LES INTERACTIONS PERTURBATEURS ENDOCRINIENS

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LES INTERACTIONS PERTURBATEURS ENDOCRINIENS
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
LES INTERACTIONS PERTURBATEURS ENDOCRINIENSMICROORGANISMES ET MATIERES ORGANIQUES,
MOTEURS DE L’ECODYNAMIQUE ET DE L’IMPACT DES
POLLUANTS AU SEIN D’ECOSYSTEMES EPURATOIRES
PECMICMOG
05 février 2013
Contrat n° 0906C0008
Guillaume BASTIDE, Direction Consommation Durable et Déchets (DCDD), Service
Prévention et Gestion des Déchets (SPGD), Angers
ADEME
1
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
MEMBRES DU PROJET
ISM-LPTC UMR 5255 Université Bordeaux I : Marie-Ange Cordier, Karyn Le Menach,
Hélène Budzinski, Edith Parlanti,
INERIS Verneuil en Halatte : Selim Ait-Aissa, Nicolas Creusot, Emmanuelle Maillot-Maréchal
IRSTEA Antony : Carolina Hoyos-Hernandez, Angeline Guenne, Céline Madigou, Théodore
Bouchez, Laurent Mazeas
INRA LBE Narbonne : Florence Braun, Glenda Cea-Barcia, Liliana Delgadillo-Mirquez,
Nadine Delgenès, Gaelle Gevaudan-Santa Catalina, Anais Bonnafous, Jérôme Hamelin,
Hélène Carrère, Dominique Patureau
L’ADEME en bref
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l’Aménagement durables, et du ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.
Elle participe à la mise en œuvre des politiques publiques dans les domaines de
l’environnement, de l’énergie et du développement durable. L’agence met ses capacités
d’expertise et de conseil à disposition des entreprises, des collectivités locales, des pouvoirs
publics et du grand public et les aide à financer des projets dans cinq domaines (la gestion
des déchets, la préservation de sols, l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables, la
qualité de l’air et la lutte contre le bruit) et à progresser dans leurs démarches de
développement durable.
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SOMMAIRE
RESUME
11
SUMMARY
13
CONTEXTE et OBJECTIFS
14
MATERIEL ET METHODES
19
1.
La solution de dopage
19
2.
Les boues
19
3.
Les dispositifs expérimentaux
21
3.1
Les réacteurs discontinus ou batch
21
3.2
Les réacteurs continus
22
3.2.1
Les réacteurs continus de 5 L : impacts de différentes boues/substrats
sur les performances de digestion anaérobie des perturbateurs
endocriniens
22
Les réacteurs continus de 400 mL : impacts des communautés
microbiennes sur les performances de digestion anaérobie des
perturbateurs endocriniens
23
L’extraction des communautés microbiennes issues de trois environnements
contrastés
24
L’analyse des matrices
26
5.1
Préparation des échantillons
28
5.2
Paramètres globaux
28
5.2.1
Mesure de la matière sèche et de la matière organique
28
5.2.2
Mesure de la DCO, demande chimique en oxygène
28
5.2.3
L’analyse des gaz de fermentation
28
5.2.4
Mesure de la concentration en Acides Gras Volatils (AGV)
30
5.2.5
Dosage des protéines
30
5.2.6
Dosage des sucres
31
5.2.7
Dosage des lipides
31
5.2.8
Analyse de la densité des boues
31
3.2.2
4.
5.
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5.3
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Fractionnement du compartiment aqueux
31
5.3.1 Fractionnement par filtration-ultrafiltration
31
5.3.2 Fractionnement par couplage flux/force avec flux asymétrique
(Asymmetrical Flow Field-Flow Fractionation-AF4)
32
Analyse fonctionnelle par fluorescence tridimensionnelle du compartiment
aqueux
33
6. Extraction et quantification des perturbateurs endocriniens dans les différents
compartiments de la boue
35
5.4
7.
6.1
Extraction des PE de la boue totale et du compartiment particulaire
35
6.2
Quantification des HAP
36
6.3
Quantification des NP
37
6.4
Quantification des PCB
37
6.5
Analyse des HAP et des PCB dans le compartiment aqueux
37
L’analyse des communautés microbiennes
40
7.1
Préparation et conservation des échantillons
40
7.2
Extraction de l’ADN total
40
7.2.1
La lyse cellulaire
41
7.2.2
Le lavage
41
7.2.3
L’élimination des impuretés
41
7.2.4
La purification
41
7.3
7.4
ADEME
Amplification de l’ADN par PCR
42
7.3.1 Amplification de la région V3 de l’ADNr 16S
42
7.3.2 Amplification du gène de la benzylsuccinate synthase
42
7.3.3 Vérification de l’efficacité d’amplification
43
La CE-SSCP
Polymorphism)
(Capillary
Electrophoresis
Single
Strand
Conformation
45
7.5
Quantification des communautés par PCR quantitative
45
7.6
Pyroséquençage
45
4
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7.7
Etude de la dégradation des PE par isotopie au carbone 13
7.7.1
7.7.2
8.
9.
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45
Maintien des communautés microbiennes adaptées aux conditions de
digestion et de dégradation des PE
45
Etude en microcosme
45
L’évaluation des activités « perturbateur endocrinien »
47
8.1
Génération de lignées cellulaires
47
8.1.1 La lignée cellulaire MELN
47
8.1.2 La lignée cellulaire MDA-kb2
47
8.1.3 La lignée cellulaire PLHC-1
48
8.2
Exposition
48
8.3
Lecture des plaques
48
8.3.1
Plaques MELN et MDA-kb2
48
8.3.2
Plaques PLHC-1
48
8.3.3
Analyses des données in vitro
49
Calculs et analyse des données
49
9.1
Le calcul des abattements des PE sur les réacteurs continus et batch
49
9.2
Le calcul des coefficients de partage
50
9.3
Les tests statistiques
50
RESULTATS ET DISCUSSION
52
1. Effet de matrices « boue » différentes sur les propriétés de sorption et sur la
dégradation
des
perturbateurs
endocriniens :
lien
disponibilité-sorptionbiodégradation
1.1
1.2
ADEME
52
Etudes menées en réacteurs continus : influence de matrices « boue »
différentes sur les performances de dégradation des PE
52
Etudes menées en réacteurs batch : influence de matrices « boue »
différentes sur les performances de dégradation des PE et sur leur distribution
dans les compartiments « matière « de la boue
55
1.2.1 Les performances globales de dégradation
56
1.2.2 Distribution des PE dans les compartiments « matière » des boues et
lien avec les performances de dégradation des PE
59
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1.2.2.1 Cas des HAP
59
1.2.2.2 Cas des PCB
63
1.2.3 Lien caractérisation du compartiment DCM et distribution des HAP
64
1.2.4 Lien caractérisation du compartiment DCM-distribution des HAPperformances de dégradation
70
2. Evaluation de la composante microbiologique : identification des acteurs microbiens
de la dégradation des PE et étude de marqueurs fonctionnels de la dégradation
74
2.1
Les performances globales et de dégradation des PE
74
2.1.1 Les HAP
74
2.1.2 Les PCB
76
2.1.3 Le NP
77
2.2
Les changements d’abondance des communautés microbiennes
79
2.3
Les changements de diversité et de structure des communautés microbiennes
80
2.4
L’expression potentielle des fonctions de dégradation des PE
87
2.4.1
2.4.2
3.
Etude du potentiel de dégradation du phénanthrène par les
microorganismes issus d’un réacteur de méthanisation
87
Etude du potentiel de dégradation de molécules aromatiques
90
Evaluation du potentiel toxique : lien entre dégradation des PE, leur distribution dans
les compartiments « matière » des boues et l’expression de leur toxicité
93
3.1
Distribution des PE dans les compartiments « matière »
93
3.1.1
Influence des caractéristiques des molécules sur la distribution des PE
93
3.1.2
Influence des paramètres de fonctionnement des réacteurs sur la
distribution des PE dans les compartiments
94
3.2
Activité des PE dans les différents compartiments « matière » des boues
96
CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
ADEME
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LISTE DES TABLEAUX ET FIGURES
Tableau 1 : Caractéristiques des molécules étudiées.
Tableau 2 : Temps de rétention (min) des HAP par HPLC et couples de longueurs d’onde
d’excitation/émission (nm) utilisés pour leur détection par fluorescence.
Tableau 3 : Rendements de quantification des HAP en SPME obtenus suivant les différentes
méthodes de calcul.
Tableau 4 : Composition des échantillons standards (eau ou surnageant).
Tableau 5 : Amorces utilisées lors de l'étude des différentes communautés microbiennes.
Tableau 6 : Conditions expérimentales des tests isotopiques.
Tableau 7 : Ligands de référence et concentrations (en nM) effectives (EC50) et saturantes (témoin
positif dans le bioessai).
Tableau 8 : Performances de digestion des 5 bioréacteurs anaérobies alimentés avec des boues
différentes.
Tableau 9 : Caractéristiques des 5 boues/substrats.
Tableau 10 : Distribution du pyrène, chrysène et indéno(1,2,3,c,d)pyrène dans les compartiments des
trois mélanges initiaux en ng/L.
Tableau 11 : les variables PLS utilisées pour le modèle KDCM. Bloc X, variables explicatives, bloc Y
variable à expliquer le KDCM pour 13 HAP dans chaque mélange. Temps initial, t0, temps final, tf.
Tableau 12 : les variables PLS utilisées pour le modèle explicatif de la dégradation des HAP. Bloc X,
variables explicatives, bloc Y variable à expliquer, l’abattement total des 13 HAP dans chaque
mélange.
Tableau 13 : les variables PLS utilisées pour le modèle prédictif de la dégradation des HAP. Bloc X,
variables explicatives, bloc Y variable à expliquer, l’abattement total des 13 HAP dans chaque
mélange.
Tableau 14 : Performances globales (matière et biogaz) mesurées sur les réacteurs inoculés par les
trois communautés microbiennes différentes. Moyenne à l’état d’équilibre sur les triplicats.
Tableau 15 : Abattements en PCB à l'équilibre dans les différents réacteurs.
Tableau 16 : Données de diversité obtenues par pyroséquençage du gène d’ADNr 16S sur les 9
réacteurs inoculés avec les 3 inocula à l’état d’équilibre (TSH 5). Nb : nombre, Nb seq: nombre de
séquences.
Tableau 17 : Comparaison entre concentrations en HAP et activité HAP-like dans les boues digérées
DSol et DBoue.
Tableau 18 : Activités HAP-like calculées et mesurées (en BaP-EQ) dans la boue totale et dans les
compartiments (particulaire et aqueux) à l’état d’équilibre
Figure 1 : La tri-interaction matrice-microorganisme-polluant(PE) au sein d’un bioréacteur.
Figure 2 : Programme de travail
Figure 3 : Les différentes matrices « boues » utilisées au cours de l’étude et les dispositifs
expérimentaux associés.
Figure 4 : Représentation des expérimentations menées en batch pour un mélange substrat/inoculum.
Figure 5 : Représentation des réacteurs de 5 L alimenté en continu automatiquement.
Figure 6 : Représentation des réacteurs de volume utile de 400 ml alimentés et soutirés tous les jours
manuellement sous conditions stériles.
Figure 7 : Schéma des étapes d'établissement du gradient (Barra Caracciolo et al., 2005).
Figure 8 : Les analyses réalisées sur les échantillons de boue.
Figure 9 : (a) Technologie des flux croisés. (b) Elution, x: petites particules; y: grosses particules.
Figure 10 : Coordonnées des régions de fluorescence obtenues grâce au logiciel Image J et les
groupes fonctionnels des régions selon Chen et al. (2003).
Figure 11: Système SPME (Cea-Barcia, 2012).
Figure 12 : Analyses en bioessais in vitro.
Figure 13 : Les différents compartiments de la matrice séparés selon la taille des particules les
constituant. Le compartiment « particulaire » avec des particules de taille supérieure à 1,2 µm obtenu
après centrifugation de l’échantillon de boue (culot). Le compartiment « dissous colloïdale » ou
« DCM » avec des particules de taille inférieure à 1,2 µm obtenu après centrifugation de la boue et
filtration du surnageant à 1,2 µm. Par filtration et ultrafiltration du surnageant, obtention des fractions
F1 à F4. Présence du PE (HAP) sous forme libre ou associé à la DCM, la somme de ces deux
compartiments donnant le compartiment aqueux déterminé par extraction liquide-liquide ou SPE ou
SPME. Présence du polluant associé au particulaire déterminé par extraction sous solvant. La somme
des trois compartiments donne la teneur totale qui est mesurée par extraction sous solvant sur
l’échantillon brut.
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Figure 14 : Performances de dégradation des polluants (HAP, PCB, NP) obtenues sur 5 réacteurs
continus alimentés avec 5 substrats différents. Pour chaque composé, la p-valeur entre 5 jeux de
données (3 pour PCB) est indiquée en italique. Les abattements sont considérés comme
statistiquement différents pour une p-valeur inférieure à 0.05.
Figure 15 : (a) Les performances ‘polluant’ mesurées versus les performances modélisées par la PLS
(régression linéaire des moindres carrés) établissant un lien entre les performances de dégradation
des polluants et les caractéristiques des boues/substrats et des polluants. Les coefficients centrés et
réduits des variables ‘boue’ (noirs) et ‘polluant’ (gris) donnés par l’analyse PLS (b).VFA : acides gras
volatils, n6C : nombre de cycles à 6 carbone, n5C : nombre de cycles à 5 carbone, nOH : nombre de
groupement OH, nCl, nombre de chlore.
Figure 16 : Production de méthane au cours des tests batch avec un ratio inoculum-boue de 80/20 en
poids avec et sans polluant. HLSS=boue secondaire forte charge.
Figure 17 : Pertes abiotiques observées dans un réacteur batch avec un ratio inoculum-boue de 80/20
en poids. Aucune activité biologique n’est observée, absence de production de biogaz et aucune
réduction de la matière sèche.
Figure 18 : Performances ‘digestion’ (A et B, production de méthane et abattement en MS) et
‘polluants’ (C et D, abattements mesurés via les concentrations totales) dans les réacteurs batch en
fonction de 3 substrats différents, comparés deux à deux. HLSS=boue secondaire forte charge,
HLSS-1KDa (HLSS avec présence uniquement de colloïdes inférieurs à 1kDa) et boue secondaire
faible charge-LLSS. Pour chaque composé, la p-valeur entre les 2 jeux de données est indiquée en
noir. Les abattements peuvent être considérés comme significativement différents pour des p-valeurs
inférieures à 0.05.
Figure 19 : Cinétique de dégradation de l’indéno(1,2,3cd)pyrène (concentration totale) au cours de la
digestion de la boue HLSS.
Figure 20 : Abattements totaux pour la somme des 7 PCB et pour le PCB180 mesurés sur les
réacteurs batch en fonction des 3 substrats.
Figure 21 : Distribution des HAP dans les compartiments des boues HLSS, HLSS-1KDa et LLSS au
temps initial. A et B ratio CPE,free sur CPE,total, B et C ratio CPE,aq sur CPE,total.
Figure 22 : Evolution des concentrations libre, DCM et totale sur la boue LLSS. A : phénanthrène. B :
pyrène. C : indéno(1,2,3,c,d)pyrène. L’écart type est calculé sur les duplicats réacteurs.
Figure 23 : logKDCM des HAP. A : mélange initial, B : mélange final (53 jours).
Figure 24 : logKpart des HAP. A : mélange initial, B : mélange final (53 jours).
Figure 25 : Evolution des concentrations totale et aqueuse du PCB180 pour le mélange HLSS-1KDa
(A) et LLSS (B).
Figure 26 : Spectre de fluorescence 3D des phases aqueuses des trois boues HLSS, HLSS-1KDa et
LLSS au temps initial.
Figure 27 : Le modèle PLS pour le KDCM. Valeurs prédites en fonction des valeurs mesurées,
validation croisée de facteur 4 (a). Coefficients centrés et réduits des variables explicatives (b).
Figure 28 : Log KDCM en fonction du log Kow pour chaque HAP présents dans les sous-compartiments
F1 (0,1-1,2 µm), F2 (10 kDa-0,1 µm), F3 (1-10 kDa) et F4 (<1 kDa).
Figure 28 :
Figure 29 :
Figure 30 : Abattement moyen (triplicat) du phénanthrène au cours du temps dans les réacteurs
continus ensemencés avec les trois communautés microbiennes extraites de la boue (gris clair), du
sédiment PCB (gris moyen) et du sol HAP (noir). Dynamique similaire pour tous les HAP.
Figure 31 : Abattement moyen (triplicat) à l’équilibre pour chaque groupe de HAP séparé selon leur
poids moléculaire, dans les réacteurs continus ensemencés avec les trois communautés microbiennes
extraites de la boue (gris clair), du sédiment PCB (gris moyen) et du sol HAP (noir).
Figure 32 : Dégradation des PCB tout inoculum confondu en fonction de leur degré de chloration.
Figure 33 : Dynamique des abattements en NP au cours du temps (indiqué en Temps de Séjour
Hydraulique) pour les trois écosystèmes sol (blanc), sédiment (gris) et boue (noir).
Figure 34 : Evolution des concentrations en NP mesurées en µg/L de boue.
Figure 35 : Abondance des Bactéries et des Archées au cours du temps pour les trois communautés
microbiennes extraites de la boue (noir), du sédiment PCB (gris moyen) et du sol HAP (blanc).
Figure 36 : Corrélation entre le ratio archées/bactéries (%) et la production de méthane calculés à
l’équilibre sur l’ensemble des 9 réacteurs.
Figure 37 : Empreintes moléculaires CE-SSCP des bactéries (gauche) et des Archées (droite) pour
chaque écosystème (profil moyen des triplicats) à l’équilibre.
Figure 38 : Influence de l’origine de l’inoculum (sol , sédiment , boue ) sur les différences de
structure génétique des communautés bactéries (gauche) et archées (droite). L’ACP explique 65,4 %
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de la variance des empreintes moléculaire de bactéries et 74,3 % de la variance des empreintes
moléculaire d’Archées obtenues par CE-SSCP.
Figure 39 : Les corrélations entre la structure des communautés bactéries (gauche) et archées (droite)
et les paramètres de fonctionnement des réacteurs.
Figure 40 : Représentation des variables discriminantes sur les analyses en composantes principales
(ACP) obtenues à partir des données de CE-SSCP (à gauche) et des espèces par pyroséquençage (à
droite). L’ACP explique 92.0 % de la variance des empreintes moléculaire de bactéries (CE-SSCP) et
92,3 % de la variance des proportions d’espèces obtenues par pyroséquençage. Les réacteurs dont
l’inoculum provient du sol, du sédiment, de la boue sont représentés, respectivement par les symboles
suivant : , , . A gauche les flèches représentent les pics les plus discriminants et à droite les
espèces les plus discriminantes parmi les 20 plus abondantes.
Figure 41 : Représentation des paramètres de fonctionnement discriminants sur les analyses en
composantes principales (ACP) obtenues à partir des données de SSCP (à gauche) et des
proportions des différentes espèces obtenues par pyroséquençage (à droite). L’ACP explique 92 % de
la variance des empreintes moléculaire de bactéries (SSCP) et 92,3 % de la variance des proportions
d’espèces obtenues par pyroséquençage. Les réacteurs dont l’inoculum provient du sol, du sédiment,
de la boue sont représentés, respectivement par les symboles suivant : , , . Les flèches
représentent les paramètres de fonctionnement les plus discriminants.
Figure 42 : Proportion de chaque espèce d’Archées par rapport au nombre total d’Archées présentes
dans les réacteurs.
Figure 43 : Proportion dans chaque réacteur des 20 espèces les plus abondantes.
13
Figure 44 : Fractionnement isotopique (δ C en ‰) du biogaz produit au cours du temps par les
microcosmes aux trois concentrations différentes de phénanthrène. Les symboles représentent le
fractionnement du CO2, les
celui du CH4. En bleu, sont présentés les résultats des dupliqua des
13
incubations avec le phénanthrène marqué au C, en orange ceux obtenus avec le phénanthrène non
marqué.
Figure 45 : Répartition des HAP dans le compartiment particulaire et aqueux de la boue et dans les
fractions libre et DCM du compartiment aqueux. Les proportions sont calculées par rapport au total
des concentrations en polluant. Les polluants sont représentés de gauche à droite (du plus foncé au
plus clair) par ordre croissant de log Kow.
Figure 46 : Répartition des HAP dans la fraction libre et DCM au sein du compartiment aqueux. Les
proportions sont calculées par rapport au total des concentrations en polluant dans le compartiment
aqueux.
Figure 47 : Comparaison de quatre activités "perturbateur endocrinien" représentatives mesurées
dans des extraits de micropolluants issus des différents compartiments de chaque réacteur à
l’équilibre. Activité mesurée dans la boue d’alimentation des réacteurs dopés (barre hachurée), dans
les boues digérées par les réacteurs inoculés par des microorganismes provenant du sol (barre
blanche), des sédiments (barre grise) et de la boue (barre noire). n.a., non analysée, ; n.d., non
détectée.
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LISTE DES ABBREVIATIONS
ACP : analyse en composantes principales
AF4 : fractionnement par couplage flux / force avec flux asymétrique
AGV : acides gras volatils
ASE : système accéléré d’extraction haute température, haute pression
CE-SSCP : Capillary Electrophoresis-Single Strand Conformation Polymorphism
DCO : demande chimique en oxygène
DCM : compartiment dissout/colloïdal
MS/MV : matière sèche/matière volatile
HAP : hydrocarbure polycyclique aromatique
HLSS : boue secondaire forte charge
HLSS-1kDa : boue secondaire forte charge dont le surnageant a été filtré et ultrafiltré jusqu’à
1 kDa
LLSS : boue secondaire faible charge
NP : nonylphénol
PCB : polychlorobiphényls
PCR : réaction de polymérisation en chaîne
PE : perturbateur endocrinien
PLS : régression linéaire des moindres carrés
SPME : microextraction sur phase solide
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RESUME
Contexte : La pollution de l’atmosphère, des sols et des eaux par les activités humaines
(industrielles, agricoles..) fait l’objet d’une prise de conscience récente mais de plus en plus accentuée
au regard de près de deux siècles de développement économique. Si beaucoup de données existent
sur la présence des polluants dans notre environnement, leur dynamique et impact sur le long terme
restent cependant difficilement prévisibles. Les systèmes de dépollution ne dérogent pas à cette
constatation : depuis une vingtaine d’années, il est fréquent d’avoir des publications sur la présence
des polluants dans les eaux résiduaires ou industrielles polluées, dans les eaux traitées et dans les
boues, mais rares sont celles décrivant les mécanismes gouvernant le devenir de ces composés. Or,
ces systèmes épuratoires constituent de bons modèles car ils sont à la fois un point de convergence
d’une multitude de polluants faiblement concentrés vers notre environnement, mais aussi ils sont le
siège d’une somme de processus qu’il est possible de mieux décrire, de gérer et d’optimiser en jouant
sur divers paramètres biotiques et abiotiques.
Objectifs : le présent projet vise à contribuer à l’évaluation et à la réduction des risques
environnementaux de pollution chimique de l’environnement, associés aux perturbateurs endocriniens
(PE) présents dans des produits résiduaires utilisés en agriculture. Cet objectif général se décompose
en objectifs spécifiques liés à l’une des composantes du risque, l’exposition. Cette exposition sera
caractérisée via le développement et la validation d’indicateurs de la disponibilité des polluants. Ces
indicateurs seront identifiés au travers de l’observation multi-échelle des interactions entre les
polluants, les microorganismes (le vivant) et l’environnement matriciel dans lequel ils évoluent. En
effet, c’est de l’interaction de ces trois composantes que naît la dynamique des polluants dans un
environnement tel que celui des procédés de traitement. Une meilleure compréhension de ces
interactions et des processus qui y sont liés nous permettra de mieux appréhender la dynamique des
polluants, de la modéliser et contribuera significativement à l’évaluation des risques (indicateurs de
disponibilité) et à leur réduction au travers de la proposition de stratégies de traitement. Pour ce faire,
nous proposons de développer une approche intégrée combinant les visions des microbiologistes,
chimistes-géochimistes et écotoxicologues au cœur d’un procédé modèle de digestion anaérobie
traitant des boues urbaines multi- et faiblement contaminées en PE.
Cibles : acteurs du traitement et de la gestion des déchets
Sorties :
-Outils de caractérisation des compartiments matière des boues (aqueux, sous compartiments aqueux
et particulaire) : utilisation de la méthode de f ractionnement par filtration/ultrafiltration et par
couplage flux / force avec flux asymétrique (AF4) afin de subdiviser le compartiment aqueux
des boues en sous-compartiments selon une large gamme de taille des éléments les
constituant. Utilisation de la fluorescence tridimensionnelle pour caractériser la nature des
molécules présentes dans les compartiments et sous-compartiments aqueux des boues.
-Outils de spéciation (localisation) des polluants organiques : utilisation de la technique de microextraction sur phase solide (SPME) afin de quantifier les PE dans le compartiment aqueux des boues.
Quantification possible des fractions libre et sorbée à la matière dissoute et colloïdale des
compartiments et sous-compartiments aqueux des boues pour les HAP seulement.
-Lien spéciation/dégradation/disponibilité des micropolluants : le compartiment aqueux (libre et sorbé
à la matière dissoute et colloïdale) des boues semble être le compartiment disponible pour la
dégradation anaérobie des HAP et dans ce compartiment, les HAP sont très affins des colloïdes de
grosse taille dont la nature serait proche de molécules type mélanoïdines, acides humiques,
lignocellulose.
-Développement d’un modèle prédictif pour la disponibilité des micropolluants (HAP) dans les boues :
la caractérisation du compartiment aqueux par fluorescence tridimensionnelle permet d’évaluer
l’affinité de ce compartiment pour les HAP et l’affinité du compartiment particulaire pour les petits et
moyens HAP. A partir des affinités, il est possible de connaitre la répartition des HAP dans les
compartiments de la boue et donc d’évaluer le compartiment disponible.
- Développement d’un modèle prédictif pour l’élimination des micropolluants (HAP) par digestion
anaérobie : en couplant les données de spéciation/localisation des micropolluants aux données de
caractérisation par fluorescence tridimensionnelle du compartiment aqueux, il est possible d’évaluer a
priori l’abattement en HAP au cours de la digestion.
ADEME
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Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
-Développement d’une méthode originale et efficace d’extraction des communautés microbiennes sur
matrice complexe.
-Etablissement d’un lien implicite entre l’élimination anaérobie des HAP et la réalisation des premières
étapes de la digestion anaérobie des boues (hydrolyse, acidogénèse, acétogénèse) via un cométabolisme.
-Elimination anaérobie des HAP indépendante de la structure génétique des communautés
microbiennes majoritaires.
-Difficulté d’identification des microorganismes responsables de la biodégradation des PE en condition
anaérobie : la méthodologie SIP utilisée pour identifier des communautés dégradant un HAP n’a pas
abouti par l’absence d’observation de la minéralisation du composé. Ceci vient confirmer la difficulté
d’étudier des fonctions dites minoritaires dans un écosystème complexe ou des fonctions qui sont
peut être réalisées par des communautés majoritaires mais de façon non spécifiques (lien avec le cométabolisme observé pour la dégradation de HAP sous condition anaérobie).
-Evaluation de la biodégradabilité des PE en condition anaérobie par utilisation de marqueurs
fonctionnels existants : absence de détection du gène impliqué dans la dégradation anaérobie de
molécules mono-aromatiques.
-Intérêt des approches couplées de chimie et d’évaluation d’activité type « perturbateur endocrinien »
dans tous les compartiments et sous-compartiments des boues (total, aqueux, particulaire) : pas de
lien entre élimination des HAP et perte d’activité supposant l’existence de composés actifs pour les
modèles cellulaires, soit sous-produits de dégradation des HAP ou de la matière organique,
identification potentielle des PE ou toxiques résiduels à suivre dans le cadre de l’optimisation de
procédés de dépollution et dans les procédures de réglementation de composés
Mots-clés :
micropolluants organiques, biodégradation, sorption, spéciation, multipollution, digestion anaérobie,
communauté microbienne
ADEME
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Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
SUMMARY
The overall goal of this project is to better understand mechanisms driving the dynamics of pollutants
during solid waste treatment, particularly anaerobic systems. The released quantity in the environment
and the impact of pollutants on biota will deeply depend on this treatment dynamic. For this dynamic
evaluation, an integrated study will be developed using combined and complementary approaches
coming from the geochemical, chemical, microbial and ecotoxicology scientific domains integrated
within a mathematical modelling framework. Indeed, it appears nowadays important to consider the
triple interaction between the pollutants, the matrix components and the biota (target organisms like
microorganisms) in order to efficiently evaluate the fate and impact of pollutants. In contrast to usual
approaches, we will define or develop common tools to deeply characterise the matrix (in relation with
pollutants interaction), the pollutants (total and available fraction) and the target organisms (with
markers of activity). One of the main breakthroughs will be to combine the different scientific points of
view of the overall scientific disciplines. Apart from this, any methodological development requires
some extent of unlocking. Regarding biomarkers of degrading activity for microorganisms, particularly
under anaerobic condition, it is a big challenge because very little is known and we need to overcome
this. Regarding the speciation/localisation, we aim to propose unambiguous relationships between
speciation/location of contaminants and biota response in term of degradation and toxicity. It implies to
apply or develop analytical protocols allowing describing the speciation/location of contaminant in a
complex matrix and its fate after ageing.
Keywords : organic pollutant, biodegradation, sorption, speciation, multipollution, anaerobic digestion,
microbial community,
ADEME
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Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
CONTEXTE et OBJECTIFS
Dans le contexte de mise en conformité avec les exigences européennes de 2015 (DCE
2000/60/EC), l’élimination des micropolluants organiques est devenue aujourd’hui un objectif
de santé publique et de protection des milieux récepteurs fragiles pour un développement
durable. Les procédés de traitement, s’ils sont un point de dissémination potentielle, sont
aussi un point d’action où la richesse des procédés microbiologiques et/ou physicochimiques peut permettre d’agir sur les concentrations et les formes des PE avant rejet. Or,
les recherches menées actuellement montrent que les procédés de traitement participent
avec une efficacité variable à l’élimination de ces PE : certains composés traversent les
systèmes sans modification et persistent dans les eaux traitées (composés pharmaceutiques
tels que l’acide clofibric et la carbamazépine), ou s’accumulent par sorption sur les boues
(PCB, HAP, dioxines, esters de phthalate, nonylphénols, éthinylœstradiol), ou sont
biodégradés (17β-œstradiol, nonylphénols éthoxylés, esters de phthalate), certains sont
aussi transformés en sous-produits plus toxiques (les nonylphénols éthoxylés en
nonylphénols). A ce stade, il semble très difficile de relier les propriétés physico-chimiques et
le devenir (un même composé ayant des abattements variables d’une station à une autre),
voire même de relier le type de système épuratoire et le devenir, ceci souligne la limitation
des approches QSAR/QSBR (Okey et Stensel, 1996). Clara et al. (2005) font cependant
l’hypothèse que la biodégradation est favorisée par des temps de séjour des solides
importants et des conditions de potentiel d’oxydo-réduction larges. Il semblerait donc que les
capacités d’élimination de ces composés (par biodégradation ou adsorption) soient à la fois
liées au potentiel microbiologique et au type de matrice (boues d’épuration, matières en
suspension, colloïdes) au sein de laquelle évoluent ces processus. Les travaux menés au
Laboratoire de Biotechnologie de l’Environnement (INRA, Narbonne) sur le devenir des
micropolluants au cours de la digestion anaérobie de boues et sur le continuum boue-solplante convergent vers la même hypothèse. En effet, il a été constaté lors des expériences
menées en digestion anaérobie sur des boues contaminées en nonylphénols éthoxylés, que
la dégradation de ces composés est intimement liée au type de matrice : une boue mixte est
plus favorable à la dégradation qu’une boue secondaire. L’hypothèse est ici double : de par
leur différence de propriétés physico-chimiques, soit les matrices présentent des potentiels
d’adsorption différents permettant une disponibilité différente aux microorganismes, soit elles
influent sur le développement différentiel de métabolismes de dégradation (HernandezRaquet et al., 2007 ; Patureau et al., 2008) ou bien une combinaison des deux mécanismes.
De plus, les études menées en lysimètres avec des plantes, des sols et des produits
résiduaires différents (boues « naturellement » contaminées en micropolluants) ont montré
l’importance du type de matières organiques dans le transfert des dits polluants vers les
plantes (Mougin et al., 2006). Que l’on se positionne à l’échelle du procédé ou à celle du
continuum, il semble alors important de considérer la triple interaction matricemicroorganismes-micropolluants afin d’améliorer la compréhension du devenir de ces
composés. Cette tri-interaction est schématisée sur la figure 1.
ADEME
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Matrice
UTILISATION DE LA
MATRICE COMME
SUBSTRAT
METABOLISME
BASAL DE LA
COMMUNAUTE
SORPTION
COMETABOLISME par
rapport au
métabolisme des
CTO
COMPETITION
SUBSTRAT
BIODISPONIBILTE
BIODEGRADATION
DES COMPOSES
Toxicité
Structure
du
consortium
PE
Microorganismes
POTENTIEL de
BIODEGRADATION
Présence des
fonctions et
caractéristiques
des acteurs
Figure 1 : La tri-interaction matrice-microorganisme-polluant(PE) au sein d’un bioréacteur.
La matrice joue à la fois (i) sur le développement d’un métabolisme microbien basal souvent
nécessaire à l’expression d’un métabolisme vis à vis des composés (co-métabolisme) et (ii)
sur les interactions avec le micropolluant. Ces interactions matrice-micropolluant sont
souvent abordées sous l’angle de l’établissement d’équilibres et cinétiques d’adsorptiondésorption, que l’on relie d’une part aux propriétés physico-chimiques des composés,
particulièrement le coefficient de partage octanol-eau (Kow) et d’autre part à celles de la
matrice (présence de groupes fonctionnels, tension de surface…). De cette interaction, nait
la disponibilité des PE, disponibilité envers les microorganismes capables de les dégrader ou
disponibilité envers tout autre organisme cible pouvant présenter une réaction toxicologique
envers ces PE. Ces interactions matrice-micropolluant sont aussi abordées selon le type de
chimie utilisé (méthodes d’extraction et de dosage), chimie souvent très drastique afin d’avoir
accès à une quantité « totale » et donc éloignée de la fraction dite disponible aux
microorganismes. De plus, les microorganismes interagissent avec la matrice en la
transformant et en modifiant du même coup les relations matrice-micropolluant. Pour finir,
une fraction des microorganismes développe un métabolisme particulier vis à vis des
polluants permettant ainsi leur dégradation.
Ces différentes interactions sont souvent abordées dans la littérature mais de
façon indépendante. Les géo-chimistes s’intéressent aux interactions matrice-polluant
sans se soucier de l’existence d’un compartiment biologique, acteur ou cible, qui
pourrait interagir et modifier ces interactions. A l’inverse, les auteurs s’intéressant
à la biodégradation (potentiel microbiologique, flore microbienne..) soulignent les
problèmes de disponibilité comme facteur limitant, jouent sur des paramètres de type
procédé (ajout de surfactant, de solvant, augmentation de la température) pour l’améliorer
sans pour autant comprendre les mécanismes intrinsèques sur lesquels ils jouent.
