Du 30 novembre au 28 décembre 2014
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Du 30 novembre au 28 décembre 2014
Ex o sit o de 0ël Art contemporain en Rhône-Alpes Du 30 novembre au 28 décembre 2014 INTRODUCTION L’Exposition de Noël est un rendez-vous de l’art contemporain qui se déroule chaque mois de décembre depuis 2007. À l’initiative du MAGASIN - Centre National d’Art Contemporain de Grenoble et en partenariat avec le Conseil Régional Rhône-Alpes, la Ville de Grenoble et le Conseil Général de l’Isère, l’exposition 2014 se tient pour la huitième fois dans les salles de l’Ancien Musée de Peinture de la ville. Conçue à l’image des expositions de Noël des musées et centres d’art suisses et allemands, cette manifestation a pour objectif de rassembler en un temps et un lieu donnés une sélection d’artistes contemporains qui ont un lien avec la région Rhône-Alpes (qui y sont nés, qui y ont été formés, ou qui y vivent et y travaillent). Ces artistes ont été sélectionnés par un jury de 8 professionnels actifs dans le champ de l’art contemporain. Ils se sont réunis les 5 et 6 novembre 2014 pour sélectionner 19 artistes parmi les 250 artistes qui ont répondu à l’appel à candidature. Parmi eux sont nommés les lauréats du Prix de la Ville de Grenoble, attribué par le jury, ainsi que le prix Edouard Barbe, attribué par un groupe de collectionneurs réuni avant le vernissage de l’exposition. Les membres du jury de l’Exposition de Noël 2014 sont : Damien Airault, commissaire d’exposition indépendant. Laura Haby, artiste, co-lauréate du Prix de la ville de Grenoble 2013. Xavier Jullien, Responsable du centre d’art La Halle à Pont-en-Royans. Émilie Perotto, artiste, enseignante à l’Esad Saint-Etienne. Théo Robine-Langlois, étudiant à l’École du MAGASIN. Frédéric Le Gorrec, collectionneur. Vincent Verlé, Directeur du centre d’art Bastille, Grenoble. Léo Wadimoff, membre du collectif curatorial Marbrier 4, Genève. L’Exposition de Noël 2014 est coordonnée par 3 des 7 élèves de l’École du MAGASIN : Costanza Ciabatti, Sophie Lvoff et Théo Robine-Langlois. L’École du MAGASIN est un programme international de formation professionnelle aux pratiques curatoriales, développé depuis 1987 par le MAGASIN - Centre National d’Art Contemporain de Grenoble. Dispensé sur un an, il rassemble des participants issus de diverses formations (art, histoire de l’art, philosophie, sciences sociales…) autour d’un sujet de recherche devant déboucher sur un projet collectif. Il est coordonné par Estelle Nabeyrat. Les textes explicatifs de cette brochure nous ont été gracieusement transmis par chacun des artistes présentés dans cette exposition, afin d’expliquer leur travail. Nous les remercions de leur collaboration. Textes et images : © les artistes Création graphique : erwan soyer - frédéric besson LES ARTISTES Maxime Baudouin 5 Alexandre Bavard 7 Marie-Pierre Bufflier 9 Sophie Combes 11 Yves D’Anglefort 13 Florent Dubois 15 Jérôme Dussuchalle 17 Simon Feydieu 19 Amélie Giacomini & Laura Sellies 21 Vincent Guillermin & Laurène Vernet 23 Thomas Jeames 25 Laura Kuusk 27 Paul Limoujoux 29 Nathalie Lopizzo 31 Rodolphe Montet 33 Anne Renaud 35 Christophe Tournay 37 MAXIME BAUDOUIN moustache / cigarettes Né en 1984, il vit et travaille à Paris. L’enjeu du travail de l’artiste Maxime Baudouin est l’élaboration d’un rapport entre l’objet sculptural et sa visibilité. La vie de l’artiste rencontre le monde des objets par ses actions d’agencement, d’association ou de déplacement. C’est ce qu’il nomme « ses gestes sculpturaux minimes ». Ils sont réalisés dans son atelier ou son espace de vie, créant au fil du temps une généalogie de ses formes liée à l’histoire des lieux qu’il a traversé. Ensuite, c’est un travail sur le point de vue : la représentation photographique. L’enregistrement devient une relecture indicielle de ses premières formes. Finalement, son travail pictural