REGLEMENT DE VIE APOSTOLIQUE Commentaire officiel

Transcription

REGLEMENT DE VIE APOSTOLIQUE Commentaire officiel
REGLEMENT DE VIE APOSTOLIQUE
Commentaire officiel
DON BOSCO
PERE ET MAITRE DE LA JEUNESSE
DICASTERE POUR LA FAMILLE SALESIENNE
Consulte mondiale
REGLEMENT DE VIE APOSTOLIQUE
Commentaire officiel
Rome
Le Dicastère et la Consulte mondiale remercient ceux qui ont- généreusement
collaboré à la réalisation de ce symposium, en particulier les pères :
Joseph AUBRY
Mario COGLIANDRO
José COLOMER
Piergiorgio MARCUZZI
Mario MIDALI
José REINOSO
Couverture Maria C. Perrini
ABRÉVIATIONS
AA
Apostolicam actuositatem : décret conciliaire sur l’apostolat des laïcs
ACGS
Actes du Chapitre général spécial des SDB (1971 – 1972)
ACG21
Actes du 21e Chapitre général des SDB (1977 – 1978)
ACG22
Actes du 22e Chapitre général des SDB (1984)
ACS
Actes du Conseil supérieur des SDB
AG
Ad gentes : décret conciliaire sur l’activité missionnaire de l’Eglise
CC.SS
Coopérateurs salésiens
CD
Christus Dominus : décret conciliaire sur la charge pastorale des évêques
CfL
Christifideles laici : exhortatation apostolique postsynodale de Jean-Paul II (1988)
sur la vocation et la mission des laïcs dans l’Eglise et dans le monde
CIC
Codex Iuris Canonici : Code de droit canonique (1983)
Conv
Convention entre SDB et FMA pour l’animation des CC.SS.
CP
Communio et progressio : instruction pastorale de Paul VI sur les moyens de
communication sociale (1971)
CT
Catechesi tradendae : exhortation apostolique de Jean-Paul II sur la catéchèse
(1979)
Const FMA
Constitutions des FMA
Const SDB
Constitutions des SDB
Const VDB
Constitutions des VDB
DH
Dignitatis humanae : déclaration conciliaire sur la liberté religieuse
DP
Documents de Puebla (1979)
DV
Dei Verbum : constitution conciliaire sur la révélation divine
EE.AA.
Anciens élèves salésiens
EN
Evangelii nuntiandi : exhortation apostolique de Paul VI sur l’évangélisation dans
le monde contemporain (1976)
Ep
Epistolario (recueil de lettres) de Don Bosco préparé par le Père Eugenio Ceria
ET
Evangelica testificatio : exhortation apostolique de Paul VI sur le renouveau adapté
de la vie religieuse (1971)
FC
Familiaris consortio : exhortation apostolique de Jean-Paul II sur les tâches de la
famille chrétienne (1981)
FMA
Fille(s) de Marie Auxiliatrice
GE
Gravissimun educationis : déclaration conciliaire sur l’éducation chrétienne
GS
Gaudium et spes : constitution conciliaire sur l’Eglise dans le monde contemporain
IM
Inter mirifica : décret conciliaire sur les moyens de communication sociale
LE
Laborem exercens : encyclique de Jean-Paul II sur le travail humain (1981)
LG
Lumen gentium : constitution conciliaire sur l’Eglise
MB
Memorie Biografiche (Souvenirs de la vie) de Don Bosco
MR
Mutuae relationes : directives de la Congrégation des religieux et de la
Congrégation des évêques sur les rapports entre les évêques et les religieux dans l’Eglise (1978)
NÆ
Nostra ætate : déclaration conciliaire sur les relations de l’Eglise avec les religions
non chrétiennes
NR
Nouveau Règlement des Coopérateurs (1974)
OT
Optatam totius : décret conciliaire sur la formation des prêtres
PC
Perfectae caritatis : décret conciliaire sur la rénovation et l’adaptation de la vie
religieuse
PO
Presbyterorun ordinis : décret conciliaire sur le ministère et la vie des prêtres
RDB
Règlement des Coopérateurs rédigé par Don Bosco (1876)
Règl FMA
Règlements généraux des FMA
Règl SDB
Règlements généraux des SDB
RH
Redemptor hominis : encyclique de Jean-Paul II au début de son ministère
pontifical (1979)
RM
Recteur majeur des SDB
RVA
Règlement de vie apostolique des Coopérateurs salésiens
SC
Sacrosanctum Concilium : constitution conciliaire sur la liturgie
SD
Salvifici doloris : lettre apostolique de Jean-Paul II sur le sens chrétien de la
souffrance humaine (1984)
UR
Unitatis redintegratio : décret conciliaire sur l’œcuménisme
VDB
Volontaires de Don Bosco
Présentation
Voici le premier commentaire officiel du Règlement de vie apostolique, et je vous le présente au
nom du dicastère pour la Famille salésienne et de l’Association Coopérateurs salésiens. C’est un
travail modeste et simple, mais qualifié et abondant, destiné à nourrir la réflexion et la formation de
chaque membre.
Le moment paraît favorable : notre Association a fait une première lecture approfondie du
Règlement, et plusieurs experts et collaborateurs ont tiré parti des réflexions du congrès mondial de
1986 ainsi que des réactions suscitées par ce document statutaire. Aussi, ce document trouvera-t-il
un terrain déjà enrichi par l’étude et la mise en pratique du Règlement dans une première phase
d’assimilation.
Ce commentaire est une lecture rationnelle, mise à jour et stimulante, pour répondre au besoin de
chaque Coopérateur d’approfondir et de guider sa vocation de « salésien dans le monde ». Il aide à
méditer et donne une place aux divers domaines, aux dynamismes charismatiques et à tout ce qui,
en particulier depuis l’exhortation apostolique Christifideles laici, peut donner aujourd’hui de la
qualité et de la valeur à la vocation particulière, à la fois séculière et salésienne, du Coopérateur.
Ce commentaire a pour but d’offrir une nourriture spirituelle et apostolique au projet de vie,
d’encourager les activités de service et les relations fraternelles, et de renforcer l’organisation de
l’Association dans tout le monde salésien.
Notre mouvement fondé par Don Bosco est en majorité laïque. Si nous voulons qu’il ait un impact
décisif d’inspiration évangélique sur la société, il doit disposer de moyens et de personnes sérieuses
et responsables. Alors, il pourra imprimer une relance forte et authentique, et mobiliser de nouvelles
forces laïques pour promouvoir le bien, la solidarité et la sainteté chrétienne.
Nous pouvons donc espérer que la pensée de Don Bosco et du bienheureux Père Rinaldi sera
assimilée et diffusée pour le bien de tous. Que l’année de la béatification du Père Philippe Rinaldi,
reconnu comme celui qui a organisé, guidé et poussé en avant la Famille salésienne, soit pour les
Coopérateurs une occasion favorable de se rappeler la fondation de leur mouvement, d’élargir leur
champ d’apostolat et de mettre leurs énergies de prophètes au service des jeunes et des milieux
populaires.
Je remercie tous ceux qui ont travaillé à ce commentaire [1] et je souhaite que leur effort trouve sa
récompense dans la réponse de tous les laïcs dont le témoignage, le travail et la vie s’inspirent de
Don Bosco.
Je vous souhaite tout le bien possible.
Rome, 24 Février 1990
Père Sergio Cuevas León
Conseiller général
pour la Famille salésienne
[1] Ont collaboré à l’élaboration de ce commentaire les Pères Joseph Aubry, Mario Midali, Mario
Cogliandro, José Colomer, Piergiorgio Marcuzzi, José Reinoso, Sergio Cuveras, ainsi que monsieur
Paolo Santoni et un groupe de Coopérateurs. Cette édition à été revue par le Révérend Père Egidio
Viganò, Recteur majeur. La rédaction finale est l’œuvre du Père Mario Midali.
IntroDuction
POUR LIRE LE RVA AVEC PROFIT
Comment lire et interpréter le règlement de vie apostolique
En promulguant le règlement de vie apostolique, écrit le Père Egidio Viganò dans sa lettre de
présentation, « le Recteur Majeur, en tant que Supérieur de l’Association, le définit comme
authentique carte d’identité du Coopérateur salésien aujourd’hui et pour l’avenir ; il en assure la
pleine fidélité à Don Bosco et, en même temps, la fidélité aux principes prophétiques du concile,
comme réponse ecclésiale aux interpellations des temps nouveaux » [1].
Il s’agit d’un texte important. Il ne pourra se traduire sans déformation et avec générosité dans la vie
du Coopérateur et de l’Association que moyennant une lecture et une interprétation correctes.
Pour faciliter cette lecture et cette interprétation, il est bon d’indiquer sommairement dès le début
les critères qui ont orienté la composition de ce règlement et les fils conducteurs qui traversent tout
le Règlement, ses chapitres et ses articles [2]. Certains critères concernent plutôt la rédaction et la
forme, et d’autres le contenu.
Critères qui ont inspiré la rédaction et la forme
2.1. Continuité par rapport au Nouveau Règlement (1974)
Un premier critère général de rédaction concerne la fidélité au Nouveau Règlement approuvé par le
Recteur majeur en 1974, et introduit deux ans après à la suite du 1er congrès mondial des
Coopérateurs. Ce document a marqué une étape importante dans la réflexion et la vie de
l’Association, car il s’est efforcé d’en redéfinir le profil pour répondre aux directives du Concile et
du Chapitre général spécial des salésiens, aux attentes et aux requêtes des Coopérateurs et aux
besoins nouveaux de l’époque ;
Les rédacteurs du document définitif actuel ont pris comme base le texte du Nouveau Règlement et
en ont confirmé les options fondamentales concernant le profil du Coopérateur : sa vocation
spécifique dans l’Eglise, son apostolat séculier et salésien, sa vie fraternelle et sa collaboration
coresponsable dans le contexte de l’Eglise locale et de la Famille salésienne, l’esprit salésien, la
formation et la fidélité, ainsi que le type d’organisation et l’autonomie de l’Association [3].
Il y a donc continuité entre le Règlement de vie apostolique actuel et le Nouveau Règlement de
1974 ; non pas de la stagnation, mais un coup de fouet revitalisant.
2.2. Discernement critique des propositions de révision
Un deuxième critère pour la rédaction a été d’améliorer ce Nouveau Règlement en accueillant le
plus possible les propositions des congrès provinciaux et nationaux, et surtout du 2e congrès
mondial de 1985. Un grand nombre de Coopérateurs, de salésiens et de Filles de Marie Auxiliatrice,
et finalement le Recteur majeur lui-même avec son Conseil, ont travaillé avec une ferveur toute
salésienne et un grand sens de leur responsabilité, à la révision définitive du texte.
Ce long travail de révision, fruit d’une dizaine d’années d’expérimentation du Nouveau Règlement,
a exigé d’opérer avec sérénité et attention un discernement critique des propositions avancées et de
leurs motifs ; cela, pour garantir la mise en pratique fidèle et intelligente des directives de l’Eglise
(Vatican II et Code rénové) à propos de la fidélité rajeunie de l’inspiration évangélique de tout
projet de vie chrétienne, la fidélité dynamique au Fondateur et à sa Famille spirituelle dont fait
partie l’Association Coopérateurs salésiens, ainsi que la réponse adaptée aux exigences du monde
des jeunes et du peuple dans les divers contextes où travaillent les Coopérateurs.
2.3. Respect de la nature complexe du Règlement
Un troisième critère a été d’accorder une attention particulière à la nature complexe du
Règlement de l’Association Coopérateurs salésiens. C’est qu’il doit tenir compte de diverses
exigences :
– Il est à la fois un « projet de vie » pour les personnes et un « statut » pour l’Association. Il
veille donc à unir de façon harmonieuse la vision théologique, apostolique et spirituelle aux aspects
juridiques et d’organisation ; il cherche en outre à équilibrer les indications de valeurs et le caractère
impératif des normes de l’Association, en respectant la primauté des valeurs par rapport à
l’organisation.
– Il est une présentation le plus possible complète, synthétique et rapide des valeurs idéales et
des normes pratiques ; il n’expose donc que l’essentiel, avec sobriété et sans commentaire.
–
Il a une valeur universelle puisqu’il est destiné à tous ; il recourt donc à des concepts et à un
langage qui correspond le plus possible aux diverses cultures et langues, et propose surtout des
objectifs réalisables partout, sans imposer à tous ce qui ne peut bien se réaliser qu’en certains lieux.
–
Enfin il assume une allure pédagogique : il se veut facile à lire, attrayant et stimulant, de façon
à être un bon outil de formation initiale et permanente pour les membres de l’Association [4].
Critères doctrinaux et d’expérience
Les critères doctrinaux sont les conceptions fondamentales rattachées historiquement à quelques
documents ecclésiaux et salésiens importants , les critères d’expérience se réfèrent à l’expérience
vécue par les Coopérateurs.
fidélité aux orientations de l’Eglise
Elles concernent en particulier :
–
La conception du mystère de l’Eglise, communion organique de fidèles envoyée au service
de l’humanité, et la compréhension de l’Eglise universelle comme communion des Eglises locales.
–
La vision du laïcat dans l’Eglise, de sa mission spécifique dans la société, la condition
chrétienne séculière et la spiritualité particulière qui s’y rattache.
–
La conception du ministère ordonné dans le contexte de la responsabilité du peuple de Dieu
à accomplir la mission commune de salut.
–
La vision des associations catholiques unies à un Institut religieux, telles que l’Association
Coopérateurs [5].
La révision du Nouveau Règlement s’est également faite en tenant compte des options juridiques
faites par le nouveau Code de droit canonique (1983), en particulier à propos des laïcs et des
associations de fidèles [6].
3.2. Fidélité aux directives de la Congrégation salésienne
Au cours de ses quatre Chapitres généraux de ces vingt dernières années, et en particulier du
Chapitre général spécial de 1971-72, la Congrégation salésienne a redéfini son identité dans l’Eglise
et dans la société. Pour ce travail, elle a réfléchi avec les groupes qui constituent avec elle la Famille
salésienne et sont coresponsables du projet apostolique de Don Bosco [7].
Elle s’est aussi prononcée officiellement à plusieurs reprises sur le profil des Coopérateurs et la
place de leur Association dans la Famille salésienne et dans l’Eglise [8]. L’élaboration d’un
Nouveau Règlement des Coopérateurs a justement été décidée par le Chapitre général spécial des
salésiens pour répondre à des requêtes précises des Coopérateurs [9].
La rédaction du Nouveau Règlement et sa révision a donc accueilli et suivi les orientations
fondamentales du magistère salésien officiel, portant surtout sur la fidélité à Don Bosco relu et mis
à jour à la lumière de la doctrine de Vatican II sur l’Eglise et de la conscience rénovée des
Coopérateurs [10].
3.3.Fidélité à l’expérience des Coopérateurs
Dans la période qui a suivi le Concile, l’Association Coopérateurs a réalisé un important effort pour
se rénover et s’engager avec décision sur la voie de l’œcuménisme.
La nécessité d’adapter le Règlement de Don Bosco aux orientations du Concile était
particulièrement ressentie par les Coopérateurs eux-mêmes, et ils la demandèrent aux salésiens. Le
Nouveau Règlement a pris en compte l’expérience d’un grand nombre de Coopérateurs et de
Coopératrices de toutes les parties du monde [11].
Un critère constant a donc été d’accueillir les lumières de cette expérience, en particulier durant la
période d’expérimentation qui s’étend de 1974 à 1985 [12].
3.4. Fidélité dynamique à Don Bosco fondateur
Dans le délicat travail de l’élaboration, de la révision et de la mise à jour d’un Nouveau Règlement,
en vue de son approbation définitive par le Saint-Siège, la préoccupation fut profondément ressentie
parfois jusqu’à l’angoisse, d’être fidèles à Don Bosco, à son projet concernant les Coopérateur et à
son Règlement de 1876. Il ne fallait certes pas le recopier dans sa matérialité, mais le relire et le
mettre à jour pour qu’il réponde aux nouvelles situations de l’Eglise, de la société et de la jeunesse.
Cet effort de fidélité a été scellé par l’approbation définitive du Règlement de vie apostolique de la
part du Saint-Siège et par sa promulgation de la part du septième successeur de Don Bosco [13].
4. Les fils conducteurs du R.V.A.
Le profil du Coopérateur et de son Association dépend des composantes qui rentrent dans sa
définition et qui le constituent. Elles sont trois et parcourent tout le R.V.A.
4.1. La composante chrétienne et ecclésiale
Le Coopérateur salésien est avant tout un baptisé, membre à part entière du Peuple de Dieu et de
l’Eglise visible, universelle et locale. L’Association à laquelle il appartient est une Association de
l’Eglise.
Le Coopérateur « se sent membre vivant de l’Eglise, Corps du Christ, centre de communion de
toutes les forces qui travaillent au salut du monde » (art. 27, § 2). « Pour alimenter sa vie de prière,
le Coopérateur a recours aux sources spirituelles que lui offre l’Eglise […]. Il prend une part active
à la liturgie ; il valorise aussi les formes de piété populaire qui peuvent enrichir sa vie spirituelle.
[…] . Il s’approche souvent et avec foi des Sacrements », en particulier de l’Eucharistie et de la
Réconciliation (art. 33, §§ 1 et 3).
« Dans l’Eglise, l’Association Coopérateurs salésiens est approuvée par le Siège Apostolique
comme Association publique de fidèles […] et jouit d’une personnalité juridique publique » (art. 6,
§§ 1 et 2). « L’activité apostolique des Coopérateurs a une dimension ecclésiale. […] Ils
encouragent l’amour et la fidélité au Pape et aux évêques ; ils favorisent l’adhésion à leur magistère
et à leurs directives pastorales » […] en solidarité avec les Eglises particulières » (art. 33, §§ 1 et 2,
avec le titre).
4.2 La composante séculière
Le Coopérateur est un catholique appelé à vivre sa vocation chrétienne au milieu du monde, dans
les conditions ordinaires de la vie familiale et sociale (aspects théologique et sociologique de la
condition séculière) et à y accomplir diverses tâches : l’animation chrétienne, dans l’esprit salésien,
des réalités temporelles comme la famille, le monde du travail, les relations sociales, la culture, la
politique etc. (aspect théologal ou chrétien de la condition séculière). La préoccupation constante et
première de ceux qui ont rédigé et revu le Règlement a été de définir avec précision la condition et
surtout la mission dans le monde du Coopérateur et de son Association. C’est pourquoi le R.V.A.
dit :
« Le Coopérateur est un catholique qui vit sa foi […] à l’intérieur même de sa condition séculière »
(art. 3). « Le Coopérateur exerce son apostolat en premier lieu dans ses tâches quotidiennes. Il veut
suivre le Christ Jésus, Homme parfait, envoyé par le Père pour servir les hommes dans le monde.
En conséquence il s’efforce de réaliser, dans les conditions ordinaires de la vie, l’idéal évangélique
de l’amour de Dieu et du prochain » (art. 7) Il exerce en effet un apostolat « dans le monde »
(art. 7), « en famille » (art. 8), « dans le mariage » ou « durant les fiançailles » (art. 9), « dans son
milieu de vie et de travail » (art. 10), « dans la réalité sociale » (art. 11) et culturelle (cf. art. 12),
dans les structures « civiles, culturelles, socio-économiques et politiques » (art. 17). « Le
Coopérateur se sent “intimement solidaire” du monde où il vit et où il est appelé à être lumière et
levain. […] Il développe ses qualités humaines pour pouvoir assumer toujours mieux ses
responsabilités familiales, professionnelles et civiles » (art. 37, § 2). « Tout chrétien, quelle que soit
sa condition culturelle ou sociale, peut s’engager sur le chemin » de la vocation salésienne de
Coopérateur (art. 2, § 3). « Le Coopérateur […] s’inspire […] du projet apostolique de Don Bosco
[…] et participe à sa réalisation d’une manière adaptée à sa condition et à ses possibilités réelles »
(art. 3). « Chaque Coopérateur se sent responsable de la mission commune et il l’accomplit à la
mesure de ses capacités et possibilités. […] Dans la diversité des situations et des tâches, chacun
apporte à l’Association une contribution personnelle de valeur : les Coopérateurs adultes et âgés
[…], les jeunes Coopérateurs […], les Coopérateurs plongés dans l’épreuve […], les Coopérateurs
prêtres et diacres […] » (art. 20, §§ 1 et 3). « La formation du Coopérateur se poursuit encore […]
au cours de) l’évolution des situations personnelles et les changements de milieu » (art. 37).
« L’Association […] est dotée d’une organisation souple, pouvant s’adapter aux diverses situations
culturelles et ecclésiales » (art. 41, § 1). Les options de privilégier l’organisation à rayon local et
provincial (cf. 41 et 42), de la doter d’une certaine autonomie et d’une direction de type collégial
(cf. art. 43-45) ont voulu conférer à l’Association un visage laïque de coresponsabilité dans la
communion.
4.3. La composante salésienne
Le Coopérateur est un catholique appelé par l’Esprit Saint à vivre la vocation chrétienne commune
et à exercer sa mission dans le monde, non pas n’importe comment, mais en participant à la mission
de Don Bosco, en vivant son esprit comme membre d’une Association salésienne appartenant à la
Famille apostolique plus large qu’il a fondée.
Cette composante ne constitue pas un simple ornement accessoire, mais elle inclut les valeurs des
deux autres composantes pour leur conférer la caractéristique de Don Bosco. Elle unifie la
conscience et toute la vie du Coopérateur ; c’est elle qui caractérise l’Association dans l’Eglise et
dans la société. Le Règlement l’exprime en particulier dans les affirmations suivantes.
Les Coopérateurs sont des baptisés qui « sous l’impulsion de l’Esprit Saint, se sentent attirés par la
figure de Don Bosco et par la perspective de “travailler avec lui” en restant dans le monde (art. 2, §
1). Le Coopérateur est un « vrai salésien dans le monde », un catholique qui vit sa foi en s’inspirant,
à l’intérieur même de sa condition séculière, du projet apostolique de Don Bosco » (art. 3). « Le
Coopérateur laïc réalise son engagement et vit l’esprit salésien dans les situations ordinaires de vie
et de travail […] Le Coopérateur prêtre ou diacre séculier accomplit son ministère en s’inspirant de
Don Bosco » (art. 4, §§ 2 et 3). « Le Coopérateur exerce son apostolat […] dans le monde […]
animé par l’esprit salésien, accordant en toute occasion une attention privilégiée aux jeunes en
difficulté » (art. 7 et 8-12). Les jeunes sont les destinataires privilégiés de son apostolat séculier
salésien (cf. art. 13) ; dans son projet, Don Bosco l’a voulu pour leur donner une éducation
chrétienne selon la méthode de la bonté en exerçant des activités typiques et en travaillant dans
diverses structures civiles, ecclésiales et salésiennes (cf. art. 14-17). Les Coopérateurs et les
Coopératrices sont « frères et sœurs en Don Bosco » (art. 22), et ont des liens particuliers avec le
Recteur majeur, la société de saint François de Sales et les autres groupes de la Famille salésienne
(cf. . art. 23-25).» Le Coopérateur participe à l’expérience spirituelle de Don Bosco », c’est-à-dire à
son esprit (art. 27 et chap. IV) et a le souci d’acquérir une solide formation salésienne (chap. V).
« L’Association Coopérateurs est l’un des Goupes de la Famille salésienne. Avec [eux], elle assume
la vocation salésienne commune, et elle est coresponsable de la vitalité du projet de Don Bosco
dans le monde » (art. 5). Elle « participe au patrimoine spirituel de la société de saint François de
Sales » (art. 6)
5. Originalité de l’Association Coopérateurs
Ce qui vient d’être dit montre clairement l’originalité ecclésiale, séculière et salésienne des
Coopérateurs et de leur Association.
Le message du Règlement conduit à situer les Coopérateurs dans l’Eglise contemporaine comme
Association de laïcs et de prêtres ou de diacres « séculiers » ayant la qualification ecclésiale
originale de salésiens.
Ils ont une mission spécifique, une organisation et un esprit particuliers. En vertu de la mission et de
l’esprit salésien qu’ils vivent dans leur réalité séculière, ils ont un lien spécial avec la Congrégation
salésienne et avec les autres groupes de la famille de Don Bosco. En vertu de cette mission et de
l’esprit qui s’y rattache, ils prennent place dans les Eglises locales, non pas d’une manière
quelconque, mais en tant qu’Association publique de fidèles consacrés en particulier à la pastorale
des jeunes et du peuple, selon le projet apostolique de leur Fondateur. Si bien que lorsqu’il définit
l’originalité charismatique des Coopérateurs qui résulte d’un don de l’Esprit Saint, le Règlement
précise aussi leur profil canonique et leur droit propre.
Telle est donc, en quelques mots, la structure du Règlement de vie apostolique à connaître pour le
lire et l’interpréter correctement et selon les intentions profondes de sa rédaction, de sa révision et
de son approbation officielle.
6. Précisions de caractère général
Pour compléter ces observations, il sera utile de rappeler ici certaines options prises après un débat
qui s’est poursuivi durant toute l’élaboration et la révision du Règlement [14].
6.1. Le titre « Règlement de vie apostolique »
Don Bosco appela « Règlement » les déclarations et les normes qu’il rédigea pour les Coopérateurs
salésiens [15].
Parmi les titres proposés durant le travail de révision au cours des années 1972-1974, le Recteur
majeur choisit celui de « Nouveau Règlement » pour les motifs suivants :
1) Par fidélité à Don Bosco qui avait donné ce nom à la charte constitutionnelle des
Coopérateurs ;
2) Parce que beaucoup de réponses à la consultation internationale préféraient maintenir ce titre ;
3) Parce que l’appellation « nouveau Règlement » était celle de la délibération du Chapitre
général spécial des salésiens en 1972 [16].
Le deuxième congrès mondial de 1985 choisit un titre complexe : « Règlement des Coopérateurs
salésiens, Règle de vie du Coopérateur et Statuts de l’Association ». Ces deux titres de « Règle de
vie » et de « Statuts » désignaient parfaitement les valeurs idéales qui inspirent les Coopérateurs,
ainsi que les orientations pratiques et les normes qui règlent l’Association [17].
Le Recteur majeur a préféré le titre actuel et c’est un choix heureux qui exprime mieux l’orientation
principale de l’Association. les termes « Règle » ou « Règle de vie »ont été rejetés parce qu’ils ont
trop d’affinité avec les « règles » des ordres religieux pour bien s’appliquer à une association
séculière. « Règlement » a été maintenu parce qu’il est le titre officiel donné par Don Bosco. Mais
on y a ajouté « de vie apostolique ». pour en expliciter le caractère et le contenu.
C’est un Règlement de vie de caractère global : il décrit le programme ou, mieux, « le Projet de vie
du Coopérateur », dira le préambule (§ 3), « une manière spécifique vivre l’Evangile et de participer
à la mission de l’Eglise » (art. 2, § 2), que le Coopérateur choisit « en s’inspirant […] du projet
apostolique de Don Bosco » (art. 3) ;
C’est un Règlement de vie apostolique : cet adjectif a aussi une valeur globale : il fait comprendre
immédiatement en quoi consiste cette « manière spécifique » « de vivre la foi de [son] Baptême et
l’engagement de [sa] confirmation » (art. 2, §§ 2 et 1). Don Bosco avait expliqué : « Cette
Association est considérée comme un tiers ordre des anciens, avec la différence qu’ils proposaient
la perfection chrétienne dans l’exercice de la piété alors qu’elle a pour fin principale la vie active
dans l’exercice de la charité envers la prochain et spécialement envers la jeunesse en péril » [18].
Etant « apôtre » en vertu de sa vocation chrétienne et salésienne, le Coopérateur a donc en mains un
« Règlement vie apostolique » salésienne. Il incombe à sa responsabilité de faire passer ce projet de
vie apostolique du papier à la vie, de l’écrit au vécu !
6.2. L’appellation « Coopérateurs salésiens »
L’appellation d’une Association est une élément important de son identité, surtout si elle vient de
son fondateur.
Dans son Règlement de 1876, c’est bien connu, Don Bosco utilise l’appellation de « Coopérateurs
salésiens », et elle sera maintenue par toute la tradition qui suivra.
Durant l’élaboration du Nouveau Règlement (1972-1974), furent proposées et passées au crible
plusieurs dénominations :
« Salésiens Coopérateurs » souhaitée par les Coopérateurs et accueillie par le Chapitre
général spécial ;
« Coopérateur salésiens » soutenue par un grand nombre ;
« Coopérateurs salésiens de Don Bosco » ou, plus simplement, « Coopérateur de Don
Bosco », suggérée pour indiquer expressément leur Fondateur.
La dénomination « salésiens Coopérateurs » suscite des difficultés et des confusions dans les
milieux ecclésiastiques et civils, pour lesquels les « Salésiens » sont les religieux et personne
d’autre [19].
Dans la révision définitive du Nouveau Règlement, on s’en est tenu à ce choix pour rester fidèles à
Don Bosco et à toute la tradition. Car le Fondateur des Coopérateurs est Don Bosco. Cela ne met
pas en doute l’affirmation du Chapitre général spécial que « le Coopérateur est un véritable salésien
dans le monde » (nos 730 et 739). Le Règlement le réaffirme à plusieurs reprises sans équivoque
possible [20].
6.3. Le nom officiel : « Association Coopérateurs salésiens »
Dans l’histoire centenaire des Coopérateurs, ce sont les termes « Association » et « Union » qui ont
servi à les désigner comme groupe ou communion. Au cours du travail de révision du Nouveau
Règlement, il y a eu un débat à ce sujet. Le texte rénové a adopté le terme « Association » [21] et ce
choix s’est maintenu dans le texte définitif.
En effet, le titre général et l’article 6 précisent que le nom officiel du groupe des Coopérateurs est
« Association [sans des] Coopérateurs salésiens ». On a préféré le terme « Association » à
« Union » pour diverses raison :
– C’est le terme le plus employé par Don Bosco dans son Règlement ;
– Il est plus conforme à la terminologie de Vatican II sur l’apostolat des laïcs et à celle du nouveau
Code de droit canonique qui parle toujours d’« Association de fidèles » (publiques ou privées) [22].
6.4. La forme linguistique : non plus « nous », mais « le coopérateur », « les coopérateurs »
Dans son Règlement, Don Bosco emploie parfois le terme « Coopérateur » au singulier,
généralement à propos de tâches ou de possibilités individuelles, et plus souvent celui de
« Coopérateurs » au pluriel pour en décrire globalement la mission, les activités, les relations entre
eux et avec les salésiens, les tâches et les avantages spirituels.
La rédaction définitive du Nouveau Règlement adopta un critère souple pour respecter des
propositions apparues dans le long débat : lorsqu’il s’agissait d’un donné historique ou d’un idéal à
atteindre, elle a préféré employer la troisième personne du pluriel : « ils »ou « les Coopérateurs » ;
pour une tâche commune ou individuelle, elle a usé du « nous » plus évocateur, plus familier et plus
mobilisateur ; et lorsque le sujet concernait directement l’individu, elle a utilisé le singulier : « le
Coopérateur » [23].
Le congrès mondial de 1985 s’en était tenu essentiellement aux options du Nouveau Règlement et
s’était montré particulièrement sensible à l’emploi du « nous » pour un bon nombre d’articles [24].
Dans la dernière phase de la révision, on a pris la décision de ne pas user du « nous » parce qu’il
convient mieux à des religieux qui vivent en communauté qu’à des séculiers qui ne vivent ensemble
que quelques moments de communion fraternelle et d’apostolat en association. On décida aussi de
n’utiliser la troisième personne, du singulier ou du pluriel, que lorsqu’il s’agissait de valeurs,
d’engagements, d’activités ou d’activités respectivement individuelles ou collectives. Si bien que le
style du Règlement est rendu plus homogène et correspond mieux à la qualité séculière des
Coopérateurs.
6.5. L’indicatif pour les valeurs et l’impératif pour les tâches et les normes
Une dernière remarque générale. On sait que dans bien des langues, l’indicatif (et surtout le futur) a
aussi la valeur d’un impératif et souligne souvent l’engagement en vue d’un idéal à atteindre . C’est
ce qui avait poussé, dans certaines phases de la rédaction du Nouveau Règlement, n’utiliser que
l’indicatif.
Mais on fit remarquer de plusieurs côtés que cette manière de parler risquait de présenter comme
« déjà fait » ce qui « devait » se faire, et de tracer un profil parfois trop idéalisé du Coopérateur.
Pour remédier à cette impression, le texte du Nouveau Règlement a parfois glissé un impératif
(subjonctif) et des verbes tels que « devoir », « falloir », sans cependant tomber dans l’excès opposé
du ton moralisateur et exhortatif [25].
La révision définitive a repris la décision à présent pacifique, d’utiliser l’indicatif, rarement au
futur, sachant que sa valeur exhortative ou impérative se percevait clairement.
7. Structure globale du Règlement
La structure du Règlement est simple et sa division en chapitres bien claire. Elle reflète sa
cohérence logique ainsi que ses options précises d’ordre théologique, en particulier les composantes
essentielles de l’identité des Coopérateurs et de leur Association. À part le préambule et la
conclusion, le Règlement comporte six chapitres.
Le chapitre I s’intitule « Les Coopérateurs salésiens dans l’Eglise » et donne une définition générale
et globale de l’identité originale des Coopérateurs et de leur Association. Il décrit à larges traits
d’où vient le Coopérateur, qui il est, ce qu’il fait et comment, sa place et son rôle (à lui et de
l’Association) dans la Famille salésienne et dans l’Eglise. Il est donc fondamental et basilaire.
Les chapitres suivants présentent un à un les aspects de la vocation du Coopérateur présentés
globalement dans le chapitre d’introduction.
« Le Coopérateur, dit l’article 3 consacré à la description du profil du Coopérateur, est un
catholique qui vit sa foi en s’inspirant, à l’intérieur même de sa condition séculière, du projet
apostolique de Don Bosco ». Le chapitre II a pour titre « Engagement apostolique » et décrit le
premier trait essentiel de ce profil : l’apostolat séculier complexe du Coopérateur et les dispositions
évangéliques et salésiennes qu’il requiert.
Le Coopérateur, poursuit cet article 3, « s’engage dans la même mission auprès de la jeunesse et du
peuple, sous une forme associée et fraternelle ; il vit en communion avec les autres membres de la
Famille salésienne ». Le chapitre III se relie étroitement au précédent et décrit comment et avec qui
travaille le Coopérateur, en d’autres termes la valeur de communion de son action. Il n’est jamais
isolé ; même lorsqu’il exerce un apostolat de type personnel, il agit « en communion et
collaboration » (c’est le titre du chapitre) et « participe à la vie de la Famille salésienne ».
Les dispositions et les manières de faire qui caractérisent le Coopérateur dans son apostolat en
communion et en collaboration est décrit au chapitre IV intitulé « L’esprit salésien ». A vrai dire,
les chapitres II et III en parlent déjà, car dans son apostolat séculier et ses relations de communion
et de collaboration, le Coopérateur est et doit être animé de l’esprit de Don Bosco. Mais on a voulu
réserver un chapitre exprès à la présentation plus large et systématique de cet esprit.
Ces réflexions montrent bien que les chapitres II, III et IV forment un tout et décrivent séparément,
mais en corrélation, les traits du visage du Coopérateur. Le Coopérateur, en effet, est un catholique
qui exerce un apostolat dans le monde (chap. II) en association (chap. III) selon l’esprit salésien
caractéristique (chap. IV).
Pour se vivre en fait, cette identité décrite officiellement par le Règlement a besoin d’une formation
et d’une organisation. C’est l’objet respectivement des chapitres V et VI. Ce sont aussi des traits de
la vocation du Coopérateur.
Le chapitre V s’intitule « Appartenance et formation » et décrit le cheminement que doit parcourir
chaque Coopérateur dans sa vocation pour approfondir et stabiliser son identité d’apôtre séculier
salésien. Ce cheminement prévoit trois étapes soutenues chacune par un travail de formation
correspondant :
1)
Un préparation préalable et suffisante ;
2)
L’entrée dans l’Association ;
3) La fidélité quotidienne et progressive à sa vocation et aux tâches qu’elle implique.
Le chapitre VI enfin, intitulé « organisation » décrit d’une manière simple et succincte les principes
constitutifs de l’organisation de l’Association. Ils font eux aussi partie du profil du Coopérateur
appelé à participer au projet apostolique de Don Bosco « en association » et en « communion », ce
qui exige pour l’Association une forme structurée et institutionnalisée. Celle-ci donne une
importance primordiale à l’organisation locale et provinciale et à la direction de type collégial.
Cette succession de chapitres ressemble beaucoup à celle des Constitutions des salésiens de Don
Bosco. Un même sensibilité salésienne a dicté les deux documents : en premier plan apparaissent
l’engagement et les activités apostoliques exercés dans un esprit fraternel ; mais elles sont animées
et soutenues par la mystique du « da mihi animas » (donne-moi les âmes), par le style typiquement
salésien, et par un effort authentique de prière et de formation.
Cette disposition résulte aussi d’un souci pédagogique : amener les Coopérateurs à comprendre
progressivement leur identité chrétienne séculière et salésienne. Car le Règlement les rejoint dans
leur vie concrète : leur famille, leur travail, leur milieu social et culturel ; il leur indique les objectifs
d’une vie évangélique authentique selon la vocation salésienne décrite en un premier temps
globalement, puis dans ses composantes essentielles et inséparables.
8. Critères suivis dans la rédaction du commentaire
A la fin de cette introduction, il est bon d’indiquer les critères suivis dans la rédaction de ce
commentaire. La nature du Règlement diffère, en partie du moins, de celle de son commentaire. Le
premier est un texte bref qui fait un exposé synthétique des valeurs et des normes de l’Association ;
le second est un texte plus ample qui explique en détail son contenu. Le premier se veut simple et
linéaire ; le second répond aux impératifs d’une haute divulgation doctrinale. Le premier s’adresse à
tous les membres de l’Association ; le second est destiné surtout aux dirigeants, aux formateurs et à
des Coopérateurs qualifiés.
Si les critères rédactionnels sont en partie différents, les critères de contenu (doctrine et expérience)
sont les mêmes. C’est forcé puisque le commentaire doit présenter avec fidélité le contenu du
Règlement. Concrètement,
– Le Règlement propose un projet de vie évangélique sous forme d’énoncés concis ; le commentaire
en fait une description plus étendue, avec des références précises au message de la Bible et aux
valeurs évangéliques qui ne sont que mentionnées dans le texte du Règlement ;
– Le Règlement adopte, par des affirmations essentielles et des renvois, l’ecclésiologie rénovée de
Vatican II ainsi que l’enseignement qui a suivi de la part des évêques (Synodes) et du Pape
(encycliques et lettres apostoliques) à propos, par exemple, de l’engagement pour la justice,
l’évangélisation, la catéchèse, la réconciliation, la famille, le travail, la souffrance ; il assume en
outre les normes du nouveau Code de droit canonique. Le commentaire résume ce magistère en
citant souvent de larges passages des documents magistraux sur chacun de ces sujets, et reprend ou
cite et explique les normes du Code qui nous concernent.
– Le Règlement reprend, en de brèves formules et des déclarations synthétiques, le magistère
salésien récent contenu dans les Actes des Chapitres généraux des salésiens et dans des documents
officiels du Recteur majeur sur Don Bosco Fondateur, son projet apostolique, son esprit et sa
Famille spirituelle. Sur chacun de ces sujets, le commentaire présente ce magistère d’une manière
assez étendue et en transcrit souvent de larges extraits.
– Le Règlement se réfère sans cesse, par de brèves allusions, à l’expérience vécue des Coopérateurs
et à leurs situations concrètes. Le commentaire la souligne par des informations plus abondantes
tirées du matériel très riche qui a servi à l’élaboration et à la révision du texte du Règlement.
–
Le Règlement se réclame de Don Bosco et de son Règlement par de courtes citations ou de
simples allusions ; le commentaire leur réserve plus de place avec des informations historiques, des
citations littérales, des explications doctrinales et des évaluations. Tout cela pour rendre plus
évidente la fidélité dynamique du Règlement à la pensée et aux orientations du Fondateur de
l’Association Coopérateurs salésiens .
[1] RVA Présentation, 6.
[2] Cf. Midali Mario, Nella Chiesa e nella società con don Bosco oggi (Elle Di Ci, Turin 1974) 1432 ; Atti e Documenti del 2° Congresso mondiale Cooperatori Salesiani (Rome 1985), 47s.
[3] Cf. Atti e Documenti del 2° Congresso mondiale Cooperatori Salesiani, 47.
[4] Cf. ib. 47s.
[5] On a tenu compte en particulier des quatre constitutions conciliaires, des décrets sur l’apostolat
des laïcs, le ministère des prêtres, l’œcuménisme, l’action missionnaire, la rénovation de la vie
religieuse, et de la déclaration sur l’éducation chrétienne.
[6] On a tenu particulièrement compte des canons 207, 224-231, 298-321.
[7] Cf. ACGS, 151-177 ; Const. SDB 1972 et 1984, art. 5 ; Règl. SDB 1972, art. 30 ; Règl. SDB
1984, art. 36, 38 et 148 ; Viganò Egidio, La Famille salésienne, in ACS n° 304 (avril juin 1982), p.
3-54).
[8] Voir les références de la note précédente et, en outre, ACGS, 727-745.
[9] Cf. ACGS 736.
[10] Voir les références des notes 8 et 9.
[11] Cf. Midali Mario, Cooperatori Salesiani. Nuovo Regolamento. Histoire et documentation
(Rome, Direction générale des œuvres de Don Bosco, 1974).
[12] Cf. Atti e Documenti del 2° Congresso mondiale Cooperatori Salesiani, 44-47.
[13] Voir la déclaration rapportée au début de cette introduction.
[14] Cf. Midali Mario, Nella Chiesa e nella società con don Bosco oggi, 25-32 pour ce qui concerne
le NR.
[15] Cf. RDB, VI et Avis final.
[16] Cf. Midali Mario, Nella Chiesa e nella società con don Bosco oggi, 26s.
[17] Cf. Atti e Documenti del 2° Congresso mondiale Cooperatori Salesiani, 48s, 62.
[18] RDB, II.
[19] Cf. Midali Mario, Nella Chiesa e nella società con don Bosco oggi, 28s.
[20] Cf. RVA, en particulier les articles 2, 3 et 5.
[21] Cf. Midali Mario, Nella Chiesa e nella società con don Bosco oggi, 29-31.
[22] Cf. CIC can. 298-329.
[23] Cf. Midali Mario, Nella Chiesa e nella società con don Bosco oggi, 31s.
[24] Cf. Atti e Documenti del 2° Congresso mondiale Cooperatori Salesiani 64s. (art. 5 et 6), 71
(art. 7), 73 (art. 12), 75-77 (art. 15-18), 82 (art. 21), 85s. (26-28), 97 (art. 34).
[25] Cf. Midali Mario, Nella Chiesa e nella società con don Bosco oggi, 32.
Préambule
« L’œuvre des Coopérateurs salésiens se répandra dans tous les pays, elle se diffusera dans toute la
chrétienté. La main de Dieu la soutient ! les Coopérateurs seront les promoteurs de l’esprit
catholique. Ce sera de ma part une utopie, mais je la maintiens ! » (Don Bosco, MB XVIII, 161).
§ 1. Les Coopérateurs salésiens se proposent de vivre l’Evangile à l’école de saint Jean Bosco. Il
ont pris naissance lorsque Don Bosco, dès le début de son œuvre, invita des laïcs, hommes et
femmes, et des membres du clergé diocésain à « coopérer » à sa mission de salut des jeunes, surtout
des jeunes pauvres et abandonnés 1.
§ 2. Dès 1850 Don Bosco songea à organiser les collaborateurs de son œuvre 2. En 1876 il définit
clairement leur programme de vie dans un règlement qu’il écrivit et fit approuver par l’Autorité
ecclésiastique 3. « Associés » 4 désormais à la Congrégation salésienne, les Coopérateurs ont
participé à son élan apostolique et se sont rapidement répandus dans le monde entier.
§ 3. Le texte actuel, renouvelé, décrit le Projet de vie du Coopérateur et le Statut de l’Association. Il
offre un authentique chemin de sanctification apostolique, conforme aux exigences de l’Eglise et
adapté au monde actuel.
1.
Cf. RDB, Au lecteur.
2. Cf. Pie IX, Rescrit du 28.9.1850 ; MB IV, 93-94 ; XI,85 ; Mgr Fransoni, Décret du31.3.1852,
MB IV, 378-379 ; XI, 85.
3.
Cf. Mgr Magnasco, Décret du 15.12.1877 et Rescrit du 22.12.1877, MB XIII, 604.
4. RDB, Au lecteur, et chap. IV.
Le Règlement de vie apostolique s’ouvre par une déclaration faite par Don Bosco, le 15 juillet 1886,
à un groupe d’anciens élèves, prêtres et laïcs, qui s’étaient réunis à Valdocco pour le rencontrer, le
sachant très malade. Déclaration d’autant plus intéressante qu’elle semble pratiquement la dernière
faite par notre Fondateur sur la mission des Coopérateurs dans l’Eglise et dans la société. C’est une
espèce de vision prophétique aux vastes horizons. Elle exprime sa certitude en l’action puissante de
Dieu dans l’avenir des Coopérateurs : « Ce n’est pas Don Bosco, mais la main de Dieu qui se sert
des Coopérateurs ! Ecoutez ! Vous avez dit que […] l’œuvre des Coopérateurs a l’estime d’un
grand nombre. et j’ajoute qu’elle se répandra dans tous les pays et se diffusera dans toute la
chrétienté. […] La main de Dieu la soutient ! Les Coopérateurs seront les promoteurs de l’esprit
catholique. Ce sera de ma part une utopie, mais je la maintiens ! […] Les Coopérateurs tiendront
bien haut le flambeau de leur foi agissante » [1]. Vision stimulante de l’avenir, inspirée par une foi
solide et chargée d’espérance certaine. Deux raisons valables pour la placer en exergue de la
description d’un « projet de vie apostolique », fondé sur la pleine confiance en la puissante présence
du Dieu de Jésus-Christ, déclarée par son fondateur sur terre et à présent certainement assurée de
sont intercession au ciel.
Les trois paragraphes du préambule rappellent brièvement :
1)
L’origine historique des Coopérateurs ;
2)
Leur première organisation, le visage et l’expansion qu’ils ont pris ensuite ;
3) La nature et la signification du règlement actuel.
Les deux premiers sujets sont repris dans le premier article qui traitent de Don Bosco Fondateur ; le
troisième revient dans l’article 50 qui présente le Règlement comme « un chemin qui conduit à la
sainteté ».
1.
Origine historique des Coopérateurs (§ 1)
La phrase qui ouvre le premier paragraphe contient une déclaration générale d’intentions ; elle
indique le projet global de vie que les Coopérateurs se proposent de mettre en pratique : « vivre
l’Evangile à l’école de saint Jean Bosco ». L’expression revient, avec quelques variantes
explicatives dans les premiers articles du Règlement consacrés à la description du profil du
Coopérateur. Travailler avec Don Bosco est un des « chemins qui s’offrent aux chrétiens pour vivre
la foi de leur baptême et l’engagement de leur confirmation » (art. 2, § 1). « S’engager comme
Coopérateur, c’est […] assumer une manière spécifique de vivre l’Evangile » (art. 2, § 2). « Le
Coopérateur est un catholique qui vit sa foi en s’inspirant […] du projet apostolique de Don
Bosco » (art. 3).
Devenir Coopérateur et vivre en Coopérateur, c’est suivre le Seigneur Jésus, être son disciple,
mettre l’Evangile en pratique dans sa propre vie. Mais on est conscient de ce que l’Esprit du
Ressuscité a suscité dans l’Eglise des hommes qui ont vécu d’une manière exemplaire et
significative son message de salut en rapport avec la situation de leur temps, et sont devenus en
quelque sorte eux-mêmes des « pages vivantes d’Evangile », un « Evangile vivant », des maîtres de
vie évangélique, dignes d’être suivis. C’est le cas de Don Bosco : on se met à son école, on en
réalise le projet apostolique pour devenir de meilleurs disciples du Seigneur Jésus et mieux vivre
aujourd’hui son Evangile.