ADEME
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Certains auteurs ont cependant relié biodégradabilité et biodisponibilité dans le cas
particulier de la dégradation d’HAP sur milieu hypercontaminé en utilisant des méthodes
chimiques telles les extractions TENAX (Cornelissen et al., 1998) ou cylcodextrine (Reid et
al., 2000).
De plus, très peu de données existent sur une matrice type boue qui contient une multitude
de polluants présents à faible concentration, qui n’est ni un solide (sol), ni un liquide, mais
dans lequel les fractions organiques dissoutes, colloïdales et particulaires se côtoient en
permanence, évoluent et interagissent avec les polluants et les microorganismes.
Ce projet vise à développer une approche intégrée reliant disponibilité-biodégradationtoxicité en combinant les visions des microbiologistes, des chimistes, des géo-chimistes et
des écotoxicologues ainsi qu’une approche génie ou ingénierie des procédés afin (i) de
mieux comprendre les processus qui gèrent le devenir des composés et (ii) de déterminer le
ou les critères pertinents permettant d’évaluer a priori ce devenir pour enfin (iii) orienter ce
devenir dans un contexte de réduction des risques.
L’une des originalités de ce projet repose sur la prise en compte de la multicontamination à
faible teneur des boues, représentative des conditions réelles. Nous proposons de travailler
avec des familles chimiques représentatives des principaux PE présents dans les boues,
ciblant dans chaque famille des composés spécifiques. Nous travaillons sur : des
hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP dont fluorène, phénanthrène, anthracène,
fluoranthène,
pyrène,
benzo(a)anthracène,
chrysène,
benzo(b)fluoranthène,
benzo(k)fluoranthène, benzo(a)pyrène, dibenzo(a,h)anthracène, benzo(g,h,i)perylène,
indéno(1,2,3,cd)pyrène), des polychlorobiphényls (PCB dont PCB28, PCB52, PCB101,
PCB118, PCB138, PCB153, PCB180), un composé phénolique (le nonylphénol -NP). Sur les
études en bioréacteur, toutes ces molécules seront présentes simultanément à des teneurs
représentatives de conditions réelles. Par contre, dans le cas des études de population et de
fonction microbiennes, nous serons amenés à faire des choix qui seront guidés par les
performances épuratoires obtenues sur les différents PE et par la disponibilité de ces
molécules marquées au carbone 13. De plus, ces familles ont été choisies car :
- elles nous permettent d’avoir une large gamme de paramètres physico-chimiques :
solubilité, Kow, masse molaire, substituants, nombre de cycles aromatiques, chaîne
aliphatique, isomérie et charge, ce qui dans l’élaboration des modèles permettra d’être le
plus exhaustif possible ;
- les molécules de références sont toutes ciblées par des normes européennes et des
arrêtés nationaux ;
- la quantification exhaustive (extraction des matrices solides et liquides) est bien maîtrisée
par les différents partenaires, les analyses sont souvent multirésidus et permettent donc
d’avoir une somme de composés en même temps ;
- d’un point de vue microbiologique, nous avons déjà des pistes de recherche quant à
l’expression de la biodégradation sous diverses conditions anaérobies selon le type de
matrice. En effet, il a été montré que certains composés tels que les HAP, PCB, et NP
(Trably et al., 2003; Christensen et al., 2004; Patureau et Trably, 2006; Benabdallah ElHadj et al., 2006; Patureau et al., 2008) pouvaient se dégrader en condition anaérobie
méthanogène et que les caractéristiques des procédés (mésophile ou thermophile, temps
de séjour hydraulique, type de boue...) avaient une influence non négligeable sur leur
biodégradation. Par contre, les PE appartenant à des familles de polluants organiques très
diverses, il est difficile d'énoncer des règles générales quant à leur biodégradation lors de
la digestion anaérobie. Très peu de données existent dans la littérature sur les
microorganismes et les voies métaboliques mis en jeu pour la dégradation anaérobie des
PE étudiés dans ce projet (Patureau et Hernandez-Raquet, 2008), ce qui souligne l’enjeu et
l’importance de telles études.
Le projet a pour objet central le procédé de digestion anaérobie en tant que réaction support
de la dégradation de micropolluants organiques et consistera en des allers et retours entre
ADEME
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Février 2013
les échelles procédés (performances épuratoires sur bilan massique) et processus
(adsorption et biodégradation). Afin de pouvoir comparer les systèmes entre eux, les
polluants seront ajoutés aux diverses matrices à des teneurs proches de la réalité, soit entre
5 et 10 µg/gMS. Les objectifs sont de :
- caractériser au mieux matrices, polluants et microorganismes,
- faire varier la nature de l’un d’entre eux et en observer l’impact sur la disponibilitébiodégradabilité-toxicité des PE : faire varier la nature de la matrice et donc la
disponibilité des PE à potentiel microbien constant ou faire varier les populations
microbiennes pour une matrice donnée à disponibilité constante,
- de croiser et d’intégrer l’ensemble de ces informations (par technique de régression
des moindres carrés partiels-PLS) et d’en faire ressortir des critères pertinents de
disponibilité. Il est ici nécessaire de rendre générique les informations obtenues sur
notre écosystème modèle à d’autres écosystèmes ouverts comme le sol, les
sédiments.
Les caractéristiques à évaluer des acteurs de la tri-interaction sont :
- une caractérisation de la matière organique en relation avec ses capacités
d’adsorption des PE : caractérisation chimique, physique et fonctionnelle des différents
compartiments de la matrice, le particulaire, le colloïdal et le soluble, par utilisation des
méthodologies classiques (sucres, protéines, lipides, acides humiques) et
spectrométriques (fluorescence 3D) couplée à une caractérisation physique (porosité,
charge de surface, granulométrie),
- un panel de PE caractérisés selon des gammes larges de solubilité, Kow, masse
molaire, substituants, nombre de cycles aromatiques ou chaînes aliphatiques, isomérie,
charge, et pour lesquels seront évalués des cinétiques et équilibres de sorption. Ces
PE seront analysés à la fois avec les méthodes d’extraction permettant l’analyse de
leurs quantités totales, mais on évaluera aussi la spéciation/localisation dans les
différents compartiments matriciels,
- une évaluation d’un potentiel à biodégrader via l’identification des acteurs microbiens
(par SIP et nanosims) et l’expression de fonctions spécifiques de dégradation déjà
connues. Le métabolisme des polluants organiques sous anaérobiose est largement
moins fourni que celui sous aérobiose. Cependant, deux types d’enzymes sont
actuellement utilisés comme biomarqueurs d’activité dans des écosystèmes
hypercontaminés par des composés aromatiques : la benzylsuccinate synthase et les
déhalogénases (Winderl et al., 2007 ; Lee et al., 2006). Cette évaluation sera corrélée
à la mesure des performances d’abattement en micropolluants par bilan matière sur les
procédés de digestion anaérobie.
Le programme de recherche se décompose comme suivant (résumé sur figure 2) :
1. Evaluation de la composante physique : étude des phénomènes de sorption sur
différentes matrices boues.
2. Evaluation de la composante microbiologique : identification des acteurs microbiens
(microorganismes et gènes) de la dégradation et étude de marqueurs fonctionnels de
dégradabilité.
3. Evaluation du potentiel métabolique : impact des caractéristiques de la matrice boue sur
la biodégradation des PE
4. Evaluation du potentiel toxique
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Potentiel métabolique
Etudier l’impact des
caractéristiques de la
matrice sur la
biodégradation des CTO en
réacteurs :
Février 2013
Composante physique
LBE
ISM
LBE
ISM
Matrice
de la matrice : approches
physique + biochimique +
fonctionnelle
Boue I / boue II
UTILISATION DE LA
MATRICE COMME
SUBSTRAT
Pré-traitement thermique
METABOLISME
BASAL DE LA
COMMUNAUTE
Définir un modèle de
biodisponibilité en fonction
des caractéristiques :
du micropolluant
SORPTION
COMETABOLISME par
rapport au
métabolisme des
CTO
COMPETITION
SUBSTRAT
BIODISPONIBILTE
BIODEGRADATION
DES COMPOSES
Toxicité
Structure
du
consortium
PE
Microorganismes
Potentiel toxique
Composante microbienne
Mesurer l’abondance des
micro-organismes possédant
les fonctions de
biodégradation des CTO =
Biomarqueurs fonctionnels
HBAN
LBE
POTENTIEL de
BIODEGRADATION
Présence des
fonctions et
caractéristiques
des acteurs
Détecter la présence et
identifier la nature de
substances à activité de
perturbateurs endocriniens
Approche bio-analytique
ISM
INERIS
Figure 2 : Programme de travail
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MATERIELS ET METHODES
1. La solution de dopage
L’un des objectifs des travaux menés dans le cadre de ce travail est d’explorer l’influence
des caractéristiques des boues et des PE sur le devenir de ces derniers lors de la digestion
anaérobie de boues contaminées. Dans ce contexte, il est primordial de pouvoir étudier les
PE ensemble dans une boue donnée, mais aussi dans plusieurs boues. Or si une même
boue contenant tous les HAP/PCB/NP dans des concentrations quantifiables était déjà
difficile à trouver, trouver plusieurs boues remplissant ces conditions relèverait de
l’impossible. C’est pourquoi la stratégie de dopage de boues a été utilisée pour la mise en
œuvre de la digestion anaérobie.
Afin de réaliser le dopage, un cocktail concentré en HAP/PCB/NP (liste des composés
tableau 1) est préparé à partir de solutions concentrées en chaque composé. L’injection d’un
petit volume de ce cocktail dans la boue permet d’atteindre les concentrations souhaitées en
micropolluants organiques sans modifier les propriétés de la boue. Les 13 HAP et les 7 PCB
étudiés sont commercialisés sous formes de poudre (Dr Ehrenstorfer GmbH). Ces poudres
sont individuellement dissoutes à 2 ou 4 g/L dans du dichlorométhane selon les molécules
(1 g/L pour l’indéno(1,2,3,c,d)pyrène). Le mélange commercial des isomères du nonylphénol
(Interchim) a pour forme un liquide visqueux, qui est dilué dans de l’hexane pour obtenir une
solution à 20 g/L. Ensuite un volume donné de ce cocktail de dopage est obtenu par ajout de
1/20 ou 1/40 de ce volume de chacune des solutions individuelles de HAP et PCB, de 1/10
pour le nonylphénol. Après évaporation sous flux sec d’azote, le mélange est repris dans le
volume souhaité d’acétonitrile. Les concentrations obtenues dans la solution de dopage sont
de 2 g/L de nonylphénol, 100 mg/L de PCB et d’HAP sauf l’indéno(1,2,3,c,d)pyrène présent
à 25 mg/L. Ce dernier est présent en concentration moindre car il est très peu soluble dans
l’eau et est donc susceptible de se retrouver en condition de saturation lors des opérations
de dopage, de plus il est très coûteux. Le dopage est réalisé sous agitation pour permettre
une dispersion homogène de la solution de dopage dans l’ensemble de la boue. Le volume
de la solution de dopage ajoutée à la boue représente moins de 1/1000 du volume de boue
préparée. La concentration de dopage de référence pour les expérimentations est de 5
mgHAP/kgDM, 1,25 mgindeno(1,2,3,c,d)pyrene/kgDM, 5 mgPCB/kgDM et 100 mgNP/kgDM. Cette
concentration peut être modulée en fonction des besoins spécifiques d’une expérience.
2. Les boues
Trois types de boue, a priori de composition très contrastée, ont été utilisés en tant que
substrat tout au long de cette étude. Ces boues ont été prélevées sur trois sites différents.
Une boue primaire (PS) est échantillonnée dans la station d’épuration de Muret traitant
33 000 équivalents habitant-EH (Haute-Garonne). Une boue secondaire (HLSS) est obtenue
sur la station de Cergy-Pontoise traitant 250 000 EH (Val d’Oise), elle provient d’un procédé
à boue activée à très forte charge. Une autre boue secondaire est prélevée sur la station
d’épuration de Narbonne traitant 120 000 EH (LLSS), elle est issue d’un procédé à boue
activée à très faible charge (temps de séjour hydraulique de 3-5 jours, temps de séjour des
solides de 20 jours). Ces trois boues sont congelées avant leur utilisation. Toutes les
caractérisations biochimiques se font après cette étape de congélation/décongélation. PS et
HLSS ont aussi été diluées avec de l’eau distillée pour avoir une concentration en DCO
avoisinant les 20 g/L.
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Tableau 1 : Caractéristiques des molécules étudiées
Molécules
Fluorene
Phenanthrene
Anthracene
Fluoranthene
Pyrene
Benzo(a)anthracene
Chrysene
Benzo(b)fluoranthene
Benzo(k)fluoranthene
Benzo(a)pyrene
Dibenzo(a,h)anthracene
Benzo(g,h,i)perylene
Indeno(1,2,3,c,d)pyrene
Nonylphenol
PCB28
PCB52
PCB101
PCB118
PCB138
PCB153
PCB180
Log Kow
4.18
4.57
4.45
5.1
5.32
5.85
5.89
6.57
6.84
6.00
6.70
6.73
6.60
5.76
5.66
5.95
6.38
6.65
7.19
6.86
7.15
M
166
178
178
202
202
228
228
252
252
252
278
276
276
220
257
292
327
327
364
364
399
log S
0,301
0,079
0,114
-0,585
-0,886
-1,959
-2,699
-1,921
-3,097
-2,523
-3,301
-3,523
-1,208
0,778
-0,64
-0,904
-1,475
-1.575
-2,137
-1,959
-2.167
n5C
1
0
0
1
0
0
0
1
1
0
0
0
1
0
0
0
0
0
0
0
0
n6C
2
3
3
3
4
4
4
4
4
5
5
6
5
1
2
2
2
2
2
2
2
nCl
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
3
4
5
5
6
6
7
nOH
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
1
0
0
0
0
0
0
0
La boue PS est hydrolysée à 160°C pendant 30 min dans un autoclave type Zipperclave
pour obtenir TTPS (figure 3).
A partir de la boue secondaire HLSS, trois nouvelles boues sont générées en laboratoire
(figure 3). La boue HLSS est mélangée à des particules de cellulose (20 µm, Sigma-Aldrich),
en proportions DCO/DCO de 50/50, afin de créer la boue secondaire supplémentée en
cellulose C-HLSS. La boue HLSS est aussi diluée avec sa propre phase aqueuse
préalablement séparée dans des proportions 3V:1V (boue:surnageant), de façon à
augmenter le ratio matière dissoute et colloïdale / matière particulaire dans la boue nommée
Sup-HLSS. Enfin, la boue composite HLSS-1kDa est fabriquée à partir de HLSS comme
suit : HLSS est centrifugée (12500g, 20 min) puis le surnageant est filtré à 1,2 µm (Whatman
GF/C) puis à 0,1 µm (membrane PVDF) puis ultrafiltré sur une cellule Amicon (Millipore,
membrane cellulose régénérable seuil de coupure 1 kDa), cette fraction est ensuite
mélangée avec le culot de la centrifugation afin de reconstituer un mélange boue.
La boue HLSS a aussi été utilisée comme substrat des réacteurs anaérobies pour les études
portant sur les communautés microbiennes. Pour cela, elle a été stérilisée à 121°C pendant
20 minutes après avoir été diluée avec de l’eau distillée (figure 3).
ADEME
20
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
réacteurs continus 5L
PS
réacteurs batch
réacteurs continus 5L
HLSS
réacteurs batch
lyse
thermique
TTPS
ajout de
cellulose
Février 2013
réacteurs continus 5L
C-HLSS
réacteurs continus 5L
dilution
avec son
surnageant
Sup-HLSS
reconstitution
particulaire et
surnageant
filtré et
ultrafiltré à
1kDa
HLSS-1kDa
réacteurs batch
diluée et
stérilisée
HLSS-stérile
réacteurs continus 400 mL
réacteurs continus 5L
LLSS
Figure 3: Les différentes matrices « boues » utilisées au cours de l’étude et les dispositifs
expérimentaux associés.
3. Les dispositifs expérimentaux
Deux types de dispositifs sont utilisés, l’un mené en mode discontinu ou batch et l’autre en
continu. Ces dispositifs batch ou continus ont été réalisés et suivis au Laboratoire de
Biotechnologie de l’Environnement.
3.1
Les réacteurs discontinus ou batch
En mode batch, les expériences de digestion anaérobie sont réalisées dans des fioles à
plasma de 300 ml contenant 250 ml d’un mélange défini de boue-substrat et d’un inoculum
(figure 4). Cet inoculum est issu d’un digesteur anaérobie continu mésophile de laboratoire
alimenté avec HLSS et dopé aux PE (cf § 3.2), il est donc adapté à la fois aux conditions de
digestion anaérobie et à la présence de PE. Les fioles sont agitées (100 rpm) et maintenues
à 35°C dans une chambre thermostatée. Pour ces expériences, le ratio substrat/inoculum est
de 0,5 gDCO-substrat/gOM-inoculum. L’inoculum est concentré de 8 à 18 g/L de matière
sèche (DM) pour obtenir un mélange substrat/inoculum avec une concentration totale en DM
de 20 g/L. Pour ces expériences, le mélange substrat/inoculum est dopé à 15 mgHAP/kgDM, 3
mgindeno(1,2,3,c,d)pyrene/kgDM, 15 mgPCB/kgDM et 300 mgNP/kgDM. Trois substrats sont testés dans
ces conditions : HLSS, BN et HLSS-1kDa. Chaque mélange substrat/inoculum est mené en
duplicat. A chaque pas de temps, deux réacteurs sont sacrifiés afin de suivre en fonction du
temps l’évolution des concentrations en PE dans les compartiments matière du mélange
(total et aqueux). L’analyse de la concentration au temps initial (T0) est faite en duplicat. Des
réacteurs témoins sont aussi suivis : un premier réacteur avec le mélange HLSS/inoculum
mais non dopé aux PE afin d’observer l’influence de la présence des PE sur la digestion
anaérobie et un second réacteur abiotique avec le mélange HLSS/inoculum dopé aux PE et
stérilisé par autoclavage à 121°C pendant 20 min.
Les paramètres de digestion suivis sur ces réacteurs sont : le volume et la composition du
biogaz, les AGV et la matière sèche (DM).
ADEME
21
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Figure 4 : Représentation des expérimentations menées en batch pour un mélange substrat/inoculum.
Sacrifice de deux fioles à chaque pas de temps.
3.2
Les réacteurs continus
Deux types de réacteurs continus sont utilisés, de volume et de conduite différents
3.2.1 Les réacteurs continus de 5 L : impact de différents substrats sur les
performances de digestion anaérobie des PE
Ces réacteurs de digestion anaérobie sont proches de réacteurs infiniment mélangés en
mode de fonctionnement continu et avec cellules libres, similaires aux procédés industriels.
Ils possèdent un volume utile de 5L dont le mélange est assuré par un agitateur magnétique
(figure 5). Leur double enveloppe permet la régulation de température. Les pompes
d’alimentation et de soutirage sont programmées de façon à opérer 6 cycles de soutiragealimentation par jour. Le volume pompé par cycle est calculé par pesée hebdomadaire des
réservoirs d’alimentation et de soutirage. Le temps de marche des pompes est ensuite ajusté
de façon à appliquer un temps de séjour hydraulique (TSH) donné. Environ 100 cycles se
succèdent au cours d’un TSH : ce mode semi-continu est donc assimilable à un mode
continu.
Les boues d’alimentation sont continuellement agitées dans un souci d’homogénéité et de
stabilité de l’alimentation. De même que les boues digérées (soutirage), elles sont
maintenues dans une enceinte réfrigérée (4°C) afin de limiter leur évolution entre le
renouvellement de l’alimentation et le prélèvement du soutirage effectués à fréquence
hebdomadaire. Une sonde Mettler Toledo reliée à un microordinateur permet l’acquisition en
ligne du pH.
L’effluent gazeux est réfrigéré de manière à limiter les pertes des composés évaporés ou
volatilisés depuis le mélange réactionnel. Un septum disposé en aval du réfrigérant permet le
prélèvement pour analyse hors ligne de la composition du biogaz. Le biogaz produit traverse
ensuite une cartouche ORBO en polyuréthanne (Supelco) dont le garnissage adsorbe les PE
volatilisés. Le biogaz atteint ensuite le compteur volumique qui permet de suivre en ligne le
volume de biogaz produit. A chaque volume Vimp le traversant, ce compteur génère une
impulsion électrique acquise par le microordinateur. Vimp est mesuré au cours de l’étalonnage
préalable du compteur.
Ce dispositif a permis l’étude de la digestion anaérobie des boues PS, TTPS, HLSS, CHLSS et Sup-HLSS dopées à 5 µgHAP/gDM durant 4 TSH chacune, en conditions mésophiles
(35°C, TSH : 20 jours) et pour une charge de 1,2 ± 0.2 gCOD/L/jour. Au démarrage, les
réacteurs sont ensemencés avec un digestat industriel mésophile traitant des boues
naturellement contaminées en HAP (inoculum).
ADEME
22
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Février 2013
Mesure du débit de
biogaz
Septum de
prélèvement du
biogaz
Cartouche
ORBO
4°C
Réfrigérant
Sonde pH
Pompe
d’alimentation
Pompe de
soutirage
35°C
Agitateur
magnétique
Réservoir
d’alimentation
Enceinte à
4°C
Flacon de
soutirage
Agitateur
magnétique
Figure 5 : Représentation des réacteurs de 5 L alimenté en continu automatiquement.
3.2.2 Les réacteurs continus de 400 ml : impact des communautés
microbiennes sur les performances de digestion anaérobie des PE.
Ces réacteurs de digestion anaérobie sont aussi proches de réacteurs infiniment mélangés
en mode de fonctionnement continu et avec cellules libre. Ils possèdent un volume utile de
400 ml dont le mélange est assuré par un agitateur magnétique (figure 6). Ils sont maintenus
dans une chambre thermostatée à 35°C. Ils sont fermés par un bouchon à trois sorties : une
sortie gaz fermée par un septum à jupe retournée, une sortie permettant l’alimentation et
enfin une troisième prolongée dans le flacon par un tube permettant le prélèvement de la
boue digérée. Ils sont soutirés (20 ml) et alimentés (20 ml) manuellement tous les jours sous
une hotte stérile.
Cette configuration a été utilisée pour tester l’influence sur la dégradation des PE de trois
communautés microbiennes à historique contrasté et qui ont servi d’inoculum. Quatre
réacteurs sont menés pour chaque inoculum : un réacteur est alimenté avec la boue HLSS
non dopée et les trois autres avec la boue HLSS dopée à 100 mgNP/kgDM et 5 mgHAP-PCB/kgDM.
Les répliqua nous permettent de pallier les phénomènes de divergence des communautés
microbiennes. La boue HLSS est stérilisée (121°C, 30 min) afin de n’observer que l’effet des
communautés apportées au temps initial. Pour ce faire, deux grands volumes de boue HLSS
sont préparés, l’un est non dopé et l’autre est dopé avec les PE (tel que décrit au 1), puis ces
lots sont répartis dans des bidons puis stérilisés et congelés. Avant leur utilisation comme
alimentation, les aliquots de boue sont transférés pendant une nuit à 4°C afin de décongeler,
et le pH est ajusté à 7 sous hotte stérile à l’aide d’une solution stérile de NaHCO3- à 52 g/l.
ADEME
23
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Février 2013
Dans un premier temps les réacteurs sont conduits en fedbatch pour éviter l’orientation vers
des voies fermentaires et permettre aux communautés de s’adapter plus facilement aux
conditions opératoires. Chaque échantillon de microorganismes extraits d’un écosystème
d’intérêt (sol contaminé en HAP, sédiment contaminé en PCB et boue de STEP) sert
d’inoculum à un volume de 100 ml de boue stérilisée dopée (ou non) diluée à 1 g DCO/l (cf
paragraphe suivant pour l’extraction des communautés). Les fioles sont soumises à un flux
d’azote (stérilisé par filtration) pendant quelques minutes pour permettre la mise en place de
l’anaérobiose. La production de biogaz est suivie à la fois quantitativement et
qualitativement. En fonction des quantités de méthane produit, la charge est
progressivement augmentée jusqu’à obtenir un volume réactionnel de 400 ml et une charge
volumique appliquée de 1gDCO/l/j (période d’environ 100 jours).
Une fois ce volume atteint, les réacteurs sont menés en régime semi continu avec un TSH
de 20 jours. Le régime semi-continu appliqué peut être assimilé à un régime continu. Les
sorties de chaque réacteur sont conservées séparément à 4°C sur une période de 10 jours
(correspondant à un demi TSH). Tous les 10 jours les différents réservoirs de sortie servent
aux analyses de suivi de réacteurs décrites dans le §5, aux analyses de suivi des
micropolluants organiques décrites dans le §6 et aux analyses de biologie moléculaire
décrites dans le §7. Ces mêmes analyses sont effectuées à chaque changement de flacon
d’alimentation. Les différents prélèvements se font sous hotte stérile. Les expériences sont
menées simultanément pour chaque inoculum jusqu’à obtention et maintien d’un équilibre de
dégradation de la matière (100 jours).
Figure 6 : Représentation des réacteurs de volume utile de 400 ml alimentés et soutirés tous les jours
manuellement sous conditions stériles.
4. L’extraction des communautés microbiennes issues de trois environnements
contrastés
Ces expériences ont été menées au Laboratoire de Biotechnologie de l’Environnement.
Pour extraire les communautés microbiennes des trois écosystèmes d’intérêt (sol contaminé
en HAP, sédiment contaminé en PCB et boue de STEP), une stratégie d’extraction de
cellules par gradient de densité (inspirée des protocoles d’extraction de cellules de sol) a été
appliquée. Dans le cas de la boue, un prétraitement enzymatique de l’échantillon a été
nécessaire et a fait l’objet d’un développement méthodologique spécifique.
Prétraitement enzymatique de la boue : 250 ml de boue anaérobie (correspondant à 10g de
matière sèche) provenant de la STP de Lunéville ont été centrifugé à 15000 g pendant 20
ADEME
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Février 2013
min à une température de 4°C. Le culot obtenu est suspendu dans 250 ml de tampon
phosphate 80 mM avec du MgCl2 à une concentration finale de 20 mM. Pour optimiser
l’hydrolyse des exopolymères de la boue, du triphosphate pentasodique (STPP, Sigma) a
été ajouté au tampon à une concentration finale de 50 mM. Une succession d’enzymes est
ensuite appliquée ; il s’agit d’ α-amylase, de pectinase, de cellulase et de DNase. Chaque
enzyme est ajoutée en excès pour prévenir la possible inhibition de l’activité de l’enzyme par
des phénomènes de sorption. Les quantités d’enzymes sont basées sur une estimation
générale de la composition en polysaccharides, sucres complexes, cellulose et ADN de la
boue (Simon et al. 2009). 20 U d’ α-amylase (provenant de Bacillus sp., Duramyl® 300 U.g-1,
Sigma), 330 U de pectinase (provenant d’Aspergillus niger, 1000 U g-1, Sigma), 5600 U de
cellulase (provenant d’Aspergillus sp., Carezyme® 1000 U.g-1, Sigma) et 250 U de DNase
(RQ1 RNase-Free DNase, Promega) sont ajoutés successivement et incubés 1h, à 37°C.
Pour obtenir une activité optimale de chaque enzyme, le tampon est d’abord ajusté à un pH
de 5 lors de l’ajout de α-amylase puis de la pectinase, puis à un pH de 7, lors de l’ajout de
la cellulase et de DNase. La suspension est ensuite centrifugée à 15000 g pendant 20 min à
une température de 4°C et le culot obtenu est suspendu dans une solution saline de NaCl
(80%) pour lavage avant que la suspension ne soit à nouveau centrifugée selon les mêmes
conditions.
Application d’un gradient de densité : dans un erlenmeyer stérile de 100 ml, préalablement
placé dans un bac à glace, 10 g d’échantillon (sol, sédiment, culot de centrifugation de la
boue prétraitée enzymatiquement) et 50 ml d’une solution de tampon PVPP sont mixés à
vitesse maximum et pendant 90s (Maron et al. 2006) à l’aide d’un UltraTurax (T15 basic)
avant d’être agité (~100 rpm) pendant une nuit à 37°C. Le tampon PVPP est composé de
tampon PBS 1× (130 mM NaCl, 7 mM Na2HPO4, 3 mM NaH2PO4, 5 mM Na2EDTA, pH 7.3),
de PVPP (3.5 mg.ml-1), et d’1 % of Tween 20. La sonde de l’ultraturax aura préalablement
été lavée 30 min dans un bain d’acétone placé dans un bain à ultrasons.
20 ml de la solution obtenue sont ensuite prélevés et répartis dans 2 tubes à centrifuger
stériles, de 50 ml, en polycarbonate. Sous cette solution, 16 ml de solution de Gentodenz
(Gentaur, France) stérile (de densité 1,3 g/ml) sont déposés, à l'aide d'une pipette stérile,
comme indiqué sur la figure 7 (Barra Caracciolo et al. 2005). La solution de Gentodenz est
préparée en dissolvant 40 g de Gentodenz (composé similaire au Nicodenz, soluble dans
l’eau, non ionique, non toxique et dérivé de l’acide benzoique) dans 50 ml d’eau distillée
stérile, comme recommandé par Lindahl et al. (1996).
Les suspensions sont ensuite centrifugées à 10.000 x g pendant 40 min à une température
de 4°C pour procéder à la séparation de phase entre les particules de l’échantillon et les
cellules.
Après centrifugation, on obtient dans le tube la séparation de phase (figure 7). La couche de
cellules d’intérêt est prélevée à l’aide d’une micropipette avec un peu du surnageant et un
peu de la phase qui contient le Gentodenz dans un bécher stérile de 100 ml.
Cette suspension est ensuite répartie dans plusieurs tubes en polyallomère stériles (environ
10 ml par tube). Le volume est ajuster à 30 ml avec du l’eau saline stérile (NaCl 80%) et
centrifugée à 16.000 x g pendant 60 min à 4°C pour éliminer les résidus de Gentodenz. Pour
chaque écosystème, les culots obtenus à partir des 10 g de matières sont regroupés et
récupérés dans 20 ml une solution saline stérile (NaCl 80%).
ADEME
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Février 2013
Figure 7 : Schéma des étapes d'établissement du gradient (Barra Caracciolo et al., 2005).
5. L’analyse des matrices
Les différents échantillons de boue prélevés sur les réacteurs ont été traités comme
présenté sur la figure 8. Sur cette figure, les interactions entre les différents partenaires du
projet sont soulignées.
ADEME
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Février 2013
Figure 8 : Les analyses réalisées sur les échantillons de boue.1 Analyses effectuées au Laboratoire
de Physico- et Toxico-Chimie de l'environnement (LPTC) de Bordeaux (dosage des PCB sur le
compartiment particulaire, dosage SPME HAP et PCB sur le surnageant, fractionnement AF4 et
dosage SPME HAP). 2 Analyses réalisées par le LPTC (extraction liq/liq au DCM et extraction ASE
Mtoh/DCM) et l’unité « Écotoxicologie in vitro et in vivo » de l’INERIS à Verneuil-en-Halatte (tests
cellulaires). 3 Analyses effectuées par l’unité de recherche « Hydrosystèmes et bioprocédés » de
l’IRSTEA d’Antony (isotopie carbone 13). Les autres analyses ont été effectuées par le Laboratoire de
Biotechnologie de l’Environnement de l’INRA de Narbonne.
ADEME
27
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5.1
Février 2013
Préparation des échantillons
Une centrifugation à 15 000 g pendant 20 min, suivi d’une filtration à 1,2 µm permet de
séparer la phase particulaire de la boue de sa phase aqueuse. La phase aqueuse contient
alors les matières colloïdales et dissoutes.
Entre 100 ml (réacteur batch) et 300 ml (réacteur continu) de boues totales ou bien de leur
phase particulaire sont tout d’abord congelés à -20°C. Grâce au module HetoPowerDry PL
3000 (ThermoElectron Corporation), ces échantillons sont lyophilisés. Les parois du piège à
glace sont maintenues à -55°C, le vide est poussé à 1 mbar, et les étagères portant les
plateaux sont équipées de résistances chauffantes, de manière à accélérer la sublimation de
la glace. Le chauffage est programmé selon des paliers de 2h à -20°C, -5°C, 5°C, 15°C puis
les échantillons sont maintenus à 25°C jusqu’à arrêt de l’appareil. La lyophilisation dure
environ 24 h.
De manière à garantir des échantillons homogènes et obtenir une poudre fine, les
échantillons lyophilisés sont broyés. Pour cela, un microbroyeur (Culatti) équipé d’un tamis
de 1 mm est utilisé. La vitesse de rotation de la tête de broyage est fixée entre 3000 et 4500
rpm. L’échantillon broyé est récupéré dans un flacon pyrolysé ambré et conservé à
température ambiante.
5.2
Paramètres globaux
5.2.1 Mesure de la matière sèche et de la matière organique
Dans un creuset en céramique séché et pesé (masse T), environ 30 ml d’échantillon (boue
totale) sont introduits. Le creuset est ensuite pesé afin de déterminer la masse exacte
introduite (m0), puis placé à l’étuve à 105°C durant 24 h afin d’évaporer l’eau. A sa sortie du
four, le creuset est placé dans un dessiccateur pour refroidissement avant d’être pesé à
nouveau (m105). Cette étape nous permet d’obtenir la concentration en matière sèche de
l’échantillon par le calcul suivant :
MS (g/kg) =
m105 ( g )  T ( g )
* 1000
m0 ( g )  T ( g )
Le creuset est, enfin, déposé dans un four à 550°C pendant 2 h, et pesé à nouveau (m 550)
après refroidissement dans un dessiccateur. A la fin de cette étape, il ne reste dans le
creuset que la matière minérale et la concentration en matière volatile (MV) ou matière
organique (MO) est obtenue par le calcul suivant :
MV = MO (g/kg) =
m105 ( g )  m550 ( g )
* 1000
m0 ( g )  T ( g )
5.2.2 Mesure de la DCO, demande chimique en oxygène
La DCO des boues totales ou de leur phase aqueuse (méthode de séparation décrite § 5.1)
est mesurée à l’aide de kits Spectroquant (Merck), en accord avec la norme ISO 15705. La
DCO de la phase particulaire est déduite de la différence de ces deux mesures. Les tubes
commercialisés contiennent un excès de bichromate de potassium (K2Cr2O7) qui permet
l’oxydation totale de la matière de l’échantillon après 2 h en conditions acides et à 150°C. 2
ml d’échantillon sont introduits par tube. La détection par spectrophotométrie s’applique dans
la gamme 0 à 1500 mgO2/l.
5.2.3 L’analyse des gaz de fermentation
ADEME
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Février 2013
La quantification du biogaz total et l’analyse de la composition de celui-ci nous ont permis de
pouvoir quantifier les volumes produits pour chaque gaz produits (H2, CO2, CH4).