redonne au tout une matérialité, plus de réalité, devenant une présentation ou représentation de ses multiples formes successives, autre chose à regarder. Pour moustache, Maxime Baudouin utilise l’artifice du masque comme un objet fondateur de son geste sculptural minime. cigarettes, quant à lui, joue d’une dualité dans l’image. La jointure qui crée l’effet miroir n’est pas révélée. Les deux bandes de peinture surjouent le masque et la dualité, rajoutant du trouble aux images et aux objets, en leur donnant une autre matérialité, plus de réalité. moustache, 2014 photographie numérique, tirage c-print, peinture et spray acrylique sur verre, 80x60 cm cigarettes, 2014 photographie numérique, tirage c-print, peinture et spray acrylique sur verre, 80x60 cm 5 ALEXANDRE BAVARD Listen to your body Né en 1987, il vit et travaille à Paris. Mon travail est une exploration des champs de la science-fiction et du fantastique. Filtrage, métamorphose, ré-injection. Dans cet univers où abondent les imageries fantasmatiques, les visions d’anticipations et leurs cortèges de mondes réinventés, je puise un certain nombre de vocable et tisse de nouveaux récits qui viennent habiter mes pièces. Dans mes toiles où se mélangent passé, présent et futur, j’amalgame les distances et je détourne des références pour permettre au spectateur de construire, à son tour, un idéal fantastique. Ma peinture assimile les structures narratives mises en place par la bande dessinée et le cinéma : des montages superposés et successifs où les figures et les fonds participent à la mise en place de l’intrigue. J’essaie de troubler les systèmes de perception et de remettre en question la vision que chacun se fait de son environnement, de son cadre de vie et du rapport à la mémoire collective. Les questionnements qui nourrissent mon travail pictural s’origine dans une angoisse de notre temps, dans une peur de l’avenir, seul résultat des paradoxes de l’ère que nous vivons : peur du nucléaire, décadences sociales, avènement des mondes virtuels... J’ouvre une frontière entre le probable et l’improbable. Cette contradiction m’intéresse car elle crée une étrangeté d’où émerge l’apparition de formes, d’objets intrigants mais doués d’un certain pouvoir visuel. Ils attirent autant qu’ils inquiètent. Par le caractère fictionnel de mes pièces, je cherche à ouvrir des espaces de possible pour mieux appréhender et maîtriser le réel. Listen to your body est une rencontre, comme pourrait l’être un voyageur avec un être venu d’ailleurs. Il révèle la présence d’êtres supérieurs, d’une faune et d’une flore nouvelle, comme on peut en retrouver dans les récits fantastiques. C’est ici un regard d’explorateur et de naturaliste qui est porté et qui se rapproche d’auteurs de science-fiction tel Aldous Huxley. Il apporte un message comme un monolithe évoquant les tables de la Loi, forme de divinité ou manifestation de l’état avancé d’être pensant. Listen to your body, 2014 Papier mâché peint, tissus « tie and dye », édition, fleurs, diode lumineuse, dictaphone Oeuvre réalisée pour l’exposition « Yidlun », Marseille, galerie Association d’idées 7 MARIE-PIERRE BUFFLIER Le canapé aux motifs printaniers Née en 1966, elle vit et et travaille à Romans. Ma pratique artistique se nourrit de l’attention que je porte aux objets domestiques. Leurs apparences me fascinent ; la capacité qu’ont leurs formes à solliciter notre corps sans utiliser les mots m’interroge. Je cherche à comprendre ce qui dans leur façon d’être nous permet de nous sentir entourés, accueillis. De leurs cousins domestiques, ils ne copient que les apparences : s’ils évoquent un pot ou une lampe, jamais ils n’en revendiquent les fonctions. Ainsi, le « vase » sans fond fait de papier ne peut contenir de liquide et le « canapé » aux motifs printaniers ne saurait supporter le poids d’un corps humain. Je fais en sorte que face à eux nous nous