Mariage homosexuel : bénira, bénira pas

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Mariage homosexuel : bénira, bénira pas
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Mariage homosexuel : bénira, bénira pas ?
©Shutterstock.com/William Perugini
Le calendrier législatif sur le projet de mariage homosexuel rejoint la
réflexion des Eglises sur la bénédiction des couples homosexuels. Le Conseil
national de l’Eglise réformée de France a mis en place un « Groupe de
travail sur la bénédiction des couples PACSés ». En Alsace en en Moselle, un
groupe informel se réunit également.
Depuis 2001, plusieurs pays européens reconnaissent le mariage homosexuel : les
Pays-Bas, la Belgique, l'Espagne, la Suède (où l'Eglise est tenue de trouver un
pasteur pour célébrer le mariage religieux), la Norvège, le Portugal et l'Islande. Dans
plusieurs pays, des Eglises protestantes bénissent des unions de couples
homosexuels, avec des variantes quant à la forme et la manière de faire la différence
avec une bénédiction d’une union hétérosexuelle. Ainsi, dans l’Eglise de Rhénanie,
les discussions ont commencé dès 1968, suivies du travail d’une commission de
réflexion puis de débats importants en paroisses dès 1996. Le Synode de 2000,
constatant des avis partagés, encourage à accompagner (aussi par le culte) des
couples non mariés homosexuels, mais laisse chaque paroisse décider.
Où en est-on en France ?
La Mission Populaire évangélique de France, proche des Eglises historiques, autorise
les pasteurs « à participer à un geste liturgique d’accueil et de prière pour un projet
de couple homosexuel pacsé, après accompagnement du couple, dans la mesure où
ce geste ne s’apparente en aucune manière à une bénédiction de mariage et ne
s’impose pas à la communauté locale ». Il faut donc qu’un débat local ait lieu. A
contrario, dans les Eglises protestantes historiques, un document de 2004 de la
Communion protestante luthéro-réformée (CPLR) fait encore référence aujourd'hui :
« Il n’est pas opportun d’envisager un culte de bénédiction qui entretiendrait la
confusion entre couple homosexuel et hétérosexuel. » Dans la pratique, des
paroisses et des pasteurs accompagnent spirituellement des couples homosexuels
qui le demandent et il arrive à certains pasteurs de dire en privé la bénédiction de
Dieu sur leurs personnes. Pour une cérémonie publique, il faudra que le Conseil
presbytéral soit lui aussi d’accord et que les synodes n’interdisent pas de le faire.
Parler avec les personnes
Il sera important que les paroisses locales débattent de cette question et de celle de
l’homoparentalité qui lui est liée. Une première étape serait de parler non pas sur les
couples homosexuels mais avec eux. J’ai rencontré des personnes homosexuelles
blessées par des paroles qui les considèrent comme des malades à soigner ou des
pécheurs à convertir…
Parler du couple homosexuel, ce sera aussi parler du couple, de mon couple : la vie
partagée à deux s’enrichit des mille et une différences entre les humains, bien audelà de la seule différence sexuelle. Je connais des homosexuels qui espèrent bâtir
une vraie vie de couple dans la fidélité, le respect, le pardon et la foi.
Notre lecture de la Bible sera interrogée : pouvons-nous fonder une morale sur une
lecture particulière, hors contexte historique et culturel, et appliquer certaines
paroles qui appellent à exclure, lapider, tuer, réduire en esclavage ? Nos lectures
auront à s’attacher aux grands thèmes qui esquissent les contours d’une vie de
couple en Dieu : fidélité, promesse, pardon, respect…
L’Eglise « ne marie pas » mais accompagne et bénit un couple déjà marié
civilement qui souhaite dire publiquement sa reconnaissance de l’amour reçu et
partagé et placer son engagement sous la bénédiction de Dieu. Il faudra réfléchir au
nom de quels principes accorder ou refuser la bénédiction à certains, car bénir, ce
n’est pas donner un jugement de valeur ou une approbation morale de ce que les
gens vivent (ainsi la bénédiction en prison), mais c’est bien dire, à travers une parole
et un geste : « Dieu n’est pas exclu de ce que vous vivez, il vous rejoint, vous
accompagne et vous souhaite un avenir. »
Cette question s’inscrit aussi dans les temps d’une vie que les Eglise accompagnent
et marquent : la naissance, l’adolescence, le couple, la mort, mais aussi les
séparations, les déménagements, les rentrées scolaires, les départs, les
anniversaires, etc. Pour dire la communion en Dieu et aider à vivre cette vie en Dieu.
Pierre Magne de la Croix
Membre du « Groupe de travail : bénédiction de couples PACSés » de
l’Eglise réformée de France
Article paru dans le Nouveau Messager de novembredécembre 2012
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