La composition du biogaz produit par les systèmes anaérobies est déterminée par
chromatographie en phase gazeuse (CPG). 0,5 ou 1 ml d’échantillon gazeux est prélevé
dans le ciel gazeux du réacteur à l’aide d’une seringue et injecté dans un chromatographe
(GC-8A , Shimadzu). Deux colonnes en série permettent la séparation des différents gaz. La
première colonne (Hayesep Q, Touzart & Matignon), garnie de Silicagel (d’une longueur de 2
m, d’un diamètre de 3,175 mm, d’une granulométrie de 80 à 100 mesh), permet la
séparation du CO2. Les autres gaz sont séparés grâce à la seconde colonne, qui est un
tamis moléculaire de 5 Ǻ (Touzart & Matignon) de même longueur, diamètre et granulométrie
que la colonne précédente. Les deux colonnes sont séparées par une colonne à vide de
10m de long qui ralenti le passage du gaz au niveau du tamis moléculaire. Les molécules
sont entrainées par un gaz vecteur, de l’argon à 2,8 bars. La détection est réalisée à l’aide
d’un catharomètre dont le courant est fixé à 80 mA. Le four à colonne est régulé à 30°C,
alors que l’injecteur et le détecteur opèrent à 100°C. La composition de l’échantillon est
déterminée par un étalonnage externe. Le gaz étalon utilisé est composé de 25 % volumique
de CO2, 2 % d’O2, 5 % d’H2, 10 % de N2 et 58 % de CH4.
Pour mesurer le biogaz produit au cours des fermentations, deux méthodes ont été utilisées,
l’une utilisant un système d’éprouvette renversée (réacteur batch), l’autre par différentiel de
pression (réacteur continu de 400 ml). Sur les réacteurs continus de 5 l, un capteur
volumétrique (sonde de niveau), relié à une centrale d’acquisition a été utilisé.
Par éprouvette : le volume de biogaz produit est mesuré en piquant le septum de la sortie
gaz du flacon à l’aide d’une aiguille. Cette aiguille est reliée à un tuyau dont l’autre extrémité
est placée dans une éprouvette renversée remplie d’eau acidifiée (pH<2). La surpression
s’évacue de la bouteille et entraîne une diminution du volume d’eau dans l’éprouvette ce qui
permet de mesurer le volume de gaz en surpression dans le flacon.
Pour calculer le gaz produit entre deux prélèvements les équations suivantes sont
appliquées :
ΔNj = (yj Psalle (j) Vh / R Tj)-(yj-1 Psalle (j-1) Vh / R Tj-1)
ΔVj = ΔNj R T0 / P0 = ΔNj * 8.314*273.15/105 (*106 ml pour l’avoir en ml)
Avec :
- yj et yj-1, les teneurs du gaz étudié dans le gaz total, exprimées en pourcentage,
mesurées respectivement le jour du prélèvement et lors du prélèvement
précédent.
-
Psalle
(j)
et Psalle
(j-1),
les pressions en Pa mesurées dans la salle,
le jour du
prélèvement et après le prélèvement précédent.
-
P0= 105 Pa, condition normale de pression
-
T0= 273,15 K, condition normale de température
-
Vh, le volume du ciel gazeux dans le flacon en m3
-
R, la constante des gaz parfaits
-
T, température en Kelvin
Par différentiel de pression : la pression Pj à l’intérieur du système est mesurée le jour du
prélèvement, à l’aide d’un manomètre piqué dans la bouteille. Le volume de gaz produit (ΔVj)
est alors calculé aux conditions normales de pression et température (CNTP) de la manière
suivante via la détermination du nombre de moles (ΔNj) :
ΔNj = (yj Pj Vh / R Tj)-(yj-1 Pj-1 Vh / R Tj-1)
ADEME
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Février 2013
ΔVj = ΔNj R T0 / P0 = ΔNj * 8.314*273.15/105 (*106 ml pour l’avoir en ml)
Avec :
- yj et yj-1, les teneurs du gaz étudié dans le gaz total, exprimées en pourcentage,
mesurées respectivement le jour du prélèvement et lors du prélèvement
précédent.
-
Pj et Pj-1, les pressions en Pa mesurées le jour du prélèvement et après le
prélèvement précédent.
-
P0= 105 Pa, condition normale de pression
-
T0= 273,15 K, condition normale de température
-
Vh, le volume du ciel gazeux dans le flacon en m3
-
R, la constante des gaz parfaits
-
T, température en Kelvin
5.2.4 Mesure de la concentration en Acides Gras Volatils (AGV)
Le dosage des concentrations en AGV est réalisé sur la phase aqueuse de la boue
(méthode de séparation décrite § 5.1) par CPG. Cette analyse permet de mesurer les
concentrations en acétate, propionate, butyrate, iso-butyrate, valérate et iso-valérate d’un
échantillon liquide grâce à une table d’identification préprogrammée dans le système
d’analyse. Une solution d’acide éthyl 2 butyrique à 1g/l, servant d’étalon interne, doit être
ajoutée à l’échantillon à analyser (volume à volume).
L’analyse des échantillons s’effectue sous un gradient de température par un
chromatographe (Varian GC 3900) équipé d’un détecteur à ionisation de flammes. Un
passeur automatique complète l’ensemble, permettant l’analyse en série des échantillons.
Une seringue prélève automatiquement le liquide et le place dans l’injecteur qui est chauffé à
une température de 210°C. Le liquide se volatilise et les produits gazeux de cette
volatilisation migrent dans la colonne semi-capillaire FFAP de 15 m de long et de 0,52 mm
de diamètre, Phase ECTM 1000. Le four est soumis à un gradient de température de 80°C à
120°C (rampe de 10°C par minute). L’injecteur est maintenu à 210°C et le détecteur à 280
°C. Le gaz vecteur, l’azote, est maintenu à un débit 6 ml/min. Les pressions en hydrogène et
air sont de 50 kPa et 100 kPa, respectivement. L’acquisition des données est réalisée grâce
au logiciel Galaxie Work Station de Varian (version 1.9.3.2).
5.2.5 Dosage des protéines
Les protéines contenues dans les boues totales ou leur phase aqueuse sont dosées par la
méthode spectrophotométrique de Lowry (Lowry, et al. 1951) basée sur la détection des
liaisons peptidiques. La solution de réactifs est un mélange de solution basique (4 g NaOH/l) de
Na2CO3 (20 g/l), de solution de CuSO4, 5H20 à 10 g/l, et de solution de tartrate double de
potassium et de sodium à 20 g/l, en proportions volumiques 100/1/1.
L’étalonnage est réalisé grâce à des solutions de sérum d’albumine bovine (SAB) à 20, 40,
60, 80 et 100 mg/l.
Dans des tubes à essai, 1 ml d’échantillon ou de standard, 3 ml de solution de réactifs et 0,3
ml de réactif de Folin sont introduits puis placés à l’obscurité durant 2 h. Dans ce milieu
alcalin, les ions Cu2+ réagissent avec les atomes d’azote des liaisons peptidiques et sont
réduits en Cu+. Les ions Cu+ réduisent ensuite le complexe acide phosphotungsitique / acide
phosphomolybdique contenu dans le réactif de Folin, ce qui confère une coloration bleutée
ADEME
30
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
aux mélanges réactionnels. L’absorbance à 750 nm est finalement mesurée pour obtenir la
concentration des échantillons en équivalents gSAB/l.
5.2.6 Dosage des sucres
Le dosage des glucides, dans les boues totales ou leur phase aqueuse est basé sur leur
réaction avec l’anthrone (Dreywood 1946). La solution de réactif est préparée par dilution
d’anthrone dans de l’acide sulfurique à 98% à raison de 2 g/l.
L’étalonnage est réalisé grâce à des solutions de glucose à 20, 40, 60, 80 et 100 mg/l.
75 µl d’échantillon ou de standard ainsi que 150 µl de solution de réactifs sont disposés dans
des puits d’une microplaque 96 puits, puis placés à l’étuve à 105°C durant 10 min. A cette
température et en milieu acide, les glucides réducteurs sont déshydratés pour donner des
dérivés furfuraliques. Ceux-ci se condensent avec l’anthrone, générant une couleur verte
pour les hexoses. Après refroidissement dans de la glace, l’absorbance à 625 nm permet
d’obtenir la concentration en glucides en équivalents gGlu/l.
5.2.7 Dosages des lipides
Le dosage des lipides dans les échantillons lyophilisés et broyés est mené grâce à l’appareil
ASE 200 (Dionex), qui permet de réaliser l’extraction par l’éther de pétrole à hautes
température et pression. Les cellules contenant 1 g d’échantillon sont chauffées à 105°C et
portées à la pression de 67 bars, maintenues dans ces conditions pendant 10 min, puis
purgées de la totalité du solvant. Chaque cellule subit trois cycles de ce type. Les extraits
sont récupérés dans des vials préalablement tarés. L’éther de pétrole est évaporé à l’aide
d’un Multivapor (Büchi) dans lequel les échantillons sont agités, chauffés à 45°C, mis sous
vide (500 mbar), et l’éther de pétrole est condensé à 4°C. Les traces de solvant restantes
sont ensuite éliminées à l’étuve à 105°C avant pesée du vial. La différence par rapport à la
tare permet de mesurer la masse de matière extractible à l’éther de pétrole par unité de
masse de l’échantillon, à 5% prêt (gEEP/g).
5.2.8 Analyse de la densité
La densité de la matière totale ou de la matière minérale des boues est mesurée sur
échantillons lyophilisés et broyés. Dans un appareil Ultra Pycnometer 1000, une masse
précise d’échantillon est introduite. De l’azote ou de l’hélium est introduit dans la chambre de
l’échantillon dont le volume est connu, jusqu’à atteindre la pression de 17 psi. La vanne
reliant la chambre de l’échantillon à la chambre d’expansion (de volume connu aussi) est
alors ouverte. La différence de pression alors mesurée est directement reliée au volume
occupé par l’échantillon. Le ratio entre la masse d’un échantillon (en g) et le volume qu’il
occupe (en ml) donne sa densité. Une sphère métallique de masse et volume connus,
utilisée à la place de l’échantillon, permet de calibrer l’appareil. La densité de la matière
organique est déduite des densités de la matière totale et de la matière minérale.
5.3
Fractionnement du compartiment aqueux
5.3.1 Fractionnement par filtration-ultrafiltration
Le critère physique choisi pour la caractérisation de la matière dissoute et colloïdale est sa
répartition en classes de taille. Quatre fractions sont définies : F1 concerne les molécules
comprises entre 0,1 et 1,2 µm, F2 entre 10 kDa et 0,1 µm, F3 entre 1 et 10 kDa et F4 en
dessous de 1 kDa. La DCO est choisie comme référence pour cette répartition en raison du
faible volume que cette analyse nécessite.
ADEME
31
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
La matière dissoute et colloïdale a subi une étape de filtration lors de sa séparation des
particules. La DCO initiale de l’échantillon (DCO<1,2µm) est mesurée. L’échantillon subit alors
une étape de filtration sous vide sur une membrane en PVDF de 0,1 µm de seuil de coupure
(Millipore), et la DCO du filtrat (DCO<0,1µm) est mesurée. Le filtrat subit ensuite une ultrafiltration sous 3 bars dans une cellule Amicon (Millipore) munie d’une membrane en cellulose
régénérée de 10 kDa de taille de pores (Millipore). Cet ultra-filtrat (DCO<10kDa) est de
nouveau ultra-filtré à 1 kDa de taille de pores pour donner la fraction représentée par
DCO<1kDa. F1, F2, F3 et F4 sont calculées comme suit :
F1 
F3 
DCO1, 2 µm  DCO0,1µm
DCO1, 2 µm
F2 
*100 ,
DCO10kDa  DCO1kDa
*100
DCO1, 2 µm
et
DCO0,1µm  DCO10kDa
DCO1, 2 µm
F4 
*100 ,
DCO1kDa
*100
DCO1, 2 µm
5.3.2 Fractionnement par couplage flux / force avec flux asymétrique
(Asymmetrical Flow Field-Flow Fractionation AF4)
La phase aqueuse des boues a été fractionnée par AF4 et chaque fraction caractérisée par
diffusion de lumière laser multiangulaire et UV (figure 9). Le système AF4 utilisé est un
Eclipse 3 de Wyatt Technology Europe et permet de séparer les objets d’un milieu selon une
large gamme de tailles (de 1 nm à quelques 10 µm). Il est équipé d’un détecteur miniDAWN
TREOS (Wyatt Technology Europe), détecteur à diffusion de lumière statique multi-angles (3
angles de mesure). L’AF4 est équipé d’un canal de séparation court Eclipse avec un
espaceur de 490 µm d’épaisseur et d’une membrane Pall Omega en polyethersulfone de
seuil de coupure 1 kDa. Le débit au détecteur est maintenu constant à 0,5ml/mn. Après
équilibre du débit, 50 µl d’échantillon (environ 300 mg/l de carbone organique dissous) est
injecté à un débit de 0.2 ml/min pendant 5min avec un flux de focus de 2 ml/min. Les
paramètres d’élution ont été optimisés en testant un cross-flow constant à 3,5 ml/mn et
différents gradients de cross-flow (de 3,5 à 0 ml/mn) linéaires ou exponentiels. Les
paramètres retenus pour le fractionnement des échantillons sont présentés sur la figure 9c
avec un cross-flow constant à 3,5 ml/mn pendant 15 mn suivi d’un gradient exponentiel
jusqu’à 0ml/mn en 26 mn.
Channel Flow and
Sample Injection
Focus
Flow
Channel
Flow Out
a
Cross Flow
ADEME
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b
Channel
f low
Membrane
X
Y
Frit
Crossf low (out)
c
Detector flow : 0,5 ml/mn
-
Focus flow : 2ml/mn
-
Inject flow: 0,2ml/mn
Elution
4
Elution Focus + cross-flow
injection constant
Cross-flow
3.5
3
2.5
Elution - gradient
exponentiel de
cross-flow
2
1.5
1
0.5
0
Rinçage:
élution +
injection
-0.5
0
10
20
30
40
50
60
70
Figure 9 : (a) Technologie des flux croisés. (b) Elution, x: petites particules; y: grosses particules. (c)
Paramètres retenus pour le fractionnement des échantillons.
5.4
Analyse fonctionnelle par fluorescence tridimensionnelle du compartiment
aqueux
Le spectrofluorimètre utilisé est un spectrofluorimètre Perkin Elmer LS55. Il possède une
lampe au xénon émettant un rayonnement pulsée entre 200 et 600 nm. Sur cet appareil, une
partie du rayonnement d’excitation est récupérée comme référence pour corriger la réponse
enregistrée par le détecteur en cas de variation énergétique de la source. La présence de
monochromateurs en excitation et émission permet l’acquisition de spectres d’excitation,
d’émission et 3D. Dans les cas de spectres 3D, les longueurs d’onde d’excitation varient de
200 à 600 nm avec des incréments de 10 ou 20 nm. La largeur de fente des
monochromateurs d’excitation et d’émission est fixée à 10 nm. La vitesse de balayage du
monochromateur d’émission est de 1200 nm/s. Les valeurs de fluorescence sont
enregistrées tous les 0,5 nm, entre 200 et 600 nm. Les signaux enregistrés par le détecteur
sont traités par un micro-ordinateur via le logiciel PerkinElmer FL WinLab 4.00.02.
Les échantillons de surnageant de boue sont dilués plusieurs fois (1/50, 1/100, 1/200) avec
de l’eau milliQ afin de déterminer l’intensité maximum d’émission pour différentes longueurs
d’onde d’excitation. La dilution de travail est choisie dans la zone linéaire de réponse, puis le
spectre 3D est acquis.
Très brièvement, la propriété de fluorescence de certaines molécules est liée à la présence
de fluorophores dans leur structure chimique. Ces fluorophores sont des entités chimiques
capables de passer d’un état d’énergie électronique fondamental à un état excité, par
ADEME
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Février 2013
absorption de photons d’énergie donnée. Ils restituent ensuite une partie de l’énergie
absorbée par émission de photons : c’est la fluorescence. La capacité de fluorescence est
liée à la présence d’électrons pi délocalisés : les doubles liaisons conjuguées, les noyaux
aromatiques et les hétérocycles insaturés caractérisent les fluorophores.
L’environnement électronique varie d’une molécule fluorescente à l’autre, du fait de leur
structure chimique primaire et de leur structure tri-dimensionnelle. Ainsi, pour un fluorophore
donné, l’énergie du rayonnement (liée à λex) capable de provoquer l’excitation est
caractéristique, tout comme l’énergie du rayonnement émis (liée à λem), qui dépend de la
part de l’énergie absorbée qui est ré-emise. Ainsi, le plan défini par λex et λem peut être
divisé en zones spécifiques de familles de fluorophores. Chen et al. (2003) ont ainsi défini 7
régions : les zones I à III, caractéristiques des protéines contenant respectivement les acides
aminés aromatiques (tyrosine et tryptophane), la zone IV spécifique des structures similaires
aux acides fulviques, les zones V et VI aux sous-produits protéiques microbiens et la zone
VII des fluorophores analogues aux acides humiques (Figure 10). Au sein de ces zones, les
massifs résultent d’une multitude de fluorophores, chacun contribuant en position et en
intensité selon sa structure et sa concentration.
Pour l’exploitation des spectres présentes en figure , les volumes de fluorescence de chaque
zone ont donc été déterminés, et normalisés par la concentration en carbone organique et
aussi par l’aire de la zone. Pour cela, les spectres sont transformés au format ASCII afin de
générer une image en noir et blanc grâce à un algorithme développé au LBE sous matlab.
Puis l’image est traitée avec le plugin Sync measure 3D du logiciel Image J afin d’obtenir
l’intensité de fluorescence en unité arbitraire (I), l’aire de chaque région (exprimé en volume)
de fluorescence et les coordonnées du barycentre. Les deux paramètres calculés sont :
Avec Ai,région, aire de chaque région et At l’aire totale, NI l’intensité normalisée.
ADEME
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Figure 10 : Coordonnées des régions de fluorescence obtenues grâce au logiciel Image J et les
groupes fonctionnels des régions selon Chen et al. (2003).
6. Extraction et quantification des perturbateurs endocriniens dans les différents
compartiments de la boue
Le dosage des HAP/PCB/NP est effectué dans les différentes fractions de la boue
(particulaire et aqueuse) ainsi que sur les échantillons totaux de boue.
Le dosage des HAP et NP, des échantillons totaux et de la phase particulaire, est réalisé au
Laboratoire de Biotechnologie de l’Environnement (LBE) par chromatographie liquide à
haute performance-HPLC couplée à un détecteur de fluorescence ; le dosage des PCB est
réalisé à l’INRA d’Arras par chromatographie gazeuse couplée à un détecteur à capture
d’électrons (GC-ECD) pour les réacteurs continus et par GC-ECD au Laboratoire de
Physico- et Toxico-Chimie de l'environnement (LPTC) de Bordeaux pour les réacteurs
batch ; le dosage des HAP dans la phase aqueuse est réalisé par micro-extraction sur phase
solide (SPME) suivi d’une analyse en chromatographie en phase gazeuse couplée à la
spectrométrie de masse (CG-MS) au Laboratoire de Physico- et Toxico-Chimie de
l'environnement (LPTC) de Bordeaux.
6.1
Extraction des PE de la boue totale et du compartiment particulaire
L’extraction des HAP/PCB/NP contenus dans les échantillons de boue totale ou du
particulaire de la boue se fait de manière conjointe sur des échantillons lyophilisés et broyés
(cf § 5.1). Elle est réalisée par extraction accélérée par solvant avec l’ « Accelerated solvent
ADEME
35
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Extractor » (ASE 200, Dionex) selon la méthodologie proposée par Trably et al. (2004). Cet
appareil accélère l’extraction des composés organiques en utilisant des solvants à des
températures élevées. Une pression est appliquée à la cellule (contenant l’échantillon) pour
maintenir le solvant chauffé à l’état liquide pendant l’extraction. Après chauffage, l’extrait est
rincé de la cellule de l’échantillon vers un flacon de récupération.
Dans des cellules comportant un filtre en fibre de verre (Whatman), surmonté de 1 g
d’alumine (rétention des composés polaires, Sigma Aldrich) et de 1 g d’hydromatrix
(dispersant et asséchant, Varian), 0,5 g d’échantillon sont introduits puis mélangés à
l’hydromatrix présent. Enfin, le volume restant est comblé d’hydromatrix.
Le solvant utilisé pour l’extraction est un mélange d’hexane et d’acétone à 50/50 volumique.
Une extraction consiste à chauffer la cellule remplie de ce mélange jusqu’à atteindre la
température de 120°C (au bout de 6 min), à maintenir cette température et une pression de
100 bars pendant 5 min, puis à purger 60 % du volume de solvant pour le remplacer par du
solvant neuf. L’opération est réitérée une seconde fois. Deux extractions sont opérées par
cellule, et l’extrait est récupéré dans deux vials séparés. L’évaporation du solvant est
réalisée à l’aide du Multivapor Buchi P12 couplé à un vacuum controller V-855. Dans ce
Multivapor, les échantillons sont agités, chauffés à 45°C, mis sous vide (500 mbars), et les
solvants sont condensés à 4°C. Le séchage complet des extraits est obtenu sous flux
d’azote. 2 ml d’acétonitrile sont introduits dans chaque vial de récupération. Après agitation
et repos, les deux volumes de 2 ml et 1 ml additionnel d’acétonitrile utilisé pour le rinçage
sont rassemblés dans un vial de reprise préalablement taré. Le volume exact de reprise est
déterminé par pesée. Les extraits sont conservés à -20°C.
6.2 Quantification des HAP
Les HAP extraits par ASE sont quantifiés par chromatographie liquide à haute performance.
Cette chaîne analytique est composée d’un passeur d’échantillons (Waters 717 plus
Autosampler), d’un système de pompes péristaltiques (Waters 600 Controller) et d’un
détecteur fluorimétrique (Waters 2475).
La colonne greffée en C18 (BakerbondTM PAH 16-Plus) est maintenue à température
constante de 25°C, à l’aide d’un four à effet Pelletier (CIL Cluzeau). Après l’injection de 20 µl
d’échantillon, le système de pompes permet de générer une première phase isocratique à
0,25 ml/min de mélange acétonitrile/eau (60/40 v/v) pendant 30 min, puis un gradient jusqu’à
atteindre une élution d’acétonitrile à 100 % au bout de 35 min, et le débit est finalement
augmenté à 0,5 ml/min pour la phase de rinçage sous acétonitrile/eau (60/40 v/v). Le
système de détection optimisé au laboratoire est programmé de façon à quantifier chaque
HAP à son couple longueur d’excitation (λex) / longueur d’onde d’émission (λem) optimal
(tableau 2).
Tableau 2 : Temps de rétention (min) des HAP par HPLC et couples de longueurs d’onde
d’excitation/émission (nm) utilisés pour leur détection par fluorescence.
HAP
tR
λex
λem
Flu
22
266
312
Phe
26
250
370
Ant
31
250
400
Fluora
36
280
430
Pyr
39
260
410
BaA
49
280
430
Chr
51
268
384
BbF
57
234
420
BkF
60
270
400
BaP
63
270
400
DBA
67
300
407
BghiP
69
300
407
Ind
71
300
500
L’étalonnage est réalisé par six niveaux de standard (10 à 1 000 µg/l) obtenus à partir de la
dilution d’une solution mère PAH Mix 9 (CIL Cluzeau) à 10 mg/l. Après chaque série
d’environ 10 échantillons, un standard est injecté de façon à vérifier la stabilité du signal au
fil des injections et à corriger les données.
ADEME
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Février 2013
6.3 Quantification des NP
Le NP extrait par ASE est analysé selon la méthode mise au point par Ahel et al. (2000). Le
dispositif de dosage du NP par HPLC est composé d’un passeur d’échantillon ASI 100
(Dionex), d’un système de pompe P580 (Dionex) et d’un détecteur fluorimétrique RF2000
(Dionex).
La colonne LiChroCART® Purospher® STAR NH2 est maintenue à 30°C à l’aide d’un four
(CIL Cluzeau). L’éluant utilisé est un mélange hexane/isopropanol (98,5/1,5 v/v), ce qui
nécessite un transfert des extraits (obtenus dans de l’acétonitrile) dans de l’hexane, par une
étape d’évaporation de 100 µl d’extrait et reprise dans un volume adéquat d’hexane.
L’élution s’effectue en mode isocratique à 2 ml/min, et le nonylphénol (t R : 13 min) est
détecté au couple λex/ λem de 228/305 nm.
A partir d’une solution standard commerciale à 10 mg/l (CIL Cluzeau), quatre niveaux de
concentrations sont préparés (0,5, 1, 2 et 4 mg/l). Le volume injecté est de 20 µl. Une série
d’injection de ces quatre niveaux est intercalée entre chaque série de 10 échantillons.
6.4 Quantification des PCB
Les PCB extraits par ASE des échantillons des réacteurs continus (5 l ou 400 ml) ont été
analysés à l’INRA d’Arras par chromatographie gazeuse (colonne DB5 : 30 m*0.25 mm*0.25
µm) couplée à un détecteur à capture d’électrons (GC-ECD). Pour ce faire, un volume des
extraits ACN (issus de l’ASE) est repris dans du dichlorométhane et est purifié (élimination
du soufre). La limite de détection est de 100 ng/kgMS. L’étalonnage est réalisé grâce à
l’injection de solution étalon (2 à 50 µg/l) et par ajout d’un étalon interne (PCB202 à 50 µg/l).
Pour les échantillons issus des réacteurs batch, la purification et l’analyse des PCB ont été
réalisées au Laboratoire de Physico- et Toxico-Chimie de l'environnement (LPTC) de
Bordeaux. La purification est réalisée sur micro-colonne de silice et cuivre activé. Après
conditionnement de la colonne avec 5 ml de n-pentane, un volume précis des extraits ACN
est déposé sur la colonne. L’élution se fait sous vide avec 3*5 ml d’un mélange npentane/dichlorométhane (90/10 v/v). Les 15 ml sont ensuite évaporés sous flux d’azote
jusqu’à 1 ml et 2 ml d’isooctane sont ensuite ajoutés. Le mélange est de nouveau évaporé
jusqu’à un volume de 300 µl.
HB/KLM : GC-EDC conditions ou référence
6.5
Analyse des HAP et des PCB dans le compartiment aqueux
Le dosage des HAP et des PCB est aussi réalisé dans la phase aqueuse. Dans le cas des
HAP, ce dosage permet de dissocier les HAP libres de ceux sorbés sur le compartiment
dissout/colloidal. Le dosage des HAP et des PCB dans la phase aqueuse est réalisé par
SPME suivi d’une analyse en GC-MS et GC-ECD, respectivement, au LPTC de Bordeaux.
Les analyses SPME sont réalisées sur 9 ml d'échantillon de phase aqueuse de boue, avec
des fibres Supelco (Bellefonte, USA) recouvertes de polydiméthylsiloxane (PDMS) et
polydiméthylsiloxane-divinylbenzène (PDMS-DVB) (Figure 11). Après immersion de la fibre
dans l'échantillon, celle-ci est introduite dans l’injecteur de la GC où les composés sont alors
immédiatement désorbés. Les analyses sont effectuées automatiquement avec un
CombiPAL (CTC Analytics, Zwingen, Suisse).
ADEME
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Figure 11: Système SPME (Cea-Barcia, 2012).
La quantification des HAP se fait grâce à un GC (Agilent 6890) équipé d'un détecteur sélectif
de masse (modèle 5972) avec une énergie d'ionisation de 70eV. La colonne utilisée est une
HP-5MS ((5%-phényl)-méthylpolysiloxane, 30 m x 0,25 mm id, film de 0,25 pm; Agilent
Technologies). L'injection d'échantillons SPME est réalisée en mode pulse splitless (pulse
d’une minute à 30 psi, puis application d’un débit de purge 55 ml/min de pendant 2 min et
enfin l'économiseur de gaz est fixé à un flux de 20 ml/min pendant 15 minutes) et la
température d'entrée est de 250°C. L’hélium est utilisé comme gaz vecteur à un débit
constant de 1,3 ml/min et une vitesse linéaire de 42 cm/s. La température de la colonne est
maintenue pendant 2 min à 60°C, puis différents paliers de température sont atteints. Le
premier palier est à 150°C (rampe de 20°C par minute), le second à 250°C à (rampe de
15°C par minute) et enfin le troisième est à 310°C (rampe de 10°C par minute) et cette
température finale est enfin maintenue pendant 3 min. La GC-MS est utilisée suivant le
mode d’acquisition SIM (Selected Mode Aquisition).
La mesure des concentrations en HAP se fait en utilisant les correspondants HAP-deutérés
et le naphtalène-d8 comme étalons internes de la quantité de HAP dans la phase aqueuse et
sous état libre, respectivement.
A partir d’échantillon d’eau milliQ et de surnageant de boue, dopés à des concentrations
connues en HAP et en leur correspondants deutérés, le facteur de réponse Ki de chaque
HAP est calculé. Pour la détermination des Ki de la fraction libre, le naphtalène-d8 a été
choisi comme étalon interne (Hawthorne et al. 2005), car sa réponse est la même avec ou
sans matière dissoute et colloïdale (DCM).
La méthode de calcul des concentrations en HAP dans la phase aqueuse et la fraction libre
est validée en déterminant les valeurs de Ki et Ci (rendement de quantification) dans de l'eau
milliQ et dans des échantillons phase aqueuse (DCM) de boue non dopée en utilisant les
équations suivantes :
md= Ad* Kd
mi= Ai* K
Ki=Kd/K= (Ai/Ad)*(md/mi)
- md = quantité du composé (deutéré ou naphtalène-d8) étalon interne rajouté dans
l’échantillon.
- mi = quantité du composé (i) présent dans l’échantillon.
- Ad = aire du pic chromatographique correspondant au composé (deutéré ou
naphtalène-d8) étalon interne
- A i = aire du pic chromatographique correspondant au composé (i) à doser
- (Kd/K) = Ki coefficient de réponse du composé (i) quantifié par rapport au composé
(deutéré ou naphtalène-d8).
ADEME
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Février 2013
Six échantillons (trois d’eau milliQ et 3 de DCM) de 9 ml sont dopés à des concentrations
connues des 13 HAP étudiés, avec leurs correspondants HAP-deutéré. Les échantillons sont
analysés par SPME-GC-MS, et le Ki est déterminé pour l'eau milliQ et pour les échantillons
de DCM. Puis, les Ci des échantillons DCM sont calculés en utilisant les valeurs de Ki
obtenues dans de l'eau milliQ, ainsi il est possible de connaître le pouvoir d’interférence de la
matrice sur la quantification des HAP en phase aqueuse. Si les valeurs de Ci pour chaque
HAP sont proches de 100%, la méthodologie est validée.
Au vu des résultats présentés dans le tableau 3, la méthode de calcul n’a pas d’influence
sur la concentration totale de la phase aqueuse, par contre, cette méthode a un impact sur le
calcul des concentrations dans la phase libre. Calculer les concentrations dans le
surnageant à partir des Ki obtenus sur l’eau milliQ entraine des erreurs d’autant plus grandes
que les molécules sont hydrophobes. Nous avons donc choisi de calculer les concentrations
dans nos échantillons en utilisant les Ki obtenus dans le surnageant de boue.
Les standards utilisés pour mesurer la concentration des HAP, ont donc été réalisés avec les
surnageants d’une boue qui ont été dopés. Les Ki sont mesurés au début, régulièrement
entre les échantillons et à la fin de chaque séquence SPME-GC-MS afin d’être sûr qu’ils
n’évoluent pas au cours de l’analyse. Dans chaque 9 ml d’échantillon, 50 µl de la solution
d’étalon interne (mélange de chaque HAP deutéré ou solution de naphtalène-d8 à une
concentration de 200 ng/g solvant) est ajouté.
La quantification des PCB sur la phase aqueuse se fait grâce à un GC couplé à un
détecteur à capture d’électron. La mesure des concentrations en PCB se fait en utilisant des
étalons internes (tableau 4). Ceux-ci ont été choisis suffisamment proches en masse molaire
des congénères à analyser et de même que pour les HAP, la méthodologie a été validée en
utilisant de l’eau milliQ ou du surnageant de boue auxquels ont été ajoutés les 10 étalons
internes et les 7 PCB afin de déterminer les facteurs de réponse (Ki) et les rendements de
quantification (Ci). Le tableau montre la composition de ces échantillons standards avec les
7 PCB recherchés et les 10 standards internes. Dans les séries analysées, ces échantillons
standards sont répartis comme suit : 2 au début, 2 à chaque 8 échantillons et 2 à la fin afin
de déterminer les Ki et Ci au cours de la série d’analyse. Seuls les PCB de la phase
aqueuse totale sont quantifiés.
Tableau 3 : Rendements de quantification des HAP en SPME obtenus suivant les différentes
méthodes de calcul.
Ci, Rendements de quantification en %
Phase aqueuse
Phase libre
Composés
aqu/aqu
Phénanthrène
103
100
118
102
100
110
Anthracène
106
102
112
108
102
128
Fluorène
106
101
121
107
101
125
Fluoranthène
103
101
101
87
101
66
Pyrène
99
99
98
84
99
58
Benzo(A)Anthracène
104
101
94
80
101
28
Chrysène
103
102
98
78
102
25
Benzo(b)Fluoranthène
105
100
85
85
100
9
ADEME
DCM/DCM DCM/aqu
aqu/aqu DCM/DCM DCM/aqu
39
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Benzo(k)Fluoranthène
104
102
96
88
102
9
Benzo(A)Pyrène
104
111
100
89
111
8
Indéno(1,2,3,c,d)Pyrène
111
93
103
110
93
2
Dibenzo(a,h)Aanthracène
109
115
119
105
115
3
Benzo(g,h,i)perylèneP
108
79
104
111
79
3
aqu/aqu : rendement calculé dans l’eau milliQ dopée par rapport à l’ensemble des composé deutérés (ou au
naphthalène d8 pour la phase libre), avec les Ki calculé dans l’eau milliQ
DCM/DCM : rendement calculé dans le surnageant dopé par rapport à l’ensemble des composé deutérés
(ou au naphthalène d8 pour la phase libre), avec les Ki calculé dans le surnageant.
DCM/aqu : rendement calculé dans le surnageant dopé par rapport à l’ensemble des composé deutérés (ou
au naphthalène d8 pour la phase libre), avec les Ki calculés dans l’eau milliQ
Tableau 4 : Composition des échantillons standards PCB (eau ou surnageant).
PCB
recherchés
PCB 28
PCB 52
PCB 101
PCB 118
PCB 153
PCB 138
PCB 180
Concentration en PCB
(ng/g solution)
11.5
12.3
9.7
10.5
7.2
7.3
13.2
Standards
Internes
PCB 20
PCB 30
PCB 103
PCB 155
PCB 79
PCB 77
PCB 87
PCB 128
PCB 159
PCB 198
Concentration des standards
(ng/g solution)
22.59
7.36
6.43
6.72
18.64
22.20
21.05
21.61
15.01
8.35
7. L’analyse des communautés microbiennes
Ces analyses ont été réalisées au Laboratoire de Biotechnologie de l’Environnement.
Dans un premier temps, une vision globale de l’influence des communautés microbiennes
est obtenue par amplification PCR de la région V3 de la sous unité ribosomale de l’ADN 16S,
suivi d’une méthode d’empreinte moléculaire par CE-SSCP sur des ADN génomiques totaux.
Cette première analyse permet d’obtenir la structure, la diversité et la dynamique des
populations bactériennes et archées. Cette analyse est complétée par des PCR quantitatives
permettant d’estimer les proportions de bactéries et d’archées et de suivre leur évolution.
Ces données de structure et de diversité ont été complétées par des données de
pyroséquençage sur les régions V4-V5 de l’ADNr 16S.
Enfin, une étude SIP (Stable Isotope Probing) basée sur l’utilisation de molécules marquées
au carbone 13 a été menée afin d’identifier de façon spécifique les communautés impliquées
dans la dégradation des PE marqués.