sentions à la fois sollicités et empêchés d’agir, et je contredis systématiquement les invitations que leurs formes adressent à nos corps par des choix esthétiques qui nous maintiennent à distance : ici un matériau ou une technique inadaptés, là des disproportions dans l’échelle, ailleurs une grande fragilité dans l’apparence. Je demande à mes volumes d’être délibérément superflus, décoratifs, pour qu’ils nous aident à admettre et à supporter notre propre sentiment d’inanité ; je les veux fragiles, précaires, désœuvrés. Je leur apprends à ne pas nous servir. Je veux que nous percevions leur pauvreté, leur humilité, la distance qu’ils nous imposent comme un don qu’ils nous feraient, une invitation à accepter nos propres faiblesses et fragilités sans chercher à les dissimuler au travers de l’interaction avec autrui. Le canapé aux motifs printaniers fait partie d’une gamme de volumes produits pour l’installation Pavillon ouest, Chambre n°2 (Valence, 2014) sur la base de l’assemblage de modules rectangles en tasseaux recouverts de papier journal marouflé. La forme de ce volume, la façon dont il est surélevé et la présence de motifs décoratifs sur ses surfaces lui confèrent les apparences d’un canapé. Néanmoins, sa fragilité nous empêche de tenter un contact physique. Mieux : elle nous invite à rester à distance et à comprendre que c’est l’humilité et le désœuvrement de cet objet qui nous permet de le regarder en face. Le canapé aux motifs printaniers, 2014 Assemblage 9 SOPHIE COMBES Afterimage Née en 1974, elle vit et travaille à Lyon et Valence. Par le biais de la photographie, mon intérêt se porte sur le paysage comme construction humaine et comme perception, et sur ce qui dans un environnement donné porte la marque de structures sociales ou économiques. Le point de départ est de regarder ce qui demeure caché et qui d’une façon générale est banni de toute considération pour ponctuer une certaine forme d’entropie produite par notre temps. Les lieux explorés sont ceux où l’économie laisse son empreinte, des espaces intermédiaires, inachevés ou en ruines, traversés ou négligés, des sortes de limbes contemporaines. En cherchant à porter au jour cette réalité mouvante, l’intention repose également sur une forme d’investigation de la représentation photographique et de l’expérience de l’abstraction visuelle, et de la façon dont ces deux éléments peuvent se combiner dans une image. Il s’agit d’explorer les limites du medium et ses propres contradictions, mais aussi d’interroger ses interactions avec la peinture ou la sculpture. Comment déployer le potentiel de latence d’une captation photographique ? Comment une image peut-elle en générer d’autres ? Lorsqu’elle interroge le processus de vision, l’image devient une surface de projection, et de transition, un écran sur lequel viennent se figer la marque d’une transformation, le passage d’un état à un autre, l’épreuve du temps et l’effacement. Lors des débuts de la technique photographique Balzac, redoutant qu’on le prît en photo, dit à Nadar que chaque corps dans la nature se composait d’une série de spectres en couches superposées à l’infini. Selon l’écrivain, la photographie détacherait une de ces couches seulement, faisant de l’impalpable une chose solide - opération magique, impossible et inquiétante à la fois. Afterimage traite ainsi de la matérialité de l’image photographique, de son principe de révélation et de rémanence en montrant la version stéréotypée d’un paysage, un décor qui s’abime et laisse réapparaitre d’autres éléments du réel. Afterimage, 2014 Photographie numérique - Tirage fine art contrecollé sur alu dibond - 93,5 x 100 cm 11 YVES D’ANGLEFORT N°91 / N° 169 / N° 183 Né en 1954, il vit et travaille à Meylan. Je dessine des sujets que je veux représenter, des rêves ou des songes qui passent ou sortent de mon esprit. Mes dessins sont numérotés depuis un an environ car le