Infections urinaires chez les personnes porteuses de sonde à

Transcription

Infections urinaires chez les personnes porteuses de sonde à
COllection
Infections urinaires chez les personnes
porteuses de sonde à demeure
ayant une vessie neurogène
les connaître
les reconnaître
les gérer
Cahier
Les cahiers du BTEC
4
Pistes d’action documentées pour la pratique infirmière
POUR UNE PRISE DE DÉCISION INFORMÉE PAR DES RÉSULTATS PROBANTS
Infections urinaires chez les personnes porteuses de sonde à demeure
ayant une vessie neurogène
les connaître
les reconnaître
les gérer
Bureau de transfert et d’échange de connaissances (BTEC)
Faculté des sciences infirmières
Institut de réadaptation en déficience physique de Québec (IRDPQ)
Décembre 2005
MEMBRES DU GROUPE D’ÉLABORATION DES PISTES D’ACTION
Stéphanie, Brochu, inf.
Étudiante stagiaire
Ginette Mbourou Azizah, Ph.D.
Coordonnatrice scientifique
Françoise Côté, inf., Ph.D.
Professeure adjointe
Johanne Gagnon, inf., Ph.D. Sc. inf.
Professeure agrégée
Bureau de transfert et d’échange de connaissances (BTEC)
Faculté des sciences infirmières
Université Laval
Francine Roy, inf.
Brigitte Boivin, inf.
Institut de réadaptation en
déficience physique de Québec (IRDPQ)
Remerciements
Docteur Jean- Guy Vézina
Médecin Urologue
IRDPQ
Madame Monette Marchand
Infirmière
IRDPQ
i
Le BTEC en quelques mots
L'intégration de preuves scientifiques aux pratiques professionnelles est devenue un
critère de qualité dans le domaine de la santé. À terme, de telles pratiques devraient se
traduire par l'amélioration des soins fournis à la population.
Le Bureau de transfert et d’échange de connaissances (BTEC) est un outil dont se
dotent des infirmières dans la poursuite de cet objectif de mise en place de pratiques
informées par des résultats probants. * Au sein du BTEC, les infirmières et infirmiers aux
prises avec des préoccupations d'ordre professionnel agissent en tant qu'indicateurs de
situations problématiques. Ces questionnements sont acheminés, via une infirmière
clinicienne, à des étudiants en sciences infirmières. Sous supervision, ces derniers
traduisent les préoccupations provenant du milieu clinique en questions de recherche
auxquelles ils doivent répondre par le biais d'une revue exhaustive de la littérature. Suite
à l'obtention de cette réponse, les étudiants poursuivent leur tâche en préparant un
compte-rendu synthétique, documenté et accessible qu’ils accompagneront de pistes
d’action pour la pratique. Ce document est ensuite retourné au milieu pour validation.
L'infirmière clinicienne, en collaboration avec les autres membres du personnel,
analysent l’à-propos d’utiliser ces connaissances pour améliorer les interventions de
l’équipe. Cette analyse permet la poursuite du processus de transfert et d’échange de
connaissances. Il s’agit alors de raffiner les recommandations proposées pour les rendre
conformes aux réalités des milieux de pratique. Il appartient ultimement aux infirmières
et infirmiers de devenir des agents de changement en regard de leurs pratiques.
Pour communiquer avec le BTEC
Rita Labadie, coordonnatrice administrative
Université Laval
1078 Pavillon Lacerte
[email protected]
téléphone :(418) 656-2131 poste 12038
télécopieur : (418) 656-7825
*
En raison de ses sources de financement, le BTEC répond actuellement aux questionnements des
infirmières et infirmiers oeuvrant dans les établissements universitaires de santé de la région de Québec.
ii
Méthodologie de la recherche documentaire
Banques de données consultées :
• Current Contents
• Cochrane Library
• Embase
• CINHAL
• Medline
Années couvertes :
• 1976 à 2005
Mots clés utilisés :
• urinary tract infection
• urinary complication
• urological complication
• catheterization
• urinary catheter
• indwelling catheter
• spinal cord injury
• neurogenic bladder
• bladder management
• prevention and management
• cranberry
Critères d’inclusions :
Les études étaient choisies si elles discutaient
‚ des moyens de prévention des infections urinaires ou
‚ des sondes à demeure ou
‚ des vessies neurogènes.
iii
Table des matières
MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE .............................III
PRÉVENTION DES INFECTIONS URINAIRES CHEZ DES PORTEURS DE
SONDE URINAIRE AYANT UNE VESSIE NEUROGÈNE...................................- 1 PISTES D’ACTION DOCUMENTÉES .............................................................- 3 PROBLÉMATIQUE.....................................................................................................- 4 CONTAMINATION DU SYSTÈME URINAIRE EN PRÉSENCE D’UNE SONDE
URINAIRE ....................................................................................................................- 5 PRÉVENTION DES INFECTIONS URINAIRES....................................................- 5 SONDE À DEMEURE : LE POUR ET LE CONTRE ................................................................ - 5 DIFFÉRENTS TYPES DE CATHÉTERS ............................................................................... - 6 PRINCIPES D’INSERTION DE LA SONDE .......................................................................... - 6 SYSTÈME DE DRAINAGE ................................................................................................ - 6 ANTIBIOTHÉRAPIE EN PROPHYLAXIE ............................................................................ - 7 ENTRETIEN DE LA SONDE ET DES PATIENTS SONDÉS...................................................... - 7 CHANGEMENT DE LA SONDE ......................................................................................... - 7 HYPER RÉFLEXIVITÉ ET VESSIE NEUROGÈNE ................................................................. - 7 NOUVELLES TENDANCES EN MATIÈRE DE PRÉVENTION DES INFECTIONS ....................... - 8 SUIVI DES BLESSÉS MÉDULLAIRES PORTEURS D’UNE SONDE À
DEMEURE ....................................................................................................................- 9 ÉDUCATION AUX PATIENTS .................................................................................- 9 FORMATION DU PERSONNEL ...............................................................................- 9 TRAITEMENT ET DIAGNOSTIC DES INFECTIONS URINAIRES ................- 10 INFECTIONS NOSOCOMIALES ET BLESSÉS MÉDULLAIRES ....................- 10 CONCLUSION ...........................................................................................................- 11 RÉFÉRENCES............................................................................................................- 12 ANNEXE A - FORCES DE PREUVE DU BTEC....................................................- 14 ANNEXE B - ÉTUDES SUR LE CANNEBERGE ..................................................- 15 -
iv
Prévention des infections urinaires chez
des porteurs de sonde urinaire ayant une vessie neurogène
sonde à demeure soit inévitable.1 5 Or,
lorsque comparé aux autres méthodes de
vidange de la vessie, cet appareillage
augmente considérablement les risques de
développer des infections urinaires.6
Toutefois, il faut être vigilant, car une
‘bactériurie’ n’est pas synonyme d’une
‘infection urinaire’.
