème à historique contrasté de pollution et de les ré-introduire dans une matrice boue/substrat stérilisé. Cette stratégie devrait permettre d’apporter un éclairage nouveau sur sur les acteurs microbiens et les processus impliqués dans la dégradation de micropolluants organiques au cours de la digestion anaérobie en utilisant les caractéristiques de la communauté microbienne initiale comme seule variable opératoire. Dans un premier temps, il a été nécessaire de mettre au point un nouveau protocole expérimental permettant d’extraire les communautés microbiennes d’intérêt de leur écosystème natif tout en conservant les caractéristiques initiales (densité, diversité et activité). Ce protocole a permis d’étudier l’influence des communautés microbiennes placées dans les mêmes conditions physico-chimiques en réacteur continu (alimentation en substrat, température, taux de dilution, etc.). Si les protocoles d’extraction existant dans la littérature ont pu être facilement adaptés aux matrices de sol et de sédiment, la nature même de l’échantillon de boue, et particulièrement la présence de la gangue d’exopolymères (EPS), a nécessité la mise au point d’un protocole spécifique couplant un traitement enzymatique avec une extraction sur gradient de densité. Pouvoir extraire spécifiquement des communautés microbiennes d’écosystèmes complexes tout en minimisant l’impact de l’extraction sur la structure, la diversité et les fonctions des communautés, permet alors leur étude dans des conditions opératoires choisies et contrôlées. Cette stratégie efficace développée au cours de ce travail pourrait être employée dans bien d’autres domaines et sous bien d’autres conditions que celles de la digestion anaérobie et de la dégradation de micropolluants. Cet outil, mis en place sur des échantillons de boue peut par ailleurs être adapté à d’autres matrices complexes riches en EPS comme par exemple des biofilms ou granules microbiens retrouvés dans de nombreux procédés de traitement biologiques d’effluents. Ce protocole d’extraction permet aussi de comparer les communautés d’un grand nombre d’écosystèmes de structures et de caractéristiques physico-chimiques différentes sans que celles-ci n’interfèrent directement sur les communautés et les conditions opératoires choisies. Aussi, dans le cas d’écosystèmes complexes organisés en agrégat, riches en EPS, cette extraction pourrait permettre de faciliter l’emploi des protocoles expérimentaux de caractérisation des microorganismes basés sur des outils faisant par exemple intervenir la fluorescence (DAPI) ou le comptage de cellules libres (cytométrie). 105 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Dans notre cas, cette méthodologie d’extraction appliquée à trois écosystèmes présentant des historiques de pollution contrastés nous a permis l’obtention de trois communautés microbiennes de structure et de diversité a priori différentes. Elles ont été utilisées comme source d’inoculum pour des réacteurs anaérobies alimentés avec une même boue stérilisée (afin de ne pas apporter une diversité microbienne supplémentaire) et enrichie en HAP, PCB et NP. Ces bioréacteurs ont donc permis, tout en suivant leur propre évolution de structure et de diversité microbienne, sous des conditions opératoires contrôlées et similaires (alimentation avec la même boue et donc a priori avec la même disponibilité des micropolluants), d’étudier l’influence de ses trois communautés microbiennes sur : (i) les cinétiques d’abattements en HAP, PCB et NP au cours de la digestion, (ii) l’activité microbienne du système et l’expression de fonctions spécifiques impliquées dans la dégradation des micropolluants, (iii) la distribution des micropolluants au sein des compartiments particulaires/aqueux, et fraction dissoute et colloïdales, au regard de l’expression d’une activité toxique dans ces mêmes compartiments, (iv) la toxicité résiduelle du substrat après digestion. A partir des trois écosystèmes initiaux, nous avons obtenu deux types de comportement de digestion distincts, l’un bloqué aux activités fermentaires et l’autre réalisant la méthanogenèse complète. Dans un même temps, nous