7.1
Préparation et conservation des échantillons
Un millilitre de boue est prélevé puis centrifugé à 13400 rpm pendant 10 min et le
surnageant est éliminé. Le culot est suspendu dans 500 µl d’un mélange composé d’1 ml de
tampon guanidine thiocyanate 4 M Tris-Cl pH 7,5 0,1 M et de 300 µl de N-lauryl sarcosine 10
% (N-LS).
7.2
ADEME
Extraction de l’ADN total
40
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Le but de l’extraction d’ADN est d'isoler l'ADN chromosomique des microorganismes
présents dans l’échantillon en appliquant différentes méthodes de lyses (thermique,
chimique et mécanique) sans le dénaturer. Cette procédure se divise en 4 étapes : lyse des
cellules, lavage du support permettant la lyse des cellules, élimination des impuretés et
précipitation de l’ADN, et enfin purification de l’ADN.
7.2.1 La lyse cellulaire
A l’échantillon encore congelé sont ajoutés 500 μl de LS 5%-tampon phosphate pH 8 0.1 M.
Après 1 h d’incubation à 70°C l’échantillon est placé dans de la glace. 500 μl de billes de
zirconium stériles de 0,1 mm de diamètre sont ajoutées avant de soumettre l’échantillon à
une agitation de 10 min à vitesse maximale par un vribrobroyeur. 15 mg de PVPP
(polyvinylpolypyrrolidone) sont ajoutés puis l’échantillon est vortexé 30 s avant d’être
centrifugé à 13400 rpm pendant 3 min. Le surnageant résultant de cette centrifugation est
récupéré dans un tube de 2 ml.
7.2.2 Le lavage
Le culot de centrifugation est remis en suspension dans 500 μl de TENP (Tris-Cl pH8 50
mM, EDTA pH8 20 mM, NaCl 100 mM, PVPP polyvinylpolypyrrolidone 1%) avant d’être
centrifugé à 13400 rpm pendant 3 min. Le surnageant est ensuite récupéré et additionné
dans le tube de 2 ml à celui précédemment obtenu. Cette étape est réitérée sur le culot
encore deux fois, puis une dernière centrifugation à 13400 rpm de 3 min est effectuée sur le
tube contenant les surnageants pour éliminer les matières en suspensions restantes.
7.2.3 L’élimination des impuretés
Le surnageant est réparti dans 2 tubes de 2 ml. Un volume d'isopropanol est ajouté dans
chaque tube avant de l’agiter doucement en le balançant afin d'obtenir une pelote d'ADN
puis de le laisser 10 min à température ambiante. L’échantillon est ensuite centrifugé 13400
rpm pendant 15 min et les 2 culots sont récupérés dans 100 μl d'eau et réunis. Après avoir
ajouté 20 μl de RNAse à 1 mg/ml, l’échantillon est vortexé 15 s puis incubé 10 min à 37°C
7.2.4 La purification
Pour cette étape, le matériel du kit commercial kit QIAamp DNA Mini Kit est utilisé. Un
volume de 200 μl de tampon AL est ajouté à l’échantillon qui est ensuite vortexé 15 s puis
incubé 10 min à 70°C. Après incubation, 200 μl d'éthanol absolu pour biologie moléculaire
sont ajoutés à l’échantillon qui est à nouveau vortexé 15 s. Le contenu du tube est alors
transvasé sur la colonne QIAamp avant une centrifugation à 13400 rpm d’1 min. L’ADN se
fixe alors sur la colonne. Le filtrat est éliminé et 500 μl de tampon AW1 sont ajoutés avant
une centrifugation à 13400 rpm d’1min. L’étape ci-dessus est réitérée avec le tampon AW2.
Après élimination du filtrat, une nouvelle centrifugation à 13400 rpm d’1min est appliquée
pour éliminer toute contamination avec le tampon.
La colonne est ensuite transférée dans un tube de 1,5 ml et 50 μl d’eau ppi sont ajoutés puis
l’échantillon est laissé à incuber 5 min à température ambiante avant d’être centrifugé une
dernière fois à 13400 rpm pendant 1 min.
Dans un premier temps, avant congélation et conservation de l’extrait obtenu, le bon
fonctionnement de l’extraction est vérifié par électrophorèse sur un gel d’agarose à 0,7 %
contenant du bromure d'éthidium (BET). Le résultat de la migration est visualisé par
fluorescence UV.
Dans un deuxième temps, dans un souci de limiter l’exposition des agents à des produits
CMR, l’emploi du BET a été supprimé du laboratoire. La pureté et la quantité d’ADN extrait
sont dès lors vérifiées par mesure des absorbances à 260 et 280 nm à l’aide d’un
ADEME
41
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Février 2013
spectromètre Infinite M 200 Nanoquant (Tecan). Le ratio DO260nm/DO280nm permet de
vérifier la pureté de l’ADN et doit être compris entre 1,8 et 2.
7.3
Amplification de l’ADN par PCR
La PCR (Polymerase Chain Reaction) est une méthode permettant l’amplification in vitro
d’un fragment d’ADN grâce à l’utilisation d’amorces spécifiques, d’une polymérase et des
désoxyribonucléotides (dNTPs). Chaque cycle de température permet une dénaturation du
brin d’ADN devenant monocaténaire, puis une hybridation des amorces et fixation de la
polymérase, et enfin une élongation (copie) du brin ciblé par cette dernière.
7.3.1 Amplification de la région V3 de l’ADNr 16S
Dans le but d’analyser la structure des communautés bactérienne et archées, la région V3
de l’ADNr 16S est amplifiée par PCR. Les bactéries sont ciblées spécifiquement par le
couple d’amorce W49 (amorce spécifique des bactéries) et W104 (amorce universelle). Les
archées quant à elles sont ciblées spécifiquement par les amorces W274 et W275 (tableau
5). Les amorces W104 et W275 sont marquées par un fluorochrome pour permettre la
détection, par le laser de la CE-SSCP, du fragment amplifié.
L’amplification des séquences bactériennes est réalisée dans 50 µl de mélange PCR
contenant 5 µl de tampon 10x Pfu Turbo, 0,2 mM de dNTP, 8mM de chaque amorce, 1,25 U
d’ADN polymérase Pfu Turbo (Stratagene, La Jolla, CA) et 1 µl d’ADN (dilué si nécessaire),
complétés avec de l’eau ppi pour obtenir le volume réactionnel souhaité. Les cycles PCR
sont réalisés dans un Mastercycler Epgradiant S (Eppendorf). Le programme de température
appliqué est de 94°C pendant 2 min (dénaturation initiale), 25 cycles de 30 s à 94°C
(dénaturation), 30 s à 61°C (hybridation), et 30 s à 72°C (élongation), suivis finalement de 10
min d’élongation à 72°C.
L’amplification des séquences archéennes est réalisée dans 25 µl de mélange PCR
contenant 2,5 µl de tampon 10x Pfu Turbo, 0,2 mM de dNTP, 8 nM de chaque amorce,
0,625 U d’ADN polymérase Pfu Turbo (Stratagene, La Jolla, CA), 1 µl d’ADN (dilué si
nécessaire), complétés avec de l’eau ppi pour obtenir le volume réactionnel souhaité. Les
cycles PCR sont réalisés dans un Mastercycler Epgradiant S (Eppendorf). Le programme de
température appliqué est de 94°C pendant 2 min (dénaturation initiale), 30 cycles de 30 s à
94°C (dénaturation), 30 s à 65°C (hybridation), et 30 s à 72°C (élongation), suivis finalement
de 10 min d’élongation à 72°C.
7.3.2 Amplification du gène de la benzylsuccinate synthase
Pour amplifier les versions du gène bssA contenues dans les extraits d’ADN, des amorces
spécifique W243 et W244 (tableau 5), dessinées au laboratoire (Barret, 2009), sont utilisées.
L’amplification des versions du gène bssA présent dans les microorganismes de nos
échantillons est réalisée dans 50 µL de mélange PCR contenant 5 µL de tampon 10x Pfu
Turbo, 0,2 mM de dNTP, 8 nM de chaque amorce, 1,25 U d’ADN polymérase Pfu Turbo
(Stratagene, La Jolla, CA) et 1 µL d’ADN (dilué si nécessaire), complétés avec de l’eau ppi
pour obtenir le volume réactionnel souhaité. Les cycles PCR sont réalisés dans un
Mastercycler Epgradiant S (Eppendorf). Le programme de température appliqué est de 94°C
pendant 2 min (dénaturation initiale), 30 cycles de 30 s à 94°C (dénaturation), 30 s à 51°C
(hybridation), et 30 s à 72°C (élongation), suivis finalement de 10 min d’élongation à 72°C.
Le témoin positif utilisé pour cette amplifaction est de l’ADN d’Azoarcus sp. CIB.
ADEME
42
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Tableau 5 : Amorces utilisées lors de l'étude des différentes communautés microbiennes.
Amorce
PCR/
PCR-Q
Séquence (5’ – 3’)
W49F
PCR
AGGTCCAGACTCCTACGGG
W104R
PCR
TTACCGCGGCTGCTGGCAC
W274F
PCR
CCCTACGGGGCGCAGCAG
W275R
PCR
TTACCGCGGCGGCTG
W243F
PCR/
PCR-Q
AARTGGCAAYGACGACGA
(Barret 2009)
W244R
PCR/
PCR-Q
TTCTGGTTTTTCTGCACTTT
(Barret 2009)
BAC338F
PCR-Q
ACTCCTACGGGAGGCAG
(Yu et al. 2005)
BAC805R
PCR-Q
GACTACCAGGGTATCTAATCC
(Yu et al. 2005)
BAC16F
PCR-Q
TGCCAGCAGCCGCGGTAATAC
ARC787F
PCR-Q
ATTAGATACCCSBGTAGTCC
(Yu et al. 2005)
ARC1059R
PCR-Q
GCCATGCACCWCCTCT
(Yu et al. 2005)
ARC915F
PCR-Q
AGGAATTGGCGGGGGAGCAC
Fluorochrome
Référence
(Zumstein et al.
2000)
3’- 6 - FAM
3’- 6 - FAM
(Zumstein et al.
2000)
(Braun
2011)
et
al.
(Braun
2011)
et
al.
5’-Yakima yellow
(Yu et al. 2005)
3’-TAMRA
5’-6-FAM
3’-TAMRA
(Yu et al. 2005)
7.3.3 Vérification de l’efficacité d’amplification
Après avoir stoppé toutes les réactions PCR en maintenant les échantillons à 4°C, l’efficacité
des différentes PCR est vérifiée par électrophorèse. L’électrophorèse permet de séparer les
brins d’ADN en fonction de leur poids moléculaire. Les acides nucléiques, chargés
négativement, migrent électrophorétiquement à travers la matrice d’un gel sous l’effet d’un
champ électrique. Plus le pourcentage d’agarose du gel est important, plus le maillage est
serré. Plus le poids moléculaire des molécules est faible, plus elles migrent rapidement.
Dans un premier temps, l’efficacité d’amplification PCR est vérifiée par électrophorèse sur un
gel d’agarose à 2 % contenant du bromure d'éthidium (BET). Le résultat de la migration est
visualisé par fluorescence UV. Dans un deuxième temps, toujours dans le but de limiter
l’utilisation de produit CMR comme le BET, l’efficacité de l’amplification par PCR est vérifiée
à l’aide du Bioanalizer 2100 (Agilent). Cet appareil permet une analyse des produits PCR par
électrophorèse sur des puces en microfluidique. L’ajout d’un marqueur fluorescent permet de
détecter les fragments d’ADN par fluorescence aux UV induite par un laser.
ADEME
43
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
7.4
La CE-SSCP
Polymorphism)
(Capillary
Electrophoresis-Single
Strand
Février 2013
Conformation
La CE-SSCP est une technique d’empreinte moléculaire qui permet de visualiser rapidement
une image représentative de la communauté microbienne présente dans un échantillon.
Cette méthode sépare les fragments d’ADN simple brin de même taille mais de séquence
nucléotidique différente. Les fragments d’ADN amplifiés à l’aide d’amorces marquée lors de
la PCR, sont préalablement dénaturés. Chaque fragment adopte ensuite une structure
secondaire spécifique de sa séquence qui lui confère une vitesse de migration précise. Lors
de la migration le brin marqué est détecté par un laser et visualisé sous forme de pic.
Chaque espèce est représentée par un pic. La surface des pics est proportionnelle à la
quantité d’ADN détecté et correspond donc à l’abondance relative d’une espèce au sein de
l’écosystème (Delbès et al. 2001).
1 μl de chaque produit PCR amplifié à l’aide du couple d’amorces W49/W104-marqué en 5’
(fluorophore FAM) est dilué dans de l’eau ppi de manière à ce que l’intensité de fluorescence
émise par l’échantillon ne dépasse pas la limite de détection du laser.
1 µl de chacune de ces dilutions est ensuite déposé dans une plaque 96 puits auquel est
ajouté 18,8 μl de formamide et 0,2 μl de standard interne GeneScan ROX (Applied
Biosystems). Ce dernier permet d’attribuer à chaque fragment une position de migration
spécifique de sa structure secondaire, donc de sa séquence. Les échantillons sont ensuite
dénaturés par chauffage (5 min à 95 °C), puis refroidis rapidement (10 min dans de la glace).
L’électrophorèse est réalisée en séquenceur par l’ABI Prism 3130 genetic analyser (Applied
Biosystems). Les fragments d’ADNr 16S migrent dans un capillaire (47cm×50μm) rempli à
5,6% d’un polymèred’analyse de conformation (GeneScan polymer, Applied Biosystems).
Chaque amorce marquée par un fluorophore est détectée par le laser de l’appareil, qui
transcrit le signal sous la forme d’un pic où chaque pic correspond à un fragment d’ADN. La
migration de chaque échantillon est réalisée à 32°C pendant 30min sous une intensité de
courant de 12kV.
Chaque profil CE-SSCP est aligné avec un standard interne ROX pour corriger toute
modification de la mobilité électrophorétique entre les différents passages. La somme des
surfaces des pics a été normalisée avant l'analyse statistique. La complexité des
communautés microbiennes a été estimée en utilisant l’indice de Simpson (D) à partir des
profils (Simpson 1949). Cet indice est calculé à partir du nombre de pic et de leur abondance
relative (air sous les pics) grâce à la formule suivante :
D = -ln(∑(aire des pics)2).
Ces étapes de traitement des profils ont été réalisées à l’aide du package StatFingerprints
(Michelland et al. 2009) sur la version 2.11.1 de R (R. Develpment Core Team 2010).
7.5
Quantification des communautés par PCR quantitative
La PCR quantitative permet de suivre en continu (« en temps réel ») le processus
d’amplification PCR en détectant la fluorescence émise par le produit PCR formé. La
quantification se fait en comparant un échantillon de référence à un échantillon à tester. En
utilisant comme référence un échantillon où le nombre de molécule est connu, une
quantification absolue de l’échantillon testé pourra être obtenue en nombre de copies.
La réaction de PCR quantitative (PCR-Q) de quantification des bactéries et des archées est
réalisée dans des plaques RT-PCR 96 puits (Eppendorf) par un Mastercycler ep realplex2S
(Eppendorf). L’amplification est réalisée dans 25 µl de mélange PCR contenant 12,5 µl
d’Express qPCR Supermix pré-mélangé à du ROX (Invitrogen), 5 µl d’ADN dilué, 10 nM de
chaque amorce, et 8 nM de sonde TaqMan, complétés avec de l’eau pure pour obtenir le
ADEME
44
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
volume réactionnel souhaité. Le programme de température appliqué est de 95°C pendant 2
min, suivi de 40 cycles de 15 s à 95°C, 1 min à 60°C. Pour chaque essai, une courbe de
référence est générée en utilisant 10 degrés de dilution d’un produit PCR provenant de
clones connus. Les clones DF10 et LC103 sont utilisés comme standard de référence pour
les bactéries et les archées, respectivement. Pour chaque échantillon, trois dilutions sont
testées.
7.6
Pyroséquençage
Cette méthode consiste à séquencer un ADN monobrin par synthèse du brin
complémentaire, base par base, en détectant à chaque étape le nucléotide qui a été ajouté.
Des échantillons d’ADN totaux ont été envoyés à la société Molecular Research Laboratory
(Texas, USA). Le séquençage des régions V4-V5 de l’ADNr 16S des bactéries et des
archées a été réalisé sur GS-FLX 454 Titanium de Roche et les analyses bioinformatiques
standard (contrôles qualité du process, qualité des séquences, groupement en OTU) ont été
réalisées par cette même société.
7.7
Etude de la dégradation des PE par isotopie au carbone 13
7.7.1 Maintien des communautés microbiennes adaptées aux conditions de
digestion et de dégradation des PE
A partir de deux des triplicats des réacteurs continus (400 ml) inoculés par les
microorganismes extraits de la boue, un réacteur semi continu de 800 ml est démarré en
conditions stériles. Le mélange est assuré par un agitateur magnétique. Le réacteur est un
réacteur à double enveloppe qui permet la régulation de la température à 35°C. Les pompes
d’alimentation et de soutirage sont programmées de façon à opérer 4 cycles de soutiragealimentation par jour. Le volume pompé par cycle est calculé par pesée hebdomadaire des
réservoirs d’alimentation et de soutirage. Le temps de fonctionnement des pompes est ajusté
à partir de ce calcul, de façon à appliquer un TSH de 20 jours. 80 cycles se succèdent au
cours d’un TSH ; ce mode semi-continu est donc assimilable à un mode continu.
La boue d’alimentation (stérile et dopée) est continuellement agitée par un agitateur
magnétique. Tout comme la boue de soutirage, elle est maintenue dans une enceinte
réfrigérée pour limiter leur évolution. Un septum placé sur la sortie gaz permet le
prélèvement pour une analyse de la composition du biogaz. La sortie gaz du réacteur est
reliée à un système d’éprouvette renversée permettant la mesure du biogaz produit.
7.7.2 Etude en microcosmes
L’étude en microcosme est réalisée dans l’unité de recherche « Hydrosystèmes et
bioprocédés » de l’IRSTEA d’Antony.
La boue de sortie du réacteur précédemment décrit est utilisée pour des tests isotopiques en
microcosme. Le principe est de suivre la dégradation d’un substrat marqué isotopiquement
avec du Carbone (lourd) 13. Des analyses en GC-C-IRMS permettent de détecter un
enrichissement du biogaz produit en 13C, preuve d’une minéralisation du substrat étudié.
Compte tenu du coût des molécules marquées au 13C, il n’est pas envisageable d’effectuer
ses tests sur un cocktail de molécules. Le phénanthrène est retenu comme substrat d’étude.
Les concentrations en phénanthrène marqué au 13C et le volume de boue à incorporer dans
le microcosme, sont calculées de manière à produire suffisamment de biogaz isotopique 13C
pour être détecté par les méthodes de mesure employées et être dans une fourchette de
détection au-dessus des enrichissements naturels, sans pour autant apporter par la
biomasse une quantité trop importante de Carbone 12 qui diluerait le carbone 13 (Tableau
6).
ADEME
45
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Tableau 6 : Conditions expérimentales des tests isotopiques.
Concentration
en Volume
de Facteur de dilution de la
phénanthrène
boue
boue
Condition 1
0,1 mg/l
0,5 ml
100
Condition 2
1 mg/l
5 ml
10
Condition 3
3 mg/l
5 ml
10
Afin de réaliser le dopage en phénanthrène marqué au 13C, une solution concentrée est
préparée. Le phénanthrène (dont tous les carbones sont marqués au 13C) commercialisé
sous forme de poudre (Cortecnet) est dissout dans de l’éthanol. La solution obtenue a une
concentration calculée de 1,4 g/l. Un volume de solution concentrée (correspondant aux
conditions expérimentales choisies (tableau 6) est introduit à l’aide d’une seringue dans une
fiole pénicilline pyrolysée et stérilisée de 50 ml. Après évaporation du solvant, 5 ou 0,5 ml de
boue de sortie de réacteur sont ajoutées ainsi que du surnageant de cette même boue de
sortie pour obtenir un volume d’essai de 50 ml. 2 répliqua sont réalisés par condition. Une
troisième fiole est réalisée dans les mêmes conditions mais la solution de dopage utilisée
n’est pas marquée. Enfin une quatrième fiole, dite abiotique, est préparée pour chaque
condition selon la même procédure en ajoutant de l’HgCl2 (méthode de stérilisation
couramment utilisée pour stériliser des échantillons de sol) dans la solution à une
concentration finale de 1,5 g/l. Les fioles sont ensuite fermées à l’aide d’un septum et
scellées par une bague métallique. L’anaérobiose est obtenue en remplaçant l’air présent
dans le ciel gazeux des microcosmes par de l’azote à l’aide d’une rampe à vide réalisée à la
demande de l’IRSTEA par la société Swagelo. Les incubations sont réalisées dans une
enceinte thermostatée à 35°C.
Condition
La composition isotopique du CH4 et du CO2 est analysée à l’aide d’un couplage en GC
(Trace GC Ultra, Thermo Electron Corporation), un four de combustion (C) (Finnigan GC
combustion II, Thermo Electron Corporation) et un spectromètre de masse isotopique
(IRMS). 100 µl d’échantillon gazeux sont injectés dans l’injecteur grâce à une seringue à
gaz. Le CH4 et le CO2 sont séparés par une colonne (Paraplot). L’injecteur est utilisé en
mode split avec un ratio de 20 et est maintenu à une température de 150°C. Le four de la
GC est programmé pour maintenir la température à 35° pendant 3 min, avant un montée en
température (rampe de 60°C/min) jusqu’à un palier de 180°C, maintenu pendant 24 s.
L’hélium est utilisé comme gaz vecteur à un flux de 1,8 ml/min. Les gaz traversent le four
capillaire de combustion de l’appareil (tube de quartz rempli d’oxyde de cuivre porté à 940°C,
où ils sont transformés en CO2). D’autres composés comme de l’eau ou des oxydes d’azote
peuvent également être formés. Les oxydes d’azote sont réduits en N2 en traversant un four
capillaire rempli de cuivre porté à 600°C. L’eau quant à elle, est piégée par une membrane
hydroscopique. Le CO2, produit de la combustion de chaque composé carboné ainsi purifié,
est introduit dans la source de l’IRMS, où il est chargé positivement. Les ions CO2+ sont
accélérés et projetés sous forme d’un faisceau très fin dans un tube soumis à un champ
magnétique. Les différentes formes isotopiques sont dérivées sur des trajectoires circulaires
en fonction de leur masse. Trois collecteurs distincts (3 cages de Faraday) permettent leur
détection. Les particules sont de masse m/z 44, 45 et 46. Des signaux électriques sont
générés et dépendent de la quantité d’ions collectés. L’amplificateur, relié aux collecteurs,
permet d’amplifier ces signaux qui sont ensuite transmis à un ordinateur. Là, ces données
sont analysées et les rapports isotopiques 45/44 et 46/45 sont déterminés et comparés à
ceux d’un gaz de référence introduit en début et fin d’analyse. Ces données permettent de
calculer le rapport 13C/12C de chaque composé du mélange. La répétabilité de la mesure est
testée en effectuant chaque analyse 3 fois.
ADEME
46
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
8. L’évaluation des activités « perturbateur endocrinien »
L’activité « perturbateurs endocriniens » est évaluée grâce à des bioessais in vitro sur
différentes lignées cellulaires. Ces expériences sont réalisées à l’unité « Écotoxicologie in
vitro et in vivo » de l’INERIS à Verneuil-en-Halatte. Les lignées cellulaires utilisées sont la
lignée MELN, la lignée MAD-kb2 et la lignée PLHC1 qui permettent d’évaluer les activités
œstrogénique, androgénique et /ou glucocorticoïde et enfin dioxin-like et HAP-like,
respectivement.
Les tests cellulaires sont réalisés sur des extraits d’échantillon provenant de boue totale, de
phase particulaire et aqueuse. Les extraits sur la boue totale et le particulaire sont obtenus à
partir des échantillons lyophilisés. L’extraction est réalisée à l’ASE. Le solvant utilisé pour
l’extraction est un mélange volumique de dichlorométhane et de méthanol à 50/50 et les
extraits sont repris dans du méthanol. Les échantillons de surnageant subissent une
extraction liquide-liquide avec 100% de dichlorométhane. Avant d’effectuer les tests
cellulaires, les échantillons sont repris dans du diméthylsulfoxyde (DMSO). Le mode
opératoire des bioessais est divisé en trois grandes étapes, l’exposition des cellules à
l’échantillon à analyser, la mesure de l’intensité de luminescence ou de fluorescence induite
par l’activation des récepteurs et enfin le traitement des résultats permettant de calculer
l’activité de l’échantillon testé (Figure 12).
Figure 12 : Analyses en bioessais in vitro.
8.1
Génération de lignées cellulaires
8.1.1 La lignée cellulaire MELN
La lignée cellulaire MELN, fournie par Patrick Balaguer de l’Institut de Recherche en
Cancérologie de Montpellier (INSERM U896), dérive d’une lignée cellulaire humaine de
cancer du sein (lignée MCF-7) qui exprime de manière endogène le récepteur aux
œstrogènes ERα. Cette lignée a été produite en transfectant de façon stable le gène codant
pour la luciférase placé sous le contrôle d’un élément de réponse aux œstrogènes (ERE) et
du promoteur du gène de la β-Globine (Balaguer et al. 1999).
8.1.2 La lignée cellulaire MDA-kb2
La lignée cellulaire MDA-kb2, fournie par l’American Tissue Cell Collection (ATCC, N°
CRL2713), dérive d’une lignée de cellules épithéliales humaines de cancer du sein (lignée
MDA-MB-453) qui exprime de manière endogène le récepteur des androgènes (AR). Elle
exprime également le récepteur des glucocorticoïdes (GR) alors que les récepteurs de la
progestérone (PR) et des œstrogènes (ER) ne sont pas ou peu présents. Cette lignée a été
établie en transfectant de façon stable le gène de la luciférase, placé sous le contrôle
ADEME
47
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
transcriptionnel du promoteur viral MMTV (Mouse Mammary Tumor Virus) (Wilson et al.
2002). Ce promoteur est activé par les récepteurs AR, GR et PR activés.
8.1.3 La lignée cellulaire PLHC-1
La lignée cellulaire PLHC-1 utilisée dans cette étude a été obtenue à partir d’un hépatome
de vairon tropical Poeceliopsis lucida induit par le dimethylbenzoanthracène (Ryan et
Hightower 1994). Cette lignée présente l’intérêt d’avoir conservé certaines capacités
métaboliques hépatiques et exprime notamment un fort taux de récepteurs AhR.
8.2
Exposition des cellules aux échantillons à analyser
Deux jours avant l’exposition aux échantillons, les cellules sont ensemencées dans des
plaques de culture à 96 puits blanches (MELN et MDA-kb2) et transparentes (PLHC-1) à une
concentration de 103 cellules/µl de milieu de culture. Pour les activités hormonales, du milieu
de culture sans rouge phénol complémenté par du sérum préalablement dé-stéroïdé (par
prétraitement sur dextran et charbon actif) est utilisé afin de minimiser l’interférence du signal
basal avec les stéroïdes apportés par le milieu nutritif et augmenter ainsi la sensibilité de
détection du test.
Afin de tester l’activité d'extraits d’échantillon à des concentrations Xi, un volume de chaque
extrait est séché puis repris par du diméthylsufoxide (DMSO). Cette solution à 200X 1 est
utilisée pour préparer, par dilutions successives, une gamme de solutions dont les
concentrations sont : 200X2 (X2 = X1/3), 200X3 (X3 = X1/10), 200X4 (X4 = X3/10),….etc. 3 µl de
chacune de ces solutions est ensuite dilué dans 200 µl du milieu de culture blanc pour
obtenir une concentration de 3Xi. 50 µl de chacune des solutions ainsi réalisées sont
introduits dans les puits contenant les cellules dans 100 µl de milieu. La concentration finale
en échantillon dans chaque puits est de Xi. Dans ces conditions, le pourcentage en solvant
est de 0,5 %. A cette concentration en solvant, les tests n’ont montré aucune altération de la
viabilité cellulaire ou problème d’expression non spécifique de la luciférase ou de l’EROD.
Les cellules sont ensuite incubées avec les extraits de boue, phase particulaire ou phase
aqueuse pendant 16 heures (MELN et MDA-kb2) ; pour les cellules PLHC1, deux durées
sont testées, 4h (activité HAP-like) et 20 heures (activité dioxin-like).
8.3
Lecture des plaques
8.3.1 Plaques MELN et MDA-kb2
A la fin de l’incubation, le milieu contenant les échantillons à tester est remplacé par 50 µl du
milieu de culture blanc contenant la luciférine (0,3 mM). L’activation des différents récepteurs
par les ligands contenus dans les extraits induit la synthèse de luciférase qui transforme la
luciférine en oxyluciférine avec production de lumière. Le signal luminescent est stable au
bout de 5 min. Les plaques de 96 puits sont ensuite placées dans un luminomètre lecteur de
plaque (Microbeta Wallac Luminometer) et la luminescence est mesurée à une vitesse de 2
s/puits. Les résultats bruts sont exprimés en unité relative de luminescence (RLU : Relative
Luminescence Unit) puis convertis en pourcentage d’activité luciférase. La valeur de 100 %
correspond à l’activité induite par le ligand de référence à une concentration saturante.
8.3.2 Plaques PLHC-1
A la fin de l’incubation, le milieu de culture est remplacé par 100 µl de milieu sans rouge
phénol contenant la 7-ERF à la concentration de 2 µM. Juste après le remplissage de tous
les puits par la 7-ERF, la formation de la résorufine est mesurée dans les cellules vivantes,
toutes les 30 s pendant au moins 20 min, à l’aide d’un spectrofluorimètre lecteur de plaque
(Victor, Perkin Elmer, France). La longueur d’onde d’excitation utilisée est de 530 nm pour
une longueur d’onde d’émission de 590 nm. Les résultats bruts enregistrés sont en unité de
ADEME
48
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
fluorescence par minute. Ces résultats sont ensuite convertis en pourcentages relatifs de
l’activité EROD maximale induite par un ligand de référence (BaP ou TCDD) à une
concentration saturante.
8.3.3 Analyses des données in vitro
L’activation des récepteurs par les extraits de boue (totale, phase particulaire et phase
aqueuse) est exprimée en pourcentage de l’activation maximum induite par le ligand de
référence à concentration saturante. Les ligands de référence de chaque test et leurs
concentrations effectives sont représentées dans le Tableau 7.
Tableau 7 : Ligands de référence et concentrations (en nM) effectives (EC50) et saturantes (témoin
positif dans le bioessai).
Récepteur
Lignée cellulaire
ER
MELN
AR
AhR-4h
Ligand de référence
EC50
ECsaturante
17β-E2
0,018
10
MDA-kb2
DHT
0,1
10
PLHC-1
BaP
4
100
AhR-24h
PLHC-1
TCDD
0,1
1
Des courbes dose-réponse sont établies pour chaque échantillon et analysées à l’aide d'une
"macro" Excel Regtox 7.5 développée par Vindimian et al. (1983) librement disponible sur le
site http://www.normalesup.org/~vindimian/fr_index.html. Cette macro, basée sur le modèle
de Hill, permet de déterminer la concentration en échantillon pour laquelle 20, 25 ou 50% de
l’activation maximale est obtenue (EC20, EC25 ou EC50, EC : effective concentration). Ainsi,
en comparant les valeurs des EC20 du ligand de référence à celles de l’échantillon analysé,
on détermine l’activité de l’échantillon exprimée en masse d’équivalent de ligand de
référence par masse d’échantillon (Ref-EQ). En théorie, le calcul de l'équivalent implique que
les courbes dose-réponse aient le même minimum, le même maximum et la même pente, ce
qui est rarement le cas. Un éloignement du modèle de référence est fréquemment constaté
avec l'augmentation de la concentration, lié notamment à des interférents et des effets de
mélange. Utiliser l’EC20 permet de se placer dans les conditions les plus proches possible
du modèle de référence.
L’activité toxique-équivalent (TEQ) de l’échantillon testé est donnée par la formule :
TEQ= Ref-EQ = EC20 REF / EC20 échantillon
avec Ref, le ligand de référence du test.
9. Calculs et analyse des données
9.1
Le calcul des abattements des PE sur les réacteurs continus et batch
La comparaison des paramètres d’entrée et de sortie des réacteurs permet de déterminer le
taux d’abattement, que ce soit pour les paramètres macroscopiques des réacteurs (matières
sèches, matières volatiles, DCO…) ou pour les micropolluants.
Le taux d’abattement est calculé après avoir atteint l’état stationnaire, soit après 3 à 4 TSH,
dans notre cas, entre 60 et 80 jours de digestion.
Le calcul des taux d’abattement sur les données macroscopiques est basé sur un calcul de
taux d’abattement pour chacune des 5 dernières semaines de chaque phase d’étude, c’està-dire entre 40 et 60 jours après le démarrage des réacteurs.
ADEME
49
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Abattement 
Février 2013
moyenne( sortie)  moyenne(entrée )
 100
moyenne(entrée )
avec moyenne(sortie), la moyenne des concentrations en sortie sur les 5 dernières semaines
et moyenne(entrée), la moyenne des concentrations en entrée sur les 5 dernières semaines.
Ainsi, le taux d’abattement moyen et l’écart-type correspondant sont obtenus.
Sur les réacteurs batch, la vitesse d’élimination des PE (µg/l/j) est mesurée par différence de
concentration entre deux réacteurs sacrifiés à chaque pas de temps de la cinétique. De la
même façon, les vitesses de production de méthane (mlCH4/gDCO/j) et d’accumulation d’AGV
(g/l/j) sont calculées.
9.2
Le calcul des coefficients de partage
L’analyse des PE s’est faite sur la boue totale (CPE,tot), sur le compartiment particulaire
(CPE,part) et sur la phase aqueuse (CPE,aq), concentrations exprimées respectivement en
µg/gMS, µg/gMS,PART, µg/l. Seulement pour les HAP, dans la phase aqueuse, nous avons aussi
accès à la concentration libre (CPE,free), exprimée en µg/l et qui permet de déduire la
concentration sur le compartiment organique dissous/colloidal (CPE,DCM), exprimée en
(µg/gMS,DCM), selon la formule suivante :
CPE,aq = CPE,free + (CPE,DCM × [MS,DCM])
Avec [MS] = [MS,PART] + [MS,DCM]
Ainsi, les coefficients de partage, qui représentent l’affinité des PE pour les matières
organiques du compartiment particulaire et du compartiment dissous/colloidal (DCM)
sont respectivement:
K part 
C PE , part
C PE , free
9.3
(l/gMS,PART)
et
K DCM 
C PE , DCM
C PE , free
(l/gMS,DCM).
Les tests statistiques
Des tests statistiques sont utilisés lors de cette étude pour rechercher des liens entre les
paramètres étudiés (test de corrélation et Analyse en Composante Principale, PCA) ou pour
vérifier si les différences en terme de performance de dégradation des polluants,
performance des réacteurs anaérobies, paramètres caractéristiques des communautés
microbiennes, sont significatives ou non (Analyse de variance, ANOVA) et d’identifier quels
groupes sont différents (test de Student Newman Keuls, SNK). Ces différents tests
statistiques sont réalisés à l’aide du logiciel R version 2.11.1 (R. Develpment Core Team
2010).