Résumé
À ce jour, peu d’approches ont
prouvé leur efficacité clinique en
ce qui concerne la prévention des
infections du tractus urinaire chez
les personnes portant une sonde à
demeure.21 Peu coûteuses et
facilement implantables, des
mesures misant sur la formation
en cours d’emploi du personnel et
sur l’éducation au patient sont à la
portée de toute équipe soucieuse
d’améliorer ses pratiques pour
favoriser la qualité de vie des
personnes.
Bactériurie et infection urinaire. Le
terme ‘bactériurie’ signifie la présence de
bactéries dans l’urine, sans égard à
l’apparition de symptômes associés.
L’‘infection urinaire’, pour sa part,
représente le cas où la prolifération
bactérienne aura causé le développement
de symptômes. Ainsi, même si l’utilisation
fréquente d’un cathéter sur la vessie est
synonyme de bactériurie, la bactériurie
n’est pas synonyme d’infection urinaire.
Plutôt, elle en augmente les risques d’en
être atteint.18
Une gestion adéquate de la dysfonction
vésicale est une composante essentielle
dans un programme de réadaptation chez
les blessés médullaires. Elle revêt
également une grande importance chez les
autres porteurs d’une vessie neurogène.1
En effet, la perte du fonctionnement
normal de la vessie est très déstabilisante
pour toutes ces personnes.2 De plus, elle
augmente les risques de détérioration du
tractus urinaire et peut élever de manière
significative les taux de morbidité.1
D’une importance particulière, les
infections urinaires demeurent des
complications fréquentes chez les blessés
médullaires. Bien qu’en général ces
infections
n’entraînent
pas
de
complications importantes, elles peuvent
engendrer la formation de calculs rénaux,
l’apparition de pyélonéphrites pouvant
mener à de l’insuffisance rénale et une
émergence de bactéries résistantes aux
antibiotiques.3 4
Chez les personnes ayant un vessie
neurogène, il arrive que l’utilisation d’une
Signes et symptômes d’infections
urinaires chez les porteurs de vessie
neurogène. Chez les personnes ayant une
vessie neurogène, les infections urinaires
peuvent se présenter de diverses façons.
Les signes et symptômes à surveiller sont :
fièvre, frissons, urines troubles ou
nauséabondes,
hématuries,
brûlure
suspubienne ou mictionnelle, inconfort
abdominal ou dorsal, incontinence ou
augmentation des fuites urinaires,
augmentation des contractures spastiques,
dysurie, malaise général, léthargie,
diaphorèse et hyperéflexie.7-6-9 18-20
Facteurs de risque d’infections. Les
vessies neurogènes sont particulièrement
sujettes aux infections urinaires pour
plusieurs raisons : a) vidange incomplète
de la vessie, b) augmentation de la
-1-
pression intravésicale, c) utilisation
fréquente d’instrumentation sur l’appareil
urinaire, d) surdistension vésicale, e)
reflux vésico-urétéral et, f) stase urinaire.7-
composition et de taille optimales pour le
patient, l’emploi des principes d’insertion
stériles, le recours à des systèmes de
drainage clos autant que faire se peut,
l’entretien rigoureux de la sonde et son
changement opportun réduiraient les
risques d’infections. En tout temps, le
système de drainage devrait permettre le
libre écoulement de l’urine. Parmi les
pratiques actuelles, il faudrait surveiller
l’utilisation de produits antibiotiques en
prophylaxie 4 9 15 et les anti-cholinergiques
en raison des effets secondaires
reconnus.16
Pour les personnes porteuses d’une
sonde à demeure, l’éducation quant aux
signes et symptômes d’infections urinaires
pourrait en réduire la fréquence et la
sévérité.17 Des enseignements concernant
l’importance d’une hydratation adéquate et
de la consommation de repas équilibrés
pour
éviter
la
constipation,
la
démonstration du positionnement correct
du cathéter et du sac ainsi que l’exposition
du rôle primordial du maintien de mesures
d’hygiène
rigoureuses
pourraient
contribuer au mieux-être des patients.16
9
Colonisation de la vessie par des
bactéries. En présence d’une sonde à
demeure, les bactéries peuvent coloniser la
vessie de trois façons : 1) par la voie
extraluminale où des bactéries colonisent
l’espace séparant le cathéter de
l’épithélium de l’urètre pour y former un
biofilm, 2) au moment de l’insertion de la
sonde et, 3) par la voie intraluminale, où
des bactéries en suspension dans l’urine
provenant du sac de drainage gagnent la
vessie.10
Prévention des infections. Avec une
prise en charge appropriée visant à
optimiser la fonction vésicale pour réduire
les risques d’infection urinaire, les
personnes vivant avec une vessie
neurogène pourront recouvrer une vie plus
saine. La formation en cours d’emploi
pour le personnel et l’éducation aux
patients constituent les bases susceptibles
de mener à une réduction des risques
d’infections urinaires associées au port
d’un cathéter.
Pour le personnel, il importe de
reconnaître que le moyen le plus efficace
pour
réduire
le
développement
d’infections urinaires chez les personnes
ayant une vessie neurogène consiste à faire
une utilisation minimale de la sonde à
demeure,11 qu’il s’agisse alors d’opter
pour un autre type de système de drainage
ou d’être attentif à tout changement dans
la condition de la personne qui pourrait
conduire à l’abandon de la sonde à
demeure.12 Il est également recommandé
de procéder à la pose d’une sonde de
manière à minimiser l’introduction de
bactéries et à réduire les traumatismes
physiques qui y sont associés.4 8 13 14 Entre
autres, l’utilisation d’un cathéter de
Commentaire. À ce jour, peu d’approches
ont prouvé leur efficacité clinique en ce
qui concerne la prévention des infections
du tractus urinaire chez les personnes
portant une sonde à demeure.21 Peu
coûteuses et facilement implantables, des
mesures misant sur la formation en cours
d’emploi du personnel sont à la portée de
toute équipe soucieuse d’améliorer ses
pratiques pour favoriser la qualité de vie
des personnes. En regard de l’importante
somme de travaux actuellement en cours
pour le développement de nouvelles
technologies visant à réduire les infections
urinaires associées aux cathéters, il sera
intéressant d’observer les changements
positifs qui devraient s’opérer dans un
avenir rapproché.21
-2-
PISTES D’ACTION DOCUMENTÉES
Force de la
preuve †
Formation du personnel
 La formation en cours d’emploi du personnel infirmier devrait cibler
l’apprentissage et le renouvellement des techniques d’insertion stérile, la
reconnaissance des signes et symptômes d’infections et la surveillance
de la période de cathétérisme.
 Les pratiques devraient être mises à jour régulièrement, afin de tenir
compte des avancées scientifiques dans ce domaine qui évolue
rapidement.