avons aussi constaté une convergence des capacités d’abattement en HAP quelle que soit les voies métaboliques empruntées. L’analyse de la structure, de la diversité et l’identification des communautés microbiennes révèlent que les différences observées au niveau structurel sont très bien corrélées avec l’activité générale de l’écosystème quantifiée par l’accumulation d’AGV (métabolisme fermentaire) et la production de méthane (métabolisme méthanogène). Par contre, l’abattement des micropolluants ne peut s’expliquer par des différences structurelles de communauté microbienne ou par des différences de rendement méthanogène. Ces résultats soulignent à nouveau que la dégradation de ces composés organiques persistants présents en faible quantité dans la boue par rapport aux autres sources de carbone ne peut se faire qu’en combinaison avec la dégradation de co-substrats, soit au travers d’un cométabolisme. Ils montrent que cette dégradation des micropolluants est imputable à une structure et une diversité microbienne non spécifique de la présence et de l’abattement des micropolluants mais spécifiques de la dégradation des co-substrats et des voies métaboliques empruntées. Ils suggèrent de plus que la dégradation des HAP n’est pas directement liée au processus de méthanogenèse mais aux étapes initiales de la digestion anaérobie de la matière organique. Les résultats obtenus sur la dégradation des PCB et NP mériteraient d’être approfondis. Par exemple, concernant le devenir du nonylphénol dans nos systèmes, un bilan englobant aussi le devenir des composés polyéthoxylés s’avère nécessaire pour tenir compte au mieux des processus concomitants de dégradation et de synthèse du nonylphénol. En effet, en condition anaérobie, le nonylphénol peut être à la fois dégradé et produit via la présence de composés polyéthoxylés. L’abattement observé en NP est donc le résultat d’un équilibre entre la dégradation et la néo-synthèse de ce composé. La vision apportée par la seule analyse des abattements en nonylphénol peut donc se révéler biaisée. Le processus de digestion anaérobie bloqué à différents stades (fermentaire ou méthanogène) devrait aboutir à la production de deux digestats de compositions physicochimiques et de caractéristiques matricielles fonctionnelles différentes. Cette variabilité matricielle finale influence vraisemblablement la répartition des micropolluants au sein des compartiments matière des boues digérées puisqu’ils présentent des affinités contrastées aux matières organiques des boues en fonction de leur nature et de leur concentration. Même s’ils restent majoritairement sorbés à la matière particulaire, l’étude de la répartition des HAP au sein de la boue révèle qu’une partie des micropolluants non dégradés est transférée dans la phase aqueuse et que ce transfert dépend du degré de digestion de la 106 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 boue. Au sein du compartiment aqueux, un réarrangement s’opère également et les HAP sont plus favorablement sorbés à la matière dissoute et colloïdale dans le cas où la digestion anaérobie est la plus efficace. L’hypothèse que des modifications physico-chimiques et fonctionnelles, s’opérant sur les compartiments matière et donc dépendantes du rendement de digestion, influencent la répartition des micropolluants est par la même fortement suggérée. Une caractérisation physico-chimique et fonctionnelle de la nature des compartiments plus approfondie nous permettrait de mettre en perspective, le degré de digestion et la caractérisation de ses sous-produits, avec l’affinité des micropolluants pour chaque compartiment. Dans cette perspective, de nouveaux outils de caractérisation de la matière comme la fluorescence 3D peuvent être envisagés. Cette approche employée sur les HAP pourra par ailleurs être transposée sur les PCB et NP. Les communautés microbiennes ont emprunté des voies de dégradation de la matière différentes qui ont eu un impact sur les interactions matrice/micropolluants. La modification de ces interactions peut, en soit, introduire des différences d’expression de la toxicité des micropolluants. La mesure des activités