La seconde phrase rappelle que les Coopérateurs « ont pris naissance lorsque Don Bosco, dès le
début de son œuvre, invita des laïcs, hommes et femmes, et des membres du clergé diocésain à
“coopérer” à sa mission de salut des jeunes, surtout des jeunes pauvres et abandonnés ». Elle se
réfère expressément à ce que Don Bosco écrit dans sa présentation de son Règlement des
Coopérateurs salésiens. « L’œuvre des oratoires, entreprise en 1841, trouva dès son début, de pieux
ecclésiastiques et des laïcs plein de zèle, qui lui vinrent en aide pour cultiver la moisson, dès lors
abondante, de jeunes gens exposés au danger de se perdre. Ces collaborateurs ou Coopérateurs ont
toujours été le soutien des bonnes œuvres que la Divine providence nous confiait » [2].
Le préambule a soin d’indiquer la diversité des personnes invitées par Don Bosco : laïcs, hommes et
femmes, prêtres diocésains ; c’est un des rares passages du Règlement où les Coopératrices sont
mentionnées comme telles. Les autres se trouvent à l’article 19 qui parle de « frères et sœurs
spirituels » et à l’article 39, § 1 qui souligne la « la solidarité [des] frères Coopérateurs et [des]
sœurs Coopératrices ».
Le règlement entend tracer le profil et le projet apostolique qui sont communs aux Coopérateurs et
aux Coopératrices, dans le cadre d’une Association fermée des une et des autres, présentés
précisément comme « frères et sœurs ».
Chaque fois qu’il rencontrera le mot « Coopérateur », le lecteur n’oubliera pas qu’il indique aussi
bien les Coopératrices que les Coopérateurs !
2.
Première organisation, visage et expansion pris ensuite (§ 2)
Les passages des Memorie biografiche (mentionnés à la note 2), où Don Bosco lui-même décrit la
première organisation des collaborateurs de son œuvre, disent ceci : « L’histoire des Coopérateurs
salésiens remonte à 1841, lorsqu’on commença à rassembler les enfants pauvres et abandonnés à
Turin. Ils se rassemblaient dans des locaux et des églises exprès, étaient occupés dans une
récréation agréable et honnête, instruits, amenés à recevoir avec dignité les saints sacrements de la
confirmation, de la confession et de la Communion. Pour exercer toutes ces tâches diverses
s’adjoignirent plusieurs personnes qui, par leur travail personnel et leur bienfaisance, soutenaient
l’œuvre appelée des patronages (oratoires) du dimanche. Ils recevaient l’appellation correspondant à
leur fonction, mais ils étaient en général appelés bienfaiteurs, promoteurs et aussi coopérateurs de la
Congrégation de saint François de Sales ». Parmi eux, Maman Marguerite est une figure exemplaire
et la plus grande Coopératrice de l’Oratoire.
« Le Supérieur de ces patronages était le prêtre Bosco. Travaillant en tout sous la direction et
l’autorité immédiate de l’archevêque, il exerçait son ministère en recevant les facultés opportunes
par oral ou par lettre. Chaque fois que se présentaient des difficultés, l’ordinaire les aplanissait par
l’intermédiaire du prêtre Bosco ». […]
« Les promoteurs et les coopérateurs salésiens, constitués en véritable congrégation sous le titre de
saint François de Sales, commencèrent aussi à obtenir du Saint-Siège quelques avantages spirituels
par le rescrit du 18 Avril 1845. […]
« En 1850, le prêtre Bosco fit valoir à Sa Sainteté qu’une Congrégation avait été légitimement
érigée dans cette ville sous le titre et la protection de saint François de Sales et demanda de plus
larges faveurs pour ses membres et pour les non-membres. Ces faveurs furent accordés par le rescrit
du 28 septembre 1850. […]
« La Congrégation des Promoteurs salésiens fut ainsi constituée aux yeux des autorités
ecclésiastiques locales et du Saint-Siège. Et vu la multitude des pauvres enfants qui y entraient, il
fut nécessaire d’ouvrir d’autres écoles, d’autres patronages du dimanche en d’autres quartiers de la
ville. Ensuite, pour garder dans l’œuvre des patronages l’unité d’esprit, de discipline et de
commandement, et lui donner de la stabilité, le supérieur ecclésiastique, par le décret ou
autorisation du 31 Mars 1852, en assigna la direction au prêtre Bosco avec toutes les facultés
nécessaires ou simplement opportunes à cette fonction.
« Après cette déclaration, la Congrégation des Promoteurs salésiens s’estima toujours
canoniquement érigée et les relations avec le Saint-Siège furent toujours maintenues par son
supérieur » [3].
Quant à l’approbation du Règlement élaboré par Don Bosco en 1876, il faut savoir que dans le
décret Cum sicuti du 9 mai 1876, Pie IX a reconnu en fait l’érection canonique de l’Association ;
mais que ce fut Mgr Magnasco, archevêque de Gênes qui a approuvé officiellement le Règlement
par un rescrit du 15 décembre 1877 auquel se réfère la note 3 [4].
3.
Nature et signification du Règlement (§ 3)
Ce dernier paragraphe indique la double nature du Règlement rénové : il est à la fois un « projet de
vie »pour chaque Coopérateur et le « statut de l’Association »comme telle [5].
Sa signification essentielle est exprimée par l’affirmation suivante : « Il offre un authentique chemin
de sanctification apostolique, conforme aux exigences de l’Eglise et adapté au monde actuel ». Car
il a été élaboré, expérimenté et amélioré en fonction des indications de renouveau données par
Vatican II, et selon les normes du Code de droit canon et les expériences valables des dix dernières
années vécues par les Coopérateurs et les Coopératrices qui travaillent dans le vaste monde salésien.
Cette affirmation comporte deux idées importantes.
1)
La « sanctification apostolique » : non pas, comme dans les premiers projets de
rédaction, la juxtaposition de la « sanctification » et de l’« apostolat » qui prêtait à une fâcheuse
conception dualiste. Fidèles au message de la Bible (le Saint par antonomase est le Seigneur Jésus,
Apôtre du Père) et à la pensée de Don Bosco, les Coopérateurs se sanctifient par « l’exercice actif
de la charité envers le prochain » [6]. et font consister leur sanctification personnelle en la
réalisation de leur mission salésienne en faveur des jeunes gens pauvres et abandonnés.
2)
Le « chemin » de sanctification : comme toute vocation chrétienne, celle du
Coopérateur est dynamique, celle d’un pèlerin qui marche, jour après jour, en compagnie du
Seigneur ressuscité, animé de son esprit, à la conquête de la perfection évangélique modelée sur
celle du Père (Mt 5, 48), jusqu’au dernier jour de sa vie.
[1] MB XVIII, 161.
[2] RDB, Au lecteur.
[3] MB XIII, 84-85, ainsi que, pour la lettre de Don Bosco au Saint-Père en 1850, MB IV, 93-94 ; et
pour le décret de Mgr Fransoni en 1852, MB IV, 378-379.
[4] Cf. MB XIII, 603-604.
[5] Pour comprendre les termes techniques de « règlement » et de « statut », voir l’introduction au
n° 6.1.
[6] RDB, III.
CHAPITRE I
LES COOPÉRATEURS SALÉSIENS DANS L’ÉGLISE
« Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et établis afin que vous partiez,
que vous donniez du fruit, et que votre fruit demeure »(Jn15,16).
Le texte biblique est tiré des discours d’adieu placés par l’Evangéliste dans un climat de profonde
intimité entre le Seigneur Jésus et ses disciples les plus proches. Au verset 14, Jésus dit
expressément que les disciples sont « ses amis », parce que tout le temps qu’il a été en leur
compagnie, il les a traités non en serviteurs, mais en amis authentiques, en confidents à qui il a fait
connaître tout ce qu’il a appris du Père.
L’unique moyen pour eux de lui rendre cette amitié est de donner effectivement du fruit, un fruit qui
demeure, qui les conduira à la vie avec Dieu qui est impérissable. Ce fruit se ramène à la foi vivante
qui s’exprime par la pratique de la grande loi de l’amour de Dieu et du prochain.
Le texte a été judicieusement choisi pour préciser l’optique qui permet de comprendre, à la lumière
de l’Evangile, le profil du Coopérateur et sa vocation spécifique de véritable salésien dans le
monde, en qualité de laïc, de prêtre ou de diacre séculiers. Cette vocation ne vient pas d’un projet
humain dont on puisse se vanter. Elle est radicalement un don magnifique de Dieu, d’un Dieu qui
en Jésus s’est manifesté comme « ami » de l’humanité, et qui fait précisément de ses disciples des
« amis ». « S’engager comme Coopérateur, dit l’article 2, § 2, est un don […] de celui qui l’a
appelé ».
PRÉMISSES
1. L’invitation de Vatican II à redéfinir son identité propre.
Au concile Vatican II, l’Eglise a redéfini son identité pour être plus fidèle à l’idéal évangélique que
lui a assigné son Fondateur et pour donner une réponse renouvelée aux situations et aux exigences
nouvelles du monde contemporain.
A la suite des indications officielles du concile, toutes les institutions ecclésiales ont fait un
cheminement, plus ou moins long et mobilisateur, destiné à redéfinir leur identité.
Le Règlement des Coopérateurs salésiens présente le fruit mûr d’un travail accompli dans ce but
durant vingt ans. Le premier chapitre, en effet, donne les traits généraux du profil original des
Coopérateurs et de leur Association, et les chapitres suivants en présentent les différents aspects
séparés. Il s’impose donc de bien comprendre ce chapitre tant aux Coopérateurs eux-mêmes qu’à
ceux qui travaillent avec eux ou pour eux.
2.
Significations diverses du terme « identité » [1]
Il est possible de comprendre l’identité du Coopérateur (ce que le Coopérateur est, son profil, son
visage, sa nature) en termes de quantité ou en termes de qualité. Dans le premier cas, nous nous
demandons : combien sommes-nous ? Dans le second, qui sommes-nous, que faisons-nous,
comment nous organisons-nous, comment nous situons-nous dans la Famille salésienne, l’Eglise et
la société. Sans être indifférent à l’aspect quantitatif, le Règlement s’intéresse surtout à l’aspect
qualitatif.
On parle d’identité en sens personnel lorsqu’on se réfère à un individu comme tel ; au sens collectif,
lorsqu’il s’agit d’un « nous » ou d’une institution. Le Règlement décrit l’identité personnelle
lorsqu’il se réfère au Coopérateur dans son individualité, et l’identité collective quand il parle des
Coopérateurs au pluriel ou de l’Association.
En référence au réseau complexe des relations de l’identité collective qualitative, on distingue
aujourd’hui l’identité réelle, l’identité idéale, l’identité instituée et l’identité exprimée. L’identité
réelle est celle qui est vécue par l’individu ou le groupe dans son agir quotidien. Le Règlement y est
très attentif, mais il considère surtout l’identité idéale du Coopérateur et de l’Association, qui se
présente comme un but à atteindre, comme un projet plus parfait que celui qui se vit en fait et
comporte toujours des défauts. Et comme les Coopérateurs font partie d’une institution, leur identité
réelle et idéale revêt aussi un aspect institutionnel. Le Règlement le prend nécessairement en
considération quand il parle de l’Association, de sa structure interne et de sa place dans la Famille
salésienne et dans l’Eglise.
En outre, il ne s’intéresse qu’à notre identité exprimée qui est notre identité réelle, projetée et
instituée. Il le fait dans ce qu’il exprime, décrit et règle, et d’une manière officielle. Car il recourt
aux intentions de Don Bosco Fondateur, à l’interprétation authentique de la tradition séculaire de
l’Association, aux délibérations des Chapitres généraux des salésiens, aux indications des congrès
mondiaux des Coopérateurs, aux décisions du Recteur majeur et à l’approbation du Saint-Siège.
Bref, il présente une description officielle de l’identité du Coopérateur et de l’Association,
approuvée par des autorités reconnues.
L’identité des individus et des groupes change avec le temps. À cinquante ans, une personne n’est
plus comme à vingt : la vie l’a changée. Comme toutes les institutions, l’Association des
Coopérateurs a une date de naissance. À partir d’alors, elle s’est développée, s’est étendue, a
modifié son organisation et sa physionomie juridique, elle s’est adaptée aux différentes cultures et
aux générations qui se sont succédé. Bref, l’identité qualitative des Coopérateurs a une dimension
temporelle : ils sont fils de leur histoire et leur identité est dynamique. Le chemin parcouru au cours
de ces vingt dernières années pour redéfinir leur identité le montre avec évidence. Ce travail visait
non pas à la changer radicalement, mais à lui garantir un sens crédible et lisible dans les situations
sociales, culturelles et ecclésiales d’aujourd’hui, différentes du temps de Don Bosco et de la
première moitié du xxe siècle.
1.
La grande idée qui domine le chapitre: la conviction de foi en un don de Dieu
Parmi toutes les composantes de l’identité qualitatives des Coopérateurs, le Règlement assigne une
incontestable priorité aux valeurs religieuses et morales qui la qualifient en profondeur. Il se réfère à
ces valeurs lorsqu’il aborde la vocation, la mission, la communion, la collaboration et l’esprit
salésien. C’est très clair dans le premier chapitre qui adopte la perspective générale du chapitre
correspondant des constitutions salésiennes [2].
Ce chapitre est dominé par une grande idée unique qui ne peut se recevoir que dans la foi, parce
qu’elle concerne un don de Dieu. Elle constitue la raison d’être des Coopérateurs. C’est la présence
active de l’Esprit Saint dans la fondation, l’histoire et le présent de leur Association comme des
autres groupes de la Famille salésienne.
À la différence d’autres institutions catholiques ou d’autres groupes ecclésiaux, les Coopérateurs ne
résultent pas du simple intérêt humain de chrétiens, hommes et femmes, engagés dans un apostolat,
même s’il était évidemment présent. Ni d’une intervention particulière des évêques et du Pape,
comme c’est par exemple le cas pour l’Action catholique et d’autres associations provenant de
l’initiative de tel ou tel ecclésiastique.
Les Coopérateurs sont issus et sont destinés à durer dans le temps en vertu d’une action particulière
de l’Esprit de Dieu. Historiquement, celle-ci s’est manifestée tout d’abord en Don Bosco et dans la
création des différents groupes de sa Famille apostolique ; ensuite dans l’acceptation et
l’approbation de cette nouvelle entité par l’Eglise ; enfin, dans l’histoire centenaire de la Famille
salésienne et, en elle, des Coopérateurs. Cette présence active de l’Esprit Saint confère au groupe
salésien des Coopérateurs une physionomie ou une identité particulière et, par leur concours, il la
renouvelle pour l’accorder aux les signes des temps.
Telle est, en synthèse, l’option de base qui parcourt tout le premier chapitre. C’est une réalité
mystérieuse, mais vraie et exaltante. Aujourd’hui, en s’inspirant au langage de saint Paul et de
Vatican II, on l’appelle « charisme salésien ». Les Constitutions des salésiens lui donnent la
première place, parce qu’elle est à la base de la mission, de la vie de communion, de la pratique des
conseils évangéliques et de l’esprit salésien. Le Règlement a fait la même option fondamentale :
c’est l’Esprit Saint qui appelle le Coopérateur à devenir disciple de Don Bosco et anime son
engagement apostolique, la communion au sein de l’Association et avec les autres membres de la
Famille salésienne, et l’esprit salésien.
2.
Vue d’ensemble du chapitre
Nous avons dit que le premier chapitre dessine les grands traits de l’identité qualitative et originale
des Coopérateurs et de leur Association. En termes condensés et précis, il traite de ceci : d’où vient
le Coopérateur, ce qu’il est, ce qu’il fait, quelle est sa place et son rôle dans la Famille salésienne et
dans l’Eglise [3]. Ce chapitre a donc une importance fondamentale : il pose les fondements de
l’Association Coopérateurs salésiens !
Il compte six articles regroupés entre eux deux à deux pour former trois petites unités thématiques.
1)
Initiative de Dieu par son Esprit :
Dans l’œuvre de Don Bosco, Fondateur charismatique des Coopérateurs
art. 1
Dans la vocation de chaque Coopérateur
art. 2
2)
-
Identité du Coopérateur :
Globale (traits essentiels : ecclésial, séculier, salésien)
Spécifique du Coopérateur laïc et du Coopérateur prêtre ou diacre
art. 3
art. 4
3)
-
Identité de l’Association :
Dans la Famille salésienne (aspect charismatique)
Dans l’Eglise : Association publique (aspect juridique)
art. 5
art. 6
[1] Cf. Desramaut Francis, Problemi di identità salesiana, in Desramaut F. – Midali M. (sous la
direction de), La vocazione salesiana (Elle Di Ci Turin 1982), 19-59 ; Midali Mario, Identità
carismatico-spirituale della Famiglia salesiana, in Midali M. (sous la direction de), Costruire
insieme la Famiglia salesiana (LAS Rome 1983), 151-157).
[2] Cf. Const. SDB 1984, art. 1-9.
[3] Cf. Atti e Documenti del 2° Congresso mondiale Cooperatori salesiani (Rome 1985), 57s.
ARTICLE 1er : LE FONDATEUR, UN HOMME ENVOYE PAR DIEU
§ 1. Pour contribuer au salut de la jeunesse, « cette part la plus délicate et la plus précieuse de la
société humaine » 1, l’Esprit Saint suscita, avec l’intervention maternelle de Marie, saint Jean
Bosco. Il forma en lui un cœur de père et de maître, capable de se donner totalement, et il lui inspira
une méthode d’éducation tout imprégnée de la charité du Bon Pasteur.
§ 2. Afin qu’une telle mission puisse se continuer et s’étendre, le même Esprit le conduisit à donner
naissance à diverses forces apostoliques, parmi lesquelles les Coopérateurs salésiens. Persuadé que
« les forces, même faibles, quand elles s’unissent, deviennent puissantes » 2, Don Bosco voulut
sans tarder les regrouper en une « Pieuse Union », appelée par la suite Association. C’est en elle que
l’Eglise, par son approbation, a reconnu l’authenticité de son inspiration évangélique 3.
1
2
3
MB II, 45 : cf. MB VII, 291.
RDB, I.
Pie ix, Bref Cum sicuti 9 mai 1876) ; MB XI, 77, 546-547
Cet article présente Don Bosco comme un « homme envoyé par Dieu » et un Fondateur conduit par
l’Esprit Saint, et montre le caractère charismatique de l’Association Coopérateurs salésiens dans
l’Eglise.
1.1. Trois significations du titre de « Fondateur »
Le premier article du Règlement s’intitule : « Le Fondateur ».Cette dénomination a été conférée
officiellement à Don Bosco par l’Eglise en référence aux trois groupes de la Famille apostolique
qu’il a créés [1].
Dans les documents ecclésiastiques, le titre de fondateur attribué à quelqu’un qui a lancé une
institution ecclésiale a eu des significations différentes. Il est utile de les connaître pour mieux
comprendre le rôle de Don Bosco dans la création des Coopérateurs.
Jusqu’au Concile Vatican II, dominent presque exclusivement deux significations : la signification
historique et juridique (ou canonique), et la signification historique et théologique.
– Est déclaré fondateur au sens historique et juridique d’un mouvement religieux ou apostolique
celui qui en a conçu l’idée, en a précisé les finalités et tracé les normes de vie et de gouvernement,
au moins pour l’essentiel.
– Est reconnu comme fondateur au sens historique et théologique d’une institution ecclésiale celui
qui s’est senti « appelé par Dieu » à la créer et en a défini les fins, la forme de vie et l’esprit.
Les documents de Vatican II font apparaître une troisième signification : le sens théologique et
charismatique. Il devient central et prépondérant dans les textes pontificaux [2] et épiscopaux [3]
qui ont suivi et qui parlent expressément à partir d’alors de « charisme des fondateurs » et/ou de «
charisme de fondation ». Dans ce sens théologique et charismatique est fondateur celui qui est
appelé par Dieu non seulement à créer une nouvelle institution, mais à susciter et à vivre
personnellement une expérience de l’Esprit qui doit caractériser cette institution.
Selon les documents salésiens qui ont suivi le Concile, le premier article du Règlement présente
Don Bosco Fondateur au sens historique et juridique, théologique et charismatique de la Famille
salésienne et, en elle, des Coopérateurs. Il a en effet créé ces institutions (sens historique), en a
indiqué les finalités et les normes (sens juridique), s’est senti « appelé par Dieu » à le faire (sens
théologique), et il a suscité et vécu personnellement l’expérience évangélique au sein de la Famille
apostolique qu’il a suscitée (sens charismatique) [4].
Pour présenter le visage et l’œuvre de notre Fondateur, l’article attire l’attention sur les faits
historiques majeurs suivants :
1.
Don Bosco a été suscité par l’Esprit de Dieu,
2.
pour réaliser une mission spécifique en faveur des jeunes,
3. destinée à durer par la création de diverses forces apostoliques qui comptent aussi les
Coopérateurs ;
4.
Il les a voulus groupés étroitement en une Association,
5. dont l’inspiration évangélique a reçu l’approbation de l’Eglise.
Ce sujet est tiré en substance du premier article des Constitutions SDB et a fait l’objet, au cours de
ces vingt dernières années, d’études historiques et théologiques, et de déclarations officielles [5]. Le
commentaire qui suit en résume les affirmations désormais largement acquises.
1.2.
Don Bosco « homme envoyé par Dieu »
« Don Bosco est sans aucun doute l’un des grands “charismatiques” que Dieu a suscités dans son
Eglise. L’intensité de l’initiative divine en lui se manifeste non seulement dans sa sainteté
personnelle, solennellement reconnue par l’Eglise, mais aussi dans son œuvre de Fondateur, elle
aussi reconnue dans l’approbation officielle des constitutions des Salésiens et des Filles de Marie
Auxiliatrice et dans celle de l’association des Coopérateurs salésiens.
« Pour le reconnaître comme instrument de Dieu, l’Eglise a certes eu recours avant tout au critère
fondamental que dicte la sagesse chrétienne : l’authenticité évangélique des vertus et des œuvres de
notre père. Mais il est également légitime de remarquer comment lui-même, au fil de son
expérience, a acquis la certitude d’être conduit par la Providence. Mieux encore, il voulut que ses
fils ne perdent jamais de vue l’intensité de cette intervention divine. C’est dans ce but même qu’il
écrivit le document des « Mémoires de l’Oratoire » : « À quoi pourront servir ces pages ? […] À
faire connaître comment Dieu a Lui-même conduit toute chose à chaque moment » [6].
1.3. Mission de Don Bosco auprès des jeunes
« Au cours de sa vie si complexe, Don Bosco a rempli un certain nombre de tâches liées à des
situations passagères […]. Mais ce qui nous intéresse ici, ce sont les lignes fondamentales de sa
vocation de fondateur, c’est-à-dire l’œuvre que l’Esprit de Dieu lui a inspiré de « fonder » non
seulement pour le présent, mais aussi pour le futur de l’Eglise.
« À Jean Bosco, jeune prêtre turinois, en 1841, l’Esprit-Saint a donné une sensibilité toute spéciale
pour percevoir, à travers une série d’expériences, la misère et les périls dans lesquels se trouvaient
les jeunes, déracinés de leur campagne et accourant dans une cité en pleine transformation sociale,
politique et religieuse. Il l’appela ainsi à consacrer sa vie pour les aider à devenir d’honnêtes
citoyens et de bons chrétiens, et à créer dans ce but une série d’œuvres de charité corporelle et
spirituelle répondant à leurs besoins » [7].
Ces déclarations officielles du Chapitre général spécial des SDB sont exprimées au premier
paragraphe de notre article, qui souligne quelques données historiques que nous allons citer.
– C’est à la jeunesse que s’adresse avant tout et de préférence l’apostolat de Don Bosco, à cause
de son importance unique dans l’avenir de toute société : « Pour contribuer au salut de la jeunesse,
“cette part la plus délicate et la plus précieuse de la société humaine” ». Les jeunes se profilent
d’emblée à l’horizon et y resteront à travers tout le Règlement : Don Bosco, sa Famille, les
Coopérateurs et les Coopératrices sont là pour eux !
– Dans la vocation et la mission de Don Bosco auprès des jeunes, l’action de l’Esprit Saint
s’accompagne sans cesse de l’intervention maternelle de la Vierge Auxiliatrice : « L’Esprit Saint
suscita, avec l’intervention maternelle de Marie, saint Jean Bosco ». Le verbe « suscita » indique
que Don Bosco a été choisi et appelé gratuitement par Dieu.
–
Le visage et l’œuvre de Don Bosco se caractérisent par plusieurs dispositions indispensables à
celui qui se consacre à l’apostolat des jeunes : l’Esprit « forma en lui un cœur de père et de maître,
capable de se donner totalement ». Les déclarations de Don Bosco sur cette consécration aux jeunes
sont innombrables. Il suffit de citer celle-ci qui est bien connue : « J’ai promis à Dieu que ma vie,
jusqu’à son dernier souffle, serait pour mes pauvres garçons » [8]. La formule « père et maître » est
tirée de l’oraison liturgique de la fête de saint Jean Bosco.
–
Dans la mission de Don Bosco auprès des jeunes, la méthode d’éducation qu’il appelle
« Système préventif » occupe une place unique et irremplaçable. C’est la méthode pour la remplir :
une méthode typiquement évangélique, c’est-à-dire animée de la « charité salvifique du Christ
Pasteur » (art.28). L’Esprit Saint « lui inspira une méthode d’éducation tout imprégnée de la charité
du Bon Pasteur ». [9].
1.4.
Origine charismatique des trois premiers groupes de la Famille salésienne
L’Esprit Saint a fait peu à peu [10] découvrir à Don Bosco que sa mission auprès des jeunes devrait
« se dilater dans l’espace et le temps, au profit des peuples divers et de générations nombreuses ».
Mais alors, elle « réclamait des hommes et des femmes capables de “travailler avec Don Bosco” et
des institutions capables d’en assurer la continuité dans la fidélité dynamique » [11].
Comme il le dit lui-même dans sa « Storia dei Cooperatori » [12], Don Bosco, dès 1844, s’était
entouré d’ecclésiastiques et de laïcs, hommes et femmes, qui formaient une sorte de « Congrégation
de saint François de Sales » : ce furent ses premiers collaborateurs. Parmi eux figurent des prêtres et
des laïcs turinois connus et des gens simples du peuple ; tous, de manière occasionnelle ou plus
stable, offraient leur concours à l’Oratoire.
Ensuite, sous l’impulsion de l’Esprit Saint, Don Bosco comprit que sa mission complexe et lourde
aurait plus de stabilité et de possibilités de durer si elle pouvait s’appuyer sur des personnes qui se
seraient consacrées entièrement à elle. Le même Esprit fit naître dans le cœur des premiers disciples
du saint l’appel à une consécration apostolique. Et à partir de 1859, date de la fondation de la
Société salésienne, la « Congrégation de saint François de Sales » première manière ne disparut pas
et ne fut pas absorbée, mais, comme nous dit encore son Fondateur, « elle fut divisée en deux
catégories ou plutôt en deux familles. Ceux qui disposaient d’eux-mêmes et en sentaient la
vocation, se groupèrent dans la vie commune et demeurèrent dans le bâtiment qui fut toujours
considéré comme la maison mère et le centre de la pieuse association, que le Souverain Pontife
conseilla d’appeler Pieuse Société de saint François de Sales, nom qui est encore à présent le sien.
Les autres, c’est-à-dire les externes, continuèrent à vivre dans le monde au sein de leur famille, mais
ils continuèrent à promouvoir l’œuvre des Oratoires et conservèrent jusqu’à présent le nom d’Union
ou de Congrégation de saint François de Sales, de promoteurs ou de Coopérateur » [13]. Ces
Coopérateurs appelés « membres externes » furent expressément pris en considération dans les
différentes rédactions des Constitutions salésiennes de 1860 à 1874, année où les difficultés bien
connues avec la curie romaine obligèrent à sacrifier le chapitre XVI qui leur était consacré.
Au cours de ces mêmes années et en particulier en 1872, vu qu’il avait eu la certitude « que c’était
la volonté de Dieu qu‘il s’occupât aussi des filles » [14] , il fonda la Congrégation des Filles de
Marie Auxiliatrice, et voulut qu’elle fût réunie ou étroitement affiliée à la société salésienne [15].
Mais quels furent les derniers développements des « membres externes » ? Don Bosco ne renonça
pas à sa « conviction fondamentale que le plus grand nombre possible de chrétiens doivent unir
leurs forces pour le bien des âmes, surtout des jeunes en situation de pauvreté » [16]. De 1874 à
1876, il se démena beaucoup pour que ces membres externes eussent dans sa Famille la place qui
semblait leur revenir de plein droit. Il élabora plusieurs schémas de Règlement qui lui permirent de
clarifier encore son projet et lui trouva une autre physionomie juridique [17] : « La Société
salésienne devait être comme le levain animateur d’un vaste mouvement de charité, où des hommes
et des femmes entreraient pour participer à sa mission et à son esprit, chacun selon son propre état
de vie : ainsi prit naissance l’Association des Coopérateurs, troisième institution porteuse de son
charisme » [18].
Le chapitre général spécial des SDB a reproposé cette lecture à la lumière de la foi dans son
document sur la Famille salésienne, à propos de l’origine charismatique des trois groupes fondés
par Don Bosco [19], et dans le document sur les Coopérateurs, en ce qui concerne spécifiquement
leur fondation [20].
Le Règlement des Coopérateurs ne pouvait pas la passer sous silence. L’article que nous étudions
en parle au second paragraphe par cette affirmation générale : « Afin qu’une telle mission de (Don
Bosco en faveur des jeunes) puisse se continuer et s’étendre, le même Esprit le conduisit à donner
naissance à diverses forces apostoliques, parmi lesquelles celles des Coopérateurs salésiens.»
1.5. Union des Coopérateurs
L’article poursuit : « Persuadé que les forces, même faibles, quand elles s’unissent, deviennent
puissantes, « Don Bosco voulut sans tarder les regrouper en une “Pieuse Union”, appelée par la
suite Association ».
Un commentaire sûr et digne de foi de cette affirmation, qui souligne la préoccupation de notre
Fondateur d’unir immédiatement les Coopérateurs en Association, nous est offert par le Règlement
écrit de sa main. Le premier chapitre porte le titre significatif : « Il faut que les bons chrétiens
s’unissent pour faire le bien ».
Pour étoffer ce « Manifeste catholique », Don Bosco énumère quelques affirmations générales qui,
au-delà du langage qui reflète le climat culturel de l’époque, conservent une actualité certaine.
La nécessité d’unir les gens de bien ressort de l’histoire millénaire des peuples : « De tout
temps, on a jugé que l’union entre les gens de bien leur était nécessaire pour se soutenir
mutuellement dans la pratique des bonnes œuvres et se préserver du mal ».
L’importance pour les chrétiens d’agir ensemble est attestée par l’expérience de l’Eglise des
origines : « Nous en avons l’exemple chez les chrétiens de la primitive Eglise, qui, sans se
décourager à la vue des périls auxquels ils étaient sans cesse exposés, n’ayant qu’un cœur et qu’une
âme, s’exhortaient mutuellement à demeurer inébranlables dans la foi, et à combattre vaillamment
au milieu des assauts qu’on ne cessait de leur livrer ».
Les avantages qui se retirent d’agir dans la solidarité sont indiqués dans le message
évangélique : « Notre Seigneur lui-même nous enseigne cette vérité lorsqu’il dit : « que les
moindres forces, si elles se réunissent, deviennent puissantes, et que s’il est facile de rompre une
corde seule, il est très difficile d’en rompre trois réunies »
L’union des catholiques est requise par la confrontation qu’ils doivent soutenir avec les autres
forces sociales, culturelles et politiques : « Les gens du monde font usage de ce moyen pour leurs
affaires temporelles. Faudra-t-il que les enfants de la lumière soient moins prudents que les enfants
des ténèbres ? Non certes. Nous, qui faisons profession d’être chrétiens, nous devons nous réunir en
ces temps difficiles pour propager l’esprit de prière et de charité par tous les moyens que nous
fournit la religion, et tâcher ainsi de détourner ou du moins d'alléger les maux qui menacent
l’innocence et les mœurs de cette jeunesse qui croît autour de nous, et qui tient entre ses mains
l’avenir de la société. »
Pour la discussion survenue durant la période postconciliaire au sujet du titre à choisir : « Union »,
ou « Association », pour désigner l’ensemble des Coopérateurs, voir l’introduction [21].
1.5. Authenticité de l’inspiration évangélique
La relecture dans la foi des origines des Coopérateurs accomplie dans la période qui a suivi le
Concile n’a pas été exempte de perplexités. Pour certains, l’inspiration divine dans la fondation de
la société salésienne et de l’Institut des Filles de Marie Auxiliatrice était acceptée pacifiquement.
L’origine des Coopérateurs, par contre, n’était due qu’à une initiative purement humaine suggérée à
Don Bosco par les circonstances historiques.
Cette vision des choses n’a pas été accueillie par le Chapitre général des salésiens, parce que
contraire à la pensée de Don Bosco, qui ressort de beaucoup de ses déclarations. Il est possible d’en
citer un grand nombre, mais celle que reporte le Règlement en exergue suffira : « Ce n’est pas Don
Bosco, mais la main de Dieu qui se sert des Coopérateurs ! Ecoutez ! Vous avez dit que […]
l’œuvre des Coopérateurs salésiens plaît à un grand nombre. Moi, j’ajoute qu’elle se répandra dans
tous les pays, elle se diffusera dans toute la chrétienté. […] La main de Dieu la soutient ! Les
Coopérateurs seront les promoteurs de l’esprit catholique. C’est peut-être une utopie de ma part,
mais je la maintiens ! » [22].
Pour Don Bosco, être Coopérateur, c’était une façon concrète d’être catholique et, en définitive, une
manière de vivre l’Evangile dans l’aujourd'hui de l’histoire [23]. Cette conviction s’appuyait sur le
fait que l’œuvre des Coopérateurs était authentifiée par l’appui de Dieu. Mais en plus du
témoignage du Fondateur, il y eut la reconnaissance importante de la part du peuple de Dieu : avec
ses évêques, il accueillit et apprécia ce mouvement apostolique. Il y eut surtout l’intervention du
Pape. L’article du Règlement renvoie à l’approbation de l’Association contenue dans le Bref « Cum
sicuti » de Pie IX en 1876. Il s’agit de la sentence de la plus haute autorité de l’Eglise, garante de
l’authenticité de l’inspiration évangélique du projet apostolique réalisé par les Coopérateurs. Cela
vaut pour l’approbation officielle de la part du Saint-Siège de l’actuel Règlement de vie
apostolique.
[1] Cf. Midali Mario, Madre Mazzarello. Il significato del titolo di confondatrice (LAS Rome
1982), 15-30, 123s.
[2] Cf. ET, 11; MR, 11.
[3] Cf. p. ex. iiie Conférence générale de l’épiscopat latino-américain, Puebla. L’évangélisation
dans le présent et le futur de l’Amérique latine, 736, 762, 772.
[4] Cf. Midali Mario, Identità carismatico-spirituale della Famiglia salesiana, in Midali M. (sous la
direction de), Costruire insieme la Famiglia salesiana (LAS Rome 1983), 166-168.
[5] Cf. ACGS 7-15; Viganò Egidio, La Famille salésienne, in ACS 304 (avril juin 1982) p. 10-33 ;
Desramaut F. – Midali M. (sous la direction de), La Famiglia salesiana, collection Colloqui sulla
vita salesiana 5 (Elle Di Ci 1974) ; Midali Mario (sous la direction de), Costruire insieme la
Famiglia salesiana (LAS Rome 1983).
[6] ACGS 7-8. La traduction française des « Mémoires de l’Oratoire » s’intitule Souvenirs
autobiographiques. Apostolat des Editions. Paris 1977. (256 pages et 16 hors-texte).
[7] ACGS 9-10.
[8] MB XVIII, 258. Cité à l’art. 1er des Constitutions SDB.
[9] L’essentiel du Système préventif est exposé à l’article 15 du Règlement des Coopérateurs.
[10] Pour connaître l’histoire de la Famille salésienne et en particulier celle des Coopérateurs, voir :
Morand Wirth, Don Bosco et les salésiens, cent cinquante ans d’histoire (Elle Di Ci TurinLeumann, 1969) p. 199-210 et 381-392, où il est possible d’avoir une première vue d’ensemble.
Pour une étude plus approfondie, voir Ceria Eugenio, I Cooperatori salesiani, un po’ di storia
(Turin, SEI 1952) 118 p. ; Favini Guido, Don Bosco e l’apostolato dei laici (Turin, SEI 1952) 90
p. ; Id., Il cammino di una grande idea. I Cooperatori salesiani (Turin, Elle Di Ci 1962) 222p. ;
Auffray Augustin, Con Don Bosco e con i tempi. I Cooperatori salesiani (Turin, SEI 1955) 79 p. ;
Stella Pietro, Don Bosco nella storia della religiosità cattolica I (Zürich, Pas-Verlag 1968) 209227) ; Desramaut Francis, La storia primitiva della Famiglia salesiana secondo tre esposti di Don
Bosco, in Desramaut F. – Midali M. (sous la direction de), La Famiglia salesiana (Collection
Colloqui sulla vita salesiana 5), (Turin-Leumann, Elle Di Ci 1974) p. 17-44 ; Id., Da Associati alla
Congregazione salesiana del 1873 a Cooperatori Salesiani del 1876, Desramaut F. – Midali M.
(sous la direction de), Il Cooperatore nella società contemporanea (Collection Colloqui sulla vita
salesiana, 6) (Turin-Leumann, Elle Di Ci 1975) p. 23-50.
[11] ACGS, 10, 12.
[12] Cf. Storia dei Cooperatori, manuscrit du P. Gioachino Berto, corrigé par Don Bosco, in ACS
133 Cooperatori 3 (1) 1 fol. 4 p. Publié in Desramaut F. – Midali M. (sous la direction de), La
Famiglia salesiana, 341-343.
[13] Cooperatori Salesiani, manuscrit autographe de Don Bosco 2 pages, in ACS 133 Cooperatori 3
(1), publié avec de petites variantes par Ceria E. in MB XII 84-86 et in Desramaut F. Midali M.
(sous la direction de), La Famiglia salesiana, 338-340.
[14] MB X 597
[15] Cf. Desramaut Francis, La storia primitiva della Famiglia salesiana secondo tre esposti di Don
Bosco, in Desramaut F. – Midali M. (sous la direction de), La Famiglia salesiana 35-39 ; pour
l’histoire successive cf. Posada Maria Ester, Don Bosco e le Figlie di Maria Ausiliatrice, ib., 47-56 ;
Secco Michemina, L’identità vocazionale delle FMA nella Famiglia salesiana, in Midali M. (sous la
direction de), Costruire insieme la Famiglia salesiana 267-275.
[16] ACGS 12.
[17] Cf. Desramaut Francis, Da Associati alla Congregazione salesiana del 1873 a Cooperatori
Salesiani del 1875, in Desramaut F. – Midali M. (sous la direction de), Il Cooperatore nella Società
contemporanea, Collana Colloqui sulla vita salesiana 6 (Elle Di Ci Tutin 1975) 23-50.
[18] ACGS, 12.
[19] ACGS, 153.
[20] Cf. ACGS, 729.
[21] Cf. Introduction au n° 4.3.
[22] MB XVIII 161.
[23] Cf. RDB II.
ARTICLE 2. LE COOPÉRATEUR : UN CHRÉTIEN APPELÉ
§ 1. Divers sont les chemins qui s’offrent aux chrétiens pour vivre la foi de leur baptême et
l’engagement de leur confirmation. Certains, sous l’impulsion de l’Esprit Saint, se sentent attirés
par la figure de Don Bosco et par la perspective de « travailler avec lui » en restant dans le monde.
§ 2. S’engager comme Coopérateur, c’est répondre à la vocation salésienne en assumant une
manière spécifique de vivre l’Evangile et de participer à la mission de l’Eglise. C’est tout à la fois
un don et un libre choix qui qualifient l’existence.
Pour réaliser ce projet, le Coopérateur s’appuie sur la fidélité de celui qui l’a appelé 1.
§ 3. Tout chrétien, quelle que soit sa condition culturelle ou sociale, peut s’engager sur ce chemin.
1.
Cf. 1 Cor 1, 9 ; 1 Th 5, 24.
Cet article reconnaît l’initiative de Dieu non seulement en Don Bosco et dans la fondation de
l’Association, mais en chaque Coopérateur appelé à en faire partie.
2.1. Qu’est-ce que la qualité de Coopérateur ajoute à celle du chrétien ?
Il n’est pas rare d’entendre des jeunes ou d’autres personnes poser à propos des Coopérateurs des
questions comme celles-ci : Qu’est-ce que la qualité de Coopérateur apporte à un chrétien engagé
ou à un prêtre ? La simple appartenance à une association de bienfaisance ? Ou encore la possibilité
de bénéficier d’aides et d’avantages spirituels ? Ou bien ajoute-t-elle autre chose ?
Le deuxième article du Règlement se propose de répondre à ce genre de questions qui contiennent
toutes une part de vérité, mais n’expriment pas le point important : s’engager comme Coopérateur
ou comme Coopératrice, c’est répondre à la vocation salésienne ; c’est participer à la réalisation du
projet apostolique de Don Bosco.
On se trouve ici en face d’une affirmation catégorique et claire du Chapitre général spécial des
salésiens : « Il faut prendre clairement conscience que s’engager comme “Coopérateur salésien”,
c’est répondre à un véritable “appel” ; c’est donc accepter une authentique vocation salésienne […]
apostolique » [1].
Cet article souligne déjà l’importance de cette affirmation par le titre : « le Coopérateur : un
chrétien appelé ».
2.2. Une objection sérieuse
Cette déclaration du Chapitre général a trouvé dans le passé et suscite encore parfois des résistances
et des perplexités. L’objection est que Don Bosco n’a jamais parlé de « vocation salésienne » à
propos des Coopérateurs. C’est un théologien salésien [2] qui a répandu la formule après le Concile.
Le Chapitre général en a discuté et a fini par l’adopter dans ses documents. Il faut donc se demander
si, dans tout cela, on a respecté la pensée définitive de Don Bosco.
L’objection est sérieuse. Et il faut concéder que Don Bosco n’a très probablement pas employé le
mot « vocation » à propos des Coopérateurs. Mais ce serait une vérification historique à faire.
Mais le problème n’est pas dans l’utilisation ou non du mot, même s’il n’est pas indifférent à cause
de ses répercussions psychologiques et sociales sur celui qui l’utilise et sur ceux qui l’entendent. Le
problème est de savoir si Don Bosco a exprimé, dans un autre vocabulaire, la même réalité qui, sur
la base de la théologie du Concile, se désigne par le terme de « vocation ».
Ce que le Chapitre général spécial affirme par le terme « vocation », Don Bosco l’a répété souvent
en d’autres mots à son époque, plus précisément dans son Règlement des Coopérateurs. Là, il fait
en effet appel aux « bons catholiques » qui, vivant selon leurs conditions de vie, en famille et dans
le monde du travail, sont disposés, à fournir, suivant leurs capacités, un service humain et chrétien
pour le bien des jeunes, en collaboration avec la société salésienne et selon son esprit. C’est en
substance ce que dit le Chapitre général spécial qui s’inspire de la théologie de Vatican II à propos
des différentes vocations apostoliques dans l’Eglise.
Bref, même si – ce qui reste à prouver – Don Bosco n’a pas utilisé la formule « vocation
salésienne » à propos des Coopérateurs salésiens, il faut reconnaître qu’il a exprimé en d’autres
tournures ce que la formule exprime aujourd’hui. Il est bon de se le rappeler, ne fût-ce que pour
éviter d’inutiles et fâcheuses discussions.
2.3. Présentation biblique de la vocation
Pour présenter la vocation salésienne du Coopérateur, notre article 2 s’inspire du langage de la
Bible qui est assez proche de l’expérience humaine d’aujourd’hui. Avec le terme de « vocation », il
utilise aussi les mots « choix », « mission », « chemin », « don ». La citation biblique mise en
exergue de ce chapitre situe la vocation du Coopérateur dans la perspective d’un « choix » de la part
du Seigneur Jésus ; à l’article 2, le premier paragraphe la présente comme l’un des « chemins »
possibles qui s’offrent aux chrétiens ; le deuxième paragraphe la considère comme une manière de
participer à la « mission » de l’Eglise, et la considère comme un « don ». Pour mieux comprendre
ce sujet, il est utile de rappeler brièvement la signification que donne l’Ecriture aux mots clés dont il
vient d’être question.
Selon la Bible, chaque vocation vient de Dieu ; elle est un fruit de la grâce du Christ, un don de
l’Esprit : c’est toujours Dieu qui appelle, ou le Christ ou son Esprit. Chaque vocation suppose un
choix divin. Dieu fait entendre son appel à celui qu’il a choisi. Toute vocation a comme objet une
mission à remplir : Dieu appelle pour envoyer ; à tous ceux qu’il choisit et appelle il répète le même
ordre : « Va ! » Chaque vocation implique un chemin à parcourir : celui qui a été appelé à remplir
une mission doit reconnaître et suivre les voies de Dieu : la voie droite du bien, de la vertu, de la
vérité, de la justice, de l’amour, de la paix, la voie qui conduit à la vie ; et non pas la voie tortueuse
du mal qui conduit à la perdition et à la mort.
Tout cela s’est réalisé d’une manière emblématique en Jésus de Nazareth : il est celui que le Père a
choisi et appelé, a oint par le don de l’Esprit, a envoyé remplir une mission de salut, à réaliser à
travers la voie pascale de la passion qui conduit à la résurrection.
L’Eglise naissante a compris l’existence chrétienne à la lumière de son Seigneur. Etre chrétien, c’est
avoir été choisi par Dieu, avoir reçu une vocation née de l’Esprit pour vivre dans l’Esprit ; c’est être
envoyé pour collaborer au plan divin de salut ; c’est parcourir le chemin suivi par le Christ devenu
personnellement la « voie » de l’amour qui, dans un seul Esprit, conduit au Père [3].
2.4. Vocation chrétienne commune et vocations spécifiques (art. 2 § 1)
L’article 2 s’ouvre par une déclaration qui s’inspire de Vatican II : « Divers sont les chemins qui
s’offrent aux chrétiens pour vivre la foi de leur baptême et l’engagement de leur confirmation ».
Dans l’Eglise, dit la constitution lumen gentium, « L’appel à la plénitude de la vie chrétienne et à la
perfection de la charité s’adresse à tous ceux qui croient au Christ, quels que soient leur état ou leur
forme de vie » [4].
Mais cette vocation à l’apostolat et à la sainteté, commune à tous les chrétiens en vertu de leur
baptême et de leur Confirmation, n’est pas à réaliser d’une manière générique, mais selon des
vocations spécifiques différentes. Ainsi le Concile parle-t-il expressément de la vocation propre des
laïcs [5], des époux chrétiens [6], des clercs [7], des religieux [8], des laïcs agrégés à des institutions
approuvées par l’Eglise [9]. En effet, il est possible d’aimer Dieu et le prochain en diverses formes
de vie : comme célibataires, comme mariés, comme consacrés par la profession des trois vœux de
pauvreté, de chasteté et d’obéissance ; et, d’un autre point de vue, dans une vie de contemplation ou
d’apostolat actif, ou bien de souffrance (en certaines périodes, du moins).
Il est possible d’aimer Dieu et le prochain à travers différents services ou engagements ou
ministères : ceux des membres de la hiérarchie, ceux qui se rattachent à vie familiale, sociale et
politique, ceux qui se rattachent à l’œuvre de l’évangélisation et qui répondent aux nécessités du
moment historique : témoigner, éduquer, donner une animation chrétienne aux milieux de travail,
maintenir et renforcer l’unité, aller à la rencontre de ceux qui sont dans le besoin et la souffrance …
La Constitution conciliaire sur l’Eglise l’explique avec clarté dans un de ses textes les plus réussis
qui se conclut en ces termes : « Tous ceux qui croient au Christ iront en se sanctifiant toujours plus
dans les conditions, les charges et les circonstances qui sont celles de leur vie et grâce à elles » [10].
