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60 Disponible en ligne sur CAS CLINIQUE www.smr.ma Gonalgies chroniques secondaires à une tumeur glomique : à propos d’un cas. Chronic knee pain secondary to a glomus tumor : a case report. Hicham El hyaoui, Nabil Elkoumiti, Abouali Haitam, Abderrahim Rafaoui, Mohamed Rafai, Abdelhak Garch. Service de Traumatologie-orthopédie, Pavillon 32, CHU Ibn Rochd, Casablanca - Maroc. Rev Mar Rhum 2015; 34: 60-2 Résumé Abstract Les tumeurs glomiques sont des tumeurs bénignes rares. La localisation la plus fréquente est la main particulièrement les doigts, mais une localisation anatomique atypique reste rare en dehors du doigt et la taille le plus souvent petite de la tumeur peuvent rendre le diagnostic difficile et retardé. Glomus tumors are rare benign tumors. The most common location is the hand especially the fingers, but an atypical anatomical localization remains rare outside the finger and usually small tumor size can make the diagnosis difficult and delayed. Nous rapportons une localisation très rare de tumeur glomique au niveau du genou et nous discutons les aspects épidémiologiques, diagnostiques et thérapeutiques de ces tumeurs. We report a rare localization of glomus tumor in the knee and we discuss epidemiological, diagnostic and therapeutic aspects of these tumors. Mots clés : Tumeur glomique; Genou; Extra digitale ; Douleur chronique. chronic pain. Les tumeurs glomiques sont des tumeurs bénignes rares, ne représentant que 1,6% des tumeurs des tissus mous [1,2]. Elles se caractérisent par leur petite taille et leur caractère très douloureux. Le diagnostic est souvent évoqué devant un nodule douloureux des extrémités, mais une localisation atypique rend le diagnostic parfois difficile. Nous rapportant une localisation inhabituelle d’une tumeur glomique au niveau du genou et nous discutons les aspects épidémiologiques, diagnostiques et thérapeutiques de ces tumeurs rares. OBSERVATION Il s’agit d’un patient de 38 ans de sexe masculin qui consultait pour une douleur exquise du genou droit déclenchée à la moindre pression et évoluant depuis 16 mois. Il ne pouvait supporter que son pantalon ou les draps de son lit touchent la face antérieure de son Correspondance à adresser à : Dr. H. El hyaoui Email : [email protected] Key words : Glomus tumor; Knee; Extradigital; genou. Il n’y avait aucun antécédent de traumatisme et aucun symptôme mécanique. Les symptômes n’ont pas été atténués par un traitement conservateur administré par de nombreux médecins. L’examen révélait un petit nodule blanchâtre visible dès l’inspection à la face antéro-supérieure de la rotule mesurant 10 mm de diamètre, non fixé aux plans profonds (Fig. 1). II était extrêmement sensible à la palpation, au point que le patient essayait de l’éviter car elle déclenchait de très vives douleurs. L’articulation du genou était libre et le reste de l’examen de l’appareil locomoteur était sans particularité. La radiographie standard du genou n’avait pas montré d’anomalie. L’IRM avait objectivé un petit nodule sous cutané de 7/3 mm arrondi, bien limité, en pré-rotulien, hyposignal en T1 et hyper signal en T2. Revue Marocaine de Rhumatologie Gonalgies chroniques secondaires à une tumeur glomique: à propos d’un cas. Sous rachianesthésie, une incision cutanée de 2 cm juste au dessus de la masse était réalisée. Une petite masse arrondie bien limité encapsulée et violacée était retrouvée dans le tissu sous cutané et était excisée complètement (Figure 2). L’examen histologique avait confirmé le diagnostic d’une tumeur glomique. En post opératoire, le patient a fait une excellente récupération caractérisée par une résolution immédiate et complète des symptômes et un retour à l’activité quotidienne. Figure 1 : Petit nodule blanchâtre visible dès l’inspection à la face antéro-supérieure de la rotule mesurant 10 mm de diamètre. 61 sauf pour les tumeurs glomiques sous-unguéales qui montrent une prépondérance féminine [4]. Leur site le plus fréquent est la main, en particulier les doigts [2]. Elles peuvent être développées dans des régions aussi diverses que le coude, la hanche, la région paraachilléenne, ou le pied [5-8]. Des localisations plus profondes ont été décrites au niveau des viscères, comme l’estomac ou l’utérus, mais aussi de certains os, du nerf sciatique et de la coiffe des rotateurs [9-11]. La localisation au niveau du genou est authentique et très rare. À notre connaissance, 18 cas au niveau du genou ont été rapportés dans la littérature [4,12-15]. Ces tumeurs autour du genou ont été rapportés dans des endroits variables; sous cutanée, sous synovial, dans le ligament rotulien, dans le ligament adipeux, latéral au niveau de la tête du péroné et au niveau du creux poplité. Notre cas était localisé en sous cutané à la partie antéro-supérieure de la rotule. Seuls trois cas localisés dans cette région pré-patellaire ont été rapportés dans la littérature [13-15]. La douleur peut être augmentée par des changements de température, en particulier l’exposition au froid. Caroll et al. citent la caractéristique triade « douleur paroxystique, sensibilité exagérée au froid et au choc et nodule tumoral » comme étant la clé du diagnostic [16]. La douleur est un élément sémiologique important, mais parfois peu