de perturbation endocrinienne via la mesure des activités œstrogénique, androgénique, dioxin-like et HAP-like a révélé que l’activité majoritairement présente étaient celle HAP-like. D’un point de vue global, quelle que soit la voie métabolique empruntée, l’activité toxique globale de la boue n’est pas influencée par le processus de digestion. Cependant des différences au niveau des activités des compartiments particulaire et aqueux sont notables entre les voies fermentaires. L’étude de l’activité HAP-like révèle que les activités mesurées dans le compartiment particulaire sont plus faibles lorsque la digestion est plus avancée et que, inversement, l’activité mesurée dans le compartiment aqueux augmente ce qui est bien corrélé au transfert de la phase particulaire à l’aqueux envisagé. Cette dynamique est inverse quand la digestion est moins efficace. La présence de métabolites induisant une activité HAP-like est fortement suggérée par les différences entre activité mesurée et activité théorique et par le fait que des abattements en HAP sont mesurés dans nos systèmes sans pour autant voir l’activité globale HAP-like diminuée. Il peut par ailleurs s’agir de métabolites de nature différente suivant la voie fermentaire. L’identification de ces intermédiaires potentiels de dégradation des HAP et pouvant induire une activité HAP-like nous renseignerait sur les voies de dégradation des micropolluants en condition méthanogène que nous pourrions confronter avec celles supposées dans d’autres conditions anaérobies. La présence d’intermédiaires métaboliques démontrerait d’autre part l’implication forte des processus biologiques dans la dégradation des molécules. L’étude de la présence de gènes potentiellement impliqué dans la dégradation des molécules mono-aromatiques (gène bssA) ne nous a pas permis de mettre en évidences des populations spécifiques responsables de ces processus. Les études dans lesquelles ces outils sont employés portent sur des milieux hypercontaminés où la fonction de dégradation représente une activité majeure de l’écosystème et est vraisemblablement supportée par une population spécifique. Dans nos systèmes, la pression de sélection imposée par de faibles concentrations en micropolluants explique peut-être la difficulté d’emploi de ces outils. Dans des systèmes faiblement contaminés, les fonctions de dégradation des micropolluants ne sont peut-être pas portées par des populations très spécifiques (du fait de la faible pression de sélection imposée) mais plutôt par un consortium microbien qui les cométabolisent lors des phases fermentaires. D’ailleurs, en condition peu favorable à l’expression d’un co-métabolisme (comme dans nos expériences utilisant du phénanthrène marqué), la dégradation des micropolluants est difficilement observable. Pour pallier ce biais méthodologique, l’ajout d’une source de carbone facilement biodégradable est proposé. Le marquage de cette source de carbone sur un autre atome que le carbone (l’azote par exemple) permettrait de mettre en évidence, voire d’identifier les acteurs du co-métabolisme. L’analyse et l’identification de composés sous-produits marqués seraient une autre voie d’identification des voies métaboliques de dégradation. 107 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Elucider les processus de dégradation des micropolluants sous condition anaérobie semble ne pas pouvoir se faire par une approche mono-disciplinaire. Le couplage des connaissances apportées par les analyses chimiques, écotoxicologiques et microbiologiques, développé dans cette étude devrait être encouragé et poursuivi dans le but, dans un premier temps, d’identifier les co-substrats et les métabolites intermédiaires de dégradation et dans un deuxième temps, basé sur ces connaissances de remonter aux fonctions et pouvoir élaborer des marqueurs biologiques pertinents pour suivre les communautés dégradantes. Ce couplage des différentes approches peut par ailleurs être employé à l’étude de la dégradation d’autres molécules polluantes dans d’autre processus. 