L'analyse de la variance (ANOVA) est un test statistique permettant de vérifier que
plusieurs échantillons sont issus d'une même population, c'est à dire qu'ils ont
statistiquement une même moyenne. C'est une généralisation du test de Student. Ainsi pour
ce test, l'hypothèse nulle (H0) correspond au cas où les distributions suivent la même
moyenne et l'hypothèse alternative est qu'il existe au moins une distribution dont la moyenne
s'écarte des autres moyennes. Le rejet ou non de l’hypothèse nulle est décider en étudiant la
p-value (probabilité critique). Si la p-value est inférieur à 0,05 alors H0 est rejetée avec 5 %
de risque. Si elle est supérieure à 0,05, le risque est trop grand pour rejeter H 0, l’hypothèse
« nulle » est donc validée.
ADEME
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Février 2013
Le test student Newman Keul (SNK) est un test de comparaison a posteriori qui permet,
lorsqu’un test de type ANOVA révèle des différences entre échantillons, de savoir quels sont
les échantillons qui diffèrent entre eux. Dans notre étude, il est réalisé en utilisant la fonction
snk de la librairie R mutoss (MuToss coding Team et al. 2010)
Le coefficient de corrélation de Pearson est un coefficient de corrélation linéaire simple
qui permet d’appréhender le degré de liaison qui peut exister entre deux variables, en
mettant en évidence le sens de la liaison et son intensité. En effet s’il est nul les variables
sont indépendantes, plus il se rapproche de 1 plus les variables sont liées. S’il est positif les
variables évoluent dans le même sens, s’il est négatif elles évoluent dans des sens
opposées.
L’Analyse en Composante Principale (ACP) permet l’examen des corrélations entre de
nombreuses variables. Elle permet de visualiser et d’analyser rapidement les corrélations
entre les variables et de visualiser et d’analyser les différents échantillons décrits par les
variables sur un graphique à deux dimensions (construit de manière à maximiser les
différences entre échantillons). Elle permet aussi de représenter sur le même plan,
échantillons et variables et ainsi d’identifier des tendances. Des corrélations entre la
distribution des échantillons sur l’ACP avec d’autres paramètres (fonctionnement du
procédé, conditions opératoires, inoculum source) ont été réalisées. La librairie R vegan
(Oksanen et al. 2010) a été utilisée.
La régression linéaire des moindres carrés partiels (Partial Least Squares, PLS) est
appliquée lorsque une variable (bloc de Y) est à expliquer/prédire en fonction de plusieurs
variables explicatives/prédictives (bloc des X). L’hypothèse de l’existence d’une relation
linéaire entre Y et chaque prédicteur est posée.
Cette technique de régression est basée sur la construction de facteurs (également nommés
composantes principales) en minimisant la covariance entre le bloc de Y et le bloc des X. Le
premier facteur contient le pourcentage le plus élevé de variance, et les facteurs suivants
des pourcentages décroissants. Le nombre de facteurs à inclure (dimension) est déterminé
en minimisant la moyenne des carrés des erreurs de prédiction (PRESS) par une procédure
de validation croisée. Une régression multivariée du bloc de Y en fonction des facteurs (et
donc du bloc des X) est ensuite réalisée. Cette technique présente l’avantage de pouvoir
considérer des variables explicatives liées.
Les régressions PLS sont mises en œuvre grâce à la version 1.2.2 du logiciel libre R, et en
employant des fonctions préalablement développées.
Le modèle obtenu peut être utilisé en tant que prédiction. Pour réaliser des prédictions de Y
à partir d’un bloc de X contenant des variables explicatives indéterminées, une version de
démonstration du logiciel The Unscrambler 9.6 est utilisée. Grâce à ce logiciel, les variables
manquantes sont estimées à partir de leurs coordonnées, déterminées lors de la
construction des facteurs. Le bloc de X ainsi « complété » permet d’appliquer le modèle pour
prédire les Y correspondant.
ADEME
51
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Février 2013
RESULTATS ET DISCUSSION
Tout au long de ce travail, nous avons considéré :
(i) la digestion anaérobie comme un procédé modèle permettant de transformer la
matière organique et donc de jouer à la fois sur les propriétés de sorption des PE
mais aussi sur l’expression de métabolismes microbiens variables,
(ii) notre substrat « boue » comme un système à plusieurs compartiments physiques,
séparés selon la taille des particules les constituant et pouvant héberger les PE
(figure 13).
Boue
F3
F4
HAP,libre
1 kDa
HAP, DCM
F2
10 kDa
Particulaire
F1
0,1 µm
1,2 µm
HAP,part
Matière dissoute colloïdale
DCM
Figure 13 : les différents compartiments de la matrice séparés selon la taille des particules les
constituant. Le compartiment « particulaire » avec des particules de taille supérieure à 1,2µm obtenu
après centrifugation de l’échantillon de boue (culot). Le compartiment « dissous colloïdal » ou
« DCM » avec des particules de taille inférieure à 1,2 µm obtenu après centrifugation de la boue et
filtration du surnageant à 1,2 µm. Par filtration et ultrafiltration du surnageant, obtention des fractions
F1 à F4. Présence du PE (HAP) sous forme libre ou associé à la DCM, la somme de ces deux
compartiments donnant le compartiment aqueux déterminé par extraction liquide-liquide ou SPE ou
SPME. Présence du polluant associé au particulaire déterminée par extraction sous solvant. La
somme des trois compartiments donne la teneur totale qui est mesurée par extraction sous solvant sur
l’échantillon brut.
Ainsi, les PE peuvent se retrouver dans les différents compartiments de la boue selon
l’affinité qu’ils vont développer avec les matières organiques présentes dans ces
compartiments. Cette affinité peut être transcrite sous la forme de coefficients de partage,
Kpart et KDCM, respectivement affinité pour le compartiment particulaire et affinité pour le
compartiment DCM, tels que décrits dans le § 9.2.
1. Effet de matrices « boue » différentes sur les propriétés de sorption et sur la dégradation
des perturbateurs endocriniens : lien biodisponibilité-sorption-biodégradation.
Les parties 1 et 3 du projet portant sur « Evaluation de la composante physique : étude des
phénomènes de sorption sur différentes matrices boues » et « Evaluation du potentiel
métabolique : impact des caractéristiques de la matrice boue sur la biodégradation des PE »
ont été traitées simultanément (cf schéma de projet, figure 2). Elles s’intègrent pleinement
dans les objectifs de la thèse de Glenda Cea Barcia (bourse Chilienne Conicyt). L’objectif
était ici de travailler à populations microbiennes constantes et de ne faire varier que
l’environnement matriciel, afin d’observer l’effet d’une disponibilité variable des polluants
(matrice variable  sorption variable  disponibilité variable) sur la dégradation des
polluants. En effet, les résultats de Barret et al. (2010a) montrent que la composition
physico-chimique d’une boue influe sur l’affinité des polluants pour les différents
compartiments de cette boue (particulaire et dissous/colloïdale).
1.1 Etudes menées en réacteurs continus : influence de matrices « boue »
différentes sur les performances de dégradation des perturbateurs endocriniens.
Les premières études ont été menées en réacteurs continus, inoculés avec une boue
industrielle anaérobie qui connaît une contamination aux HAP depuis de longues années, et
ADEME
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Février 2013
alimentés avec des boues différentes. Pour obtenir des caractéristiques d’alimentation
différentes, deux boues réelles ont été tout d’abord échantillonnées sur site (boue primaire
PS et boue secondaire HLSS). Etant donné l’intérêt porté sur les pré-traitements en amont
de la digestion anaérobie, et à la vue des résultats intéressants obtenus en matière de
sorption (Barret et al., 2010a), un pré-traitement thermique a aussi été appliqué à la boue PS
avant sa méthanisation (TTPS). Toutefois, ces trois substrats n’ont pas permis de générer
des performances de digestion anaérobie très différentes. La stratégie d’alimentation s’est
alors orientée vers la fabrication de substrats composites. Ainsi, la boue HLSS a été
mélangée à de la cellulose micro-cristalline pour obtenir C-HLSS. La cellulose étant un
substrat entièrement biodégradable, le substrat C-HLSS devrait induire un haut cométabolisme. De plus, le pourcentage de matière dissoute et colloïdale (DCM) dans
l’alimentation étant divisé par un facteur 2, des répercussions sur la concentration en DCM et
donc sur la fraction aqueuse des polluants sont attendues. Enfin, la cinquième boue
d’alimentation a été fabriquée par dilution de la boue HLSS avec son propre surnageant, de
façon à augmenter la proportion de DCM sans modifier les propriétés ni des particules ni de
la DCM. La DCM étant également plus facilement biodégradable que la matière particulaire,
et permettant de déplacer les polluants vers la fraction aqueuse par sorption, la boue SupHLSS a été conçue de façon à favoriser un fort co-métabolisme et une forte biodisponibilité
des polluants. Ces 5 bioréacteurs ont été suivis sur 5 temps de séjour hydraulique afin
d’atteindre l’état stationnaire et les performances de digestion et de dégradation des
polluants ont été évaluées (figure 14 et tableau 8) et confrontées aux caractéristiques
physico-chimiques des 5 substrats (figure 15).
Figure 14 : Performances de dégradation des polluants (HAP, PCB, NP) obtenues sur 5 réacteurs
continus alimentés avec 5 substrats différents. Pour chaque composé, la p-valeur entre 5 jeux de
données (3 pour PCB) est indiquée en italique. Les abattements sont considérés comme
statistiquement différents pour une p-valeur inférieure à 0.05.
ADEME
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Février 2013
Tableau 8 : Performances de digestion des 5 bioréacteurs anaérobies alimentés avec des boues
différentes.
Substrat
PS
TTPS
HLSS
C-HLSS
Sup-HLSS
% Abattement MS
49 9
60 10
58 10
79 5
52 11
Ratio méthane/dioxyde de carbone
69/31
71/29
70/30
60/40
70/30
Les 5 réacteurs présentent des performances différentes de digestion et de dégradation des
polluants : les caractéristiques des boues/substrats influent donc à la fois sur le métabolisme
général du système et sur le métabolisme spécifique des polluants.
Tableau 9 : Caractéristiques des 5 boues/substrats.
Boues
DCO
gO2/L
MS
gMS/L
DCM
% MS
Protéines
geqSAB/gMS
Sucres
geqGlu/gMS
Sucres
cellulose
geqGlu/gMS
Lipides
gPEEM/gMS
AGV
gAGV/gMS
PS
TTPS
HLSS
C-HLSS
SupHLSS
28 ±4
27 ±3
22 ±2
27 ±2
19 ±2
24 ±2
20 ±2
19 ±1
21 ±4
16 ±2
5 ±1
11 ±2
4 ±4
8 ±7
14 ±4
0.27 ±0.03
0.3 ±0.1
0.25 ±0.02
0.16 ±0.03
0.29 ±0.05
0.29 ±0.09
029 ±0.15
03 ±0.1
0.2 ±0.19
0.26 ±0.06
0
0
0
0.46
0
0.13 ±0.05
0.15 ±0.06
0.1 ±0.04
0.06 ±0.04
0.1 ±0.05
0.03 ±0.02
0.04 ±0.01
0.04 ±0.04
0.02 ±0.04
0.1 ±0.02
La boue primaire est plus riche en protéines et en lipides que la boue secondaire (tableau 9).
Ces différences pourraient expliciter les performances moindres avec PS. Le pré-traitement
thermique de PS réduit considérablement les performances ‘polluant’ alors que les
performances ‘digestion’ sont largement accrues. Lorsque la cellulose est ajoutée à HLSS,
les performances ‘polluant’ sont réduites alors que les performances ‘digestion’ sont ellesmêmes fortement augmentées. Ceci signifie que la synergie co-métabolique avec les
polluants n’est pas déterminée uniquement par le métabolisme général. Cette synergie est
peut-être liée à un métabolisme plus spécifique ou bien le co-métabolisme n’est pas ici le
facteur limitant la dégradation des polluants. Les performances ‘polluant’ et ‘digestion‘ les
plus faibles sont obtenues avec le réacteur Sup-HLSS alors que les fortes proportions de
DCM de ce substrat étaient supposées améliorer la disponibilité des polluants et donc leur
dégradation. Dans ce cas là, l’effet co-métabolisme est prédominant sur l’effet
biodisponibilité. Pour conclure, les performances ‘polluant’ peuvent donc être expliquées soit
par des variations de co-métabolisme ou par des niveaux de disponibilité différents. Ceci
suggère qu’il est très difficile de savoir quel est le facteur limitant ou quel poids relatif on peut
donner à l'un ou l'autre des deux facteurs. Cependant une caractérisation précise de la
boue/substrat permet de prédire les performances ‘polluant’ (figure 15a) au moyen d’une
analyse statistique type PLS (établir une relation linéaire entre des variables explicatives, les
caractéristiques des boues, et une variable à expliquer, l’abattement en polluants dans les
réacteurs anaérobies).
Le modèle de régression est le suivant (unité du tableau 9 pour les variables):
Abattement(%) = 151 + 0.41logKow – 0.077M – 1.94n5C – 3.08n6C – 1.86nCl – 11.8nOH +
0.08logH + 131DCM – 24Protéine -45.7Sucre -336Lipide – 54.2Cellulose – 577AGV
avec un coefficient de corrélation de 0.78, ce qui suggère une bonne prédiction des
abattements en polluants via les caractéristiques des boues/substrats.
ADEME
54
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Figure 15 : (a) Les performances ‘polluant’ mesurées versus les performances modélisées par la PLS
(régression linéaire des moindres carrés) établissant un lien entre les performances de dégradation
des polluants et les caractéristiques des boues/substrats et des polluants. Les coefficients centrés et
réduits des variables ‘boue’ (noirs) et ‘polluant’ (gris) donnés par l’analyse PLS (b).VFA : acides gras
volatils, n6C : nombre de cycles à 6 carbone, n5C : nombre de cycles à 5 carbone, nOH : nombre de
groupement OH, nCl, nombre de chlore. (Barret et al., 2010b)
Le poids des caractéristiques ‘boue’ et ‘polluant’ peut être comparé via les coefficients
centrés et réduits donnés par la PLS (figure 15b). La teneur en AGV a le plus de poids
négatif sur l’abattement en polluants car la concentration la plus élevée a été mesurée dans
la boue Sup-HLSS et ce réacteur présente les abattements les plus faibles en polluant et en
MS et DCO. Or, les AGV dans ce réacteur sont intégralement dégradés, ils ne sont donc pas
directement impliqués dans la baisse du potentiel à dégrader les polluants, mais par contre il
est possible qu’un autre inhibiteur ait été présent lors de la supplémentation avec le
surnageant, ce qui réduit le potentiel global et celui des polluants. La teneur en lipides est le
second facteur ayant le plus d’importance (influence négative). D’une part, les lipides sont
difficilement accessibles aux microorganismes et donc abaissent le métabolisme général.
D’autre part, ils favorisent la sorption des polluants sur les particules et diminuent alors leur
disponibilité. Ces deux effets agonistes contribuent à cet effet fortement négatif des lipides
sur les performances ‘polluant’. Le seul paramètre ayant une influence positive est la teneur
en DCM. Cette dernière doit jouer à la fois sur la proportion de polluants présents dans ce
compartiment qui est selon l’hypothèse la plus couramment admise le compartiment le plus
disponible aux microorganismes (Artola-Garicano et al., 2003 ; Urase and Kikuta, 2005 ;
Dionisi et al., 2006), mais aussi parce que cette DCM est un compartiment plus accessible
aux microorganismes de la digestion anaérobie et permet d’activer le métabolisme général.
1.2 Les études menées en réacteur batch : influence de différentes matrices
« boue » sur les performances de dégradation des perturbateurs endocriniens et
sur leur distribution dans les compartiments « matière » de la boue
Ces expériences en réacteurs continus à l’équilibre montrent clairement l’influence des
caractéristiques physico-chimiques de la matrice sur les performances de dégradation des
polluants, mais il reste très difficile de dissocier les divers effets : à savoir de distinguer entre
un effet sur la sorption/disponibilité et un effet via le métabolisme microbien général. Forts de
ces expériences, nous avons conduit des expérimentations en réacteurs discontinus où
l’objectif était de réduire l’effet population microbienne et donc le métabolisme général en
ADEME
55
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
mesurant des performances ‘polluant’ instantanées (vitesses initiales). Pour cela, les tests
ont été effectués avec 80% (en poids) d’inoculum adapté aux polluants modèles provenant
d’un digesteur anaérobie de laboratoire (digestat issu du réacteur alimenté avec HLSS), et
mis en présence avec 20% de diverses boues, avec une quantité de DCO initiale
équivalente.
1.2.1 Les performances globales de dégradation
Un premier test a été effectué dans ces conditions de mélange et permet de mesurer la
dégradation des polluants tout en observant une activité de production de biogaz et de
dégradation de la matière sèche avec un léger temps de latence par rapport au témoin sans
polluant (figure 16).
250
mL CH4/gDCO initiale
SS
SS sans
polluant
200
12%MS
150
100
50
0
0
20
40
60
Jours
Figure 16 : Production de méthane au cours des tests batch avec un ratio inoculum-boue de 80/20 en
poids avec et sans polluant. HLSS=boue secondaire forte charge.
Un réacteur batch mené dans les mêmes conditions que précédemment décrites mais qui a
été autoclavé 30 minutes à 120°C afin de supprimer l’activité biologique montre que des
pertes abiotiques sont observables pour les trois plus petits HAP (figure 17).
Abiotique SS
30
20
10
Indeno
B(ghi)P
DBA
B(a)P
B(k)F
B(b)F
Chrys
B(a)A
Pyr
Fluorant
Anthra
-10
Phenant
0
Fluorène
Pertes en HAP totaux (%)
40
-20
Figure 17 : Pertes abiotiques observées dans un réacteur batch avec un ratio inoculum-boue de 80/20
en poids. Aucune activité biologique n’est observée : absence de production de biogaz et aucune
réduction de la matière sèche.
De plus, les mélanges inoculum-boue testés présentent des capacités de sorption différentes
(évaluées via le modèle développé par Barret et al. (2010a) grâce à la caractérisation
biochimique des mélanges) et donc des distributions supposées différentes dans les
compartiments « matière ». Les matrices boues ont été choisies afin d’avoir une distribution
initiale des composés dans les compartiments la plus diverse possible : (1) boue secondaire
ADEME
56
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faible charge-LLSS (fortement stabilisée), (2) boue secondaire forte charge-HLSS (très
réactive)), (3) cette dernière dont on a modifié la phase dissoute-colloïdale-HLSS-1KDa
(présence uniquement de colloïdes inférieurs à 1kDa). Ces 3 systèmes ont été caractérisés
au temps initial et ont été suivis sur 7 pas de temps afin d’évaluer les vitesses de
dégradation des polluants ajoutés au temps initial. Pour ces 3 systèmes, nous avons des
données sur les teneurs totales en polluants (HAP, NP, PCB), les teneurs dans la phase
aqueuse (HAP, PCB), les teneurs des polluants libres et sorbés à la matière dissoutecolloïdale (HAP) à T0 (temps initial) et au cours du temps (cf § 6.5 matériel et méthodes).
B
A
250
HLSS
HLSS
200
200
12% DM
12% DM
150
150
6% DM
100
9% DM
100
HLSS-1kDa
LLSS
50
50
0
0
10
20
30
40
50
0
60
0
C
20
30
40
50
60
Days
D
60
HLSS
60
HLSS-1kDa
0.047
HLSS
LLSS
< 0.01
50
50
40
40
0.15
30
0.05
0.05
30
< 0.01
< 0.01
< 0.01
< 0.01
< 0.01
< 0.01
< 0.01
NP
Indeno
B(ghi)P
< 0.01 < 0.01
DBA
< 0.01
B(a)P
NP
Indeno
DBA
B(ghi)P
B(a)P
B(k)F
B(b)F
Chrys
Pyr
B(a)A
Anth
0
0.54
B(k)F
0.1
0
Fluor
< 0.01
Chrys
< 0.01
10
Phe
0.01
Pyr
< 0.01
Fluor
< 0.01 < 0.01
10
Phe
0.038
< 0.01
20
0.02
B(a)A
0.77
Anth
0.018
Fluo
20
Fluo
OPs total removal (%)
10
Days
B(b)F
m L C H 4/gC O D initial
250
Figure 18 : Performances ‘digestion’ (A et B, production de méthane et abattement en MS) et
‘polluants’ (C et D, abattements mesurés via les concentrations totales) dans les réacteurs batch en
fonction de 3 substrats différents, comparés deux à deux. HLSS=boue secondaire forte charge,
HLSS-1KDa (HLSS avec présence uniquement de colloïdes inférieurs à 1kDa) et boue secondaire
faible charge-LLSS. Pour chaque composé, la p-valeur entre les 2 jeux de données est indiquée en
noir. Les abattements peuvent être considérés comme significativement différents pour des p-valeurs
inférieures à 0.05.
Les systèmes ainsi mis en œuvre nous permettent d’observer des abattements en polluants
totaux (analyses réalisées sur la totalité de la boue) à mettre en lien avec une activité de
méthanisation (production de biogaz et abattement de la matière sèche), ces performances
sont significativement différentes pour les trois substrats (figure 18). La boue HLSS présente
les meilleures performances tandis que la boue LLSS les moins bonnes, ce qui s’explique
par la nature même des boues forte et faible charge, respectivement. De plus, les cinétiques
sur polluants totaux nous montrent que l’abattement des polluants est intimement lié à la
production d’acides gras volatils, intermédiaires de la digestion anaérobie, soit donc lié aux
premières étapes d’acidogenèse et d’acétogenèse (figure 19).
ADEME
57
160
1
150
0,8
140
0,6
130
0,4
120
110
0,2
100
0
0
rIndéno:
20
J ours
1,45 µg/L/jour
40
A c étate g /L C H4 L /L
HA P ug /L
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Indéno(1,2,3,c,d)
P yrène-batch1
Indéno(1,2,3,c,d)
P yrène-batch2
Acétate
C H4
60
rAcetate: 0,032 g/L/jour
Figure 19 : Cinétique de dégradation de l’indéno(1,2,3cd)pyrène (concentration totale) au cours de la
digestion de la boue HLSS.
Pour les PCB, les résultats sont très différents : les abattements totaux pour la somme des 7
PCB ne sont pas significativement différents pour les trois mélanges (figure 20). Cela semble
signifier que les abattements des PCB ne sont pas affectés ni par l’abattement de la matière
sèche, ni par une disponibilité des PCB différente. Les PCB ne sont pas dégradés comme
les HAP. En effet, les premières étapes de dégradation consistent en une déhalogénation
réductrice (échange des atomes de chlore pour des atomes d’hydrogène) où les PCB jouent
le rôle d’accepteurs d’électrons (Smidt and deVos, 2004). Ainsi les plus gros PCB vont
donner des plus petits PCB, ceux-ci sont donc à la fois produits et dégradés. Afin de
s’affranchir de ce biais, nous ne considérerons que le PCB180, le plus substitué, qui ne
pourra être que dégradé au cours de nos incubations. Ce PCB présente les abattements les
plus élevés mais statistiquement non différents selon les trois conditions (figure 20)
30
Total removal %
25
20
HLSS
15
HLSSF4
HLSS
LLSSHLSS-1kDa
10
LLSS
5
0
PCBs Sum
PCB 180
Figure 20 : Abattements totaux pour la somme des 7 PCB et pour le PCB180 mesurés sur les
réacteurs batch en fonction des 3 substrats.
ADEME
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1.2.2 Distribution des PE dans les compartiments « matière » des boues et
lien avec les performances de dégradation des PE
1.2.2.1 Cas des HAP
L’analyse de la distribution des HAP dans les différents compartiments de la boue au temps
initial (figure 21) montre que :
-quelle que soit la boue, la fraction aqueuse (figure 21 B et D) est très faible, inférieure à 1,5
% pour LLSS, 1% pour HLSS et 0,5 % pour HLSS-1KDa, et ce quel que soit le HAP, seule
la fraction aqueuse du fluorène, le plus petit HAP, est plus élevée autour de 2%,
-dans cette fraction aqueuse, les HAP légers se retrouvent principalement dans la fraction
libre mais aussi un peu dans la fraction DCM tandis que les HAP lourds sont uniquement
dans la fraction DCM,
-la distribution est différente entre les trois boues : les fractions libre et aqueuse de HLSS1KDa sont les plus faibles des trois boues alors que la fraction DCM de LLSS est la plus
élevée, même pour les HAP légers. Pour illustrer cette distribution différente dans les trois
boues, la concentration de trois HAP dans les compartiments libre et DCM est donnée dans
le tableau 10. Pour le chrysène (HAP de poids moléculaire moyen), elles sont de 251 et 867
ng/L respectivement pour HLSS-1KDa contre 671 et 5188 ng/L pour LLSS avec une
concentration totale de 373 701 ng/L.
A
B
3,0
HLSS-1kDa
HLSS
% Cfree/C Total
HLSS
HLSS
HLSS
LLSS
2,0
2,0
Indeno
B(ghi)P
DBA
B(a)P
B(k)F
B(b)F
Chrys
B(a)A
Pyr
Anthra
2,5
Fluorant
HLSSF4 HLSS-1kDa
HLSS
HLSS
Fluorene
D
3,0
Phenant
Indeno
B(ghi)P
B(k)F
DBA
0,0
B(a)P
0,0
B(b)F
0,5
Chrys
0,5
B(a)A
1,0
Fluorant
1,0
Pyr
1,5
Phenant
1,5
Anthra
% C aqueous/C total
3,0
2,5
2,5
Fluorene
C
HLSSF4
3,0
HLSS
Indeno
B(ghi)P
B(a)P
DBA
B(b)F
B(k)F
B(a)A
Chrys
Pyr
Anthra
Fluorant
Fluorene
Phenant
Indeno
B(ghi)P
DBA
B(a)P
0,0
B(k)F
0,0
B(b)F
0,5
Chrys
0,5
B(a)A
1,0
Fluorant
1,0
Pyr
1,5
Phenant
1,5
Anthra
2,0
Fluorene
2,0
LLSS
HLSS
2,5
Figure 21 : Distribution des HAP dans les compartiments des boues HLSS, HLSS-1KDa et LLSS au
temps initial. A et B ratio CPE,free sur CPE,total, B et C ratio CPE,aq sur CPE,total.
ADEME
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Tableau 10 : Distribution du pyrène, chrysène et indéno(1,2,3,c,d)pyrène dans les compartiments des
trois mélanges initiaux en ng/L.
Sludge
mixture
HLSS
HLSS-1kDa
LLSS
CHAP,free
CHAP,DCM
CHAP,aq
Pyr
Chrys Indeno Pyr Chrys Indeno
Pyr
Chrys
Indeno
1871
926
36
497 2289
401
2368
3215
437
727±24 251±13 12±2
540
867
281
1266±32 1127±254 293±98
2117±62 671±11 30±6 3460 5188
1012 5578±402 5859±81 1042±169
Si l’on compare cette répartition initiale des HAP dans les compartiments avec les
abattements mesurés (figure 18 et 21) sur HLSS et HLSS-1KDa, les abattements en
polluants les plus élevés sont observés pour HLSS (plus grande différence observée pour
les HAP du chrysène à l’indénopyrène) où les concentrations dans le compartiment DCM
sont les plus élevées : l’interaction HAP et DCM améliorerait la biodisponibilité des polluants.
Ajoutons que ce compartiment DCM est aussi très différent en quantité et en nature
biochimique entre HLSS et HLSS-1Kda, puisque ce dernier est dépourvu des gros colloïdes
et que sa concentration en DCO est bien plus faible. Il peut donc aussi jouer sur l’expression
d’un métabolisme global moindre, ce qui est observé par la réduction de la matière sèche qui
n’est que de 9% contre 12% pour HLSS. Dans ce cas, les deux aspects biodisponibilité et
co-métabolisme jouent en faveur du mélange HLSS et entrainent pour ce mélange
l’observation des meilleures performances.
Si de la même façon, on compare HLSS et LLSS, les conclusions sont différentes. En effet,
les performances les plus élevées sont observées sur HLSS, alors que le compartiment
DCM de LLSS est le plus élevé et le plus largement consommé (figure 22). Dans ce cas, le
co-métabolisme est le facteur limitant, la nature même de la boue LLSS, faible charge et
donc largement stabilisée, entraîne un flux co-métabolique plus faible (l’abattement matière
n’est que de 6%) avec une étape d’hydrolyse du compartiment particulaire qui doit être
limitée, limitant du même coup les transferts polluants de ce compartiment vers le
compartiment aqueux. Ces observations sont largement confirmées par les suivis au cours
du temps de l’évolution de cette répartition des polluants dans les compartiments.
En effet, cette distribution évolue au cours de la cinétique de dégradation des
polluants (figures 22 pour LLSS) : les concentrations en phase aqueuse diminuent au cours
du temps puis se stabilisent, elles sont la résultante d’une consommation par les
microorganismes (selon l’hypothèse couramment admise que le compartiment aqueux est
celui qui est disponible pour les bactéries) et d’une recharge du compartiment aqueux par
désorption des polluants du compartiment particulaire. Les cinétiques sont variables selon le
poids moléculaire du HAP considéré. Pour les HAP légers, la fraction libre est la fraction
consommée, pour les HAP de PM moyen, les deux compartiments libre et DCM sont
consommés. A l’opposé, c’est le compartiment DCM qui disparait pour les HAP lourds.
L’abattement le plus élevé en phase aqueuse est obtenu pour la boue LLSS avec 70 % pour
11 HAP sur 13. Pour la boue HLSS, les abattements sont beaucoup plus faibles (entre 20 et
60 %) et plus variables d’un HAP à l’autre. Pour la boue HLSS-1KDa, les abattements sont
élevés pour les HAP légers (60-70 %), et équivalents à ceux de HLSS pour les plus lourds. Il
faut souligner aussi que les seuls abattements mesurés dans le compartiment aqueux ne
suffisent pas à expliquer les abattements totaux et donc que le compartiment particulaire
contribue aussi et très largement à cette mesure soit directement (consommation des HAP
sorbés aux particules durant l’hydrolyse de celles-ci), soit indirectement en rechargeant le
compartiment aqueux.
ADEME
60
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Figure 22 : Evolution des concentrations libre, DCM et totale sur la boue LLSS. A : phénanthrène. B :
pyrène. C : indéno(1,2,3,c,d)pyrène. L’écart type est calculé sur les duplicats réacteurs.
L’ensemble de ces données montrent que nos trois systèmes se comportent différemment à
la fois en composition initiale et en cinétique.
ADEME
61
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A partir des concentrations dans les différents compartiments, il est possible de calculer les
coefficients de partage entre libre et particulaire (Kpart) et libre et DCM (KDCM), représentant
respectivement les affinités pour le particulaire et le dissout/colloidal (cf § 9.2). Les figures 23
et 24 représentent ces affinités en fonction du logKow des HAP pour les trois mélanges au
temps initial et final des réacteurs batch. Quelles que soient les conditions, les affinités
augmentent avec le poids moléculaire des HAP, ce qui est couramment observé. Le
compartiment DCM du mélange LLSS présente la plus forte affinité pour les HAP et le
mélange HLSS la plus faible. Par contre, au temps final, la tendance s’inverse avec une
nette diminution de l’affinité pour le compartiment DCM de LLSS (diminution de 2 log
environ) alors que l’affinité pour le compartiment DCM de HLSS reste identique. L’affinité
initiale pour le compartiment particulaire des mélanges HLSS et LLSS est identique, alors
qu’elle est plus élevée pour le mélange HLSS-1KDa (figure 24); au temps final, les
tendances restent identiques mais toutes les affinités sont augmentées (1 log de plus) ce qui
a aussi été observé par Barret et al. (2010a) lors de l’analyse comparée des affinités d’une
boue/substrat et d’un digestat. La digestion anaérobie permet de transformer la matière
organique (particulaire et soluble) vers une matière plus stable et plus complexe
structurellement et présentant une affinité plus élevée aux polluants.
Figure 23 : logKDCM des HAP. A : mélange initial, B : mélange final (53 jours).
ADEME
62
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Figure 24 : logKpart des HAP. A : mélange initial, B : mélange final (53 jours).
1.2.2.2 Cas des PCB
La figure 25 montre l’évolution au cours du temps des concentrations totale et aqueuse du
PCB180 pour les deux mélanges LLSS et HLSS-1KDa (pas de suivi sur HLSS). Nous
pouvons observer des dynamiques un peu différentes avec une diminution des
concentrations totale et aqueuse dans les deux cas sur les 20 premiers jours, suivie d’une
recharge du compartiment aqueux. La consommation dans le compartiment aqueux du
mélange LLSS est de loin la plus importante par contre tout comme pour les HAP cette seule
consommation ne suffit pas expliquer l’abattement total mesuré, soulignant de nouveau
l’importance du compartiment particulaire dans cet abattement total soit directement soit
indirectement.
ADEME
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Figure 25 : Evolution des concentrations totale et aqueuse du PCB180 pour le mélange HLSS-1KDa
(A) et LLSS (B).
1.2.3 Lien caractérisation du compartiment DCM-distribution des HAP
Les trois mélanges présentent des comportements différents en abattement « matière »,
« polluant » et en distribution des polluants dans les compartiments matière. Il était donc
intéressant de faire le lien avec la caractérisation des compartiments : quel type de
molécules présentes dans la matrice interagit avec les polluants (nature et taille) ?
Pour cela, nous avons utilisé la fluorescence 3D, spectres acquis sur les compartiments
aqueux des échantillons initiaux (figure 26) et finaux des trois mélanges. Les signatures de
fluorescence sont effectivement différentes pour les trois échantillons et permettent
d’envisager d’utiliser ces données pour décrire les phénomènes de sorption. Sept régions de
fluorescence (NI) sont extraites des spectres et normalisées pour chaque échantillon. Ces
données couplées à celles de caractérisation biochimique, ont été utilisées pour expliquer et
prédire les affinités KDCM et Kpart grâce à une analyse statistique de type PLS (cf § 9.3).
ADEME
64
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Les variables explicatives utilisées sont listées dans le tableau 11. Les données de
concentrations dans les différents compartiments n’ont pas été utilisées car le coefficient de
partage KDCM est directement calculé à partir de ces concentrations.
HLSS
HLSS1kDa
B
B
A
A
D
D
LLSS
B
A
E
D
Figure 26 : Spectre de fluorescence 3D des phases aqueuses des trois boues HLSS, HLSS-1KDa et
LLSS au temps initial.
Tableau 11 : les variables PLS utilisées pour le modèle KDCM. Bloc X, variables explicatives, bloc Y
variable à expliquer le KDCM pour 13 HAP dans chaque mélange. Temps initial, t 0, temps final, tf.
Mélanges
HLSS t0
HLSS-1kDa t0
LLSS t0
HLSS tf
HLSS-1kDa tf
LLSS tf
X bloc
Caractéristiques des PE Zones de fluorescence
Log Kow
RI
M
RII
Log S
RIII
RIV
RV
RVI
RVII
Y bloc
KDCM
L’équation (eq. 1) donnée par la régression PLS est la suivante pour le coefficient de partage
KDCM :
(eq.1)
logKDCM = -1.68 + 0.25 logKow + 0.46M – 0.11 logS – 0.18RI – 0.17RII – 0.38RIII +
0.18RIV + 0.38RVI + 0.55RVII
avec un coefficient R2 de 0.96 (validation croisée) et un REMSEC/MAX de 0.03 confirmant
respectivement la capacité de ce modèle à bien expliquer et bien prédire ce coefficient de
partage KDCM. La figure 27 montre les coefficients centrés réduits des variables qui ont le
ADEME
65
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Février 2013
plus d’influence sur KDCM. Le log Kow, la masse molaire M et les régions de fluorescence III,
VI et VII ont le plus d’influence sur ce KDCM. Pour les paramètres « molécules », plus M et log
Kow sont élevés, plus l’affinité pour un compartiment matière sera forte. La région de
fluorescence III est dite protéine-like, et les autres régions I et II, dites aussi protéine-like, ont
une influence ou positive ou négative mais peu significative. A l’inverse, les régions VI et VII
ont une influence positive et significative sur le KDCM. Ces régions correspondent à des zones
dites mélanoïdine-like, lignocellulosique-like et acide humique-like. Ceci confirme des
résultats observés dans la littérature par Lee and Farmer (1989) et Perminova et al (1999)
qui identifient les acides humiques de phase aqueuse comme des molécules très affines de
polluants hydrophobes comme le sont les HAP.