3
1
Éducation aux patients
 L’éducation aux patients devrait débuter dès que possible suite au
cathétérisme. Elle devrait aborder les thèmes de l’hygiène personnelle
et l’hygiène de vie ainsi que la reconnaissance des signes et symptômes
d’infections.
3
Prévention des infections urinaires
•
La meilleure approche de cathétérisme devrait prendre en compte des
caractéristiques individuelles de chaque patient (morphologie, style de
vie et préférences) et être discutée avec celui-ci.
4
•
Le lavage des mains devrait précéder et suivre la manipulation du
cathéter.
1
•
Lors de la pose du cathéter, des mesures stériles devraient être
employées et toute manipulation susceptible de causer des
traumatismes devrait être réduite au minimum.
1 et 4
Le système de drainage devrait permettre le libre écoulement de l’urine.
4
•
Options thérapeutiques
†
•
L’utilisation rationnelle des produits antibiotiques contribuerait à réduire
l’émergence de résistance bactérienne.
1
•
L’emploi de médicaments anti-cholinergiques devraient être réservé aux
cas d’hyper réflexivité de la vessie, sous condition qu’il n’y ait pas de
contre indication à leur utilisation.
2
Voir annexe A
-3-
Problématique
À sa naissance, l’être humain ne contrôle pas sa vessie. Avec le développement de son système
nerveux, il devient apte à en inhiber et à en initier la vidange. Dès lors, certaines atteintes
neurologiques peuvent causer un dysfonctionnement de la vessie.22 16 Spécifiquement, le type de
problèmes expérimenté par les personnes dont le système nerveux est atteint dépendra de
l’endroit où la moelle épinière aura été endommagée.
C’est donc dire l’importance d’une gestion adéquate de la dysfonction vésicale dans un
programme de réadaptation chez les blessés médullaires ou autres personnes présentant vivant
avec des vessies neurogènes.1 En effet, la perte de la fonction normale de la vessie est très
déstabilisante et résulte en une augmentation des risques de détérioration du tractus urinaire,
pouvant élever de manière significative les taux de morbidité.10 1 Avec une prise en charge
appropriée pour optimiser la fonction vésicale, ces personnes peuvent cependant recouvrer une
vie plus saine, notamment en réduisant les risques d’infections urinaires.
Idéalement, la prise en charge vésicale sera guidée par les caractéristiques uro dynamiques du
patient. Dans les faits, d’autres facteurs tels des caractéristiques anatomiques et préférences du
patient devront être pris en compte.10 En général, il importe de reconnaître que le cathétérisme
intermittent demeure l’option la plus efficace en regard de sa capacité à réduire les risques
d’infection du tractus urinaire chez des personnes aux prises avec des problèmes de vidange.22
Son emploi peut également augmenter la continence et prévenir des dommages des voies
urinaires supérieures. Idéalement, la personne devrait pouvoir faire ses propres cathétérismes à
son départ de l’hôpital. Cependant, pour certaines personnes, il sera impensable d’initier ou de
poursuivre les auto-cathétérismes, cette méthode étant incompatible avec leur situation physique,
psychique, environnementale ou leur causant des blessures.1 5 10 À ce moment, le cathétérisme
continu, via la pose d’une sonde à demeure, sera envisagé et discuté avec la personne.
Selon la littérature, environ le tiers des blessés médullaires avec des vessies neurogènes feront ce
choix. Cependant, plusieurs problèmes sont rattachés à l’usage du cathétérisme continu. La
majorité de ces complications est attribuable à l’inévitable bactériurie inhérente à l’utilisation du
cathétérisme continu qui augmente considérablement les risques d’infections. 6 À partir du
moment où la sonde est insérée, l’incidence de bactériurie et les risques d’infections urinaires
associées augmentent de 5% à 10% par jour.10 Ce type d’infections constitue la complication la
plus fréquente chez les blessés médullaires. Ces infections pourront engendrer la formation de
calculs rénaux, l’apparition de pyélonéphrites susceptibles de mener à de l’insuffisance rénale et
une émergence de résistance bactérienne aux antibiotiques.3 4
Le présent document vise à fournir une information à jour sur la prévention des infections
urinaires chez les porteurs de sonde urinaire ayant une vessie neurogène. Tout au long du texte,
les termes ‘bactériurie’ et ‘infection urinaire’ ne seront pas interchangés. Plutôt, l’emploi du
terme ‘bactériurie’ signifiera exclusivement la présence de bactéries dans l’urine, sans égard à
l’apparition de symptômes associés. L’‘infection urinaire’, pour sa part, représentera le cas où la
prolifération bactérienne aura causé le développement de symptômes. Ainsi, même si l’utilisation
fréquente d’un cathéter sur la vessie est synonyme de bactériurie, la bactériurie n’est pas
synonyme d’infection urinaire symptomatique. Plutôt, elle en augmente les risques.18 Les
prochaines pages aborderont les modes de contamination du système urinaire, les stratégies
préventives, le suivi, l’éducation, la formation, les traitements et diagnostic des infections
urinaires et infections urinaires nosocomiales associées à la blessure médullaire.
-4-
Contamination du système urinaire en présence d’une sonde urinaire
En présence d’une sonde urinaire, les bactéries peuvent coloniser la vessie selon trois
mécanismes : 1) par la voie extraluminale (colonisation bactérienne sous la forme d’un biofilm ‡
entourant le cathéter, entre la paroi externe de celui-ci et l’épithélium de l’urètre)4 18 24, 2) lors de
l’insertion de la sonde10 et, 3) par la voie intraluminale (ascension des bactéries en suspension
dans l’urine qui, à partir du sac de drainage, remontent vers la vessie par le conduit du cathéter).23
Selon plusieurs auteurs, la voie intraluminale serait plus fréquente chez l’homme, tandis que la
voie extraluminale le serait chez la femme.8 19
La contamination bactérienne périodique demeure donc inévitable. Toutefois, il importe de
reconnaître qu’elle n’est pas directement responsable du développement d’infections urinaires.
Plutôt, c’est l’accumulation dans le temps et la prolifération de ces bactéries introduites qui
conduiront à la pathologie.23 Cette nuance peut s’illustrer en comparant le fonctionnement d’une
vessie normale à celui d’une vessie neurogène sur laquelle on applique une sonde. Dans le
premier cas, le processus normal de remplissage et de vidange de la vessie implique d’abord que
la vessie soit emplie, puis vidée complètement à toutes les trois heures. Cette vidange périodique
conserve la vessie exempte de maladies, car elle évacue les bactéries qui auraient pu coloniser le
tractus urinaire. Dans le cas d’une vessie neurogène équipée d’une sonde et d’un sac, l’urine se
vide lentement et de manière continue, ce qui contribue à une accumulation de bactéries.2
Prévention des infections urinaires
Plusieurs auteurs s’entendent pour dire qu’il y aura une bactériurie après un mois de
cathétérisme ou de port d’une sonde, peu importe les moyens de prévention et le matériel
utilisé.13 Par exemple, en dépit des nombreuses recherches technologiques menées ces dernières
années, il semble qu’aucun biomatériel ni principe pharmacologique ne soit actuellement capable
de prévenir complètement la constitution du biofilm.8 Puisque la bactériurie semble inévitable,
les moyens de prévention des infections urinaires visent donc à empêcher qu’une bactériurie
asymptomatique se développe en infection urinaire symptomatique.