titre n’a pour moi aucune importance. Et vu tout ce que j’écris dessus, il n’y en aurait pas besoin. Mes dessins racontent des histoires, des batailles et des événements. J’y dessine souvent de petits bonshommes et des personnages. Je remplis mes dessins avec des codes, des messages et des sentences, des sigles et de petites poésies inventées. Il y a des fées, des anges, des esprits et des œufs sacrés. Beaucoup d’aston martin et des cayennes turbo parce qu’elles me font rêver. J’adore Betty de Rothschild, Simone Veil, et Judith Scott. J’ai fait un ciel un jour où dans un petit coin à l’abri séchaient des gouttes de pluie. Voilà. C’est un monde complexe, mon monde. Les véhicules y ont souvent deux pilotes. La vie est rarement binaire. N°91, 2014 Techniques mixtes sur papier C’est le plan d’un falcon 5000 de guerre qui va se promener entre le jardin des mots et le wood à essence, il y a l’avion d’albert de monaco et celui de karl von karl, la fusée des frères chanel aussi, et une faïencerie pour les baby killers, une caravane et un musée. N° 169, 2014 Techniques mixtes sur papier c’est la vierge marie qui emmène son baby jc 1er et les amis de celui-ci à l’école dans son cayenne turbo pick up qui est une version spéciale que lui a offert porsche, sinon elle a une maseratti, mais elle est simple et refuse d’avoir un chauffeur, son mari travaille tout le temps, il y a carrefour, c’est une histoire qui va mal finir mais la ce n’est que le début, il y a des anges du secret service qui regardent si tout se passe bien. N° 183, 2014 Techniques mixtes sur papier C’est une histoire extrêmement compliquée où les petites filles du dessin N°92 avaient volé les voiliers de six de mes petits amis présents à nouveau dans ce dit dessin pour célébrer le mariage de deux d’entre eux. 13 FLORENT DUBOIS La fête de la fertilité Né en 1990, il vit et travaille à Toulouse. La fête de la fertilité est une vidéo faite d’un montage d’animations courtes divisée en trois parties et illustrant plusieurs rapports à la fête. Les images utilisées mêlent, à des fragments de mon travail pictural, des photographies personnelles ainsi que des détails de livres sur les hobbies et travaux manuels. Unis par les mêmes jeux de contamination colorée mouvante et par une bande-son rythmée, les effets du montage greffent ces images d’une lecture nouvelle. Les photographies didactiques et les souvenirs d’enfance devenant le prétexte à une narration fictive. Les gestes de mains affairées à la réalisation de travaux manuels deviennent ainsi les doigts du magicien transformant les déguisements de crépon en tuniques et les décorations de table étoilées en mystérieux pentacles. L’animation picturale sert de liant et de toile de fond colorée en unifiant cette fiction-rébus. Dans celle-ci, des enfants masqués comme des initiés possèdent désormais l’inquiétante aura d’une confrérie secrète d’acteurs ou celle d’une troupe de cirque où les objets décoratifs se meuvent eux-mêmes en masques et en cachoteries. Par le biais du montage vidéo, j’essaie de représenter les danses et rituels d’une sous-culture fabriquée de toute pièce. Son émergence s’appuie sur l’accumulation et la juxtaposition simultanée de rythmes, d’images et de sons ne présentant apparemment aucuns rapports historiques ou logiques entre eux. Au contraire, c’est un bal incertain où se célèbre la propre instabilité et superficialité de ses protagonistes. Mais à force de mélanges et d’imbrications, cette célébration semble elle-même vidée de tout sens. Ici évidente, la pratique de l’appropriation devient comme un rituel magique capable de détourner des images de leur sens initial ou commun pour mieux les offrir, consentantes ou pas, à d’intuitives déformations et hybridations. La fête de la fertilité, 2014 Video, 4’14’’ 15 JÉRÔME DUSSUCHALLE Tablée I / Tablée II Né en 1974, il vit et travaille entre Paris et St-Etienne. La sculpture