Log Kdoc predicted Y (Factor 4)
7
6
RMSE = 0,2
5
R² = 0,9617
Kow,
4
M
R IV
Log S
R V R VI R VII
3
R II
2
1
RI
0
0
1
2
3
4
5
R III
6
Log Kdoc measured Y (Factor 4)
Figure 27 : Le modèle PLS pour le KDCM. Valeurs prédites en fonction des valeurs mesurées,
validation croisée de facteur 4 (a). Coefficients centrés et réduits des variables explicatives (b).
Grâce à ce modèle statistique, il est donc possible de prédire de façon assez précise l’affinité
et indirectement la sorption des polluants sur le compartiment aqueux d’une boue.
Un modèle PLS a été construit pour prédire l’affinité des polluants pour le compartiment
particulaire (Kpart). Il utilise de la même façon les caractéristiques de la phase aqueuse
(données de fluorescence et données biochimiques) en faisant l’hypothèse que la phase
aqueuse est une représentation en terme qualitatif du compartiment particulaire. Si l’on
considère l’ensemble des HAP (13), ce modèle ne dépend alors que des caractéristiques
des molécules et non de celles de la matrice. Par contre si l’on établit des modèles selon les
classes de poids moléculaire pour les HAP (petit, moyen et gros), il est possible de prédire le
Kpart des petits et des moyens HAP à partir des caractéristiques des matrices avec une très
bonne précision (cf équations 2 et 3).
(eq.2)
avec R2 de 0.98 et REMSEC/MAX de 0.009 et
(eq.3)
avec R2 de 0.92 et REMSEC/MAX de 0.02.
ADEME
66
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Dans ces deux cas, les régions I et II (acide aminé-like) et la concentration en protéines
totales ont une influence négative alors que la région III a une influence positive. Ceci
suggère que l’affinité des polluants pour le compartiment particulaire est régie par la
présence de structures protéiques assez denses à forte biodégradabilité qui fluoresceraient
en région III (Baker, 2001). Comme pour le KDCM, la région VII présente une influence très
positive sur les valeurs de Kpart, confirmant l’importance des acides humiques dans les
phénomènes d’interaction polluants-matrice. Pour les HAP les plus gros, la description du
compartiment aqueux est insuffisante pour prédire l’affinité des polluants au compartiment
particulaire. Il serait dans ce cas-là intéressant d’approfondir la caractérisation de ce
compartiment en essayant d’atteindre par exemple des compartiments d’accessibilité
croissante via l’utilisation d’extractants de force croissante.
Fort de la caractérisation du compartiment aqueux par fluorescence et de sa capacité à
prédire le KDCM, nous nous sommes intéressés à savoir dans quels sous-compartiments se
retrouvaient les molécules de HAP. Pour ce faire, nous avons utilisé deux méthodes pour
subdiviser notre phase aqueuse, l’une basée sur une succession de filtration-ultrafiltration et
l’autre par Asymmetrical Flow Field-Flow Fractionation (AF4).
Le compartiment aqueux du mélange HLSS a été fractionné par filtration-ultrafiltration (§
5.3.1) avec récupération des fractions F1 à F4 sur les filtres. Ces fractions ont été analysées
par SPME afin de quantifier les HAP libres et sorbés à ces sous-compartiments. A partir de
ces données, nous avons calculé les KDCM pour chaque HAP (figure 28).
Figure 28 : Log KDCM en fonction du log Kow pour chaque HAP présents dans les sous-compartiments
F1 (0,1-1,2 µm), F2 (10 kDa-0,1 µm), F3 (1-10 kDa) et F4 (<1 kDa) du mélange initial HLSS.
La plus forte affinité est observée pour le compartiment F1 qui contient des colloïdes de
grosse taille. Plus la taille des colloïdes est faible, moins il y a d’affinité entre polluants et ce
compartiment. Dans les sous-compartiments F3 et F4, il a d’ailleurs été impossible de
calculer un KDCM pour les plus petits HAP (fluorène au pyrène) car on ne les quantifie que
dans la fraction libre.
La seconde approche a consisté en un fractionnement par couplage flux/force avec flux
asymétrique (AF4) afin de déterminer plus finement la distribution en taille des constituants
des échantillons et de caractériser les différentes fractions isolées. Les échantillons HLSS,
LLSS et HLSS-1kDa ont ainsi été fractionnés par AF4 en utilisant les conditions opératoires
décrites figure 9c. Les résultats de ce fractionnement sont présentés figure 29.
ADEME
67
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
10
HLSS
HLSS-1kDa
LLSS
Crossflow
Absorbance à 280 nm
18
17
9
8
7
6
16
5
4
15
3
14
Cross-flow (ml/mn)
19
2
1
13
0
12
-1
12
17
22
27
32
37
42
47
52
temps (min)
10
HLSS
HLSS-1kDa
LLSS
Cross-flow
Laser - diffusion détecteur 90°
0.6
0.5
9
8
7
6
0.4
5
4
0.3
3
0.2
Cross-flow (ml/mn)
0.7
2
1
0.1
0
0
-1
12
17
22
27
32
37
42
47
52
temps (min)
Figure 29 : Fractogrammes des échantillons. (A) signal UV. (B) diffusion de lumière.
On peut noter tout d’abord une grande similitude des signaux obtenus par absorbance UV et
par diffusion de lumière. Cela signifie que l’ensemble des composés constituant le
compartiment DCM de ces échantillons sont chromophoriques. On observe des distributions
différentes pour les échantillons HLSS et LLSS dans des gammes de tailles comparables
indiquant la présence d’un matériel de nature différente dans chaque échantillon ou de
même type mais en proportions différentes. L’analyse par fluorescence des fractions isolées
devrait nous permettre de confirmer l’une ou l’autre de ces deux hypothèses.
ADEME
68
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Si l’on compare les fractogrammes des échantillons HLSS et HLSS-1kDa, on remarque que
pour le mélange HLSS-1KDa on a perdu à la fois les plus petites molécules (1er pic entre 14
et 16 min.) et les plus grosses molécules (dernier pic entre 30 et 40 min.). Autant ce dernier
point paraît logique puisque cet échantillon correspond au mélange du filtrat (donc les
molécules de taille < 1kDa) du surnageant et du culot de centrifugation de l’échantillon
HLSS, autant il est plus surprenant de ne pas retrouver les molécules de plus petite taille.
Cela pourrait être expliqué de deux façons. Soit les « petites molécules » de ce mélange
sont de taille très inférieure à 1 kDa et pourraient avoir été perdues lors du fractionnement
AF4. L’analyse de la fraction éliminée par le flux croisé permettra de valider ou non cette
hypothèse. Soit les plus petites molécules ont formé des agrégats et précipité au cours des
différentes étapes de filtration/ultrafiltration et ne seraient donc plus présentes dans ce
mélange. Les plus petites molécules pourraient également avoir formé des agrégats avec
d’autres molécules remises en suspension lors du mélange avec le culot de centrifugation.
Les pics observés pour l’échantillon HLSS et absents de HLSS-1kDa pourraient
correspondre aux bandes de fluorescence A et D bien plus intenses pour HLSS que pour
HLSS-1kDa (figure 26).
Une dizaine de fractions ont ensuite été isolées pour chacun des 3 échantillons afin de
caractériser par fluorescence chaque phase colloïdale et déterminer les polluants qui y sont
associés par SPME.
La figure 30 présente les différentes fractions collectées pour 3 injections successives de
chacun des échantillons. Suite à plusieurs pannes instrumentales, les analyses par
fluorescence de l’ensemble de ces fractions sont encore en cours actuellement. Les fractions
seront ensuite analysées par SPME/GC-MS afin de déterminer les HAP libres et associés
aux phases colloïdales.
HLSS
Laser - diffusion détecteur 90°
7
8
9
11
10
17.4
0.26
16.4
0.21
15.4
0.16
14.4
0.11
Absorbance à 280 nm
1 23 4 5 6
0.31
13.4
0.06
0.01
12.4
12
17
22
27
32
37
42
47
52
temps (min)
ADEME
69
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
HLSS-1kDa
1 2
3
4
5 6
7
9
8
17.4
0.26
16.4
0.21
15.4
0.16
14.4
0.11
Absorbance à 280 nm
Laser - diffusion détecteur 90°
0.31
13.4
0.06
0.01
12.4
12
17
22
27
32
37
42
47
52
temps (min)
LLSS
2
1
3
4 5 6
7
8
9
10
19.4
11
0.7
18.4
0.6
17.4
0.5
16.4
0.4
15.4
0.3
14.4
0.2
Absorbance à 280 nm
Laser - diffusion détecteur 90°
0.8
13.4
0.1
0.0
12.4
12
17
22
27
32
37
42
47
52
temps (min)
Figure 30 : Fractions collectées. (A) HLSS. (B) HLSS-1kDa. (C) LLSS.
1.2.4 Lien caractérisation du compartiment DCM-distribution des HAP-performances
de dégradation
L’objectif est ici d’aller plus loin que prédire les phénomènes de sorption au travers d’une
caractérisation fine de la matrice, mais de voir s’il est possible de mieux comprendre les
mécanismes qui régissent la dégradation des PE (ici uniquement les HAP) à partir des
ADEME
70
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
connaissances acquises précédemment. Il semble que cette dégradation soit fortement
influencée par à la fois la présence de co-substrats et le développement d’un métabolisme
couplé et par la disponibilité des HAP qui semble être assez bien représentée par la
distribution des composés dans les compartiments « matière ». Pour tenir compte de cet
ensemble de variables influentes, nous avons construit un modèle PLS, considérant comme
variables explicatives, la distribution initiale des HAP dans les compartiments du mélange,
les caractéristiques des HAP et les performances de dégradation de la matière (tableau 12).
Tableau 12 : les variables PLS utilisées pour le modèle explicatif de la dégradation des HAP. Bloc X,
variables explicatives, bloc Y variable à expliquer, l’abattement total des 13 HAP dans chaque
mélange.
Mélange
HLSS
HLSS1kDa
LLSS
Caractéristiques des
HAP
Log Kow
M
Log S
n5C
n6C
X bloc
Abattement substrat
(%)
MS
MV
Y bloc
Distribution initiale (%)
COP,free
COP,DCM
Abattement
total des
HAP
(%)
eqGlu
EqSAB
eqEEP
DCODCM
L’équation obtenue est la suivante :
(eq. 4) %abattement HAP = 76.68 - 0.11LogKow + 0.08M + 0.06n5C + 0.11n6C + 0.27LogS
+ 0.12DCODCM + 0.09eqGlu + 0.18eqSAB + 0.17MV + 0.18MS + 0.23eqEEP + 0.35 COP,free + 0.14
COP,DCM
avec R2 de 0.83 et REMSEC/MAX de 0.11.
Le modèle montre que les variables représentant le co-métabolisme (abattement substrat)
ont un effet positif sur l’abattement des HAP conjointement avec les variables représentant la
disponibilité, la concentration dans le compartiment libre présentant l’effet positif maximal.
Ce type de modèle conforte donc nos hypothèses de couplage de la dégradation de la
matière avec la dégradation des HAP et de la forte influence du compartiment aqueux (libre
et DCM) sur la dégradation des HAP.
A l’instar de ce qui a été présenté dans le § 1.1, nous avons aussi envisagé de proposer un
modèle prédictif de l’abattement des HAP en fonction uniquement des caractéristiques
initiales des mélanges. Nous avons choisi de travailler avec les variables explicatives
suivantes : les caractéristiques de fluorescence du compartiment aqueux, les
caractéristiques des HAP et la distribution initiale des HAP dans les compartiments
« matière » (tableau 13).
Tableau 13 : les variables PLS utilisées pour le modèle prédictif de la dégradation des HAP. Bloc X,
variables explicatives, bloc Y variable à expliquer, l’abattement total des 13 HAP dans chaque
mélange.
Mélange
HLSS
ADEME
Caractéristiques
des HAP
X bloc
Caractéristiques des
mélanges (fluorescence)
Log Kow
RI
Y bloc
Distribution
initiale
(µgOP/gTOC)
COP,free
71
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
HLSS-1kDa
LLSS
M
Log S
n5C
n6C
RII
RIII
RIV
RV
RVI
RVII
Février 2013
COP,DCM
Abattement
total des
HAP
(%)
L’équation obtenue est la suivante :
(eq. 5) %abattement HAP =
avec R2 de 0.8 et REMSEC/MAX de 0.11.
Les variables qui ont le plus d’influence sur la dégradation des HAP sont : les concentrations
libre et DCM et les régions III, VI et VII. L’influence positive des concentrations libre et DCM
souligne de nouveau l’importance de ce compartiment aqueux dans la dégradation et
renforce l’idée que ce compartiment est le compartiment disponible aux microorganismes. La
région de fluorescence III a une influence positive sur la dégradation ce qui pourrait être
expliqué par la nature même des molécules qui fluorescent dans cette région qui sont des
molécules type protéines assez biodégradables (Baker, 2001) et qui soulignerait là un effet
co-métabolisme. A l’inverse les régions VI et VII ont une influence négative, les molécules
type de cette région sont des molécules beaucoup plus complexes (mélanoïdines-like,
acides humiques-like, lignocellulose-like), elles reflètent la maturité et la stabilité de la
matière organique de l’échantillon et donc influenceraient négativement à la fois le cométabolisme et la disponibilité. Par rapport au modèle présenté dans le § 1.1, ce modèle
permet d’identifier des variables à influence positive.
Pour conclure sur cette première partie :
Nous avons montré qu’une diversité des matrices « boue » entrainait une diversité de
performances de dégradation pour les PE. Ceci s’explique par une combinaison d’effets : la
matrice et sa transformation au cours du procédé de digestion jouent (i) en tant que cosubstrat pour aider à la dégradation des PE, c’est l’effet co-métabolisme et (ii) aussi sur la
nature des interactions avec les PE, c’est l’effet disponibilité. Les résultats semblent montrer
que le compartiment disponible est le compartiment aqueux et que dans ce compartiment les
PE (ici les HAP) sont très affins des colloïdes de grosse taille dont la nature serait proche de
molécules type mélanoïdines, acides humiques, lignocellulose. Si prédire la distribution des
PE dans les compartiments « matière » de la boue au travers d’une caractérisation fine de
ceux-ci semble être aisé (obtention d’un excellent modèle), la prédiction des performances
de dégradation reste chose difficile car les deux effets sont très interdépendants.
Ainsi, le seul fait de maximiser le compartiment disponible (cas du mélange LLSS) n’est pas
suffisant pour maximiser la dégradation totale, certes cela contribue significativement à
maximiser la dégradation dans le compartiment aqueux. Ce n’est pas suffisant car 99% de
nos composés sont sorbés sur le compartiment particulaire et si ce compartiment est
réfractaire à la dégradation alors l’effet co-métabolisme prédomine donc il faut maximiser la
sorption sur le compartiment aqueux tout en maintenant un niveau de co-métabolisme
suffisant pour agir simultanément sur les deux effets co-métabolisme et disponibilité. Les
boues secondaires fortes charge répondent pleinement à ces deux critères et sont donc des
boues de nature favorable pour permettre de maximiser à la fois co-métabolisme et
disponibilité.
ADEME
72
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Si la caractérisation du compartiment aqueux est suffisante pour décrire les interactions PEmatrice dans ce compartiment, elle ne l’est pas pour décrire celles liant PE et compartiment
particulaire surtout pour les HAP de haut poids moléculaire. Il semble donc important de
poursuivre notre effort de caractérisation de ce compartiment et d’établir un lien entre ses
fractions de matières organiques plus ou moins accessibles et la distribution des composés
dans ces dites fractions.
Il est peu aisé de conclure sur les deux autres familles PCB et NP, car les résultats acquis
ne vont pas aussi loin que ceux sur HAP. Il faudrait donc poursuivre les investigations sur
ces deux familles. Dans le cas des PCB, la dégradation commence par une déhalogénation
où les PCB jouent le rôle d’accepteurs d’électrons, l’implication ou le couplage avec le
fonctionnement global de la digestion anaérobie ne semble donc pas aussi prégnant qu’avec
les HAP. Pour le NP, il faut tenir compte du fait que ce composé est à la fois produit et
consommé au cours de la digestion, il est donc indispensable de regarder l’ensemble des
molécules précurseurs à la synthèse de cette molécule.
Dans toutes les expériences présentées précédemment, deux types de matrices sont
mélangées : la matrice « boue » qui sert de substrat est toujours en présence d’une matrice
« boue » qui sert d’inoculum, soit pourvoie le système en une microflore dite adaptée au
niveau de contamination en PE. Or, ces deux types de boue contiennent systématiquement
des microorganismes et de la matière organique qui se mêlent, il est alors difficile de faire la
part entre les microorganismes apportés pour leurs capacités à dégrader de ceux présents
dans la boue/substrat. Dans l’objectif de dissocier ces deux communautés et afin de piloter
ce paramètre communauté, il a été envisagé une stratégie d’extraction de diverses
communautés microbiennes à partir d’écosystème à historique contrasté de pollution et de
les ré-introduire dans une matrice boue/substrat stérilisé.
ADEME
73
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
2. Evaluation de la composante microbiologique : identification des acteurs microbiens
de la dégradation des PE et étude de marqueurs fonctionnels de la dégradation.
Cette partie du projet porte sur « Evaluation de la composante microbiologique ». Elle fait
partie intégrante du projet de thèse de Florence Braun, thèse Ademe/INRA. L’enjeu est ici de
faire varier les communautés microbiennes (potentiel métabolique/cométabolique) tout en
maintenant l’environnement matriciel constant et d’en observer l’impact sur la biodégradation
en terme de communautés et de gènes impliqués. La matrice choisie commune entre les
deux parties du projet est la boue secondaire forte charge-HLSS qui a été stérilisée par une
méthode ne modifiant pas trop ses propriétés et ensemencée uniquement avec des
microorganismes extraits de divers écosystèmes. Les premiers tests ont donc porté sur les
méthodes de stérilisation efficaces et sur les méthodes d’extraction de microorganismes de
matrices complexes. La méthode de stérilisation finalement adoptée est un autoclavage à
121°C pendant 30 minutes. Des microorganismes ont été spécifiquement extraits de trois
écosystèmes différents par l’adaptation/amélioration d’une procédure originellement
développée pour le sol couplant un gradient de densité et une pré-extraction avec un cocktail
enzymatique (Braun et al., 2011). Il a été vérifié que cette procédure n’affecte en rien le
nombre, la diversité et l’activité des microorganismes extraits. Les trois consortiums
microbiens proviennent d’écosystèmes contrastés : un sol fortement contaminé en HAP
(g/kg), un sédiment fortement contaminé en PCB (g/kg) et une boue historiquement
contaminée en HAP/PCB/NP (et sûrement autres polluants) à des teneurs de l’ordre de la
dizaine de mg/kg. La tourbe, le 4eme écosystème envisagé, n’a pu être traité efficacement
par la procédure, les microorganismes restant intimement liés à leur gangue matricielle.
Ces trois communautés microbiennes extraites ont servi d’inoculum pour des réacteurs
continus (afin d’acclimater progressivement les communautés) alimentés avec la boue
secondaire forte charge stérilisée et dopée en PE : 3 réplicats par inoculum et un réplicat
non complémenté en micropolluants (vérifier si la présence des polluants influe sur les
communautés et leur évolution). En pratiquant ainsi, nous nous affranchissions de l’effet
matriciel de l’inoculum et de l’effet d’apport constant de microorganismes via le substrat et
donc d’observer uniquement l’effet des communautés microbiennes à matrice constante sur
la dégradation des polluants. Sur ces écosystèmes ont été suivies les populations
microbiennes et les vitesses de dégradation des polluants au cours des temps de séjour. Les
méthodes de caractérisation des populations se font par suivi de l’ADNr 16S et de gènes
fonctionnels (ciblant des gènes spécifiques soit pour la dégradation des mono et
polyaromatiques, soit pour la déhalogénation des organochlorés) pour avoir une idée de la
diversité totale et fonctionnelle et répondre à la question du rôle et de l’impact des
communautés microbiennes sur l’expression de la dégradation de polluants.
2.1
Les performances globales et de dégradation des polluants
2.1.1
Les HAP
Les données acquises montrent une convergence des trois écosystèmes en termes
d’abattement des polluants et de réduction de la matière sèche (figure 30 et tableau
14) quelle que soit la communauté microbienne : les abattements moyens (sur les triplicats)
à l’équilibre (soit 4-5 TSH) pour les polluants sont de 10-30% selon les poids moléculaires
des HAP (figure 31) et pour les MS de 11%. Les abattements varient donc selon le poids
moléculaire mais pas selon l’origine de l’inoculum. Les abattements des MS et des MV sont
aussi très fortement corrélés aux abattements des polluants (corDM=0.580, corVS=0.568),
cette corrélation est d’autant plus forte que les HAP sont lourds (avec corDM=0.445,
corVS=0.445 pour les petits HAP, corDM=0.614, corVS=0.602 pour les moyens et corDM=0.639,
corVS=0.613 pour les lourds).
ADEME
74
Abattement
du Phénanthrène (%)
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
100
80
60
40
20
0
0
1
2
3
Temps (TSH)
4
5
Figure 30 : Abattement moyen (triplicat) du phénanthrène au cours du temps dans les réacteurs
continus ensemencés avec les trois communautés microbiennes extraites de la boue (gris clair), du
sédiment PCB (gris moyen) et du sol HAP (noir). Dynamique similaire pour tous les HAP.
Figure 31 : Abattement moyen (triplicat) à l’équilibre pour chaque groupe de HAP séparé selon leur
poids moléculaire, dans les réacteurs continus ensemencés avec les trois communautés microbiennes
extraites de la boue (gris clair), du sédiment PCB (gris moyen) et du sol HAP (noir).
Pourtant les trois écosystèmes ne présentent pas les mêmes comportements métaboliques
avec l’écosystème « sol » qui produit beaucoup de CO2 et peu de méthane (60/40),
accumule les acides gras volatils (AGV), soit un comportement plutôt fermentaire,
l’écosystème « boue » qui présente un comportement typiquement méthanogène (20/80), et
l’écosystème « sédiment » présentant un comportement mixte avec deux réacteurs tendant
vers le comportement méthanogène et un vers le comportement fermentaire, d’où des écarttypes élevés sur tous les paramètres (tableau 14).
ADEME
75
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Tableau 14 : Performances globales (matière et biogaz) mesurées sur les réacteurs inoculés par les
trois communautés microbiennes différentes. Moyenne à l’état d’équilibre sur les triplicats .
2.1.2
Les PCB
Il est souvent difficile d’interpréter les résultats d’abattement en PCB car une des premières
étapes de la dégradation des PCB est leur déchloration. Il en résulte que les PCB les plus
chlorés peuvent être déchlorés en molécules suivant les schémas : (PCB180 → PCB153 →
PCB 101 →PCB 52 et PCB 180 → PCB 138 → PCB 118 → PCB 28). On peut alors
observer une accumulation des molécules les moins chlorées, les PCB 52 ou 28, si par
exemple les rendements de formation sont supérieurs aux rendements de dégradation de
ces molécules. Les abattements ainsi mesurés pour chaque molécule résultent de la
différence entre formation via les molécules plus fortement chlorées et dégradation en
molécules moins chlorés ou en biphényls. Ces abattements ont été calculés pour chaque
réacteur (Tableau 15). Seuls les échantillons correspondant au TSH 4,5 ont été analysés. A
ce TSH, l’état d’équilibre est atteint. L’absence de réplicat des mesures rend l’interprétation
des résultats peu aisée. Pour chaque inoculum, deux réacteurs sur trois révèlent des
abattements positifs (dégradation supérieure à formation) pour chacun des PCB mais un
réacteur révèle à chaque fois des abattements négatifs (formation supérieure à dégradation).
En l’absence de répétitions des mesures, exclure les échantillons ayant des abattements
négatifs peut s’avérer risqué.
Tableau 15 : Abattements en PCB à l'équilibre dans les différents réacteurs.
Réacteurs
Inoculum sol 1
Inoculum sol 2
Inoculum sol 3
Inoculum sédiment 1
Inoculum sédiment 2
Inoculum sédiment 3
Inoculum boue 1
Inoculum boue 2
Inoculum boue 3
PCB 28 PCB 52 PDB 101 PCB 118 PCB 138 PCB 153 PCB 180
21
16
11
39
2
29
27
-9
29
15
14
10
14
-6
28
26
-10
32
9
9
-1
27
-10
20
16
-8
24
5
6
-1
23
-8
21
12
-13
17
4
4
-6
22
-11
16
10
-15
16
3
6
-5
20
-13
16
10
-16
14
2
5
-5
18
-13
15
5
-17
9
PCB total
7
8
-1
23
-9
20
14
-13
19
Au vu de ces résultats, plusieurs observations peuvent toutefois être faites. Pour les PCB les
moins chlorés (PCB 28 et 52), il semblerait que l’origine de l’inoculum n’ait pas d’influence
sur les capacités de dégradation du système. L’écosystème sol pour lequel les abattements
des PCB les plus chlorés sont très faibles, n’induisant donc que très faiblement la production
de PCB légers, est donc capable de dégrader des PCB faiblement chlorés. A l’inverse, les
abattements des PCB 28 et 52 sont légèrement plus élevés pour l’écosystème sédiment,
avec des abattements élevés mesurés aussi sur les PCB lourds, induisant donc
potentiellement la formation de PCB légers. Il semblerait donc que pour cet écosystème
provenant d’un sédiment adapté à une contamination aux PCB, la communauté microbienne
ADEME
76
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
présente une activité de déchloration plus importante déployée pour l’ensemble des
molécules PCB du plus léger au plus lourd. Pour les PCB de 5 à 6 chlores, l’inoculum sol
présente les moins bons abattements. Enfin pour le PCB 180, les meilleurs abattements sont
obtenus avec l’inoculum provenant de sédiments contaminés. De plus, de manière générale,
on peut observer une diminution des abattements en PCB avec l’augmentation du degré de
chloration des molécules (Figure 32). Ces résultats sont en opposition avec d’autres études
qui montrent qu’en condition anaérobie mésophile, les PCB les plus chlorés sont ceux pour
lesquels de meilleurs abattements sont observés (Benabdallah El-Hadj et al. 2007; Barret,
Barcia, et al. 2010;). Par analogie, on peut supposer que dans notre système les rendements
de dégradation des PCB les moins chlorés sont suffisamment supérieurs à ceux des PCB
les plus chlorés pour observer une dégradation des PCB 28 et 52 malgré leur formation due
à la déchloration des autres congénères.
Si l’on observe l’abattement moyen sur l’ensemble des PCB suivant l’inoculum, l’inoculum
provenant des sédiments enregistre les meilleurs abattements. Or, cet inoculum provient
d’un sédiment contaminé en PCB, on peut émettre l’hypothèse que les populations
provenant de ces sédiments possèdent une activité spécifique vis-à-vis de ces polluants qui
est plus forte que dans le cas des deux autres inocula.
Pour confirmer ces observations et permettre une étude statistique fiable des données, il
aurait été préférable de mesurer les concentrations en PCB pour les trois demi-TSH formant
l’état d’équilibre (TSH 4/4,5/5). Cela nous aurait entre autre permis d’exclure ou non les
résultats obtenus à TSH 4.5 pour les réacteurs sol-3, sédiment-2 et boue-2.
Figure 32 : Dégradation des PCB tout inoculum confondu en fonction de leur degré de chloration.
2.1.3
Le NP
Comme pour les HAP, la dégradation des nonylphénols a été suivie au cours du temps
(Figure 33).
Contrairement aux HAP, dès le début du régime continu, les NP ont le même comportement
quel que soit l’inoculum étudié. Au bout de 80 jours, au TSH 4, on calcule des abattements
ADEME
77
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Février 2013
négatifs en NP ce qui pourrait suggérer un phénomène d’accumulation ou de production de
ces molécules à partir des dérivés nonylphénol polyéthoxylés (NPEO). Cependant la
ponctualité de ce phénomène, le fait qu’il se produise dans tous les réacteurs et la valeur
particulièrement basse de NP mesurée dans la boue d’alimentation laisse supposer une
erreur de mesure pour ce point et une sous-estimation de la concentration en NP dans
l’alimentation (Figure 34).
Si on exclut les valeurs obtenues au quatrième temps de séjour, pour les derniers temps de
séjour (4.5 et 5), on constate un abattement très faible, voire nul de ces molécules. Les NP
ne sont pas (voire que très faiblement) abattus dans nos systèmes ou sont produits autant
qu’il sont consommés. Chang et al. (2005) montrent que la dégradation du NP en condition
méthanogène est l’une des conditions les moins favorables des conditions anaérobies et
Hernandez-Raquet et al. (2007) n’observent pas de dégradation de cette molécule, il n’est
donc pas surprenant d’enregistrer des abattements en NP faibles dans nos systèmes. La
digestion anaérobie peut entraîner la dégradation de NPEO qui produisent ainsi du NP
(Patureau et al. 2008; Paterakis et al. 2012). Il existe donc au sein des systèmes de
digestion anaérobie, un équilibre entre les phénomènes de production du NP (via la
dégradation des NPEO) et la dégradation du NP. Suivant l’efficacité de l’un ou de l’autre, des
abattements en NP peuvent être mesurés ou non. L’absence d‘abattement de NP tel que
nous le mesurons ou sa ponctuelle accumulation peut être due au fait que la dégradation de
NPEO est aussi importante ou ponctuellement plus importante que la dégradation du NP.
Dans nos expériences, les NPEO n’ont pas été dosés mais des pics pouvant correspondre à
ces molécules ont été identifiés sur nos spectres d’analyse HPLC aussi bien dans
l’alimentation que dans les sorties de réacteur. Etablir un bilan, sur l’ensemble des molécules
(NP+NPEO), nous permettrait de mieux appréhender les phénomènes de
production/dégradation au sein de nos systèmes.
Observons cependant que tout comme pour les HAP, le comportement des NP (tel que nous
le mesurons dans nos systèmes), est similaire quelle que soit la voie métabolique
empruntée. Les populations méthanogènes ne semblent pas particulièrement impliquées
dans la dégradation de ces molécules.
Figure 33 : Dynamique des abattements en NP au cours du temps (indiqué en Temps de Séjour
Hydraulique) pour les trois écosystèmes sol (blanc), sédiment (gris) et boue (noir).
ADEME
78
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Figure 34 : Evolution des concentrations en NP mesurées en µg/L de boue
2.2
Les changements d’abondance des communautés microbiennes
Cette abondance des bactéries et des archées est mesurée par PCRq (figure 35).
Figure 35 : Abondance des Bactéries et des Archées au cours du temps pour les trois communautés
microbiennes extraites de la boue (noir), du sédiment PCB (gris moyen) et du sol HAP (blanc).
L’abondance « bactéries » évolue au cours du temps surtout pour l’écosystème sol. A
l’équilibre, ces abondances « bactéries » sont assez similaires et élevées quel que soit
l’écosystème. A l’équilibre, les abondances « archées » sont différentes entre les trois
écosystèmes avec l’abondance la plus élevée pour l’écosystème « boue ». La présence de
polluants ne modifie pas les abondances « bactéries » (comparaison des triplicats et des
témoins par ANOVA; pour le sol P=0.609, le sédiment P=0.521 et la boue P=0.844) mais
modifie celle des archées pour les écosystèmes sol et boue (ANOVA; P<0.001). Il est
possible de calculer un ratio archées/bactéries (%) qui est à l’équilibre de 9,7, 14 et 19,9
pour respectivement les écosystèmes sol, sédiment et boue. Ce ratio est fortement corrélé à
la production de méthane (figure 36)
ADEME
79
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Figure 36 : Corrélation entre le ratio archées/bactéries (%) et le rendement en méthane calculé à
l’équilibre sur l’ensemble des 9 réacteurs.
2.3
Les changements de diversité et de structure des communautés microbiennes
La diversité et la structure des communautés microbiennes sont évaluées grâce aux
empreintes moléculaires en CE-SSCP réalisées au cours du temps et à l’équilibre sur
chacun des triplicats et les réacteurs témoins (figure 37). L’index de Simpson « bactéries »
calculé à partir des empreintes réalisées diminue de 3 à 1,9 sur les écosystèmes sol alors
qu’il augmente de 2,7 à 3,2 sur les écosystèmes boue et est stable (2,3) pour les
écosystèmes sédiment. Concernant la diversité « archées », l’index de Simpson diminue
pour les écosystèmes sédiment et augmente pour les écosystèmes boue. A l’équilibre, la
diversité « bactéries » et « archées » est la plus élevée pour les écosystèmes boue, mais
chaque écosystème maintient sa propre diversité alors que les conditions opératoires
appliquées sont les mêmes pour tous les réacteurs.
ADEME
80
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Figure 37 : Empreintes moléculaires CE-SSCP des bactéries (gauche) et des Archées (droite) pour
chaque écosystème (profil moyen des triplicats) à l’équilibre.
Ces changements de diversité ont été analysés par ACP. Cette analyse montre
effectivement que si les communautés sont diverses au temps initial, elles maintiennent leur
divergence au cours du temps : les deux structures de communautés bactéries (P<0,001,
r2=0,245) et archées (P<0,001, r2=0,351) peuvent être discriminées par l’origine de
l’inoculum (figure 38). Une corrélation est alors trouvée avec les paramètres globaux
d’évolution du système, à savoir le pourcentage de méthane dans le biogaz (cor=0,393,
P=0,005) et l’accumulation d’AGV (cor=-0,678, P<0,001) mais aucune corrélation n’est
trouvée ni avec l’abattement des polluants, ni avec la dégradation de la MS (figure 39).
ADEME
81
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Figure 38 : Influence de l’origine de l’inoculum (sol-triangle, sédiment-carré, boue-cercle) sur les
différences de structure génétique des communautés bactéries (gauche) et archées (droite). L’ACP
explique 65,4 % de la variance des empreintes moléculaire de bactéries et 74,3 % de la variance des
empreintes moléculaire d’Archées obtenues par CE-SSCP.
Figure 39 : Les corrélations entre la structure des communautés bactéries (gauche) et archées (droite)
et les paramètres de fonctionnement des réacteurs.
Le pyrosequençage (gène ADNr 16S) effectué à l’équilibre sur l’ensemble des réacteurs
nous permet d’identifier quelles sont les espèces qui permettent de discriminer nos
échantillons. Le nombre de séquences détectées par échantillon varie de 3364 à 15538
séquences suivant l’échantillon étudié. Comme le nombre de séquences obtenues par
échantillon est très hétérogène (Tableau 16), les analyses de diversité ont été réalisées sur
un sous-échantillon de séquences de même taille. Nous avons égalisé la taille de l’inventaire
de chaque échantillon à la valeur minimale (ici 3364).
