Infections urinaires chez les personnes porteuses de sonde à
Transcription
Infections urinaires chez les personnes porteuses de sonde à
COllection Infections urinaires chez les personnes porteuses de sonde à demeure ayant une vessie neurogène les connaître les reconnaître les gérer Cahier Les cahiers du BTEC 4 Pistes d’action documentées pour la pratique infirmière POUR UNE PRISE DE DÉCISION INFORMÉE PAR DES RÉSULTATS PROBANTS Infections urinaires chez les personnes porteuses de sonde à demeure ayant une vessie neurogène les connaître les reconnaître les gérer Bureau de transfert et d’échange de connaissances (BTEC) Faculté des sciences infirmières Institut de réadaptation en déficience physique de Québec (IRDPQ) Décembre 2005 MEMBRES DU GROUPE D’ÉLABORATION DES PISTES D’ACTION Stéphanie, Brochu, inf. Étudiante stagiaire Ginette Mbourou Azizah, Ph.D. Coordonnatrice scientifique Françoise Côté, inf., Ph.D. Professeure adjointe Johanne Gagnon, inf., Ph.D. Sc. inf. Professeure agrégée Bureau de transfert et d’échange de connaissances (BTEC) Faculté des sciences infirmières Université Laval Francine Roy, inf. Brigitte Boivin, inf. Institut de réadaptation en déficience physique de Québec (IRDPQ) Remerciements Docteur Jean- Guy Vézina Médecin Urologue IRDPQ Madame Monette Marchand Infirmière IRDPQ i Le BTEC en quelques mots L'intégration de preuves scientifiques aux pratiques professionnelles est devenue un critère de qualité dans le domaine de la santé. À terme, de telles pratiques devraient se traduire par l'amélioration des soins fournis à la population. Le Bureau de transfert et d’échange de connaissances (BTEC) est un outil dont se dotent des infirmières dans la poursuite de cet objectif de mise en place de pratiques informées par des résultats probants. * Au sein du BTEC, les infirmières et infirmiers aux prises avec des préoccupations d'ordre professionnel agissent en tant qu'indicateurs de situations problématiques. Ces questionnements sont acheminés, via une infirmière clinicienne, à des étudiants en sciences infirmières. Sous supervision, ces derniers traduisent les préoccupations provenant du milieu clinique en questions de recherche auxquelles ils doivent répondre par le biais d'une revue exhaustive de la littérature. Suite à l'obtention de cette réponse, les étudiants poursuivent leur tâche en préparant un compte-rendu synthétique, documenté et accessible qu’ils accompagneront de pistes d’action pour la pratique. Ce document est ensuite retourné au milieu pour validation. L'infirmière clinicienne, en collaboration avec les autres membres du personnel, analysent l’à-propos d’utiliser ces connaissances pour améliorer les interventions de l’équipe. Cette analyse permet la poursuite du processus de transfert et d’échange de connaissances. Il s’agit alors de raffiner les recommandations proposées pour les rendre conformes aux réalités des milieux de pratique. Il appartient ultimement aux infirmières et infirmiers de devenir des agents de changement en regard de leurs pratiques. Pour communiquer avec le BTEC Rita Labadie, coordonnatrice administrative Université Laval 1078 Pavillon Lacerte [email protected] téléphone :(418) 656-2131 poste 12038 télécopieur : (418) 656-7825 * En raison de ses sources de financement, le BTEC répond actuellement aux questionnements des infirmières et infirmiers oeuvrant dans les établissements universitaires de santé de la région de Québec. ii Méthodologie de la recherche documentaire Banques de données consultées : • Current Contents • Cochrane Library • Embase • CINHAL • Medline Années couvertes : • 1976 à 2005 Mots clés utilisés : • urinary tract infection • urinary complication • urological complication • catheterization • urinary catheter • indwelling catheter • spinal cord injury • neurogenic bladder • bladder management • prevention and management • cranberry Critères d’inclusions : Les études étaient choisies si elles discutaient des moyens de prévention des infections urinaires ou des sondes à demeure ou des vessies neurogènes. iii Table des matières MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE DOCUMENTAIRE .............................III PRÉVENTION DES INFECTIONS URINAIRES CHEZ DES PORTEURS DE SONDE URINAIRE AYANT UNE VESSIE NEUROGÈNE...................................- 1 PISTES D’ACTION DOCUMENTÉES .............................................................- 3 PROBLÉMATIQUE.....................................................................................................- 4 CONTAMINATION DU SYSTÈME URINAIRE EN PRÉSENCE D’UNE SONDE URINAIRE ....................................................................................................................- 5 PRÉVENTION DES INFECTIONS URINAIRES....................................................- 5 SONDE À DEMEURE : LE POUR ET LE CONTRE ................................................................ - 5 DIFFÉRENTS TYPES DE CATHÉTERS ............................................................................... - 6 PRINCIPES D’INSERTION DE LA SONDE .......................................................................... - 6 SYSTÈME DE DRAINAGE ................................................................................................ - 6 ANTIBIOTHÉRAPIE EN PROPHYLAXIE ............................................................................ - 7 ENTRETIEN DE LA SONDE ET DES PATIENTS SONDÉS...................................................... - 7 CHANGEMENT DE LA SONDE ......................................................................................... - 7 HYPER RÉFLEXIVITÉ ET VESSIE NEUROGÈNE ................................................................. - 7 NOUVELLES TENDANCES EN MATIÈRE DE PRÉVENTION DES INFECTIONS ....................... - 8 SUIVI DES BLESSÉS MÉDULLAIRES PORTEURS D’UNE SONDE À DEMEURE ....................................................................................................................- 9 ÉDUCATION AUX PATIENTS .................................................................................- 9 FORMATION DU PERSONNEL ...............................................................................- 9 TRAITEMENT ET DIAGNOSTIC DES INFECTIONS URINAIRES ................- 10 INFECTIONS NOSOCOMIALES ET BLESSÉS MÉDULLAIRES ....................- 10 CONCLUSION ...........................................................................................................- 11 RÉFÉRENCES............................................................................................................- 12 ANNEXE A - FORCES DE PREUVE DU BTEC....................................................- 14 ANNEXE B - ÉTUDES SUR LE CANNEBERGE ..................................................