Sonde à demeure : le pour et le contre
Il semblerait que la meilleure approche pour prévenir les infections urinaires liées aux
cathéters chez les blessés médullaires serait de retirer le cathéter dès qu’il est cliniquement
possible de le faire.11 D’autres modalités d’évacuation que la sonde à demeure devront
alors être préférées.4 14 20 En effet, la comparaison des différents types de cathéters sur la
base de leur propension à favoriser des infections urinaires fait ressortir clairement que les
personnes utilisant des types de vidanges autres que la sonde à demeure (e.g.,
cathétérisme intermittent, étui pénien) ont moins d’infections urinaires que les porteurs de
telles sondes.6 25 Cependant, dans certains cas, les auto-cathétérismes seront incompatibles
avec la situation de la personne, auxquels cas le cathétérisme continu devient une option
valable.1 5 10 Il demeure important de spécifier que, chez certaines populations à risque
d’infections urinaires comme c’est le cas des âgés, la sonde à demeure devrait être
évitée.26
‡
Le biofilm est une matière constituée d’organismes pathogènes enchâssés dans une enveloppe composée d’une
matrice protéique de l’hôte et d’un exoglycocallice d’origine microbienne. Le biofilm confère au microbe une
protection contre les agents antimicrobiens et défenses de l’hôte. La formation du biofilm, très rapide (recouvre,
englobe et fixe les bactéries entre la muqueuse urétrale et la paroi de la sonde urinaire dès les six premières heures),
peut mener au développement d’infections chroniques et persistantes difficilement curables par une antibiothérapie.
-5-
Différents types de cathéters
Présentement, aucun cathéter à même de prévenir complètement la formation d’un
biofilm n’a pu être développé. Il est donc difficile d’éviter l’adhésion de bactéries à
l’urètre.8 11 Plusieurs études se sont toutefois intéressées à identifier le type de cathéters le
plus avantageux pour prévenir les infections urinaires. D’une part, les résultats obtenus
demeurent discordants. D’autre part, plusieurs de ces études ont été initiées par des
fabricants de sondes vésicales.13
Des résultats disponibles, il est actuellement possible de proposer que la nature du
biomatériel constituant la sonde doit être choisie de manière à optimiser la tolérance du
cathéter par le patient. Pour un sondage à demeure de longue durée, il est ainsi préférable
d’opter pour les sondes en silicone, qui semblent provoquer moins d’obstructions et
fournir un meilleur confort au patient.8 27
En ce qui concerne l’activité antimicrobienne, les sondes comportant un alliage
d’argent ont conduit à l’observation de résultats intéressants. In vitro, l’argent diminuerait
l’adhésion d’E. coli au cathéter, se lierait à l’ADN bactérien et empêcherait la
multiplication des bactéries.13 À l’heure actuelle, le rapport coût/bénéfice de cette
approche demeure cependant un sujet débattu.13 28 29 30 31
Principes d’insertion de la sonde
Plusieurs experts recommandent d’insérer la sonde vésicale de façon stérile.4 8 13 14 Il
est également suggéré 1) de procéder au nettoyage préalable du méat au savon doux, 2) de
choisir un cathéter adapté à la morphologie de l’urètre (un calibre trop gros pourrait
entraîner des traumatismes, alors qu’un cathéter trop petit permettrait le passage
rétrograde des microorganismes) § , 3) d’utiliser des cathéters fins, lubrifiés et déformables
pour épouser le mieux possible l’anatomie de l’urètre, 4) de gonfler le ballonnet à l’eau
stérile pour éviter qu’il ne bouge, 5) de gonfler le ballonnet avec seulement 10 mL de
liquide pour minimiser les risques de traumatismes et, 6) de fixer correctement la sonde
pour éviter les va-et-vient pouvant causer des traumatismes de l’urètre.8 13 14 Il est par
ailleurs important d’être particulièrement vigilants en présence d’un sphincter spastique.32
Finalement, le recours à un lubrifiant antimicrobien lors de l’insertion du cathéter n’aurait
pas fait preuve d’efficacité.8
Système de drainage
Le système de drainage doit a priori rester clos tout au long de son utilisation.7 4 8 14 15
Le système est dit clos quand la jonction sonde-ligne de drainage n’est jamais
déconnectée. Son but est de diminuer le risque de migration bactérienne à l’intérieur de la
ligne urinaire. Pour réaliser une gestion en système clos, il est nécessaire d’utiliser un sac
collecteur d’urine possédant les trois éléments suivants : une vidange (pour ne pas changer
de poche), une valve antireflux (pour éviter la contamination rétrograde) et un site
ponctionnable.4 Cependant, les systèmes ouverts correctement manipulés pourraient être
tout aussi sécuritaires que les systèmes clos.33 En général, pour une très courte période, le
système clos demeurerait toutefois préférable.7 Dans tous les cas, le drainage devrait être
contrôlé régulièrement pour éviter la distension exagérée de la vessie.32
§
Une taille de 12 à 14 Fr est recommandée pour éviter le blocage du lumen urétral tout en permettant un bon
drainage de l’urine. Cette taille sera ajustée à la hausse dans le cas d’urine trouble.
-6-
Antibiothérapie en prophylaxie
Bien que l’antibiothérapie en prophylaxie s’avère efficace, elle serait liée à une trop
grande émergence de résistance bactérienne. Elle devrait donc être limitée à certains cas,
par exemple avant des traitements invasifs.4 9 15 Par ailleurs, l’irrigation vésicale
d’antibiotiques ne permet pas de prévenir l’infection urinaire, alors que les cathéters
enduits d’antibiotiques contribuent à les réduire. Ceux-ci augmentent cependant les
risques de développement de résistance chez les bactéries et d’émergence de
champignons.13 8 34 À long terme, les agents antiseptiques (e.g., oral, topique, instillé dans
la vessie, instillé dans le sac à drainage) qui modifient la flore normale de la peau peuvent
également être dommageables en facilitant le processus de colonisation urétrale par des
bactéries encore plus virulentes.11
Entretien de la sonde et des patients sondés
Il est tout d’abord important de rappeler que toute personne manipulant une sonde
devrait se laver les mains avant et après être entrée en contact avec le cathéter.35 Le méat
urinaire devrait également être nettoyé au savon doux lors de la toilette et après chaque
selle, s’il y a souillures.13 28 L’usage d’un savon antiseptique n’aurait pas démontré de
bénéfices plus grands.13 34 De manière générale, il serait recommandé de 1) placer le sac
de drainage plus bas que la vessie, même dans le cas de sac muni d’une valve antireflux,
2) maintenir le système de drainage fonctionnel, sans obstruction ni torsion et, 3) favoriser
une hydratation adéquate ** .19 36 20 Le rôle des infirmières serait particulièrement crucial
pour chacun de ces points.19
Changement de la sonde
Les avis quant aux meilleurs moments pour changer les sondes vésicales divergent.