ADEME
82
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Tableau 16 : Données de diversité obtenues par pyroséquençage du gène d’ADNr 16S sur les 9
réacteurs inoculés avec les 3 inocula à l’état d’équilibre (TSH 5). Nb : nombre, Nb seq: nombre de
séquences.
Réacteurs
Nb
Séquences
Nb OTU
Nb seq
Bactéries
Nb seq
Archées
Nb Phyla
Nb Genre
Nb
Espèces
DSol1
4409
116
4392
16
8
28
41
DSol2
4717
133
4608
27
7
27
42
DSol3
3364
154
3295
10
7
25
39
DSed1
6303
149
6140
35
6
28
43
DSed2
14052
260
13627
58
7
38
58
DSed3
15538
367
14035
192
12
50
76
DBoue1
11902
475
10199
240
15
60
103
DBoue2
14168
510
12831
151
19
66
107
DBoue3
11839
469
10413
238
17
59
100
Des analyses en composantes principales (ACP) ont été réalisées à partir des données de
pyroséquençage en utilisant les proportions de chaque espèce, pour discriminer nos
échantillons. Il s’avère que cette représentation est très proche de celle obtenue en réalisant
une ACP à partir des données de CE-SSCP.
La très grande robustesse des comparaisons entre échantillons observée avec les deux
techniques moléculaires (CE-SSCP et pyroséquençage) est encourageante. En effet, il se
pose toujours cette question de biais imputables à chacune des techniques et de
représentativité des résultats lorsqu’ils sont obtenus à partir de plusieurs méthodes
moléculaires différentes (Smalla et al 2007), en particulier si un même échantillon est
analysé via deux méthodes qui ne ciblent pas la même région de l’ADN 16S (Bowen De
León et al. 2012).
L’ACP nous a permis de mettre en évidence 57 espèces (dont quatre Archées parmi
lesquelles trois sont absentes des échantillons DSol) dont les abondances permettent de
discriminer statistiquement nos échantillons (12 espèces p ≤ 0.001 ; 19 espèces p ≤ 0.01 ; 26
espèces p ≤ 0.05). Si l’on considère les 20 espèces les plus abondantes, 7 d’entre elles sont
très hautement discriminantes, 7 sont hautement discriminantes et 2 sont discriminantes.
Une ACP sur la base des 20 espèces les plus abondantes nous offre la même
représentation des données. Qu’il s’agisse de l’ACP avec les données CE-SSCP ou de
l’ACP obtenue par pyroséquençage, nos échantillons sont bien discriminés selon l’origine de
l’inoculum (Figure 40). L’ACP obtenue à partir des données CE-SSCP nous permet de
mettre en évidence 4 pics qui permettent d’expliquer la discrimination des échantillons.
L’ACP obtenue à partir des données de pyroséquençage nous permet de mettre en
évidences des espèces permettant de discriminer nos échantillons.
ADEME
83
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Figure 40 : Représentation des variables discriminantes sur les analyses en composantes principales
(ACP) obtenues à partir des données de CE-SSCP (à gauche) et des espèces par pyroséquençage (à
droite). L’ACP explique 92.0 % de la variance des empreintes moléculaire de bactéries (CE-SSCP) et
92,3 % de la variance des proportions d’espèces obtenues par pyroséquençage. Les réacteurs dont
l’inoculum provient du sol, du sédiment, de la boue sont représentés, respectivement par les symboles
suivant : triangle, carré, cercle. A gauche les flèches représentent les pics les plus discriminants et à
droite les espèces les plus discriminantes parmi les 20 plus abondantes.
Les échantillons DSol sont caractérisés par la présence d’un pic majoritaire en CE-SSCP
mais de trois espèces bactériennes proches de trois espèces bactériennes du genre
Clostridium. Ces bactéries anaérobies sont capables de transformer par fermentation de
nombreux monomères en éthanol, CO2, H2 et acétate (Madden et al. 1982; Sukhumavas et
al. 1988; Hethener et al. 1992). Le fait que les échantillons Dsol soient discriminés par des
bactéries appartenant exclusivement au genre Clostridium est cohérent avec le fait que ce
groupe de réacteurs est caractérisé par l’accumulation d’AGV (Figure 41). L’abondance du
genre Clostridium dans nos échantillons est par ailleurs assez bien corrélé avec les
concentrations en AGV mesurées (cor = 0.851, p-value =0.003). Les échantillons DSed 2 et
3 sont caractérisés par la présence de trois espèces bactériennes (deux du genre
Parabacteroides et une du genre Dysgonomonas) appartenant toutes au phylum des
Bacteroides. Enfin les échantillons de boues sont caractérisés par la présence de 5 espèces
différentes (Clostridium ultunense, Anaerobaculum mobile, Thiohalomonas denitrificans,
Pseudomonas stutzeri et op9), appartenant au phyla des Firmicutes, Synergitetes,
Proteobacteria et op9. Les phyla Bacteroides, Firmicutes et Proteobacteria sont des phyla
fréquents dans les réacteurs de digestion anaérobie (Nelson et al. 2011) et le phyla des
Synergitetes apparait comme un phyla caractéristique des environnements anaérobies
(Godon et al. 2005).
ADEME
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Figure 41 : Représentation des paramètres de fonctionnement discriminants sur les analyses en
composantes principales (ACP) obtenues à partir des données de SSCP (à gauche) et des
proportions des différentes espèces obtenues par pyroséquençage (à droite). L’ACP explique 92 % de
la variance des empreintes moléculaires de bactéries (SSCP) et 92,3 % de la variance des
proportions d’espèces obtenues par pyroséquençage. Les réacteurs dont l’inoculum provient du sol,
du sédiment, de la boue sont représentés, respectivement par les symboles suivant : triangle, carré,
cercle. Les flèches représentent les paramètres de fonctionnement les plus discriminants.
Les échantillons de DBoue et DSed 3 se caractérisent aussi par la présence d’au moins 5
espèces d’Archées différentes alors que seulement une ou deux espèces sont présentent
dans les autres réacteurs (Figure 42). Ces espèces appartiennent toutes au phylum des
Euryarchaeota majoritairement présent dans les réacteurs de digestion anaérobie (Nelson et
al. 2011). La diversité des Archées et les ratios Archées/Bactéries plus importants dans ces
réacteurs DBoue et DSed 3 concordent avec une production plus forte de méthane.
Aucun des genres d’Archées présents dans nos échantillons ne correspondent aux genres
Methanosaeta et Methanoculleus que Berdugo-Clavijo et al. (2012) suggèrent comme
pouvant jouer un rôle important dans le métabolisme de HAP léger (à deux noyaux
aromatiques) en condition méthanogène.
ADEME
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Février 2013
Figure 42 : Proportion de chaque espèce d’Archées par rapport au nombre total d’Archées présentes
dans les réacteurs.
Les principaux phyla bactériens représentés dans nos réacteurs sont les Firmicutes, les
Bacteroides, les Synergitetes et les Protobacteria (Figure 43). Par rapport aux travaux de
(Nelson et al. 2011) et de (Werner et al. 2011), le phylum des Chloroflexi est sousreprésenté dans nos systèmes. Absent des échantillons DSol et DSed, il n’est présent que
dans les échantillons DBoue et représente moins de 1 % des séquences trouvées. En
particulier, aucune séquence du genre Dehalococcoides, bactéries connues pour leur
aptitude à dégrader les PCB en conditions anaérobies (Adrian et al. 2009; Fennell et al.
2004) n’a été retrouvée. Le phylum des Firmicutes est le plus présent dans nos systèmes.
Pour les réacteurs DSol, il se compose essentiellement des bactéries du genre Clostridium
alors que dans les réacteurs Dboue, il se compose majoritairement de l’espèce Clostridium
ultunense, capable d’oxyder l’acétate en association synthrophique avec des bactéries
hydrogénotrophes méthanogènes (Schnurer et al. 1996) et des bactéries du genre
Synthotrophomonas, capables de dégrader les acides gras en présence entre autre de
consortium bactérien méthanogène ou consommateur d’hydrogène (McInerney et al. 1981;
Zhang et al. 2004; McInerney et al. 2008). Les proportions de bactéries appartenant au
genre Synthrophomonas sont d’ailleurs anti-corrélées aux concentrations en acides gras
volatils trouvés dans nos systèmes (cor =-0.860 , p-value = 0.003).
Bien que majoritairement présente dans les réacteurs DSol, la famille des Clostridiceae est
présente dans l’ensemble de nos systèmes. Berdugo-Clavijo et al. (2012) suggèrent que
cette famille peut jouer un rôle important dans la dégradation de HAP léger en condition
méthanogène. Par ailleurs, la famille des Desulfatobacteracea, impliquée selon Musat et al.
(2009) dans la dégradation des HAP, en condition sulfato-réductrice n’est retrouvée que
dans les groupes Dsol et DSed. L’espèce Pseudomonas stutzeri potentiellement impliqué
dans les processus de dégradation des HAP (Rockne et al. 2000) et NP (De Weert et al.
2011) en condition dénitrifiante, est retrouvée dans nos trois groupes de réacteur DSol,
DSed et DBoue et de manière plus abondante dans DBoue. Les variations d’abondances de
ces familles et espèces ne peuvent expliquer à elles seules l’homogénéité des abattements
en HAP et NP mesurés dans nos systèmes.
ADEME
86
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Figure 43 : Proportion dans chaque réacteur des 20 espèces les plus abondantes.
En observant le profil des proportions des espèces bactériennes majoritaires dans chaque
réacteur, encore une fois, il apparait que les répliqua DSol et DBoue forment 2 groupes
homogènes distincts. Par contre le groupe DSed est hétérogène avec DSed1 dont le profil
est très proche de Dsol, DSed 3 plus proche de DBoue et DSed2 un peu à part.
L’ensemble de ces résultats obtenus par pyroséquençage, confirme d’une part les résultats
obtenus par empreintes moléculaire et Q-PCR et d’autre part confirme bien à différents
niveaux une discrimination de nos populations microbiennes selon l’origine et les
métabolismes mis en jeu au sein de nos systèmes.
2.4 L’expression potentielle des fonctions de dégradation des PE
Dans cette partie, nous avons développé une approche liée au potentiel microbiologique de
dégradation des micropolluants organiques. Pour ce faire, nous avons utilisé une
méthodologie permettant de suivre les populations dégradant les HAP et plus
spécifiquement le phénanthrène par marquage isotopique du polluant utilisé comme
substrat. Nous nous sommes ensuite intéressés aux communautés impliquées dans la
dégradation des molécules aromatiques en utilisant comme indicateur fonctionnel un des
gènes identifiés dans la littérature comme intervenant dans l’ouverture des cycles
aromatiques, le gène bssA.
2.4.1 Etude du potentiel de dégradation du phénanthrène par les
microorganismes issus d’un réacteur de méthanisation
Dans le but de suivre la dégradation d’un polluant et d’identifier les populations microbiennes
impliquées dans sa dégradation, des tests en microcosmes sont réalisés à partir de
phénanthrène marqué en 13C, utilisé comme substrat (§ 7.7 matériel et méthode). Une fois
dégradé, il est alors possible d’identifier les produits de dégradation car ces derniers
présenteront une composition isotopique non naturelle. Couplée à des méthodes de
microbiologie, l’étude du devenir d’un substrat marqué peut également permettre d’identifier
les microorganismes actifs impliqués dans la dégradation de la molécule. L’assimilation du
ADEME
87
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Février 2013
ou d’une partie du substrat marqué va entrainer l’enrichissement des constituants cellulaires
des microorganismes responsables de sa dégradation.
La technique de « stable isotope probing » (SIP) permet par ultracentrifugation, de séparer
les acides nucléiques de composition isotopique naturelle de ceux enrichis en 13C après
incorporation du substrat dans la biomasse. Il est alors possible de pré-identifier les
microorganismes responsables de la dégradation de la molécule marquée, utilisée comme
substrat.
Pour pouvoir fournir suffisamment de boue pour les tests d’assimilation du phénanthrène 13C,
deux réacteurs de 400 ml effectuant efficacement la méthanisation ont été réunis dans un
réacteur semi automatisé de 800 ml. Les réacteurs produisant le plus de méthane étant les
réacteurs inoculés à partir des communautés issues de la boue, ce sont deux d’entre eux qui
ont été choisis. La boue de sortie de ce réacteur a ensuite été utilisée pour des tests en
microcosmes anaérobies contenant du phénanthrène 13C (§ 7.7).
Plusieurs microcosmes ont été réalisés :
- Deux fioles de 50 ml contenant du phénanthrène marqué au 13C sur tous les
atomes de carbone à des concentrations de 0.1, 1 et 3 mg/L ont été inoculées
avec respectivement 5, 50 et 50 mg de MV. La composition isotopique du biogaz
produit a été analysée régulièrement par « Isotope-ratio mass spectrometry »
(IRMS). Ce dispositif permet de mettre en évidence la dégradation du substrat en
condition de croissance par enrichissement en 13C du méthane produit.
- Une fiole contenant du phénanthrène marqué au 13C aux mêmes concentrations,
mais avec ajout d’un agent biocide (HgCl2), permet de vérifier si la dégradation
potentiellement observée est la résultante de phénomènes biotiques.
- Une fiole avec du phénanthrène non marqué aux mêmes concentrations sert de
témoin négatif en vue de l’utilisation de la technique SIP.
Les résultats de suivi de la composition isotopique du biogaz au cours du temps sont
présentés en figure 44. Aucune production de méthane n’a été enregistrée dans les témoins
contenant le biocide.
Dans les microcosmes contenant une concentration en phénanthrène de 0.1 mg/l et
possédant la plus faible teneur en biomasse aucun enrichissement n’est observé dans les
fioles contenant le phénanthrène marqué par rapport à celle contenant le phénanthrène non
marqué. Dans les fioles contenant, 1 et 3 mg/l de phénanthrène 13C, un léger enrichissement
est observable dans les incubations contenant le phénanthrène 13C après 100 jours
d’incubation.
Cependant, l’enrichissement observé est très faible et la composition isotopique mesurée est
très proche de celle des incubations avec le phénanthrène non marqué, situé dans une
fourchette basse par rapport aux valeurs des compositions isotopiques mesurées
naturellement en digestion anaérobie (Keppler et al. 2010). Il semble donc que le
phénanthrène ne soit pas dégradé sous forme de biogaz dans les conditions testées.
L’absence de minéralisation complète du composé n’entraîne pas forcément une absence de
dégradation. En fin d’incubation, il ne restait plus de phénanthrène dissout, ce qui suggère
qu’il est fortement sorbé aux matières en suspension. Dans le but d’identifier une
dégradation partielle du phénanthrène dans les incubations, une recherche de métabolites
dans la phase dissoute par GC-IRMS et RMN a été réalisée. Aucun produit de dégradation
n’a pu être mis en évidence. La même démarche est en cours sur la phase particulaire par
GC-IRMS, LC-IRMS et RMN afin d’identifier d’éventuels métabolites.
ADEME
88
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
13
Figure 44 : Fractionnement isotopique (δ C en ‰) du biogaz produit au cours du temps par les
microcosmes aux trois concentrations différentes de phénanthrène. Les symboles représentent le
fractionnement du CO2, les
celui du CH4. En bleu, sont présentés les résultats des dupliqua des
13
incubations avec le phénanthrène marqué au C, en orange ceux obtenus avec le phénanthrène non
marqué.
Afin d’identifier les microorganismes impliqués dans la dégradation du phénanthrène, il était
initialement prévu de mettre en œuvre l’approche Stable Isotope Probing (SIP) sur des
échantillons prélevés lors des incubations avec le phénanthrène marqué en carbone 13. Les
ADEME
89
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
microorganismes dégradant le phénanthrène vont assimiler les atomes de carbone 13 dans
l’ensemble de leurs constituants cellulaires dont l’ADN. L’approche SIP repose sur la
séparation de l’ADN présentant un enrichissement isotopique en carbone 13 non naturel
(%13C >1,1) de l’ADN de composition isotopique naturelle. L’ADN marqué isotopiquement
ainsi isolé peut alors être séquencé spécifiquement afin d’identifier les microorganismes
impliqués. Cette méthodologie n’a pu être mise en place dans le cadre de ces expériences
en l’absence de mise en évidence d’un processus de biodégradation.
Dans le § 2.1, nous avons vu que la dégradation des HAP n’est pas reliée directement à la
méthanogenèse ; de même, d’autres travaux menés en batch (Cea-Barcia, 2012) ou en
réacteur (Delgadillo-Mirquez, 2011) suggéraient que la dégradation des HAP pouvait être
liée aux premières étapes d’hydrolyse, d’acidogenèse et d’acétogenèse de la digestion
anaérobie, et notamment par des phénomènes de co-métabolisme. Or, nos
expérimentations utilisant le phénanthrène marqué sont conçues de telle manière qu’elles ne
favorisent ou permettent pas l’expression d’un tel co-métabolisme (travail à forte
concentration en molécule marquée et avec une biomasse diluée afin de ne pas diluer le
carbone 13 dans le carbone 12). Si l’expression d’un co-métabolisme est nécessaire à la
minéralisation partielle ou totale du phénanthrène, pour favoriser sa réalisation, une autre
source de carbone doit être introduite dans le milieu réactionnel. L’ajout d’un co-substrat (ex.
cellulose ou glucose) pour favoriser la dégradation de la molécule marquée a été donc
envisagé. Une fois la dégradation observée, l’analyse spatiale par spectrométrie de masse
d’ion secondaire (NanoSIMS) pourrait permettre de co-localiser les bactéries ayant incorporé
l’isotope stable avec celles qui auraient incorporé les co-substrats si celui-ci est lui-même
marqué sur un autre atome que le carbone (Li et al. 2008).
2.4.2 Etude du potentiel de dégradation de molécules aromatiques
Afin d’étudier le potentiel microbien de dégradation de micropolluants organiques, nous
avons choisi d’utiliser comme marqueur fonctionnel le gène bssA utilisé normalement
comme marqueur de la dégradation anaérobie des molécules mono-aromatiques. Ce gène
code pour une sous-unité de l’enzyme benzyl-succinate synthase qui permet l’ouverture des
cycles aromatiques par addition d’une molécule de succinate. Les premières étapes du
processus d’ouverture des cycles aromatiques lors de la dégradation des molécules polyaromatiques ne sont actuellement pas décrites dans la littérature. Dans ce travail, nous
avons recherché la présence du gène bssA par analogie avec les connaissances sur les
voies de dégradation des molécules mono-aromatiques. Le nonylphénol présentant un seul
noyau aromatique pourrait potentiellement être dégradé selon ce même type de voie. Les
quelques connaissances acquises sur la dégradation de poly-aromatiques non substitués,
comme les HAP, montrent que des méthylations ou carboxylations ont lieu sur les noyaux
afin de les ouvrir, ce qui si la dégradation est avancée pourrait aboutir à des métabolites
mono-aromatiques.
Le système de détection du gène bssA, mis point au laboratoire (Barret, 2009), a été mis en
œuvre sur les extraits d’ADN obtenus à partir des sorties de réacteurs au TSH 5 et sur un
témoin positif. Les conditions d’amplification sont les mêmes que celles utilisées pour
l’amplification de la région V3 de l’ADNr 16S à la différence près que la température
d’hybridation est abaissée à 51°C pour tenir compte de la température de fusion des
amorces utilisées Barret, 2009). Aucune amplification du gène bssA n’a été observée mis à
part pour le témoin positif.
L’échec de la détection du gène bssA dans nos échantillons peut s’expliquer par différentes
hypothèses :
- Le gène bssA n’est pas présent chez les microorganismes de nos échantillons. Le
choix de ce gène comme marqueur d’une dégradation de molécule aromatique repose
sur l’hypothèse forte que la dégradation des noyaux aromatiques des HAP, NP et PCB
ADEME
90
Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
étudiée en conditions méthanogènes est liée à l’activité benzyl-succinate synthase. Or
à ce jour, aucune expérience ne nous permet de valider cette hypothèse. Les
abattements mesurés dans nos réacteurs font peut-être intervenir d’autres enzymes ou
alors ils sont la résultante d’une dégradation partielle de la molécule mère et ne font
donc pas intervenir le gène bssA, marqueur de la dégradation de molécule
monoaromatique.
- Le gène bssA peut aussi être présent, mais à des niveaux inférieurs à la limite de
détection. Les polluants étudiés représentent une source très faible de carbone et
d’énergie dans nos systèmes. On peut donc supposer qu’un très faible pourcentage de
l’ADN génomique extrait possède le gène bssA. Les concentrations en polluants
utilisées dans nos systèmes, choisies pour être proches de la réalité des systèmes
épuratoires ne permettent peut-être pas d’appliquer une pression de sélection
suffisante qui aurait permis d’enrichir nos systèmes en microorganismes capables
d’utiliser les polluants comme source principale (et unique) de carbone et d’énergie.
Pour conclure sur cette partie 2 :
L’étude de l’influence de communautés microbiennes anaérobies et complexes différentes
sur la dégradation des PE, soumises à la même pression de sélection imposée par la
matrice et la charge en polluants est un sujet important car dans ces conditions, les acteurs
et voies métaboliques impliquées sont largement inconnues. La stratégie originale
développée lors de cette étude, basée sur l’extraction spécifique de microorganismes
d’écosystèmes différents et leur re-introduction dans une unique matrice stérile, nous a
permis de répondre à ces enjeux.
Les réacteurs anaérobies inoculés avec ces communautés extraites ont préservé et même
augmenté les différences génétiques existantes entre les communautés en fonction de
l’origine de l’inoculum.
Les suivi des HAP, la production de biogaz, l’accumulation des AGV d’une part et les
analyses de communautés d’autre part, nous ont permis de démontrer l’indépendance des
changements de structure des communautés avec l’abattement des HAP. Ces changements
sont par contre fortement corrélés aux activités métaboliques exprimées par ces
communautés. La forte corrélation entre l’abattement des HAP et la réduction de la matière
sèche est de nouveau soulignée par cette étude et renforce les résultats de la littérature. De
la même façon, il est montré que la dégradation des HAP est plus faible lorsque le poids
moléculaire des composés augmente. Il semble donc que la dégradation des HAP soit liée à
la dégradation de la matière totale quelle que soit l’activité métabolique finale exprimée
(fermentaire ou méthanogène) et que les communautés se développent en fonction de ces
activités métaboliques exprimées et non vis-à-vis d’un potentiel à dégrader les HAP. Certes
les outils de caractérisation des communautés utilisés ici ne permettent de regarder que les
communautés dominantes et il est possible que la dégradation de ces molécules soit
assurée par une/des communauté(s) microbienne(s) minoritaire(s). Il faudrait alors travailler
sans a priori avec des outils de métagénomique et/ou métatranscriptomique afin d’identifier
l’ensemble des gènes et/ou protéines sur ces trois communautés.
L’étude des communautés microbiennes par pyroséquençage a confirmé les données
obtenues par empreinte moléculaire et Q-PCR. A savoir ; (i) une discrimination des
communautés microbiennes selon les activités métaboliques exprimées avec la distinction
de deux groupes homogènes distincts, DSol et DBoue, et un groupe DSed plus hétérogène ;
(ii) une faible proportion d’archée méthanogène mais dont les variations d’abondance
relative expliquent bien les différences de production de méthane enregistrée entre les
réacteurs ; (iii) la présence de tous les groupes phylogénétiques connus dans les
microbiomes de digestion anaérobie ; (iv) l’absence de séquences affiliées au genre
ADEME
91
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Dehalococcoides qui auraient pu signer la présence de bactéries potentiellement impliquées
dans la dégradation des PCB.
Etudier les fonctions de dégradation de micropolluants organiques dans nos systèmes se
révèle être assez compliqué. En effet, la dégradation des micropolluants organiques semble
être une fonction minoritaire de nos écosystèmes et la détection des acteurs de cette
fonction se heurte alors à des problèmes de seuil de détection. Les difficultés rencontrées
peuvent être dues (i) à la faible pression de sélection appliquée sur nos systèmes par des
concentrations en micropolluants organiques faibles (mais, rappelons-le, réalistes par
rapport à celles rencontrées dans les systèmes épuratoires), (ii) au manque de
connaissances et donc d’outils moléculaires permettant de détecter la présence des gènes
codant pour les enzymes impliqués dans les processus de dégradation des molécules
aromatiques en condition méthanogène.
Même si elle n’a pas permis de mettre en évidence une minéralisation du phénanthrène,
l’approche par marquage isotopique de micropolluant utilisé comme substrat pourrait nous
permettre (i) d’identifier les compartiments dans lesquels les microorganismes ont assimilé le
micropolluant marqué, (ii) d’identifier des intermédiaires métaboliques de dégradation de la
molécule, et enfin (iii) de présélectionner les microorganismes ayant incorporé le substrat
marqué en vue de les identifier. Pour cela, il est peut-être nécessaire de favoriser, dans nos
incubations, les processus de co-métabolismes, suspectés de jouer un rôle important dans la
dégradation des HAP, en ajoutant dans le milieu réactionnel un co-substrat. Une autre
stratégie serait de travailler avec des microorganismes provenant d’enrichissement à de plus
fortes concentrations sur phénanthrène.
ADEME
92
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de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
3.
Février 2013
Evaluation du potentiel toxique : lien entre dégradation des PE, leur distribution dans
les compartiments matière et l’expression de leur toxicité
Les systèmes expérimentaux décrits dans le chapitre 2 des résultats ont été utilisés pour
mener à bien cette partie. Dans ces systèmes, si l’origine des populations microbiennes,
utilisées comme inocula, n’influence pas le devenir global des HAP, elle entraine la
réalisation de voies métaboliques majeures différentes (fermentaire et méthanogène). Ces
voies métaboliques peuvent influencer les caractéristiques de la matière et peuvent
potentiellement induire un effet sur (i) la répartition des micropolluants au sein des différents
compartiments de la boue, (ii) une expression différente de la toxicité selon les
compartiments et (iii) sur les voies métaboliques mineures de dégradation et la production de
métabolites à activité perturbatrice endocrinienne variable. Dans ce chapitre, nous
étudierons donc à l’état d’équilibre, la répartition des HAP au sein des compartiments
matière des boues digérées ainsi que l’activité toxique qu’eux ou leurs métabolites peuvent
générer.
Nous avons définis 4 types de boue :
 Alim : boue servant d’alimentation pour tous les réacteurs continus de 400 ml
 DSol : boues digérées provenant des réacteurs inoculés par les microorganismes
extraits du sol
 DSed : boues digérées provenant des réacteurs inoculés par les microorganismes
extraits du sédiment
 DBoue : boues digérées provenant des réacteurs inoculés par les microorganismes
extraits de la boue
3.1
Distribution des PE dans les différents compartiments de la boue
Les concentrations pour chacun des HAP sont mesurées ou calculées dans le compartiment
particulaire (Ci part), le compartiment aqueux (Ci aqu), la fraction dissoute et colloïdale (Ci DCM),
dans la fraction libre (Ci libre) et dans la boue totale (Ci total).
3.1.1 Influence des caractéristiques des molécules sur la distribution des PE
Etudions dans un premier temps la répartition des micropolluants dans les différents
compartiments par rapport à la concentration totale en polluant dans la boue (Figure 47). La
majorité des polluants présents dans la boue se retrouve dans le compartiment particulaire,
quel que soit le composé étudié. La concentration en polluants dans la phase aqueuse varie
suivant les molécules étudiées. Les proportions de polluant dans la phase aqueuse sont
faibles (inférieur à 6%) quel que soit le composé. Dans le compartiment aqueux, les
molécules les plus hydrophobes sont majoritairement retrouvées dans la fraction dissoute et
colloïdale du compartiment alors qu’à l’inverse les composés de poids moléculaire plus petit
sont majoritairement présents sous forme libre.
ADEME
93
C aqu (%)
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5
4
3
2
1
0
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Figure 45 : Répartition des HAP dans le compartiment particulaire et aqueux de la boue et dans les
Alim et DCM du compartiment
DSol
DSed
fractions libre
aqueux. Les proportions
sont calculées DBoue
par rapport au total
des concentrations en polluant. Les polluants sont représentés de gauche à droite (du plus foncé au
plus clair) par ordre croissant de log Kow:
Flu
Ant
Phe
Fluor
Pyr
BaA
Chr
BaP
BbF
Ind
BkF
DBA
BghiP
3.1.2 Influence des paramètres de fonctionnement des réacteurs sur la
distribution des PE dans les différents compartiments
De la même manière que les caractéristiques des molécules n’influencent pas la proportion
de HAP sorbés à la matière particulaire, le fonctionnement des réacteurs n’induit pas de
différence sur ces proportions. Qu’il s’agisse de la boue d’alimentation ou de n’importe
quelles boues digérées, la majorité des polluants est retrouvée dans le compartiment
particulaire. Par rapport à la concentration totale, toute molécule confondue, la proportion de
polluant présent dans la phase aqueuse est supérieure dans les boues digérées par rapport
à la boue d’alimentation. La proportion de polluants présents dans la phase aqueuse est
croissante entre Dsol, Dsed et Dboue. Les proportions en polluants dans la phase libre et
dans la DCM augmentent conjointement selon le même classement.
ADEME
94
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Février 2013
L’étude de la répartition des HAP dans la phase aqueuse, révèle que dans toutes les boues
digérées, les polluants sont présents de manière plus importante dans la fraction DCM que
dans la fraction libre (Figure 48). Là encore le phénomène est accentué entre les trois types
de réacteurs.
La digestion anaérobie de la boue entraine donc un réarrangement de la répartition des
polluants. Les effets de ce réarrangement sont plus importants dans la phase aqueuse. Ce
réarrangement est influencé par le fonctionnement des réacteurs. Si l’on compare les
réacteurs où la méthanisation se déroule normalement (Dboue) aux réacteurs où d’autres
voies métaboliques sont impliquées dans la dégradation de la matière (DSol), on peut
émettre l’hypothèse que plus la digestion de la matière est poussée, plus les polluants se
retrouvent dans la phase aqueuse. Dans cette phase, le processus de digestion va entrainer
une accumulation des polluants sur la fraction DCM.
C aqu (%)
Les réacteurs étant tous alimentés avec le même type de boue (Alim), la disponibilité initiale
des polluants est identique quels que soient les écosystèmes étudiés. Les bactéries sont
soumises à une répartition en polluant similaire dans tous les écosystèmes, induite par les
caractéristiques de la boue d’alimentation. Les polluants sont essentiellement présents dans
le compartiment particulaire. Au cours de la digestion, le compartiment particulaire et les
HAP sorbés dessus sont transformés, les molécules HAP non dégradées vont par la suite se
répartir différemment dans les compartiments suivant différentes affinités développées vis-àvis de la composition physico-chimique de chacun des compartiments.
5
4
3
2
1
0
Alim
DSol
DSed
DBoue
Figure 46 : Répartition des HAP dans la fraction libre et DCM au sein du compartiment aqueux. Les
proportions sont calculées par rapport au total des concentrations en polluant dans le compartiment
aqueux.
Flu
ADEME
Ant
Phe
Fluor
Pyr
BaA
Chr
BaP
BbF
Ind
BkF
DBA
BghiP
95
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3.2
Février 2013
Activité des perturbateurs endocriniens dans les différents compartiments
« matière » des boues
Les activités « perturbateur endocrinien » sont évaluées dans la boue totale, dans le
compartiment particulaire et dans le compartiment aqueux. Les activités œstrogéniques,
androgéniques, dioxin-like et HAP-like pouvant toutes quatre être modulées par la présence
de HAP, PCB ou NP, sont évaluées à partir de tests sur différentes lignées cellulaires (cf § 8
matériel et méthode). Les activités ciblées font partie de celles classiquement trouvées dans
la littérature pour décrire l’action de molécules pouvant induire une activité de perturbateur
endocrinien, à la fois dans des études sur des procédés de traitement et de valorisation
(Combalbert et al. 2012; Patureau et al. 2012) mais aussi dans des études sur des
échantillons environnementaux (Kinani et al. 2010). Chaque activité est mesurée par rapport
à une molécule de référence. Il s’agit du 17β-œstradiol (E2) pour l’activité œstrogénique, de
la dihydrotestostérone (DHT) pour l’activité androgénique, de la 2,3,7,8-tétrachlorodibenzo-pdioxine (TCDD) pour l’activité dioxin-like et le Benzo(a) Pyrène (BaP) pour l’activité HAP-like.
Les différentes activités mesurées sont présentées sur la figure 49.
De façon générale, les activités mesurées dans le compartiment « boue totale » sont plus
élevées ou équivalentes à celles mesurées dans le compartiment particulaire ; ces dernières
sont à chaque fois supérieures à celle mesurée dans le compartiment aqueux, ce qui
coïncide bien avec le fait que les micropolluants organiques soient sorbés majoritairement au
compartiment particulaire.
Mise à part l’activité androgénique pour laquelle aucune activité « boue totale » n’est
mesurée et l’activité dioxin-like, il est difficile de différencier l’activité « boue totale » de la
boue d’alimentation, de celle des boues digérées. Par contre des différences sont
observables à la fois dans le compartiment particulaire et dans le compartiment aqueux entre
boue d’alimentation et boues digérées avec soit une augmentation, soit une diminution
d’activité entre alimentation et sortie.
Dans le compartiment particulaire, la boue des réacteurs provenant des inocula « boue »
(DBoue) possède des activités œstrogénique, androgénique et HAP-like proches de la boue
d’alimentation, alors que la boue provenant des réacteurs inoculés avec des
microorganismes venant du sol (DSol) possède à chaque fois une activité supérieure. La
boue provenant de l’inoculum « sédiment » (DSed) possède un comportement intermédiaire
entre DBoue et DSol. Ces résultats suggèrent que, dans le cas d’une digestion incomplète
de la boue, il se forme des composés intermédiaires qui interagissent avec les différents
récepteurs de nos modèles cellulaires.
Dans le compartiment aqueux, il est difficile de différencier les types de boue selon leur
activité œstrogénique. Par contre, les activités androgéniques et HAP-like sont différentes
selon le type d’inoculum étudié. L’activité androgénique de DBoue est similaire à celle
mesurée dans l’alimentation alors qu’elle est supérieure dans DSol. Par opposition, l’activité
HAP-like mesurée dans l’alimentation est similaire à celle mesurée dans DSol et nettement
inférieure à celle mesurée dans DBoue. Peu d’activité dioxin-like est mesurée dans le
compartiment aqueux.
L’activité androgénique est la seule pour laquelle, des activités sont mesurées dans les
compartiments particulaire et aqueux, sans que des activités soient mesurées dans le
compartiment total. Ce phénomène peut être dû à des actions agonistes (effet positif sur le
récepteur) et antagonistes (effet négatif sur le récepteur) qui mènerait à une absence
d’activité générale mesurée dans la boue. Des tests pour déterminer la possible présence
d’action antagoniste sont en cours d’analyse.
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Dans le cas de l’activité dioxin-like, certaines activités mesurées dans le compartiment
particulaire sont supérieures à celles mesurées dans le compartiment total. Ici aussi des
actions agonistes et antagonistes peuvent survenir. Les PCB notamment peuvent jouer des
rôles différents sur le récepteur AhR suivant la conformation des molécules (Chen and
Bunce, 2004).