- 15 - iv Prévention des infections urinaires chez des porteurs de sonde urinaire ayant une vessie neurogène sonde à demeure soit inévitable.1 5 Or, lorsque comparé aux autres méthodes de vidange de la vessie, cet appareillage augmente considérablement les risques de développer des infections urinaires.6 Toutefois, il faut être vigilant, car une ‘bactériurie’ n’est pas synonyme d’une ‘infection urinaire’. Résumé À ce jour, peu d’approches ont prouvé leur efficacité clinique en ce qui concerne la prévention des infections du tractus urinaire chez les personnes portant une sonde à demeure.21 Peu coûteuses et facilement implantables, des mesures misant sur la formation en cours d’emploi du personnel et sur l’éducation au patient sont à la portée de toute équipe soucieuse d’améliorer ses pratiques pour favoriser la qualité de vie des personnes. Bactériurie et infection urinaire. Le terme ‘bactériurie’ signifie la présence de bactéries dans l’urine, sans égard à l’apparition de symptômes associés. L’‘infection urinaire’, pour sa part, représente le cas où la prolifération bactérienne aura causé le développement de symptômes. Ainsi, même si l’utilisation fréquente d’un cathéter sur la vessie est synonyme de bactériurie, la bactériurie n’est pas synonyme d’infection urinaire. Plutôt, elle en augmente les risques d’en être atteint.18 Une gestion adéquate de la dysfonction vésicale est une composante essentielle dans un programme de réadaptation chez les blessés médullaires. Elle revêt également une grande importance chez les autres porteurs d’une vessie neurogène.1 En effet, la perte du fonctionnement normal de la vessie est très déstabilisante pour toutes ces personnes.2 De plus, elle augmente les risques de détérioration du tractus urinaire et peut élever de manière significative les taux de morbidité.1 D’une importance particulière, les infections urinaires demeurent des complications fréquentes chez les blessés médullaires. Bien qu’en général ces infections n’entraînent pas de complications importantes, elles peuvent engendrer la formation de calculs rénaux, l’apparition de pyélonéphrites pouvant mener à de l’insuffisance rénale et une émergence de bactéries résistantes aux antibiotiques.3 4 Chez les personnes ayant un vessie neurogène, il arrive que l’utilisation d’une Signes et symptômes d’infections urinaires chez les porteurs de vessie neurogène. Chez les personnes ayant une vessie neurogène, les infections urinaires peuvent se présenter de diverses façons. Les signes et symptômes à surveiller sont : fièvre, frissons, urines troubles ou nauséabondes, hématuries, brûlure suspubienne ou mictionnelle, inconfort abdominal ou dorsal, incontinence ou augmentation des fuites urinaires, augmentation des contractures spastiques, dysurie, malaise général, léthargie, diaphorèse et hyperéflexie.7-6-9 18-20 Facteurs de risque d’infections. Les vessies neurogènes sont particulièrement sujettes aux infections urinaires pour plusieurs raisons : a) vidange incomplète de la vessie, b) augmentation de la -1- pression intravésicale, c) utilisation fréquente d’instrumentation sur l’appareil urinaire, d) surdistension vésicale, e) reflux vésico-urétéral et, f) stase urinaire.7- composition et de taille optimales pour le patient, l’emploi des principes d’insertion stériles, le recours à des systèmes de drainage clos autant que faire se peut, l’entretien rigoureux de la sonde et son changement opportun réduiraient les risques d’infections. En tout temps, le système de drainage devrait permettre le libre écoulement de l’urine. Parmi les pratiques actuelles, il faudrait surveiller l’utilisation de produits antibiotiques en prophylaxie 4 9 15 et les anti-cholinergiques en raison des effets secondaires reconnus.16 Pour les personnes porteuses d’une sonde à demeure, l’éducation quant aux signes et symptômes d’infections urinaires pourrait en réduire la fréquence et la sévérité.17 Des enseignements concernant l’importance d’une hydratation adéquate et de la consommation de repas équilibrés pour éviter la constipation, la démonstration du positionnement correct du cathéter et du sac ainsi que l’exposition du rôle primordial du maintien de mesures d’hygiène rigoureuses pourraient contribuer au mieux-être des patients.16 9 Colonisation de la vessie par des bactéries. En présence d’une sonde à demeure, les bactéries peuvent coloniser la vessie de trois façons : 1) par la voie extraluminale où des bactéries colonisent l’espace séparant le cathéter de l’épithélium de l’urètre pour y former un biofilm, 2) au moment de l’insertion de la sonde et, 3) par la voie intraluminale, où des bactéries en suspension dans l’urine provenant du sac de drainage gagnent la vessie.10 Prévention des infections. Avec une prise en charge appropriée visant à optimiser la fonction vésicale pour réduire les risques d’infection urinaire, les personnes vivant avec une vessie neurogène pourront recouvrer une vie plus saine. La formation en cours d’emploi pour le personnel et l’éducation aux patients constituent les bases susceptibles de mener à une réduction des risques d’infections urinaires associées au port d’un cathéter. Pour le personnel, il importe de reconnaître que le moyen le plus efficace pour réduire le développement d’infections urinaires chez les personnes ayant une vessie neurogène consiste à faire une utilisation minimale de la sonde à demeure,11 qu’il s’agisse alors d’opter pour un autre type de système de drainage ou d’être attentif à tout changement dans la condition de la personne qui pourrait conduire à l’abandon de la sonde à demeure.12 Il est également recommandé de procéder à la pose d’une sonde de manière à minimiser l’introduction de bactéries et à réduire les traumatismes physiques qui y sont associés.4 8 13 14 Entre autres, l’utilisation d’un cathéter de Commentaire. À ce jour, peu d’approches ont prouvé leur efficacité clinique en ce qui concerne la prévention des infections du tractus urinaire chez les personnes portant une sonde à demeure.21 Peu coûteuses et facilement implantables, des mesures misant sur la formation en cours d’emploi du personnel sont à la portée de toute équipe soucieuse d’améliorer ses pratiques pour favoriser la qualité de vie des personnes. En regard de l’importante somme de travaux actuellement en cours pour le développement de nouvelles technologies visant à réduire les infections urinaires associées aux cathéters, il sera intéressant d’observer les changements positifs qui devraient s’opérer dans un avenir rapproché.21 -2- PISTES D’ACTION DOCUMENTÉES Force de la preuve † Formation du personnel  La formation en cours d’emploi du personnel infirmier devrait cibler l’apprentissage et le renouvellement des techniques d’insertion stérile, la reconnaissance des signes et symptômes d’infections et la surveillance de la période de cathétérisme.  