2.5. Vocation personnelle spécifique
Ces indications officielles font ressortir que chaque chrétien a le devoir de donner à l’appel de Dieu,
commun à tous les fidèles, une réponse concrète et personnelle. Chacun doit se dire avec netteté :
« Dieu m’appelle à l’aimer, Lui et le prochain, en accomplissant une mission et en offrant un
service généreux à la suite du Seigneur Jésus ; il m’appelle moi, avec mes dons naturels et ceux que
j’ai reçus de l’Esprit Saint ; il m ‘appelle ici et maintenant, dans ma situation personnelle, familiale,
sociale et ecclésiale qui est la mienne … Comment vais-je répondre ? »
Devant toutes les possibilités qui se présentent, il faut choisir. Et chacun doit alors se demander :
« Dans quelle forme de vie et en assumant quelle sorte d’engagement vais-je répondre à ma
vocation personnelle et prendre place dans la vie et la mission de l’Eglise ? »
Le Concile Vatican II donne à ce sujet des indications officielles pour reconnaître les signes de la
vocation personnelle.
2.6. Signes de la vocation
Dieu révèle à chacun sa vocation personnelle à travers divers signes :
1. Les dons naturels ou gratuits, parce que dons de sa grâce, que reçoit tout fidèle. Puis à travers la
présence, vive ou discrète, par laquelle Il sollicite la conscience de chaque croyant : perception
aiguë de certaines valeurs évangéliques, sensibilité à certaines nécessités du moment ou du lieu,
goûts et désirs profonds, impulsions ou élans vers une forme déterminée d’amour et de service pour
autrui.
2. Les circonstances de la vie : le milieu familial et social, des rencontres, les amitiés valables,
tout ce qui arrive « providentiellement ».
3. Les « signes des temps », c’est -à- dire les phénomènes sociaux qui, par leur extension générale
et leur fréquence, caractérisent une époque et expriment les aspirations et les attentes de l’humanité
ou du groupe humain dans lequel on vit [11].
4. La situation historique de l’Eglise à une époque déterminée. L’Eglise étant « solidaire du genre
humain et de son histoire » [12], l’Esprit du Seigneur ne cesse de susciter en elle des chrétiens,
hommes et femmes, et des mouvements apostoliques qui répondent aux nouvelles exigences.
Beaucoup ont vu le jour dans le passé, naissent encore aujourd’hui et continueront à le faire dans
l’avenir. L’un de ces mouvements ecclésiaux concrets, issu le siècle dernier et opérant aujourd’hui
dans le monde, est la Famille salésienne. Chaque fidèle, homme et femme, laïc, prêtre ou diacre
séculier, se trouve ainsi en fait en présence de nombreuses forces spirituelles et apostoliques qui
participent à la mission du Peuple de Dieu pour le bien de l’humanité. Le « fait salésien » dans
l’Eglise (Paul VI) fait partie des signes qu’offre le Seigneur à chacun pour découvrir et suivre sa
vocation particulière.
2.7.La vocation salésienne de Coopérateur (art. 2 § 1 et 2)
C’est ainsi que, sous la motion intérieure de l’Esprit du Seigneur et la provocation extérieure des
circonstances ordinaires de la vie, des signes des temps et de la présence dans l’Eglise des
nombreux mouvements et groupes apostoliques, un chrétien peut découvrir que le Christ
« l’appelle » à aimer et à servir Dieu dans les autres, et à prendre place dans le vaste mouvement
lancé par Don Bosco et destiné par l’Esprit à poursuivre sa mission : sa vocation spécifique est alors
de s’engager comme « coopérateur salésien ».
Sa vocation est une de celles dont parle le Concile quand il traite des « laïcs qui selon leur vocation
particulière se sont agrégés à des associations ou instituts approuvés par l’Eglise » [13].
Que signifie précisément avoir cette vocation salésienne de Coopérateur ou de Coopératrice ?
L’article qui lui est consacré le dit en quelques mots. C’est :
1. Se sentir attiré par le visage évangélique de Don Bosco et constater que sa personnalité, son
esprit réaliste et dynamique, son œuvre et sa méthode d’éducation correspondent à certains traits de
son expérience chrétienne personnelle.
2. Se trouver bien avec Don Bosco et désirer travailler avec lui dans la Famille salésienne qui en
continue la mission auprès des jeunes et du peuple.
3. Etre sensible aux problèmes des jeunes et du peuple, comprendre qu’il s’agit là de problèmes
peut-être décisifs pour le monde actuel et son proche avenir ; c’est donc sympathiser avec les petits
et les pauvres, et vouloir leur apporter une aide concrète de manière à leur assurer une promotion
humaine et le salut chrétien. Bref, c’est chercher à apporter sa part, modeste ou importante, à la
réalisation du projet apostolique de Don Bosco, tout en gardant la condition de chrétien laïque
engagé dans l’apostolat ou de diacre ou de prêtre diocésain.
Le premier paragraphe de notre article veut souligner que l’appel de l’Esprit Saint se sert
habituellement de l’attrait exercé par le visage de Don Bosco et de la validité de sa mission auprès
des jeunes et du peuple : « Certains sous l’impulsion de l’Esprit Saint, se sentent attirés par la figure
de Don Bosco et par la perspective de “travailler avec lui” en restant dans le monde. ».
Plus profondément, avoir la vocation salésienne de Coopérateur ou de Coopératrice, c’est avoir la
conviction que l’Esprit de Dieu, qui est Amour et Liberté, remplit l’univers [14]. Il « appelle »
chaque chrétien à trouver sa place originale dans le Peuple de Dieu et à remplir sa tâche particulière
dans la mission de l’Eglise. Ce n’est qu’en cas exceptionnel qu’il s’agit d’une vocation
extraordinaire. Le plus souvent, c’est une vocation simple. Dans tous les cas, elle est propre à
chacun et à la mesure de sa personnalité humaine et chrétienne. Elle est à découvrir et à suivre en
pleine docilité à l’Esprit Saint, en l’invoquant dans la prière.
Mais c’est en même temps avoir une sorte de goût pour la vie chrétienne authentique, dans un
contexte où tant de gens, qui se disent chrétiens, ignorent ou négligent les exigences de leur
baptême et les engagements de leur Confirmation.
C’est désirer se tenir à l’écart de la médiocrité, des protestations théoriques ou sentimentales, de la
piété formaliste, pour prendre l’Evangile au sérieux et tenter la formidable aventure de la foi vécue
et de la vie donnée.
Tout cela se trouve dans le texte du Règlement : on devient Coopérateur « sous l’impulsion de
l’Esprit Saint » (§ 1) ; et « répondre à la vocation salésienne en assumant une manière spécifique de
vivre l’Evangile et de participer à la mission de l’Eglise » (§ 2).
2.8.La vocation salésienne est un « don » (art. 2 § 2)
Selon une remarque déjà faite plus haut, mais sur laquelle il est bon de revenir, la Bible présente la
vocation chrétienne comme un don de l’Esprit du Seigneur ressuscité. Au cœur de celle-ci, chaque
vocation particulière est à ramener à un charisme du même Esprit.
Le décret de Vatican II sur l’apostolat des laïcs reprend et actualise cette indication de la Bible :
« Pour l’exercice de cet apostolat, le Saint-Esprit […] accorde en outre aux fidèles des dons
particuliers (cf. 1 Co 12, 7), les “répartissant à chacun comme il l’entend” (cf. 1 Co 12, 11) pour que
tous et “chacun selon la grâce reçue se mettant au service des autres” soient eux-mêmes “comme de
bons intendants de la grâce multiforme de Dieu” (1 P 4, 10), en vue de l’édification du Corps tout
entier dans la charité (cf. Ep 4, 16). De la réception de ces charismes même les plus simples, résulte
pour chacun des croyants le droit et le devoir d’exercer ces dons dans l’Eglise et dans le monde,
pour le bien des hommes et l’édification de l’Eglise, dans la liberté du Saint-Esprit qui “souffle où il
veut” (Jn 3, 8), de même qu’en communion avec ses frères dans le Christ et très particulièrement
avec ses pasteurs » [15].
Quand il affirme que la vocation salésienne de Coopérateur « est un don », le Règlement ne fait
qu’appliquer au cas particulier du Coopérateur cette doctrine générale de la Bible et du Concile.
Plus précisément, la vocation du Coopérateur est un charisme de l’Esprit Saint, qui est Amour. Elle
est donnée à la personne en vue de sa promotion humaine, non pour la situer au-dessus des autres,
mais la mettre à leur service [16] de la façon la plus conforme à ses capacités et à sa condition. Elle
est donnée pour le service salésien rendu aux jeunes et au peuple, dans l’esprit de Don Bosco et en
communion avec tous les frères et sœurs de sa Famille. Comme tout don de Dieu, elle s’accueille
avec joie et reconnaissance.
2.9.Une option libre qui qualifie l’existence
Les scènes bibliques de vocation, les scènes impressionnantes des grands personnages de l’Ancien
Testament et, généralement plus simples, des disciples de Jésus de Nazareth, les scènes très
communes des chrétiens de l’Eglise primitive posent l’un en face l’un de l’autre, selon les cas, Dieu
(le Seigneur, l’Esprit Saint) dans sa majesté et son mystère, et l’homme dans toute sa vérité, sa peur
et sa générosité, dans sa faculté de résister et d’accepter.
Tout appel personnel de la part de Dieu s’adresse à la conscience la plus profonde de la personne ; il
en change l’existence non seulement dans ses conditions extérieures, mais aussi dans son cœur. La
vocation chrétienne est un appel à suivre le Christ sur une voie nouvelle qui comporte une
conversion.
Toute vocation spécifique qualifie de façon différente celui qui l’accueille : elle finalise son activité
à des objectifs apostoliques déterminés et entraîne l’assimilation de dispositions spirituelles et de
manières d’agir précises.
C’est ce qu’entend exprimer le Règlement par cette assertion concise : la vocation salésienne de
Coopérateur est « un libre choix qui qualifie l’existence ». Car elle interpelle la responsabilité
personnelle, sollicite sa réponse libre, implique sa participation au projet apostolique de Don Bosco
et l’assimilation de son esprit.
2.10.
Confiance en l’Esprit (art. 2 § 2)
Celui qui reçoit la vocation de Coopérateur peut l’accueillir avec confiance. Parce que l’Esprit Saint
est, pour ainsi dire, fidèle à lui-même et surtout généreux : quand il appelle un chrétien sur le
chemin salésien, il le rend capable de marcher d’un bon pas, il l’accompagne sans cesse, il le
« convertit » peu à peu, le soutient dans la fidélité et dans la joie. En un mot, il lui garantit sa
présence aimante. Assuré de pouvoir s’appuyer sur la force et la tendresse divines, le Coopérateur
ne manquera pas de s’adresser souvent, dans une prière simple et confiante, à Celui qui l’a appelé.
C’est ce que souligne le Règlement : « Pour réaliser ce projet salésien, le Coopérateur s’appuie sur
la fidélité de Celui qui l’a appelé ».
Pour étayer cette assertion importante, il renvoie à deux textes de l’Ecriture sainte qui méritent
d’être retranscrits : « Dieu est fidèle, lui qui vous a appelés » (1 Co 1, 9), affirme saint Paul aux
fidèles de Corinthe, qu’il reconnaît enrichis des dons de Dieu : « Il est fidèle, le Dieu qui vous
appelle » (1 Th 5, 24), répète-t-il aux chrétiens de Thessalonique.
2.11.
Le chemin salésien est ouvert à tous (art. 2 § 3)
La dernière et brève affirmation est des plus importantes : la vocation salésienne de Coopérateur
n’est pas un don réservé à une élite restreinte. « Tout chrétien, quelle que soit sa condition culturelle
ou sociale, peut s’engager sur ce chemin ».
Pour chercher des Coopérateurs, Don Bosco s’est tourné vers le vaste public des « bons
catholiques » de son temps [17]. Ses vues au sujet de cette institution étaient très larges : il
prévoyait une association nombreuse, ouverte aux catholiques appartenant à toutes les couches
sociales et largement répandue [18].
De fait, l’Association des Coopérateurs a compté et compte encore parmi ses membres des gens
appartenant à l’aristocratie, à la bourgeoisie, au prolétariat urbain et paysan ; des professionnels, des
professeurs, des maîtres et des maîtresses, des employés, des paysans, des ouvriers et des ouvrières
… Bref, la vocation de Coopérateur s’accorde avec n’importe quelle situation culturelle et sociale,
de la plus qualifiée à la plus modeste. Il y a de nos jours bien des manières de « travailler avec Don
Bosco ». Il suffit d’une volonté sincère de servir selon ses capacités personnelles et sa situation
propre : les articles 3 et 20 le répéteront.
[1] ACGS, 730, ainsi que 154.
[2] Cf. p. ex. Midali Mario, Il carisma di Don Bosco (Elle Di Ci Turin 1970), 97, 99 suiv.
[3] Cf. p. ex. Léon-Dufour Xavier, Vocabulaire de théologie biblique, les mots « élection »,
« vocation », « chemin », « don », (Cerf Paris, 1970).
[4] LG, 40b.
[5] Cf. LG, 31b, 33.
[6] Cf. LG, 35c, 41c.
[7] Cf. LG, 31b, 41d.
[8] Cf. LG, 47 ; PC 5a, 8a, 10a, 25.
[9] Cf. AA, 4h.
[10] LG, 41g.
[11] Cf. GS, 4a, 11a, 44b ; PO, 9b, 6b ; Auteurs divers, Les signes des temps, in Linee di
rinnovamento (Elle Di Ci Turin 1971) 15-37.
[12] GS, 1.
[13] AA 4h.
[14] Liturgie de la Pentecôte.
[15] AA, 3de.
[16] LG, 32c.
[17] Cf. RDB, II.
[18] Cf. MB XVIII, 161.
ARTICLE 3 - VERITABLE SALESIEN DANS LE MONDE 1
Le Coopérateur est un catholique qui vit sa foi en s’inspirant, à l’intérieur même de sa condition
séculière, du projet apostolique de Don Bosco :
–
il s’engage dans la même mission 2 auprès de la jeunesse et du peuple, sous une forme
associée et fraternelle ;
–
il vit en communion avec les autres membres de la Famille salésienne ;
–
il travaille pour le bien de l’Eglise et de la société ;
–
tout cela d’une manière adaptée à sa condition et à ses possibilités réelles.
1. Cf. Actes CGS SDB, 730, 739.
2.Cf. RDB IV.
L’article 3 décrit trois traits essentiels de la vocation salésienne du Coopérateur : son appartenance à
l’Eglise, sa marque laïque et sa touche salésienne. L’article suivant en proposera encore d’autres. Il
s’inspire de l’enseignement officiel du Chapitre général spécial des salésiens, ainsi que des
approfondissements et des clarifications qui ont suivi cette Assemblée extraordinaire. Le Chapitre
général définit le Coopérateur en ces termes : « Le Coopérateur, dans la pensée première de Don
Bosco, est un véritable salésien dans le monde, c’est-à-dire un chrétien, laïc ou prêtre, qui, bien que
sans le lien des vœux religieux, répond à sa vocation personnelle à la sainteté en s’engageant dans
une mission auprès de la jeunesse populaire selon l’esprit de Don Bosco, au service de l’Eglise
locale et en communion avec la Congrégation salésienne » [1].
3.1. Traits communs et traits spécifiques
Le fait que le Coopérateur « s’inspire […] du projet apostolique de Don Bosco » n’est pas un trait
parmi les autres, mais le signe global et décisif sous lequel se rangent tous les autres. En d’autres
termes, l’expression « projet apostolique de Don Bosco » désigne, de façon globale, tout ce qui
caractérise le profil du Coopérateur énumérées dans l’article.
Cette description souligne, d’un côté, les traits que le Coopérateur partage avec les autres groupes
de la Famille salésienne : sa vocation (dont a traité l’article précédent), sa mission auprès des jeunes
et du peuple, la forme associée et fraternelle sous laquelle il la réalise, son sens de la solidarité et de
la collaboration avec les autres membres de la Famille salésienne, sa recherche du bien de l’Eglise
et de la société, son esprit salésien qu’explicitera l’article suivant.
De l’autre côté, il met en lumière les traits qui le différencient : le caractère séculier de sa vie de
famille et de ses tâches temporelles, ses dons personnels de la nature et de la grâce, sa qualité
spécifique laïque ou ministérielle (dans la condition séculière) dont parlera l’article suivant.
Les traits communs, c’est-à-dire qu’il partage avec la Famille salésienne font de lui un « salésien » ;
ses traits spécifiques, un salésien « dans le monde » ou « séculier ».
Aussi le titre de l’article (qui reprend une affirmation du Chapitre général spécial [2] dit-il que le
Coopérateur est un « véritable salésien dans le monde ». L’adjectif « véritable » veut répondre à
ceux qui trouvent difficile de reconnaître que la vocation du Coopérateur soit « salésienne » : le
Chapitre spécial l’a justement déclaré avec beaucoup de fermeté. Ce n’est pas pour rien qu’il a
affirmé qu’il s’agit d’une « réalité véritablement rénovatrice », d’une « redécouverte » qui exige un
«changement radical de mentalité à tous les niveaux » [3].
La suite du Règlement détaillera en quoi consistent ces traits, tant communs que particuliers, du
profil du Coopérateur. Le moment est venu de faire à son propos quelques observations globales.
–
Sa présentation dans l’optique ecclésiale du Concile ;
–
Le fait que le Coopérateur est un « catholique » ;
–
Sa qualité de salésien « séculier »
–
La manière dont chaque coopérateur ou coopératrice participe au projet apostolique de Don
Bosco.
3.2.Perspective ecclésiale du Concile dans laquelle est décrit le profil du coopérateur
L’article présente le profil du coopérateur à la lumière des dimensions essentielles de l’Eglise,
remises en évidence par le Vatican II. Il s’ensuit que ses dispositions obéissent non à des critères
arbitraires, mais à une option théologique précise : c’est celle qu’a suivie le Concile pour décrire
l’Eglise. Le Chapitre général spécial l’a adoptée pour définir le profil de la Famille salésienne et des
groupes distincts qui la composent [4].
Selon la doctrine du Concile, l’Eglise :
–
Résulte d’une élection, d’une vocation et d’une sanctification (ou consécration) divines, dues
à la présence en elle de l'Esprit du Seigneur ressuscité ;
–
Est par constitution un mystère de communion, c’est-à-dire d’union des hommes avec Dieu et
entre eux, en vertu de la Parole et des sacrements, de la foi et de la charité ;
–
Est essentiellement missionnaire, participant de la mission du Christ et de son Esprit et, par
conséquent, envoyée dans le monde ;
–
Réalise sa mission dans le service de l’homme, à la suite du Seigneur Jésus, qui est venu non
pour être servi, mais pour servir ;
–
Remplit ce service à travers de multiples ministères (ordonnés, institués, exercés en fait),
fonctions et activités selon les besoins de l’homme dans son histoire ;
–
En elle, tous ses membres sont appelés à une unique sainteté – la perfection de la charité – à
réaliser dans les divers ministères et services et toujours sous les différentes formes de vie : les uns
et les autres ayant à leur origine des dons ou charismes variés de l’unique Esprit ;
–
Est le Sacrement universel du salut, c’est-à-dire le signe (ou témoin) et l’instrument (ou
médiatrice) de l’union des hommes avec Dieu et de l’unité du genre humain ;
–
Est le Peuple de Dieu pèlerin dans l’histoire appelé à se renouveler sans cesse et soutenu par
l’espérance dans sa marche vers son accomplissement final.
À noter que ces dimensions sont essentielles à la nature et à l’action de l’Eglise et, en elle, de tout
fidèle et de toute communauté qui se veut authentiquement d’Eglise. Elles sont en outre étroitement
liées entre elles et imbriquées les unes dans les autres, bien que selon des modalités différentes.
Ainsi la consécration reçue par le don de l’Esprit au Baptême et à la Confirmation engendre et
imprègne la communion, la mission, le service, les fonctions, les ministères … ; de même que la
communion imprime son dynamisme à la mission et à l’activité apostolique [5].
Les différents articles du chapitre I du Règlement et, en particulier, celui que nous étudions, tracent
le profil du Coopérateur en référence aux directives essentielles de l’Eglise. En effet :
–
Devenir Coopérateur, c’est suivre l’impulsion de l’Esprit et choisir un chemin pour vivre la
consécration de son Baptême et de sa Confirmation (art. 2, § 1) ;
–
Suivre la vocation salésienne de Coopérateur et s’engager dans la mission auprès de la
jeunesse et du peuple de Don Bosco, c’est une façon de participer à la mission de l’Eglise (art. 2 § 2
et art. 3) ;
–
Le Coopérateur accomplit la mission salésienne suivant la dynamique de la communion au
sein de l’Association, en relation avec les autres membres de la Famille salésienne (art. 3) et en
collaboration avec les autres forces ecclésiales (art. 6) ;
–
Il travaille pour le bien de l’Eglise et de la société en esprit de service (art. 3) ;
–
Il exerce des fonctions et des activités laïques ou des ministères ordonnés selon qu’il est
Coopérateur diacre ou prêtre (art. 4).
Cette ordonnance en fonction de l’Eglise tout à fait dans l’esprit du Concile n’est pas présente dans
ce chapitre d’introduction seulement, mais aussi dans tout le Règlement jusque dans l’agencement
même des chapitres. Celui-ci, en effet, ne suit pas des critères pratiques, mais s’inspire des options
ecclésiologiques précises dont il vient d’être question.
3.3.« Le Coopérateur est un catholique »
Pour devenir Coopérateur, il faut appartenir à l’Eglise catholique. Cette disposition respecte à coup
sûr la pensée de Don Bosco. Son Règlement s’adresse expressément aux « catholiques », et même
lorsqu’il utilise des termes généraux comme « fidèles » ou « chrétiens », le contexte indique
clairement qu’il vise les fidèles et les chrétiens catholiques. Il a voulu une association de
catholiques organisée comme une espèce de tiers ordre [6].
Fidèle à l’intention de notre Fondateur, l’article 3 précise que « le Coopérateur est un catholique » ;
l’article 6 déclare que « dans l’Eglise, l’“Association des Coopérateurs salésiens” est approuvée par
le Siège Apostolique comme Association publique de fidèles ».
Cela exclut que des chrétiens d’autres confessions ou des croyants d’autres religions puissent être
membres de l’Association des Coopérateurs tout en continuant à rester dans leur Eglise ou religion.
Un croyant non chrétien ou non catholique qui voudrait devenir Coopérateur devrait développer et
approfondir son intériorité religieuse (qui peut être bouddhiste, hindouiste, musulmane, hébraïque)
ou confessionnelle (p. ex. anglicane, protestante, orthodoxe) dans le sens d’une authentique
appartenance à l’Eglise guidée par le Successeur de Pierre.
Il ne faut pas interpréter cette précision indispensable du Règlement dans un sens négatif ni
restrictif : il s’agit de donner un sens vrai et sincère à la situation personnelle de catholique du
Coopérateur, ainsi qu’à l’appartenance des autres à des confessions chrétiennes ou des religions
différentes.
Il faut ajouter que dans leurs relations avec les adeptes d’autres religions et d’Eglises ou de
communautés non catholiques, les Coopérateurs doivent suivre les indications de Vatican II, et du
magistère pontifical et épiscopal qui a suivi, à propos de la relation de l’Eglise avec les religions
non chrétiennes et du dialogue œcuménique. L’article 16 § 1 parlera de la « collaboration au
dialogue œcuménique »
3.4.La qualité « séculière »
Le Chapitre général spécial a indiqué comment la vocation salésienne des Coopérateurs se distingue
de celle des autres groupes religieux de la Famille salésienne : « Les engagements chrétiens
découlant de la consécration baptismale-confirmationnelle peuvent être orientés par l’appel à
devenir membre de l’association des Coopérateurs salésiens : ces membres s’emploient à la
promotion intégrale des jeunes pauvres et abandonnés, mais ils le font au sein de leurs activités
temporelles et en dehors de l’engagement spécial d’une consécration religieuse ou séculière » [7]
(cette dernière est propre aux VDB et leur apporte la richesse particulière de la radicalité).
Ce point a demandé une très grande attention d’abord dans la rédaction du Nouveau Règlement,
puis dans la révision définitive de l’actuel Règlement de vie apostolique. Et c’est surtout à propos
de cette caractéristique « séculière » qu’ont été indispensables et déterminantes les contributions des
Coopérateurs et des Coopératrices. Car il s’agissait de formuler une spiritualité salésienne pour des
laïcs et des prêtres ou diacres qui ne vivent pas dans une communauté religieuse (comme les
salésiens et les Filles de Marie Auxiliatrice), mais dans le monde.
Or cette caractéristique séculière, qui est propre aux laïcs et aux prêtres ou diacres diocésains, et
qui, pour les laïcs, comporte la tâche (très soulignée par le Concile) [8] d’animer dans le sens
chrétien les réalités temporelles – la famille, le travail, l’économie, la culture, la politique … – fait
partie de la vie quotidienne des Coopérateurs et s’identifie à leur mission chrétienne.
Elle se vit le plus souvent de façon inconsciente. Mais ce qui compte surtout, c’est qu’elle soit
authentique, simple et rayonnante. De plus elle doit s’assimiler et se vivre avec spontanéité, sans
complications. c’est ainsi qu’il doit en être. Celui qui jouit d’une bonne santé vit sans penser aux
mécanismes compliqués de son corps.
Mais il était nécessaire d’en exprimer une description, une sorte de « carte d’identité ». Les sciences
médicales ne constituent pas la santé, mais lui sont utiles. Et ce n’était ni simple ni facile. On ne
pouvait certes pas réduire le profil des Coopérateur à celui des salésiens religieux en « modèle
réduit » ; ni non plus présenter l’idéal salésien des Coopératrices à partir de celui des Sœurs de Don
Bosco qu’on aurait amputé des traits liés aux vœux, à la vie commune etc. Les Coopérateurs et les
Coopératrices ne sont ni de religieux ne des sœurs, comme le sont, par leur vocation spécifique, les
SDB et les FMA.
La vocation propre des Coopérateurs est d’être des « salésiens dans le monde » sans le lien des
vœux de religion. Ce qu’il a été difficile de définir, c’est comment il est possible d’être un
« salésien Coopérateur » dans sa famille, son milieu de travail, le cadre de ses relations sociales, son
Eglise diocésaine et sa communauté paroissiale. Comment il est possible d’accomplir la mission
salésienne et d’en vivre l’esprit dans ces conditions de vie et de travail.
L’article 3 déclare que le Coopérateur s’inspire du projet apostolique de Don Bosco « à l’intérieur
même de sa condition séculière ». Tout le Règlement a essayé de repenser la mission et l’esprit
salésiens dans cette perspective « séculière » et de les formuler en termes concrets dans un langage
qui colle le plus possible au caractère séculier des Coopérateurs. On peut dire que la rédaction de
chaque chapitre et de chaque article a tenu compte de cette « dimension séculière salésienne ».
C’est évident pour le chapitre II qui traite précisément ce sujet. Mais elle est tout aussi présente
dans les chapitres suivants sur la communion et la collaboration, sur l’esprit salésien et sur la
formation. Et la direction de l’Association, elle aussi, a été conçue en vue de cette dimension
séculière.
3.5. Manière personnelle de participer au projet apostolique de Don Bosco
L’association compte des hommes et des femmes, des spécialistes et des ouvriers, des gens de
culture et des gens du peuple, des jeunes, des adultes et des personnes âgées, des chrétiens laïcs,
diacres et prêtres, des célibataires et des mariés, des gens qui travaillent dans les institutions civiles
et des institutions ecclésiastiques, et de ceux qui travaillent dans le cadre des œuvres des SDB et des
FMA ou d’autres groupes salésiens. Toutes ces connotations concernent l’identité personnelle.
Pour être objectif et coller à la vie, le Règlement devait tenir compte de tous et donner sa juste
valeur à l’apport de chacun : plus large et plus exigeante chez certains, et plus simple et plus
modeste chez d’autres, sans décourager personne, ni non plus privilégier qui que ce soit. Il ne fallait
pas exiger tout de tous, mais, comme l’avait fait Don Bosco, proposer à chacun tout et seulement ce
qu’il pouvait offrir selon ses possibilités et sa disponibilité.
Dans ce but, il aurait pu fixer une sorte de « plus petit commun dénominateur », valable pour tous.
Il aurait ainsi secondé les exigences de ceux qui ne peuvent offrir davantage (il s’agit souvent de
personnes âgées, méritantes et dignes de reconnaissance et d’estime). Mais par contre, il aurait
renoncé à proposer un engagement plus sérieux à ceux qui, capables de l’assumer et disposés à le
faire, se seraient trouvés déçus de ne pas y trouver des orientations pour un programme stimulant.
C’est pourquoi l’article 3 fixe l’orientation générale selon laquelle le Coopérateur ou la
Coopératrice réalise le projet apostolique de Don Bosco « d’une manière adaptée à sa condition et à
ses possibilités réelles ». Cette orientation générale se retrouve à travers tout le Règlement dans
chacun des domaines qu’il explore : la mission salésienne au service des jeunes, la communion et la
collaboration, la formation et l’organisation ; il ne propose à chacun que ce qui correspond à ses
possibilités et à sa disponibilité.
Mais, comme il se doit, il tient également compte de ceux qui se sentent appelés à une tâche
salésienne plus consistante et demandent avec insistance des orientations en conséquence. Car il y a
en fait beaucoup de Coopérateurs et de Coopératrices qui travaillent dans l’école, l’assistance
sociale ou la communication sociale ; il y a les noyaux de familles de Coopérateurs, le secteur des
jeunes Coopérateurs … Pour tous le Règlement prévoit des possibilités concrètes et variées de
travail apostolique salésien, dans la ligne des directives de Vatican II et du récent magistère salésien
officiel ; et il met à profit l’expérience positive des Coopérateurs, en particulier celle de ces vingt
dernières années pour concrétiser les directives de rénovation données par le Concile et les
salésiens.
[1] ACGS 730 et 739 ; cf ib. 154, 161-166, 169, 171-176, 727-745 ; Viganò Egidio, La Famiglia
salesiana, in ACS 304 ; Voir en outre la littérature citée aux notes 5, 15 et 17 de l’art. 1.
[2] Cf. ACGS 730, 739b.
[3] Ib.
[4] Cf. ACGS 1-191.
[5] Pour une présentation systématique et documentée de chacune de ces dimensions essentielles
d’être Eglise, voir : Midali Mario, Linee dinamiche di rinnovamento, in CGS, Linee di
rinnovamento. I Salesiani di Don Bosco oggi (Elle Di Ci Turin 1971) 63-83.
[6] Le règlement de Don Bosco porte les claires déclarations suivantes : Le Règlement des
Coopérateurs salésiens donne « les anneaux d’une chaîne par laquelle des catholiques de bonne
volonté peuvent s’unir aux Salésiens et travailler sur un plan commun et stable » (Au lecteur) ;
parmi les moyens de travailler pour le bien de la jeunesse, « nous venons seulement en proposer un
de plus : l’œuvre des Coopérateurs salésiens , en priant les bons catholiques qui vivent au milieu du
monde, de venir en aide aux associés de cette Congrégation [salésienne] » (II). Le Souverain
Pontife a assimilé cette Association aux anciens Tiers-Ordres, avec cette différence que […] notre
but principal est l’exercice actif de la charité envers le prochain et plus spécialement envers la
jeunesse » (III). Les italiques viennent du commentateur.
[7] ACGS, 169.
[8] Cf. LG 11, 31, 34-36, 41 ; AA 2, 4, 6-8, 11-14, 29 ; GS 43. Voir aussi les précisions contenues
dans CfL 15.
ARTICLE 4 : UNE UNIQUE VOCATION : DEUX FAçONS DE LA VIVRE
§ 1. L’association, telle que Don Bosco l’a conçue, est ouverte aux laïcs et au clergé séculier.
§ 2. Le Coopérateur laïc réalise son engagement et vit l’esprit salésien dans les situations ordinaires
de vie et de travail, selon sa sensibilité et ses caractéristiques de laïc ; il répand ainsi les valeurs
salésiennes dans son propre milieu.
§ 3. Le Coopérateur prêtre ou diacre séculier accomplit son ministère en s’inspirant de Don Bosco,
modèle éminent de vie sacerdotale. Dans ses options pastorales, il privilégie les jeunes et les
milieux populaires ; c’est là, pour lui, une façon d’enrichir l’Eglise où il travaille 1.
1. Cf. CIC can. 278.
Poursuivant la description du profil du Coopérateur, le Règlement présente ici deux qualifications
chrétiennes qui distinguent les membres de l’Association : la laïcité propre aux Coopérateurs laïcs
et le ministère ordonné propre aux Coopérateurs diacres ou prêtres diocésains.
4.1. L’intention de notre Fondateur (art. 4 § 1)
Ce visage de l’Association reflète une intention explicite de notre Fondateur [1]. Le premier
paragraphe l’exprime en ces termes : « L’Association, telle que Don Bosco l’a conçue, est ouverte
aux laïcs et au clergé séculier ».
Dans son histoire plus que centenaire, l’Association a toujours compté parmi ses membres des
chrétiens tant laïcs qu’ecclésiastiques. Le nombre des laïcs a toujours été majoritaire, et celui des
prêtres a varié selon les circonstances. C’est surtout au cours du rectorat des bienheureux don Rua
et Rinaldi qu’il y eut de nombreux prêtres parmi les Coopérateurs : directeurs diocésains, sousdirecteurs, décurions. Beaucoup d’activités à l’échelle locale et diocésaine en eurent à leur tête et
furent animées par eux [2]. Autour de 1950 et plus tard, leur présence dans l’Association se réduisit.
Par fidélité à l’intention de notre Fondateur et pour favoriser la relance indispensable de
l’Association dans ce secteur, selon les indications du Concile à propos de la collaboration entre les
ecclésiastiques et les laïcs, il a paru bon et même nécessaire de présenter dans le Règlement rénové
les deux profils distincts : le Coopérateur laïc et le Coopérateur diacre ou prêtre diocésain.
4.2. Deux qualifications distinctes mais complémentaires (art. 4 § 1)
Cette option ne se fit pas sans difficultés. Certains eurent l’impression que c’était accorder trop
d’importance à la distinction entre les deux situations que de l’inscrire dans le premier chapitre qui
donne les bases. D’autres apprécièrent à juste titre cette décision.
Pour obvier à ces difficultés, il faut préciser que les deux qualifications caractérisent profondément
la vie et l’action chrétienne et ecclésiale de leurs titulaires. Elles impriment aussi des traits
spécifiques à leur participation au projet apostolique de Don Bosco, comme l’expliquent les
paragraphes suivants de cet article.
Il faut donc les comprendre sans les déformer pour ne pas porter préjudice à l’unité de
l’Association, selon le rapport de communion et de collaboration entre la hiérarchie et le laïcat
proposé par Vatican II. Ces qualifications sont certes différentes, mais elles favorisent des relations
différenciées de communion et de collaboration au sein de l’Association et dans ses projets d’action
dans le milieu social et ecclésial. Le titre de l’article 4 souligne avec bonheur que l’appartenance au
laïcat ou à la hiérarchie constituent « deux façons de vivre » l’ « unique vocation » salésienne
commune à tous les Coopérateurs.
4.3. Le Coopérateur laïc (art. 4 § 2)
Dans son tracé général du profil du Coopérateur laïc, le deuxième paragraphe fait ressortir trois
traits qui concernent sa participation spécifique au projet apostolique de Don Bosco. Le
Coopérateur :
– « Réalise son engagement [apostolique] et vit l’esprit salésien dans les situations ordinaires de vie
et de travail ». C’est la condition théologique et sociologique de sécularité dans laquelle il participe
à la mission de l’Eglise selon l’esprit de Don Bosco.
– Accomplit tout cela « selon sa sensibilité et ses caractéristiques de laïc » . C’est son caractère
ecclésial et laïque, c’est-à-dire de chrétien laïque appelé à exercer son apostolat auprès de la
jeunesse et du peuple par l’exercice de sa fonction de culte, de prophétie (ou de témoignage) et
d’animation chrétienne de l’ordre temporel, largement développée par Vatican II dans sa
constitution sur l’Eglise et son décret sur l’apostolat des laïcs [3].
– « Répand ainsi les valeurs salésiennes dans son propre milieu ». Ce sont les valeurs spécifiques
du projet évangélique de Don Bosco réalisé selon des caractéristiques laïques dans la famille, le
mariage, le milieu de vie et de travail, et dans le cadre social. Ces valeurs sont décrites en particulier
au chapitre II du Règlement, consacré précisément à l’engagement apostolique, et au chapitre IV
qui traite de l’esprit salésien.
4.3.Le Coopérateur prêtre ou diacre (art. 4 § 3)
Dans son profil du Coopérateur qui appartient à la hiérarchie ecclésiastique, le troisième paragraphe
suit une ligne analogue. Il fait ressortir trois traits essentiels liés à sa manière séculière de participer
à la réalisation du projet apostolique de Don Bosco.
–
Il « accomplit son ministère en s’inspirant de Don Bosco, modèle éminent de vie
sacerdotale ». C’est la caractéristique salésienne de son ministère presbytéral ou diaconal.
–
« Dans ses options pastorales, il privilégie les jeunes et les milieux populaires ». Il choisit
ainsi pour son ministère un champ d’action qui s’accorde à la mission salésienne en faveur des
jeunes et du peuple.
–
« C’est là, pour lui, une façon d’enrichir l’Eglise où il travaille », parce que le projet
apostolique de Don Bosco est une forme concrète de la mission de l’Eglise [4], et que l’esprit
salésien est « un don du Seigneur à l’Eglise » comme le déclare l’article 26 du Règlement.
[1] Cela ressort clairement de sa pratique ainsi que de son Règlement qui prévoit un « prêtre »
diocésain comme décurion là où il n’y a pas de maisons salésiennes (V, 5) ; et il établit encore que
« Les prêtres […] sont dispensés de cette prière » du Pater et Ave à saint François de Sales (VIII 3).
[2] Cf. Ceria E., I Cooperatori Salesiani, un po’ di storia (SEI Turin 1952) 91 ; également id. Annali
della Società Salesiana (SEI Turin 1941), I 232.
[3] Cf. LG 34-36 ; AA 6-8.
[4] Cf. RVA art. 2 et CIC can. 276 § 2.
ARTICLE 5
L’Association dans la Famille salÉsienne
§ 1. L’Association des Coopérateurs est l’un des Groupes de la Famille salésienne. Avec la Société
de saint François de Sales, l’Institut des Filles de Marie Auxiliatrice et d’autres Groupes
officiellement reconnus 1, elle assume la vocation salésienne commune, et elle est coresponsable de
la vitalité du projet de Don Bosco dans le monde. Elle apporte à la Famille salésienne les valeurs
spécifiques de sa condition séculière, dans le respect de l’identité et de l’autonomie de chacun des
autres Groupes. Elle vit en relation particulière de communion avec la Société salésienne qui, de par
la volonté du Fondateur, joue dans la Famille un rôle de responsabilité spécifique.
1. Cf. ACS 304, p. 67-71
Un trait important du profil des Coopérateurs et des Coopératrices est que leur Association fait
partie de la Famille salésienne. Ce trait essentiel est présenté par l’article 5 de leur Règlement qui
développe les idées-forces suivantes :
1. L’appartenance de l’Association à la Famille salésienne ;
2. Sa configuration et sa responsabilité spécifiques au sein de celle-ci en rapport avec le projet de
Don Bosco ;
3.
Les valeurs spécifiques qu’elle y apporte ;
4. Son lien particulier de communion avec la Société de saint François de Sales.
5.1. Sens de la Famille salésienne aujourd’hui
Selon une lecture peu respectueuse de la vérité historique, Don Bosco aurait d’abord fondé la
Congrégation salésienne (1859), ensuite l’Institut des Filles de Marie Auxiliatrice (1872), et enfin
les Coopérateurs (1876). En réalité, cette lecture serait certainement inexacte si elle entendait faire
croire qu’il aurait fondé trois institutions parallèles, et cherché ensuite à les rapprocher pour les
unir.
Au contraire, Don Bosco a fondé une unique Association de forces apostoliques, il a constitué une
unique Famille spirituelle composée de groupes différents et complémentaires, même si dans la
pratique il n’est pas arrivé à réaliser cette unité sous une forme canonique adéquate [1]. « Dans
l’esprit et le cœur de Don Bosco, déclare le Chapitre général spécial (CGS), la Famille salésienne
est UNE ! Son unité originelle a sa racine dernière dans la communauté de l’esprit et de la mission,
et elle s’engage au service de la jeunesse et du peuple. Elle réalise ainsi, au niveau supérieur, une
véritable communauté dans laquelle tous les membres sont intégrés selon leurs dons, leurs fonctions
spécifiques et les différentes formes de vie possibles dans l’Eglise » [2].
A la lumière du magistère du Concile (Vatican II) sur les charismes que l’Esprit distribue aux
membres du Peuple de Dieu pour les rendre « aptes et disponibles pour assumer les diverses charges
et offices utiles au renouvellement et au développement de l’Eglise » [3], la Famille fondée par Don
Bosco a été reconnue par l’autorité comme « une réalité charismatique : c’est-à-dire un don fait à
l’Eglise par l’Esprit Saint et destiné à croître et à se prolonger dans le Peuple de Dieu, au-delà de
circonstances changeantes de lieu et de temps, selon une orientation précise et durable » [4].
Comme telle, elle constitue une des plus hautes valeurs religieuses qui intéresse radicalement le
profil des différents groupes qui lui appartiennent. C’est ce qu’a clairement perçu le CGS : « Les
salésiens ne peuvent repenser en toute vérité leur vocation dans l’Eglise sans se référer à ceux qui
sont avec eux les porteurs de la volonté du Fondateur »[5]
C’est pour la même raison que les autres groupes et, parmi eux les Coopérateurs, ont fait
explicitement référence à la Famille salésienne dans la définition de leur identité.
Selon le même Chapitre général, trois nécessités actuelles ont posé en termes nouveaux le problème
de la communion des forces salésiennes.
– « Le contexte social particulièrement sensible au processus de sécularisation nous oblige à
éviter toute forme d’isolement et d’autosuffisance, et à unir toutes nos forces pour réaliser plus
sûrement et plus efficacement les buts qui nous sont proposés.
– « Le contexte ecclésial. La redécouverte du peuple de Dieu comme grand protagoniste de
l’histoire du salut avec comme conséquence la promotion du laïcat, lequel prend dans l’Eglise une
place particulière en pleine coresponsabilité avec la hiérarchie et les religieux, nous offre la
possibilité de réaliser le grand projet de Don Bosco d’unir tous ceux qui désirent travailler selon son
esprit pour la jeunesse ».
– « L’extraordinaire ampleur et la complexité des problèmes des jeunes aujourd’hui incitent
notre zèle à accentuer les formes de répartition des forces qui travaillent dans ce secteur et leur
mutuelle collaboration. Il ne s’agit pas seulement d’une simple ‘stratégie de l’action’ à perspective
humaine. Il s’agit de bâtir ensemble ‘un futur’ à la lumière de l’Evangile pour la réalisation du
Royaume de Dieu » [6].
Le magistère conciliaire et postconciliaire sur la valeur ecclésiale d’un Fondateur et de son œuvre a
aidé à mieux comprendre Don Bosco et la Famille qu’il a fondée. Le Fondateur est suscité par Dieu
dans l’Eglise ; il est porteur d’un don ou charisme destiné au bien de tout le Peuple de Dieu ; la
hiérarchie en prend conscience, s’en réjouit et se sent enrichie de son apport spirituel et apostolique,
elle en bénit les valeurs, promeut et soutient le caractère propre de son charisme et exige que soit
sauvegardée son identité.
Don Bosco Fondateur et la Famille salésienne sont à comprendre dans cette optique ecclésiale, qui
stimule à aller au-delà des conceptions étroites qui réduisent Don Bosco et sa Famille à une
« propriété privée » des seuls continuateurs de son œuvre.
C’est ce qui a été perçu par le CGS, qui a déclaré officiellement : « La Famille salésienne est une
réalité d’Eglise et elle exprime dans l’Eglise la vocation de ses divers membres à remplir une
mission particulière selon l’esprit de Don Bosco ;
« – Elle y exprime aussi, en correspondance avec ce que l’Eglise a dit d’elle-même (à Vatican II), la
communion des divers ministères au service du peuple de Dieu ; elle intègre divers types de
vocations particulières, et par là manifeste la richesse du charisme du fondateur ;
« – Elle développe une spiritualité originale, de nature charismatique, qui enrichit le corps entier de
l’Eglise ; et en particulier elle présente un modèle de pédagogie chrétienne » [7].
5.2. Membres en raison de la vocation salésienne
Quels sont les groupes qui constituent la Famille salésienne ? Uniquement les trois que Don Bosco
a fondés ? D’autres également ? Lesquels ? Sont-ils tous sur le même plan ou faut-il faire des
distinctions ? Et dans ce cas, selon quels critères ? Ces questions et bien d’autres se sont posées au
sein des divers groupes dans le récent cheminement de réflexion sur la Famille salésienne.
Le CGS a tâché de faire la lumière sur une situation concrète plutôt confuse et flottante, mais sans
exclure aucun de ceux qui avaient quelque rapport avec la réalité salésienne. Il a ainsi distingué
divers types de groupes appartenant tous à la Famille apostolique de Don Bosco, mais ayant avec
elle des liens différents.
Le critère adopté a tout d’abord été celui de la vocation : la vocation salésienne commune fait que
certains groupes ont entre eux des liens plus étroits. Ce sont ceux auxquels l’Esprit Saint inspire de
rechercher la sainteté chrétienne en s’engageant dans la mission en faveur des jeunes et du peuple
selon l’esprit salésien. Ceux-ci se sentent alors tous ensemble coresponsables et collaborateurs dans
l’accomplissement de cette mission selon cet esprit. Il est clair que les trois groupes fondés par Don
Bosco lui appartiennent en vertu de leur vocation même.
Ensuite l’Esprit du Seigneur a enrichi la Famille salésienne d’autres groupes, en les faisant éclore de
sa vitalité en réponse à des exigences et à des situations nouvelles. Il s’agit évidemment de groupes
participant à la mission et non de simples destinataires de l’action salésienne. Parmi eux le CGS
énumère expressément les Volontaires de Don Bosco qui sont nées par la volonté du Père Filippo
Rinaldi à Turin, dans un contexte commun de salésiens, de Filles de Marie Auxiliatrice, de
Coopératrices et d’Anciennes Elèves [8].
Le même CGS a affirmé que les Anciens Elèves appartiennent à la Famille salésienne « au titre de
l’éducation reçue, ce qu’ils peuvent traduire dans des engagements apostoliques variés » [9]. Le
CG22 (1984) a approfondi le sujet et déclaré que « leur appartenance devient plus étroite lorsqu’ils
s’engagent à participer à la mission salésienne dans le monde » [10].
Divers Instituts religieux, issus en général de l’initiative de quelques salésiens, ont fait la demande
formelle d’être officiellement reconnus par le Recteur majeur comme appartenant à la Famille
salésienne au titre de leur vocation [11]. Ont obtenu jusqu’à présent cette reconnaissance les
Instituts religieux féminins suivants :
–
Les Filles des Sacrés-Cœurs de Jésus et de Marie, fondées en Colombie par le Père Luigi
Variara ;
–
Les Sœurs de la Charité de Miyazaki fondées au Japon par Mgr Vincenzo Cimatti et le Père
Antonio Cavoli ;
–
Les Salésiennes Oblates du Sacré-Cœur fondées en Calabre par Mgr Giuseppe Cognata ;
–
Les Apostoliques de la Sainte Famille fondées par le Coopérateur salésien le Card. Giuseppe
Guarino, archevêque de Messine ;
–
Les Sœurs missionnaires de Marie Auxiliatrice fondées en Assam (Inde) par Mgr Stefano
Ferrando ;
–
Les Filles du Divin Sauveur fondées en Amérique centrale par Mgr Pedro Arnoldo Aparicio,
évêque salésien de Saint-Vincent (Salvador) ;
–
Les Sœurs Ancelles du Cœur Immaculé de Marie fondées en Thaïlande par l’évêque salésien
missionnaire Mgr Gaetano Pasotti ;
–
Les Sœurs de Jésus Adolescent, fondées au Brésil par Mgr Vicente Priante [12].