Dans le cas des activités œstrogéniques, en combinant les analyses chimiques, qui nous
renseignent sur les concentrations en NP obtenues dans la boue totale, avec les analyses
biologiques, nous pouvons comparer les équivalents toxiques donnés par les analyses
chimiques et biologiques. Nos calculs (données non présentées) nous révèlent que pour
tous les échantillons seuls 0.1 à 0.3% de l’activité mesurée biologiquement sont expliqués
par les concentrations en NP mesurées. A concentration égale cette molécule induit une
activité presque un million de fois plus faible que le 17β-œstradiol. Ce dernier composé (non
dosé dans notre étude) peut être retrouvé dans les boues dans des concentrations allant de
10 à 20 µg/kg (Muller et al. 2010) ce qui représenterait 15 à 30% de l’activité mesurée.
Figure 47 : Comparaison de quatre activités "perturbateur endocrinien" représentatives mesurées
dans des extraits de micropolluants issus des différents compartiments de chaque réacteur à
l’équilibre. Activité mesurée dans la boue d’alimentation des réacteurs dopés (barre hachurée), dans
les boues digérées par les réacteurs inoculés par des microorganismes provenant du sol (barre
blanche), des sédiments (barre grise) et de la boue (barre noire). n.a., non analysée, ; n.d., non
détectée.
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De nombreux composés peuvent agir sur le récepteur ER comme, par exemple des
hormones œstrogènes (naturelles ou synthétiques), des métabolites des HAP ou du
Bisphénol-A (Kinani et al. 2010).
L’activité HAP-like est sans conteste l’activité la plus présente dans nos échantillons (avec
des valeurs jusqu’à 1000 fois supérieures aux autres valeurs d’activités « perturbateur
endocrinien »).
Dans la suite de ce paragraphe, nous mettons volontairement à part les réacteurs inoculés
avec des microorganismes issus de sédiments qui ont un comportement métabolique
hétérogène et intermédiaire par rapport aux réacteurs inoculés par des microorganismes de
sol et de boue.
De manière générale sur les échantillons totaux, si l’on compare les échantillons de boue
digérée à l’échantillon d’alimentation, bien que nous mesurions des abattements en HAP,
nous n’enregistrons ni perte, ni surplus d’activité HAP-like. Des molécules mères HAP ayant
pourtant été éliminées de la boue, cela peut suggérer une activité HAP-like des produits de
dégradation.
D’un point de vue qualitatif, si l’on compare donc les réacteurs ayant les comportements les
plus différents (à savoir DSol et DBoue), les activités biologiques, observées sur les
échantillons, semblent bien liées aux concentrations totales en HAP quantifiées dans les
différents compartiments (Tableau 17). En effet dans la boue totale les concentrations en
HAP sont similairement élevées quel que soit le type de boue (t-test, p>0.05) et les activités
HAP-like le sont aussi (t-test, p>0.05). Dans le compartiment aqueux, les concentrations les
plus fortes en micropolluants sont mesurées dans les échantillons DBoue et c’est là aussi
que les activités HAP-like les plus fortes sont mesurées (cor=0.909, p-value=0.012). Par
opposition dans ce même compartiment, dans les échantillons DSol, les concentrations en
HAP sont les plus faibles, et les activités HAP-like les sont aussi. Dans le compartiment
particulaire où les concentrations en HAP sont plus fortes dans DSol que dans DBoue, là
encore les activités suivent les tendances des concentrations (cor=0.947, p=0.004) et l’on
mesure des activités plus fortes dans le particulaire de DSol que dans le particulaire de
DBoue.
Tableau 17 : Comparaison entre concentrations en HAP et activité HAP-like dans les boues digérées
DSol et DBoue.
Réacteur
C ech totale
HAP-like ech total
C part
HAP-like part
C aqu
HAP-like aqu
DSol
+
+
+
+
-
-
DBoue
+
+
+
+
En combinant les analyses chimiques, qui nous renseignent sur les concentrations en HAP
dans chaque compartiment, avec les analyses biologiques, nous pouvons comparer les
équivalents toxiques donnés par les analyses chimiques et biologiques. Pour ce faire nous
calculons pour chaque réacteur les équivalents toxiques théoriques mesurés grâce aux
dosages chimiques. Pour calculer ces équivalents toxiques, nous utilisons les coefficients de
toxicité de chaque molécule sur la lignée cellulaire PLHC1 (Louiz et al., 2008). Pour chaque
réacteur, une valeur correspondant à l’activité toxique générée théoriquement par l’ensemble
des 13 HAP (Chem-BaP) est calculée et comparée à la valeur mesurée biologiquement (BioBaP-EQ). A partir de ces données, le pourcentage d’activité mesurée expliqué par les
mesures chimiques peut être calculé.
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Quelle que soit la boue étudiée, les concentrations en HAP mesurées dans la boue totale
expliquent 36 ±3 % de l’activité HAP-like (tableau 18). Ces pourcentages sont cohérents
avec ceux trouvés dans la littérature sur la mesure d’activité HAP-like dans des échantillons
contaminés par un cocktail de molécules (Kinani et al. 2010). Les ligands naturels de AhR
sont peu connus mais d’autres molécules peuvent interagir avec ce récepteur tels que des
HAP méthylés, des PCB ou des acides humiques (Brack et al. 2008; Louiz et al. 2008;
Kinani et al. 2010). Par ailleurs, d’autres HAP (ou d’autres isomères), non mesurés dans
notre étude, peuvent aussi être présents dans la boue et donc induire une activité toxique.
Dans le compartiment particulaire, de manière générale, les données de la chimie expliquent
mieux l’activité mesurée biologiquement que dans la boue totale. Les autres molécules
pouvant agir sur le récepteur AhR pourraient donc être plus présentes dans le compartiment
aqueux. Le pourcentage d’activité expliquée par les concentrations en HAP mesurée est
différent suivant le type de boue étudiée (tableau 18).
Si l’on compare les deux types de réacteurs, ayant des comportements fermentaires les plus
éloignés (soit DSol et DBoue), l’activité HAP-like calculée à partir des mesures chimiques
explique mieux celle mesurée biologiquement dans le cas de DBoue que dans le cas de
DSol. La digestion est plus poussée dans DBoue que dans DSol. Notre hypothèse serait
donc que dans le cas d’une digestion incomplète de la boue, la dégradation des HAP ne se
fait pas non plus de manière complète et des métabolites intermédiaires de cette
dégradation (comme des HAP méthylés) se formeraient. Ils resteraient sorbés au particulaire
et pourraient donc induire une activité du récepteurs AhR. Dans le cas d’une digestion
complète, la dégradation des HAP serait plus poussée et les produits de dégradation ne
seraient pas sorbés au compartiment particulaire, ne pouvant donc induire une activité du
récepteur AhR. La grande majorité des molécules mères HAP restant dans le particulaire
expliqueraient donc la grande majorité de l’activité biologique mesurée. Une analyse des
métabolites présents dans chacune des boues, nous permettrait d’infirmer ou non cette
hypothèse. Le fait que les concentrations chimiques surestiment l’activité mesurée dans la
boue d’alimentation peut être due à la présence de molécules antagonistes du récepteur
AhR dans la boue d’alimentation. Ces molécules seraient alors transformées lors de la
digestion ou leur action inhibée.
Les activités mesurées dans le compartiment aqueux sont plus faibles que dans le
compartiment particulaire, de manière générale. Ces activités HAP-like sont plus faiblement
expliquées dans ce compartiment que dans la boue totale (Tableau 18). Cela renforce notre
hypothèse que d’autres molécules capables d’induire l’activité HAP-like mesurée dans la
boue totale seraient donc préférentiellement présentes dans le compartiment aqueux.
Conclusion partie 3 :
Les micropolluants sont majoritairement répartis dans le compartiment particulaire quel que
soit le type de boue (digérée ou non) et quel que soit le mode de digestion. La répartition des
HAP dans le compartiment aqueux varie d’une boue non digérée à une boue digérée mais
aussi entre boues digérées. La digestion augmente la proportion des HAP présents dans le
compartiment aqueux et plus particulièrement DCM. La digestion entraine donc un
réarrangement de la répartition des HAP dans le compartiment aqueux. L’affinité des HAP
pour le compartiment DCM augmente avec le degré de digestion de la boue, il est donc
logique de retrouver des proportions plus importantes de HAP sorbés à la DCM. Cette
modification de l’affinité des HAP pour le compartiment DCM peut être expliqué par les
modification physico-chimiques et fonctionnelles de la nature de la DCM qui surviennent lors
de la digestion (Barret 2009; Cea-Barcia, 2012). Des analyses permettant de caractériser la
composition biochimique du compartiment aqueux et ses transformations, notamment la
fluorescence 3D, semble une perspective intéressante.
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Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Les activités « perturbateur endocriniens » ne permettent pas de différencier les différents
types d’échantillons de boue si l’on considère l’échantillon de boue brut. D’un point de vue
qualitatif, les activités HAP-like mesurées dans les compartiments suivent bien les variations
des concentrations en HAP dans le compartiment particulaire et aqueux. La comparaison
des activités biologiques HAP-like mesurées, à celle des activités théoriques calculées, nous
permet de conclure quant à la présence d’autres molécules capables d’agir sur le récepteur
cellulaire.
Les résultats obtenus sur le compartiment particulaire en comparant deux boues (DSol et
DBoue) résultant d’une activité microbienne différente laissent supposer la présence dans ce
compartiment d’intermédiaires de dégradation des HAP sorbés à la matière particulaire et
pouvant induire une activité biologique sur les récepteurs AhR (il pourrait s’agir par exemple
de HAP méthylés).
Ces intermédiaires métaboliques pourraient être de caractéristiques chimiques différentes
suivant la voie de dégradation empruntée par le système. Notre hypothèse est que dans le
cas des réacteurs DSol, ces intermédiaires, aux caractéristiques encore proches de la
molécule mère, resteraient sorbés au compartiment particulaire. Dans le cas des réacteurs
DBoue, où la digestion est plus poussée, on peut supposer une dégradation plus avancée
des molécules mères HAP, formant ainsi des métabolites plus solubles ou ayant plus
d’affinité pour le compartiment DCM, ce qui engendrerait les activités plus fortes mesurées
dans le compartiment aqueux de DBoue.
Par ailleurs, les modifications physico–chimiques induites par la digestion sur la nature des
compartiments entrainent une affinité plus forte des HAP non dégradés pour le compartiment
DCM. Ceci explique aussi l’augmentation d’activité mesurée dans ce compartiment dans les
échantillons DBoue.
Selon les profils d’activités obtenus, une approche « Effect-Directed Analysis » (EDA),
intégrant des analyses chimiques, guidées par les tests sur lignée cellulaire, peut être mis en
œuvre dans le but d’identifier les molécules responsables des effets toxiques observés. Des
échantillons d’intérêt (DSol et DBoue, représentants les deux voies fermentaire observées)
pourraient être fractionnés en fonction de la polarité ou de la masse des composés présents.
L’activité de chaque fraction, ainsi obtenue, pourrait être mesurée ce qui permettrait
d’identifier celles induisant une perturbation endocrinienne. Ces dernières seraient alors
isolées et analysées, par différentes techniques de spectrométrie de masse à haute
résolution (GC-TOF et/ou LC-TOF). Ceci permettrait la détection d’éventuels composés
actifs, non ciblés par notre démarche d’analyse classique.
In fine, le couplage des analyses chimiques et toxicologiques devrait permettre d’identifier
les composés ainsi que les classes chimiques, responsables d’une activité de perturbation
endocrinienne, dans les échantillons de boue et leurs compartiments et/ou fractions. Cela
permettrait aussi d’appréhender l’effet de la digestion et des voies métaboliques des
communautés microbiennes, sur ces éléments.
L’analyse de l’activité induite par les échantillons issu des réacteurs non dopés, nous
permettrait de vérifier si le processus de dégradation même de la matière, entraîne ou non
une activité sur les différents récepteurs.
Notre analyse s’est essentiellement focalisée sur les HAP, mais analyser la répartition des
PCB et des NP dans les différents compartiments, nous permettraient de mieux comprendre
les activités « perturbateur endocrinien » mesurées en lien avec la dynamique de répartition
de ces micropolluants dans les compartiments en fonction des voies métaboliques
empruntées par les trois communautés microbiennes.
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Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Tableau 18 : Activités HAP-like calculées et mesurées (en BaP-EQ) dans la boue totale et dans les
compartiments (particulaire et aqueux) à l’état d’équilibre.
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Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
L’objectif du présent projet, visait à (i) mieux comprendre les processus qui pilotent la
dynamique des micropolluants organiques (ici des perturbateurs endocriniens-PE) au sein
d’écosystèmes épuratoires, (ii) déterminer le ou les critères pertinents permettant a priori
d’évaluer ce devenir pour enfin (iii) orienter ce devenir dans un contexte de réduction des
risques (lié au rejet des micropolluants dans notre environnement soit par le biais du rejet
des eaux usées traitées soit par le biais de l’épandage des boues sur sol agricole). Nous
avons pour ce faire choisi de travailler (i) avec des perturbateurs endocriniens types, HAP,
PCB et NP qui se retrouvent de façon systématique dans les boues issues du traitement des
eaux usées et (ii) sur un procédé modèle de digestion anaérobie, procédé utilisé lors des
traitements de stabilisation des boues avant leur utilisation comme amendement ou fertilisant
sur sol agricole. La méthodologie utilisée fut la suivante : (1) nous avons travaillé sur des
boues de nature différente (soit naturelles, soit modifiées au laboratoire) afin d’observer
l’effet de cette variabilité matricielle sur le potentiel à dégrader les PE et ainsi faire le lien
entre caractérisation des boues-disponibilité des PE-sorption-biodégradation mais aussi à
l’inverse (2) nous avons utilisé trois écosystèmes microbiens différents que nous avons mis
en présence d’une même matrice boue afin d’observer l’effet de cette diversité microbienne
sur l’expression de la biodégradation des PE et sur l’expression d’activités « perturbateur
endocrinien ».
Pour étudier le lien entre caractérisation des boues-disponibilité des PE-sorptionbiodégradation, deux systèmes expérimentaux ont été utilisés, soit des réacteurs continus,
soit des réacteurs batch, dans les deux cas, des boues de nature différente ont été utilisées
et caractérisées finement. Le panel de boues sélectionnées était suffisamment large pour a
priori obtenir des comportements et des cinétiques de réaction divers pour les PE. De plus,
les rendements de transformation de la boue dépendent également de sa composition
initiale, de son accessibilité et de sa biodégradabilité. Ainsi, biodisponibilité et cométabolisme
des PE sont de fait confrontés dans ce type d’expérience. Les résultats ont montré que les
abattements des PE par digestion anaérobie varient considérablement en fonction des
caractéristiques des boues d'alimentation. Selon le réacteur, l'élimination plus ou moins
grande peut être expliquée soit par des variations de cométabolisme ou par différents
niveaux de biodisponibilité des PE. Cependant, les résultats suggèrent qu'une
caractérisation détaillée des boues d'alimentation, en particulier de la fraction aqueuse,
pourrait aider à prédire l’élimination des PE. Pour aller plus loin, les abattements des PE ont
été mesurés dans des réacteurs batch alimentés avec différents mélanges de boues, mais
inoculés avec le même consortium anaérobie adapté aux PE. L’objectif était ici de mieux
comprendre l'influence de la biodisponibilité sur les abattements des PE au travers de l'étude
du rôle de la concentration et de la nature de la matière dissoute et colloïdale sur la
distribution des PE dans les trois compartiments physiques de la boue, soit le compartiment
libre, sorbé à la matière dissoute et colloïdale et sorbé aux particules. Les concentrations
totale, aqueuse et libre des PE ont été mesurées tout au long des expériences en utilisant la
technique SPME-solid phase microextraction. Ainsi, les cinétiques des abattements des PE
dans les trois compartiments physiques de la boue ont été obtenues pour chaque mélange
de boues.
Ces cinétiques dans les réacteurs batch ont montré que les abattements des PE sont
couplés aux premières étapes d’hydrolyse et d’acidogenèse de la digestion anaérobie. Ces
abattements sont conjoints à un transfert des PE du compartiment particulaire vers le
compartiment aqueux lors de l’hydrolyse des particules. Ce transfert des PE permet
l'élimination apparente et simultanée des concentrations libre, sorbée à la matière dissoute
et colloïdale et sorbée aux particules. De plus, les résultats soulignent l'importance de la
matière dissoute et colloïdale sur l'élimination des PE de haut poids moléculaire qui est
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Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
directement liée à la concentration initiale des PE sorbés à ce compartiment. Cependant,
même si un niveau élevé de cette concentration implique un fort abattement de cette
concentration, l’élimination totale des PE n’est pas uniquement régie par le compartiment
dissout et colloïdale, mais l’est également par le flux cométabolique généré par l’hydrolyse
de la matrice et par les phénomènes de transfert des PE d’un compartiment à l’autre.
Pour étudier les interactions PE-matrice et leur influence sur l’élimination des PE, les
coefficients de partition KDOC et Kpart, c'est à dire les affinités respectives des PE pour la
matière dissoute et colloïdale et les particules, ont été calculés en utilisant les résultats
SPME. Ces coefficients sont bien corrélés avec les Kow des PE, mais sont différents entre
les boues. Ils ont donc été utilisés pour construire un modèle explicatif et prédictif de ces
interactions PE-matrice avec la méthode statistique de régression partielle des moindres
carrés (PLS). Les autres données explicatives choisies sont des données biochimiques et de
caractérisation fonctionnelle par fluorescence tridimensionnelle (3D) de la fraction aqueuse.
Il a été constaté que les compartiments de type acides humiques-like et mélanoïdines-like
ont un grand rôle dans les interactions PE-matrice dans la phase aqueuse. De plus en
couplant SPME et filtration/ultrafiltration, il a été montré que les colloïdes de grande taille
contribuent principalement à la sorption des PE dans le compartiment aqueux. La
caractérisation de la phase aqueuse par fluorescence 3D a également été utilisée pour
expliquer et prédire l'affinité des PE pour le compartiment de particules. Pour ce
compartiment, en plus du compartiment matière de type acides humiques-like, les protéines
complexes régissent les interactions PE-matrice. Cependant, cette caractérisation
fonctionnelle de la phase aqueuse n'est pas suffisante pour expliquer les interactions entre
tous les PE et la fraction particulaire, ce qui rend nécessaire une caractérisation plus
détaillée de cette fraction afin de déterminer quel type de matière organique particulaire
interagit avec les PE. Le modèle prédictif de KDOC présente quant à lui une très bonne
précision en utilisant cette méthode simple et non-destructive de caractérisation fonctionnelle
de fluorescence 3D.
Des modèles PLS explicatifs et prédictifs des abattements totaux des PE ont aussi été
construits. Il en ressort que l’élimination des PE est favorisée par tous les paramètres
cométaboliques (élimination des substrats). La variable « concentration aqueuse des PE »
est elle aussi très fortement corrélée aux abattements, ce qui tend à confirmer que ce
compartiment correspond au compartiment biodisponible. Le modèle prédictif PLS a été
construit à partir d'une caractérisation plus détaillée initiale et en tenant compte de l'influence
de la biodisponibilité (via la distribution initiale des PE dans les trois compartiments
matriciels). Les distributions initiales des PE ont été identifiées comme les variables les plus
importantes qui permettent de prédire les abattements totaux des PE, avec une influence
positive des concentrations « libre » et « matière dissoute et colloïdale » et négative de la
concentration « particules ». Parmi les paramètres de caractérisation des boues, les
compartiments matière de type protéines-like, acides humiques-like et mélanoïdines-like
présentent les plus grandes influences. Ces paramètres peuvent influer soit sur la
biodisponibilité par affinités variables des PE pour les différents compartiments soit
indirectement sur le flux cométabolique.
De façon générale, si prédire la distribution des PE dans les compartiments « matière » de la
boue au travers d’une caractérisation fine de ceux-ci semble être aisé, la prédiction des
performances de dégradation reste chose difficile car les deux effets (co-métabolisme et
biodisponibilité) sont très interdépendants.
Ainsi, le seul fait de maximiser le compartiment aqueux/disponible n’est pas suffisant pour
maximiser la dégradation totale, certes cela contribue significativement à maximiser la
dégradation dans ce compartiment. Mais, ce n’est pas suffisant car 99% de nos composés
sont sorbés sur le compartiment particulaire et si ce compartiment est réfractaire à la
dégradation alors l’effet co-métabolisme prédomine donc il faut maximiser la sorption sur le
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Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
compartiment aqueux tout en maintenant un niveau de co-métabolisme suffisant pour agir
simultanément sur les deux effets co-métabolisme et disponibilité. Les boues secondaires
fortes charge répondent pleinement à ces deux critères et sont donc des boues de nature
favorable pour permettre de maximiser à la fois co-métabolisme et disponibilité.
Si la caractérisation du compartiment aqueux est suffisante pour décrire les interactions PEmatrice dans ce compartiment, elle ne l’est pas pour décrire celles liant PE et compartiment
particulaire surtout pour les HAP de haut poids moléculaire. Il semble donc important de
poursuivre notre effort de caractérisation de ce compartiment et d’établir un lien entre ses
fractions de matières organiques plus ou moins accessibles et la distribution des composés
dans ces dites fractions.
Dans toutes les expériences présentées précédemment, deux types de matrices sont
mélangées : la matrice « boue » qui sert de substrat est toujours en présence d’une matrice
« boue » qui sert d’inoculum, soit pourvoie le système en une microflore dite adaptée au
niveau de contamination en PE. Or, ces deux types de boue contiennent systématiquement
des microorganismes et de la matière organique qui se mêlent, il est alors difficile de faire la
part entre les microorganismes apportés pour leurs capacités à dégrader de ceux présents
dans la boue/substrat. Dans l’objectif de dissocier ces deux communautés et afin de piloter
ce paramètre communauté, il a été envisagé une stratégie d’extraction de diverses
communautés microbiennes à partir d’écosystème à historique contrasté de pollution et de
les ré-introduire dans une matrice boue/substrat stérilisé. Cette stratégie devrait permettre
d’apporter un éclairage nouveau sur sur les acteurs microbiens et les processus impliqués
dans la dégradation de micropolluants organiques au cours de la digestion anaérobie en
utilisant les caractéristiques de la communauté microbienne initiale comme seule variable
opératoire.
Dans un premier temps, il a été nécessaire de mettre au point un nouveau protocole
expérimental permettant d’extraire les communautés microbiennes d’intérêt de leur
écosystème natif tout en conservant les caractéristiques initiales (densité, diversité et
activité). Ce protocole a permis d’étudier l’influence des communautés microbiennes placées
dans les mêmes conditions physico-chimiques en réacteur continu (alimentation en substrat,
température, taux de dilution, etc.). Si les protocoles d’extraction existant dans la littérature
ont pu être facilement adaptés aux matrices de sol et de sédiment, la nature même de
l’échantillon de boue, et particulièrement la présence de la gangue d’exopolymères (EPS), a
nécessité la mise au point d’un protocole spécifique couplant un traitement enzymatique
avec une extraction sur gradient de densité.
Pouvoir extraire spécifiquement des communautés microbiennes d’écosystèmes complexes
tout en minimisant l’impact de l’extraction sur la structure, la diversité et les fonctions des
communautés, permet alors leur étude dans des conditions opératoires choisies et
contrôlées. Cette stratégie efficace développée au cours de ce travail pourrait être employée
dans bien d’autres domaines et sous bien d’autres conditions que celles de la digestion
anaérobie et de la dégradation de micropolluants. Cet outil, mis en place sur des échantillons
de boue peut par ailleurs être adapté à d’autres matrices complexes riches en EPS comme
par exemple des biofilms ou granules microbiens retrouvés dans de nombreux procédés de
traitement biologiques d’effluents. Ce protocole d’extraction permet aussi de comparer les
communautés d’un grand nombre d’écosystèmes de structures et de caractéristiques
physico-chimiques différentes sans que celles-ci n’interfèrent directement sur les
communautés et les conditions opératoires choisies. Aussi, dans le cas d’écosystèmes
complexes organisés en agrégat, riches en EPS, cette extraction pourrait permettre de
faciliter l’emploi des protocoles expérimentaux de caractérisation des microorganismes
basés sur des outils faisant par exemple intervenir la fluorescence (DAPI) ou le comptage de
cellules libres (cytométrie).
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Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
Dans notre cas, cette méthodologie d’extraction appliquée à trois écosystèmes présentant
des historiques de pollution contrastés nous a permis l’obtention de trois communautés
microbiennes de structure et de diversité a priori différentes. Elles ont été utilisées comme
source d’inoculum pour des réacteurs anaérobies alimentés avec une même boue stérilisée
(afin de ne pas apporter une diversité microbienne supplémentaire) et enrichie en HAP, PCB
et NP. Ces bioréacteurs ont donc permis, tout en suivant leur propre évolution de structure et
de diversité microbienne, sous des conditions opératoires contrôlées et similaires
(alimentation avec la même boue et donc a priori avec la même disponibilité des
micropolluants), d’étudier l’influence de ses trois communautés microbiennes sur :
(i) les cinétiques d’abattements en HAP, PCB et NP au cours de la digestion,
(ii) l’activité microbienne du système et l’expression de fonctions spécifiques impliquées
dans la dégradation des micropolluants,
(iii) la distribution des micropolluants au sein des compartiments particulaires/aqueux, et
fraction dissoute et colloïdales, au regard de l’expression d’une activité toxique dans
ces mêmes compartiments,
(iv) la toxicité résiduelle du substrat après digestion.
A partir des trois écosystèmes initiaux, nous avons obtenu deux types de comportement de
digestion distincts, l’un bloqué aux activités fermentaires et l’autre réalisant la
méthanogenèse complète. Dans un même temps, nous avons aussi constaté une
convergence des capacités d’abattement en HAP quelle que soit les voies métaboliques
empruntées. L’analyse de la structure, de la diversité et l’identification des communautés
microbiennes révèlent que les différences observées au niveau structurel sont très bien
corrélées avec l’activité générale de l’écosystème quantifiée par l’accumulation d’AGV
(métabolisme fermentaire) et la production de méthane (métabolisme méthanogène). Par
contre, l’abattement des micropolluants ne peut s’expliquer par des différences structurelles
de communauté microbienne ou par des différences de rendement méthanogène. Ces
résultats soulignent à nouveau que la dégradation de ces composés organiques persistants
présents en faible quantité dans la boue par rapport aux autres sources de carbone ne peut
se faire qu’en combinaison avec la dégradation de co-substrats, soit au travers d’un cométabolisme. Ils montrent que cette dégradation des micropolluants est imputable à une
structure et une diversité microbienne non spécifique de la présence et de l’abattement des
micropolluants mais spécifiques de la dégradation des co-substrats et des voies
métaboliques empruntées. Ils suggèrent de plus que la dégradation des HAP n’est pas
directement liée au processus de méthanogenèse mais aux étapes initiales de la digestion
anaérobie de la matière organique.
Les résultats obtenus sur la dégradation des PCB et NP mériteraient d’être approfondis. Par
exemple, concernant le devenir du nonylphénol dans nos systèmes, un bilan englobant aussi
le devenir des composés polyéthoxylés s’avère nécessaire pour tenir compte au mieux des
processus concomitants de dégradation et de synthèse du nonylphénol. En effet, en
condition anaérobie, le nonylphénol peut être à la fois dégradé et produit via la présence de
composés polyéthoxylés. L’abattement observé en NP est donc le résultat d’un équilibre
entre la dégradation et la néo-synthèse de ce composé. La vision apportée par la seule
analyse des abattements en nonylphénol peut donc se révéler biaisée.
Le processus de digestion anaérobie bloqué à différents stades (fermentaire ou
méthanogène) devrait aboutir à la production de deux digestats de compositions physicochimiques et de caractéristiques matricielles fonctionnelles différentes. Cette variabilité
matricielle finale influence vraisemblablement la répartition des micropolluants au sein des
compartiments matière des boues digérées puisqu’ils présentent des affinités contrastées
aux matières organiques des boues en fonction de leur nature et de leur concentration.
Même s’ils restent majoritairement sorbés à la matière particulaire, l’étude de la répartition
des HAP au sein de la boue révèle qu’une partie des micropolluants non dégradés est
transférée dans la phase aqueuse et que ce transfert dépend du degré de digestion de la
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Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
Février 2013
boue. Au sein du compartiment aqueux, un réarrangement s’opère également et les HAP
sont plus favorablement sorbés à la matière dissoute et colloïdale dans le cas où la digestion
anaérobie est la plus efficace. L’hypothèse que des modifications physico-chimiques et
fonctionnelles, s’opérant sur les compartiments matière et donc dépendantes du rendement
de digestion, influencent la répartition des micropolluants est par la même fortement
suggérée. Une caractérisation physico-chimique et fonctionnelle de la nature des
compartiments plus approfondie nous permettrait de mettre en perspective, le degré de
digestion et la caractérisation de ses sous-produits, avec l’affinité des micropolluants pour
chaque compartiment. Dans cette perspective, de nouveaux outils de caractérisation de la
matière comme la fluorescence 3D peuvent être envisagés. Cette approche employée sur
les HAP pourra par ailleurs être transposée sur les PCB et NP.
Les communautés microbiennes ont emprunté des voies de dégradation de la matière
différentes qui ont eu un impact sur les interactions matrice/micropolluants. La modification
de ces interactions peut, en soit, introduire des différences d’expression de la toxicité des
micropolluants. La mesure des activités de perturbation endocrinienne via la mesure des
activités œstrogénique, androgénique, dioxin-like et HAP-like a révélé que l’activité
majoritairement présente étaient celle HAP-like. D’un point de vue global, quelle que soit la
voie métabolique empruntée, l’activité toxique globale de la boue n’est pas influencée par le
processus de digestion. Cependant des différences au niveau des activités des
compartiments particulaire et aqueux sont notables entre les voies fermentaires. L’étude de
l’activité HAP-like révèle que les activités mesurées dans le compartiment particulaire sont
plus faibles lorsque la digestion est plus avancée et que, inversement, l’activité mesurée
dans le compartiment aqueux augmente ce qui est bien corrélé au transfert de la phase
particulaire à l’aqueux envisagé. Cette dynamique est inverse quand la digestion est moins
efficace. La présence de métabolites induisant une activité HAP-like est fortement suggérée
par les différences entre activité mesurée et activité théorique et par le fait que des
abattements en HAP sont mesurés dans nos systèmes sans pour autant voir l’activité
globale HAP-like diminuée. Il peut par ailleurs s’agir de métabolites de nature différente
suivant la voie fermentaire. L’identification de ces intermédiaires potentiels de dégradation
des HAP et pouvant induire une activité HAP-like nous renseignerait sur les voies de
dégradation des micropolluants en condition méthanogène que nous pourrions confronter
avec celles supposées dans d’autres conditions anaérobies. La présence d’intermédiaires
métaboliques démontrerait d’autre part l’implication forte des processus biologiques dans la
dégradation des molécules.
L’étude de la présence de gènes potentiellement impliqué dans la dégradation des
molécules mono-aromatiques (gène bssA) ne nous a pas permis de mettre en évidences des
populations spécifiques responsables de ces processus. Les études dans lesquelles ces
outils sont employés portent sur des milieux hypercontaminés où la fonction de dégradation
représente une activité majeure de l’écosystème et est vraisemblablement supportée par
une population spécifique. Dans nos systèmes, la pression de sélection imposée par de
faibles concentrations en micropolluants explique peut-être la difficulté d’emploi de ces outils.
Dans des systèmes faiblement contaminés, les fonctions de dégradation des micropolluants
ne sont peut-être pas portées par des populations très spécifiques (du fait de la faible
pression de sélection imposée) mais plutôt par un consortium microbien qui les cométabolisent lors des phases fermentaires. D’ailleurs, en condition peu favorable à
l’expression d’un co-métabolisme (comme dans nos expériences utilisant du phénanthrène
marqué), la dégradation des micropolluants est difficilement observable. Pour pallier ce biais
méthodologique, l’ajout d’une source de carbone facilement biodégradable est proposé. Le
marquage de cette source de carbone sur un autre atome que le carbone (l’azote par
exemple) permettrait de mettre en évidence, voire d’identifier les acteurs du co-métabolisme.
L’analyse et l’identification de composés sous-produits marqués seraient une autre voie
d’identification des voies métaboliques de dégradation.
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Elucider les processus de dégradation des micropolluants sous condition anaérobie semble
ne pas pouvoir se faire par une approche mono-disciplinaire. Le couplage des
connaissances apportées par les analyses chimiques, écotoxicologiques et
microbiologiques, développé dans cette étude devrait être encouragé et poursuivi dans le
but, dans un premier temps, d’identifier les co-substrats et les métabolites intermédiaires de
dégradation et dans un deuxième temps, basé sur ces connaissances de remonter aux
fonctions et pouvoir élaborer des marqueurs biologiques pertinents pour suivre les
communautés dégradantes. Ce couplage des différentes approches peut par ailleurs être
employé à l’étude de la dégradation d’autres molécules polluantes dans d’autre processus.
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Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
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Thèses :
Cea-Barcia, G., E., 2012. Identification des mécanismes qui gèrent la disponibilité en vue de
l’optimisation de la dégradation des micropolluants organiques au sein d'écosystèmes épuratoires.
Braun, F., 2012. Impact des communautés microbiennes sur la dynamique de dégradation de
micropolluants organiques au sein d’écosystèmes épuratoires et sur l’expression de leur
toxicité.
Articles :
Barret, M., Carrere, H., Cea Barcia, G. and Patureau, D. (2010). Influence of inlet
characteristics on the removal of micropollutants during the anaerobic digestion of
contaminated sludge. Journal of Hazardous Materials, 181: 241-247.
Braun, F., Hamelin, J., Gevaudan, G., Patureau, D. (2011) Development and application of
an enzymatic and cell flotation treatment for the recovery of viable microbial cells from
environmental matrices such as anaerobic sludge. Applied and Environmental Microbiology,
77(24): 8487–8493.
Barret, M., Delgadillo-Mirquez, L., Trably E., Delgenes, N., Braun, F., Cea Barcia, G., Steyer,
J.P. and Patureau, D. (2012) Anaerobic Removal of Trace Organic Contaminants in Sewage
Sludge: 15 Years of Experience. Pedosphere, 22(4): 508–517.
Cea Barcia, G., Carrère, H., Steyer, J.P. and Patureau, D. (2013) Evidence for PAH removal
coupled to the first steps of anaerobic digestion in sewage sludge. Accepted in International
Journal of Chemical Engineering.
Braun, F., Hamelin, J., Bonnafous, A., Delgenes, N., Steyer, JP., Patureau, D. Similar
micropollutants fate in anaerobic digesters fed with the same sludge but exhibiting different
microbial populations and metabolic routes. Submitted to Water Research.
Articles en preparation:
Braun, F., Delgenes, N., Creusot, N., Ait-Aissa, S., Le Menach, K., Budzinski, H., Hamelin,
J., Patureau, D. Chemical and toxicological assessments of anaerobic digesters removing
EDCs.
Cea-Barcia G., Budzinski, H., Le Menach, K., Carrère H., and Patureau D. Role of dissolved
and colloidal matter on the distribution and the anaerobic removal of PAHs in sewage sludge.
Cea-Barcia G., Barret, M., Budzinski, H., Le Menach, K., Carrère H., and Patureau D.
Prediction of micropollutant sorption in the aqueous fraction of sludge by fluorescence.
Conférences orales :
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Les interactions Perturbateurs EndoCriniens-MICroorganismes et Matières OrGaniques, moteurs
de l’écodynamique et de l’impact des polluants au sein d’écosystèmes épuratoires
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Compostèle, 25-27 juin 2012.
Posters :
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