Les pratiques devraient être mises à jour régulièrement, afin de tenir compte des avancées scientifiques dans ce domaine qui évolue rapidement. 3 1 Éducation aux patients  L’éducation aux patients devrait débuter dès que possible suite au cathétérisme. Elle devrait aborder les thèmes de l’hygiène personnelle et l’hygiène de vie ainsi que la reconnaissance des signes et symptômes d’infections. 3 Prévention des infections urinaires • La meilleure approche de cathétérisme devrait prendre en compte des caractéristiques individuelles de chaque patient (morphologie, style de vie et préférences) et être discutée avec celui-ci. 4 • Le lavage des mains devrait précéder et suivre la manipulation du cathéter. 1 • Lors de la pose du cathéter, des mesures stériles devraient être employées et toute manipulation susceptible de causer des traumatismes devrait être réduite au minimum. 1 et 4 Le système de drainage devrait permettre le libre écoulement de l’urine. 4 • Options thérapeutiques † • L’utilisation rationnelle des produits antibiotiques contribuerait à réduire l’émergence de résistance bactérienne. 1 • L’emploi de médicaments anti-cholinergiques devraient être réservé aux cas d’hyper réflexivité de la vessie, sous condition qu’il n’y ait pas de contre indication à leur utilisation. 2 Voir annexe A -3- Problématique À sa naissance, l’être humain ne contrôle pas sa vessie. Avec le développement de son système nerveux, il devient apte à en inhiber et à en initier la vidange. Dès lors, certaines atteintes neurologiques peuvent causer un dysfonctionnement de la vessie.22 16 Spécifiquement, le type de problèmes expérimenté par les personnes dont le système nerveux est atteint dépendra de l’endroit où la moelle épinière aura été endommagée. C’est donc dire l’importance d’une gestion adéquate de la dysfonction vésicale dans un programme de réadaptation chez les blessés médullaires ou autres personnes présentant vivant avec des vessies neurogènes.1 En effet, la perte de la fonction normale de la vessie est très déstabilisante et résulte en une augmentation des risques de détérioration du tractus urinaire, pouvant élever de manière significative les taux de morbidité.10 1 Avec une prise en charge appropriée pour optimiser la fonction vésicale, ces personnes peuvent cependant recouvrer une vie plus saine, notamment en réduisant les risques d’infections urinaires. Idéalement, la prise en charge vésicale sera guidée par les caractéristiques uro dynamiques du patient. Dans les faits, d’autres facteurs tels des caractéristiques anatomiques et préférences du patient devront être pris en compte.10 En général, il importe de reconnaître que le cathétérisme intermittent demeure l’option la plus efficace en regard de sa capacité à réduire les risques d’infection du tractus urinaire chez des personnes aux prises avec des problèmes de vidange.22 Son emploi peut également augmenter la continence et prévenir des dommages des voies urinaires supérieures. Idéalement, la personne devrait pouvoir faire ses propres cathétérismes à son départ de l’hôpital. Cependant, pour certaines personnes, il sera impensable d’initier ou de poursuivre les auto-cathétérismes, cette méthode étant incompatible avec leur situation physique, psychique, environnementale ou leur causant des blessures.1 5 10 À ce moment, le cathétérisme continu, via la pose d’une sonde à demeure, sera envisagé et discuté avec la personne. Selon la littérature, environ le tiers des blessés médullaires avec des vessies neurogènes feront ce choix. Cependant, plusieurs problèmes sont rattachés à l’usage du cathétérisme continu. La majorité de ces complications est attribuable à l’inévitable bactériurie inhérente à l’utilisation du cathétérisme continu qui augmente considérablement les risques d’infections. 6 À partir du moment où la sonde est insérée, l’incidence de bactériurie et les risques d’infections urinaires associées augmentent de 5% à 10% par jour.10 Ce type d’infections constitue la complication la plus fréquente chez les blessés médullaires. Ces infections pourront engendrer la formation de calculs rénaux, l’apparition de pyélonéphrites susceptibles de mener à de l’insuffisance rénale et une émergence de résistance bactérienne aux antibiotiques.3 4 Le présent document vise à fournir une information à jour sur la prévention des infections urinaires chez les porteurs de sonde urinaire ayant une vessie neurogène. Tout au long du texte, les termes ‘bactériurie’ et ‘infection urinaire’ ne seront pas interchangés. Plutôt, l’emploi du terme ‘bactériurie’ signifiera exclusivement la présence de bactéries dans l’urine, sans égard à l’apparition de symptômes associés. L’‘infection urinaire’, pour sa part, représentera le cas où la prolifération bactérienne aura causé le développement de symptômes. Ainsi, même si l’utilisation fréquente d’un cathéter sur la vessie est synonyme de bactériurie, la bactériurie n’est pas synonyme d’infection urinaire symptomatique. Plutôt, elle en augmente les risques.18 Les prochaines pages aborderont les modes de contamination du système urinaire, les stratégies préventives, le suivi, l’éducation, la formation, les traitements et diagnostic des infections urinaires et infections urinaires nosocomiales associées à la blessure médullaire. -4- Contamination du système urinaire en présence d’une sonde urinaire En présence d’une sonde urinaire, les bactéries peuvent coloniser la vessie selon trois mécanismes : 1) par la voie extraluminale (colonisation bactérienne sous la forme d’un biofilm ‡ entourant le cathéter, entre la paroi externe de celui-ci et l’épithélium de l’urètre)4 18 24, 2) lors de l’insertion de la sonde10 et, 3) par la voie intraluminale (ascension des bactéries en suspension dans l’urine qui, à partir du sac de drainage, remontent vers la vessie par le conduit du cathéter).23 Selon plusieurs auteurs, la voie intraluminale serait plus fréquente chez l’homme, tandis que la voie extraluminale le serait chez la femme.8 19 La contamination bactérienne périodique demeure donc inévitable. Toutefois, il importe de reconnaître qu’elle n’est pas directement responsable du développement d’infections urinaires. Plutôt, c’est l’accumulation dans le temps et la prolifération de ces bactéries introduites qui conduiront à la pathologie.23 Cette nuance peut s’illustrer en comparant le fonctionnement d’une vessie normale à celui d’une vessie neurogène sur laquelle on applique une sonde. Dans le premier cas, le processus normal de remplissage et de vidange de la vessie implique d’abord que la vessie soit emplie, puis vidée