108 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Thèses : Cea-Barcia, G., E., 2012. Identification des mécanismes qui gèrent la disponibilité en vue de l’optimisation de la dégradation des micropolluants organiques au sein d'écosystèmes épuratoires. Braun, F., 2012. Impact des communautés microbiennes sur la dynamique de dégradation de micropolluants organiques au sein d’écosystèmes épuratoires et sur l’expression de leur toxicité. Articles : Barret, M., Carrere, H., Cea Barcia, G. and Patureau, D. (2010). Influence of inlet characteristics on the removal of micropollutants during the anaerobic digestion of contaminated sludge. Journal of Hazardous Materials, 181: 241-247. Braun, F., Hamelin, J., Gevaudan, G., Patureau, D. (2011) Development and application of an enzymatic and cell flotation treatment for the recovery of viable microbial cells from environmental matrices such as anaerobic sludge. Applied and Environmental Microbiology, 77(24): 8487–8493. Barret, M., Delgadillo-Mirquez, L., Trably E., Delgenes, N., Braun, F., Cea Barcia, G., Steyer, J.P. and Patureau, D. (2012) Anaerobic Removal of Trace Organic Contaminants in Sewage Sludge: 15 Years of Experience. Pedosphere, 22(4): 508–517. Cea Barcia, G., Carrère, H., Steyer, J.P. and Patureau, D. (2013) Evidence for PAH removal coupled to the first steps of anaerobic digestion in sewage sludge. Accepted in International Journal of Chemical Engineering. Braun, F., Hamelin, J., Bonnafous, A., Delgenes, N., Steyer, JP., Patureau, D. Similar micropollutants fate in anaerobic digesters fed with the same sludge but exhibiting different microbial populations and metabolic routes. Submitted to Water Research. Articles en preparation: Braun, F., Delgenes, N., Creusot, N., Ait-Aissa, S., Le Menach, K., Budzinski, H., Hamelin, J., Patureau, D. Chemical and toxicological assessments of anaerobic digesters removing EDCs. Cea-Barcia G., Budzinski, H., Le Menach, K., Carrère H., and Patureau D. Role of dissolved and colloidal matter on the distribution and the anaerobic removal of PAHs in sewage sludge. Cea-Barcia G., Barret, M., Budzinski, H., Le Menach, K., Carrère H., and Patureau D. Prediction of micropollutant sorption in the aqueous fraction of sludge by fluorescence. Conférences orales : Cea Barcia, G., Barret, M., Carrère, H., Delgadillo, L. and Patureau, D. (2010) Biodegradation of PAHs during the anaerobic digestion of sludge: modelling the limitations by bioavailability and cometabolism. IWA Conférence, Anaerobic Digestion n°12, Mexico, 0104/11/2010. Cea Barcia, G., Carrère, H. and Patureau, D. (2011) PAH Biodegradation kinetics under anaerobic conditions: link between sorption, bioavailability and cometabolism. The 5th European Bioremediation Conference on July 4-7, Chania, Crete, Greece. Braun, F., Hamelin, J., Bonnafous, A., Steyer, JP., Patureau, D. (2011) Organic micropollutants degradation under anaerobic mesophilic conditions with respect to the inoculum origin. ISPAC International Symposium on Polycyclic Aromatic Compounds 23, Münster, Germany, 04-08/09/2011. 109 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Barret, M., Delgadillo-Mirquez, L., Trably E., Delgenes, N., Braun, F., Cea Barcia, G., Steyer, J.P. and Patureau, D. (2012) Persistent and emerging pollutants removal under anaerobic conditions: 15 years of experience. EcoSTP conference “Ecotechnologies for Wastewater Treatment. Technical, Environmental and Economic Challenges”, Saint-Jacques de Compostèle, 25-27 juin 2012. Posters : Braun, F., Hamelin, J., Bonnafous, A., Steyer, JP., Patureau, D. (2011) Role of the inoculum origin on organic micropollutants degradation under anaerobic mesophilic conditions. International Conference on Biogas Microbiology, September 14-16, Leipzig, Germany. Cea-Barcia G., Carrère H., Budzinski, H., Le Menach, K. and Patureau D. (2012) Role of dissolved and colloidal matter on the distribution and the removal of PAHs in sewage sludge EcoSTP conference “Ecotechnologies for Wastewater Treatment. Technical, Environmental and Economic Challenges”, Saint-Jacques de Compostèle, 25-27 juin 2012. Braun, F., Hamelin, J., Bonnafous, A., Steyer, J.