Ont obtenu la reconnaissance officielle d’appartenance à la Famille salésienne l’Association des
Dames salésiennes fondées au Venezuela par le Père salésien Miguel Gonzalez ; ainsi que
l’Association de Marie Auxiliatrice rattachée au sanctuaire de Marie Auxiliatrice à Valdocco [13].
Ces différents groupes, surtout les trois premiers, institués par Don Bosco lui-même comme
fondement et centre vital de son œuvre, forment un éventail polychrome de forces qui représentent
toutes les conditions de vie et toutes les formes de travail apostolique salésien. Ils constituent une
merveilleuse richesse : une possibilité concrète de mieux répondre aux multiples exigences de la
mission, de l’esprit et de la fraternité suscités par Don Bosco ; mais à condition qu’ils se sentent
réellement une seule Famille et veuillent effectivement collaborer.
Cette vision rénovée de la Famille salésienne se résume ainsi au début de l’article 5 du Règlement :
« L’Association des Coopérateurs est l’un des groupes de la Famille salésienne. Avec la Société de
saint François de Sales, l’Institut des Filles de Marie Auxiliatrice et d’autres groupes officiellement
reconnus, elle assume la vocation salésienne commune, et elle est coresponsable de la vitalité du
projet de Don Bosco dans le monde ».
5.3. Le « mouvement » salésien
Il y a beaucoup d’autres groupes ou personnes qui gravitent autour de ceux qui viennent d’être cités
et qui ont avec eux divers types de liens, mais non en rapport avec la vocation salésienne ou avec
l’éducation reçue. Pris dans leur ensemble, ils forment un vaste « mouvement » salésien. La Famille
salésienne se situe au cœur de celui-ci comme centre unificateur et propulseur.
Par sa nature, la charité pastorale salésienne, précieux héritage du Fondateur, rayonne et crée des
relations. Don Bosco disait avoir besoin de tous, et il savait susciter autour de lui la sympathie et
des collaborations innombrables : il n’a jamais refusé ne fût-ce que la plus petite aide susceptible de
servir à sa cause. Il a eu beaucoup d’amis illustres et inconnus, personnages importants et simples
gens du peuple. Cette caractéristique de Don Bosco a continué à se trouver chez ses disciples.
Il s’est ainsi créé autour de sa Famille apostolique, prise dans le sens qu’on vient d’expliquer, un
vaste mouvement de personnes qui lui appartiennent « au sens large » pour employer la formule du
CGS : les jeunes auxquels est destiné le service salésien, leurs parents, les bienfaiteurs des œuvres
salésiennes, les sympathisants, les amis de Don Bosco [14] …
Le dynamisme social propre de ce mouvement a fait que Don Bosco devient le patrimoine non
seulement des salésiens, mais de l’Eglise entière et de l’humanité. En effet, tout en étant en soi un
dynamisme ecclésial, le « mouvement » salésien peut entraîner des forces diverses, même peu
homogènes, ayant des formes d’organisation variées, des intérêts de promotion humaine et
d’attention sociale différents, vu qu’il est ouvert à la collaboration même avec les non-chrétiens et
parfois avec les non-croyants. En bref, il peut polariser autour de Don Bosco et de son idéal des
personnes de bonne volonté, même si elles ne connaissent pas toujours à fond les valeurs centrales
de l’éducation salésienne exprimées par le Système préventif [15].
5.4. Projet unitaire, articulé et ouvert
Toutes ces considérations montrent avec clarté que la Famille salésienne est un projet de vie et
d’action unitaire, articulé et ouvert auquel on est appelé par l’Esprit Saint, et à la réalisation duquel
on participe de différentes manières.
5.4.1. « Coresponsable de la vitalité du projet de don bosco dans le monde » (art. 5)
C’est un projet unitaire parce que beaucoup de valeurs sont communes et doivent se réaliser
ensemble. Le CGS les a précisées comme ceci : « Voulant déterminer les éléments qui sont
communs entre les divers groupes [au sens strict] de la Famille salésienne, rappelons que
fondamentalement ils se résument dans le fait d’être appelés pour l’unique mission de salut propre à
Don Bosco, à réaliser selon son esprit. […] Le zèle commun pour le salut des jeunes suscite une
forme commune de fraternité [apostolique], certes différenciée dans ses expressions. L’action de
tous les membres de la Famille salésienne (entendue comme promotion intégrale et éducation à la
foi des jeunes pauvres) inclut en effet une orientation communautaire fraternelle, et elle met en jeu
une responsabilité commune (ou coresponsabilité), même si les expressions de cette action
apostolique se diversifient selon les temps, les personnes et les lieux […]. Mais dans cette grande
variété d’expressions, le « style de famille » caractéristique de Don Bosco est un élément d’unité
dans les rapports entre tous les membres, en même temps qu’une note typique de leur
apostolat » [16].
Le CG21 a complété ces indications générales en soulignant qu’il est indispensable que chaque
Province élabore un projet éducatif et pastoral « inculturé », c’est-à-dire adhérant à la situation et
aux exigences sociales, culturelles, religieuses et ecclésiales du lieu. A son élaboration et à sa mise
en œuvre devaient être opportunément convoqués les groupes de la Famille salésienne œuvrant sur
place et, parmi eux, les Coopérateurs et les Coopératrices [17].
Dans cet ordre d’idée, l’article 5 du Règlement déclare que l’Association est « coresponsable de la
vitalité du projet de Don Bosco dans le monde ».
5.4.2. « Apporte les valeurs spécifiques de sa condition séculière » (art. 5)
C’est un projet articulé parce qu’y travaillent des groupes avec leur identité propre. Le CGS a
énuméré les valeurs spécifiques suivantes : « Le type de consécration [religieuse pour les SDB, les
FMA et les autres Instituts religieux, séculière pour les VDB] et la forme de vie concrète
[sacerdotale ou laïque, célibat ou mariage] de chaque membre de la Famille salésienne donnent lieu
à des différences quant à la façon de réaliser la mission et de vivre l’esprit salésien. […] A la source
de ces diversités nous constatons toujours une différence de vocation concrète » [18], justement
celle de chaque groupe.
Chacun de ces groupes, spécialement au niveau de leurs Chapitres ou de leurs Assemblées
générales, a tenté de donner une définition rénovée de leur identité salésienne particulière et des
valeurs spécifiques que chacun apporte à la Famille unique. Tout cela est à présent codifié dans les
textes constitutionnels ou réglementaires de chaque groupe et expliqué dans des études
appropriées [19].
De son côté l’article 5 du Règlement de Vie apostolique des Coopérateurs déclare que l’Association
« apporte à la Famille salésienne les valeurs spécifiques de sa condition séculière, dans le respect de
l’identité […] de chacun des autres groupes ».
Ce sont les valeurs liées à l’apostolat séculier en famille, dans le mariage, dans le milieu de vie et de
travail, dans la vie sociale, sur le terrain de l’éducation chrétienne de la jeunesse, dans l’exercice
diocésains des ministères ordonnés ; ce sont les valeurs qui se rattachent à l’esprit de communion et
de collaboration nécessaires pour vivre les rapports réciproques au sein de l’Association et avec les
autres groupes de la Famille salésienne. Ils sont exposés dans les chapitres ii, iii et iv qui suivent.
5.4.3. Projet animé par l’Esprit
C’est un projet animé par l’Esprit qui suscite la fraternité de ceux qui y collaborent : « L’EspritSaint, affirme le CGS, tient unis ceux qu’il a appelés ensemble. A la base de notre salésianité, il y a
l’appel de l’Esprit-Saint en vue de la réalisation, dans une complexité organique, du salut des jeunes
pauvres et laissés à eux-mêmes selon l’esprit de Don Bosco. C’est à cette profondeur que les
membres de la Famille salésienne perçoivent l’authenticité de leurs liens réciproques » [20].
5.4.4. « Respect de l’autonomie de chacun des autres groupes » (art. 5)
C’est un projet qui, au dire du CGS, implique la communion dans une juste autonomie : « Les
divers éléments composant la Famille salésienne requièrent tous de pouvoir s’exprimer en forme
visible et institutionnalisée. Nous savons avec quelle insistance Don Bosco voulait rassembler
publiquement (même si c’était aussi avec beaucoup de souplesse) les forces de ses divers
collaborateurs. […] L’autonomie de chaque groupe est à garantir afin que chacun puisse exprimer
intégralement ses propres richesses. Mais il faut également réaffirmer le lien extérieur et fonctionnel
des groupes afin que soit aussi exprimée leur vocation salésienne commune » [21].
A ce sujet, le même Chapitre général a distingué dans le projet de Don Bosco deux aspects
intimement liés mais d’importance inégale :
1)
Les grandes intentions et motivations ou exigences, les valeurs d’unité de la Famille
salésienne dans la diversité des groupes en vue d’un service différencié au monde des jeunes ;
2) Les modèles sociologiques (une Famille unique) et ecclésiaux (constituée de deux Congrégations
religieuses et d’une sorte de tiers ordre) où il a introduit de façon concrète ces valeurs pour leur
garantir plus sûrement la durée et une efficience pratique plus grande.
Dans le délicat travail de rénovation de leurs Constitution ou Règlements, chaque groupe a précisé
tant son autonomie personnelle que ses relations, également de nature institutionnelle, avec les
autres groupes de l’unique Famille et, en particulier, son lien avec le Recteur majeur qui, en qualité
de successeur de Don Bosco, « est le père et le centre d’unité de la Famille salésienne » [22].
L’article du Règlement en question parle expressément du « respect de l’autonomie de chacun des
autres groupes », et consacre les articles 22-25 à la description des rapports de l’Association avec
eux.
5.5. Relation particulière avec la société salésienne (art. 5)
En ce qui concerne son lien avec les salésiens, l’article 5 affirme que l’Association « vit en relation
particulière de communion avec la Société salésienne qui, par volonté du Fondateur, joue dans la
Famille un rôle de responsabilité spécifique ».
Ce rôle a été défini de façon officielle par le CGS et le CG22 dans des textes rigoureux qui méritent
d’être retranscrits.
« C’est l’initiative même de l’Esprit-Saint inspirant Don Bosco d’accomplir telle mission selon tel
esprit qui permet d’entrevoir le rôle des salésiens dans la Famille salésienne.
« Ils ont avant tout une fonction de stabilité : ils vivent la mission et l’esprit salésiens dans la
consécration religieuse, selon la plénitude souhaitée par Don Bosco. Leur profession des conseils
évangéliques leur fournit de quoi assurer la stabilité et une harmonieuse créativité aussi bien à
l’extérieur, dans l’Eglise, qu’à l’intérieur, par rapport aux divers groupes qui composent la Famille.
« Ils ont en outre une fonction d’animation. Réalisant en eux-mêmes la plénitude de la consécration,
(du baptême, de la confirmation, et pour certains aussi de l’ordre), ils sont dans l’Eglise et dans la
Famille salésienne, les porteurs et les animateurs de la mission vue dans son intégralité, de la
promotion humaine jusqu’à la plénitude de la vie chrétienne.
« Enfin ils remplissent un rôle d’union, soit à l’intérieur des divers groupes, par l’animation dont
nous venons de parler, soit à l’extérieur parce qu’en esprit de service ils proposent les liens avec
chaque groupe et les liens de tous les groupes entre eux » [23].
Pour les salésiens, ce rôle n’est pas un titre de prestige ni de puissance, mais plutôt et
essentiellement un titre de service et, comme dit le Règlement, « un rôle de responsabilité » : « Par
la volonté de notre Fondateur, déclare l’article 5 des Constitutions SDB, nous avons dans la Famille
salésienne, des responsabilités particulières : maintenir l’unité de l’esprit, stimuler le dialogue et la
collaboration fraternelle pour un enrichissement mutuel et une plus grande fécondité
apostolique » [24].
[1]. Cf. ACGS, 153s, 171-173 ; Desramaut Francis, La storia primitiva della Famiglia salesiana
secondo tre esposti di Don Bosco, Desramaut F. – Midali M. (sous la direction de), La Famiglia
salesiana 17-44.
[2]. ACGS, 739.
[3]. LG, 12.
[4]. Viganò Egidio, La Famiglia salesiana 18.
[5]. ACGS, 151.
[6]. ACGS, 728, 160 ainsi que 158s.
[7]. ACGS 159 ; Viganò Egidio, La Famiglia salesiana 9-11.
[8]. Cf. Viganò Egidio, Le Recteur majeur aux Volontaires de Don Bosco in ACS n° 295, p. 55-79 ;
Midali Mario, Identità carismatico-spirituale della Famiglia salesiana, in Midali Mario (sous la
direction de), Costruire insieme la Famiglia salesiana (LAS Rome 1983) 172-181 ; Colomer José,
Identità salesiana delle Volontarie di Don Bosco nella Famiglia salesiana, ib. 289-354.
[9]. Const. SDB 1972,art. 5.
[10]. Const. SDB 1984, art. 5.
[11]. Cf. Reconnaissance d’appartenance à la Famille salésienne. Orientations adoptées par le
Conseil supérieur pour la reconnaissance, in ACS 304, p. 67-71.
[12]. Les dates de la reconnaissance officielle sont les suivantes :
– Institut des Filles des Sacrés-Cœurs de Bogotà : lettre du Recteur majeur (LRM) 11.01.82, in
ACS 304 (avril-juin 1982), p. 81-82 ;
– Institut des Salésiennes Oblates du Sacré-Cœur : LRM du 24.12.83, in ACG 312 (janvier-mars
1985), p. 71s. [non traduite en français] ;
– Institut des Apostoliques de la Sainte-Famille : LRM du 24.12.84, in ACG 312 (janvier-mars
1985), p. 81-83 ;
– Institut des Sœurs de la Charité de Miyazaki : LRM du 31.03. 86, in ACG 317 (avril-juin
1986), p. 55-56 ;
– Institut des Sœurs missionnaires de Marie Auxiliatrice de Shillong : LRM du 08.07.86, in
ACG 319 (octobre-décembre 1986), p. 50-53 ;
– Institut des Filles du Divin Sauveur : LRM du 24.02.87, in ACG 321 (avril-juin 1987), p. 7981 + 82-84 ;
– Institut des Sœurs Ancelles du Cœur Immaculé de Marie : LRM du 28.02.87, in ACG 321
(avril juin 1987), 81-84 ;
– Institut des Sœurs de Jésus Adolescent : LRM du 23.12.88, in ACG 329 (avril-juin 1989), 8184.
[13]. Association des Dames salésiennes : LRM du 29.12.88, in ACG 329 (avril-juin 1989), p. 8488 ; Association de Marie Auxiliatrice : LRM du 24.07.89, in ACG 331 (octobre-décembre 1989),
p. 54-66.
[14]. Cf. ACGS, 177.
[15]. Cf. Const. SDB 1984, art. 5 et Le Projet de vie des salésiens de Don Bosco, tome I (Rome
1986), p. 125-126
[16]. ACGS, 161 et 165.
[17]. Cf. ACG21, 69-75.
[18]. ACGS, 165.
[19]. Cf. Midali M. (sous la direction de), Costruire insieme la Famiglia salesiana (LAS Rome
1983) les apports consacrés à la définition de la nature de la Famille salésienne en général, des
SDB, des FMA, des VDB et d’autres Groupes. Voir les commentaires des Constitutions rénovées
des différents Groupes de la Famille salésienne publiés récemment ou en voie de publication.
[20]. ACGS, 171.
[21]. ACGS, 172.
[22]. Const. SDB 1984, art. 126.
[23]. ACGS, 173. Voir aussi la déclaration du même Chapitre général spécial qui définit le rôle des
salésiens vis-à-vis des Coopérateurs : ACGS, 732.
[24] Cf. les art. 23 et 24 du RVA.
ARTICLE 6
LE CARACTÈRE ECCLÉSIAL DE L’ASSOCIATION
§ 1. Dans l’Eglise, l’« Association Coopérateurs salésiens » est approuvée par le Siège
Apostolique 1 comme Association publique de fidèles et participe au patrimoine spirituel de la
Société de saint François de Sales 2. Ses membres :
– collaborent activement à sa mission au nom de l’Eglise,
– en union avec la Congrégation salésienne sous l’autorité du Recteur majeur,
– en esprit de fidélité aux évêques et en collaboration avec les autres forces ecclésiales 3.
§ 2. L’Association des Coopérateurs salésiens jouit dans l’Eglise d’une personnalité juridique
publique 4. Son siège central est à Rome.
1. Pie IX, Bref Cum sicuti (9 mai 1876), MB XI, 77, 546.
2. Cf. CIC, can. 301,3 et 303.
3. Cf. CIC, can. 311, 312-320.
4. Cf. CIC, can. 313.
L’article 5 présente l’Association comme une réalité charismatique au sein de la Famille salésienne
et de ses Groupes porteurs de la vocation salésienne commune, comme un don de l’Esprit à l’Eglise.
Cet article 6 la présente comme une réalité juridique qui a sa place dans les structures officielles de
l’Eglise. Les deux aspects, charismatique et juridique, ne doivent pas simplement se juxtaposer ni,
pis, s’opposer l’un à l’autre : ils sont des aspects complémentaires de l’identité de l’Association. De
plus, la nature charismatique de l’Association préside à son image juridique dans l’Eglise et la
caractérise.
Cela reflète une orientation fondamentale de son Fondateur Don Bosco, qui a défini les traits
juridiques de l’Association des Coopérateurs à partir de leur disponibilité chrétienne à coopérer
avec les salésiens pour le bien de la jeunesse et du peuple, autrement dit à partir de l’origine et de la
nature charismatique de l’Association même.
Il faut noter que l’article 6 reprend justement les orientations fondamentales que notre Fondateur a
mises dans son Règlement, et les propose sous une forme rénovée sur la base du nouveau Code de
droit canonique.
6.1. Association publique rattachée à la Société salésienne (art. 6 § 1)
Le préambule et l’article 1er disent que, dès le début de l’œuvre des Oratoires, Don Bosco a cherché
à dépasser le stade d’association privée où se trouvaient ses collaborateurs ou coopérateurs, et de
conférer à leur collaboration un caractère public sous forme d’une association approuvée par
l’archevêque de Turin d’abord, et par le Pape ensuite. Dans ce but, il élabora, en un premier temps,
quelques indications ou normes pratiques ; plus tard, quelques articles insérés dans les divers projets
de Constitutions de la Société salésienne (les fameux articles sur les « salésiens externes ») et, enfin,
le Règlement de 1876 où l’Association équivaut à un « tiers ordre », mais dont le but est moins la
dévotion que l’apostolat [1].
Par fidélité à ces intentions de notre Fondateur et en conformité avec le nouveau Code de droit
canonique, le paragraphe 1er de l’article 6 présente les Coopérateurs salésiens comme une
« Association publique de fidèles » qui « participe au patrimoine spirituel de la Société de saint
François de Sales ». Cette double qualification mérite quelques lignes de commentaire.
– « Association publique de fidèles » : selon le Code rénové, « les associations de fidèles érigées
par l’autorité ecclésiastique compétente sont appelées associations publiques » [2]. C’est
précisément le cas de l’Association des Coopérateurs salésiens à partir du 9 mai 1876, date où elle
fut en fait reconnue par Pie IX dans le bref Cum sicuti, auquel renvoie explicitement la note 1 de
l’article que nous étudions.
– Association équivalant à un tiers ordre : toujours selon le Code, « les associations dont les
membres, participant dans le monde à l’esprit d’un institut religieux, mènent la vie apostolique et
tendent à la perfection chrétienne sous la haute direction de cet institut, sont appelés tiers ordres ou
portent un autre nom approprié » [3]. On connaît la distinction traditionnelle entre « premier
ordre », « second ordre » et « tiers ordre » qui indique respectivement l’institut religieux masculin
(p. ex. les franciscains, les dominicains), l’institut religieux féminin frère (p. ex. les franciscaines,
les dominicaines) et l’association de fidèles unie à l’institut religieux masculin et dirigée par lui.
Dans le cas des Coopérateurs, leur Association équivaut à un tiers ordre sous le nom officiel
d’« Association des Coopérateurs salésiens », parce qu’elle a toutes les caractéristiques énumérées.
En effet :
1. Elle est une Association de vie apostolique : expression qui a inspiré le titre actuel du
Règlement ;
2. Elle se rattache à un institut religieux, la Société de saint François de Sales : c’est pourquoi ce
Règlement a été approuvé par la Congrégation des Religieux et non par le Conseil pontifical des
laïcs ;
3. Elle « participe au patrimoine spirituel » de cette Société : ce sont toutes les valeurs salésiennes
qui appartiennent au projet apostolique de Don Bosco et que partagent les Groupes de la Famille
salésienne, indiqués aux articles 3 et 5 du Règlement ;
4. Elle est placée « sous la haute direction » de la Société de saint François de Sales, dans le sens
défini par le Règlement même.
Cette configuration juridique de l’Association a comme implication générale que vaut pour elle la
législation ecclésiastique sur les « associations de fidèles » [4] et en particulier sur les « associations
publiques » [5].
Cette législation concerne, en général, les matières suivantes qui intéressent directement les
Coopérateurs :
– Existence et finalité des associations de fidèles (can. 298) ;
– Droit d’association des fidèles (can. 299) ;
– Compétence de l’autorité ecclésiastique dans l’érection d’associations (can. 300 et 301) ;
– Associations cléricales (can. 302) ;
– Tiers ordres et associations équivalant à un tiers ordre (can. 303) ;
– Statuts de l’association et matières qu’ils doivent définir (can. 304) ;
– Vigilance de l’autorité ecclésiastique sur les associations (can. 305) ;
– Condition pour jouir des droits et privilèges de l’association (can. 306) ;
– Réception des membres dans l’association (can. 307) ;
– Et leur renvoi (can. 308) ;
– Compétence des associations (can. 309) ;
– Obligations des instituts religieux auxquels est unie une association (can. 311).
La législation concernant les associations publiques traite des sujets suivants qui intéressent
l’Association des Coopérateurs :
– Autorité compétente pour les ériger (can. 312) ;
– Personnalité juridique de ces associations (can. 313) ;
– Approbation des Statuts (can. 314) ;
– Haute direction ecclésiastique (can. 315) ;
– Condition pour l’admission et le renvoi valides d’un candidat (can 316) ;
– Administration des biens de l’association (can. 319) ;
– Suppression de l’association (can. 320) ;
Dans la révision du Règlement en vue de son approbation, il a fallu tenir compte de cette législation
canonique et des normes qui la concernent. Le commentaire de chaque article souligne de fois en
fois les aspects juridiques du sujet étudié.
L’article 6 se limite à énumérer quelques implications majeures liées aux deux caractéristiques de
l’Association des Coopérateurs salésiens qui ont été expliquées plus haut. Il y en a quatre, toutes
importantes, et à comprendre dans le cadre normatif proposé par le Règlement.
6.2. Les membres collaborent à la mission salésienne au nom de l’Eglise
(art. 6 § 1)
Comme membres d’une association publique (la seconde période l’article parle des « membres » et
non de l’Association comme telle), pour réaliser la mission salésienne, les Coopérateurs et les
Coopératrices agissent non seulement comme membres de l’Eglise, comme tous les baptisés, mais
« au nom de l’Eglise » et, de façon spécifique, des pasteurs qui la dirigent et l’animent. En d’autres
termes, leur apostolat salésien est reconnu officiellement par l’autorité ecclésiastique, est autorisé
par elle, fait partie de la mission de la communauté chrétienne tout entière et en manifeste de façon
publique la réalisation pratique.
« Les associations publiques, dit le canon. 313, par le décret même de l’autorité ecclésiastique
compétente qui les érige, […] reçoivent la mission, dans la mesure où cela est requis, pour
poursuivre au nom de l’Eglise les buts qu’elles se proposent elles-mêmes d’atteindre ». Dans le cas
des Coopérateurs, cette mission canonique concerne leur engagement apostolique et la façon de le
réaliser, l’un et l’autre définis dans leur Règlement.
6.3. En union avec la Congrégation salésienne sous l’autorité du Recteur majeur (art. 6 § 1)
Comme « membres » d’une Association reliée à la Société de saint François de Sales, les
Coopérateurs et les Coopératrices agissent dans le cadre de leurs liens particuliers avec cette Société
et avec son Recteur majeur. Ces liens sont indiqués dans les articles 23 et 24 du Règlement qui
définissent, pour les Coopérateurs, ce qu’établissent les canons 303 et 317 § 1 pour les associations
assimilées aux tiers ordres.
6.4. Fidélité aux évêques et collaboration avec d’autres forces ecclésiales
(art. 6 § 1)
Comme membres d’une association publique insérée dans l’Eglise, les Coopérateurs et les
Coopératrices travaillent sans se refermer sur eux-mêmes, mais, au contraire, en s’ouvrant à la
collaboration et, selon l’article du Règlement, « en esprit de fidélité aux évêques et en collaboration
avec les autres forces ecclésiales ».
Une insistance sur ce point se trouve au canon 311 rappelé expressément dans la note 3 du
Règlement. Il dit : « Les membres des instituts de vie consacrée, qui dirigent ou assistent les
associations unies de quelque manière à leur institut, veilleront à ce que ces associations apportent
leur aide aux œuvres d’apostolat existant dans le diocèse, surtout en coopérant, sous la direction de
l’Ordinaire du lieu, avec les associations qui sont ordonnées à l’exercice de l’apostolat dans le
diocèse ».
Cette norme est déterminée par la loi de la communion qui doit animer tous les membres de la
communauté chrétienne, paroissiale et diocésaine. Cette communion devient effective par la
collaboration réciproque entre les personnes et entre les groupes. Dans beaucoup de diocèses et de
paroisses, elle trouve aujourd’hui une application concrète dans la « pastorale organique » promue
par Vatican II [6] : par elle, les différentes forces apostoliques présentes au niveau paroissial et
diocésain collaborent entre elles à l’élaboration et à la mise en œuvre du plan pastoral en
communion avec leurs curés et sous la haute direction de leur évêque. Les articles 17 § 2 et 18 du
Règlement traitent de ce sujet.
6.5. L’Association jouit d’une personnalité juridique publique (art. 6 § 2)
Une quatrième implication fondamentale regarde le fait que « l’Association des Coopérateurs
salésiens jouit d’une personnalité juridique publique » selon le canon 313 et dans le cadre de son
Règlement. Cette qualification lui a été conférée par le décret d’érection et avec l’approbation
subséquente de son Règlement. Le Code explique en quoi elle consiste : en voici quelques extraits
qui concernent directement l’Association des Coopérateurs salésiens, en particulier à propos de son
organisation, des Conseils aux divers niveaux, de l’administration des biens, de ses droits et de ses
devoirs dans l’Eglise.
« Les personnes juridiques sont […] des ensembles de personnes ou de choses ordonnés à une fin
qui s’accorde avec la mission de l’Eglise et dépasse les intérêts des individus. Les fins s’entendent
d’œuvres de piété, d’apostolat, de charité spirituelle ou temporelle » [7].
Il s’agit donc de l’Association des Coopérateurs entendue comme ensemble de personnes, et des
biens de l’Association même.
« Un ensemble de personnes, qui doit être constitué d’au moins trois personnes [d’où le nombre
minimum de trois membres requis pour les divers Conseils des Coopérateurs], est collégial si ses
membres en déterminent l’action en prenant part en commun aux décisions à prendre à égalité de
droit ou non, selon le droit et les statuts ; sinon il est non collégial.
« Un ensemble de choses ou fondation autonome consiste en des biens ou des choses spirituelles ou
matérielles ; il est dirigé, selon le droit et les statuts, par une ou plusieurs personnes physiques, ou
par un collège » [8]. Les Conseils des Coopérateurs aux différents niveaux constituent des
ensembles de personnes à caractère collégial. Aux articles 44 § 1 et 49, le Règlement détermine les
personnes physiques et collégiales chargées de l’administration des biens de l’Association.
« Les personnes juridiques publiques sont des ensembles de personnes ou de choses, constitués par
l’autorité ecclésiastique compétente afin de remplir au nom de l’Eglise, dans les limites qui leur ont
été fixées et selon les dispositions du droit, la charge propre qui leur a été confiée en vue du bien
public » [9].
« Représentent la personne juridique publique, en agissant en son nom, ceux à qui cette compétence
a été reconnue par le droit universel ou particulier, ou par ses statuts propres » [10]. C’est déterminé
par les articles du Règlement concernant le Recteur majeur (art. 23) et le Coordinateur (art. 44 § 2 et
45 § 2).
« La personne juridique est, par sa nature, perpétuelle ; cependant elle s’éteint si elle est supprimée
légitimement par l’autorité compétente, ou si, pendant une durée de cent ans, elle cesse
d’agir » [11].
Comme personne juridique publique, l’Association des Coopérateurs salésiens peut poser, selon les
façons prévues par son Règlement, des actes officiellement reconnus dans l’Eglise qui concernent
l’apostolat de l’Association, la collaboration au sein de l’Association et avec les forces apostoliques
qui lui sont étrangères, l’acceptation des candidats, la formation et la démission de ses membres,
son organisation aux divers niveaux.
Dans les pays où l’Eglise et l’Etat entretiennent des rapports concordataires, l’Association peut se
valoir de cette qualité dans ses relations avec les autorités civiles du lieu, si c’est prévu dans le
concordat.
Enfin, en tant qu’association publique, elle jouit d’un siège central propre à Rome auprès de la
direction générale de la Société de saint François de Sales.
6.6. Implications spirituelles
Cette configuration juridique de l’Association des Coopérateurs salésiens dans l’Eglise, au-delà des
droits et privilèges mentionnés, apporte avec elle quelques conséquences spirituelles importantes
pour tout Coopérateur et Coopératrice : la nouvelle prise de conscience d’être membres d’un
Groupe organisé et différencié, qui a sa place dans la vie de l’Eglise, mystère de communion, et de
participer de façon plus efficace et évidente à sa mission, en réalisant le projet apostolique de Don
Bosco. C’est un idéal ecclésial stimulant, qu’il n’est possible d’atteindre que par un engagement
renouvelé de chaque Coopérateur et de leur Association tout entière.
[1]. RDB, iii.
[2]. CIC, can. 301 § 3.
[3]. CIC, can. 303.
[4]. Cf. CIC, can. 298-311.
[5]. Cf. CIC, can. 312-320.
[6]. Cf. LG, 23 ; CD, 6, 9-10, 17a, 30b, 35b ; PC, 23 ; AA, 23-24 ; AG, 29-34.
[7]. CIC, can. 114 § 1 et 2.
[8] CIC, can. 115 § 2 et 3.
[9] CIC, can. 116 § 1.
[10] CIC, can. 118.
[11] CIC, can. 120 § 1.
CHAPITRE II
ENGAGEMENT APOSTOLIQUE
« Vous êtes le sel de la terre. Vous êtes la lumière du monde. Que votre lumière brille devant les
hommes : alors, en voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux
cieux » (Mt 5,13-16).
Ce texte bref est extrait de l’Evangile des béatitudes, dans le cadre d’un projet de vie qui rend les
personnes vraiment bienheureuses. Comme telles, elles sont appelées à être le sel de la terre et la
lumière du monde.
Le sel a une grande utilité pour la vie individuelle (cf. Lc 14,34) ; mais s’il perd la propriété qui lui
donne sa saveur, il n’y a plus moyen de la lui rendre. C’est la même chose pour les disciples : ils
doivent accomplir une tâche analogue, autrement dit se faire promoteurs d’une qualité de vie
vraiment évangélique pour ceux au milieu de qui ils vivent et agissent, et ils sont les seuls à pouvoir
le faire. S’ils deviennent intimement infidèles à l’esprit de leur mission, ils ne servent plus à rien.
L’image de la lumière est courante dans l’Ancien Testament et dans le judaïsme : Israël selon Is
42,6, le Serviteur de Dieu selon Is 49,6, est la lumière des païens. Dans le judaïsme, Dieu, Israël, la
loi, le temple et quelques personnages éminents sont appelés « la lumière » ou « la lampe » du
monde. Jésus se qualifie lui-même comme « la lumière du monde » (Jn 8,12). De la même manière
les disciples aussi doivent être porteurs de lumière pour le monde, c’est-à-dire pour l’humanité, par
le témoignage de toute leur vie.
En effet, dans leur vie ordinaire ils ont une responsabilité non seulement envers eux-mêmes, mais
aussi vis-à-vis d’autrui. Dans un monde obscur et oublieux de Dieu, ils doivent donner la preuve
d’être des « fils de la lumière » (Lc 16,8), ils doivent montrer ouvertement la lumière de leur
condition de disciples et de chrétiens, pour que les hommes en soient « édifiés », c’est-à-dire
amenés à rendre gloire à Dieu, « car tout est de lui, et par lui, et pour lui » (Rm 11,36).
Les bonnes œuvres manifestent clairement comment tout cela doit se réaliser : par le témoignage
ouvert et courageux de la foi personnelle à travers toute sa vie et son engagement apostolique. Et
cela non pour être remarqués et loués par les hommes (Mt 6,1-18), mais « pour rendre gloire à notre
Père qui est aux cieux ».
Le texte introduit très bien à la compréhension sage et éclairée des contenus du deuxième chapitre
consacré justement à présenter l’engagement apostolique du Coopérateur dans le concret de sa vie
familiale, sociale, professionnelle, culturelle, politique, ecclésiale et salésienne. Dans notre contexte
de pleine laïcité il doit remplir une mission qui cherche à favoriser une qualité de vie humaine et
chrétienne pour tous ceux avec qui il vit et travaille, et en particulier pour les destinataires
privilégiés de son engagement apostolique : les jeunes et le peuple.
PRÉAMBULE
1.
Contenus principaux du chapitre
Le chapitre ii du Règlement de Vie apostolique traite de l’engagement apostolique du Coopérateur
salésien, en lui consacrant une place importante de douze articles avec trois séries de contenus :
– Les articles 7-12 traitent de l’engagement salésien du Coopérateur dans le quotidien, en particulier
de ses engagements familiaux (art. 8-9), socio-politiques (art. 10-11) et socio-culturels (art. 12).
– Les articles 13-17 parlent de l’engagement du Coopérateur dans les activités typiquement
salésiennes, en rapport avec les jeunes, le peuple et les missions, et donne des indications sur le
genre de service éducatif, la méthode du Système préventif et les structures où il travaille.
– L’article 18, enfin, indique comment ce vaste engagement s’exerce toujours dans le cadre de
l’Eglise universelle et surtout locale.
Le chapitre décrit comment le Coopérateur réalise sa vocation à l’apostolat, commune à tous les
catholiques, selon la vocation salésienne qui le pousse à s’engager comme Don Bosco dans la
mission en faveur des jeunes et du peuple et à en vivre l’esprit.
De cette façon, le chapitre cherche à tracer quelques aspects importants de ce qui est communément
appelé la « spiritualité séculière ». Cette caractéristique non exclusive des chrétiens laïcs et des
diacres et prêtres diocésains donne sens et force à toutes les activités apostoliques du Coopérateur
dans son effort de transformer les réalités séculières selon le Christ Seigneur.
2.
Concept conciliaire de la sécularité
Le substantif « sécularité » et l’adjectif « séculier » ont des sens différents dans la littérature
théologique et dans le langage religieux courant. Pour éviter de fâcheux malentendus, il est
nécessaire d’en préciser la signification en nous rapportant à l’enseignement officiel de Vatican II et
du magistère pontifical postconciliaire qui distingue, sans les opposer, la « dimension » séculière du
« caractère » séculier.
« Comme l’affirme Paul VI, déclare l’exhortation apostolique Christifideles laici de Jean Paul II,
‘l’Eglise a une authentique dimension séculière, inhérente à sa nature intime et à sa mission’[1].
[…] L’Eglise, en effet, vit dans ce monde […] et est envoyée pour continuer l’œuvre rédemptrice de
Jésus-Christ ; cette œuvre ‘qui concerne essentiellement le salut des hommes, embrasse aussi le
renouvellement de tout l’ordre temporel’[2].
« Il est certain, que tous les membres de l’Eglise participent à sa dimension séculière ; mais cela de
façons diverses. En particulier la participation des fidèles laïcs a une modalité de réalisation et de
fonction, qui, selon le Concile, leur est “propre et particulière” : c’est cette modalité qu’on désigne
du nom de “caractère séculier” »[3].
Le texte célèbre de la constitution Lumen gentium auquel il se réfère ici déclare : « Le caractère
séculier est le caractère propre et particulier des laïcs. En effet, […] la vocation propre des laïcs
consiste à chercher le règne de Dieu précisément à travers la gérance des choses temporelles qu’ils
ordonnent selon Dieu. Ils vivent au milieu du siècle, c’est-à-dire engagés dans tous les divers
devoirs et ouvrages du monde, dans les conditions ordinaires de la vie familiale et sociale dont leur
existence est comme tissée. A cette place, ils sont appelés par Dieu pour travailler comme du
dedans à la sanctification du monde, à la façon d’un ferment, en exerçant leurs propres charges sous
la conduite de l’esprit évangélique, et pour manifester le Christ aux autres avant tout par le
témoignage de leur vie, rayonnant de foi, d’espérance et de charité. C’est à eux qu’il revient, d’une
manière particulière, d’éclairer et d’orienter toutes les réalités temporelles auxquelles ils sont
étroitement unis, de telle sorte qu’elles se fassent et prospèrent constamment selon le Christ et
soient à la louange du Créateur et Rédempteur »[4].
2.1 Concept humain et chrétien de la sécularité
Le texte signale expressément deux aspects constitutifs de cette sécularité chrétienne et laïque : l’un
est sociologique ou, si l’on veut, un donné humain de fait ; l’autre est théologal ou chrétien, et
comporte une vocation et une mission.
Au sens sociologique, la sécularité indique avant tout le fait de « vivre dans le monde », « dans les
conditions ordinaires de la vie familiale et sociale ». Elle indique en outre le fait d’« être impliqués
dans les devoirs et les affaires du monde » et d’exercer une « tâche propre » ou travail. Bref, le mot
« sécularité » recouvre toutes les réalités humaines et temporelles, avec leurs structures et leur
évolution, qui tisse l’existence quotidienne de chacun. Dans le cas des Coopérateurs et des
Coopératrices, il s’agit de leur vie et de leur activité ordinaires en famille, dans le mariage, dans le
travail et, de façon plus générale, de leurs relations avec autrui.
Au sens chrétien (c’est ici le point qui qualifie et spécifie le caractère séculier du fidèle laïc), elle
indique l’engagement à faire en sorte que, du dedans, cette réalité quotidienne soit « ordonnée selon
Dieu », que toutes les activités « soient faites selon le Christ », c’est-à-dire suivant son plan ou son
Règne qui, comme le dit plus loin le texte, « est règne de vérité et de vie, règne de sainteté et de
grâce, règne de justice, d’amour et de paix »[5]. Travailler à ce que les relations interpersonnelles
dans le cadre de la famille, du groupe humain où l’on travaille, des rapports civiques et sociaux
soient inspirées et guidées par la justice, l’amour , la liberté et la paix, à l’exemple du Christ et en
conformité avec son message, voilà ce qui spécifie le caractère séculier du chrétien laïc et le
différencie de la sécularité commune à tous les hommes.
La sécularité humaine implique de participer aux conditions de vie communes à tous et d’assumer
ses responsabilités familiales et sociales. La séculatité chrétienne comporte en outre la volonté de se
faire guider en tout par l’esprit évangélique, d’éclairer et d’ordonner les relations humaines selon
les exigences de l’Evangile et de manifester ainsi le Christ aux autres. Bref, elle implique de faire
en sorte que la force rayonnante de la foi, de l’espérance et de la charité soit mise en œuvre dans le
concret de l’existence quotidienne. Il s’agit d’unir les contenus théologaux de la création et ceux de
la Rédemption pour « réunir tout sous un seul chef, le Christ »[6].
3.
Caractéristiques d’une spiritualité laïque/séculière
Il y a un autre texte important du Concile qui complète ce qui vient d’être dit jusqu’ici : « Ni le soin
de leur famille ni les affaires temporelles ne doivent être étrangers à leur spiritualité [de laïcs], selon
le mot de l’Apôtre : ‘Tout ce que vous faites, en paroles ou en œuvres, faites-le au nom du Seigneur
Jésus-Christ, rendant grâces par Lui à Dieu le Père’ (Col 3,17). […] Cette spiritualité des laïcs
[vivifiée par la foi, l’espérance et la charité et par le contact avec le Christ] doit revêtir des
caractéristiques particulières suivant les conditions de vie de chacun : vie conjugale et familiale,
célibat et veuvage, état de maladie, activité professionnelle et sociale. Chacun doit donc développer
sans cesse les qualités et les dons reçus et en particulier ceux qui sont adaptés à ses conditions de
vie, et se servir des dons personnels de l’Esprit-Saint »[7].
Selon les textes conciliaires cités ici, la condition et l’engagement chrétiens dans les réalités
temporelles permettent aux chrétiens laïcs d’exprimer une vie spirituelle qui colle bien à leurs
formes d’activités et de vie, à leurs capacités et aptitudes humaines et aux dons ou charismes
correspondants reçus de l’Esprit. En d’autres termes, la rencontre de foi avec le Christ, l’amour
concret pour autrui, l’espérance chrétienne, et la prière même assument des contenus et des formes
différentes chez un jeune, un fiancé ou une fiancée, un père ou une mère de famille, une personne
adulte ou âgée, un ouvrier ou un professionnel, parce que sont différents les problèmes et les
préoccupations, les projets et les idéaux, les joies et les épreuves inhérents à ces diverses activités et
conditions de vie[8].
Or l’idée conductrice de ce deuxième chapitre est précisément de présenter avec sobriété quelques
aspects du caractère séculier du chrétien laïc et de faire ressortir comment le Coopérateur et la
Coopératrice peuvent vivre l’Evangile dans l’optique salésienne de Don Bosco au cœur de leur
existence quotidienne dans leur famille, la société et l’Eglise, de telle façon qu’elle les conduise à la
sainteté.
C’est en exerçant cet apostolat particulier qu’ils réalisent leur vocation à la sainteté.
[1] Christifideles laici 15. Citation du discours de Paul VI aux supérieurs et membres des Instituts
séculiers (2 février 1972).
[2] Ib. Citation de AA 5.
[3] Ib.
[4] LG 31b.
[5] Cf LG 36a.
[6] Ep 1,10. Cf. CfL 15.
[7] AA 4ag ; CfL 16-17.
[8] Cf. ib.
Article 7[1]
APOSTOLAT SÉCULIER
Dans l’esprit de Don Bosco 1, le Coopérateur exerce son apostolat en premier lieu dans ses tâches
quotidiennes. Il veut suivre le Christ Jésus, Homme parfait, envoyé par le Père pour servir les
hommes dans le monde 2. En conséquence il s’efforce de réaliser, dans les conditions ordinaires de
la vie, l’idéal évangélique de l’amour de Dieu et du prochain. Il le fait animé par l’esprit salésien,
accordant en toute occasion une attention privilégiée aux jeunes en difficulté.
1. Cf. Deliberazioni del I Captitolo Generale 1877, MB XIII, 605-606.
2. Cf. Vat. II, GS, 45.
Dans la première phrase, cet article affirme la priorité des tâches quotidiennes du Coopérateur et
l’appuie sur la pensée de Don Bosco. Dans les deux phrases qui suivent, l’article propose, à la
lumière du message biblique et conciliaire, le fondement christologique de l’apostolat séculier du
Coopérateur. Le Seigneur Jésus est l’apôtre qui réunit en Lui tout l’univers, et le point de référence
imprescriptible pour chacun de ses fidèles disciples, comme est appelé à être chaque Coopérateur et
chaque Coopératrice.
La dernière phrase est très importante et il faut toujours en tenir compte pour comprendre les
contenus du chapitre entier. Elle fait comprendre qu’en tout cet engagement chrétien séculier, le
Coopérateur vit « selon la pensée de Don Bosco ».
7.1. Priorité des tâches quotidiennes
Un projet de révision du nouveau Règlement de 1974, selon une suggestion émanée de plusieurs
Conseils et de quelques Coopérateurs, exposait d’abord les activités plus typiquement salésiennes
du Coopérateur, et seulement ensuite ses tâches dans le quotidien. Soumise à l’évaluation de la
base, elle ne fut pas accueillie et l’on reprit l’ordre des engagements apostoliques du Coopérateur
proposé par le nouveau Règlement. Cela pour une raison décisive exprimée justement par la phrase
qui ouvre l’article : « Dans l’esprit de Don Bosco, le Coopérateur exerce son apostolat en premier
lieu dans ses tâches quotidiennes ».
La référence à Don Bosco Fondateur concerne précisément une de ses déclarations contenue dans le
projet de délibération pour le Chapitre général de 1877 qui dit ceci : « Il est nécessaire que nous
ayons dans le siècle [= monde] des amis, des bienfaiteurs et des personnes qui vivent au sein de
leurs familles en mettant en pratique tout l’esprit des salésiens » 1. Et au-delà de sa déclaration, il y
a sa pensée constante sur le fait que les Coopérateurs devaient être de « bons chrétiens », des
catholiques authentiques. En effet, la raison décisive de cette priorité est la situation et la mission
séculière [= dans le monde] du Coopérateur.
7.2. Suivre le Christ aujourd’hui
Que doit faire le Coopérateur pour être un chrétien et un apôtre séculier comme le voulait hier Don
Bosco et comme le veut l’Eglise aujourd’hui ?
Il doit suivre le Christ aujourd’hui ! Phrase évangélique 2 adoptée et commentée par le Concile
Vatican II 3. Cela veut dire croire en Lui, au mystère ineffable de Sa personne d’Homme-Dieu, à Sa
vie offerte pour notre salut et notre libération intégrale (foi). Cela veut dire adopter la vision du
monde, des hommes, de l’histoire et des événements humains, qu’Il avait, Lui (conversion). Cela
veut dire avoir les dispositions intérieures d’abandon total et confiant en Dieu et de confiance pleine
d’amour dans les hommes, qu’Il avait, Lui (espérance). Cela veut dire aimer Dieu et aimer le
prochain comme Lui (charité). Cela veut dire traiter les personnes comme Il les traitait, Lui ; se
comporter en famille, au travail, dans la société, dans la joie et la souffrance, en face de la pauvreté
et de la maladie, de l’injustice et de l’oppression, et de toutes formes d’épreuves, comme Il se
comportait, Lui. Cela veut dire être dociles à la voix intérieure de l’Esprit, qui éclaire la conscience
et stimule la volonté, comme Il l’a été, Lui. Et tout cela non en théorie, au niveau des idées, mais
dans la pratique, dans la trame ordinaire de l’existence quotidienne.
Pour mettre au point ces affirmations d’allure générale, le Règlement signale quelques traits
essentiels du profil et de la vie du Seigneur Jésus : sa mission dans le monde, son service des
hommes, son activité dans des conditions ordinaires de vie, le fait d’être l’Homme parfait, modèle
vivant pour chaque personne humaine : « Quiconque suit le Christ, Homme parfait, devient luimême plus homme » 4. Ce sont quelques traits de la figure du Christ sur lequel le Concile a insisté à
propos de la mission et du service de l’Eglise dans le monde contemporain 5. Ce sont des traits de la
vie du Seigneur particulièrement significatifs pour l’engagement apostolique, séculier et salésien du
Coopérateur et de la Coopératrice.
7.3. « Envoyé par le Père »
La mission du Peuple de Dieu et de ceux qui en font partie dérive du Christ et trouve en Lui sa
source et sa raison d’être ; « Le Christ envoyé par le Père est la source et l’origine de tout
l’apostolat de l’Eglise », dit le décret sur l’apostolat des laïcs 6.
Selon les Synoptiques, le Christ se présente aux hommes comme l’envoyé de Dieu par excellence
(Lc 4,17-21). Tous les aspects de l’action libératrice du Christ (annoncer l’Evangile, accomplir la
Loi et les Prophètes, appeler non pas les justes mais les pécheurs, chercher ce qui était perdu,
restituer son vrai sens à la création etc.) se rattachent à la mission qu’Il a reçue du Père, Créateur
miséricordieux.