complètement à toutes les trois heures. Cette vidange périodique conserve la vessie exempte de maladies, car elle évacue les bactéries qui auraient pu coloniser le tractus urinaire. Dans le cas d’une vessie neurogène équipée d’une sonde et d’un sac, l’urine se vide lentement et de manière continue, ce qui contribue à une accumulation de bactéries.2 Prévention des infections urinaires Plusieurs auteurs s’entendent pour dire qu’il y aura une bactériurie après un mois de cathétérisme ou de port d’une sonde, peu importe les moyens de prévention et le matériel utilisé.13 Par exemple, en dépit des nombreuses recherches technologiques menées ces dernières années, il semble qu’aucun biomatériel ni principe pharmacologique ne soit actuellement capable de prévenir complètement la constitution du biofilm.8 Puisque la bactériurie semble inévitable, les moyens de prévention des infections urinaires visent donc à empêcher qu’une bactériurie asymptomatique se développe en infection urinaire symptomatique. Sonde à demeure : le pour et le contre Il semblerait que la meilleure approche pour prévenir les infections urinaires liées aux cathéters chez les blessés médullaires serait de retirer le cathéter dès qu’il est cliniquement possible de le faire.11 D’autres modalités d’évacuation que la sonde à demeure devront alors être préférées.4 14 20 En effet, la comparaison des différents types de cathéters sur la base de leur propension à favoriser des infections urinaires fait ressortir clairement que les personnes utilisant des types de vidanges autres que la sonde à demeure (e.g., cathétérisme intermittent, étui pénien) ont moins d’infections urinaires que les porteurs de telles sondes.6 25 Cependant, dans certains cas, les auto-cathétérismes seront incompatibles avec la situation de la personne, auxquels cas le cathétérisme continu devient une option valable.1 5 10 Il demeure important de spécifier que, chez certaines populations à risque d’infections urinaires comme c’est le cas des âgés, la sonde à demeure devrait être évitée.26 ‡ Le biofilm est une matière constituée d’organismes pathogènes enchâssés dans une enveloppe composée d’une matrice protéique de l’hôte et d’un exoglycocallice d’origine microbienne. Le biofilm confère au microbe une protection contre les agents antimicrobiens et défenses de l’hôte. La formation du biofilm, très rapide (recouvre, englobe et fixe les bactéries entre la muqueuse urétrale et la paroi de la sonde urinaire dès les six premières heures), peut mener au développement d’infections chroniques et persistantes difficilement curables par une antibiothérapie. -5- Différents types de cathéters Présentement, aucun cathéter à même de prévenir complètement la formation d’un biofilm n’a pu être développé. Il est donc difficile d’éviter l’adhésion de bactéries à l’urètre.8 11 Plusieurs études se sont toutefois intéressées à identifier le type de cathéters le plus avantageux pour prévenir les infections urinaires. D’une part, les résultats obtenus demeurent discordants. D’autre part, plusieurs de ces études ont été initiées par des fabricants de sondes vésicales.13 Des résultats disponibles, il est actuellement possible de proposer que la nature du biomatériel constituant la sonde doit être choisie de manière à optimiser la tolérance du cathéter par le patient. Pour un sondage à demeure de longue durée, il est ainsi préférable d’opter pour les sondes en silicone, qui semblent provoquer moins d’obstructions et fournir un meilleur confort au patient.8 27 En ce qui concerne l’activité antimicrobienne, les sondes comportant un alliage d’argent ont conduit à l’observation de résultats intéressants. In vitro, l’argent diminuerait l’adhésion d’E. coli au cathéter, se lierait à l’ADN bactérien et empêcherait la multiplication des bactéries.13 À l’heure actuelle, le rapport coût/bénéfice de cette approche demeure cependant un sujet débattu.13 28 29 30 31 Principes d’insertion de la sonde Plusieurs experts recommandent d’insérer la sonde vésicale de façon stérile.4 8 13 14 Il est également suggéré 1) de procéder au nettoyage préalable du méat au savon doux, 2) de choisir un cathéter adapté à la morphologie de l’urètre (un calibre trop gros pourrait entraîner des traumatismes, alors qu’un cathéter trop petit permettrait le passage rétrograde des microorganismes) § , 3) d’utiliser des cathéters fins, lubrifiés et déformables pour épouser le mieux possible l’anatomie de l’urètre, 4) de gonfler le ballonnet à l’eau stérile pour éviter qu’il ne bouge, 5) de gonfler le ballonnet avec seulement 10 mL de liquide pour minimiser les risques de traumatismes et, 6) de fixer correctement la sonde pour éviter les va-et-vient pouvant causer des traumatismes de l’urètre.8 13 14 Il est par ailleurs important d’être particulièrement vigilants en présence d’un sphincter spastique.32 Finalement, le recours à un lubrifiant antimicrobien lors de l’insertion du cathéter n’aurait pas fait preuve d’efficacité.8 Système de drainage Le système de drainage doit a priori rester clos tout au long de son utilisation.7 4 8 14 15 Le système est dit clos quand la jonction sonde-ligne de drainage n’est jamais déconnectée. Son but est de diminuer le risque de migration bactérienne à l’intérieur de la ligne urinaire. Pour réaliser une gestion en système clos, il est nécessaire d’utiliser un sac collecteur d’urine possédant les trois éléments suivants : une vidange (pour ne pas changer de poche), une valve antireflux (pour éviter la contamination rétrograde) et un site ponctionnable.4 Cependant, les systèmes ouverts correctement manipulés pourraient être tout aussi sécuritaires que les systèmes clos.33 En général, pour une très courte période, le système clos demeurerait toutefois préférable.7 Dans tous les cas, le drainage devrait être contrôlé régulièrement pour éviter la distension exagérée de la vessie.32 § Une taille de 12 à 14 Fr est recommandée pour éviter le blocage du lumen urétral tout en permettant un bon drainage de l’urine. Cette taille sera ajustée à la hausse dans le cas d’urine trouble. -6- Antibiothérapie en prophylaxie Bien que l’antibiothérapie en prophylaxie s’avère efficace, elle serait liée à une trop grande émergence de résistance bactérienne. Elle devrait donc être limitée à certains cas, par exemple avant des traitements invasifs.4 9 15 Par ailleurs, l’irrigation vésicale d’antibiotiques ne permet pas de prévenir l’infection urinaire, alors que les cathéters enduits d’antibiotiques contribuent à les réduire. Ceux-ci augmentent cependant les risques de développement de résistance chez les bactéries et d’émergence de champignons.13 8 34 À long terme, les agents antiseptiques (e.g., oral, topique, instillé dans la vessie, instillé