comme un monde La sculpture est un monde dans lequel les formes naissent, s’évanouissent, reprennent vie et donnent à mes idées une trajectoire, une dimension aussi. La force de mes sculptures, c’est peut-être de se retrouver à la croisée des images, des symboles, qui les font naître. Je partage avec le spectateur un imaginaire commun, une communauté de formes, que je propose de réinventer, auxquelles je réinsuffle vie et existence. À travers, agencements, lignées, portées, tablées, je tente de tracer une histoire discontinue mais vivante qui me raconte et raconte l’histoire des formes architecturales, topographiques et scripturales. Tablées I, juillet-septembre 2014 Assemblage : bois, peinture, plâtre teinté, réemploi de mobilier, 68,5 x 190,5 x 50 cm Tablée II, juillet-septembre 2014 Assemblage : bois, peinture et plâtre, 85 x 100 x 77 cm 17 SIMON FEYDIEU sans titre (Molène) Né en 1984, il vit et travaille à Lyon et Bordeaux. Cette série a débuté par des marches dans des paysages urbains non paysagés, plus précisément le port industriel d’Anvers. Cette série de toiles repose sur un procédé chimique rudimentaire suite à une collecte de plantes rudérales (Molène, Erigerons du Canada, Mille Perthuis,…). Immergées pendant plusieurs jours dans de l’acétone, les pétales ou les feuilles dégorgent leurs pigments. Chaque plante a une teinte qui lui est propre. La toile est ensuite immergée dans ce mélange. Les marques claires apparaissant sur la toile sont celles laissées soit par les pétales et les feuilles des plantes soit par la grille de l’étendoir, jusqu’à évaporation de l’acétone et le séchage concomitant de la toile. Ce phénomène de crystalisation d’un état floral s’assimile à la réalisation d’un herbier abstrait, éphémère car photosensible. sans titre (Molène), 2014 Diptyque de 72 x 56 cm (2 panneaux de 36 x 56 cm) Acétone, pigments de plantes rudérales, toiles tendues sur châssis Vue d’atelier à Air Antwerpen, Anvers © Stefanie Pretnart, 2014 19 AMÉLIE GIACOMINI & LAURA SELLIES Une partie indivisible de sa scénographie aquatique, La Piscine Nées en 1988 et 1989, elles vivent et travaillent entre Paris et Lyon. La natation synchronisée se décompose en deux niveaux : le spectacle (la représentation artistique) est au dessus de l’eau, parfois la caméra plonge et nous laisse découvrir autre chose : l’effort physique. La ligne de l’eau représente cette surface-limite, ce moment précis de basculement entre deux états. Début 2013, nous commençons à suivre l’équipe de natation synchronisée de la ville de Lyon. Nous nous constituons un catalogue d’images, de gestes, de matériaux, de sons et de récits. Catalogue-outil qui sera à la base d’un ensemble plus métaphorique intitulé Une partie indivisible de sa scénographie aquatique. Six sous-ensembles ou sculptures activées le compose. La piscine en est l’un des fragments autonomes. Fragments sur lesquels différents niveaux de récits se collent. La nageuse erre sans devenir, appelant à la contemplation. Elle débute sa parade, charme, on la suit. Dernier motif venant compléter la spirale du thème, elle s’adonne à de courtes aventures avec la sculpture. Un temps. L’apprivoise. Elle est prise dans une suite d’actions mystérieuses dont le destinataire reste inconnu. Héroïne redondante, elle réactive le paysage désolé et rend la projection d’un récit possible. « Les objets sont les sculptures mais ils seront aussi le décor de la scène quand le corps les traversera. Des sculptures que les mouvements de la performeuse transforment en partenaires, dont le sens et la disposition attendent qu’elle vienne les éclairer, les rehausser. Elles existent seules pourtant. Mais deviennent autres quand l’événement commence. Parfait exemple de plasticité. C’est pourquoi les actions d’Amélie Giacomini et Laura Sellies sont aussi des expositions de sculptures : on préfèrerait dire des « temps ». (...) Rien ne