Dans le quatrième Evangile, l’envoi du Fils par le Père revient comme un refrain dans tous ses
discours (quarante fois). Tout ce que fait et dit le Christ jusqu’à sa passion et à l’achèvement de son
œuvre sur la Croix, n’est autre que « faire la volonté de Celui qui l’a envoyé » (Jn 4,34).
A travers la mission du Fils sur la terre, Dieu s’est fait connaître comme Père. Il n’est pas étonnant
alors de voir que les écrits apostoliques donnent une place centrale à cette mission du Fils. Le Père
l’a envoyé dans la plénitude des temps pour nous racheter et faire de nous des fils adoptifs (Ga 4,5),
pour être notre Sauveur, pour nous donner la plus grande preuve de son amour pour nous (1 Jn
4,9s), pour rendre à l’ordre temporel la libération du pouvoir de la corruption (Rm 8,21). Ainsi le
Christ est l’envoyé par excellence, l’apôtre pour notre confession de foi (He 3,1).
Dans un Règlement de chrétiens « apôtres séculiers » comme doivent être les Coopérateurs, il
s’imposait de rappeler de façon expresse ce titre du Christ. Le Coopérateur « rencontre dans le Fils
unique l’Apôtre parfait du Père », dit le paragraphe 2 de l’article 27 du Règlement à propos d’un
trait essentiel de l’esprit salésien.
7.4. « Servir les hommes »
Envoyé par le Père pour perfectionner l’œuvre des serviteurs de l’Ancien Testament (Mt 21,33s), le
Fils aimé vient pour servir. Dès son enfance il affirme qu’il doit s’occuper des choses de son Père
(Lc 2,49). Toute sa vie est sous le signe d’un « il faut » qui exprime sa dépendance filiale et
inéluctable de la volonté du Père (Mt 16,21) ; mais c’est au cœur de cette nécessité de servir qui le
conduit à la Croix qu’il révèle l’amour qui, seul, lui confère sa dignité et sa valeur : « Il faut que le
monde sache que j’aime mon Père, et que je fais tout ce que mon Père m’a commandé » (Jn 14,31).
Le Christ serviteur de Dieu se met au service de l’humanité, et révèle ainsi le projet du Père sur
elle : le Père veut que les hommes se mettent au service les uns des autres comme l’a fait Jésus de
Nazareth, leur Seigneur et Maître ; « Le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour
servir et donner sa vie » (Mt 20,28 et textes par.) ; « C’est un exemple que je vous ai donné […]. Le
serviteur n’est pas plus grand que son maître » (Jn 13,15.16) ; « Je suis au milieu de vous comme
celui qui sert » (Lc 22,27). Ce n’est qu’ainsi que se restaure le cosmos dans le Christ.
Ce trait essentiel de la mission de Jésus Christ ne pouvait donc pas manquer dans le Règlement de
Vie apostolique, s’il voulait rattacher les responsabilités familiales et sociales des Coopérateurs et
leur service salésien à leur source et matrice évangéliques, le mystère du Seigneur.
7.5. « Dans le monde »
Le Christ a réalisé sa mission et accompli son service à l’humanité dans un contexte humain
concret : celui de sa famille et de son village de Nazareth d’abord, puis le contexte plus large de son
peuple, même s’il revêtait une portée universelle de salut.
Il ne s’est pas tenu à l’écart du milieu social et culturel où il avait été envoyé ; il ne s’est pas
soustrait à ses responsabilités familiales, civiles et sociales. Il a voulu être semblable à ses frères en
tout, hormis le péché (He 2,17). Il a vécu au contact des gens humbles et simples ; il a eu affaire
avec les autorités civiles et religieuses de son temps ; il s’est trouvé impliqué dans les structures de
son peuple. Et c’est dans ce tissu humain, avec toutes ses lumières et ses ombres, ses misères et ses
souffrances, ses angoisses et ses espoirs, ses aspirations et ses frustrations, qu’il a réalisé le salut et
la libération totale de l’humanité 7.
Ces situations séculières diffèrent sous bien des aspects de celles où se trouvent et travaillent
aujourd’hui le Coopérateur et la Coopératrice, mais elles leur ressemblent en beaucoup d’autres
points. Ce n’est pas en fuyant ces « conditions ordinaires de la vie », mais en y restant, qu’il doit
adopter les dispositions et les comportements du Seigneur, comme le dit l’article 7 du Règlement.
7.6. Salésien dans le monde
Le Coopérateur « veut suivre le Christ Jésus, Homme parfait […]. En conséquence il s’efforce de
réaliser, dans les conditions ordinaires de la vie, l’idéal évangélique de l’amour de Dieu et du
prochain ».
Mais il veut le faire non d’une façon générique, comme n’importe quel chrétien séculier, mais d’une
façon spécifique, en tant qu’apôtre salésien dans le monde. C’est la raison pour laquelle l’article
précise à bon droit qu’« il le fait animé par l’esprit salésien, accordant en toute occasion une
attention privilégiée aux jeunes en difficulté ».
En effet, le Coopérateur réalise son option apostolique particulière avant tout dans les situations
concrètes et ordinaires où sa qualification séculière le porte à agir. En famille, au travail, dans ses
activités sociales et ses loisirs, son attention se porte sans cesse vers les jeunes, mais à partir d’une
sensibilité spéciale aux besoins de ceux qui l’entourent, et en se montrant prêt à s’approcher d’eux
dans le style de relation typique de Don Bosco (dont parle l’article 31 du Règlement) 8.
[1]
1. Cf MB XIII, 605-606 et CGS, 153.
2. Cf. p. ex. Jn 8,12 ; 10,4 ; 12,26 ; Mt 10,28 par., 16,24 par., 19,27 par. ; Mc 1,18.22 ; Lc 18,22.
3. Cf. p. ex. LG, 40b, 37b, 41, 43s ; AA, 4f, etc.
4. GS, 41a.
5. Cf. p. ex. pour la mission du Christ et de l’Eglise : LG, 2-5, 12b, 17, 32 ; AA, 2a, 5, 6g, 10, 3537 ; AG, 2-5 ; pour le service du Christ et de l’Eglise : LG, 5, 10b, 18, 24a, 32c, 42 ; AA, 1, 11, 29 ;
AG, 3b ; GS, 32,3, 40 etc.
6. AA, 4a.
7. GS, 22abc, 32bcde, 38a ; voir aussi GS, 45 cité par l’article 7 du Règlement. Pour tout ce sujet
sur le Christ révélateur du mystère de l’homme, il est bon de se reporter à l’encyclique programme
de Jean Paul II intitulée Redemptor hominis (1979).
8. Cf. Actes et documents du 2e Congrès mondial des Coopérateurs salésiens (Rome 1985) 68.
ARTICLE 8
EN FAMILLE
Conscient des valeurs familiales, chaque Coopérateur forme avec les membres de sa famille une
« église domestique » 1. Il travaille à leur croissance humaine et chrétienne, favorisant le dialogue,
l’amour mutuel et la prière en commun ; il entretient les liens de parenté, portant une attention
particulière aux plus jeunes et aux parents âgés. Il est généreux et hospitalier, vient en aide à
quiconque est dans le besoin et s’ouvre à la collaboration avec les autres familles 2.
1. Vatican. II, LG, 11
2. Cf. RDB, III.
Le premier milieu où chaque Coopérateur, célibataire, marié ou veuf, est appelé à exercer son
apostolat est sa propre famille. L’article 8 donne quelques indications concrètes sur les engagements
familiaux qui concernent tous les Coopérateurs et toutes les Coopératrices sans distinction. L’article
9, par contre, traite en particulier des responsabilités conjugales des Coopérateurs mariés et de la
préparation au mariage pour les Coopérateurs fiancés.
8.1. « Conscient des valeurs familiales »
En mettant à jour le diagnostic de la famille effectué par Vatican II [1], le synode des Evêques
de 1980 en a tracé le cadre suivant : « La situation dans laquelle se trouve la famille présente des
aspects positifs et des aspects négatifs ; les uns sont le signe du salut du Christ à l’œuvre dans le
monde ; les autres, du refus que l’homme oppose à l’amour de Dieu.
« Car, d’une part, on constate une conscience plus vive de la liberté personnelle et une attention
plus grande à la qualité des relations interpersonnelles dans le mariage, à la promotion de la dignité
de la femme, à la procréation responsable, à l’éducation des enfants ; il s’y ajoute la conscience de
la nécessité de développer des liens entre familles en vue d’une aide spirituelle et matérielle
réciproque, la redécouverte de la mission ecclésiale propre à la famille et de sa responsabilité dans
la construction d’une société plus juste.
« Mais, par ailleurs, il ne manque pas d’indices d’une dégradation préoccupante de certaines
valeurs fondamentales : une conception théorique et pratique erronée de l’indépendance des
conjoints entre eux ; de graves ambiguïtés à propos du rapport d’autorité entre parents et enfants ;
des difficultés concrètes à transmettre les valeurs, comme l’expérimentent bien des familles ; le
nombre croissant des divorces ; la plaie de l’avortement ; le recours sans cesse plus fréquent à la
stérilisation ; l’instauration d’une mentalité vraiment et proprement contraceptive. […]
« Dans les pays du tiers monde, les familles manquent souvent aussi bien des moyens
fondamentaux pour leur survie, tel que la nourriture, le travail, le logement, les médicaments, que
des plus élémentaires libertés.
« Dans les pays plus riches, en revanche, le bien-être excessif et l’esprit de consommation,
celui-ci étant paradoxalement uni à une certaine angoisse et à quelque incertitude quant à l’avenir,
enlèvent aux époux la générosité et le courage de susciter de nouvelles vies humaines : souvent la
vie n’est plus alors perçue non comme une bénédiction, mais comme un péril dont il faut se
défendre. [...]
« En vivant dans un tel monde, et sous l’influence provenant surtout des mass media, les fidèles
n’ont pas toujours su et ne savent pas toujours demeurer indemnes de l’obscurcissement des valeurs
fondamentales ni se situer comme conscience critique de cette culture familiale et comme sujets
actifs de la construction d’un authentique humanisme familial. [...]
« Toute l’Eglise a le devoir de réfléchir et de s’engager en profondeur, afin que la nouvelle
culture qui apparaît soit intimement évangélisée, que soient reconnues les vraies valeurs, que soient
défendus les droits de l’homme et de la femme et que la justice soit promue dans les structures
mêmes de la société. Ainsi le “nouvel humanisme” ne détournera pas les hommes de leurs rapports
avec Dieu, mais il les y conduira de façon plus plénière. [...]
« Il est donc nécessaire que tous reprennent conscience du primat des valeurs morales : elles
sont celles de la personnes humaine comme telle. La compréhension du sens ultime de la vie et de
ses valeurs fondamentales est le grand défi qui s’impose aujourd’hui en vue du renouvellement de
la société. Seul le sentiment du primat de ces valeurs permet d’utiliser les immenses possibilités
mises par la science dans les mains de l’homme de manière à promouvoir vraiment la personne
humaine dans sa vérité tout entière, dans sa liberté et dans sa dignité. La science est appelée à s’unir
à la sagesse » [2].
Si nous avons pris la peine de recopier ce texte de l’exhortation apostolique de Jean-Paul II sur
la famille, c’est parce que c’est à partir de ce diagnostic général, réaliste mais non décourageant,
qu’il nous faut lire et comprendre les articles du Règlement concernant l’apostolat en famille et
dans le mariage.
Dans la situation qui vient d’être décrite il est indispensable que chaque Coopérateur et chaque
Coopératrice deviennent des sujets actifs d’un « authentique humanisme familial » ! De quelle
manière ? En prenant toujours mieux conscience des valeurs familiales, en particulier de celles qui
ont besoin d’être plus protégées et poursuivies avec plus d’efficacité aujourd’hui. Le Règlement les
présente rapidement dans le sillage de l’enseignement du Concile et du magistère pontifical et
épiscopal [3].
8.2. « Il forme avec les membres de sa famille
une “Eglise domestique” »
La famille qui résulte du mariage chrétien ne représente pas un simple préalable pour l’Eglise
ou une partie de celle-ci. Non, elle peut s’appeler à bon droit « petite Eglise » ou « Eglise
domestique » comme le dit la constitution de Vatican II sur l’Eglise [4]. Telle est la signification
nouvelle et de grande valeur qu’elle prend sur le plan de salut instauré par le Christ.
Saint Paul et les Pères des premiers siècles [5] voient la famille chrétienne comme une Eglise en
petit, où se réalisent et se manifestent certains traits constitutifs de la plus grande famille de Dieu
qu’est l’Eglise : le ministère de foi, d’amour, de témoignage puissant du royaume de Dieu et de
présence vivante du Seigneur ressuscité. « Faites de votre maison une église », disait souvent saint
Jean Chrysostome, au milieu des acclamations de joie de son peuple [6].
Mais que faut-il faire pour que cet idéal évangélique exaltant devienne une réalité consolante,
qu’il faut souhaiter à tous les noyaux familiaux chrétiens ? Le Règlement signale quelques pistes
pour l’effort concret de chaque Coopérateur et Coopératrice.
8.3. « Il travaille à la croissance humaine et chrétienne
de ses membres ».
Il travaille avant tout à la croissance humaine de ses membres en encourageant dans sa famille
cet ensemble de relations interpersonnelles (nuptialité, paternité et maternité, filiation, fraternité),
par lesquelles chacun est introduite dans la « famille humaine » et dans la « famille de Dieu » qu’est
l’Eglise. Pour arriver à cette profonde communion de pensée et de cœur, il privilégie le dialogue
sincère et constant pour dépasser les tensions possibles et pour faciliter l’entente ; il fait en sorte que
l’affection mutuelle grandisse et se renforce au-delà des épreuves et inévitables difficultés
inhérentes à la vie familiale ; il contribue à la promotion sociale et culturelle de chaque membre de
la famille et au développement de ses capacités et dons spirituels. Dans ce but Don Bosco offre les
grands critères qui inspirent sa pédagogie préventive.
Il travaille, en même temps, à la croissance chrétienne des membres de sa famille en faisant en
sorte que sa famille soit une communion de personnes qui révèle sa foi en Dieu et son amour pour
Lui, en particulier dans la prière faite en commun et englobant la vie même de la famille : « joies et
peines, espoirs et tristesses, naissances et anniversaires, commémoration du mariage des parents,
départs, absences et retours, choix importants et décisifs, la mort des êtres chers etc., sont des signes
de la présence aimante de Dieu dans l’histoire de la famille, et ces événements doivent aussi devenir
un moment favorable d’action de grâces, de supplication et d’abandon filial au Père commun qui est
aux cieux. » [7]
En outre, il fera en sorte que cette prière privée débouche tout naturellement sur la participation
de tous les membres de sa famille à la liturgie de la communauté chrétienne locale, centrée sur
l’Eucharistie, surtout des dimanches et jours de fêtes, ainsi que sur les autres sacrements, en
particulier ceux de l’initiation chrétienne des enfants. Il fera aussi en sorte que sa famille soit, en
fait, une authentique école de vie chrétienne, de sanctification réciproque, de témoignage et
d’apostolat efficaces. Bref, il fera en sorte que sa famille manifeste autour d’elle, grâce à la
collaboration bienveillante de tous, l’aimable présence du Sauveur du monde [8].
8.4. « Il entretient les liens de parenté, portant une attention particulière aux plus jeunes et aux
parents âgés ».
Cette autre tâche du Coopérateur est inspirée par quelques textes influents de l’exhortation
apostolique de Jean-Paul II sur la famille. Nous les citons largement ici parce qu’ils en constituent
un excellent commentaire.
Liens de parenté : « La communion conjugale constitue le fondement sur lequel s’édifie la
communion plus large de la famille, des parents et des enfants, des frères et des sœurs entre eux,
parents proches et autres membres de la famille. Une telle communion s’enracine dans les liens
naturels de la chair et du sang, et se développe en trouvant sa perfection proprement humaine par la
mise en place et la maturation de liens encore plus profonds et plus riches de l’esprit : l’amour qui
anime les rapports interpersonnels entre les différents membres de la famille est la force intérieure
qui donne forme et vie à la communion et à la communauté familiales » [9].
Attention envers les plus jeunes : « Au sein de la famille, communauté de personnes, une
attention très spéciale sera réservée à l’enfant, de façon à développer une profonde estime pour sa
dignité personnelle comme aussi un grand respect pour ses droits que l’on doit servir
généreusement. Cela vaut pour tous les enfants, mais c’est d’autant plus important que l’enfant est
plus jeune, ayant besoin de tout, ou qu’il est malade, souffrant ou handicapé. [...]
« L’accueil, l’amour, l’estime, le service multiple et unitaire – matériel, affectif, éducatif, spirituel –
envers tout enfant qui vient au monde devront toujours constituer une note distinctive et
imprescriptible des chrétiens, en particulier des familles chrétiennes » [10].
Attention à l’égard des personnes âgées : « Il y des cultures qui manifestent une vénération
singulière et un grand amour pour la personne âgée : loin d’être bannie de la famille ou supportée
comme poids inutile, la personne âgée reste insérée dans la vie familiale, continue à y prendre une
part active et responsable – tout en devant respecter l’autonomie de la nouvelle famille – et surtout
elle exerce la précieuse mission d’être témoin du passé et source de sagesse pour les jeunes et pour
l’avenir.
« D’autres cultures, au contraire, notamment à la suite d’un développement industriel et urbain
désordonné, ont conduit et continuent à conduire les personnes âgés à des formes inacceptables de
marginalité qui sont la source à la fois de souffrances aiguës pour elles-mêmes et
d’appauvrissement spirituel pour tant de familles.
« Il est nécessaire que l’action pastorale de l’Eglise stimule chacun à découvrir et à valoriser le
rôle des personnes âgées dans la communauté civile et ecclésiale, et en particulier dans la famille.
En réalité, ‘la vie des personnes âgées aide à clarifier l’échelle des valeurs humaines ; elle montre la
continuité des générations et elle est une preuve merveilleuse de l’interdépendance du peuple de
Dieu. Les personnes âgés possèdent souvent le charisme de combler les fossés entre les générations
avant qu’ils ne soient creusés : combien d’enfants ont trouvé compréhension et amour dans les
yeux, les paroles et les caresses des personnes âgées ! Et combien parmi celles-ci ont, avec
empressement, souscrit à ces paroles divines : « La couronne des grands-parents, c’est leurs petitsenfants » (Pr 17,6) [11].
8.5. « Il est généreux et hospitalier, vient en aide à quiconque est dans le besoin ».
En différents textes, Vatican II rappelle deux tâches importantes et à la portée de tout noyau
familial qui veut être authentiquement chrétien : une « hospitalité effective » et « les l’aide accordée
à tous les frères qui sont dans le besoin » [12].
« De nos jours surtout, dit Gaudium et Spes, nous avons l’impérieux devoir de nous faire le
prochain de n’importe quel homme et, s’il se présente à nous, de le servir activement : qu’il s’agisse
de ce vieillard abandonné de tous, ou de ce travailleur étranger, méprisé sans raison, ou de cet exilé,
ou de cet enfant né d’une union illégitime [...] ou de cet affamé qui interpelle notre conscience en
nous rappelant la parole du Seigneur : ‘Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de
mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait’ (Mt 25,40) [13].
Le Règlement a accueilli cet appel vibrant du Concile et l’a appliqué à chaque Coopérateur et à
chaque Coopératrice par ces mots : « Il est généreux et hospitalier, vient en aide à quiconque est
dans le besoin ». Il ne pouvait pas passer outre cette valeur si caractéristique dans la vie de Don
Bosco.
8.6. « Il s’ouvre à la collaboration avec les autres familles ».
Chaque famille est un peu comme la cellule d’un tissu : sa santé et son développement normal
dépendent des rapports qu’elle réussit à établir et à maintenir avec les autres cellules familiales.
C’est une loi de la vie. D’où la nécessité imprescriptible pour chaque famille de s’ouvrir au contact
et à « la collaboration avec les autres familles » comme dit l’article du Règlement.
La législation civile de nombreux pays permet aujourd’hui, plus que dans le passé, une présence
efficiente de la famille dans l’administration de l’école et dans la gestion des organismes de zone,
de quartier ou de commune. Il s’ouvre ici un vaste terrain pour l’activité des Coopérateurs pour
soutenir la vie de leur propre famille.
Dans divers textes, le Concile non seulement approuve, mais encourage et stimule ces
différentes formes de coopération qui ont pour but d’aider et de soutenir, du point de vue matériel et
spirituel, la famille [14]. Le Règlement accueille cette orientation conciliaire qui correspond à des
besoins actuels et vitaux pour la famille.
En ce sens méritent une mention spéciale les Coopérateurs et Coopératrices d’Espagne pour leur
intéressante initiative des « Hogares Don Bosco ».
[1]. Cf. GS, 8c, 47, 51a.
[2]. FC, 6-8.
[3]. Cf. LG, 11b, 35c ; AA, 11 ; GE, 3a ; GS, 47-52 ; en outre FC, 49-64.
[4]. Cf. LG, 11b, ainsi que AA, 11d.
[5]. Cf. p. ex. Saint Augustin, Sermon 94 : PL 38, 380s.
[6]. Cf. Saint Jean Chrysostome, Sermons sur la Genèse 6,2 : PG 54, 607 ; également GS, 48d.
[7]. FC, 59.
[8]. Cf. LG, 35c, 41d ;AA, 11de ; GS, 48cd, 52b.
[9]. FC, 21.
[10]. FC, 26.
[11]. FC, 27.
[12]. AA, 11d.
[13]. GS, 27b ; FC, 63s.
[14]. Cf. AA, 11cf ; GS, 48d, 52c ; FC, 72.
ARTICLE 9
DANS LE MARIAGE
Le Coopérateur marié trouve dans le sacrement de l’amour la force pour vivre avec enthousiasme sa
mission conjugale et familiale :
- « témoin de la foi » 1, il s’efforce de réaliser une communion d’époux profonde ;
- « coopérateur de l’amour du Dieu Créateur » 2, il est responsable et généreux dans l’accueil et la
transmission de la vie ;
- sachant que les parents sont « les premiers et principaux éducateurs de leurs enfants » 3, il guide
leur croissance par l’exemple et la parole, selon la méthode de la bonté propre au « Système
préventif » ; il les aide à découvrir et à suivre leur vocation personnelle et les oriente vers l’action
apostolique.
A cette tâche il s’est préparé durant les fiançailles. Conscient de l’importance de cette période, le
Coopérateur fiancé s’engage en un sérieux cheminement de maturation humaine et chrétienne ; et il
apporte à l’Association l’originalité de son témoignage.
1. Cf. Vat. II, LG, 35.
2. Cf. Vat. II, GS, 50.
3. Vat. II, GE, 3.
Comme chacun sait, Vatican II s’est vivement intéressé du problème du mariage [1]. A beaucoup
de points de vue, son enseignement large et systématique, est innovateur vis-à-vis de la mentalité
chrétienne commune. Son enseignement a été adapté à la situation des années 80 par le Synode des
Evêques consacré au thème de la famille, et ses orientations ont abouti à l’exhortation apostolique
Familiaris consortio de Jean Paul II.
La rédaction de l’article 9 du Règlement a tenu compte de cet enseignement et surtout des ses
aspects nouveaux, qu’on veut simplement signaler ici, car c’est à leur lumière qu’il faut lire et
comprendre les devoirs proposés per cet article aux Coopérateurs et aux Coopératrices mariés.
9.1. Les nouvelles perspectives conciliaires sur la vie conjugale.
9.1.1. Vision de foi du mariage.
Vatican II nous une éclairante vision de foi du mariage. Il le considère à l’intérieur du plan divin.
Dieu est l’auteur du mariage : les conjoints sont créés à l’image du Dieu vivant. Le Christ a assaini,
perfectionné et élevé l’amour conjugal par un don spécial de grâce ; il l’a assumé dans l’amour
divin ; il en a fait l’expression concrète de l’amour avec lequel Il aime l’Eglise et Il a garanti aux
époux chrétiens sa présence (sacrement).
Dans le mariage les époux chrétiens réalisent leur propre vocation spécifique, fruit d’un don ou
charisme de l’Esprit-Saint, l’Amour de Dieu, qui leur est donné pour qu’Il éclaire et renforce leur
amour de mari et femme et il lui donne une dimension divine [2].
9.1.2. Conception positive de l’amour conjugal
Le Concile dépasse aussi une vision restrictive, médiocre et inhibitrice qu’on a parfois eue et qu’on
a encore de l’amour conjugal. Car il nous en présente une conception positive et apaisante qui n’en
réduit pas les responsabilités, mais en souligne plutôt les valeurs.
Le véritable amour entre mari et femme est un acte « éminemment humain puisqu’il va d’une
personne vers une autre personne en vertu d’un sentiment volontaire [...] qui enveloppe le bien de la
personne tout entière ; il peut donc enrichir d’une dignité particulière les expressions du corps et de
la vie psychique et les valoriser comme les éléments et les signes spécifiques de l’amitié conjugale.
[...]. Associant l’humain et le divin, un tel amour conduit les époux à un don libre et mutuel d’euxmêmes qui se manifeste par des sentiments et des gestes de tendresse et il imprègne toute leur vie ;
bien plus, il s’achève lui-même et grandit par son généreux exercice. Il dépasse donc de loin
l’inclination simplement érotique qui, cultivée pour elle-même, s’évanouit vite et d’une façon
pitoyable » [3].
Cet amour exige de se développer pour parvenir à maturation. « Même si, contrairement au vœu
souvent très vif des époux, il n’y a pas d’enfant, le mariage, comme communauté et communion de
toute la vie, demeure, et il garde sa valeur et son indissolubilité » [4].
La constitution pastorale Gaudium et spes offre enfin des critères de jugement selon lesquels les
époux chrétiens peuvent s’orienter pratiquement dans la tâche difficile d’harmoniser les exigences
de l’amour avec la responsabilité de transmettre la vie [5].
9.2. Attitude optimiste dans la mission conjugale et familiale
Les options fondamentales du Règlement mettent au premier plan l’énergie humaine et chrétienne
qui naît de l’amour conjugal, ce grand don divin que fortifient et sanctifient la grâce du Christ et la
présence amoureuse de son Esprit : c’est la « force » que le Coopérateur marié « trouve dans le
sacrement de l’amour ».
Elles s’opposent fermement à la mentalité dominante contraire à la vie et se situent avec décision
dans la ligne ecclésiale du « Oui » généreux à la vie : c’est l’attitude optimiste rappelée par la
phrase du Règlement « vivre avec enthousiasme la mission conjugale et familiale ».
Elles rattachent quelques graves responsabilités conjugales du Coopérateur à sa « mission d’époux
et de parent », vue sous trois aspects essentiels : être dans la vie conjugale « témoin de la foi »,
« coopérateur de l’amour du Dieu Créateur », « premier et principal éducateur des enfants ». Les
devoirs conjugaux sont ainsi étroitement ancrés aux valeurs du mariage chrétien : celles-ci sont la
source des premiers, leur donnent leur motivation profonde et en soutiennent la réalisation pratique.
9.3. « Témoin de la foi »
Un premier aspect de la mission des époux chrétiens est d’être l’un pour l’autre « témoin de la
foi » [6]. Selon l’Evangile exposé avec autorité par Vatican II, toute la vie matrimoniale est un
grand événement dans lequel intervient Dieu dans le Christ et dans son Esprit ; il est un lieu
privilégié de sa présence. L’intimité conjugale elle-même, si elle se réalise d’une manière vraiment
humaine, est œuvre de la grâce et un chemin sûr de perfection chrétienne. C’est pourquoi les époux
chrétiens sont invités par le Concile à prendre conscience de cette présence divine du Seigneur, à la
vivre dans une perspective de foi, à se la manifester l’un à l’autre dans l’harmonie de l’amour et la
grandeur d’âme, avec une générosité féconde et une constante fidélité, en esprit de sacrifice et avec
la confiance en Dieu [7].
Tout cela oriente un engagement moral précis, formulé en ces termes par le Règlement : « témoin
de la foi », le Coopérateur « s’efforce de réaliser une communion d’époux profonde ».
De quelle manière ?
Par la reconnaissance nette et effective de « l’égale dignité personnelle qu’il faut reconnaître
à la femme et à l’homme dans l’amour plénier qu’ils se portent l’un à l’autre » [8].
Par une constante communication de pensée et une amoureuse et mutuelle ouverture d’âme,
pour mettre en commun leurs joies et leurs peines, leurs projets et leurs préoccupations, et favoriser
le dialogue continuel et la maturation réciproque.
Par le maintien et la défense de la pleine familiarité de leur vie, la volonté de se comprendre
et de pardonner dans les moments inévitables de tension et d’épreuve, le soutien réciproque dans les
difficultés et l’aide mutuelle, même financière [9].
9.4. « Coopérateur de l’amour de Dieu créateur »
« Dans le devoir qui leur incombe de transmettre la vie et d’être des éducateurs (ce qu’il faut
considérer comme leur mission propre), les époux savent qu’ils sont les coopérateurs de l’amour de
Dieu Créateur et comme ses interprètes.
« Ils s’acquitteront donc de leur charge en toute responsabilité humaine et chrétienne et, dans un
respect plein de docilité à l’égard de Dieu, d’un commun accord et d’un commun effort, ils se
formeront un jugement droit : ils prendront en considération à la fois et leur bien et celui des enfants
déjà nés ou à naître ; ils discerneront les conditions aussi bien matérielles que spirituelles de leur
époque et de leur situation ; ils tiendront compte enfin du bien de la communauté familiale, des
besoins de la société temporelle et de l’Eglise elle-même.
« Ce jugement, ce sont en dernier ressort les époux eux-mêmes qui doivent l’arrêter devant Dieu.
Dans leur manière d’agir, que les époux chrétiens sachent bien qu’ils ne peuvent pas se conduire à
leur guise, mais qu’ils ont l’obligation de toujours suivre leur conscience, une conscience qui doit se
conformer à la loi divine ; et qu’ils demeurent dociles au magistère de l’Eglise, interprète autorisé
de cette loi à la lumière de l’Evangile. Cette loi divine manifeste la pleine signification de l’amour
conjugal, elle le protège et le conduit à son achèvement vraiment humain » [10].
La même constitution pastorale rappelle en outre que « La vie humaine et la charge de la
transmettre ne se limitent pas aux horizons de ce monde et n’y trouvent ni leur pleine dimension, ni
leur plein sens, mais qu’elles sont toujours à se mettre en référence avec la destinée éternelle des
hommes » [11].
Comme on le sait, sur ce même argument sont intervenus Paul VI avec l’encyclique Humanae vitae
(1968) et Jean Paul II avec l’exhortation apostolique Familiaris consortio (1981) : dans ces
documents, les deux Papes donnent des orientations doctrinales, morales et pastorales autorisées et
sûres, dans le but d’aider les époux chrétiens à organiser et vivre sereinement et de façon
constructive leur expérience conjugale [12].
Le Règlement adopte ces orientations générales du magistère conciliaire et pontifical, et oppose à la
mentalité dominante contraire à la vie une attitude de « générosité » dans l’accueil et la transmission
de la vie. Aussi formule-t-il en ces termes ce deuxième aspect de la mission du Coopérateur marié
et son engagement moral qui en dérive : « ’Coopérateur de l’amour du Dieu Créateur’, il est
responsable et généreux dans l’accueil et la transmission de la vie ».
9.5. « Premiers et principaux éducateurs de leurs enfants »
Les parents sont les « premiers et principaux éducateurs de leurs enfants », nous dit le texte du
Règlement en se référant à la déclaration conciliaire sur l’éducation chrétienne Gravissimum
educationis, qui en donne un très bon commentaire : « Les parents, parce qu’ils ont donné la vie à
leurs enfants, ont la très grave obligation de les élever, et à ce titre, doivent être reconnus comme
leurs premiers et principaux éducateurs. Le rôle éducatif des parents est d’une telle importance que,
en cas de défaillance de leur part, il peut difficilement être suppléé. C’est aux parents, en effet, de
créer une atmosphère familiale, animée par l’amour et le respect envers Dieu et les hommes, telle
qu’elle favorise l’éducation totale, personnelle et sociale de leurs enfants. La famille est donc la
première école des vertus sociales nécessaires à toute la société.
Mais c’est surtout dans la famille chrétienne, riche des grâces et des exigences du sacrement du
mariage, que dès leur plus jeune âge les enfants doivent, conformément à la foi reçue au baptême,
apprendre à découvrir Dieu et à l’honorer, ainsi qu’à aimer le prochain ; c’est là qu’ils font la
première expérience de l’Eglise et de l’authentique vie humaine en société ; c’est par la famille
qu’ils sont peu à peu introduits dans la communauté des hommes et dans le peuple de Dieu. Que les
parents mesurent donc bien l’importance d’une famille vraiment chrétienne dans la vie et le progrès
du peuple de Dieu lui-même » [13].
Dans ce cadre, le Règlement souligne quelques responsabilités majeures.
9.5.1. « Il guide la croissance [des enfants] par l’exemple et la parole »
Une première responsabilité est de guider la croissance de ses enfants par l’exemple et la parole. A
ce propos il nous faut expliquer un concept fondamental. La situation actuelle de nombreux pays se
caractérise par un notable pluralisme social et culturel : l’école, le lieu de travail, la société, les mass
media proposent des idéaux, des modèles de comportements et des projets de vie non seulement
différents mais souvent opposés. Cette situation à mis en crise le rôle traditionnel des parents et en a
exigé un changement profond.
Pour arriver à transmettre les valeurs humaines et chrétiennes authentiques qu’ils ont vécues, les
époux chrétiens doivent faire en sorte que la famille devienne le lieu privilégié où ce pluralisme
d’idéaux, de modèles, d’évaluation etc., soit connu, discuté, accueilli avec discernement et intégré
dans la vie personnelle au moyen d’une communication sincère et continuelle entre les parents euxmêmes et avec les enfants. En d’autres termes, la tâche des parents aujourd’hui est de former les
enfants à une vie capable d’être critique des différentes formes de manipulation socio-culturelle qui
la menacent, et créatrice de nouvelles valeurs dans le sens indiqué.
Dans ce contexte il faut souligner l’importance :
– de la catéchèse de l’enfance et de l’adolescence réalisée selon les indications du magistère
pontifical et épiscopal, à l’exemple des bonnes expériences de catéchèse familiale en cours
aujourd’hui ;
– de l’éducation sexuelle adéquate, demandée par des orientations précises de plusieurs documents
conciliaires et pontificaux [14] ;
– de l’éducation à la vie sociale [15].
Puisqu’il s’agit de tâche éducative réalisée par les Coopérateurs et Coopératrices salésiens, le
Règlement rappelle opportunément qu’elle est à réaliser « selon la méthode de bonté propre du
Système préventif », dont les contenus sont exposés à l’article 15.
9.5.2. « Il aide [ses enfants] à découvrir et à suivre leur vocation personnelle »
Une deuxième responsabilité est d’aider ses enfants « à découvrir et à suivre leur vocation
personnelle ». Il s’agit ici de la vocation concrète des enfants, à savoir le choix d’une profession et
la préparation à leur propre forme de vie, matrimoniale ou célibataire.
Il faut rappeler que le Concile souligne à plusieurs reprises le grave devoir qui incombe aux époux
chrétiens de favoriser avec tout le soin possible la vocation au ministère ordonné et à une des
diverses formes de vie consacrée découverte éventuellement chez les enfants. « Les époux
chrétiens, dit le décret Apostolicam actuositatem, [...] aident avec sagesse [leurs enfants] dans le
choix de leur vocation, et favorisent de leur mieux une vocation sacrée s’ils la découvrent en
eux » [16].
Elle fait partie de la mission salésienne des Coopérateurs « d’accorder une attention privilégiée aux
jeunes et spécialement [...] à ceux qui présentent des signes de vocation apostolique spécifique
(laïque, consacrée, sacerdotale) », comme dit l’article 13 de leur Règlement. Pour le Coopérateur
marié, cette attention privilégiée concerne évidemment avant tout ses propres enfants.
9.5.3. « Il les oriente vers l’action apostolique »
Une troisième responsabilité étroitement liée à la précédente, est « d’orienter ses enfants vers
l’action apostolique ». L’apostolat est inhérent à toute vocation chrétienne et il concerne donc, de
façon vitale, l’action éducatrice des parents chrétiens.
Le décret sur l’apostolat des laïcs a reconnu que « les enfants ont également une activité apostolique
qui leur est propre. A la mesure de leurs possibilités ils sont les témoins vivants du Christ au milieu
de leurs camarades » [17]
Il a en outre fortement souligné le fait que les jeunes peuvent et « doivent devenir les premiers
apôtres des jeunes, en contact direct avec eux, exerçant l’apostolat par eux-mêmes et entre eux,
compte tenu du milieu social où ils vivent » [18].
L’exhortation apostolique Evangelii nuntiandi de Paul VI de 1975 mentionne parmi les ouvriers de
l’évangélisation les jeunes avec cette considération d’ordre général : « Les circonstances nous
invitent à une attention toute spéciale aux jeunes. Leur montée numérique et leur présence
croissante dans la société, les problèmes qui les assaillent, doivent éveiller en tous le souci de leur
offrir, avec zèle et intelligence l’idéal évangélique à connaître et à vivre. Mais il faut par ailleurs
que les jeunes, bien formés dans la foi et la prière, deviennent toujours davantage les apôtres de la
jeunesse. L’Eglise compte beaucoup sur cet apport » [19].
Ici s’ouvre un vaste champ d’action pour le Coopérateur marié conscient de ses graves
responsabilités actuelles en éducation.
C’est dans cet engagement de s’acquitter de ces tâches d’époux et de parents que Vatican II
reconnaît « la part principale de leur apostolat » [20]. Il était indispensable que le RVA le mette en
lumière pour les Coopérateurs mariés.
9.6. Le Coopérateur fiancé
Le dernier paragraphe de l’article 9 est consacré aux Coopérateurs fiancés. « Il souligne le devoir
d’approfondir ce qu’ils doivent affronter en vue du mariage ainsi que leur apport spécifique, comme
Coopérateurs, au Centre auquel ils appartiennent. Ce dernier point a été dicté par la préoccupation,
exprimée de plusieurs côtés, que les Coopérateurs fiancés ont tendance à se refermer sur euxmêmes et à perdre les contacts avec les autres, alors qu’ils sont nécessaires pour une vraie
croissance » [21].
Une compréhension correcte de cet engagement nous est donnée par les considérations de
l’exhortation apostolique Familiaris consortio au sujet de la préparation au mariage. Elle souligne
avant tout la nécessité et l’urgence d’une pastorale ecclésiale sage et à jour orientée vers la
préparation adéquate des jeunes au mariage. « De nos jours, la préparation des jeunes au mariage et
à la vie familiale est plus nécessaire que jamais. Dans certains pays, ce sont encore les familles qui,
selon d’antiques usages, se réservent de transmettre aux jeunes les valeurs concernant la vie
matrimoniale et familiale, par un système progressif d’éducation ou d’initiation. Mais les
changements survenus au sein de presque toutes les sociétés modernes exigent que non seulement la
famille, mais aussi la société et l’Eglise, soient engagées dans l’effort de préparation adéquate des
jeunes aux responsabilités de leur avenir. Beaucoup de phénomènes négatifs que l’on déplore
aujourd’hui dans la vie familiale viennent du fait que, dans les nouvelles situations, les jeunes ont
perdu de vue la juste hiérarchie des valeurs, et que, ne possédant plus de critères sûrs de
comportement, ils ne savent plus comment affronter et résoudre les nouvelles difficultés.
L’expérience enseigne pourtant que les jeunes bien préparés à la vie familiale réussissent en général
mieux que les autres.
« Cela vaut encore plus pour le mariage chrétien, dont l’influence s’étend sur la sainteté de tant
d’hommes et de femmes. C’est pourquoi l’Eglise doit promouvoir des programmes meilleurs et plus
intensifs de préparation au mariage, pour éliminer le plus possible les difficultés dans lesquelles se
débattent tant de couples, et encore plus pour conduire positivement les mariages à la réussite et à la
pleine maturité » [22].
Le Règlement adopte cette préoccupation ecclésiale quand il dit : « A cette tâche le Coopérateur
s’est préparé durant les fiançailles ».
A propos du chemin de préparation au mariage, l’exhortation apostolique sur la famille signale trois
moments principaux : une préparation lointaine qui coïncide avec ce qu’on appelle la formation
initiale ; une préparation prochaine qui comprend la période des fiançailles ; une préparation
immédiate en vue de la célébration du sacrement de mariage [23].
Au sujet de la période des fiançailles, qui est celle que prend en considération le texte du
Règlement, l’exhortation Familiaris consortio propose les orientations suivantes : « La préparation
prochaine, à partir de l’âge opportun et avec une catéchèse adéquate, un peu comme pour le
cheminement catéchuménal, comporte une préparation plus spécifique aux sacrements, comme si
on les redécouvrait. Cette catéchèse rénovée de tous ceux qui se préparent au mariage chrétien est
tout à fait nécessaire, afin que le sacrement soit célébré et vécu avec les dispositions morales et
spirituelles qui conviennent.
« La formation religieuse des fiancés devra être complétée, au moment voulu et selon les diverses
exigences concrètes, par une préparation à la vie à deux : une telle préparation, en présentant le
mariage comme un rapport interpersonnel de l’homme et de la femme à développer de façon
continuelle, devra les encourager à approfondir les problèmes de la sexualité conjugale et de la
paternité responsable, avec les connaissances essentielles qui leur sont connexes dans l’ordre
biologique et médical, et les amener à se familiariser avec de bonnes méthodes d’éducation des
enfants, en favorisant l’acquisition des éléments de base pour la conduite ordonnée de la famille
(travail stable, disponibilité financière suffisante, sage administration, notion d’économie familiale,
etc.) » [24].
Le Règlement se réfère à ces orientations de principe quand il dit : « Conscient de l’importance de
cette période [de préparation prochaine], le Coopérateur fiancé s’engage en un sérieux cheminement
de maturation humaine et chrétienne ».
L’exhortation Familiaris consortio offre une dernière orientation toujours à propos de la période des
fiançailles : « Enfin on ne devra pas négliger la préparation à l’apostolat familial, à la fraternité et à
la collaboration avec les autres familles, à l’insertion active dans de groupes, associations,
mouvements et initiatives ayant pour finalité le bien humain et chrétien de la famille » [25].
C’est dans ce contexte qu’il faut lire et comprendre la recommandation finale de l’article qui dit :
« [Le Coopérateur fiancé] apporte à l’Association l’originalité de son témoignage ».
[1]. Voir les références de la note 3 du commentaire de l’article 8.
[2]. Cf. GS, 48, 49b ; LG, 11b; AA, 11a.
[3]. GS, 49a.
[4]. GS, 50c.
[5]. Cf. GS, 50, 51.
[6]. LG, 35c ; AA, 11b.
[7]. Cf. GS, 48d, 50c, 52g ; LG, 11b ; FC, 19.
[8]. GS, 49b.
[9]. Cf. FC, 19.
[10]. GS, 50b.
[11]. GS, 51d.
[12]. FC, 28-35.
[13]. GE, 3a.
[14]. Cf. GS, 51c, 87c ; AA, 11c ; FC, 37.
[15]. Cf. FC, 37.
[16]. AA, 11b ; cf. LG, 11b ; OT, 2a.
[17]. AA, 12e ; cf. CfL, 46.
[18].. AA, 12b.
[19]. EN, 72 ; cf. CfL, 46.
[20]. AA, 11c.
[21]. Cf. Actes et documents du 2e Congrès mondial des Coopérateurs salésiens, 68s.
[22]. FC, 66ab.
[23]. FC, 66c-i.
[24]. FC, 66 e.
[25]. FC, 66f
ARTICLE.10
DANS LE MILIEU DE VIE ET DE TRAVAIL
Dans son travail, dans ses études, dans ses loisirs, le Coopérateur se veut continuateur de l’œuvre
créatrice de Dieu et témoin du Christ :
– par l’honnêteté, le dynamisme et la cohérence de sa vie ;
– par sa compétence professionnelle sérieuse et maintenue à jour ;
– par sa participation fraternelle aux joies, aux souffrances et aux justes aspirations de ses
compagnons ;
– par sa disponibilité généreuse au service du prochain en toute occasion.
Après la famille, le premier milieu dans lequel chaque Coopérateur est appelé à réaliser son
apostolat séculier salésien est le milieu social. Aux articles 10 et 11, le Règlement présente ce sujet
qui intéresse les secteurs névralgiques de la vie et de l’agir humain.
L’article 10 est de caractère général : il propose deux caractéristiques fondamentales de l’apostolat
« dans son travail, dans ses études , dans ses loisirs » pris globalement : continuer l’œuvre créatrice
de Dieu, être témoin du Christ. Il énumère, en outre, quelques exigences et quelques dispositions
liées à cette tâche apostolique. Dans leur ensemble elles font partie de « l’Evangile du travail »,
constituent une « spiritualité chrétienne du travail » et trait propre de l’esprit salésien.
L’article 11 aborde un point plus restreint, mais très actuel, de cet apostolat : l’engagement respectif
du Coopérateur et de l’Association en faveur de la justice sociale : « l’engagement socio-politique »
10.1. « Continuateur de l’œuvre créatrice de Dieu »
« Comme dit le Concile Vatican II, rappelle Jean Paul II dans son encyclique sur le travail humain,
“pour les croyants, une chose est certaine : l’activité humaine, individuelle ou collective, le
gigantesque effort par lequel les hommes, tout au long des siècles, s’acharnent à améliorer leurs
conditions de vie, considéré en lui-même, correspond au dessein de Dieu. L’homme, créé à l’image
de Dieu, a en effet reçu la mission de soumettre la terre et tout ce qu’elle contient, de gouverner le
cosmos en sainteté et justice et, en reconnaissant Dieu comme Créateur de toutes choses, de lui
référer son être ainsi que l’univers : en sorte que, tout étant soumis à l’homme, le nom même de
Dieu soit glorifié par toute la terre” (GS 34).
« Dans les paroles de la Révélation divine, on trouve très profondément inscrite cette vérité
fondamentale que l’homme, créé à l’image de Dieu, participe par son travail à l’œuvre du Créateur,
et continue en un certain sens, à la mesure de ses possibilités, à la développer et à la compléter, en
progressant toujours davantage dans la découverte des ressources et des valeurs incluses dans
l’ensemble du monde créé. [...]
« La conscience que le travail humain est une participation à l’œuvre de Dieu doit, […] imprégner
même “les activités les plus quotidiennes. Car ces hommes et ces femmes qui, tout en gagnant leur
vie et celle de leur famille, mènent leurs activités de manière à bien servir la société, sont fondés à
voir dans leur travail un prolongement de l’œuvre du Créateur, un service de leurs frères, un apport
personnel à la réalisation du plan providentiel dans l’histoire” (GS 34).
« Il faut donc que cette spiritualité chrétienne du travail devienne le patrimoine commun de tous.
[...] La conscience de participer par le travail à l’œuvre de la création constitue la motivation la plus
profonde pour l’entreprendre dans les différents secteurs. [...]
« Cette vérité d’après laquelle l’homme participe par son travail à l’œuvre de Dieu lui-même, son
Créateur, a été particulièrement mise en relief par Jésus-Christ [...]. En effet, Jésus proclamait et
surtout mettait d’abord en pratique “l’Evangile” qui Lui avait été confié, les paroles de la Sagesse
éternelle. Pour cette raison, il s’agissait vraiment de “l’Evangile du travail”, parce que celui qui le
proclamait était lui-même un travailleur, un artisan comme Joseph de Nazareth. [...] L’éloquence de
la vie du Christ est sans équivoque : il appartient au « monde du travail » ; il apprécie et respecte le
travail de l’homme ; on peut dire même davantage : il regarde avec amour ce travail, ainsi que ses
diverses expressions, voyant en chacune une manière particulière de manifester la ressemblance de
l’homme avec Dieu Créateur et Père. [...]
« Dans ses paraboles sur le Royaume de Dieu, Jésus-Christ se réfère constamment au travail : celui
du berger, du paysan, du médecin, du semeur, du maître de maison, du serviteur, de l’intendant, du
pêcheur, du marchand, de l’ouvrier. Il parle aussi de divers travaux des femmes. Il présente
l’apostolat à l’image du travail manuel des moissonneurs ou des pêcheurs. Il se réfère aussi au
travail des scribes » [1].