dans le sac à drainage) qui modifient la flore normale de la peau peuvent également être dommageables en facilitant le processus de colonisation urétrale par des bactéries encore plus virulentes.11 Entretien de la sonde et des patients sondés Il est tout d’abord important de rappeler que toute personne manipulant une sonde devrait se laver les mains avant et après être entrée en contact avec le cathéter.35 Le méat urinaire devrait également être nettoyé au savon doux lors de la toilette et après chaque selle, s’il y a souillures.13 28 L’usage d’un savon antiseptique n’aurait pas démontré de bénéfices plus grands.13 34 De manière générale, il serait recommandé de 1) placer le sac de drainage plus bas que la vessie, même dans le cas de sac muni d’une valve antireflux, 2) maintenir le système de drainage fonctionnel, sans obstruction ni torsion et, 3) favoriser une hydratation adéquate ** .19 36 20 Le rôle des infirmières serait particulièrement crucial pour chacun de ces points.19 Changement de la sonde Les avis quant aux meilleurs moments pour changer les sondes vésicales divergent. En situation aiguë, le cathéter devrait être changé régulièrement plusieurs fois par semaine. Par exemple, la sonde doit être changée rapidement en cas d’infections, lors d’un traitement antibiotique, lorsqu’elle est bouchée ou défectueuse. Dans une situation plus chronique et en milieu clinique, elle devrait être changée tous les 10 jours. Pour un patient chronique ayant peu de complications, le changement pourrait s’effectuer entre deux et six semaines.32 27 Pour ce qui est des cultures d’urine, plusieurs auteurs suggèrent de remplacer la sonde avant la culture, ce qui aurait pour effet d’éliminer le biofilm, d’augmenter la diffusion de l’antibiothérapie et de fournir des résultats plus valides.37 9 18 19 Si le cathéter n’était pas remplacé, plusieurs microorganismes seraient effectivement présents, ce qui pourrait conduire à une antibiothérapie erratique.38 13 Hyper réflexivité et vessie neurogène Dans la littérature, les anti-cholinergiques sont généralement associés aux vessies hyperactives. Chez les patients ayant ce type de vessie (e.g., certains blessés médullaires ou personnes vivant avec une vessie neurogène), l’utilisation de tels médicaments peut être importante pour prévenir le développement de petites vessies contractées. Bien que les agents anti-cholinergiques (e.g., oxybutynin et tolterodine) soient indiqués pour traiter les vessies neurogènes, leur utilisation demeure limitée en raison de leurs importants effets secondaires anti-muscariniques. Parmi ceux-ci, mentionnons l’assèchement de la ** Une hydratation adéquate pourrait contribuer à la diminution de la stase dans la vessie. Une diurèse quotidienne de 1500 mL pourrait avoir un effet positif pour contrer la prolifération bactérienne.3 -7- bouche, la constipation, les reflux gastro-oesophagiens, la vision embrouillée.16 Dans l’état actuel des choses, l’utilisation de tels médicaments devrait donc être cessée dès que possible.16 Cependant, une éventuelle application intra vésicale pourrait réduire les effets secondaires adverses des anti-cholinergiques.39 De même, le développement de nouveaux agents ayant une activité anti-muscarinique plus spécifique constitue une voie thérapeutique prometteuse actuellement explorée.16 Finalement, l’injection directe de la toxine du botulisme †† dans le muscle détrusor semble améliorer l’état des patients (i.e. diminution de l’hyper réflexivité de la vessie).16 Une faiblesse musculaire généralisée a toutefois été rapportée en de rares occasions.16 Ce procédé apparaît l’un des plus prometteurs pour traiter les vessies hyper réflexives.40 Bien que certaines contreindications s’appliquent, un rapport risque/bénéfice favorable semble encourager l’utilisation de la toxine botulique.41 Nouvelles tendances en matière de prévention des infections La plupart des nouveaux moyens de prévention des infections urinaires visent la voie extraluminale, car la formation d’un biofilm sur la sonde serait responsable de l’emprisonnement d’un nombre important de bactéries qui seraient à même de causer la bactériurie. L’utilisation de souches non pathogènes de bactéries, ou interférence bactérienne, est unique parmi les approches préventives visant à réduire les infections urinaires associées aux cathéters. En bref, il s’agit de sélectionner des organismes bénins pour former un biofilm protecteur sur les cathéters plutôt que de prévenir la formation d’un biofilm d’organismes pathogènes. Par exemple, on peut instiller une souche bénigne d’E. coli dans la vessie neurogène de personnes blessées médullaires. Un essai clinique a montré que ce type d’instillation directe est sécuritaire, ne produit aucun symptôme d’infection urinaire et réduit la fréquence des infections. Une autre approche, qui fait également appel au principe d’interférence bactérienne, consiste à incuber les cathéters urinaires en présence d’une souche non pathogène d’E. coli. La formation d’un biofilm protecteur sur le cathéter empêchera sa colonisation ultérieure par des uro pathogènes. Bien que l’exploitation d’un biofilm non pathogène pour induire une colonisation durable par une flore bénigne n’en soit qu’à ses débuts, plusieurs y voient des développements encourageants.21 L’utilisation de jus ou de comprimés de canneberges§ est actuellement vue comme une prophylaxie intéressante pour diminuer l’apparition des infections urinaires. Deux composantes des canneberges contribueraient à prévenir l’adhérence des bactéries (surtout E. coli) aux cellules uro épithéliales de la vessie et de l’urètre, tout en ayant la capacité d’acidifier l’urine.14 42 Cependant, la littérature disponible ne permet pas de reconnaître ces bienfaits chez les personnes ayant une vessie neurogène.28 Il est possible que ce phénomène soit dû à ce que, chez des personnes avec une vessie normale, les infections seraient souvent attribuables à E. coli, alors que chez les personnes avec une vessie neurogène, un grand nombre de bactéries différentes serait plutôt en cause. Les résultats de recherches confirment donc que les canneberges peuvent avoir une certaine efficacité dans la prévention des infections urinaires chez les femmes sans vessie neurogène et non †† En inhibant l’acétylcholine à la jonction pré synaptique, cette toxine cause une dénervation chimique réversible d’une durée approximative de neuf mois. § Voir annexe B : études sur les canneberges. -8- sondées et suggèrent qu’aucune modification du pH urinaire ni du décompte des bactéries et des globules blancs ne sont observés chez des patients blessés médullaires avec vessie neurogène. Il demeure cependant important de reconnaître que ces études sont sujettes