En situation aiguë, le cathéter devrait être changé régulièrement plusieurs fois par
semaine. Par exemple, la sonde doit être changée rapidement en cas d’infections, lors d’un
traitement antibiotique, lorsqu’elle est bouchée ou défectueuse. Dans une situation plus
chronique et en milieu clinique, elle devrait être changée tous les 10 jours. Pour un patient
chronique ayant peu de complications, le changement pourrait s’effectuer entre deux et six
semaines.32 27
Pour ce qui est des cultures d’urine, plusieurs auteurs suggèrent de remplacer la sonde
avant la culture, ce qui aurait pour effet d’éliminer le biofilm, d’augmenter la diffusion de
l’antibiothérapie et de fournir des résultats plus valides.37 9 18 19 Si le cathéter n’était pas
remplacé, plusieurs microorganismes seraient effectivement présents, ce qui pourrait
conduire à une antibiothérapie erratique.38 13
Hyper réflexivité et vessie neurogène
Dans la littérature, les anti-cholinergiques sont généralement associés aux vessies
hyperactives. Chez les patients ayant ce type de vessie (e.g., certains blessés médullaires
ou personnes vivant avec une vessie neurogène), l’utilisation de tels médicaments peut
être importante pour prévenir le développement de petites vessies contractées. Bien que
les agents anti-cholinergiques (e.g., oxybutynin et tolterodine) soient indiqués pour traiter
les vessies neurogènes, leur utilisation demeure limitée en raison de leurs importants
effets secondaires anti-muscariniques. Parmi ceux-ci, mentionnons l’assèchement de la
**
Une hydratation adéquate pourrait contribuer à la diminution de la stase dans la vessie. Une diurèse quotidienne de
1500 mL pourrait avoir un effet positif pour contrer la prolifération bactérienne.3
-7-
bouche, la constipation, les reflux gastro-oesophagiens, la vision embrouillée.16 Dans
l’état actuel des choses, l’utilisation de tels médicaments devrait donc être cessée dès que
possible.16
Cependant, une éventuelle application intra vésicale pourrait réduire les effets
secondaires adverses des anti-cholinergiques.39 De même, le développement de nouveaux
agents ayant une activité anti-muscarinique plus spécifique constitue une voie
thérapeutique prometteuse actuellement explorée.16 Finalement, l’injection directe de la
toxine du botulisme †† dans le muscle détrusor semble améliorer l’état des patients (i.e.
diminution de l’hyper réflexivité de la vessie).16 Une faiblesse musculaire généralisée a
toutefois été rapportée en de rares occasions.16 Ce procédé apparaît l’un des plus
prometteurs pour traiter les vessies hyper réflexives.40 Bien que certaines contreindications s’appliquent, un rapport risque/bénéfice favorable semble encourager
l’utilisation de la toxine botulique.41
Nouvelles tendances en matière de prévention des infections
La plupart des nouveaux moyens de prévention des infections urinaires visent la voie
extraluminale, car la formation d’un biofilm sur la sonde serait responsable de
l’emprisonnement d’un nombre important de bactéries qui seraient à même de causer la
bactériurie. L’utilisation de souches non pathogènes de bactéries, ou interférence
bactérienne, est unique parmi les approches préventives visant à réduire les infections
urinaires associées aux cathéters. En bref, il s’agit de sélectionner des organismes bénins
pour former un biofilm protecteur sur les cathéters plutôt que de prévenir la formation
d’un biofilm d’organismes pathogènes. Par exemple, on peut instiller une souche bénigne
d’E. coli dans la vessie neurogène de personnes blessées médullaires. Un essai clinique a
montré que ce type d’instillation directe est sécuritaire, ne produit aucun symptôme
d’infection urinaire et réduit la fréquence des infections. Une autre approche, qui fait
également appel au principe d’interférence bactérienne, consiste à incuber les cathéters
urinaires en présence d’une souche non pathogène d’E. coli. La formation d’un biofilm
protecteur sur le cathéter empêchera sa colonisation ultérieure par des uro pathogènes.
Bien que l’exploitation d’un biofilm non pathogène pour induire une colonisation durable
par une flore bénigne n’en soit qu’à ses débuts, plusieurs y voient des développements
encourageants.21
L’utilisation de jus ou de comprimés de canneberges§ est actuellement vue comme
une prophylaxie intéressante pour diminuer l’apparition des infections urinaires. Deux
composantes des canneberges contribueraient à prévenir l’adhérence des bactéries (surtout
E. coli) aux cellules uro épithéliales de la vessie et de l’urètre, tout en ayant la capacité
d’acidifier l’urine.14 42 Cependant, la littérature disponible ne permet pas de reconnaître
ces bienfaits chez les personnes ayant une vessie neurogène.28 Il est possible que ce
phénomène soit dû à ce que, chez des personnes avec une vessie normale, les infections
seraient souvent attribuables à E. coli, alors que chez les personnes avec une vessie
neurogène, un grand nombre de bactéries différentes serait plutôt en cause. Les résultats
de recherches confirment donc que les canneberges peuvent avoir une certaine efficacité
dans la prévention des infections urinaires chez les femmes sans vessie neurogène et non
††
En inhibant l’acétylcholine à la jonction pré synaptique, cette toxine cause une dénervation chimique réversible
d’une durée approximative de neuf mois.
§ Voir annexe B : études sur les canneberges.
-8-
sondées et suggèrent qu’aucune modification du pH urinaire ni du décompte des bactéries
et des globules blancs ne sont observés chez des patients blessés médullaires avec vessie
neurogène. Il demeure cependant important de reconnaître que ces études sont sujettes à
un important biais en raison du taux élevé de non-adhérence au traitement, lequel est sans
doute lié aux effets secondaires expérimentés suite à la prise de jus ou de capsules de
canneberges (e.g. nausées, reflux gastro-oesophagien, augmentation du péristaltisme
intestinal). Avant de se prononcer sur l’efficacité des canneberges chez des participants
blessés médullaires et porteurs de sondes, les résultats de nouvelles études s’adressant à
cette population spécifique devront être obtenus.14 42 43
Suivi des blessés médullaires porteurs d’une sonde à demeure
La dysfonction neurogénique du tractus urinaire inférieur chez les blessés médullaires est
une condition instable qui peut varier considérablement et ce, dans une courte période. Ainsi, un
suivi méticuleux et des vérifications régulières sont nécessaires.39 Les patients devraient passer
des examens d’urine aux deux mois. Le tractus urinaire supérieur, la forme de la vessie et la
capacité résiduelle devraient être vérifiés aux six mois. Tout signe suggérant un risque d’infection
exige une investigation spécialisée.