10.2. « Témoin du Christ »
Dans les deux sacrements de l’initiation chrétienne, le Christ fait des laïcs ses témoins et il les
vivifie avec son Esprit : il les fait participer à sa fonction d’ordonner et d’animer les réalités
humaines selon son projet ou son message [2].
Le fait de vivre dans les conditions communes du monde et d’exercer son travail sur le terrain de la
culture, de l’économie, des arts, des sciences, des institutions civiles etc., confère au témoignage et
à l’engagement chrétien des laïcs un caractère spécifique et une efficacité particulière. [3]
Ce n’est pas tout : c’est leur « tâche propre » et « principale » [4] que de remplir ces fonctions et ils
y ont « une place de premier plan » [5], que « personne ne peut assumer comme il faut à leur
place » [6]. En effet « l’Evangile ne peut s’enfoncer profondément dans les esprits, dans la vie, dans
le travail d’un peuple sans la présence active des laïcs » [7].
Toujours selon Vatican II, ce témoignage du Christ et cette volonté d’animer l’ordre temporel de
l’intérieur et à la lumière de l’Evangile, doivent s’exprimer par toute la vie et l’activité des laïcs,
ainsi que par la parole [8].
Comment réaliser concrètement cette double tâche de continuer l’œuvre créatrice de Dieu et de
témoignage du Christ ? Dans le sillage du Concile, le Règlement signale quelques qualités et
dispositions qui, dans l’existence concrète du Coopérateur, doivent devenir une synthèse vitale.
10.3. « L’honnêteté, le dynamisme et la cohérence de sa vie ».
– Une première qualité requise est que le travail ou les études et les autres activités s’exercent
« avec honnêteté ». Autrement ils deviendraient un contre-témoignage et une regrettable hypocrisie.
Dans plusieurs contextes sociaux du premier aussi bien que du deuxième ou tiers monde, différents
phénomènes de corruption et de désintérêt du bien commun ont fait naître ce qu’on a appelé « la
question morale ». L’honnêteté jouit toujours, mais spécialement par rapport à ce genre de faits,
d’un potentiel irradiant : elle dénonce par les faits ces situations négatives, elle pousse au bien et au
vrai et par conséquent vers le Christ et vers la communauté animée par son Esprit de vérité [9].
– Une deuxième qualité fondamentale est « le dynamisme ». On ne peut pas être continuateurs de
l’œuvre de Dieu ni témoins du Christ « homme du travail » et de son « Evangile du travail », sans
s’engager avec sérieux et constance dans son travail.
Le dynamisme est une vertu évangélique : « Saint Paul était fier d’exercer son métier (il fabriquait
probablement des tentes), et il pouvait ainsi, tout en étant apôtre, gagner son pain tout seul » [10].
Le dynamisme est un trait caractéristique de l’esprit salésien [11]. Surtout en référence à certains
contextes de travail minés par le non-engagement et l’absentéisme, il prend toute sa valeur et offre
un témoignage chrétien, significatif et indispensable.
– Une troisième qualité fondamentale est la « cohérence de la foi avec la vie » et la pleine
harmonisation des valeurs humaines avec les valeurs chrétiennes. [12]A cet égard, Gaudium et spes
a fait une mise au point, qui souligne une responsabilité plus grave et plus exigeante pour chaque
chrétien : « Le Concile exhorte les chrétiens, citoyens de l’une et de l’autre cité, à remplir avec zèle
et fidélité leurs tâches terrestres, en se laissant conduire par l’esprit de l’Evangile. Ils s’éloignent de
la vérité ceux qui, sachant que nous n’avons point ici-bas de cité permanente, mais que nous
marchons vers la cité future, croient pouvoir, pour cela, négliger leurs tâches humaines, sans
s’apercevoir que la foi même, compte tenu de la vocation de chacun, leur en fait un devoir plus
pressant. Mais ils ne se trompent pas moins ceux qui, à l’inverse, croient pouvoir se livrer
entièrement à des activités terrestres en agissant comme si elles étaient tout à fait étrangères à leur
vie religieuse – celle-ci se limitant alors pour eux à l’exercice du culte et à quelques obligations
morales déterminées.
« Ce divorce entre la foi dont ils se réclament et le comportement quotidien d’un grand nombre est à
compter parmi les plus graves erreurs de notre temps. Ce scandale, déjà dans l’Ancien Testament,
les prophètes le dénonçaient avec véhémence et, dans le Nouveau Testament, avec plus de force
encore, Jésus-Christ Lui-même le menaçait de graves châtiments (cf. Mt 23, 3-23). Que l’on ne se
crée donc pas d’opposition artificielle entre les activités professionnelles et sociales d’une part, la
vie religieuse d’autre part. En manquant à ses obligations terrestres, le chrétien manque à ses
obligations envers le prochain, bien plus, envers Dieu Lui-même, et il met en danger son salut
éternel. A l’exemple du Christ qui mena la vie d’un artisan, que les Chrétiens se réjouissent plutôt
de pouvoir mener toutes leurs activités terrestres en unissant dans une synthèse vitale tous les
efforts humains, familiaux, professionnels, scientifiques, techniques, avec les valeurs religieuses,
sous la souveraine ordonnance desquelles tout se trouve coordonné à la gloire de Dieu » [13].
10.4. « Compétence professionnelle sérieuse et maintenue à jour »
Une influence humaine et chrétienne vraiment efficace peut s’exercer sur le milieu social en
particulier par celui qui est apprécié pour sa compétence professionnelle, c’est à dire son savoirfaire, son dévouement, son esprit d’initiative et sa sagesse. Il est illusoire de penser pouvoir être
bons chrétiens et apôtres séculiers, sans une compétence professionnelle « sérieuse et maintenue à
jour » comme dit le Règlement. Au lieu de rapprocher, l’incompétence ou la compétence
approximative dans son travail ou sa profession, l’inconstance dans l’application ou les attitudes
passives, conformistes, bornées ou manquant de créativité et de générosité, éloignent du Christ et de
l’Eglise.
C’est pour cela que Vatican II ne cesse de rappeler l’attention des fidèles laïcs sur ce point :
« Lorsqu’ils agissent, soit individuellement, soit collectivement, comme citoyens du monde, ils
auront à cœur, non seulement de respecter les lois propres à chaque discipline, mais d’y acquérir
une véritable compétence », nous dit Gaudium et spes [14].
« Les laïcs accomplissent cette mission de l’Eglise dans le monde [...] par cette pleine conscience de
leur responsabilité propre dans la vie de la société, et il s’efforcent d’accomplir leurs devoirs
familiaux, sociaux et professionnels avec générosité chrétienne », nous dit le décret sur l’apostolat
des laïcs [15]. Le même décret dit encore : « Qu’ils estiment beaucoup la compétence
professionnelle, le sens familial et civique , et les vertus qui regardent la vie sociale telles que la
probité, l’esprit de justice, la sincérité, la délicatesse, la force d’âme : sans elles il n’y a pas de vraie
vie chrétienne » [16].
10.5. Partage fraternel et disponibilité généreuse.
Deux autres manières qui font du Coopérateur le continuateur de l’œuvre créatrice de Dieu et
témoin du Christ sont les suivantes :
- « le partage fraternel des joies, des souffrances et des justes aspirations de ceux qui nous
entourent »,
- « la disponibilité généreuse au service du prochain en toute occasion ».
La première phrase doit se comprendre dans le contexte de la solidarité, réelle et profonde, à
laquelle l’Eglise du Concile a voulu conformer ses dispositions et son action dans le monde
contemporain. « Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des
pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les
angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur
cœur » [17].
Le texte du Règlement parle de « justes » aspirations, parce que dans la vie de tous les jours
beaucoup de gens n’aspirent pas à des choses valables, et le Coopérateur n’est évidemment pas
encouragé à y participer.
Quelles sont ces justes aspirations ? Sans doutes les désirs simples et honnêtes de tous les jours,
orientés à procurer à chacun une « qualité de vie » selon la dignité de la personne humaine, compte
tenu des possibilités concrète de temps et de lieu.
En particulier, les aspirations les plus universelles, proposées par les documents du magistère
conciliaire et postconciliaire :
– l’aspiration des femmes à « la parité avec les hommes, non seulement de droit mais de fait » ;
– l’aspiration des ouvriers et des agriculteurs à être dans la condition non seulement de « gagner le
nécessaire pour vivre, mais aussi de développer leur personnalité par le travail et de prendre leur
part dans l’organisation de la vie économique, sociale, politique et culturelle » ;
– l’aspiration très profonde des « personnes et des groupes à une vie libre, digne de l’homme,
mettant à leur service les grandes possibilités que leur offre le monde aujourd’hui » ;
– l’aspiration à renforcer la maîtrise de l’homme sur la création et à « instaurer un ordre politique,
social et économique qui serve toujours plus et mieux l’homme, et qui permette à chacun et à
chaque groupe d’affirmer sa dignité propre et de la développer » [18] ;
– l’aspiration des peuples en voie de développement à atteindre une position de pleine dignité et
liberté sur le plan politique, économique et culturel, par un processus inspiré par les principes
évangéliques de communion et participation [19].
La deuxième phrase citée par le Règlement, doit se comprendre dans la perspective de l’action de
charité propre à la mission de l’Eglise, qui se donne comme but de soulager les différentes formes
de pauvreté et de souffrance physique et morale, dans le respect des personnes à qui elle s’adresse.
Il s’agit, en particulier, des œuvres de charité et d’assistance réciproque promues ou approuvées par
l’autorité ecclésiastique. « Les laïcs, nous dit le décret conciliaire sur leurs activités, doivent estimer
profondément et aider, selon leur pouvoir, les œuvres de charité et les initiatives concernant
l’assistance sociale, qu’elles soient privées ou publiques, sans oublier les initiatives internationales ;
par elles on apporte un secours efficace aux personnes et aux peuples qui souffrent. Qu’en cela ils
collaborent avec tous les hommes de bonne volonté » [20].
Les événements quotidiens nous placent souvent devant des situations de besoin qui exigent une
intervention immédiate et qu’il n’est pas toujours possible de réaliser selon les normes prévues. Le
Règlement s’y réfère aussi quand il suggère au Coopérateur la disponibilité généreuse au service du
prochain « en toute occasion ».
[1]. LE, 25s. ; voir aussi la suite du n° 26 et le n° 27 qui complètent cette synthèse sur une
spiritualité chrétienne du travail.
[2]. Cf. LG, 31a, 35a ; AA, 2b, 5-7 ; PO, 2a.
[3]. Cf. LG, 31b, 35b ; AA, 2b.
[4]. AA, 7c ; AG, 21c.
[5]. LG, 35b.
[6]. AA, 13a.
[7]. AG 21ac ; AA, 13ac.
[8]. Cf LG, 35b, 36b ; AA, 13ac ; AG, 21c.
[9]. Cf. AA, 13b.
[10]. LE, 26.
[11]. Cf. RVA, art. 30.
[12]. Cf. AA, 13b.
[13]. GS 43a.
[14]. GS, 43b.; également LG, 36b.
[15]. AA, 13b.
[16]. AA, 4i ; également GS, 72a.
[17]. GS, 1.
[18]. Cf. GS, 9.
[19]. Cf. DP, 12, 420, 473, 653, 847, 1015, 1126
[20]. AA, 8g.
ARTICLE 11
DANS LA REALITE SOCIALE
§ 1. Le Coopérateur, fidèle à l’Evangile et aux orientations de l’Eglise,
–
acquiert une conscience exacte de sa responsabilité et de son devoir de participation à la vie
sociale dans les secteurs de la culture, de l’économie, de la politique ;
–
il refuse ce qui provoque ou entretient l’injustice et l’oppression, la marginalité et la violence,
et travaille courageusement à en supprimer les causes ;
–
il s’engage à assainir et à rénover les mentalités et les mœurs, les lois et les structures des
milieux où il vit, et travaille à les rendre plus conformes aux exigences évangélique de liberté, de
justice et de fraternité ;
–
pour rendre ses interventions plus efficaces il s’insère, selon ses capacités et ses possibilités,
dans les structures culturelles, syndicales et socio-politiques.
§ 2. L’Association comme telle reste étrangère à toute politique de parti, en raison de sa nature
ecclésiale et conformément à la pensée de Don Bosco. Toutefois, elle intervient courageusement,
selon les directives de l’Eglise particulière, pour promouvoir et défendre les valeurs humaines et
chrétiennes. Elle éclaire et engage chaque Coopérateur à assumer avec responsabilité ses devoirs
dans la société.
Par le biais de Coopérateurs qualifiés, elle se rend présente dans les mouvements apostoliques et les
organismes qui se proposent en particulier le service des jeunes et de la famille, la solidarité avec
les peuples en voie de développement et la promotion de la justice et de la paix.
Cet article aborde un aspect particulier de l’engagement social du Coopérateur : celui qui concerne
la réalité sociale. Il distingue avec bonheur l’engagement du Coopérateur comme individu (§ 1) et la
ligne d’action spécifique de l’Association comme telle (§ 2).
Il faut signaler d’abord que, comme le dit clairement le titre, l’article préfère parler d’apostolat
séculier « dans la réalité sociale », plutôt que « d’engagement socio-politique », comme le
suggéraient quelques ébauches de révision. Cette deuxième formulation est d’usage courant dans
différents milieux catholiques, spécialement du Premier et Tiers-monde ; dans d’autres milieux au
contraire, par exemple dans le Deuxième monde, elle prête facilement à des équivoques. Cela ne
signifie pas que le Règlement la critique ou qu’il ne veuille pas en assumer les contenus valables
qu’elle comporte, au contraire : cela ressort du texte même de l’article. L’option prise n’a été
suggérée que pour des motifs de clarté de langage et de la nécessité d’ouvrir aussi la possibilité
d’engagement dans des situations politiques particulières et délicates, où le terme « politique » est
très vite compris comme « de parti » ou « de gouvernement ».
En énumérant certaines responsabilités majeures du Coopérateur en tant qu’individu et de
l’Association en ce domaine, l’article s’inspire du magistère conciliaire et post-conciliaire, qui est
intervenu à plusieurs reprises à propos de l’engagement des chrétiens pour la justice et la libération
intégrale, et veut rester dans la ligne d’une fidélité dynamique à Don Bosco.
11.1. L’orientation de Don Bosco en son temps
Comme pour d’autres aspects de la vocation du Coopérateur, il est essentiel ici de se référer à Don
Bosco est essentielle. Sans doute, les situations actuelles sont très différentes du siècle passé : c’est
pourquoi la fidélité au Fondateur qui s’impose ne doit pas être matérielle ni figée, mais vitale et
dynamique.
Avant tout, il est bon de faire une mise au point historique. Au temps de Don Bosco la politique de
parti était réservée à l’élite, et le milieu populaire en était exclu. Les mouvements démocratiques
survenus par la suite ont offert de grandes possibilités de participation aux chrétiens laïcs pour
définir le bien commun et ils leur ont permis de détecter des orientations et des interventions non
seulement utiles mais souvent nécessaires.
Selon le Chapitre général spécial, Don Bosco distinguait deux façons possibles d’agir sur les
structures sociales de son temps, pour les rendre plus justes :
1) Une action de vaste envergure, où la politique coïncide avec le projet global de Dieu sur
l’humanité ; c’est donc la Politique avec P majuscule ou la « Politique du Notre Père », comme il
disait. Elle est inhérente à l’œuvre d’évangélisation, parce qu’elle inclut la promotion intégrale de la
personne humaine : ici les Coopérateurs, comme individu et comme Association, travaillent avec
toutes les activités propres à la mission salésienne et principalement par leurs activités éducatives.
2) Une vision plus stricte, limitée aux perspectives des mouvements et des partis politiques, qui
ont en vue la conquête, la gestion et le maintien du pouvoir politique : Don Bosco a voulu que la
Famille apostolique fondée par lui et ses groupements, en tant que tels, s’en abstiennent. « Si nous
voulons aller de l’avant, disait-il à propos des activités des Coopérateurs, il faut qu’on ne parle
jamais de politique, ni pour ni contre [...]. Que notre programme soit de faire du bien aux enfants
pauvres » [1]
Don Bosco indiquait ainsi l’« espace social et politique » précis et concret, où lui et sa Famille
apostolique devaient intervenir de façon unitaire et sans collusions avec des mouvements
idéologiques et des partis, pour promouvoir le bien de la société. Les œuvres salésiennes et les
différentes activités des Coopérateurs ont constitué de fait (peut-être sans le remarquer
directement), une force sociale, qui, par l’éducation des jeunes, l’évangélisation des gens simples, la
diffusion de la bonne presse, la création d’une opinion publique, la préparation « d’honnêtes
citoyens et bons chrétiens » et aussi de leaders catholiques, a pesé sur le contexte social, et donc
aussi politique au sens le plus élevé, de nombreux pays. Ce n’est pas ici le moment pour juger
comme elle a pesé ni avec quels résultats, positifs ou critiquables. Il nous suffit avoir souligner le
fait.
11.2. L’orientation actuelle de l’Association
Il est bien plus urgent prendre conscience de nos nouvelles responsabilités actuelles. « La réponse
des Salésiens au problème de la justice, déclare le Chapitre général spécial, se fait dans un contexte
culturel nouveau : elle est sollicitée non pas par des motifs contingents de partis politiques ou
d’idéologies passagères, mais par les exigences mêmes que pose aujourd’hui à l’éducateur chrétien
la formation intégrale “du parfait chrétien et de l’honnête citoyen” : ce sont l’Eglise et la société qui
nous demandent de former des hommes capables d’apporter plus de justice dans un monde chargé
de graves problèmes » (ACGS, 67), et qui demandent aux Coopérateurs leur présence chrétienne
dans le domaine de la justice sociale. Le Chapitre général spécial signale justement que « un des
champs de la mission salésienne que nous devons partager ensemble dans une forme toujours plus
organique » est « l’engagement pour la justice dans le monde, réalisé selon les circonstances
opportunes et dans les formes socialement et politiquement possibles » [2]
Le Règlement va dans cette direction et opère une double option de caractère général :
1) Chaque Coopérateur, comme homme et chrétien, a des responsabilités précises dans le domaine
social, qui vont jusqu’à son insertion « dans les structures culturelles, syndicales, socio-politiques »,
comme dit le § 1 de l’article.
2) « L’Association comme telle, dit le § 2 de l’article, reste étrangère à toute politique de parti, en
raison de sa nature ecclésiale et conformément à la pensée de Don Bosco ». Toutefois elle intervient
dans la réalité sociale par d’autres sortes d’engagements positifs, propres aux associations
ecclésiales qui ont un rapport spécial avec les Pasteurs de l’Eglise, comme on le verra plus loin.
L’apostolat dans la réalité sociale, tant du Coopérateur que de l’Association, ne doit pas s’exercer
de manière individualiste et arbitraire ; il doit s’inspirer de deux critères généraux : 1) les
orientations de l’Evangile ; 2) les indications et directives de l’Eglise.
11.3. Esprit évangélique de l’engagement dans la réalité sociale et politique
La référence obligée à l’Evangile devrait, entre autres choses, dissiper immédiatement les méfiances
prévisibles et les oppositions : les options du Règlement ne réduisent pas le message du Christ à une
simple proposition sociale, comme le craignaient certains et comme c’est malheureusement arrivé
dans un passé récent dans certains contextes sociaux et ecclésiaux, souvent à cause d’une formation
chrétienne inadéquate sur le sujet.
Il demande que le Coopérateur soit « fidèle à l’Evangile » dans l’exercice de ses responsabilités
sociales. Son engagement pour la justice et pour la libération intégrale doit se comprendre comme
un point essentiel, mais non exclusif, de sa mission chrétienne, et se référer toujours à l’Evangile. Il
faut donc l’exercer dans un esprit authentiquement chrétien et salésien, comme une manière
concrète d’évangéliser la réalité sociale.
En résumé : la vraie mission salésienne requiert une double liaison : l’aide directe aux pauvres avec
la lutte contre les causes extérieures de la pauvreté collective et de l’injustice ; et cet effort de
promotion humaine avec l’authentique évangélisation des pauvres et des riches. En d’autres termes,
ne jamais séparer l’évangélisation des individus de l’évangélisation collective de leur milieu [3].
11.4. Les orientations de l’Eglise
La constitution pastorale Gaudium et spes nous dit : « Les Evêques, qui ont reçu la charge de diriger
l’Eglise de Dieu, qu’ils prêchent avec leurs prêtres le message du Christ de telle façon que toutes les
activités terrestres des fidèles puissent être baignées de la lumière de l’Evangile » [4].
Or depuis un siècle, les Papes ont exercé cette tâche avec de nombreux documents par lesquels ils
ont essayé de traduire le message évangélique pour les hommes de notre temps [5]. En ces dernières
années, de nombreuses Conférences épiscopales ont pris position sur ce sujet par des textes
officiels. Tout catholique sait qu’il est tenu, en la matière, de suivre les directives pastorales de son
évêque et de la Conférence épiscopale de sa région ou de son pays.
Il tiendra compte aussi de la constitution Gaudium et spes : « Qu’ils attendent des prêtres lumières
et forces spirituelles. Qu’ils ne pensent pas pour autant que leurs pasteurs aient une compétence
telle qu’ils puissent leur fournir une solution concrète et immédiate à tout problème, même grave,
qui se présente à eux, ou que telle soit leur mission. Mais plutôt éclairés par la sagesse chrétienne,
prêtant fidèlement attention à l’enseignement du Magistère, qu’ils prennent eux-mêmes leurs
responsabilités. Fréquemment, c’est leur vision chrétienne des choses qui les inclinera à telle ou
telle solution, selon les circonstances. Mais d’autres fidèles, avec une égale sincérité, pourront en
juger autrement, comme il advient souvent et à bon droit. S’il arrive que beaucoup lient facilement,
même contre la volonté des intéressés, les options des uns ou des autres avec la message
évangélique, on se souviendra en pareil cas que personne n’a le droit de revendiquer d’une manière
exclusive pour son opinion l’autorité de l’Eglise. Que toujours, dans un dialogue sincère, ils
cherchent à s’éclairer mutuellement, qu’ils gardent entre eux la charité et qu’ils aient avant tout le
souci du bien commun » [6].
11.5. Tâches individuelles du Coopérateur (art. 11 § 1)
11.5.1. « Il acquiert une conscience exacte » (art. 11 § 1)
Une de premières tâche individuelle du Coopérateur, par rapport à son apostolat dans la réalité
sociale, concerne sa formation : « Le Coopérateur, dit le paragraphe 1, [...] acquiert une conscience
exacte de sa responsabilité et de son devoir de participation à la vie sociale dans les secteurs de la
culture, de l’économie, de la politique ».
Même si le passé récent a connu des efforts louables à cet égard, il faut regretter aujourd’hui qu’une
telle formation fasse plutôt défaut dans de larges couches de ceux qui se disent « catholiques
pratiquants ». D’autre part, il est inconcevable de vouloir exercer un service salésien valable, en
particulier sur ce terrain, qui n’est certainement pas facile, sans une bonne préparation préalable : on
serait facilement manipulés et utilisés par des personnes ou groupes mieux préparés, plus aguerris
dans le domaine politique, financier et sociologique ; on s’exposerait à la faillite, comme
l’imprudente expérience de nombreux groupes l’a bien démontré.
Vatican II a réaffirmé la nécessité d’une éducation civile et politique, spécialement chez les
jeunes [7] et, heureusement, ils sont nombreux aujourd’hui les Coopérateurs et les Coopératrices
qui perçoivent la nécessité d’une telle formation.
Les contenus de cette formation sont essentiellement les suivants :
– La connaissance du message social contenu dans l’Evangile et la doctrine de l’Eglise en fait de
justice et de libération ;
– La connaissance des responsabilités actuelles des chrétiens laïcs dans le domaine social et des
différentes façons d’y prendre part ;
– La préparation aux responsabilités civiles, sociales et politiques ;
– La connaissance de la situation sociale où l’on vit (systèmes économiques, sociaux et culturels,
exigences, maux sociaux, idéologies, forces d’action...) et son évaluation à la lumière de l’Evangile.
Les objectifs de cette formation ne sont pas simplement d’avoir une information à jour, certes à ne
pas sous-estimer, mais plus spécifiquement :
– d’acquérir une « conscience exacte », et donc d’être capables d’analyser et de critiquer des
situations injustes qui existent dans la société et de rechercher de nouvelles formes de vie collective
mieux accordées à la dignité de la personne humaine ;
– de favoriser la libération des nombreuses situations d’oppression, de marginalité et de violence,
dont sont surtout victimes les sans défense et les plus démunis ;
– de devenir maître de ses propres options en surmontant l’ignorance, l’inertie, la peur injustifiée et
en acquérant confiance et courage.
Bien que prioritaire et indispensable, la formation n’est pas tout et elle doit avoir pour but l’action.
Les autres tâches du Coopérateur reprises par le Règlement concernent toutes son action concrète.
11.5.2. « Il refuse tout ce qui provoque ou entretient l’injustice » (art. 11 § 1)
Dans tous les milieux il y a malheureusement des phénomènes d’injustice, d’oppression, de
marginalité et de violence. Souvent ils prennent des formes et des manifestations différentes suivant
les continents ou les lieux. Le progrès technologique en crée souvent de nouvelles, peut-être moins
voyantes, mais pas moins réelles et douloureuses.
En face de ces faits, l’engagement du Coopérateur s’exprime par le refus sérieux, motivé et
courageux ; un refus qui sait, selon les cas, recourir aux manières, aux moyens et aux canaux les
plus opportuns et efficaces offerts par la situation locale. C’est la forme la plus élémentaire du
témoignage évangélique en vue de créer une société plus juste et plus fraternelle.
Il faudra se rappeler aussi que, souvent, le fait de couvrir par le « silence » des situations d’injustice,
d’oppression, de marginalité et de violence, en invoquant la nécessité de la prudence (souvent trop
humaine !) ou, pis, par peur, c’est déjà en quelque sorte entrer en connivence avec ceux qui
provoquent de telles situations inhumaines.
11.5.3. « Il travaille courageusement à en supprimer les causes » (art. 11 § 1)
Le refus exprimé à l’exemple du Christ (les fameux « malheureux êtes-vous ! » en Mt 23,15-29) est
déjà un pas important et parfois une mesure suffisante pour corriger certaines situations
inacceptables du point de vue humain et chrétien. Cependant, dans beaucoup de cas c’est insuffisant
et le refus doit être suivi d’une action efficace, qui vise à « supprimer les causes » de ces situations
injustes, comme le dit textuellement le Règlement.
Cette action peut prendre les formes les plus diverses et opportunes, à évaluer sur place, cas par cas.
A titre d’exemple on peut prendre comme hypothèse : la pression sur les autorités responsables ou
de toute façon concernées ; la sensibilisation du milieu où l’on travaille ou même de l’opinion
publique sur grande échelle par les moyens de la communication sociale ; faire de gestes concrets
de solidarité qui expriment l’engagement chrétien en faveur des opprimés [8].
11.5.4. « Il s’engage à assainir et à rénover les mentalités et les mœurs, les lois et les structures ».
(art. 11 § 1)
La constitution pastorale Gaudium et spes a souligné certains grands phénomènes contemporains
qui ont des répercussions plus ou moins fortes sur le milieu plus petit et peut-être plus modeste où
opèrent aujourd’hui beaucoup de Coopérateurs et de Coopératrices : l’accélération de l’histoire avec
les changements rapides et profonds qu’elle provoque dans tous les secteurs de l’agir humain, y
compris l’agir religieux et ecclésial ; la socialisation qui multiplie les liens et les relations humaines
de tout genre ; la sécularisation et la conscience qui en résulte pour l’homme de sa domination de la
nature, de l’autonomie des valeurs terrestres et de leur distinction des valeurs religieuses ; la
personnalisation, c’est-à-dire la nouvelle prise de conscience pour l’homme moderne d’être au
centre de l’histoire et d’être le protagoniste de son développement dans le sens positif ou négatif.
Ces faits complexes font percevoir les aspects relatifs et changeants des mentalité, des lois, des
institutions et des valeurs héritées du passé ; ils mettent à nu de situations de retards et
d’inadaptation, souvent d’injustice ; ils créent des situations, plus ou moins généralisées, de
déséquilibre, de contraste et de conflit [9].
En contact avec cette réalité quotidienne, le Coopérateur évitera les attitudes négatives : la passivité
inerte et peureuse, le désintéressement et l’absentéisme égoïste, l’intégrisme nostalgique du passé
ou l’utopie révolutionnaire et velléitaire.
Comment éviter tout cela ? Par une attitude positive en communion avec l’Eglise locale :
l’engagement réaliste, constant et courageux en suivant une triple ligne d’action :
1) Assainir mœurs et les institutions qui ne respectent pas la dignité de la personne humaine, en les
libérant de l’égoïsme, de l’oppression, de la violence, du fait d’être considérées comme des valeurs
absolues ;
2) Associer les valeurs humaines et chrétiennes du passé avec celles qui émergent aujourd’hui, et
contribuer à maintenir et à faire fonctionner correctement les structures saines et toujours valables,
dans le respect de leur juste autonomie ;
3) Renouveler les mentalités, les lois, les formes d’organisation qui ne sont plus adaptées aux
conditions et aux exigences qui ont changé, et rendre ainsi plus effectif et généreux le progrès civil,
social, culturel, économique et politique [10].
11.5.5. « Il travaille à les rendre plus conformes aux exigences évangéliques ». (art. 11 § 1)
Mais sur base de quels idéaux aura-t-il à s’acquitter de ces tâches ? La société actuelle est
pluraliste : on peut dire que la situation normale est de vivre avec des personnes qui ont une vision
différente de la vie, même si parfois elles se disent toutes chrétiennes. Il s’agit alors de se laisser
guider par les comportements et les enseignements du Christ, c’est-à-dire par « les exigences
évangéliques de liberté, de justice et de fraternité », comme dit le Règlement. La signification
évangélique de ces termes sera exposée dans le commentaire de l’article 14.
Il est utile ici de faire quelques considérations concrètes. Il s’agit de faire connaître les idéaux de
l’Evangile et d’en témoigner ; il s’agit de reconnaître les valeurs chrétiennes présentes chez ceux
avec qui l’on vit et travaille, et de les amener à accepter le droit et le devoir de tous d’organiser la
vie sociale de façon que le respect et la promotion de la personne humaine soient garantis et
favorisés au maximum ; il s’agit d’offrir volontiers sa collaboration à ceux qui visent les mêmes
objectifs valables, et faire en sorte que chez le plus grand nombre possible se renforce la conviction
qu’un système social équitable a tout à gagner de la lumière de la foi, de l’espérance et de la charité
chrétiennes et adaptées au cours de l’histoire [11].
À propos de certaines formes d’athéisme contemporain qui, pour se justifier, font appel à
l’engagement pour l’homme, Gaudium et spes déclare : « L’Eglise tient que la reconnaissance de
Dieu ne s’oppose en aucune façon à la dignité de l’homme, puisque cette dignité trouve en Dieu luimême ce qui la fonde et ce qui l’achève.[...] L’Eglise enseigne, en outre, que l’espérance
eschatologique ne diminue pas l’importance des tâches terrestres, mais en soutient bien plutôt
l’accomplissement par de nouveaux motifs. À l’opposé, lorsque manquent le support divin et
l’espérance de la vie éternelle, la dignité de l’homme subit une très grave blessure, comme on le
voit souvent aujourd’hui » [12].
11.5.6. « Il prend place, selon ses capacités et ses possibilités, dans les structures culturelles,
syndicales et socio-politiques ». (art. 11 § 1)
Dans les différents contextes actuels, les interventions dans le social ne peuvent pas se concevoir de
façon individualiste ni se réaliser isolément. Pour être efficaces, elles requièrent, ordinairement, la
présence active et responsable des fidèles laïcs dans ces organismes (par exemple les partis, les
syndicats, les groupes d’opinion, les comités de quartier, les associations de familles...) qui, par
l’analyse de la situation, la programmation d’objectifs concrets et l’élaboration de stratégies
d’intervention, favorisent une action unitaire, incisive, adhérente aux diverses situations et
conditions locales [13].
Le Règlement, cohérent en ce domaine avec une formule générale, non pas maximaliste mais
réaliste, n’impose pas d’engagements exorbitants ni de quelque façon décourageants ; il propose des
engagements exigeants mais appropriés à chacun et le plus souvent déjà inhérents à son travail ou à
sa profession : il demande au Coopérateur d’entrer dans ces structures « selon ses capacités et ses
possibilités ».
11.5.7. Hommes et femmes nouveaux (art. 11 § 1)
Pris dans leur ensemble, les engagements cités indiquent ce que veut dire pour le Coopérateur et la
Coopératrice être collaborateur de Dieu créateur et témoin du Christ dans ce secteur important de la
vie chrétienne. Cette tâche a très bien été synthétisée par le décret conciliaire Ad Gentes : « Il faut
donc qu’apparaisse en eux [hommes et femmes chrétiens] l’homme nouveau créé selon Dieu dans la
justice et la sainteté véritable (Ep 4, 24). Ils doivent exprimer cette nouveauté de vie dans le milieu
social et culturel de leur patrie, selon les traditions nationales »[14].
Ce sont ces hommes et ces femmes nouveaux qui pourront susciter des communautés croyantes et
fraternelles, et une humanité renouvelée [15].
11.6. Lignes d’action de l’Association
11.6.1. Association « étrangère aux partis politiques » (art. 11 § 2)
L’Association des Coopérateurs « reste étrangère à toute politique de parti ». Cette caractéristique
reflète les intentions proclamées par Don Bosco Fondateur, comme cela a été dit plus haut [16].
Cette configuration « indépendante des partis » est aussi requise par « la nature ecclésiale » de
l’Association, comme dit le § 2 de l’article. En effet, elle est « une Association publique de fidèles
qui collaborent activement à la mission [salésienne] au nom de l’Eglise » (art. 6). Comme telle, elle
a des rapports particuliers avec la hiérarchie ecclésiastique, elle opère « en son nom », elle en
implique la responsabilité : cela suppose de s’abstenir de prendre part à toute politique de parti,
pour garantir la liberté d’action de l’autorité ecclésiastique vis-à-vis des partis politiques.
Que signifie dans le concret la fait que l’Association « reste étrangère à toute politique de parti » ?
Cela veut dire qu’elle n’est pas, et qu’elle ne peut pas se transformer en un groupe qui appuierait ou
soutiendrait ou opterait de quelque manière pour l’adhésion à un parti déterminé, en en adoptant,
par conséquent, les options, les stratégies, les méthodes, les mécanismes et les idéologies propres.
Dans l’Eglise il y des mouvements, des groupes et des institutions dont les finalités apostoliques
comportent la possibilité d’opter pour un parti, ce qui est donc pour eux parfaitement légitime. Ce
n’est pas le cas de l’Association des Coopérateurs.
Au cas où un Centre ou un Conseil local ou provincial ou national le ferait, il trahirait son identité
spécifique et agirait ouvertement contre son propre Règlement.
Les interventions de l’Association dans la réalité sociale et politique sont différentes d’une adhésion
à des politiques de parti. Le texte du Règlement en mentionne quelques-unes de majeure
importance.
11.6.2. « Elle intervient courageusement pour promouvoir et défendre les valeurs humaines et
chrétiennes » (art. 11 § 2)
Une première sorte d’intervention concerne les nombreuses activités collectives qui ont pour but de
promouvoir et de défendre les valeurs humaines et chrétiennes. A cet égard, le Règlement ne
descend pas dans les détails. Ce serait presque impossible, vu l’extension mondiale de
l’Association. Cependant il fait deux mises au point importantes.
Il déclare, avant tout, que l’Association, aux différents niveaux et par ses organismes représentatifs
(Conseils, assemblées, réunions), n’intervient pas n’importe comment, mais « courageusement ».
C’est une mise au point très salésienne et opportune, surtout si l’on tient compte des accusations,
pas toujours sans fondement, de peur, de prudence excessive, de retard faites à l’Eglise et aux
groupes qui la composent, à propos de leur présence et de leur action dans la réalité sociale.
Il déclare ensuite que l’Association intervient « selon les directives de l’Eglise particulière ». Cette
mise au point aussi est pertinente, car les situations sont souvent différentes d’un pays à l’autre et,
par conséquent, les indications pratiques de l’autorité ecclésiastique peuvent aussi varier d’un
endroit à l’autre, car il faut tenir compte de la réalité locale. Il faut savoir que l’Eglise particulière
dépend de la Conférence épiscopale régionale ou nationale ou continentale, selon les cas. Ses
directives peuvent concerner beaucoup de façons d’agir et de types d’intervention : par exemple, la
dénonciation prophétique de situations injustes ; l’approbation d’initiatives valables : le soutien et la
collaboration pour leur réalisation. Elles peuvent concerner différents secteurs de l’économie, de la
culture, de la politique.
Ce sera la tâche des Centres et des Conseils, aux différents niveaux, d’étudier concrètement, selon
leurs propres responsabilités, la mise en pratique de cette orientation. Tout en se gardant disponibles
pour toutes les interventions conformes aux directives de la hiérarchie, il sera normal privilégier
celles qui touchent directement le monde des jeunes et des milieux populaires, qui sont les
destinataires privilégiés de la mission salésienne.
11.6.3. « Elle éclaire et engage chaque Coopérateur » (art. 11 § 2)
Une deuxième tâche de l’Association concerne plutôt les activités destinées à « éclairer » et à
« engager » les Coopérateurs dans leur apostolat sur le terrain social.
Sans doute il revient à chaque Coopérateur de soigner sa propre formation socio-politique, comme
on l’a vu. Mais dans ce domaine, l’Association ne peut être absente ; elle aussi a sa propre
responsabilité, dont elle pourra s’acquitter de différentes manières et surtout au niveau du Centre.
Le Centre devra être un « groupe de référence », où chacun fait part de ses expériences, des options
prises, des difficultés rencontrées, des obstacles à surmonter, des stratégies à employer, des
questions soulevées : c’est le lieu où, par l’échange de vues, d’informations, de connaissances, on
s’éclaire et on s’enrichit mutuellement ; où, surtout, tous se confrontent avec la Parole de Dieu et
avec le magistère, dans le contact vivant avec les problèmes concrets de son propre milieu social,
culturel, économique et politique. Les contenus et les objectifs de cette tâche de formation sont ceux
que nous avons présentés plus haut [17].
Parmi les buts de la vie du Centre il faudra souligner celui de soutenir et stimuler les membres pour
qu’ils assument et exercent, de manière responsable, leurs propres engagements dans la société. Des
activités utiles et opportunes pourront être réalisées par les Conseils provinciaux et par des
rencontres périodiques convenablement préparées, surtout en vue de l’assimilation et de
l’approfondissement de l’enseignement social de l’Eglise.
11.6.4. « Par le biais de Coopérateurs qualifiés, elle se rend présente
dans les mouvements apostoliques et autres organismes » (art. 11 § 2)
Ils sont nombreux les « mouvements apostoliques et les organismes qui se proposent en particulier
le service des jeunes et de la famille, la solidarité avec les peuples en voie de développement et la
promotion de la justice et de la paix ».
Le décret conciliaire sur l’apostolat des laïcs nous dit toute l’importance d’une présence efficace de
catholiques préparés dans toutes ces structures ecclésiales et civiles [18].
Des Coopérateurs et des Coopératrices qualifiés y travaillent déjà aujourd’hui, en général à titre
personnel. Selon le Règlement, ils peuvent le faire au nom de l’Association et, par conséquent, avec
l’appui d’un mouvement catholique international. Leur travail en sera plus significatif. À son tour,
leur travail pourra devenir encore plus efficace s’il peut compter sur l’apport de l’Association. En
quel sens ? Par ex. s’il peut profiter des expériences, des initiatives, des orientations et des
suggestions préalablement étudiées dans le cadre de l’Association.
[1]. MB. XIV, 662.
[2].ACGS, 736.
[3]. Cf. ACGS, 77.
[4]. GS, 43 § 5.
[5]. Il suffit de rappeler ici les encycliques : Rerum novarum (15 mai 1891) de Léon XIII ;
Quadragesimo anno (31 mai 1931) de Pie XI ; Mater et Magistra (15 mai 1961) et Pacem in terris
(11 avril 1963) de Jean XXIII ; Populorum progressio (25 mars 1967) et Octogesima adveniens
(mai 1971) de Paul VI ; Laborem exercens (14 sept. 1981) et Sollicitudo rei socialis (30 déc.1987)
de Jean Paul II.)
[6]. GS, 43, § 2 et 3 ; 75 § 5.
[7]. Cf. GS, 75 § 6.
[8]. Cf. AA, 14a, 18 d ; GS 75.
[9]. Cf. GS, 4-8; en outre Auteurs divers, I Segni dei tempi, in Linee di rinnovamento. I salesiani di
Don Bosco oggi (LDC, Turin 1971), 22-36.
[10]. Cf. LG, 36bc ; AA, 7b, 13a ; GS, 30, 37, 42s.
[11]. Cf. LG, 36bcd ; AA, 7, 13 ; GS, 43 § 2.
[12]. GS, 21 § 3.
[13]. Cf. AA, 14 ; GS, 67 sqq, 73 sqq.
[14]. AG, 21c.
[15]. Cf. GS, 30b.
[16]. Voir plus haut au n° 11.1.
[17]. Voir au numéro 11.5.1.
[18]. Cf. AA, 14.
ARTICLE 12
TEMOIGNAGE DES BEATITUDES
Par son style de vie personnelle, imprégné de l’esprit des Béatitudes 1, le Coopérateur contribue
également à évangéliser la culture et la vie sociale. Dans ce sens :
– il use de sa liberté en obéissant au plan de Dieu sur la création qui le porte à apprécier la valeur et
l’autonomie des réalités temporelles et à toujours en orienter l’usage au service des personnes ;
– en esprit de pauvreté évangélique, il administre ses biens selon des critères de simplicité et de
généreux partage ; il refuse toute forme d’ostentation 2 et il les envisage selon la perspective
chrétienne du bien commun ;
– il vit sa sexualité selon une vision évangélique de la chasteté qui lui inspire des comportements de
délicatesse et une vie célibataire ou conjugale intègre, joyeuse, centrée sur l’amour ;
– dans un monde de rendement, d’agressivité, de division, il témoigne de la primauté de l’esprit ; il
croit à la fécondité de la souffrance ; il est convaincu que la non-violence est un levain de paix et
que le pardon construit la fraternité.
1. Cf. GS, 72.
2. Cf. RDB, VIII, 1.
Après avoir décrit, en termes essentiels, comment il est possible d’être apôtre salésien aujourd’hui
en famille, dans le travail et dans la vie sociale, le Règlement attire l’attention sur le « style de vie
personnelle » du Coopérateur, « imprégné de l’esprit des Béatitudes ». Il s’agit de quelques
dispositions et comportements qui imprègnent la vie entière du chrétien et, donc, du Coopérateur et
de la Coopératrice. Traduit en langage actuel, l’esprit des Béatitudes indique une qualité de vie,
individuelle et collective, signalée par l’Evangile comme « heureuse » parce que elle suscite une
profonde sérénité et une joie authentique.
12.1. Valeurs évangéliques proposées à tous les disciples du Seigneur Jésus
La constitution dogmatique Lumen Gentium a solennellement déclaré que, dans l’Eglise, tous les
fidèles sont appelés à la sainteté et à la charité parfaite, bien que par des voies différentes et dans de
formes de vie variées [1], et qu’à tous les disciples du Christ ont été proposés les « conseils
évangéliques », même si leur exercice prend des formes diverses selon la vocation spécifique de
chacun [2]. C’est dans ce sens uniquement que cet article parle des Béatitudes et des divers conseils
évangéliques, en tant qu’ils peuvent se vivre effectivement par tous les fidèles laïcs, mais compte
tenu de leurs capacités, de leurs vocations distinctes et de leurs différentes conditions de vie :
célibat par amour du Royaume, fiançailles, mariage, veuvage. Il résume la façon dont les valeurs
évangéliques exprimées par les Béatitudes peuvent être vécues concrètement par des apôtres
« séculiers ».
Il est peut-être bon d’ajouter une précision : la manière de s’exprimer de Don Bosco quand il disait
que la vie des Coopérateurs devait « en quelque manière s’assimiler à celle qui se vit dans une
communauté religieuse », a été dépassée par l’enseignement du Concile. Cependant les suggestions
pratiques qu’il donnait gardent tous leur valeur [3]. Et le Règlement veut y rester fidèle, tout en les
présentant et en les introduisant dans une perspective conciliaire. D’autre part le même Concile
affirme que les religieux « attestent d’une manière éclatante et hors pair » l’esprit des Béatitudes qui
doit être commun à tous [4].
12.2. « Style de vie personnelle, imprégné de l’esprit des Béatitudes »
Il est important, déclare la constitution pastorale Gaudium et spes dans un texte auquel le
Règlement fait une référence explicite, que les laïcs « maintiennent , au milieu des activités
terrestres, une juste hiérarchie des valeurs, fidèles au Christ et à son Evangile, pour que toute leur
vie, tant individuelle que sociale, soit pénétrée de l’esprit des Béatitudes, et en particulier de l’esprit
de pauvreté » [5].
Est-il possible atteindre cet idéal ? Certainement ! Cependant il ne faut pas se fier sur ses seules
propres forces, mais s’appuyer sur l’aide de Dieu. « La charité divine, assure le décret conciliaire
Apostolicam actuositatem, rend les laïcs capables d’exprimer concrètement dans leur vie l’esprit
des Béatitudes » [6].
Le Règlement accueille ces déclarations officielles de Vatican II et parle du « style de vie
personnelle du Coopérateur imprégné de l’esprit des Béatitudes ».
12.3. « Evangéliser la culture et la vie sociale » par l’esprit des Béatitudes
Le Concile fait encore un pas en avant et il invite tous les fidèles laïcs non seulement à adopter
l’esprit de Béatitudes, en se montrant dociles à l’action merveilleuse de l’Esprit Saint, mais aussi à
le rayonner dans les milieux où ils vivent, au profit de tous. L’affirmation vient de la constitution
dogmatique Lumen gentium : « Tous ensemble et chacun pour sa part ils doivent nourrir le monde
des fruits de l’Esprit (cf. Ga 5, 22), et répandre sur lui l’esprit qui anime les pauvres, les doux, les
pacifiques, que le Seigneur dans l’Evangile proclame bienheureux (cf. Mt 5, 3-9) » [7].
Ce renversement des valeurs ne peut se comprendre qu’en référence au Christ ; les Béatitudes ne
sont rien sans Lui, parce que Lui seul leur donne un sens, puisqu’il les a vécues parfaitement :
« Devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos » (Mt 11,
29). En effet, les Béatitudes, situées au début du discours inaugural de Jésus, proposent, selon Mt 5,
3-12, le programme du bonheur chrétien.
Introduire dans le monde actuel l’esprit des Béatitudes ne peut se faire sans une évangélisation des
cultures et de la vie sociale. Et cela suppose un vrai renouveau de l’humanité actuelle dans toutes
ses couches. L’exhortation apostolique Evangelii nuntiandi de Paul VI a souligné cela dans une
page mémorable. Elle mérite d’être transcrite, car le Règlement s’y réfère quand il déclare que le
style de vie personnelle du Coopérateur, imprégné de l’esprit des Béatitudes, « contribue également
à évangéliser la culture et la vie sociale ». « Evangéliser signifie pour l’Eglise, nous dit
l’exhortation apostolique, annoncer la Bonne Nouvelle dans tous les milieux de l’humanité et, par
son impact, transformer du dedans, rendre neuve l’humanité elle-même : “Voici que je fais l’univers
nouveau”. Mais il n’y a pas d’humanité nouvelle, s’il n’y a pas d’abord des hommes nouveaux, de
la nouveauté du baptême et de la vie selon l’Evangile. Le but de l’évangélisation est donc bien ce
changement intérieur et, s’il fallait le traduire d’un mot, le plus juste serait de dire que l’Eglise
évangélise lorsque, par la seule puissance divine du Message qu’elle proclame, elle cherche à
convertir en même temps la conscience personnelle et collective des hommes, l’activité dans
laquelle ils s’engagent, la vie et le milieu concret qui sont les leurs. […]
« Pour l’Eglise il ne s’agit pas seulement de prêcher l’Evangile dans des tranches géographiques
toujours plus vastes ou à des populations toujours plus massives, mais aussi d’atteindre et comme
de bouleverser par la force de l’Evangile les critères de jugement, les valeurs déterminantes, les
points d’intérêt, les lignes de pensée, les sources inspiratrices et les modèles de vie de l’humanité
qui sont en contraste avec la Parole de Dieu et le dessein du salut » [8]. Tout cela demande des
connaissances et du savoir faire pour incarner l’Evangile dans les cultures.