à un important biais en raison du taux élevé de non-adhérence au traitement, lequel est sans doute lié aux effets secondaires expérimentés suite à la prise de jus ou de capsules de canneberges (e.g. nausées, reflux gastro-oesophagien, augmentation du péristaltisme intestinal). Avant de se prononcer sur l’efficacité des canneberges chez des participants blessés médullaires et porteurs de sondes, les résultats de nouvelles études s’adressant à cette population spécifique devront être obtenus.14 42 43 Suivi des blessés médullaires porteurs d’une sonde à demeure La dysfonction neurogénique du tractus urinaire inférieur chez les blessés médullaires est une condition instable qui peut varier considérablement et ce, dans une courte période. Ainsi, un suivi méticuleux et des vérifications régulières sont nécessaires.39 Les patients devraient passer des examens d’urine aux deux mois. Le tractus urinaire supérieur, la forme de la vessie et la capacité résiduelle devraient être vérifiés aux six mois. Tout signe suggérant un risque d’infection exige une investigation spécialisée. Éducation aux patients La perte de la fonction normale de la vessie constitue souvent un événement traumatisant dans la vie d’une personne. L’instauration d’un système de vidange de la vessie par le biais d’un cathéter rattaché à un sac est perçue par certains comme une humiliation et une perte de dignité.2 Par exemple, plusieurs femmes portant une sonde interpréteraient très mal le geste accompagnant la pose du cathéter, le percevant comme un assaut sexuel.1 Pour des raisons davantage psychosociales que biologiques, les femmes dans l’incapacité physique de s’administrer des autocathétérismes seraient donc plus nombreuses que les hommes à juger préférable le port d’une sonde à demeure plutôt que le cathétérisme intermittent effectué par une tierce personne.10 De tels états de désabusement sont rapidement suivis de complications qui peuvent être dévastatrices.2 La première action éducative à entreprendre auprès d’un patient devrait donc viser la vérification de sa perception quant au système de vidange qu’il devra gérer. Il importe ici de démystifier tant les aspects affectifs que techniques inhérents à la condition de la personne. Placée dans des dispositions favorables, la personne sera mieux à même de s’impliquer activement dans son processus de santé, reprenant ainsi une part du contrôle qu’elle aura perdu sur la gestion de sa vessie. La prévalence des infections pourra alors être diminuée par l’éducation adéquate des patients. Par exemple, il pourrait s’agir de leur enseigner à reconnaître les signes et symptômes des infections urinaires associés à leur mode de vidange vésicale. Cet enseignement pourrait réduire la fréquence et la sévérité des infections.17 Le personnel pourrait aussi sensibiliser patients et familles à l’importance d’une consommation adéquate de fluides et de repas équilibrés (e.g., pour éviter la constipation), au positionnement correct du cathéter et du sac ainsi qu’au rôle primordial d’une hygiène personnelle soignée. Formation du personnel L’éducation du personnel est aussi une composante importante dans la prévention des infections vésicales. Par exemple, un taux d’infection urinaire de 34% s’observe quand la sonde à -9- demeure est mise en place par une infirmière inexpérimentée, alors qu’une infirmière expérimentée réduira ce taux à 21%.4 De plus, les infirmières devraient être attentives à identifier des situations où l’emploi du cathéter devient inapproprié pour en discuter avec le médecin traitant.12 Une simple intervention de la sorte pourrait réduire les taux d’infections et les coûts reliés aux hospitalisations. Le nombre d’heures alloué à chaque patient aurait également un impact significatif sur la baisse des taux d’infections nosocomiales chez les blessés médullaires.44 Dans un contexte de raréfaction des ressources, la diminution des taux d’infections pourrait se faire par l’adhésion stricte aux recommandations des guides de pratique sur les soins des cathéters.4 44 De plus, les infirmières doivent surveiller attentivement les signes et symptômes des infections urinaires en vue d’un dépistage précoce et d’une mise en place rapide de traitements.44 Pour leur part, les infirmières en autorité devraient s’assurer de fournir un personnel en nombre adéquat, bien entraîné dans les techniques de cathétérisme. Elles devraient également se tenir à jour dans la recherche, afin de modifier les pratiques selon les nombreuses avancées dans le domaine.44 Finalement, la présence d’un cathéter chez un patient devait être connue de tous les intervenants qui oeuvrent auprès de lui.32 Traitement et diagnostic des infections urinaires La conduite habituelle à prendre en ce qui concerne le traitement des infections urinaires consiste à ne traiter que les bactériuries symptomatiques.3 4 7-9 15 18-20 27 28 Pour certains, la seule raison valable de traiter une bactériurie asymptomatique s’observe dans les cas de patients à haut risque de développer des complications futures et lors d’interventions invasives.43 D’autres auteurs, plus modérés, suggèrent qu’en présence de bactériuries asymptomatiques, on procédera au décompte des globules blancs dans l’urine pour prendre ensuite une décision quant au diagnostic d’infection urinaire et mesures subséquentes.28 45 Peu importe l’approche privilégiée, il demeure que les infections urinaires ne devront être traitées qu’après qu’une culture d’urine ait été faite (une densité significative de bactéries viables confirme le diagnostic)14 parce que les bactéries associées au cathéter sont souvent réfractaires aux antibiotiques.23 La surveillance des signes et symptômes reste primordiale. En ce sens, les principaux signes et symptômes suggérant la présence d’une infection urinaire symptomatique dans le cas des vessies neurogènes sont : fièvre, frissons, urines troubles, hématurie, urine nauséabonde, brûlure suspubienne ou mictionnelle, vague inconfort abdominal ou dorsal, incontinence ou augmentation des fuites urinaires, augmentation des contractures spastiques, dysurie, malaise général, inconfort, léthargie, diaphorèse et hyper réflexivité.7-9 18-20 Infections nosocomiales et blessés médullaires De manière générale, les infections urinaires comptent pour 40% de toutes les infections nosocomiales. Bien plus, 80 % de ces infections sont associées à l’utilisation de cathéters.22 Le facteur de risque le plus important reste la durée du cathétérisme.22 Bien que la morbidité associée à de telles infections reste faible, elle entraîne des malaises et augmente la durée des hospitalisations.8 45 Chez les blessés médullaires, le port d’une sonde à demeure multiplie par quatre la probabilité d’une