-P., and Patureau, D. (2012) Similar organic micropollutants fate in anaerobic mesophilic digesters fed with the same contaminated sludge but exhibiting different microbial populations and different metabolisms. ISME14 14th International Symposium on Microbial Ecology, Copenhagen (Denmark), 2012/08/1924. 398B - p 419. Braun, F., Delgenes, N., Creusot, N., Ait-Aissa, S., Le Menach, K., Budzinski, H., Hamelin, J., Patureau, D. (2012) Chemical and toxicological assessments of anaerobic digesters removing EDCs. PNRPE Conférence - Recent advances on the environmental and health effects of endocrine disrupters. Paris, 10-11 décembre 2012. 110 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES Adrian, L., Dudkova, V., Demnerova, K., Bedard, D.L., 2009. “Dehalococcoides” sp. Strain CBDB1 Extensively Dechlorinates the Commercial Polychlorinated Biphenyl Mixture Aroclor 1260. Applied and Environmental Microbiology 75 (13), 4516–4524. Ahel M, Giger W, Molnar E, Ibric S (2000). Determination of nonylphenol polyethoxylates and their lipophilic metabolites in sewage effluents by normal-phase high-performance liquid chromatography and fluorescence detection. Croatica Chemica Acta, 73(1):209-227. Artola-Garicano E, Borkent I, Hermens JLM, Vaes WHJ. 2003. Removal of two polycyclic musks in sewage treatment plants: Freely dissolved and total concentrations. Environmental Science & Technology 37(14):3111-3116. Baker A. 2001. Fluorescence excitation-emission matrix characterization of some sewage-impacted rivers. Environmental Science & Technology 35(5):948-953. Balaguer, P., François, F., Comunale, F., Fenet, H., Boussioux, a M., Pons, M., Nicolas, J.C., Casellas, C., 1999. Reporter cell lines to study the estrogenic effects of xenoestrogens. The Science of the Total Environment233 (1-3), 47–56. Barra Caracciolo, A., Grenni, P., Cupo, C., Rossetti, S., 2005. In situ analysis of native microbial communities in complex samples with high particulate loads. FEMS Microbiology Letters 253 (1), 55–58. Barret, M., 2009. Devenir des perturbateurs endocriniens HAP/NP/PCB au cours de la digestion anaérobie de boues contaminées: rôle de la biodisponibilité et du co-métabolisme. Barret, M., Carrère, H., Latrille, E., Wisniewski, C., Patureau, D., 2010a. Micropollutant and sludge characterization for modeling sorption equilibria. Environmental science & technology 44 (3), 1100– 1106. Barret, M., Barcia, G.C., Guillon, A., Carrère, H., Patureau, D., 2010b. Influence of feed characteristics on the removal of micropollutants during the anaerobic digestion of contaminated sludge. Journal of Hazardous Materials 181 (1–3), 241–247 Benabdallah El-Hadj, T., Dosta, J., Mata-Alvarez, J. (2006) Biodegradation of PAH and DEHP micropollutants in mesophilic and thermophilic anaerobic sewage sludge digestion. Wat. Sci ; Technol., 53 (8), 99-107. Berdugo-Clavijo, C., Dong, X., Soh, J., Sensen, C.W., Gieg, L.M., 2012. Methanogenic biodegradation of two-ringed polycyclic aromatic hydrocarbons. FEMS Microbiology Ecology 81 (1), 124–33. Braun, F., Gévaudan, G., Hamelin, J., Patureau, D., 2011. Development and application of an enzymatic and cell flotation treatment for the recovery of viable microbial cells from environmental matrices such as anaerobic sludge. Applied and Environmental Microbiology 77 (24), 8487–8493. Brack, W., Blaha, L., Giesy, John, P., Grote, M., Moerder, M., Schrader, S.T.S., Hecker, M.A.H., 2008. Polychlorinated naphthalenes and other dioxin-like compounds in Elbe river sediment. Environmental Toxicology and Chemistry 27 (3), 519–528. Bowen De León, K., Ramsay, B.D., Fields, M.W., 2012. Quality-score refinement of SSU rRNA gene pyrosequencing differs across gene region for environmental samples. Microbial Ecology 64 (2), 499–508. Cea-Barcia, G., E., 2012. Identification des mécanismes qui gèrent la disponibilité en vue de l’optimisation de la dégradation des micropolluants organiques au sein d'écosystèmes épuratoires. Chang, B.V., Chiang, F., Yuan, S.Y., Chiang, B.W., 2005. Anaerobic degradation of nonylphenol in sludge. Chemosphere 59 (10), 1415–1420. Chen, G., Bunce, N.J., 2004. Interaction between halogenated aromatic compounds in the Ah receptor signal transduction pathway. Environmental