12.4. Béatitudes du Coopérateur d’aujourd’hui
D’après le discours sur la montagne, deux Béatitudes résument toutes les autres : la pauvreté avec
son cortège d’œuvres de justice, d’humilité, de douceur, de pureté, de miséricorde, d’engagement
pour la paix ; et puis la persécution à cause de l’amour du Christ. Le « oui » des Béatitudes
implique le « non » aux attitudes et comportements opposés : la haine, la suffisance, l’orgueil, la
dureté, l’intrigue, la volonté de domination, la violence, la luxure, la paresse... En traduisant pour le
Coopérateur et la Coopératrice d’aujourd’hui le message évangélique des Béatitudes, le Règlement
a devant les yeux tout cela, mais il se réfère directement à certains dynamismes fondamentaux de la
personne humaine (usage de la liberté, administration des biens, vie sexuelle) et à certaines
situations sociales contemporaines plus ou moins répandues (rendement, agressivité, divisions,
violence, souffrance). Concrètement, il énumère les Béatitudes suivantes :usage de la liberté selon
le plan de Dieu ; administration des biens en esprit de pauvreté évangélique ; vivre la sexualité
selon une vision évangélique de chasteté : la primauté donnée aux valeurs de l’esprit ; la fécondité
apostolique de la souffrance, de la non-violence et du pardon. L’ordre dans la liste des trois
premières est celui adopté par les Constitutions salésiennes, qui s’en tiennent à la proposition de
Don Bosco. La motivation fondamentale est le lien distinct que obéissance, pauvreté et chasteté ont
avec la mission salésienne. Prises dans leur ensemble, ces Béatitudes constituent un projet de vie
évangélique et salésienne vraiment capable d’évangéliser en profondeur la réalité familiale et
sociale dans lesquelles vivent le Coopérateur et la Coopératrice.
12.5. Obéissance séculière
En cet article on présente en particulier les aspects « séculiers » de l’obéissance chrétienne. Dans un
deuxième temps (article 18), et certainement pas parce que ce serait secondaire, on parlera de
l’obéissance « à l’Eglise » qui s’exprime dans une docilité attentive et mûre envers les Pasteurs
légitimes.
En quoi consiste-t-elle cette obéissance séculière ? Suivant les indications officielles de Vatican II,
le Règlement la ramène à « l’obéissance au plan de Dieu sur la création ».
À cet égard, il y a un texte très pertinent dans le décret sur l’apostolat des laïcs « Tout ce qui
compose l’ordre temporel : les biens de la vie et de la famille, la culture, les réalités économiques,
les métiers et les professions, les institutions de la communauté politique, les relations
internationales et les autres réalités du même genre, leur évolution et leur progrès, n’ont pas
seulement valeur de moyen par rapport à la fin dernière de l’homme. Ils possèdent aussi une valeur
propre, mise en eux par Dieu Lui-même, soit qu’on regarde chacun d’entre eux, soit qu’on les
considère comme parties de l’ensemble de l’univers temporel : “Et Dieu vit tout ce qu’il avait fait et
c’était très bon” (Gn. 1,31). Cette bonté naturelle qui est la leur reçoit une dignité particulière en
raison de leur relation avec la personne humaine au service de laquelle ils ont été créés. Enfin il a
plu à Dieu de rassembler toutes les réalités aussi bien naturelles que surnaturelles en un seul tout
dans le Christ, “pour que celui-ci ait la primauté en tout” (Col. 1,18). Cette destination, loin de
priver l’ordre naturel de son autonomie, de ses fins, de ses lois propres, de ses moyens, de son
importance pour le bien de l’homme, rend au contraire plus parfaites sa force et sa valeur propre ;
elle le hausse en même temps au niveau de la vocation intégrale de l’homme ici-bas » [9].
Reconnaître ce projet divin sur la création et lui obéir implique une première attitude humaine et
chrétienne proposée expressément au Coopérateur par son Règlement de vie apostolique :
« apprécier la valeur et l’autonomie des réalités temporelles ».
Cela suppose l’acquisition d’une mentalité laïque correcte, à savoir une mentalité qui présente les
caractéristiques suivantes :
– Elle s’intéresse à la valeur objective des réalités temporelles : santé et vie physique, famille,
travail, professions, culture, sciences, économie, industrie, commerce, politique, relations entre les
peuples, justice sociale, paix ;
– Elle y s’y consacre avec constance, même si elles sont compliquées et requièrent réflexion,
patience, science, technique et expérimentation ;
– Elle se montre attentive à ce qui ressort de l’étude sérieuse de la réalité et le respecte ;
– Elle a un sens très élevé du savoir-faire ;
– Elle est consciente de l’utilité et de la finalité de tout métier et des exigences, souvent onéreuses,
qui s’y rattachent ;
– Elle nourrit un sain réalisme vis-à-vis de l’existence, elle programme avec sérieux les objectifs à
atteindre, elle entretient la collaboration et apprécie l’organisation.
Toutes ces qualités ne se rencontrent pas facilement chez celui qui croit pouvoir se passer de ce
qu’on appelle les valeurs « laïques ».
Reconnaître le plan divin sur la création et lui obéir, c’est, dans la situation actuelle, éviter de se
laisser contaminer par les multiples formes contemporaines de laïcisme et de matérialisme athée.
Elles font de la nature et des réalités séculières des absolus en les décrochant de Dieu ou, selon
l’hypothèse athée, en les libérant de sa domination. Ils se montrent ainsi incapables de comprendre
le sens de la création et l’union entre Dieu et les réalités qu’Il a créées et confiées à la responsabilité
de l’homme.
Dans cet ordre d’idées, le décret conciliaire déjà cité offre un second passage important : « Au cours
de l’histoire, l’usage des choses temporelles a été souillé par de graves aberrations. Atteints par la
faute originelle, les hommes sont tombés souvent en de nombreuses erreurs sur le vrai Dieu, la
nature humaine et les principes de la loi morale : alors les mœurs et les institutions humaines s’en
sont trouvées corrompues, la personne humaine elle-même bien souvent méprisée. De nos jours
encore certains se fiant plus que de raison aux progrès de la science et de la technique, sont enclins
à une sorte d’idolâtrie des choses temporelles : ils en deviennent les esclaves plutôt que les
maîtres » [10].
En face de toutes ces situations faussées par l’intervention de l’homme pécheur, le chrétien laïque a
la tâche spécifique, proposée elle aussi en toutes lettres au Coopérateur par son Règlement,
« d’orienter toujours l’usage [des réalités temporelles] au service des personnes ». C’est un
deuxième aspect de la « laïcité » des Coopérateurs et des Coopératrices liée à leur vocation
spécifique orientée vers l’animation chrétienne de l’ordre temporel.
Un autre aspect de l’obéissance séculière n’est pas repris ici par le Règlement parce qu’il a déjà été
proposé dans les articles précédents : c’est l’accomplissement des engagements familiaux et
professionnels du Coopérateur.
12.6. Pauvreté évangélique et séculière
Avant tout, la pauvreté proposée au Coopérateur et à la Coopératrice est la pauvreté évangélique, à
savoir, celle que le Christ a pratiquée et proclamée comme « béatitude ». Avant d’être un fait
économique et social, elle est une disposition spirituelle et religieuse. Au sens biblique, les
« pauvres » sont les doux, conscients de leurs limites et confiants en Dieu. Jésus de Nazareth se
présente comme le Messie des pauvres et est Lui-même pauvre, car il est « doux et humble de
cœur » (Mt 11, 29) et Roi « pacifique » (Mt 21, 5). Lui, qui pourtant apprécie les choses et s’en sert
avec simplicité [11], il exige de ses disciples avant tout cette disposition spirituelle : « Heureux les
pauvres de cœur » (Mt 5, 3), c’est-à-dire, « ceux qui ont un cœur de pauvre ». En d’autres mots, il
exige d’eux une attitude de liberté radicale vis-à-vis des biens temporels (soit qu’ils en possèdent ou
qu’ils n’en possèdent pas), le sentiment de sa propre indigence et faiblesse et la conscience d’avoir
besoin de l’aide de Dieu. C’est ainsi qu’ils deviennent capables de désirer et de recevoir les vraies
richesses qui viennent d’en haut [12].
L’accent mis par l’Evangile sur l’aspect spirituel de la pauvreté ne doit pas faire oublier la valeur
religieuse de la pauvreté effective, dans la mesure où elle est un signe et un moyen de liberté
intérieure. Bethléem (Mt 2, 1 ; Lc 2, 3-7), Nazareth (Mt 13, 55), la vie publique (Mt 8, 20), la Croix
(Mt 27, 35) sont autant de formes diverses de la pauvreté embrassée, vécue et soufferte par le
Seigneur. Le Christ met en garde tous ses disciples contre le danger des richesses (Mt 6, 19ss) et il
leur propose une pauvreté effective [13]. Et ce fut en fait, la condition de vie des apôtres, de saint
Paul qui vivait de son travail (1 Co 4, 12), et c’était l’idéal que voulait imiter la communauté
chrétienne primitive où « personne ne se disait propriétaire de ce qu’il possédait » (Ac 4, 32).
Si la pauvreté matérielle, à condition d’être acceptée avec générosité, est déjà ici-bas un motif
d’authentique joie spirituelle et d’espérance d’une ineffable récompense éternelle [14], elle n’en
reste pas moins une condition inhumaine et l’Evangile souligne les exigences de la justice sociale :
les riches ont, sur terre, des devoirs impérieux envers les pauvres [15] ; de plus, le service aux
pauvres est une manifestation de notre amour pour le Christ, parce que en eux on secourt le Christ
(Mt 25, 3 par.)
La pauvreté évangélique ouvre les horizons sur la signification des biens créés par Dieu pour tous
les hommes ; elle encourage donc à rechercher d’autres structures que les situations matérialistes
qui dominent dans le monde d’aujourd’hui.
Enfin, le principe et l’objectif de la pauvreté évangélique est la participation au mystère de la
« générosité de notre Seigneur Jésus Christ » : « lui qui est riche, il est devenu pauvre à cause de
vous, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté » (2 Co 8, 9) [16].
Après avoir clarifié brièvement la signification biblique de « l’esprit de pauvreté », il faut ajouter
que cette pauvreté indiquée au Coopérateur et à la Coopératrice est une pauvreté séculière : donc
une pauvreté conforme à leur condition de personnes qui vivent dans un contexte humain
déterminé, avec leurs responsabilités familiales et sociales. Comme telle, elle se distingue
nettement, par exemple, de celle des religieux et des religieuses. En outre, elle ne concerne pas
seulement les biens matériels, mais aussi les biens spirituels, culturels et moraux, qui sont plus
précieux que les simples richesses. Et encore, elle ne porte pas seulement sur l’usage des biens,
mais aussi sur leur acquisition et leur destination. C’est ce que dit le Règlement : « Il administre ses
biens ».
Le Règlement signale aussi les exigences de cette pauvreté évangélique et séculière en relation avec
les situations actuelles. Ce sont, en substance, les suivantes : la conscience d’être non les
propriétaires mais les simples gérants de nos biens et d’être soumis à la loi du travail avec ses
exigences, ses difficultés, ses privations ; le témoignage de simplicité, de mesure, de sobriété, qui
déteste le luxe et l’ostentation, qui insulte la grande masse des indigents et des nécessiteux ; l’esprit
de solidarité qui pousse à ne pas accumuler de façon égoïste des avoirs et à ne pas garder les biens
inutiles ; le partage généreux de ces mêmes biens « à la lumière du bien commun » [17].
12.7. Vision évangélique de la chasteté
Le Seigneur Jésus accorde son intimité à ceux qui se donnent à Lui dans la simplicité de la foi et de
l’amour, « aux cœurs purs » qu’il a proclamés « bienheureux », parce que « ils verront Dieu » (Mt
5, 8). Selon la foi biblique qui croit que toute la création est bonne et en particulier toute la réalité
sexuelle, c’est-à-dire la condition humaine fondamentale d’homme et de femme, la chasteté est un
fait intérieur et moral, et elle peut se réaliser pleinement lorsque l’existence personnelle est marquée
de la présence vivante du Seigneur [18].
Pour éviter tout malentendu, il faut se rappeler que chaque situation chrétienne comporte son type
de chasteté ; il y a la chasteté des fiancés, celle des époux, celle des célibataires... Le Règlement la
propose aux Coopérateurs et aux Coopératrices comme un idéal à atteindre, compte tenu de leur
forme de vie spécifique. Il n’exclut pas que, pour ceux qui se sentiraient appelés par Dieu à le faire,
elle puisse arriver jusqu’à renoncer à fonder une famille en vue de se donner de façon particulière
au service de Dieu et du prochain.
Il ne l’identifie pas avec l’innocence naïve, ni avec l’ignorance de la réalité biologique et
psychologique liée au fait d’être homme ou femme, ni a sa possession sans problèmes. Il suggère
plutôt l’idée d’une conquête continuelle par un cheminement éducatif éclairé. Il ne présente pas
l’engagement de l’atteindre comme un poids opprimant, angoissant et décourageant ou, pire,
engendrant l’amertume et l’insatisfaction à cause des fragilités possibles, mais comme une force
spirituelle qui libère et conduit à la maîtrise de soi, et qui s’exprime par des comportements tout à
fait naturels et délicats.
Il ne la voit pas simplement comme porteuse de sérénité (cela aussi sans doute), mais comme source
de vraie joie : elle est la « béatitude » dont parle l’Evangile.
Il l’apprécie surtout comme « centrée sur l’amour » ; elle se manifeste de manière différente dans le
célibat, les fiançailles, le mariage et le veuvage, et est ouverte à de nombreuses formes
d’authentique amitié humaine et chrétienne.
12.8. Croix, non-violence, pardon
Pour compléter cette réflexion sur les Béatitudes évangéliques en relation avec les contextes actuels
du Coopérateur et de la Coopératrice, l’article envisage maintenant trois situations socio-culturelles
issues du matérialisme ambiant qui est à l’origine de bien des maux dans la société : le rendement à
tout prix (à ne pas confondre avec l’efficacité de l’action qui est une valeur), l’agressivité et la
division.
À cela, le Règlement oppose trois dispositions qui résultent de la primauté donnée aux valeurs de
l’esprit et qualifiées de « Béatitudes » par l’Evangile : la souffrance, la non-violence et le pardon,
motivées par la correcte compréhension de la Croix du Christ, qui est la manifestation suprême de
l’amour.
À ce propos Vatican II nous donne des textes très éclairants et stimulants : ils confirment de façon
officielle la signification profonde des affirmations de notre article : « Dans un monde de
rendement, d’agressivité, de division, [le Coopérateur] témoigne de la primauté de l’esprit ; il croit à
la fécondité de la souffrance ; il est convaincu que la non-violence est un levain de paix et que le
pardon construit la fraternité ». Pour montrer que l’activité humaine est élevée à la perfection par le
mystère pascal de la mort et résurrection, la constitution pastorale Gaudium et spes, déclare : « Le
Verbe de Dieu [...], Homme parfait [...] nous révèle que "Dieu est charité" (1 Jn 4, 8), et [il]nous
enseigne en même temps que la loi fondamentale de la perfection humaine, et donc de la
transformation du monde, est le commandement nouveau de l’amour. À ceux qui croient à la divine
charité, il apporte ainsi la certitude que la voie de l’amour est ouverte à tous les hommes et que
l’effort qui tend à instaurer une fraternité universelle n’est pas vain.
« Il nous avertit aussi que cette charité ne doit pas seulement s’exercer dans des actions d’éclat,
mais, et avant tout, dans le quotidien de la vie. En acceptant de mourir pour nous tous, pécheurs, Il
nous apprend, par son exemple, que nous devons aussi porter cette croix que la chair et le monde
font peser sur les épaules de ceux qui poursuivent la justice et la paix. Constitué Seigneur par sa
résurrection, le Christ [...] agit désormais dans le cœur des hommes par la puissance de son Esprit ;
Il n’y suscite pas seulement le désir du siècle à venir, mais par là même anime aussi, purifie et
fortifie ces aspirations généreuses qui poussent la famille humaine à améliorer ses conditions de vie
et à soumettre à cette fin la terre entière » [19].
À propos de la communauté humaine, la même constitution avait déclaré : « Le respect et l’amour
doivent aussi s’étendre à ceux qui pensent ou agissent autrement que nous en matière sociale,
politique ou religieuse. D’ailleurs, plus nous nous efforçons de pénétrer de l’intérieur, avec
bienveillance et amour, leurs manières de voir, plus le dialogue avec eux deviendra aisé.
« Certes, cet amour et cette bienveillance ne doivent en aucune façon nous rendre indifférents à
l’égard de la vérité et du bien. Mieux, c’est l’amour même qui pousse les disciples du Christ à
annoncer à tous les hommes la vérité qui sauve. Mais on doit distinguer entre l’erreur, toujours à
rejeter, et celui qui se trompe, qui garde toujours sa dignité de personne, même s’il se fourvoie dans
des notions fausses ou insuffisantes en matière religieuse. Dieu seul juge et scrute les cœurs ; Il
nous interdit donc de juger de la culpabilité interne de quiconque.
« L’enseignement du Christ va jusqu’à requérir le pardon des offenses et étend le commandement
de l’amour, qui est celui de la loi nouvelle, à tous nos ennemis » [20].
[1]. Cf. LG, 40 s.
[2]. Cf. LG, 41g.
[3]. Cf. Desramaut Francis, Da Associati alla Congregazione salesiana del 1873 a Cooperatori
Salesiani del 1876, in Desramaut F. – Midali M. (sous la direction de), Il Cooperatore nella società
contemporanea (LDC, Turin 1975) 23-50.
[4]. Cf. LG, 31b.
[5]. GS, 72a.
[6]. AA, 4f.
[7]. LG, 38.
[8]. EN, 18-20.
[9]. AA, 7b.
[10]. AA, 7c.
[11]. Cf. Mt 11, 19 ; Mc 2, 19.
[12]. Cf. Mt 6, 24, 33 ; Lc 14, 26, 33.
[13]. Cf. Lc 12, 33 ; Mt 19, 21.27 et par.
[14]. Cf. Mc 12, 41-44 ; Lc 6, 20 s.; He 10, 34 ; Ap. 2, 9 s.
[15]. Cf. Mt 23, 23 ; Jc 5, 4 ; Lc 14, 13.21.
[16]. Cf. Roy L., Pauvres, in Léon-Dufour Xavier, Vocabulaire de théologie biblique (Cerf, Paris
1970), col 927-932.
[17]. Cf. LG, 8c, 42c ; AA, 4b ; GS, 26a, 37d, 63-72.
[18]. Cf. Jn 15, 3; 13, 10.
[19]. GS, 38a. Voir aussi la lettre apostolique de Jean Paul II, Salvifici doloris, 1984).
[20]. GS, 28.
ARTICLE 13
DESTINATAIRES PRIVILÉGIÉS
§ 1. « Aux Coopérateurs salésiens, affirmait Don Bosco, est offerte la même moisson que celle de
la Congrégation de saint François de Sales, à laquelle ils entendent s’associer » 1. C’est pourquoi,
dans l’exercice de leur apostolat, les Coopérateurs accordent une attention privilégiée aux jeunes
spécialement
– à ceux qui sont pauvres, abandonnés, victimes de toutes formes de marginalité,
– aux jeunes qui entrent dans le monde du travail et en affrontent les difficultés,
– aux jeunes qui présentent des signes de vocation apostolique spécifique (laïque, consacrée,
sacerdotale).
§ 2. Ils se consacrent aussi à la promotion de la famille, réalité fondamentale de la société et de
l’Eglise ; au soutien et à l’évangélisation des milieux populaires. Ils favorisent l’activité
missionnaire auprès des peuples non encore évangélisés et dans les jeunes Eglises.
1. RDB IV.
Après avoir présenté l’apostolat du Coopérateur dans les situations concrètes et ordinaires de sa vie
en famille, au travail, dans les activités sociales, le Règlement illustre maintenant la tâche
apostolique des Coopérateurs dans les activités les plus typiquement salésiennes (articles 13-17).
13.1. Unité de mission (art. 13 § 1)
L’article 13 commence par citer le Règlement de Don Bosco qui souligne l’unité de mission entre
les salésiens et les Coopérateurs vis-à-vis des destinataires : « Aux Coopérateurs salésiens est
offerte la même moisson que celle de la Congrégation de saint François de Sales, à laquelle ils
entendent s’associer ». On peut rappeler ici un autre passage très explicite où Don Bosco dit :
« Nous devons nous unir entre nous et avec toute la Congrégation [...] Unissons-nous en visant tous
le même objectif et en employant les mêmes moyens pour l’atteindre » [1].
Le Chapitre général spécial a essayé de traduire dans un langage biblique et conciliaire ce que Don
Bosco disait en termes théologique et juridiques : « objectif », « but », « moyens » et le terme
« moisson » du Nouveau Testament. Il a parlé de la vocation commune et de la mission salésienne
qui comportent tous ces points : « Tous les membres de la famille salésienne, dit le texte, reçoivent
de l’Esprit Saint une grâce particulière d’illumination et de décision vis-à-vis des urgences
concrètes de la jeunesse pauvre et abandonnée. Ces deux moments de la “vocation” et de la
“mission” sont corélatifs et sous-tendent la décision pratique de celui qui répond de façon positive à
cette grâce [...]. Cette commune vocation, en tous les groupes indiqués, vise les mêmes
destinataires » [2].
Comme les historiens l’ont amplement démontré, il existe une coïncidence substantielle entre les
articles des Constitutions salésiennes de 1874 consacrés au « but » de la Congrégation, et le chapitre
du Règlement où notre saint Fondateur explique le « but » des Coopérateurs salésiens et la
« manière de coopérer » [3]. Le texte rénové du Règlement suit cette orientation et réécrit pour les
Coopérateurs ce que les Constitutions salésiennes rénovées établissent pour les SDB [4].
Le fait d’avoir souligné l’unité de la mission des salésiens et des Coopérateurs, et de ceux-ci et des
autres groupes de l’unique Famille, ne doit pas faire oublier au moins les différences suivantes :
– Alors que les salésiens s’adressent principalement à la jeunesse masculine et les Filles de Marie
Auxiliatrice, à la jeunesse féminine, les Coopérateurs ont comme destinataires aussi bien les jeunes
gens que les jeunes filles.
– Les salésiens et les Filles de Marie Auxiliatrice exercent leur mission commune dans une
communauté religieuse, les Volontaires de Don Bosco travaillent comme membres d’un Institut
séculier. Les Coopérateurs réalisent la même mission en tant qu’apôtres séculiers dans leur
ministère (s’ils sont prêtres ou diacres), dans leurs familles (s’ils sont laïcs), au milieu des activités
temporelles et sans liens de vœux religieux, même s’il n’est pas exclu qu’il puisse y avoir l’un ou
l’autre Coopérateur ou Coopératrice faisant des vœux privés en réponse à une vocation
personnelle [5].
13.2. Formes diverses de participation (art 13 § 1)
Chaque Coopérateur participe à la mission salésienne en étroite solidarité avec les autres associés.
C’est, entre autre, pour cette raison que l’article 13 passe de l’emploi du singulier (le Coopérateur)
des articles précédents à l’emploi du pluriel (les Coopérateurs). Ce qui signifie que, lorsque le
Règlement parle de la mission salésienne, il se réfère aux « Coopérateurs » pris dans leur ensemble.
Il est bon de rappeler ici l’article 3, qui déclare de façon générale que chaque Coopérateur
« s’engage dans la même mission auprès de la jeunesse et du peuple, […] d’une manière adaptée à
sa condition et à ses possibilités réelles ».
Cette affirmation ne doit jamais se mettre en veilleuse ni se perdre de vue ; elle aidera à éviter de
prises de positions extrêmes (comme de prétendre tout de tous alors qu’on ne propose à chacun que
ce qu’il peut donner), et à dissiper les appréhensions éventuelles de ceux qui se sentiraient
évidemment incapables d’affronter, personnellement ou même en groupe, des engagements qui ne
sont pas légers.
Cela veut dire que ceux qui en ont la capacité, la compétence et la possibilité apporteront leur
contribution directe et qualifiée dans les différents secteurs de la mission salésienne. Et ceux qui ne
peuvent offrir qu’une contribution moins directe et plus ordinaire, pourront le faire sans complexes
d’infériorité, qui ne se justifieraient pas ici. Tous seront donc convaincus et heureux de participer de
plein droit et effectivement à la réalisation de la mission salésienne commune.
13.3. « Attention privilégiée aux jeunes » (art 13 § 1)
Don Bosco a reçu de Dieu un cœur « large comme le littoral de la mer » : il n’a jamais rencontré
quelqu’un, homme ou femme, riche ou pauvre, adulte ou jeune, puissant ou humble, sans essayer de
lui faire du bien. Cependant sa vie et toute son action indiquent qu’il s’est senti clairement envoyé
par Dieu directement et avant tout aux jeunes.
Cette priorité a suscité ses appels insistants auprès des Coopérateurs et apparaît de manière
indiscutable dans le Règlement écrit pour eux : « Nous devons nous réunir dans ces temps difficiles
[...] pour tâcher de détourner ou du moins d’alléger les maux qui menacent l’innocence et les mœurs
de cette jeunesse qui croît autour de nous, et qui tient entre ses mains l’avenir de la société » [6].
« La Congrégation salésienne [...] centre stable et assuré, auquel se rattachent les Coopérateurs, [...]
a pour but principal de travailler pour le bien de la jeunesse, de qui dépend l’avenir heureux ou
malheureux de la société. [...] De toutes parts [d’Italie, d’Europe, de Chine, d’Australie,
d’Amérique] arrivent d’incessantes demandes, pour obtenir des prêtres qui aillent prendre soin de la
jeunesse exposée aux plus grands dangers [...]. C’est pour subvenir à ces nombreuses nécessités que
nous faisons appel à des Coopérateurs » [7]. Le but principal des Coopérateurs est « d’exercer la
charité envers le prochain et spécialement les enfants exposés à se perdre [8]. Il est intéressant de
noter que « Tout ce qui est recommandé pour le bien des jeunes gens abandonnés, […] s’entend
aussi pour les jeunes filles qui se trouveraient dans la même condition » [9].
Cette priorité exprimée clairement par le Règlement écrit par notre Fondateur est réaffirmée par le
Règlement actuel, qui distingue nettement, en les situant dans deux paragraphes différents, les
jeunes (§ 1) et les autres destinataires (§ 2) : « Dans l’exercice de leur apostolat, les Coopérateurs
accordent une attention privilégiée aux jeunes ».
Le terme « jeune » est plutôt générique. Il est bon d’avoir quelques précisions sur l’âge et la
condition sociale. L’Eglise appelle Don Bosco « Père et Maître des jeunes ». Avec les autres
groupes de la Famille salésienne, les Coopérateurs sont envoyés « aux préadolescents, adolescents
et jeunes, selon l’âge qui dans les divers pays et cultures correspond à cette étape décisive de la vie
humaine. On n’exclut pas le fait de s’occuper des enfants ; mais cette tâche reste pour nous
occasionnelle, et elle est en vue comme préparation à l’étape suivante » [10].
13.4. Les jeunes « pauvres » (art 13 § 1)
Au sein de cette destination « jeunes » apparaît une autre priorité : les jeunes pauvres. Le Chapitre
général spécial s’est posé la question : « Quels pauvres ? Ceux qui sont touchés par n’importe
quelle forme de pauvreté :
« – Par la pauvreté économique, source de tant d’autres privations et qui pour cette raison fait
l’objet premier de nos préoccupations ;
« – La pauvreté sociale et culturelle, expérimentée comme frustration (« Je ne suis pas reconnu,
accepté ; je n’ai pas ce que j’ai le droit d’avoir ») et comme aliénation (« Je dépends de l’autre, je ne
puis pas m’exprimer selon mes initiatives ») ;
« – La pauvreté affective (l’orphelin, celui qui est mal accepté par les siens), morale et spirituelle
(privé de la connaissance des valeurs, surtout de la connaissance du vrai Dieu ; directement exposé
au péché) » [11].
13.5. Les jeunes « abandonnés, victimes de toutes formes de marginalité » (art 13 § 1)
Selon une formule courante de Don Bosco et de la tradition salésienne, parmi les jeunes pauvres, la
priorité revient aux « plus pauvres et aux plus abandonnés ou en dangers ». Et le Chapitre général
spécial dit : « Cela se vérifie :
« – Quand l’une ou l’autre des pauvreté indiquées précédemment est éprouvée à un degré spécial de
gravité : les jeunes, “dans la misère”, qui ont faim, sont analphabètes, n’ont à peu près pas de
chances de vie normale s’ils ne sont pas aidés ; les jeunes tourmentés par des problèmes religieux et
moraux ; les jeunes inadaptés, sur la voie de la délinquance, les sortis de prison, les désespérés, les
non-croyants ou athées, les drogués ;
« – quand il y a accumulation de ces diverses formes de pauvreté : cela se vérifie souvent dans les
pays du Tiers-Monde et dans les grandes villes des pays développés (jeunesse prolétaire et sousprolétaire des “bidonvilles”, jeunes émigrés, quart-monde) [...] Même dans un contexte social où
l’Etat intervient de façon générale pour que soit respectée la justice sociale, il reste toujours une
marge de jeunes et de pauvres qui ne sont pas touchés par ces mesures. La tâche des fils de Don
Bosco est précisément d’aller vers ceux qui ne sont aidés par personne et de témoigner que Dieu
aime et veut sauver “les plus perdus”. “Le monde aura toujours plaisir à nous recevoir tant que nos
soins iront aux enfants les plus pauvres et les plus exposés de la société. C’est là notre vraie
richesse, que personne ne viendra nous enlever” » [12].
13.6. Les « jeunes qui entrent dans le monde du travail »
Une autre catégorie de jeunes à qui les Coopérateurs prêtent une attention privilégiée, suivant en
cela aussi les Constitutions des SDB qui répondent à des indications précises de Don Bosco, ce sont
les jeunes « qui entrent dans le monde du travail ». A ce propos, l’article correspondant des
Constitutions salésiennes dit : « Les jeunes des milieux populaires qui se préparent au travail et les
jeunes travailleurs se heurtent souvent à des difficultés et sont facilement exposés aux injustices.
Avec la même sollicitude que Don Bosco, nous allons à eux pour les rendre capables d’occuper
avec dignité leur place dans la société et dans l’Eglise, et pour leur faire prendre conscience de leur
rôle dans la transformation chrétienne de la vie sociale » [13].
13.7. Les « jeunes qui présentent des signes de vocation apostolique spécifique (laïque, consacrée,
sacerdotale) »
Don Bosco s’est toujours fortement soucié de ces jeunes, pauvres ou riches, qui montraient des
dispositions ou même de simples signes de vocation sacerdotale ou religieuse. Ses objectifs concrets
étaient de faire mûrir de telles vocations dans des milieux organisés dans ce but. Autour de lui, et
par son intérêt vif et constant, s’épanouirent des vocations pour ses œuvres, pour les diocèses et
pour d’autres Congrégations.
Dans son Règlement il a introduit ces destinataires dans la liste des nombreuses activités que
peuvent assumer les Coopérateurs [14]. Cette caractéristique est évidemment à garder. A plus forte
raison aujourd’hui, après les rappels de Vatican II concernant l’urgence de cette tâche [15].. La crise
des vocations de cette période postconciliaire la rend même plus actuelle que jamais : la vie et la
mission du peuple de Dieu des années 2000 sont en jeu.
Précisons cependant que l’évolution de l’Eglise conciliaire vers une diversification des vocations,
dans la ligne de la promotion du laïcat, ainsi que la fidélité à la tradition salésienne exigent que les
Coopérateurs ouvrent aussi leurs activités à ces jeunes capables de devenir des apôtres laïcs. Cet
objectif est à poursuivre surtout dans les milieux du travail, dans l’école, parmi les travailleurs
comme parmi les étudiants, les universitaires en particulier, destinés à devenir les leaders chrétiens
de demain.
Suivant une une orientation du Chapitre général spécial et d’autres Chapitres successifs [16], le
Règlement élargit l’horizon de l’engagement des Coopérateurs pour les vocations et il énumère
toutes les vocations spécifiques possibles aujourd’hui : laïques ; consacrées par une profession
publique (avec vœux et autres engagements stables) des conseils évangéliques, aussi bien dans les
différentes formes de vie religieuse que dans les divers Instituts séculiers ; les vocations au
ministère sacerdotal.
Il ne sera pas inutile non plus de signaler que, au cours de ces dernières années, de nombreux
épiscopats se sont fortement préoccupés de ce secteur névralgique de la pastorale ecclésiale. Leurs
documents et leurs directives trouveront les Coopérateurs particulièrement disponibles. Les récents
Chapitres généraux salésiens se sont occupés à plusieurs reprises de ce sujet, et ont mis à jour les
orientations doctrinales et pratiques qui intéressent directement aussi l’Association des
Coopérateurs [17].
13.8. « Ils se consacrent aussi à la promotion de la famille » (art 13 § 2)
Don Bosco s’est directement intéressé aussi aux adultes. Cette mission apparaît comme un
complément et un développement de son apostolat auprès des jeunes.
« En de nombreux cas, nous dit le Chapitre général spécial, l’éducation des jeunes est tellement liée
aux conditions concrètes du milieu familial, social et politique qu’on ne peut rien faire de valable
pour eux sans travailler aussi au progrès collectif de ce milieu et donc auprès des adultes » [18].
Ce lien complémentaire entre mission en faveur des jeunes juvénile et celle en faveur du peuple est
indiqué dans le Règlement par la formule : « Ils se consacrent aussi... ».
En dressant ensuite la liste des destinataires adultes, il met en première place la « famille ». A la
différence du Règlement de Don Bosco qui n’introduit pas explicitement ce secteur dans les formes
de coopération, le Règlement rénové le nomme expressément, suivant en cela une indication précise
du Chapitre [19].
Le Règlement justifie ce choix en reconnaissant dans la famille une « réalité fondamentale de la
société et de l’Eglise ». En effet, la famille est la première cellule fondamentale et irremplaçable de
la société : de sa bonne santé dépend en large part celle de la société. La famille chrétienne est une
« église domestique », qui engendre des enfants pour la grande communauté ecclésiale et les
prépare à accomplir la mission commune selon différents ministères.
Avec leur expérience vécue de la vie conjugale et des problèmes posés par l’éducation des enfants,
par le choix de leur vocation et de leur profession et par leur préparation au mariage, les
Coopérateurs mariés sont à même d’offrir un service unique et irremplaçable pour promouvoir le
bien de la famille. Après le Synode des Evêques sur la famille, le Recteur majeur a souligné la
profonde relation qui existe entre la pastorale des jeunes et la pastorale de la famille [20].
13.9. « Ils se consacrent au soutien et à l’évangélisation des milieux populaires ». (art 13 § 2)
À la suite de Don Bosco, sa Famille apostolique et chacun de ses groupes préfère, dans sa mission
envers les adultes, ceux des classes les plus humbles et les plus pauvres, les « milieux populaires »,
le prolétariat et sous-prolétariat, les immigrés et les marginaux, parce qu’ils sont sans défense
devant les idéologies et ont le plus besoin d’être aidés pour leur promotion humaine et chrétienne.
Celui qui s’engage aujourd’hui sur ce terrain, devra, avant tout, avoir une connaissance suffisante
du nouveau contexte dans lequel vit le « peuple ». Ce ne sont plus les gens simples du temps de
Don Bosco, qui avaient besoin d’un peu de culture, d’un peu de catéchisme et d’être acheminés vers
de pieuses dévotions. C’est désormais une catégorie socio-économique, socio-politique et socioculturelle. En ce sens, le peuple a sa « conscience de classe » et est parfois attiré par la « lutte des
classe » ; Il est conscient d’être non seulement le destinataire des services charitables et sociaux,
mais d’être aussi le protagoniste de sa propre culture et de sa libération intégrale [21].
« Se consacrer au soutien et à l’évangélisation des milieux populaires », cela veut dire se mettre à
leur côté et les accompagner dans leurs efforts de promotion humaine et chrétienne, dans le sens
largement développé dans l’exhortation apostolique Evangelii nuntiandi de Paul VI et dans les
documents de l’épiscopat local, comme celui de Puebla pour l’Amérique latine [22].
13.10. La coopération missionnaire (art 13 § 2)
Don Bosco a cultivé l’idéal missionnaire et participé de manière concrète à l’œuvre missionnaire de
l’Eglise de son temps. Selon sa volonté explicite, l’apostolat missionnaire fait partie essentielle de la
nature et du but de la Société salésienne et de l’Institut des FMA ; la coopération missionnaire
imprègne tout le mouvement salésien et y occupe une place non pas marginale, mais vitale. Don
Bosco en parle expressément dans le Règlement des Coopérateurs pour en souligner l’importance et
la nécessité [23].
L’action missionnaire prend aujourd’hui un plus grand poids à cause de son lien étroit avec les
problèmes les plus graves de notre temps : la paix, le développement, la concorde et les échanges
positifs entre nations, races et religions différentes.
D’autre part, les orientations décisives données par Vatican II à propos des missions ont élargi
l’horizon de l’action de toute la Famille salésienne et suscité un profond renouveau, en vue surtout
d’un renforcement des diverses formes de solidarité missionnaire et d’un accroissement de la
coopération des jeunes et des laïcs [24].
Dans la ligne de la tradition salésienne et des nouvelles perspectives du Concile et des Chapitres
généraux des SDB [25], le Règlement affirme qu’un des domaines préférentiels de la mission
salésienne des Coopérateurs est celui de « favoriser l’activité missionnaire auprès des peuples non
encore évangélisés et dans les jeunes Eglises ». Cette option se concrétisera surtout dans les
nombreuses formes de coopération missionnaire et de « travail missionnaire » comme le spécifie le
paragraphe 1er de l’article 16.
[1]. Bollettino salesiano (janvier 1878) 1-3).
[2]. ACGS, 163 ; Voir aussi 161, 729 et 736.
[3]. Cf. Desramaut Francis, Da Associati alla Congregazione salesiana del 1873 a Cooperatori
Salesiani del 1875, in Desramaut F. – Midali M. (sous la direction de), Il Cooperatore salesiano
(LDC, Turin 1975) 23-50.
[4]. Cf. Const. SDB 1984, art. 26-30.
[5]. Cf. ACGS, 163, 169.
[6]. RDB, I.
[7]. RDB, II.
[8]. RDB, IV. Voir aussi MB XIV, 485, 541s, XVII, 25, 99s, 103, 463-466.
[9]. RDB, IV.
[10]. ACGS, 46.
[11]. ACGS, 47 ; Règl. SDB 1984, art. 1.
[12]. ACGS, 48 ; MB XVII, 272, 207.
[13]. Const. SDB 1984, art. 27.
[14]. Cf. RDB, IV, 2.
[15]. Cf. p. ex. PO, 11 ; OT, 2 ; CD, 15c ; PC, 24.
[16]. Cf. ACGS, 736, 50 ; ACG21, 106-119 ; Const. SDB 1984, art. 6, 28, 37 et 58.
[17]. Voir les références de la note précédente.
[18]. ACGS, 53, 3.
[19]. ACGS, 736.
[20]. Cf. ACS 299 (janvier-mars 1981), 3-35.
[21]. Cf. ACGS, 54 ; DP, 1134-1165.
[22]. Cf. EN, en particulier les chapitres II-IV, VIs ; DP, 1134-1165.
[23]. Cf. RDB, II.
[24]. Cf. AG, 41.
[25]. Cf. ACGS, 463, 480 ; ACG21, 143-147.
ARTICLE 14
TÂCHE D’ÉDUCATION CHRÉTIENNE
§ 1. Le Coopérateur porte partout avec lui le souci d’éduquer et d’évangéliser 1, que Don Bosco
résumait en ces mots : former « d’honnêtes citoyens et de bons chrétiens, appelés à devenir un jour
les bienheureux habitants du ciel » 2. Le Coopérateur est d’ailleurs convaincu d’être lui-même
toujours en marche vers plus de maturité humaine et chrétienne.
§ 2. Il partage avec les jeunes le goût des valeurs authentiques : la vérité, la liberté, la justice, le sens
du bien commun et du service.
§ 3. Il les éduque à la rencontre – dans la foi et les sacrements – avec le Christ ressuscité, pour
qu’ils découvrent en Lui le sens de leur vie et puissent croître en hommes nouveaux 3. Il collabore
avec eux pour trouver sous quelle forme ils sont personnellement appelés à prendre part à la mission
de l’Eglise et au renouveau de la société.
1. Cf. ACS n° 290, juillet-septembre 1978 : E Viganò, Le Projet éducatif salésien, p. 29-44 (éd.
française)
2. RDB, Au lecteur
3. Cf. Ep 4, 24 ; Col 3, 10 ; cf. Vatican II, GS 41.
14.1. Perspective conciliaire et salésienne
Dans la perspective de la Bible et selon la vision de l’Eglise proposée par le concile Vatican II, à
chaque « mission » correspond un « service », mot qui traduit le mot grec « diaconia » très employé
dans le Nouveau Testament. Jésus de Nazareth a été « envoyé » (mission) pour « servir » (diaconia)
l’humanité [1]. L’Eglise, qui participe à la mission du Christ, est par sa nature envoyée au
« service » de Dieu et de l’homme [2]. La mission spécifique salésienne implique un « service »
correspondant particulier.
L’article 14 tente justement de décrire le type de service humain et chrétien que le Coopérateur
effectue parmi les destinataires privilégiés de sa mission salésienne. Ce service est essentiellement
semblable à celui des autres membres de la Famille fondée par Don Bosco. Il s’agit d’un service
d’éducation ou, d’après le titre de l’article 14, d’une « tâche d’éducation chrétienne ». Il a
cependant des caractéristiques propres qui dérivent de la qualification de salésien séculier propre au
Coopérateur.
Cette tâche d’éducation chrétienne est considérée sous trois aspects essentiels à chacun desquels est
consacré un paragraphe :
– elle unit étroitement l’éducation et l’évangélisation (§ 1) ;
– elle comporte une éducation à la fois humaine et sociale (§ 2) ;
– et en même temps une formation à la fois chrétienne et ecclésiale (§ 3).
Il faut souligner qu’en parlant « d’éducation », le Règlement se montre sensible à la nouvelle
compréhension du rapport éducateur-éduqué obtenue par la recherche pédagogique sérieuse
d’aujourd’hui : l’éducation doit désormais se considérer non plus dans une perspective de supérieursujet ou sur un mode paternaliste, mais comme un rapport de communion et communication entre
personnes différentes par l’âge, les qualifications et les expériences, mais tendant les unes comme
les autres vers un idéal de maturité qui n'est jamais atteint et qu’il ne faut cesser de poursuivre et de
perfectionner. Le Règlement tient aussi compte du fait que de nombreux Coopérateurs sont aussi
jeunes que leurs destinataires privilégiés et qu’à la formation initiale doit faire suite la « formation
permanente ».
C’est pourquoi le premier paragraphe souligne que, tandis qu’il effectue son service d’éducation, le
Coopérateur est le premier à être « convaincu d’être lui-même toujours en marche vers plus de
maturité humaine et chrétienne ». Ce sujet sera traité à l’article 37 § 1.
14.2. « Le Coopérateur porte partout avec lui le souci d’éduquer et d’évangéliser ». (art 14 § 1)
14.2.1. La conception de Don Bosco
Au de vue historique, toute l’action éducative de Don Bosco se présente, comme une activité
clairement « pastorale », une expression et un fruit de son ministère sacerdotal, parce qu’il est
« 'pasteur d’âmes » selon la formule habituelle de la théologie de son temps. Et celui qui applique la
pédagogie de Don Bosco sans être prêtre (ils sont la majorité) doit tenir compte de cette inspiration
radicale qui caractérise le service éducatif salésien.
« Cela signifie, à notre avis, écrit un spécialiste du Système préventif, que Don Bosco a mis au
sommet de ses préoccupations, et donc de son intérêt pour les jeunes, pour leur insertion dans la
société, dans le monde du travail et de la profession, et pour l’action éducative elle-même, un seul
but : leur rédemption chrétienne en cette vie et le salut final. Sans nier pour autant la valeur
intrinsèque du travail pour faire du jeune un homme droit et un bon citoyen, ni, par conséquent, du
travail accessible aussi à ceux qui n'ont pas le caractère sacerdotal.
« Don Bosco a précisément voulu associer à son œuvre sociale et éducative une multitude de laïcs
militant au sein de sa société religieuse (les Coadjuteurs) et en dehors d’elle (les Coopérateurs).
Mais dans le concret il pensait que toute cette action devrait avoir comme fonction et but la
rédemption surnaturelle chrétienne, avec même une signification eschatologique, avec l’exigence
d’un recours aux moyens de la grâce, aux sacrements et à ceux qui, étant consacrés, pouvaient la
distribuer » [3].
14.2.2. La compréhension actuelle
Sollicités par le concile Vatican II et par le contexte culturel différent, les récents Chapitres
généraux des salésiens ont fait une relecture de cette vision qui préside à tout le Système préventif
de Don Bosco. Cette relecture a eu comme résultat la lettre du Recteur majeur, le P. Egidio Viganò,
intitulée : Le projet éducatif salésien, à laquelle se réfère explicitement le premier paragraphe de
notre article. Nous en transcrivons ici quelques passages significatifs parce qu’ils donnent une
illustration officielle à l’affirmation du Règlement qui dit : « Le Coopérateur porte partout avec lui
le souci d’éduquer et d’évangéliser ».
« L’élan “pastoral” du Système préventif conduit à unir intimement entre eux l’évangélisation et
l’éducation.
« Don Bosco exclut, de fait, dans son activité pastorale et pédagogique, une dissociation quelconque
entre l’éducation et l’évangélisation.
« Un Chapitre a voulu exprimer sa pratique par une sorte de slogan qui s’énonce comme ceci :
“Evangéliser en éduquant et éduquer en évangélisant”.
« Il affirme ainsi que la pastorale salésienne auprès des jeunes se caractérise par une incarnation
culturelle sur le terrain de l’éducation et que la pédagogie salésienne se distingue constamment par
une finalité pastorale. [...]
« Nous sommes conscients, déclare le CG21, que l’éducation et l’évangélisation sont des activités
distinctes dans leur ordre. Elles ont cependant étroitement unies sur le plan pratique de
l’existence ». [...] [4]
14.2.2.1. Evangéliser « en éduquant »
« Considérons, avant tout, la première partie de l’assertion capitulaire. La préoccupations pastorale
de Don Bosco se caractérise, avec une grande cohérence, par un choix de l’éducation comme lieu et
modalité de sa propre activité pastorale.
« Par conséquent, le Système préventif s’appuie sur le fait concret de la pénétration existentielle
réciproque qu’il y a entre “évangélisation” et “éducation”, précisément dans la ligne qui nous a été
indiquée par l’exhortation apostolique Evangelii nuntiandi de Paul VI (nos 31-36).
« Notre Chapitre général spécial avait parlé de “promotion intégrale chrétienne” et d’“éducation
libératrice chrétienne”. Don Bosco, en son temps, “aimait résumer le programme de vie qu’il
proposait aux jeunes en des formules simples mais denses”. Il parle de “bons chrétiens et de bons
citoyens” ; il vise trois objectifs : “santé, sagesse et sainteté”, et propose un style de vie qui
comporte “joie, étude, piété” (CG21 81).
« Ainsi, sa pastorale ne se réduit pas à la seule catéchèse ni à la seule liturgie, mais elle s’étend à
toutes les tâches concrètes, pédagogiques et culturelles de la vie des jeunes.