infection urinaire.8 Lorsque cette population est hospitalisée, 15% des personnes présenterait au moins un épisode d’infection urinaire nosocomiale.8 Cette prévalence confirme l’existence d’un risque plus grand des infections urinaires nosocomiales chez cette population.8 - 10 - Chez les blessés médullaires, plusieurs facteurs de risque ont été identifiés pour expliquer cette plus grande susceptibilité : la distension vésicale exagérée, le reflux vésico-urétral, les hautes pressions mictionnelles du détrusor, le grand volume de résidus post mictionnels, l’existence de lithiases de l’arbre urinaire, l’obstacle à la vidange vésicale et l’instrumentation sur la vessie.3 8 Chez les blessés médullaires hospitalisés, Klebsiella pneumoniae, bactérie de la flore intestinale, serait responsable du tiers des infections urinaires nosocomiales.8 Par exemple, un fort pourcentage d’infections urinaires chez la femme en milieu de rééducation serait secondaire à une contamination périnéale d’origine fécale.8 Conclusion À ce jour, peu d’approches ont prouvé leur efficacité clinique en ce qui concerne la prévention des infections du tractus urinaire chez les personnes portant une sonde à demeure.21 Parmi les méthodes efficaces, la stratégie à privilégier, introduite il y a près d’un siècle, consiste à faire appel à un système de drainage en circuit fermé. Cependant, des systèmes ouverts correctement manipulés seraient tout aussi sécuritaires.33 Il est également recommandé de retirer la sonde à demeure dès que son utilisation n’est plus requise. Pour ce faire, des systèmes de rappels ont conduit à des résultats concluants. Finalement, le suivi de mesures de contrôle des infections strictes telles le lavage des mains et le maintien du cathéter dans un état non obstrué pour assurer le drainage de l’urine par gravité représente une manière logique de réduire les infections. Peu coûteuse et immédiatement implantable, elle a prouvé son efficacité. Parmi les techniques en développement, la prévention de la formation des biofilms pathogènes à la surface des cathéters en est à ses premières études cliniques. Également à l’essai, l’interférence bactérienne pourrait s’avérer une manière novatrice d’exploiter les biofilms bactériens à des fins utiles. Qu’il s’agisse d’instiller des souches non pathogènes d’E. coli directement dans la vessie ou d’employer des cathéters enrobés de cette flore bénigne, cette approche est à surveiller. Similairement, avec l’accroissement du nombre d’études s’intéressant aux effets de la canneberge et de ses dérivés, de nouvelles données permettant de statuer de l’efficacité de ces produits devraient être présentées dans un proche avenir.21 - 11 - Références 1. Yavuzer G, Gok H, Tuncer S, Soygur T, Arikan N, Arasil T. Compliance with bladder management in spinal cord injury patients. Spinal Cord 2000;38(12):762-5. 2. Evan-Pughe C. A kinder catheter. IEE Review 2005;Feb:40-43. 3. Rubenstein JN, Schaeffer AJ. Managing complicated urinary tract infections: the urologic view. Infect Dis Clin North Am 2003;17(2):333-51. 4. Pavese P. Nosocomial urinary tract infections: defenition, diagnosis, physiopathology, treatment. Médecine et maladies infectieuses 2002;33:266s-274s. 5. Wyndaele JJ. Complications of intermittent catheterization: their prevention and treatment. Spinal Cord 2002;40(10):536-41. 6. Esclarin De Ruz A, Garcia Leoni E, Herruzo Cabrera R. Epidemiology and risk factors for urinary tract infection in patients with spinal cord injury. J Urol 2000;164(4):1285-9. 7. Garcia Leoni ME, De Ruz E. Management of urinary tract infection in patients with spinal cord injuries. Clin Mocrobiol Infect 2003;9:780-785. 8. De Sèze M, Shao É, Joseph PA. Nosocomial urinary tract infection and patients with a neurogenic bladder, in rehabilitation. Médecine et maladies infectieuses 2002;33:298s-310s. 9. Liedl B. Catheter-associated urinary tract infections. Curr Opin Urol 2001;11(1):75-9. 10. Jamil F. Towards a catheter free status in neurogenic bladder dysfunction: a review of bladder management options in spinal cord injury (SCI). Spinal Cord 2001;39(7):355-61. 11. Trautner BW, Darouiche RO. Prevention of urinary tract infection in patients with spinal cord injury. J Spinal Cord Med 2002;25(4):277-83. 12. Huang WC, Wann SR, Lin SL, Kunin CM, Kung MH, Lin CH, et al. Catheter-associated urinary tract infections in intensive care units can be reduced by prompting physicians to remove unnecessary catheters. Infect Control Hosp Epidemiol 2004;25(11):974-8. 13. Berthelot P, Mallaval FO, Fascia P, Turco M, Jucht F. Preventing nosocomial urinary tract infection: catheters and techniques. Médecine et maladies infectieuses 2003;33:499-505. 14. Hampton S. Nursing management of urinary tract infections for catheterized patients. Br J Nurs 2004;13(20):1180-4. 15. Niel-Weise B, Broek P. Urinary catheter policies for long-term bladder drainage. Cochrane Database Syst Rev 2005(1):CD004201. 16. Ouslander JG. Management of overactive bladder. N Engl J Med 2004;350(8):786-99. 17. Cardenas DD, Hoffman JM, Kelly E, Mayo ME. Impact of a urinary tract infection educational program in persons with spinal cord injury. J Spinal Cord Med 2004;27(1):47-54. 18. Trautner BW, Darouiche RO. Role of biofilm in catheter-associated urinary tract infection. Am J Infect Control 2004;32(3):177-83. 19. Wilde MH. Urinary tract infection in people with long-term urinary catheters. J Wound Ostomy Continence Nurs 2003;30(6):314-23. 20. Joseph PA, de Sèze M, Soyeur L. Treatment ofnosocomial urinary tract infections in patients with a neurogenic bladder. Médecine et maladies infectieuses 2002;33:488-497. 21. Trautner BW, Hull RA, Darouiche RO. Prevention of catheter-associated urinary tract infection. Curr Opin Infect Dis 2005;18(1):37-41. 22. Bardsley A. The neurogenic bladder. Nurs Stand 2000;14(22):39-41. 23. Matsukawa M, Kunishima Y, Takahashi S, Takeyama K, Tsukamoto T. Bacterial colonization on intraluminal surface of urethral catheter. Urology 2005;65(3):440. 24. Anderson GG, Palermo JJ, Schilling JD, Roth R, Heuser J, Hultgren SJ. Intracellular bacterial biofilm-like pods in urinary tract infections. Science 2003;301(5629):105-7. 25. Shekelle PG, Morton SC, Clark KA, Pathak M, Vickrey BG. Systematic review of risk factors for urinary tract infection in adults with spinal cord dysfunction. J Spinal Cord Med 1999;22(4):258-72. 26. Advice p.r.n. Draining question. Nursing 2005;35(3):10. 27. Tenke P, Jackel M, Nagy E. Prevention and Treatment of Catheter-Associated Infections: Myth or Reality? EAU Update Series 2004;2:106-115. 