se révèle, tout change, le « temps » devient celui d’un théâtre possible, muet, mystérieux, peuplé d’objets spectateurs. Nous, qui sommes là aussi, attendons ce moment pour divaguer. Puis la danseuse sort et les sculptures reprennent leur pose, retrouvent leur solitude. On croit les avoir vu s’éveiller. Illusion rétrospective. L’effet de l’art. » Bastien Gallet Le soir du vernissage, une nageuse traverse l’espace d’exposition. Une partie indivisible de sa scénographie aquatique, La Piscine, 2014 Performance, environ 4 minutes, faïence émaillée, bois, acier laqué, verre ampoule Avec le soutien de Caropolis Crédit : Karolina Krasouli 21 Burning Vitruve, 2013 Peinture murale, feu de détresse, vidéo, moniteur, lecteur DVD, 2 x 2 m pour la peinture murale, dimensions variables pour l’ensemble Haaschich maps, 2013 Scan, impression couleur, 20 x 28cm, 24 x 32cm encadré VINCENT GUILLERMIN & LAURÈNE VERNET Freedonia Nés en 1980 et 1985, ils vivent et travaillent à Lyon. Freedonia est une œuvre proposée par Vincent Guillermin et Laurène Vernet dont les deux pratiques croisées fabriquent ensemble une performance exposant un groupuscule masqué autour d’une gigantesque machine de 3,50 mètres de haut dont le bras batteur monte des centaines de kilogrammes de blancs d’oeufs en neige. Les îles flottantes disproportionnées qui ressortent de l’évènement sont ensuite mises à flot sur les rivières avoisinantes comme d’étranges archipels dont la fragilité évoque la résistance de l’utopie face à l’industrie. Freedonia, 2012 Techniques mixtes, acier, mécanique 23 THOMAS JEAMES Phantasma nzumbe mvumbi nsumbi ndzumbi nzambi zumbi bibi bi zan zan vis viva Né en 1980, il vit et travaille entre Annecy et Genève. L’art doit être ce serpent qui vous glisse entre les doigts. S’il bouge trop vite c’est que vous devez apprendre à ralentir. Phantasma nzumbe mvumbi nsumbi ndzumbi nzambi zumbi bibi bi zan zan vis viva est une installation in-situ. Le titre de celle-ci résonne comme une formule magique, sorte d’incantation que le poète se récite intérieurement avant de passer à l’acte du dessin. Issus de carnet de recherche, ces dessins proches du griffonnage sont des «speed drawings». Ils sont réalisés au cours de voyage et de déambulation. Sortis de leur contexte de carnet, ils deviennent dessins à part entière propre à l’observation au sein d’une installation. Phantasma nzumbe mvumbi nsumbi ndzumbi nzambi zumbi bibi bi zan zan vis viva, 2014 Installation, impressions 25 LAURA KUUSK Almost Film I-IV Née en 1982, elle vit et travaille entre Tallinn et Grenoble. « Une simple erreur de langage, un mot qui en remplace un autre, et les choses se mettent à basculer. Laura Kuusk travaille avec les mots et les images, les informations qui nous constituent, ce qui encadre nos manières d’être au monde, dans le moins visible, dans le plus quotidien. Elle étudie ces éléments comme des narrations potentielles, portant son attention particulièrement sur le regard, sur des relations (de pouvoir) entre l’image/l’objet donné à voir et le spectateur, ainsi que les manières différentes de constituer des histoires. Le travail de Laura Kuusk peut être comparé à celui d’une détective menant une enquête dans les détails de la vie. C’est une entreprise de sondage de ce qui nous habite, des codes, des gestes que l’on intègre malgré nous. Une sorte d’enquête sur l’inconscient collectif, la manière dont nous sommes construits culturellement. Elle focalise, regarde de près les détails qui s’effacent parce que trop proches. Relever, collectionner ces moments pensés comme des moments où l’on reprend le contrôle sur la vie par le biais de la fiction. Un temps, on prend une distance avec la réalité à partir d’un de ces détails émergents et ouvrants sur une histoire que l’on se construit parallèlement. » Eléonore Pano-Zavaroni avec Laura Kuusk Almost Films est une série de vidéos au sujet de