Éducation aux patients
La perte de la fonction normale de la vessie constitue souvent un événement traumatisant
dans la vie d’une personne. L’instauration d’un système de vidange de la vessie par le biais d’un
cathéter rattaché à un sac est perçue par certains comme une humiliation et une perte de dignité.2
Par exemple, plusieurs femmes portant une sonde interpréteraient très mal le geste accompagnant
la pose du cathéter, le percevant comme un assaut sexuel.1 Pour des raisons davantage
psychosociales que biologiques, les femmes dans l’incapacité physique de s’administrer des autocathétérismes seraient donc plus nombreuses que les hommes à juger préférable le port d’une
sonde à demeure plutôt que le cathétérisme intermittent effectué par une tierce personne.10
De tels états de désabusement sont rapidement suivis de complications qui peuvent être
dévastatrices.2 La première action éducative à entreprendre auprès d’un patient devrait donc viser
la vérification de sa perception quant au système de vidange qu’il devra gérer. Il importe ici de
démystifier tant les aspects affectifs que techniques inhérents à la condition de la personne.
Placée dans des dispositions favorables, la personne sera mieux à même de s’impliquer
activement dans son processus de santé, reprenant ainsi une part du contrôle qu’elle aura perdu
sur la gestion de sa vessie.
La prévalence des infections pourra alors être diminuée par l’éducation adéquate des
patients. Par exemple, il pourrait s’agir de leur enseigner à reconnaître les signes et symptômes
des infections urinaires associés à leur mode de vidange vésicale. Cet enseignement pourrait
réduire la fréquence et la sévérité des infections.17 Le personnel pourrait aussi sensibiliser
patients et familles à l’importance d’une consommation adéquate de fluides et de repas équilibrés
(e.g., pour éviter la constipation), au positionnement correct du cathéter et du sac ainsi qu’au rôle
primordial d’une hygiène personnelle soignée.
Formation du personnel
L’éducation du personnel est aussi une composante importante dans la prévention des
infections vésicales. Par exemple, un taux d’infection urinaire de 34% s’observe quand la sonde à
-9-
demeure est mise en place par une infirmière inexpérimentée, alors qu’une infirmière
expérimentée réduira ce taux à 21%.4 De plus, les infirmières devraient être attentives à identifier
des situations où l’emploi du cathéter devient inapproprié pour en discuter avec le médecin
traitant.12 Une simple intervention de la sorte pourrait réduire les taux d’infections et les coûts
reliés aux hospitalisations. Le nombre d’heures alloué à chaque patient aurait également un
impact significatif sur la baisse des taux d’infections nosocomiales chez les blessés médullaires.44
Dans un contexte de raréfaction des ressources, la diminution des taux d’infections pourrait se
faire par l’adhésion stricte aux recommandations des guides de pratique sur les soins des
cathéters.4 44 De plus, les infirmières doivent surveiller attentivement les signes et symptômes des
infections urinaires en vue d’un dépistage précoce et d’une mise en place rapide de traitements.44
Pour leur part, les infirmières en autorité devraient s’assurer de fournir un personnel en
nombre adéquat, bien entraîné dans les techniques de cathétérisme. Elles devraient également se
tenir à jour dans la recherche, afin de modifier les pratiques selon les nombreuses avancées dans
le domaine.44
Finalement, la présence d’un cathéter chez un patient devait être connue de tous les
intervenants qui oeuvrent auprès de lui.32
Traitement et diagnostic des infections urinaires
La conduite habituelle à prendre en ce qui concerne le traitement des infections urinaires
consiste à ne traiter que les bactériuries symptomatiques.3 4 7-9 15 18-20 27 28 Pour certains, la seule
raison valable de traiter une bactériurie asymptomatique s’observe dans les cas de patients à haut
risque de développer des complications futures et lors d’interventions invasives.43 D’autres
auteurs, plus modérés, suggèrent qu’en présence de bactériuries asymptomatiques, on procédera
au décompte des globules blancs dans l’urine pour prendre ensuite une décision quant au
diagnostic d’infection urinaire et mesures subséquentes.28 45 Peu importe l’approche privilégiée, il
demeure que les infections urinaires ne devront être traitées qu’après qu’une culture d’urine ait
été faite (une densité significative de bactéries viables confirme le diagnostic)14 parce que les
bactéries associées au cathéter sont souvent réfractaires aux antibiotiques.23 La surveillance des
signes et symptômes reste primordiale.
En ce sens, les principaux signes et symptômes suggérant la présence d’une infection urinaire
symptomatique dans le cas des vessies neurogènes sont : fièvre, frissons, urines troubles,
hématurie, urine nauséabonde, brûlure suspubienne ou mictionnelle, vague inconfort abdominal
ou dorsal, incontinence ou augmentation des fuites urinaires, augmentation des contractures
spastiques, dysurie, malaise général, inconfort, léthargie, diaphorèse et hyper réflexivité.7-9 18-20
Infections nosocomiales et blessés médullaires
De manière générale, les infections urinaires comptent pour 40% de toutes les infections
nosocomiales. Bien plus, 80 % de ces infections sont associées à l’utilisation de cathéters.22 Le
facteur de risque le plus important reste la durée du cathétérisme.22 Bien que la morbidité
associée à de telles infections reste faible, elle entraîne des malaises et augmente la durée des
hospitalisations.8 45
Chez les blessés médullaires, le port d’une sonde à demeure multiplie par quatre la probabilité
d’une infection urinaire.8 Lorsque cette population est hospitalisée, 15% des personnes
présenterait au moins un épisode d’infection urinaire nosocomiale.8 Cette prévalence confirme
l’existence d’un risque plus grand des infections urinaires nosocomiales chez cette population.8
- 10 -
Chez les blessés médullaires, plusieurs facteurs de risque ont été identifiés pour expliquer cette
plus grande susceptibilité : la distension vésicale exagérée, le reflux vésico-urétral, les hautes
pressions mictionnelles du détrusor, le grand volume de résidus post mictionnels, l’existence de
lithiases de l’arbre urinaire, l’obstacle à la vidange vésicale et l’instrumentation sur la vessie.3 8
Chez les blessés médullaires hospitalisés, Klebsiella pneumoniae, bactérie de la flore intestinale,
serait responsable du tiers des infections urinaires nosocomiales.8 Par exemple, un fort
pourcentage d’infections urinaires chez la femme en milieu de rééducation serait secondaire à une
contamination périnéale d’origine fécale.8
Conclusion
À ce jour, peu d’approches ont prouvé leur efficacité clinique en ce qui concerne la
prévention des infections du tractus urinaire chez les personnes portant une sonde à demeure.21
Parmi les méthodes efficaces, la stratégie à privilégier, introduite il y a près d’un siècle, consiste à
faire appel à un système de drainage en circuit fermé. Cependant, des systèmes ouverts
correctement manipulés seraient tout aussi sécuritaires.33 Il est également recommandé de retirer
la sonde à demeure dès que son utilisation n’est plus requise. Pour ce faire, des systèmes de
rappels ont conduit à des résultats concluants. Finalement, le suivi de mesures de contrôle des
infections strictes telles le lavage des mains et le maintien du cathéter dans un état non obstrué
pour assurer le drainage de l’urine par gravité représente une manière logique de réduire les
infections. Peu coûteuse et immédiatement implantable, elle a prouvé son efficacité.