Toxicology 19 (5), 480–9. Chen W, Westerhoff P, Leenheer JA, Booksh K. 2003. Fluorescence excitation - Emission matrix regional integration to quantify spectra for dissolved organic matter. Environmental Science & Technology 37(24):5701-5710. Christensen, N., Batstone, D.J., He, Z., Angelidaki, I., Schmidt, J.E. (2004) Removal of polycyclic aromatic hydrocarbons (PAHs) from sewage sludge by anaerobic degradation. Wat. Sci. Technol., 50 (9), 237-244. Clara M., Kreuzinger N., Strenn B., Gans O., Kroiss H. (2005) The solids retention time : a suitable design parameter to evaluate the capacity of wastewater treatment plants to remove micropollutants. Water Res., 39, 97-106. Combalbert, S., Bellet, V., Dabert, P., Bernet, N., Balaguer, P., Hernandez-Raquet, G., 2012. Fate of steroid hormones and endocrine activities in swine manure disposal and treatment facilities. Water Research 46 (3), 895–906. 111 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Cornelissen G, Rigterink H, Ferdinandy M M A, Van Noort P C M (1998). Rapidly desorbing fractions of PAHs in contaminated sediments as a predictor of the extent of bioremediation. Environmental Science & Technology, 32(7):966-970. Delbès, C., Moletta, R., Godon, J.-J., 2001. Bacterial and archaeal 16S rDNA and 16S rRNA dynamics during an acetate crisis in an anaerobic digestor ecosystem. FEMS Microbiology Ecology 35 (1), 19–26. Delgadillo-Mirquez, Liliana, R., 2011. Modeling the fate of micropollutant organics during anaerobic digestion of contaminated sewage sludge . Dionisi D, Bertin L, Bornoroni L, Capodicasa S, Papini MP, Fava F. 2006. Removal of organic xenobiotics in activated sludges under aerobic conditions and anaerobic digestion of the adsorbed species. Journal of Chemical Technology and Biotechnology 81(9):1496-1505. Dreywood, R., 1946. Qualitative Test for Carbohydrate Material. Industrial & Engineering Chemistry Analytical Edition 18 (8), 499–499. Fennell, D.E., Nijenhuis, I., Wilson, S.F., Zinder, S.H., Haggblom, M.M., 2004. Dehalococcoides ethenogenes strain 195 reductively dechlorinates diverse chlorinated aromatic pollutants. Environmental Science & Technology 38 (7), 2075–2081. Godon, J.-J., Morinière, J., Moletta, M., Gaillac, M., Bru, V., Delgènes, J.-P., 2005. Rarity associated with specific ecological niches in the bacterial world: the “Synergistes” example. Environmental Microbiology 7 (2), 213–224. Hernandez-Raquet G., Soef A., Delgenes N., Balaguer P. (2007) Removal of the endocrine disrupter nonylphenol and its estrogenic activity in sludge treatment processes. Water Res., 41 (12), 26432651. Hethener, P., Brauman, A., Garcia, J.-L., 1992. Clostridium termitidis sp. nov., a Cellulolytic Bacterium from the Gut of the Wood-feeding Termite, Nasutitermes lujae. Systematic and Applied Microbiology 15 (1), 52–58. Keppler, F., Laukenmann, S., Rinne, J., Heuwinkel, H., Greule, M., Whiticar, M., Lelieveld, J., 2010. Measurements of 13C/12C methane from anaerobic digesters: comparison of optical spectrometry with continuous-flow isotope ratio mass spectrometry. Environmental Science & Technology 44 (13), 5067–5073. Kinani, S., Bouchonnet, S., Creusot, N., Bourcier, S., Balaguer, P., Porcher, J.-M., Aït-Aïssa, S., 2010. Bioanalytical characterisation of multiple endocrine- and dioxin-like activities in sediments from reference and impacted small rivers. Environmental Pollution (Barking, Essex : 1987) 156 (11), 7483. Lee DY, Farmer WJ. 1989. Dissolved organic matter interaction with napropamide and 4 other nonionic pesticides. Journal of Environmental Quality 18(4):468-474. Lee PKH., Jonhson DR., Holmes VF., He J., Alvarez-Cohen L. (2006) Reductive dehalogenase gene expression as a biomarker for physiological activity of Dehalococcoides spp. Appl. Env. Microbiol., 72(9), 6161-6168. Li, T., Wu, T.-D., Mazéas, L., Toffin, L., Guerquin-Kern, J.-L., Leblon, G., Bouchez, T., 2008. Simultaneous analysis of microbial identity and function using NanoSIMS. Environmental Microbiology 10 (3), 580–588. Louiz, I., Kinani, S., Gouze, M.