personnes qui ont un projet de film. Il s’agit de l’archéologie d’un film au futur ou d’un film qui n’existera jamais. Nous voyons les gens en train de parler de leur idée de film, de nous montrer les endroits où ils s’imaginent ce film, quelques accessoires, les détails qui sont importants pour eux...C’est le potentiel d’un film qui est là, créé et recréé par les spectateurs d’Almost Films qui se « font un film » à partir des éléments donnés d’un imaginaire. S’agit-il du portrait d’un réalisateur, d’une fiction, d’une documentation, d’un film qui n’existe pas, d’un « making of » ? Almost Film I-IV Vidéos HD 2010-2012 Almost Film I, 6’25’’, 2010 Almost Film II, 10’26’’, 2012 Almost Film III, 7’27’’, 2011 Almost Film IV, 7’14’’, 2011 27 PAUL LIMOUJOUX Sans titre (xssxx) Né en 1989, il vit et travaille entre Lausanne et Lyon. Caractérisé par un jeu poétique avec des éléments formels directement empruntés au monde extérieur, mon travail se réfère à une certaine banalité. En m’emparant d’éléments du quotidien, je me constitue un ensemble de formes simples et discrètes qui rejettent l’idée du spectaculaire. Appréhendables comme des mots, ces volumes développent une autonomie par leurs résonnances sculpturales. Lors du temps de monstration, ces multiples objets s’assemblent pour tenter de faire œuvre afin d’interroger les mécanismes de perception de l’œuvre d’art. Chaque pièce est au service de l’ensemble afin de laisser entrevoir un échange, une fiction. Sans titre (xssxx), 2004 Dimensions variables, plomb 29 NATHALIE LOPIZZO Un appartement Née en 1964, elle vit et travaille à Fontaine. Planifier, organiser, domestiquer la création artistique... rien de tout cela dans mon parcours, qui est placé sous le signe de la liberté et de la spontanéité. Je travaille de manière intuitive, rien n’est calculé à l’avance : je me laisse guider par le pinceau. Chaque création est une nouvelle aventure dont j’ignore le dénouement. L’absence de cadre pour mes « toiles » suggère d’ailleurs une expansion de la forme, qui ouvre davantage à l’imaginaire. Les formes dépeintes peuvent donc s’échapper à l’infini. La luminosité qui se dégage se veut mystique, comme un regard sur le monde des possibles. Suite à ma première exposition, j’ai eu rapidement besoin d’espace ; la nécessite de travailler sur des grands formats s’est alors imposée d’elle-même. Mais c’est réellement dans mon appartement que l’évolution de mon travail prend tout son sens. Cette transformation d’un espace clos, totalement bétonné, en véritable jardin d’hiver est le résultat de quatre années de travail. Opérant sur le mobilier, laissant jaillir la peinture du sol au plafond comme un tourbillon d’émotions, je pratique le all-over ; recouvrant la moindre surface, j’offre à cette occasion, un modèle unique d’habitat citadin. En parallèle de l’exposition, des visites de l’appartement seront possibles. Pour plus d’informations, s’adresser aux médiateurs. Un appartement, 2010-2012 Acrylique et cerne d’or, 68m2 31 RODOLPHE MONTET Mine antipersonnelle Né en 1987, il vit et travaille à Lyon. « Depuis plus de 15 ans, Rodolphe Montet travaille les formes du désir, acceptant pleinement le risque d’une quête qui, pour être juste, se doit d’être subtile. Car l’artiste ne cherche pas à créer des objets de désir (c’est le fond de commerce de la publicité), mais bien les formes du désir lui-même. Il s’agit donc de donner une existence matérielle à une force qui par nature est immatérielle. Quels sont les effets d’une attraction ? d’un corps désirable ? Quelles tensions crée-t-il et quelles en sont les conséquences ? (…) ». Pierre-Olivier Dittmar « À travers ses séries « mine antipersonnelle », Rodolphe Montet interroge l’ambiguité de la relation qu’entretient l’homme avec les armes à feu. Entre fascination et répulsion, la société moderne dénonce la prolifération des armes tandis que ses médiums les plus