évocatrice dans les localisations extra digitales notamment autour du genou. En effet, les délais entre apparition des symptômes et diagnostic s’échelonnent de quelques mois à 30 ans le diagnostic correct n’est évoqué que dans environ 20 % des cas. Figure 2 : Aspect per-opératoire montrant une petite masse arrondie bien limité encapsulée et violacée. Discussion La tumeur glomique est diversement considérée comme un hamartome ou une tumeur du glomus neuro-myo-artériel et se compose de canaux vasculaires dilatées, entouré par la prolifération de cellules nerveuses et glomiques (canal Sucquet-Hoyer) et joue un rôle important dans la régulation thermique [3]. Les tumeurs glomiques solitaires sont généralement vues chez les adultes aussi fréquemment dans les deux sexes, Revue Marocaine de Rhumatologie Le Pin test (signe de Love) consiste à rechercher la zone douloureuse à l’aide d’un instrument pointu et est caractérisé par sa grande sensibilité (100 %) [2]. Le signe de Hildreth, très spécifique (100 %) mais moins sensible que le signe de Love (71 %), consiste en la diminution ou la disparition des phénomènes algiques après réalisation d’une ischémie d’une minute [2]. Ce test n’a pas été réalisé chez notre patient. Il n’y a pas de techniques d’imagerie spécifiques pour confirmer le diagnostic, mais l’échographie en dépit de sa faible spécificité, contribue à localiser la lésion. L’IRM, notamment en haute résolution, représente le moyen paraclinique de choix en distinguant entre la tumeur elle-même et le tissu sain. Elle définit mieux ses caractéristiques : en effet, il s’agit d’une lésion homogène bien limitée, en hyposignal T1 avec rehaussement rapide après injection de Gadolinium, et en hypersignal T2. Chez 62 H. El hyaoui et al. CAS CLINIQUE notre patient, l’IRM était demandée en deuxième intention après la radiographie standard et a permis d’évoquer le diagnostic. La certitude diagnostique est apportée par l’histologie, qui montre une prolifération constituée en proportion variable de cellules glomiques, de structures vasculaires et de tissus musculaires lisses. En fonction de ces proportions relatives, on distingue trois types : la tumeur glomique solide « classique », le glomangiome et le glomangiomyome. Une composante nerveuse est toujours associée [2]. Le diagnostic différentiel est vaste. Il inclut les lésions intra-articulaires (telles les lésions et les kystes méniscaux, une synovite, une plica synoviale, une synovite pigmentée villonodulaire, un corps étranger ou une infection) et extra-articulaires (lésions ligamentaires et tendinites) et les syndromes douloureux neuropathiques [4]. Le traitement de référence est l’exérèse chirurgicale méticuleuse et complète. Cette exérèse devrait aboutir à une résolution spectaculaire des symptômes comme le cas de notre patient. Les récidives ne sont pas fréquemment mentionnées dans la littérature, peut-être en raison du recul insuffisant, car les cas de récidives mentionnés, certes rares (7 %), ont mis trois à cinq ans avant de se manifester cliniquement ou encore en rapport avec des tumeurs multiples [2, 18]. Putti et Tatò [14] ont rapporté deux patients atteints de tumeurs glomiques prépatellaires, qui ont tous les deux développé des récidives locales après excision locale. Ils ont conclu que ces récidives ont été liées à l’excision incomplète. Chez notre patient, après un an de recul, nous n’avons pas observé de récidive. Références 1. Soule EH, Ghormley RK, Bulbulian AH. Primary tumors of the soft tissues of the extremities exclusive of epithelial tumors: an analysis of five hundred consecutive cases. AMA ARCH Surg 1955; 70:462-74. 2. Frikh R, Alioua Z, Harket A, Ghfir M, Sedrati O. Glomus tumors: anatomoclinical study of 14 cases with literature review. Ann Chir Plast Esthet 2009; 54:51-6. 3. Muller A. Tumeur glomique extradigitale : une cause rare de névralgie. Ann Fr Anesth Reanim 1997; 16:61-3. 4. Clark ML, O’Hara C, Dobson PJ, Smith AL. Glomus tumor and knee pain: a report of four cases. Knee 2009; 16:231-4 5. Burnier M, Erhard L. Glomus tumor of volar elbow capsule. Case report. Chir Main 2014 ;33:67-70. 6. Gençosmanolu R, İnceolu R, Kurtkaya-Yapıcıer O. Glomangioma of the hip. Dermatol Surg 2003;29:1244-7. 7. Nakamura Y, Nomura T, Ookubo M, Adati T, Harada D. Extradigital glomus tumor causing para-achilles tendon pain. A case report. Acta Orthop Bel 2000, 66, 503-506. 8. Massari L, Caruso G, Chinni C, Ferron P, Gaban A, Traina F. Intraosseous glomus tumor of the ankle: a case report and review of the literature. Foot Ankle Int 2006 ;27:1148-51. 9. Fabiani P, Benizri E, Michiels JF, Gugenheim J, Saint-Paul MC, Mouiel J. Un nouveau cas de glomangiome gastrique. Gastroenterol Clin Biol 1993;17:974-5. 10. Tuncali D, Yilmaz AC, Terzioglu A, Aslan G. 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Two cases of glomus tumor localized in the right knee: removal and recurrence. Chir Organi Mov1991;76:375-8. [Abstract] 15. Akgün RC, Güler UÖ, Onay U. A glomus tumor anterior to the patellar tendon: a case report. Acta Orthop Traumatol Turc 2010;44(3):250-3. Déclaration d’intérêt Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêt. 16. Carrol RE, Berman AT. Glomus tumor of the hand. J Bone Joint Surg Am 1972; 54:691-703. Revue Marocaine de Rhumatologie