-E., Ben-Attia, M., Menif, D., Bouchonnet, S., Porcher, J.M., BenHassine, O.K., Aït-Aïssa, S., 2008. Monitoring of dioxin-like, estrogenic and anti-androgenic activities in sediments of the Bizerta lagoon (Tunisia) by means of in vitro cell-based bioassays: contribution of low concentrations of polynuclear aromatic hydrocarbons (PAHs). The Science of the Total Environment402 (2-3), 318–29. Lowry, Oliver, H., Rosebrough, Nina, J., Farr, A, L., Randall, rose, J., 1951. Protein measurement with the folin phenol reagent. Journal of Biological Chemistry 193, 265–271. Madden, R.H., Bryder, M.J., Poole, N.J., 1982. Isolation and Characterization of an Anaerobic, Cellulolytic Bacterium, Clostridium papyrosolvens sp. nov. International Journal of Systematic Bacteriology 32 (1), 87–91. McInerney, M.J., Bryant, M.P., Hespell, R.B., Costerton, J.W., 1981. Syntophomonas wolfei gen. nov. sp. nov., anaerobic syntrophic, Fatty acid-Oxidizing Bacterium. Applied and Environmental Microbiology 41 (4), 1029–1039. McInerney, M.J., Struchtemeyer, C.G., Sieber, J., Mouttaki, H., Stams, A.J.M., Schink, B., Rohlin, L., Gunsalus, R.P., 2008. Physiology, ecology, phylogeny, and genomics of microorganisms capable of syntrophic metabolism. Annals of the New York Academy of Sciences 1125, 58–72. Michelland, R.J., Dejean, S., Combes, S., Fortun-Lamothe, L., Cauquil, L., 2009. StatFingerprints: a friendly graphical interface program for processing and analysis of microbial fingerprint profiles. Molecular Ecology Resources 9 (5), 1359–1363. 112 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 Mougin C., Patureau D. and Amellal-Nassr N. (2006) Innocuité et efficacité de boues urbaines nde diversement transformées. 2 Journée Nationale de la Fertilisation Organique. Pollutec, Lyon, er France, 1 décembre. Conférence invitée. Muller, M., Combalbert, S., Delgenès, N., Bergheaud, V., Rocher, V., Benoît, P., Delgenès, J.-P., Patureau, D., Hernandez-raquet, G., 2010. Occurrence of estrogens in sewage sludge and their fate during plant-scale anaerobic digestion. Chemosphere 81 (1), 65–71. Musat, F., Galushko, A., Jacob, J., Widdel, F., Kube, M., Reinhardt, R., Wilkes, H., Schink, B., Rabus, R., 2009. Anaerobic degradation of naphthalene and 2-methylnaphthalene by strains of marine sulfate-reducing bacteria. Environmental Microbiology 11 (1), 209–219. MuToss coding Team, Blanchard, G., Dickhaus, T., Hack, N., Konietshke, F., Rohmeyer, K., Rosenblatt, J., Scheer, M., Werf, W., 2010. mutoss: unified mutiple testing procedures . Nelson, M.C., Morrison, M., Yu, Z., 2011. A meta-analysis of the microbial diversity observed in anaerobic digesters. Bioresource Technology 102 (4), 3730–9. Oksanen, J., Blanchet, F.G., Kindt, R., Legendre, P., O’Hara, R.B., Simpson, G.L., Solymos, P., Stevens, M.H.H., Wagner, H., 2010. Vegan : Community Ecology Package. Park, J.-W., Krumins, V., Kjellerup, B.V., Fennell, D.E., Rodenburg, L.A., Sowers, K.R., Kerkhof, L.J., Häggblom, M.M., 2011. The effect of co-substrate activation on indigenous and bioaugmented PCB dechlorinating bacterial communities in sediment microcosms. Applied Microbiology and Biotechnology 89 (6), 2005–2017. Paterakis, N., Chiu, T.Y., Koh, Y.K.K., Lester, J.N., McAdam, E.J., Scrimshaw, M.D., Soares, a, Cartmell, E., 2012. The effectiveness of anaerobic digestion in removing estrogens and nonylphenol ethoxylates. Journal of Hazardous Materials 199-200, 88–95. Patureau D. and Trably E. (2006) Impact of anaerobic and aerobic processes on PolyChloroBiphenyl removal in contaminated sewage sludge. Biodegradation, 17, 9-17. Patureau D., Delgenès N. and Delgenès JP. (2008) Impact of sewage sludge treatment processes on the removal of the endocrine disrupters nonylphenol ethoxylates. Chemosphere, 72 (4), 586-591. Patureau, D. and Hernandez-Raquet, G. (2008) La digestion anaérobie et les xénobiotiques. In R. Moletta (ed) La méthanisation. Lavoisier. Perminova IV, Grechishcheva NY, Petrosyan VS. 1999. Relationships between structure and binding affinity of humic substances for polycyclic aromatic hydrocarbons: Relevance of molecular descriptors. Environmental Science & Technology 33(21):3781-3787. Reid B J, Stokes J D, Jones K C, Semple K T (2000). Nonexhaustive