Parmi les techniques en développement, la prévention de la formation des biofilms
pathogènes à la surface des cathéters en est à ses premières études cliniques. Également à l’essai,
l’interférence bactérienne pourrait s’avérer une manière novatrice d’exploiter les biofilms
bactériens à des fins utiles. Qu’il s’agisse d’instiller des souches non pathogènes d’E. coli
directement dans la vessie ou d’employer des cathéters enrobés de cette flore bénigne, cette
approche est à surveiller. Similairement, avec l’accroissement du nombre d’études s’intéressant
aux effets de la canneberge et de ses dérivés, de nouvelles données permettant de statuer de
l’efficacité de ces produits devraient être présentées dans un proche avenir.21
- 11 -
Références
1. Yavuzer G, Gok H, Tuncer S, Soygur T, Arikan N, Arasil T. Compliance with bladder management in spinal cord
injury patients. Spinal Cord 2000;38(12):762-5.
2. Evan-Pughe C. A kinder catheter. IEE Review 2005;Feb:40-43.
3. Rubenstein JN, Schaeffer AJ. Managing complicated urinary tract infections: the urologic view. Infect Dis Clin
North Am 2003;17(2):333-51.
4. Pavese P. Nosocomial urinary tract infections: defenition, diagnosis, physiopathology, treatment. Médecine et
maladies infectieuses 2002;33:266s-274s.
5. Wyndaele JJ. Complications of intermittent catheterization: their prevention and treatment. Spinal Cord
2002;40(10):536-41.
6. Esclarin De Ruz A, Garcia Leoni E, Herruzo Cabrera R. Epidemiology and risk factors for urinary tract infection
in patients with spinal cord injury. J Urol 2000;164(4):1285-9.
7. Garcia Leoni ME, De Ruz E. Management of urinary tract infection in patients with spinal cord injuries. Clin
Mocrobiol Infect 2003;9:780-785.
8. De Sèze M, Shao É, Joseph PA. Nosocomial urinary tract infection and patients with a neurogenic bladder, in
rehabilitation. Médecine et maladies infectieuses 2002;33:298s-310s.
9. Liedl B. Catheter-associated urinary tract infections. Curr Opin Urol 2001;11(1):75-9.
10. Jamil F. Towards a catheter free status in neurogenic bladder dysfunction: a review of bladder management
options in spinal cord injury (SCI). Spinal Cord 2001;39(7):355-61.
11. Trautner BW, Darouiche RO. Prevention of urinary tract infection in patients with spinal cord injury. J Spinal
Cord Med 2002;25(4):277-83.
12. Huang WC, Wann SR, Lin SL, Kunin CM, Kung MH, Lin CH, et al. Catheter-associated urinary tract infections
in intensive care units can be reduced by prompting physicians to remove unnecessary catheters. Infect
Control Hosp Epidemiol 2004;25(11):974-8.
13. Berthelot P, Mallaval FO, Fascia P, Turco M, Jucht F. Preventing nosocomial urinary tract infection: catheters
and techniques. Médecine et maladies infectieuses 2003;33:499-505.
14. Hampton S. Nursing management of urinary tract infections for catheterized patients. Br J Nurs
2004;13(20):1180-4.
15. Niel-Weise B, Broek P. Urinary catheter policies for long-term bladder drainage. Cochrane Database Syst Rev
2005(1):CD004201.
16. Ouslander JG. Management of overactive bladder. N Engl J Med 2004;350(8):786-99.
17. Cardenas DD, Hoffman JM, Kelly E, Mayo ME. Impact of a urinary tract infection educational program in
persons with spinal cord injury. J Spinal Cord Med 2004;27(1):47-54.
18. Trautner BW, Darouiche RO. Role of biofilm in catheter-associated urinary tract infection. Am J Infect Control
2004;32(3):177-83.
19. Wilde MH. Urinary tract infection in people with long-term urinary catheters. J Wound Ostomy Continence Nurs
2003;30(6):314-23.
20. Joseph PA, de Sèze M, Soyeur L. Treatment ofnosocomial urinary tract infections in patients with a neurogenic
bladder. Médecine et maladies infectieuses 2002;33:488-497.
21. Trautner BW, Hull RA, Darouiche RO. Prevention of catheter-associated urinary tract infection. Curr Opin Infect
Dis 2005;18(1):37-41.
22. Bardsley A. The neurogenic bladder. Nurs Stand 2000;14(22):39-41.
23. Matsukawa M, Kunishima Y, Takahashi S, Takeyama K, Tsukamoto T. Bacterial colonization on intraluminal
surface of urethral catheter. Urology 2005;65(3):440.
24. Anderson GG, Palermo JJ, Schilling JD, Roth R, Heuser J, Hultgren SJ. Intracellular bacterial biofilm-like pods
in urinary tract infections. Science 2003;301(5629):105-7.
25. Shekelle PG, Morton SC, Clark KA, Pathak M, Vickrey BG. Systematic review of risk factors for urinary tract
infection in adults with spinal cord dysfunction. J Spinal Cord Med 1999;22(4):258-72.
26. Advice p.r.n. Draining question. Nursing 2005;35(3):10.
27. Tenke P, Jackel M, Nagy E. Prevention and Treatment of Catheter-Associated Infections: Myth or Reality? EAU
Update Series 2004;2:106-115.
28. Madigan E, Neff DF. Care of patients with long-term indwelling urinary catheters. Online J Issues Nurs
2003;8(3):7.
- 12 -
29. Saint S, Elmore JG, Sullivan SD, Emerson SS, Koepsell TD. The efficacy of silver alloy-coated urinary catheters
in preventing urinary tract infection: a meta-analysis. Am J Med 1998;105(3):236-41.
30. Kumon H, Hashimoto H, Nishimura M, Monden K, Ono N. Catheter-associated urinary tract infections: impact
of catheter materials on their management. Int J Antimicrob Agents 2001;17(4):311-6.
31. Brosnahan J, Jull A, Tracy C. Types of urethral catheters for management of short-term voiding problems in
hospitalised adults. Cochrane Database Syst Rev 2004(1):CD004013.
32. Wyndaele JJ, Madersbacher H, Kovindha A. Conservative treatment of the neuropathic bladder in spinal cord
injured patients. Spinal Cord 2001;39(6):294-300.