28. Madigan E, Neff DF. Care of patients with long-term indwelling urinary catheters. Online J Issues Nurs 2003;8(3):7. - 12 - 29. Saint S, Elmore JG, Sullivan SD, Emerson SS, Koepsell TD. The efficacy of silver alloy-coated urinary catheters in preventing urinary tract infection: a meta-analysis. Am J Med 1998;105(3):236-41. 30. Kumon H, Hashimoto H, Nishimura M, Monden K, Ono N. Catheter-associated urinary tract infections: impact of catheter materials on their management. Int J Antimicrob Agents 2001;17(4):311-6. 31. Brosnahan J, Jull A, Tracy C. Types of urethral catheters for management of short-term voiding problems in hospitalised adults. Cochrane Database Syst Rev 2004(1):CD004013. 32. Wyndaele JJ, Madersbacher H, Kovindha A. Conservative treatment of the neuropathic bladder in spinal cord injured patients. Spinal Cord 2001;39(6):294-300. 33. Leone M, Garnier F, Dubuc M, Bimar MC, Martin C. Prevention of nosocomial urinary tract infection in ICU patients: comparison of effectiveness of two urinary drainage systems. Chest 2001;120(1):220-4. 34. Tambyah PA. Catheter-associated urinary tract infections: diagnosis and prophylaxis. Int J Antimicrob Agents 2004;24 Suppl 1:S44-8. 35. National electronic Library for Health. Infection Control - Recommendations. http://www.nelh.nbs.uk/guidelinesdb/html/infection_control/guidelines.asp 2004. 36. Wong ES, Hooton TM. Guidelines for prevention of catheter-associated urinary tract infections. Infect control 1981;2:126-130. 37. Shah PS, Cannon JP, Sullivan CL, Nemchausky B, Pachucki CT. Controlling antimicrobial use and decreasing microbiological laboratory tests for urinary tract infections in spinal-cord-injury patients with chronic indwelling catheters. Am J Health Syst Pharm 2005;62(1):74-7. 38. Nicolle LE. Urinary tract infections in long-term-care facilities. Infect Control Hosp Epidemiol 2001;22(3):16775. 39. Stohrer D, Castro-Diaz, e. Chartier-Kastler, G., Kramer, G., Mattiasson, A., & Wyndaele, J.J. 2003. 40. Smith CP, Somogyi, G.T., & Boone, B.T. Botulinum toxin in urology: evaluation using an evidence-based medicine approach. NATURE CLINICAL PRACTICE UROLOGY 2004;1(1):31-37. 41. Frenkl TL, Rackley RR. Injectable neuromodulatory agents: botulinum toxin therapy. Urol Clin North Am 2005;32(1):89-99. 42. Linsenmeyer TA, Harrison B, Oakley A, Kirshblum S, Stock JA, Millis SR. Evaluation of cranberry supplement for reduction of urinary tract infections in individuals with neurogenic bladders secondary to spinal cord injury. A prospective, double-blinded, placebo-controlled, crossover study. J Spinal Cord Med 2003;27:2934. 43. Jepson RG, Mihaljevic L, Craig J. Cranberries for preventing urinary tract infections (Review). The Cochrane Library 2005(1). 44. Sujijantararat R, Booth RZ, Davis LL. Nosocomial urinary tract infection: nursing-sensitive quality indicator in a Thai hospital. J Nurs Care Qual 2005;20(2):134-9. 45. Sauerwein D. Urinary tract infection in patients with neurogenic bladder dysfunction. Int J Antimicrob Agents 2002;19(6):592-7. - 13 - ANNEXE A - FORCES DE PREUVE DU BTEC - 14 - ANNEXE B - ÉTUDES SUR LE CANNEBERGE Auteurs Linsenmeyer et al., 2004 Waist et al., 2004 Jepson, Mihaljevic & Craig, 2003 Objectifs Déterminer l’efficacité des suppléments de canneberges dans la prévention des infections urinaires chez les blessés médullaires* (Essaie clinique randomisé, ECR) Vérifier si l’effet antibactérien des canneberges réduirait les bactériuries et les pyuries chez les blessés médullaires vivant avec une vessie neurogène et porteurs de sonde *. (ECR) Vérifier l’efficacité des canneberges et de ses produits dérivés dans le traitement des infections urinaires (Cochrane review) Jepson, Mihaljevic & Craig, 1998 Raz, Chaban & Dan, 2004 Vérifier l’efficacité des canneberges dans le traitement des infections urinaires (Cochrane review) Vérifier si le jus de canneberge peut-être une alternative au traitement antibiotique Lynch, 2004 Revoir les connaissances quant à la prévention des infections urinaires par la prise de canneberges Franco, 2005 Évaluer l’efficacité des traitements de canneberges sur la récurrence des infections urinaires Drug and therapeutics bulletin 2005 Revoir les connaissances quant à la prévention des infections urinaires par la prise de canneberges Conclusions • Les comprimés de canneberge ne changent pas le PH urinaire, les agents bactériens ni les globules blancs urinaires. • Les comprimés de canneberges ne préviennent pas les infections urinaires chez les blessés médullaires. • Le jus de canneberge ou les comprimés ne réduisent ni les bactériuries ni les pyuries et ne préviennent pas les infections urinaires chez les blessés médullaires. • Le jus de canneberge pourrait diminuer les infections urinaires chez les femmes sexuellement actives sur une période de 12 mois. • Le dosage (durée et quantité) et la méthode d’administration (jus ou comprimés) restent à spécifier. • L’efficacité du jus de canneberge sur le traitement des infections urinaires reste à prouver par des essais cliniques randomisés. • Le jus de canneberge semble être une prophylaxie efficace pour les infections urinaires récurrentes chez les femmes sexuellement actives. • Chez les patients ayant des vessies neurogènes, le jus de canneberge ne semble pas prévenir les infections urinaires. • Les canneberges ont un modeste effet prophylactique sur les infections urinaires; le risque d’infection peut être réduit de 20% chez les femmes à risque. • Il y a un manque d’évidences sur l’utilisation des canneberges pour le traitement des infections urinaires. • Aucune interaction entre les canneberges et la médication n’est connue. • L’utilisation des canneberges peut augmenter le risque de calculs rénaux chez certains patients. • Son action est d’acidifier l’urine et de réduire l’adhésion des bactéries. • Son mécanisme d’action serait l’inhibition compétitive de la bactérie E.coli sur les cellules épithéliales de l’urètre et la prévention des facteurs d’adhérence. • Peu d’évidences suggèrent que les dérivés de canneberges pourraient prévenir les récurrences des infections urinaires chez les femmes à risque. • Le dosage des dérivés de canneberges et sa comparaison avec la prophylaxie des antibiotiques reste à établir. • Il n’y a pas d’évidences montrant que les dérivés de canneberges préviennent les infections urinaires chez les blessés médullaires porteurs de sonde à demeure. • Peu d’évidences rapportent que les dérivés de canneberges sont efficaces pour le traitement des infections urinaires récurrentes. * Voir document en pièce jointe - 15 - Forces de preuve 1 1 1 1 3 3 2 2 - 16 - - 17 - - 18 - - 19 - - 20 - - 21 - - 22 - - 23 - - 24 - - 25 - - 26 - - 27 - Pavillon Agathe-Lacerte Local 1077 Québec (Québec) G1K 7P4 CANADA Renseignements : (418) 656-2131, poste 11880 Télécopieur : (418) 656-7825 btec.ulaval.ca