Cyclodextrin-Based Extraction Technique for the Evaluation of PAH Bioavailability. Environ. Sci. Technol., 34(15):3174-3179. Rockne, K.J., Chee-sanford, J.C., Sanford, R.A., Hedlund, B.P., Staley, J.T., Strand, S.E., 2000. Anaerobic Naphthalene Degradation by Microbial Pure Cultures under Nitrate-Reducing Conditions. Applied and Environmental Microbiology 66 (4), 1595–1601. Ryan, J.A., Hightower, L.E., 1994. Evaluation of heavy-metal ion toxicity in fish cells using a combined stress protein and cytotoxicity assay. Environmental Toxicology and Chemistry 13 (8), 1231–1240. Schnurer, A., Schink, B., Svensson, B.H., 1996. Clostridium ultunense sp. nov., a mesophilic bacterium oxidizing acetate in syntrophic association with a hydrogenotrophic methanogenic bacterium. International Journal of Systematic Bacteriology 46 (4), 1145–1152. Simpson, E.H., 1949. Measurement of Diversity. Nature 163 (4148), 688. Smalla, K., Oros-Sichler, M., Milling, A., Heuer, H., Baumgarte, S., Becker, R., Neuber, G., Kropf, S., Ulrich, A., Tebbe, C.C., 2007. Bacterial diversity of soils assessed by DGGE, T-RFLP and SSCP fingerprints of PCR-amplified 16S rRNA gene fragments: do the different methods provide similar results? Journal of Microbiological Methods 69 (3), 470–479. Smidt H, de Vos WM. 2004. Anaerobic microbial dehalogenation. Annual Review of Microbiology 58:43-73. Sukhumavas, J., Ohmiya, K., Shimizu, S., Uen, K., 1988. Species from Thai Compost 179–182. Trably, E., Patureau, D., Delgenès, J. P. (2003) Enhancement of polycyclic aromatic hydrocarbons removal during anaerobic treatment of urban sludge. Wat. Sci. Technol., 48 (04), 53-60. Trably, E., Delgenes, N., Patureau, D., Delgenes, J.P., 2004. Statistical tools for the optimization of a highly reproducible method for the analysis of polycyclic aromatic hydrocarbons in sludge samples. International Journal of Environmental Analytical Chemistry 84 (13), 995–1008. Urase T, Kikuta T. 2005. Separate estimation of adsorption and degradation of pharmaceutical substances and estrogens in the activated sludge process. Water Research 39(7):1289-1300. Vindimian, E., Robaut, C., Fillon, G., 1983. A method for cooperative or noncooperative binding studies using nonlinear regression analysis on a microcomputer. Journal of Applied Biochemistry 5 (4-5), 261–268. 113 Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires Février 2013 De Weert, J.P. a, Viñas, M., Grotenhuis, T., Rijnaarts, H.H.M., Langenhoff, A. a M., 2011. Degradation of 4-n-nonylphenol under nitrate reducing conditions. Biodegradation 22 (1), 175–187. Werner, J.J., Knights, D., Garcia, M.L., Scalfone, N.B., Smith, S., Yarasheski, K., Cummings, T. a, Beers, A.R., Knight, R., Angenent, L.T., 2011. Bacterial community structures are unique and resilient in full-scale bioenergy systems. Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America 108 (10), 4158–4163. Wilson, V.S., Bobseine, K., Lambright, C.R., Gray, L.E., 2002. A novel cell line, MDA-kb2, that stably expresses an androgen- and glucocorticoid-responsive reporter for the detection of hormone receptor agonists and antagonists. Toxicology Sciences : an Official Journal of the Society of Toxicology 66 (1), 69–81. Winderl C, Schaefer S, Lueders T (2007). Detection of anaerobic toluene and hydrocarbon degraders in contaminated aquifers using benzylsuccinate synthase (bssA) genes as a functional marker. Environmental Microbiology, 9(4), 1035-1046. Yu, Y., Lee, C., Kim, J., Hwang, S., 2005. Group-specific primer and probe sets to detect methanogenic communities using quantitative real-time polymerase chain reaction. Biotechnology and Bioengineering 89 (6), 670–679. Zhang, C., Liu, X., Dong, X., 2004. Syntrophomonas curvata sp. nov., an anaerobe that degrades fatty acids in co-culture with methanogens. International Journal of Systematic and Evolutionary Microbiology 54 (3), 969–973. Zumstein, E., Moletta, R., Godon, J.-J., 2000. Examination of two years of community dynamics in an anaerobic bioreactor using fluorescence polymerase chain reaction (PCR) single-strand conformation polymorphism analysis. Environmental Microbiology 2 (1), 69–78. 114