33. Leone M, Garnier F, Dubuc M, Bimar MC, Martin C. Prevention of nosocomial urinary tract infection in ICU
patients: comparison of effectiveness of two urinary drainage systems. Chest 2001;120(1):220-4.
34. Tambyah PA. Catheter-associated urinary tract infections: diagnosis and prophylaxis. Int J Antimicrob Agents
2004;24 Suppl 1:S44-8.
35. National electronic Library for Health. Infection Control - Recommendations.
http://www.nelh.nbs.uk/guidelinesdb/html/infection_control/guidelines.asp 2004.
36. Wong ES, Hooton TM. Guidelines for prevention of catheter-associated urinary tract infections. Infect control
1981;2:126-130.
37. Shah PS, Cannon JP, Sullivan CL, Nemchausky B, Pachucki CT. Controlling antimicrobial use and decreasing
microbiological laboratory tests for urinary tract infections in spinal-cord-injury patients with chronic
indwelling catheters. Am J Health Syst Pharm 2005;62(1):74-7.
38. Nicolle LE. Urinary tract infections in long-term-care facilities. Infect Control Hosp Epidemiol 2001;22(3):16775.
39. Stohrer D, Castro-Diaz, e. Chartier-Kastler, G., Kramer, G., Mattiasson, A., & Wyndaele, J.J. 2003.
40. Smith CP, Somogyi, G.T., & Boone, B.T. Botulinum toxin in urology: evaluation using an evidence-based
medicine approach. NATURE CLINICAL PRACTICE UROLOGY 2004;1(1):31-37.
41. Frenkl TL, Rackley RR. Injectable neuromodulatory agents: botulinum toxin therapy. Urol Clin North Am
2005;32(1):89-99.
42. Linsenmeyer TA, Harrison B, Oakley A, Kirshblum S, Stock JA, Millis SR. Evaluation of cranberry supplement
for reduction of urinary tract infections in individuals with neurogenic bladders secondary to spinal cord
injury. A prospective, double-blinded, placebo-controlled, crossover study. J Spinal Cord Med 2003;27:2934.
43. Jepson RG, Mihaljevic L, Craig J. Cranberries for preventing urinary tract infections (Review). The Cochrane
Library 2005(1).
44. Sujijantararat R, Booth RZ, Davis LL. Nosocomial urinary tract infection: nursing-sensitive quality indicator in a
Thai hospital. J Nurs Care Qual 2005;20(2):134-9.
45. Sauerwein D. Urinary tract infection in patients with neurogenic bladder dysfunction. Int J Antimicrob Agents
2002;19(6):592-7.
- 13 -
ANNEXE A - FORCES DE PREUVE DU BTEC
- 14 -
ANNEXE B - ÉTUDES SUR LE CANNEBERGE
Auteurs
Linsenmeyer et al.,
2004
Waist et al.,
2004
Jepson,
Mihaljevic
& Craig,
2003
Objectifs
Déterminer l’efficacité des suppléments
de canneberges dans la prévention des
infections urinaires chez les blessés
médullaires*
(Essaie clinique randomisé, ECR)
Vérifier si l’effet antibactérien des
canneberges réduirait les bactériuries et
les pyuries chez les blessés médullaires
vivant avec une vessie neurogène et
porteurs de sonde *. (ECR)
Vérifier l’efficacité des canneberges et
de ses produits dérivés dans le traitement
des infections urinaires
(Cochrane review)
Jepson,
Mihaljevic
& Craig,
1998
Raz,
Chaban &
Dan, 2004
Vérifier l’efficacité des canneberges
dans le traitement des infections
urinaires
(Cochrane review)
Vérifier si le jus de canneberge peut-être
une alternative au traitement antibiotique
Lynch, 2004
Revoir les connaissances quant à la
prévention des infections urinaires par la
prise de canneberges
Franco,
2005
Évaluer l’efficacité des traitements de
canneberges sur la récurrence des
infections urinaires
Drug and
therapeutics
bulletin
2005
Revoir les connaissances quant à la
prévention des infections urinaires par la
prise de canneberges
Conclusions
• Les comprimés de canneberge ne changent pas le PH
urinaire, les agents bactériens ni les globules blancs
urinaires.
• Les comprimés de canneberges ne préviennent pas les
infections urinaires chez les blessés médullaires.
• Le jus de canneberge ou les comprimés ne réduisent ni
les bactériuries ni les pyuries et ne préviennent pas les
infections urinaires chez les blessés médullaires.
• Le jus de canneberge pourrait diminuer les infections
urinaires chez les femmes sexuellement actives sur une
période de 12 mois.
• Le dosage (durée et quantité) et la méthode
d’administration (jus ou comprimés) restent à spécifier.
• L’efficacité du jus de canneberge sur le traitement des
infections urinaires reste à prouver par des essais
cliniques randomisés.
• Le jus de canneberge semble être une prophylaxie
efficace pour les infections urinaires récurrentes chez
les femmes sexuellement actives.
• Chez les patients ayant des vessies neurogènes, le jus de
canneberge ne semble pas prévenir les infections
urinaires.
• Les canneberges ont un modeste effet prophylactique
sur les infections urinaires; le risque d’infection peut
être réduit de 20% chez les femmes à risque.
• Il y a un manque d’évidences sur l’utilisation des
canneberges pour le traitement des infections urinaires.
• Aucune interaction entre les canneberges et la
médication n’est connue.
• L’utilisation des canneberges peut augmenter le risque
de calculs rénaux chez certains patients.
• Son action est d’acidifier l’urine et de réduire l’adhésion
des bactéries.
• Son mécanisme d’action serait l’inhibition compétitive
de la bactérie E.coli sur les cellules épithéliales de
l’urètre et la prévention des facteurs d’adhérence.
• Peu d’évidences suggèrent que les dérivés de
canneberges pourraient prévenir les récurrences des
infections urinaires chez les femmes à risque.
• Le dosage des dérivés de canneberges et sa comparaison
avec la prophylaxie des antibiotiques reste à établir.
• Il n’y a pas d’évidences montrant que les dérivés de
canneberges préviennent les infections urinaires chez
les blessés médullaires porteurs de sonde à demeure.
• Peu d’évidences rapportent que les dérivés de
canneberges sont efficaces pour le traitement des
infections urinaires récurrentes.
* Voir document en pièce jointe
- 15 -
Forces
de
preuve
1
1
1
1
3
3
2
2
- 16 -
- 17 -
- 18 -
- 19 -
- 20 -
- 21 -
- 22 -
- 23 -
- 24 -
- 25 -
- 26 -
- 27 -
Pavillon Agathe-Lacerte
Local 1077
Québec (Québec) G1K 7P4
CANADA
Renseignements : (418) 656-2131, poste 11880
Télécopieur : (418) 656-7825
btec.ulaval.ca