populaires (cinéma, télévision, bande dessinées, jeux-vidéo…) jouent continuellement de leur attractivité. En revisitant des formes d’armes diverses telles que les obus, les missiles ou les grenades, Rodolphe Montet nous confronte plus largement à notre rapport à la violence, à notre étrange façon de l’associer plus ou moins consciemment aux sphères du ludique et du sexuel…» Antoine Renoux Mine antipersonnelle, 2013 Installation 33 ANNE RENAUD Sans Titre (yucca) Née en 1985, elle vit et travaille à Lyon. Je construis mes peintures à partir d’images de paysages et de plantes exotiques, de piscines, d’architectures modernistes. J’extrais de ces images des éléments architecturaux et visuels pour les mettre en scène dans une juxtaposition de motifs abstraits et d’éléments figuratifs. Inspirée par les motifs de transats ou de parasols, la bande verticale jaune vif est un motif récurrent dans mon travail récent. Je l’utilise pour créer un ancrage dans la composition, un axe autour duquel construire un espace et planter un décor. Par le traitement des plantes dans des couleurs à la fois sombres et acides, j’essaie de détourner leur aspect séduisant et de leur amener une forme d’étrangeté. Les compositions flottent sur la toile et les surfaces géométriques oscillent entre l’illusion d’une profondeur donnée par la perspective et la frontalité de surfaces colorées abstraites. Les éléments figuratifs s’entremêlent parfois avec les surfaces géométriques de sorte qu’une confusion émerge entre arrière-plan et premier plan. Je choisis des plantes tropicales et des couleurs vives et lumineuses afin de recréer une atmosphère exotique évoquant des paysages de bord de mer, de vacances. L’univers visuel propre à ces lieux et à l’imagerie qu’ils convoquent me semble propice à une manipulation de signes et de clichés et à une forme de corruption de ces images. Il s’agit en fait de faire basculer légèrement ce champ de référence, de le diviser en deux entités à priori incompatibles et de mélanger ces fragments de formes comme on mélangerait les syllabes d’un mot afin de construire une nouvelle unité. Sans Titre (yucca), 2014 Acrylique et huile sur toile, 70 x 95 cm 35 CHRISTOPHE TOURNAY La moisson était-elle finie le 27 juillet ? - les silos - / Et la terre, en conscience, est rude III Né en 1964, il vit et travaille à Hauterives. Longtemps, j’ai voulu croire que peindre était une activité semblable à toute autre. Mais il n’en est rien. C’est un travail impossible, un vrai naufrage. Non que ce soit une épreuve douloureuse, l’effort est bien souvent récompensé par une grande joie mais quelque chose, réfractaire, se dérobe. Pourtant, peindre m’émerveille, mon atelier est mon royaume et après les trois, quatre mois de travail nécessaires à son élaboration et sa lente construction, un tableau prend corps et peut-être âme pour d’autres que moi. Toutefois, aucune explication et aucun discours ne peuvent fausser sa valeur, cacher son éventuel échec, le limiter (en art, seul le résultat compte). Autonome de son auteur, tout tableau s’offre selon la nature que le peintre a pu lui donner, réussi ou pas, à vous de voir... La moisson était-elle finie le 27 juillet ? - les silos, 2010 Tôle galvanisée, ondulée et cintré, charnières et boulonnerie inox, acrylique sur tôle galvanisée perforée Et la terre, en conscience, est rude III, 2013 Acrylique sur contre-plaqué, sable 37 L’Exposition de Noël est organisée par le MAGASIN – Centre National d’Art Contemporain de Grenoble, en partenariat avec la Ville de Grenoble, le Conseil Régional Rhône-Alpes et avec le soutien du Conseil Général de l’Isère. Lieu d’exposition Ancien Musée de Peinture Place de Verdun 38000 Grenoble Du mercredi au dimanche De 14h à 19h Entrée libre Centre National d’Art Contemporain Site Bouchayer-Viallet 8 esplanade Andry-Farcy 38000 Grenoble 04 76 21 95 84 [email protected] www.expositiondenoel.com