« Elle se situe dans le processus d’humanisation, sans aucun doute avec le sentiment réaliste de ses
déficiences, mais aussi avec une vision globalement optimiste de la promotion humaine, dans la
conviction que c’est justement là que doit être semé l’Evangile, pour aider les jeunes à s’engager
généreusement dans l’histoire.
« Ainsi sa pastorale tend à être précisément utile à la construction de la nouvelle société. C’est si
évident que Don Bosco put, à un homme politique qui n'acceptait pas la foi, présenter son
“Système” comme une authentique entreprise de promotion humaine.
« Il s’agit de cette charité évangélique, qui se concrétise par le don d’un verre d’eau et d’un
morceau de pain, la visite du malade et du prisonnier, l’accueil et l’éducation du jeune abandonné et
dévoyé.
« C’est avec raison que Don Bosco apparaît au monde et à l’Eglise comme un “saint éducateur”,
c’est à dire comme quelqu’un qui a investi sa sainteté dans l’éducation. D’autre part, si l’Evangile a
une valeur de salut dans la croissance humaine, et si les enfants et les jeunes vivent un âge
d’éducation, l’évangélisation la plus adaptée consistera à les accompagner, au cours de cette
éducation, pour que la foi y joue le rôle d’élément qui unifie et éclaire leur personnalité
intégrale » [5].
« La formule “évangéliser en éduquant” implique quelques options précises de la part du salésien.
[...]
– « La force d’élan qui stimule l’action éducative : la raison pour laquelle le salésien [...] se plonge
dans l’éducation, a son origine hors du champ culturel. Elle procède de la charité pastorale, c’est-àdire d’une vocation qui s’engage au service de l’Evangile [...] ». L’article 15 du Règlement en parle
expressément.
– « La sollicitude positive pour les valeurs et les institutions culturelles : se proposant
l’évangélisation, le salésien [...] est porté à apprécier et à assumer la tâche éducative dans ses
valeurs humaines ; il en approfondit et en développe la nature spécifique, qui est dotée d’une
consistance et d’une finalité propres, même s’il sait que la juste autonomie [...] ne comporte pas une
indépendance de fait, dans l’ordre pratique de l’art de l’éducation [...] ». Dans cet ordre d’idées le
Règlement met maintes fois en évidence l’autonomie relative des réalités temporelles dans
lesquelles vit le Coopérateur et l’attitude qu’il y doit assumer en tant qu’apôtre séculier.
– « Lier profondément Evangile et culture : dans la pratique éducative du Système préventif,
l’Evangile se présente en plein dans le concret de l’existence. Il n'est pas isolé de la vie, mais il
s’insère harmonieusement dans les étapes de croissance de la personnalité et de l’humanisation [...]
». Cet aspect est clairement souligné à l’article 15 du Règlement consacré au Système préventif.
– « Le sens réaliste de la gradation : imitant la patience de Dieu nous rejoignons les jeunes au point
où ils en sont de leur liberté et de leur foi. Nous multiplions les efforts pour les éclairer et les
stimuler, mais en respectant les étapes délicates de la foi. Tout notre art d’éducateurs tend à leur
permettre de se rendre progressivement responsables de leur propre formation » [6].
14.2.2.2. Eduquer « en évangélisant »
« Voyons rapidement aussi la seconde partie de l’assertion. S’il est un fait que l’option
évangélisatrice du Système préventif est l’option culturelle de l’éducation, il est tout aussi vrai que
sa tâche éducative est fortement finalisée par l’option pastorale de l’évangélisation. Notre art
éducatif est « pastoral » non seulement en ce sens que, du côté de l’éducateur, il naît et se nourrit
explicitement et quotidiennement de la charité apostolique, mais aussi en ce sens que toute l’œuvre
éducative, aussi bien dans son contenu que dans sa méthodologie, est orientée vers le but chrétien
du salut et pénétrée de sa lumière et de sa grâce.
« Cela ne signifie pas que la pédagogie salésienne ne se préoccuperait que d’incorporer, dans le
cadre institutionnel et dans les programmes d’éducation, quelques moments réservés à l’instruction
religieuse et à l’expression culturelle. Il s’agit d’un projet global et d’une tâche beaucoup plus
profonde : ouvrir aux valeurs absolues de Dieu et interpréter la vie et l’histoire selon la richesse du
mystère du Christ.
« Cette pédagogie salésienne tient vraiment compte de la force et des perspectives de la
résurrection ; elle considère sérieusement aussi la présence vivificatrice de l’Esprit Saint dans
l’Eglise et dans le monde [...] [7].
« Disons aussi que cette manière “d’éduquer en évangélisant” implique des options concrètes par
rapport au processus éducatif. De telles options se réfèrent, ici, à la réalité de la “personne” de
l’élève, au but réel et historique son développement, aux contenus et aux moyens dont il a besoin et
à la méthode la mieux appropriée à son développement ». Ce sont les options présentées dans les
paragraphes 2 et 3 du présent article. Il nous suffit, ici, d’en donner la liste.
– « Garder clairement à l’esprit le but final : la pédagogie de Don Bosco présente, avec une
insistance explicite, le véritable finalité religieuse de la vie [...].
– « Un processus éducatif positivement orienté vers le Christ [...].
– « Conscience critique et sens du devoir à la lumière de l’Evangile ; à une époque de pluralisme
comme celle que nous vivons, il est urgent de faire acquérir aux jeunes une conscience critique
capable de percevoir les valeurs authentiques et aussi de démasquer certaines hégémonies
culturelles qui, à travers les puissants moyens de communication sociale, captent l’opinion publique
et piègent tant de jeunes. [...].
– « La Parole de Dieu, de par sa nature, révèle et interpelle : enfin, une option indispensable à
assurer, dans le processus éducatif, c’est de respecter la nature spécifique de l’Evangile et de la
foi. » [8]
14.3. « Il partage avec les jeunes le goût des valeurs authentiques » (art 14 § 2)
Dans l’analyse des contenus de ce service éducatif chrétien, le § 2 s’arrête en particulier sur
certaines valeurs évangéliques de nature sociale : « la vérité, la liberté, la justice, le sens du bien
commun et du service ».
Ce sont les grandes valeurs proclamées par les documents sociaux (Mater et Magistra, Pacem in
terris) de Jean XXIII et que le concile Vatican II a adoptés : « Cet ordre [social] doit sans cesse se
développer, avoir pour base la vérité, s’édifier sur la justice, et être vivifié par l’amour ; il doit
trouver dans la liberté un équilibre toujours plus humain. Pour y parvenir, il faut travailler au
renouvellement des mentalités et entreprendre de vastes transformations sociales » [9].
Ce sont ces mêmes valeurs que le Coopérateur doit promouvoir dans la vie sociale [10]. Il est donc
naturel qu’il doive « partager » avec les jeunes parmi lesquels il exerce son activité d’éducation
chrétienne. Il y a en jeu ici la formation à un « engagement social et politique » bien compris. Nous
en avons parlé à propos de l’article 11.
14.3.1. La vérité
La vérité dont il s’agit est la vérité pleine : celle que Dieu a révélée à l’homme dans le Christ [11] ;
celle que l’Eglise, constituée par son Fondateur comme « colonne et fondement de la vérité », (1
Tm 3, 15), a reçue des Apôtres [12] et qu’elle doit annoncer, propager et défendre [13], pendant
qu’elle-même « tend à la plénitude de la vérité divine », animée par l’Esprit Saint qui la guide dans
la vérité toute entière [14]. C’est la vérité que tous les chrétiens sont appelés à vivre dans l’amour
(Ep 4, 15) [15], conscients que des éléments souvent très précieux de vérité chrétienne sont présents
même à l’extérieur des limites contrôlables de l’Eglise catholique [16], et par une divine présence
de grâce, même dans les religions non chrétiennes [17] et dans les hommes en général [18]. C’est
donc toute cette vérité, agissant dans l’humanité, qui doit être reconnue, appréciée et conduite à la
plénitude du Christ.
La vérité dont on parle est la vérité totale : avant tout la vérité profonde, religieuse, à laquelle tous
sont appelés, hommes et femmes ; la vérité qui nous unit tous, qui doit être recherchée et suivie par
une adhésion libre, en luttant contre le mensonge, les illusions et les fictions [19] ; mais aussi la
vérité du monde, de la vie, de l’histoire que l’homme atteint avec son intelligence, qu’il diffuse avec
les différents instruments de la communication interpersonnelle, de groupe et sociale, et que les
chrétiens sont sollicités à rechercher ensemble avec les autres hommes, à connaître à travers une
information sérieuse et à propager d’une manière valide, véridique, en disputant le terrain à
l’erreur [20].
14.3.2. La liberté
C’est avant tout la « liberté pour laquelle le Christ nous a libérés » (Ga 5, 1), qui permet aux
hommes de devenir chrétiens, en les libérant de l’esclavage des « éléments du monde », des idoles
de la terre, des forces du destin, de la loi et de sa lettre, les obligeant seulement à la « loi du Christ »
(Ga 6, 2) qui est la loi de l’amour.
Cette liberté n'est pas une pure caractéristique humaine, mais un don de Dieu : « Le Seigneur, c’est
l’Esprit, et là où l’Esprit du Seigneur est présent, là est la liberté » (2 Co 3, 17). En tant que don,
elle ne peut être asservie ni supprimée sans supprimer en même temps le christianisme lui-même.
Selon le Nouveau Testament, elle n'est pas une simple réalité individuelle, mais une caractéristique
de la communauté ecclésiale, et elle se manifeste dans des attitudes concrètes : la franchise de
parole et le renoncement spontané, la générosité et le respect, la promotion de toute requête
spontanée et l’exclusion de toute norme paralysante ou qui fait obstacle à la maturation de la
personne ; la libération de l’égoïsme, des « intérêts vitaux » qui rendent esclaves les personnes, de
la peur elle-même.
Le Nouveau Testament interprète la liberté chrétienne comme la liberté radicale du péché et de la
mort (Rm 8, 2) et, par conséquent, il définit la communauté ecclésiale comme le milieu où se
manifeste simplement la vie : « Parce que nous aimons nos frères, nous savons que nous sommes
passés de la mort dans la vie » (1 Jn 3, 14). L’existence chrétienne se traduit par la vitalité, car elle
est soutenue par « l’Esprit de nouveauté » (Rm 7, 6). Ce qui caractérise les fidèles dans l’Eglise
primitive, ce n'est pas l’immaturité des faibles (qui doit se respecter), mais l’exercice de la liberté
qui rappelle à tous leur dignité, et les rend capables de se comporter en personnes libres pour
dépasser peu à peu toute condition d’esclavage. Dans l’attitude de Jésus et de saint Paul, le chrétien
trouvera un exemple clair de la façon de mener une existence de personnes libres [21].
Le Concile, tout le monde devrait le savoir, a mis en lumière ce message évangélique en
l’enracinant dans la situation contemporaine de l’Eglise et de l’humanité. Il présente la liberté
comme une perfection de la personne et une exigence profonde de son esprit ; comme un don reçu,
original et inaliénable(libertés familiales, civiles, sociales, politiques et religieuse) et comme une
conquête inestimable résultant de l’engagement de l’homme dans tous les secteurs de son action
(famille, société, économie, culture, politique, information...) et, pour le chrétien, dans tous les
domaine de l’action de l’Eglise (les relations des membres du Peuple de Dieu entre eux, avec leurs
pasteurs et les autres hommes).
Il la présente, encore, comme un droit inhérent à la dignité de la personne humaine, créée à image
de Dieu (ou du chrétien, rendu libre par la présence de l’Esprit) et comme une obligation, parce
qu’elle comporte la reconnaissance et le respect des droits de Dieu et des autres personnes.
Il la voit aujourd’hui menacée ou en fait limitée par de nombreuses formes d’oppression, mais en
même temps au centre de bien des efforts généreux pour lui donner toutes les garanties possibles et
effectives [22].
C’est cette liberté, don très précieux et en même temps responsabilité très grave, que propose le
Règlement. Cela comporte, évidemment, le refus de toute forme de manipulation, à laquelle elle est,
malheureusement, souvent exposée aujourd’hui en de très nombreuses manifestations de la vie.
14.3.3. Le sens du bien commun et du service
Selon la définition donnée par la déclaration sur la liberté religieuse, « le bien commun de la société
– ensemble des conditions de vie sociale permettant à l’homme de parvenir plus pleinement et plus
aisément à sa propre perfection – consiste au premier chef dans la sauvegarde des droits et des
devoirs de la personne humaine [23]. C’est une condition inaliénable de perfection pour les
individus et pour les groupes [24] ; et donc, tout homme et tout chrétien doit s’engager à la
promouvoir [25].
Le sens du bien commun devient effectif grâce au service concret envers les autres, service rendu
avec dévouement selon ses propres capacités et conditions de vie. Il implique la connaissance des
moyens adaptés pour le promouvoir : par ex. l’information concernant les institutions civiles et
sociales, la législation, la situation des forces qui y travaillent, les difficultés, les freins, les
obstacles...
En de nombreux milieux règne aujourd’hui l’individualisme, l’égoïsme et d’autres formes
d’oppression. Ce fait freine chez les jeunes et les adultes la maturation de ce sens du bien commun
et du service, et rend difficile le travail d’éducation. Compte tenu de cette situation assez générale,
le Règlement adopte l’appel du Concile [26], et souligne expressément cette tâche salésienne du
Coopérateur.
14.4. « Il éduque [les jeunes] à la rencontre avec le Christ » (art 14 § 3)
Le décret conciliaire sur l’activité missionnaire nous enseigne que la mission de l’Eglise envers tous
les hommes « vise à les amener, par l’exemple de la vie, par la prédication, par les sacrements et les
autres moyens de la grâce, à la foi, à la liberté, à la paix du Christ, de telle sorte qu’elle leur soit
ouverte comme la voie libre et sûre pour participer pleinement au mystère du Christ » [27].
La constitution pastorale sur l’Eglise dans le monde contemporain explicite ce concept en disant
que le peuple de Dieu a pour tâche de conduire les hommes non seulement à découvrir par
l’intelligence, mais à percevoir par l’expérience quelle est, à la lumière du Christ, la signification de
la vie, du travail, de la mort, du présent et du futur pour devenir ainsi des « hommes
nouveaux » [28].
L’exemple et les directives de Don Bosco, ainsi que la tradition salésienne ont vu les Coopérateurs
se consacrer à un tel travail avec sérieux et par de nombreuses initiatives, conscients de la grandeur
divine du service rendu tant aux jeunes qu’au peuple. La fidélité dynamique à la mission reçue
exige des Coopérateurs de continuer dans cette direction, en tenant compte du contexte actuel de
l’Eglise et de la société.
Les dimensions essentielles de ce service sont les suivantes :
– Rencontre du Christ dans la foi ;
– Sa rencontre dans les sacrements.
14.4.1. Rencontre du Christ dans la foi
Jeunes et adultes doivent être accueillis selon leur degré de vie spirituelle. C’est à partir de leur
situation qu’il faut préparer le terrain pour les faire rencontrer le Christ. Il faut donc présenter
explicitement le projet de Dieu et le mystère de son Fils incarné pour le salut de l’humanité, pour
que les esprits et les cœurs s’ouvrent à Lui avec une foi sincère. Vient ensuite ce qu’on appelle
« l’inculturation » et « l’acculturation » de cette foi au moyen d’un enseignement adéquat du
message biblique et de la doctrine de l’Eglise (= inculturation) et leur confrontation avec les
cultures actuelles (= acculturation), de manière que le chrétien soit « toujours prêt à s’expliquer
devant tous ceux qui lui demandent de rendre compte de l’espérance qui est en lui » (cf. 1 P 3, 15).
Tel est le moment ou l’aspect de la pastorale de la Parole à laquelle sont invités à se consacrer avec
compétence les Coopérateurs catéchistes.
14.4.2. Rencontre du Christ dans les sacrements
La première expression de la foi est l’adoration du Père « en esprit et vérité », ou liturgie de la vie
dont parle l’article 32 § 3. La vie chrétienne atteint ses manifestations les plus significatives dans
les sacrements et dans la participation active à la liturgie. Beaucoup de Coopérateurs et de
Coopératrices sont souvent adonnés à la préparation de jeunes et d’adultes au Baptême, à la
Confirmation et au Mariage. Mais ils accorderont une attention particulière au sacrement de la
Réconciliation et surtout de l’Eucharistie, centre de la vie liturgique, à cause des richesses de grâce
et des ressources de valeur exceptionnelle qui en découlent pour l’éducation humaine et chrétienne.
Tel est l’aspect de la pastorale liturgique et sacramentelle, autre secteur dans lequel le service des
Coopérateurs devient particulièrement significatif, étant donné leur condition de séculiers.
14.5. « Il collabore avec eux pour trouver sous quelle forme ils sont personnellement appelés à
prendre part à la mission de l’Eglise et au renouveau de la société » (art 14 § 3).
Cette éducation intégrale se poursuit dans un contexte ecclésial. Elle a pour objectif de développer
l’amour de l’Eglise dont chacun se sentira membre actif. Le meilleur fruit de cette formation
ecclésiale s’obtient quand, comme dit le texte, les jeunes et les adultes « découvrent sous quelle
forme ils sont personnellement appelés à prendre part à la mission de l’Eglise et au renouveau de la
société ».
Tel est l’aspect de la pastorale ecclésiale des groupes et des mouvements de formation et d’action
apostolique, de la pastorale des vocations et de la pastorale en vue de l’engagement pour la justice.
Pour résumer tout cela et l’exprimer par des formules habituelles de Don Bosco, on peut dire que le
service salésien des jeunes et des adultes ne cherche qu’à former des saints, c’est-à-dire des
honnêtes citoyens parce que chrétiens authentiques [29].
[1]. Voir plus haut les nos 7.3 et 7.4 du commentaire de l’article 7 du RVA.
[2]. Cf. AG, 12c ; GS 3c.
[3] Braido Pietro, Il sistema preventivo di Don Bosco (PAS-Verlag, Zurich 1964) 88.
[4] Cf. ACS n° 290, juillet-septembre 1978 : E Viganò, Le Projet éducatif salésien, p. 31-32 (éd.
française)
[5] Ib. p. 32 suiv.
[6] Ib. p. 34-37.
[7] Ib. p. 37-38.
[8] Ib. p. 38- 43.
[9] GS 26c.
[10] Cf. commentaire de l’art. 11 § 1.
[11] Cf. DV 2, 6.
[12] LG 8b.
[13] Cf. LG 8b, 12a, 25 ; DV 9, 10.
[14] DV 8bc ; LG 4.
[15] Cf. LG 7c ; CD 13b ; UR 11c ; CS 79d.
[16] Cf. LG 8b ; UR 3s 11.
[17] Cf. LG 13b, 16b ; NAE 2c, 4e ; AG 9b, 11, 12, 22 etc.
[18] GS 44b.
[19] Cf. la déclaration DH sur la liberté religieuse.
[20] Cf. GS 53-62 ; IM ; CP.
[21] Cf. Cambier J., La liberté chrétienne selon saint Paul (Berlin 1964) 315-353 ; Roy L.,
Libération/Liberté, in Xavier Léon-Dufour, Vocabulaire de théologie biblique (Cerf Paris 1970 2e
éd.) 658-664. Voir aussi Congrégation pour la Foi, Déclaration sur « Liberté chrétienne et
libération » (Cité du Vatican 1986).
[22] Voir à ce sujet les mots « libération » et « liberté », dans J. Deretz – A. Nocent, Synopse des
textes conciliaires (Editions Universitaires).
[23] DH 6a.
[24] Cf. GS 26c, 74a.
[25] Cf. AA 31d, 14a.
[26] Cf. GE 1b, 3b.
[27] AG 5a ; cf. GE 2.
[28] Cf. GS 41a.
[29] Cf. CGS 65.
ART. 15 : MÉTHODE DE LA BONTÉ
Dans le service d’éducation le Coopérateur adopte la méthode de la bonté que Don Bosco a
transmise à ses fils : le « Système préventif ». Jailli de la charité pastorale, celui-ci « s’appuie tout
entier sur la raison, la religion et l’affection » 1 :
– il a recours à la persuasion et non à la contrainte, fait toujours appel aux ressources intérieures de
la personne, pour qu’elle devienne progressivement responsable de sa propre croissance ;
– il croit à « l’action invisible de la grâce dans le cœur de tout homme » 2 et à la valeur éducative de
l’expérience de la foi ;
– confiant en la force transformante de l’amour, il cherche à gagner le cœur et s’applique à se faire
aimer 3 dans la transparence et la maturité.
1. Cf. Don Bosco, Le Système préventif dans l’éducation de le jeunesse, 1877, I.
2. Vatican. II, GS 22, 5
3. Cf. Don Bosco, Lettre du 10 mai 1884, dans MB XVII, 111.
15.1. Référence nécessaire et qualifiante au Système préventif
« L’activité évangélisatrice salésienne, dit le Chapitre général 21 des salésiens, ne se caractérise pas
seulement à partir des destinataires [...], mais aussi par l’organisation particulière de ses contenus et
de ses objectifs, et par le style de présence parmi les jeunes ».
« Les salésiens de Don Bosco [y compris les Coopérateurs] ne peuvent donc approfondir
adéquatement le sens de leur mission sans réfléchir pratiquement sur le système éducatif et pastoral
que Don Bosco leur a laissé comme précieux héritage » [1].
15.2. Compréhension globale du Système préventif
Quand les récents documents salésiens parlent du Système préventif, ils n'entendent pas se référer
tout simplement au célèbre petit opuscule écrit par Don Bosco, mais plutôt à « un ensemble
organique de convictions, de dispositions, d’actions, d’interventions, de moyens, de méthodes et de
structures, qui a constitué progressivement une manière caractéristique générale d’être et d’agir,
personnelle et communautaire (de Don Bosco, de chaque salésien et de la Famille) [...] » [2]. Cela
reflète d’ailleurs une donnée constante de la tradition salésienne.
Le Règlement propose les contenus éducatifs et pastoraux dans l’article précédent (14). En effet, le
commentaire de cet article a parlé du lien étroit entre l’évangélisation et l’éducation, de la formation
humaine individuelle et sociale, chrétienne et ecclésiale : tout cela fait partie du Système préventif.
Après avoir rappelé le centre moteur et l’esprit du Système préventif (la charité pastorale), l’article
15 traite du style et de trois critères méthodologiques qui le caractérisent : cela s’exprime en trois
mots par lesquels Don Bosco définissait son système : raison, religion, cœur. Cet article ne donne
donc pas une vision globale du Système préventif ; il n’en souligne que les éléments qui font partie
d’une « méthode ». En effet, le titre déjà parle de « méthode » et le début de l’article dit : « Dans le
service d’éducation, le Coopérateur adopte la méthode de la bonté ».
15.3. « Méthode de la bonté »
Pour les salésiens qui ont écouté ou lu le P. Caviglia, témoin intelligent et fin connaisseur de la
pédagogie de Don Bosco, la définition du Système préventif comme « méthode de la bonté » va de
soi et se comprend tout à fait. Il n’en est probablement pas de même pour les membres de la Famille
salésienne qui n'ont pas eu une cette chance. Il est donc bon de citer ici quelques passages d’une
conférence dans laquelle il a présenté l’originalité du Système préventif.
L’originalité du Système préventif révèle en Don Bosco ses grands dons de créateur ; cependant sa
création « n'est pas une création d’éléments, parce que Dieu seul peut créer de rien ; c’est une
synthèse créative, qui caractérise les œuvres de génie. Synthèse créative, parce que l’originalité, la
beauté et la grandeur de la création se trouvent moins dans la nouveauté des détails que dans la
découverte de l’idée qui les assemble et les fusionne en la vie nouvelle et particulière d’un
tout » [3].
L’élément catalyseur de cette synthèse créative a été identifié par le Chapitre général spécial dans la
« charité pastorale », centre de l’esprit salésien. Le P. Caviglia y voit de plus une méthode et lui
donne le nom de « bonté » : à savoir un amour visible et familier capable de susciter une réponse
d’amour et de créer un climat d’affection en vue atteindre la fin ultime de la vie.
« Sur le piédestal de l’histoire, écrit-il, le titre par antonomase, et certainement le plus sympathique
et le mieux approprié à sa grandeur [de Don Bosco], sera la découverte du Système préventif. La
vraie originalité, l’empreinte de la pensée et du cœur de ce véritable génie du bien, se trouve dans
cette puissante synthèse créative, dans cette idée pour laquelle il a vécu et qu’il a vécue. Cette idée –
la synthèse – est venue du cœur et réside dans la bonté [...]. Le Système [...] de Don Bosco est ainsi
le système de la bonté, ou, pour mieux dire, la bonté érigée en système.
« Naturellement c’est une bonté sentie par un cœur de saint, et par conséquent non inspirée de
simples conceptions ou sentiments humains. Ici l’homme de cœur donne une forme sensible et
concrète à ce que dicte l’idéal suprême de la charité, c’est-à-dire le salut et le soin des âmes » [4].
Cette compréhension du centre propulseur du Système préventif avait déjà été officiellement
proposée, par exemple, par le P. Rinaldi. En 1925, année centenaire du premier songe de Don
Bosco, « il en avait ordonné la commémoration dans toutes les maisons, et il fit personnellement
aux salésiens et aux Sœurs des conférences sur ce sujet, dans le but précis de montrer comment, dès
cette époque, avait été indiqué à Don Bosco son système éducatif, basé sur l’esprit de bonté et de
mansuétude » [5].
C’est dans ce sens qu’il faut lire et comprendre ce que dit l’article : « Dans le service d’éducation, le
Coopérateur adopte la méthode de la bonté que Don Bosco a transmise à ses fils ».
15.4. Méthode « jaillie de la charité pastorale »
Comme il vient d’être dit, le Chapitre général spécial a identifié la source du Système préventif
dans la « charité pastorale » qui est le centre de l’esprit salésien et l’élément unificateur de la
personnalité du salésien.
La charité pastorale est « la charité envahie par une ferveur qui la porte à se vouer au bien du
prochain, et en particulier de la jeunesse, pour la gloire de Dieu : c’est bel et bien la passion
apostolique, toute pénétrée d’ardeur juvénile » [6].
« Elle est marquée par le dynamisme juvénile qui se manifestait avec tant de force dans notre
Fondateur et aux origines de notre Société. C’est un élan apostolique qui nous fait chercher les âmes
et ne servir que Dieu seul » [7]. L’article 28 du Règlement la décrit en ces termes : « Le centre et la
synthèse de l’esprit salésien, c’est cette “charité pastorale” que Don Bosco a vécue en plénitude,
rendant présent parmi les jeunes l’amour miséricordieux de Dieu Père, la charité salvifique du
Christ Pasteur et le feu de l’Esprit qui renouvelle la face de la terre ».
Le P. Albera est probablement celui qui a décrit avec le plus de pénétration psychologique l’amour
de Don Bosco pour les jeunes comme élément typique de la vocation salésienne. Il le définit comme
« le don de la prédilection pour les jeunes : [...] il ne suffit pas, écrit-il, d’éprouver pour eux une
simple attirance naturelle, mais il faut avoir une vraie prédilection pour eux. À son point de départ,
cette prédilection est un don de Dieu, c’est la vocation salésienne elle-même, mais il appartient à
notre intelligence et à notre cœur de la développer et de la perfectionner » [8].
Voici comment il décrit la prédilection de Don Bosco pour ses jeunes et la reconduit, comme à son
origine, à la charité : « Il faut dire que Don Bosco avait pour nous une prédilection unique, bien à
lui : nous en éprouvions une fascination irrésistible ; je me sentais comme prisonnier d’une
puissance affective qui nourrissait mes pensées, mes paroles et actions ; j'avais l’impression d’être
aimé d’une manière jamais éprouvée auparavant, de loin supérieure à toute autre affection : il nous
entourait tous et complètement comme dans une atmosphère de contentement et de bonheur. Tout
en lui exerçait sur nous une puissante attraction : il agissait sur nos cœurs de jeunes comme un
aimant dont nous ne pouvions nous soustraire : et même si nous l’avions pu, nous ne l’aurions pas
fait pour tout l’or du monde, tant nous étions heureux de son extraordinaire ascendant sur nous, qui
était chez lui la chose la plus naturelle, sans calcul ni effort aucun. Et il ne pouvait en être
autrement, car de chacune de ses paroles et de ses actions émanait la sainteté de l’union avec Dieu,
qui est la charité parfaite. Il nous attirait à lui par la plénitude d’amour surnaturel qui embrasait son
cœur. C’est par cette singulière attraction qu’il conquérait nos cœurs. Ses nombreux dons naturels
devenaient surnaturels chez lui à cause de la sainteté de sa vie » [9].
Le texte du Règlement se situe dans cette optique quand il déclare que le Système préventif est
« jailli de la charité pastorale » de Don Bosco.
15.5. Raison, religion, cœur
Pour décrire la méthode du Système préventif, l’article reprend les trois mots qui se retrouvent dans
la formule désormais célèbre : raison, religion, cœur. Ils sont à comprendre à la fois séparément,
dans leur ensemble et dans leur rapport réciproque.
Ils expriment, en synthèse, les contenus généraux (déjà exposés à l’article 14) de la proposition
éducative salésienne.
Ils suggèrent les dispositions qui doivent animer la pratique de la méthode : le bon sens, la foi, la
charité pédagogique faite de proximité et d’intérêt réel.
Ils indiquent surtout les ressources intérieures de la personne et, précisément, les ressources de
l’intelligence, du cœur et du désir de Dieu : stimulées et développées, elles garantissent un résultat
positif aux expériences éducatives particulières, et surtout structurent la personne pour la rendre
capable d’affronter la vie.
Les contenus de l’éducation proposée, les dispositions du Coopérateurs et l’appel aux ressources
intérieures des jeunes sont en relations réciproques et doivent être présents en même temps.
L’article 15 souligne les dispositions qui doivent animer le Coopérateur et les ressources intérieures
des destinataires privilégiés auxquelles il doit faire appel pour exercer parmi eux son service
salésien.
15.5.1. La raison
Notre article décrit ce premier critère méthodologique en ces termes : le Coopérateur « a recours à
la persuasion et non à la contrainte, fait toujours appel aux ressources intérieures de la personne,
pour qu’elle devienne progressivement responsable de sa propre croissance ».
Du point de vue de la méthode, la raison requiert certaines dispositions et attitudes fondamentales :
– Faire comprendre toutes les motivations, montrer le bien-fondé des exigences et des normes, faire
preuve de créativité et de souplesse pour proposer, calculer les possibilités de l’interlocuteur pour
présenter et exiger quelque chose ;
– Prêter attention aux jeunes tels qu’ils sont, à leurs vrais besoins, à leurs intérêts actuels et aux
tâches qui les attendent dans la vie ; montrer de la vraie sympathie pour leur univers ; savoir
accueillir leurs requêtes de vie et de développement et les aider à les évaluer avec équilibre ;
– Montrer de l’estime et une juste considération pour les valeurs dont les jeunes sont porteurs et être
attentif aux dynamismes de leur croissance initiale et permanente ;
– Exploiter les connaissances en matière d’éducation, stimuler la responsabilité, solliciter l’adhésion
aux valeurs non par la contrainte, mais par la persuasion et l’amour [10].
15.5.2. La religion
Ce deuxième critère méthodologique est décrit comme suit par le Règlement : le Coopérateur
« croit à “l’action invisible de la grâce dans le cœur de tout homme” et à la valeur éducative de
l’expérience de la foi ».
Le texte reprend une affirmation de la constitution pastorale Gaudium et spes qui la justifie de cette
manière : « En effet, puisque le Christ est mort pour tous et que la vocation dernière de l’homme est
réellement unique, à savoir divine, nous devons tenir que L’Esprit-Saint offre à tous, d’une façon
que Dieu connaît, la possibilité d’être associé au mystère pascal » [11].
Le CG21 a rappelé la conviction, encourageante d’un point de vue humain et chrétien, qui était très
familière à Don Bosco : « En tout jeune, même le plus disgracié, il y a un point accessible au bien ;
le premier devoir de l’éducateur est de rechercher ce point, cette corde sensible et d’en tirer
profit ». [12]
La religion implique, plus en détail, quelques dispositions fondamentales :
– Croire en la force génératrice et éducative de l’annonce de l’Evangile et du contact avec le Christ,
spécialement dans la prière et les Sacrements ;
– Ne pas négliger de faire appel à la conscience et au besoin de chacun d’être en communion
profonde avec Dieu et le prochain, à rechercher et à réaliser dans une vie chrétienne convaincue et
mûre ;
– Faire saisir la beauté de la foi et de ses manifestations dans la liturgie, la piété rénovée ou la
religiosité populaire ;
– Promouvoir et provoquer dans la vie quotidienne des moments et des motivations religieuses par
la fête, les célébrations, les anniversaires joyeux ou tristes. Le critère méthodologique de la
« religion » peut s’appliquer aussi à ceux qui ne vivent pas la foi chrétienne ou appartiennent à
d’autres religions. Mais cela exige un discernement continuel et intelligent.
15.5.3. Le cœur
Au point de vue méthodologique, la raison et la religion doivent toujours converger dans
l’affection : « Confiant en la force transformante de l’amour, nous dit l’article, [le Coopérateur]
cherche à gagner le cœur et s’applique à se faire aimer dans la transparence et la maturité ».
L’expression « confiant en la force transformante de l’amour » évoque une conviction maintes fois
exprimée par Don Bosco et par lui chaudement recommandée aux membres de sa Famille
apostolique. Elle est bien connue, une de ses dernières lettres au P. Giacomo Costamagna en
Argentine, dans laquelle il écrit : « [...] moi qui me vois dans un âge très avancé, je voudrais
pouvoir avoir avec moi tous mes fils et nos consœurs d’Amérique. [...] Je voudrais vous faire à tous
[...] une conférence sur l’esprit salésien qui doit animer et guider nos actions et toutes nos paroles.
Le Système préventif doit vraiment nous appartenir : [...] le mot douceur, charité et patience
résonner dans les classes. [...] Chaque salésien doit se faire l’ami de tous, ne jamais chercher la
vengeance, pardonner avec facilité et ne jamais rappeler ce qu’il a pardonné. [...] La douceur dans le
langage, le comportement et les avertissements gagne tout et tous » [13].
La formule de l’article « cherche à gagner le cœur » évoque des phrases connues du petit livret de
Don Bosco sur le Système préventif : quand il emploie ce système, le supérieur « parvient, en
général, à gagner le cœur » de l’élève : « le Système préventif fait de l’élève un ami » ; grâce à lui
« l’éducateur gagne [...] le cœur de son protégé » [14].
Le texte du Règlement se réfère à la fameuse lettre de Rome du 10 mai 1884. Don Bosco y
recommande aux salésiens d’aimer les jeunes pour se faire aimer d’eux. Voici quelques passages,
brefs mais significatifs : « Familiarité avec les jeunes surtout en récréation. Sans familiarité,
l’affection ne se prouve pas, et sans cette preuve il ne peut y avoir de confiance. Qui veut être aimé
doit montrer qu’il aime. Jésus-Christ se fit petit avec les petits et porta nos faiblesses. Voilà le
maître de la familiarité ! [...] Celui qui se sait aimé aime, et celui qui est aimé obtient n'importe
quoi, surtout des jeunes. Cette confiance crée un courant électrique entre les jeunes et leurs
supérieurs. Les cœurs s’ouvrent, ils expriment ce qui leur manque et révèlent leurs défauts. Cet
amour permet aux supérieurs de supporter les fatigues, les ennuis, les ingratitudes, les contrariétés,
les manquements et les négligences des enfants » [15].
L’affection est la charité qui se manifeste et s’adapte à la condition de l’interlocuteur (qu’il soit
enfant, jeune ou adulte) surtout du plus nécessiteux, qui ne sait s’exprimer ; c’est la proximité
agréable qui suscite la familiarité, l’affection exprimée de façon sensible à travers des gestes
compréhensibles qui favorisent la confiance et créent la relation qui aide à mûrir. Cette façon de
faire donne une sécurité intérieure, suggère des idéaux, soutient l’effort de se dépasser. C’est une
charité pédagogique qui « crée la personne » et se perçoit comme une aide à l’épanouissement
personnel.
Comme le dit en synthèse le Règlement, l’affection, c’est « gagner le cœur et s’appliquer à se faire
aimer dans la transparence et la maturité » [16].
[1] CG21 80.
[2] Auteurs divers, Il sistema educativo di Don Bosco tra pedagogia antica e nuova. Actes du
Congrès européen salésien sur le Système préventif de Don Bosco (Elle Di Ci, Turin 1974) 301.
[3] Caviglia Alberto, La pedagogia di Don Bosco (Rome 1935) 9.
[4] Ib. 14 s.
[5] Ceria Eugenio, Vita del Servo di Dio Sac. Filippo Rinaldi (SEI, Turin 1948) 443.
[6] CGS 89
[7] Const. SDB 1984 art. 10
[8] Lettere circolari di D. Paolo Albera ai Salesiani (Direction générale des œuvres salésiennes,
Turin 1965) 372.
[9] Ib. 372-374.
[10] Cf. CG21 100s, 103.
[11] GS 22 § 5.
[12] CG21 101.
[13] Ceria Eugenio, Epistolario di S. Giovanni Bosco (SEI, Turin 1959) 332.
[14] Don Bosco, Le Système préventif dans l’éducation de la jeunesse.
[15] MB XVII 111.
[16] Voir le commentaire du RVA art. 28 § 2 et 31 § 2. L’expression « dans la transparence et la
maturité » ne se rattache pas à « se faire aimer », mais à « cherche à » : elle concerne donc
l’attitude du Coopérateur et pas celle des destinataires.
ARTICLE 16
ACTIVITÉS TYPIQUES
§ 1. Toutes les formes d’apostolat sont ouvertes aux Coopérateurs. Parmi elles, à la suite de Don
Bosco, ils donnent la préférence aux suivantes :
–
la catéchèse 1 et la formation chrétienne ;
–
l’animation de groupes, de mouvements de jeunes et de familles ;
–
la collaboration dans des centres d’éducation et d’enseignement ;
–
le service social parmi les pauvres ;
–
l’engagement dans la communication sociale, car elle est créatrice de culture et diffuse des
modèles de vie parmi le peuple 2 ;
–
la coopération à la pastorale des vocations 3 et la promotion de l’Association elle-même ;
–
le travail missionnaire et la collaboration au dialogue œcuménique.
De plus les Coopérateurs sont disponibles pour réaliser toute initiative nouvelle répondant à des
urgences locales.
§ 2. Le Coopérateur réalise encore valablement son engagement apostolique par la prière, par l’aide
matérielle, en impliquant d’autres personnes, et en offrant généreusement ses souffrances et
infirmités personnelles 4.
1. Cf. RDB IV, 1.
2. Cf. RDB IV, 3
3. Cf. RDB IV, 2.
4. Cf. RDB IV, 4-5.
16.1. Liste des activités typiques
Comme on l’a déjà expliqué à propos des destinataires privilégiés, la mission salésienne et le
service éducatif qui lui correspond se réalisent à travers toute une gamme d’activités ou
d’initiatives. Cet article 16 en présente une liste plus ou moins par ordre d’importance et d’affinité.
Il ne faut donc pas interpréter ce critère de façon rigide. Par exemple, le fait que la pastorale des
vocations et le travail missionnaire figurent à la fin du premier paragraphe et que différentes formes
d’engagement apostolique prennent place au deuxième, ne veut pas dire que ces activités soient
moins importantes que celles qui figurent avant elles.
Dans le concret, en conformité avec ce qui s’est dit sur l’apostolat séculier du Coopérateur en
famille, au travail et dans la vie sociale, l’article confirme avant tout le principe général selon lequel
« toutes les formes d’apostolat sont ouvertes aux Coopérateurs », puisqu’ils sont salésiens séculiers.
Il propose donc, dans un premier paragraphe, une liste indicative des activités qui correspondent
directement à la mission spécifique salésienne et auxquelles ils « donnent la préférence », comme
dit le texte.
Le deuxième paragraphe indique quelques formes d’engagement apostolique déjà proposées par le
Règlement de Don Bosco. Elles n'entrent pas, à proprement parler, dans ce qu’on appelle apostolat
actif, mais elles constituent une manière valable de faire apostolat et de collaborer à la mission
spécifique salésienne.
Choisir l’une ou l’autre de ces activités typiques dépendra des aptitudes et des capacité, de la
préparation, de la disponibilité et des conditions de chaque Coopérateur et de chaque Coopératrice.
Elles sont proposées au libre choix de chacun, et celles qui sont énumérées dans le deuxième
paragraphe en particulier seront suggérées par les conditions objectives, par exemple l’âge, la
maladie, la situation familiale particulière.
16.2. « La catéchèse et la formation chrétienne » (art 16 § 1)
Tout le monde connaît quel rôle a joué le souci d’évangéliser dans la vie, les activités et les œuvres
de Don Bosco, et quelle place y occupèrent le travail catéchistique et la formation chrétienne de la
jeunesse. Beaucoup de ses collaborateurs prêtres et laïcs de la première heure, germe prometteur des
futurs Coopérateurs, furent engagés par lui dans la catéchèse et des activités orientées vers
l’éducation religieuse de la jeunesse et du peuple.
Dans ses constitutions il a écrit : « La première œuvre de charité sera de réunir les enfants les plus
pauvres et abandonnés, pour les instruire dans la sainte religion » [1]. Dans le Règlement des
Coopérateurs il plaça en première et quatrième place (une sorte d’inclusion significative) la
catéchèse et d’autres activités orientées vers la formation chrétienne des adultes et des jeunes [2].
Dans ses nombreuses conférences aux Coopérateurs, l’appel à l’action catéchistique et au travail
d’éducation religieuse qui s’y rattache a été très fréquent comme un leitmotiv dominant [3]. En ses
cent années d’histoire, la Famille salésienne a adopté le zèle évangélisateur de son Fondateur pour
le porter partout, à travers de nombreuses activités.
Le concile Vatican II a parlé de la catéchèse comme du premier et meilleur « moyen » pour
l’éducation chrétienne : « Le premier [de ces moyens] est la formation catéchétique qui éclaire et
fortifie la foi, nourrit la vie selon l’esprit du Christ, achemine à la participation active et consciente
au mystère liturgique et incite à l’action apostolique » [4]. Il a publié des directives générales sur les
contenus bibliques et liturgiques de la catéchèse [5], son ouverture aux problèmes de l’homme
d’aujourd’hui en vue d’y répondre, les besoins des missions, des Eglises locales et de l’Eglise
universelle [6]. Il fortement souligné la responsabilité des parents et des laïcs en ce domaine [7].
Dans la période post-conciliaire, plusieurs documents officiels sur ce sujet ont été élaborés par les
salésiens [8], le magistère pontifical [9] et plusieurs épiscopats. Les Coopérateurs catéchistes
trouveront un intérêt spécial à les lire et à les étudier. Le travail catéchistique et les autres activités
de formation chrétienne ne peuvent pas s’entreprendre aujourd’hui dans une perspective de résultat
positif sans une préparation adéquate sur les contenus, les méthodes, les itinéraires et les techniques,
élaborés sur les bases objectives d’une expérience convenable.
16.3. « L’animation de groupes, de mouvements de jeunes et de familles » (art 16 § 1)
Il est bien connu que Don Bosco a été très sensible au besoin des jeunes de s’associer : il suffit de
penser au poids qu’il donnait aux « compagnies ». Il y voyait un moyen efficace pour la formation
sociale, morale et religieuse des jeunes et pour renforcer en eux le sens de la responsabilité
personnelle et collective.
Les groupes et des mouvements de jeunes et de familles sont présents dans la tradition salésienne et
ce fait revêt une importance spéciale en de nombreux contextes sociaux et ecclésiaux actuels. Il
répond à des besoins profonds, en particulier des jeunes et des noyaux familiaux qui vivent et
travaillent dans des milieux urbains caractérisés par l’anonymat et la mobilité sociale.
Pour beaucoup de jeunes, le groupe et, avec les nuances qui s’imposent, le mouvement de jeunesse
constituent des lieux privilégiés où, par la confrontation amicale avec leurs compagnons, ils peuvent
approfondir des options humaines et chrétiennes qui marqueront leur vie de diverses façons, et faire
une expérience d’Eglise et de sérieux engagement apostolique [10].
Au niveau salésien il existe des groupes de jeunes dans presque toutes les œuvres. Dans certaines
régions existe aussi un mouvement salésien de jeunes. De nombreux Coopérateurs et Coopératrices
en sont les animateurs. Leur Règlement reconnaît de façon officielle cette tâche comme une activité
salésienne typique.
Les divers mouvements familiaux et les nombreuses associations de familles pour les familles ont
été appréciés et encouragés par l’exhortation apostolique Familiaris consortio de Jean Paul II, pour
le service qu’ils rendent au profit des familles et de la société. Ce document offre des orientations
éclairantes pour une pastorale familiale à jour et attentive aux urgences du moment [11].
L’épiscopat aussi a publié des documents consacrés à ce point névralgique pour l’avenir de l’Eglise
et de la société. Ces documents officiels sont des points de référence indispensables aux
Coopérateurs engagés dans l’animation des mouvements familiaux.
Sur le terrain salésien il existe aussi des mouvements et associations de familles. Il suffit de rappeler
une fois de plus, par exemple, les « Hogares Don Bosco » [Foyers Don Bosco] en Espagne. Très
nombreuses sont les activités en rapport avec la famille gérées avec la participation des
Coopérateurs : consultation psychopédagogique et matrimoniale, tables rondes sur des problèmes
éducatifs et familiaux... Ce genre d’activités orientées vers « la promotion de la famille », comme
dit l’article 13 § 2, est désormais reconnue officiellement par le Règlement comme répondant à la
mission salésienne.
16.4. « La collaboration dans des centres d’éducation et d’enseignement » (art 16 § 1)
Un nombre considérable de Coopérateurs travaillent aujourd’hui dans des centres d’éducation et
d’enseignement, en raison de leur profession d’éducateurs, d’enseignants et de conseillers à
différents niveaux.
La législation scolaire de nombreux pays prévoit désormais la participation active à la gestion de
l’école ou du centre, non seulement du personnel de l’école, mais aussi des parents d’élèves.
Les documents officiels des salésiens et des Filles de Marie Auxiliatrice encouragent les
Coopérateurs et les Coopératrices disponibles et qualifiés, à coopérer aux œuvres d’éducation et
d’enseignement gérées par les SDB et FMA. En certains endroits ont vu le jour diverses formes de
participation des Coopérateurs, qui se sont révélées très profitables et prometteuses.
Sous leurs multiples formes (consultation pédagogique, rencontres personnelles, conseils, réunions
de classes, excursions scolaires, classes de neige etc.), ces activités, exercent une influence
éducative indubitable. Ce sont des initiatives ouvertes à tous les Coopérateurs et à toutes les
Coopératrices. Elles sont en particulier à conseiller à ceux d’entre eux dont les dispositions et les
qualifications leur permettent d’apporter une collaboration précieuse et souvent pas facile à trouver.
16.5. « Le service social parmi les pauvres » (art 16 § 1)
Les activités par lesquelles, au cours de leur histoire, les Coopérateurs et les Coopératrices ont aidé
les pauvres sont nombreuses et bien connues. Elles peuvent en gros se distinguer en bienfaisance
individuelle et collective, et en soutien donné aux œuvres des salésiens et des Filles de Marie
Auxiliatrice consacrées au service de la jeunesse pauvre et des milieux populaires [12].
Actuellement, en de nombreux pays du premier comme du tiers monde, leur mission populaire a
pris la forme d’un « service social parmi les pauvres » géré directement par eux, avec des activités
dictées par les nécessités et les possibilités de l’endroit : centre d’accueil, dispensaires, cabinet de
consultations, hôpitaux, patronages, centres scolaires et récréatifs... Le Règlement enregistre cette
évolution positive de leur service salésien aux pauvres et l’inclut, avec raison, parmi les activités
typiques salésiennes à privilégier.
16.6. « L’engagement dans la communication sociale » (art 16 § 1)
Voici quelques notes du Chapitre général spécial des salésiens : elles donnent un commentaire
officiel du petit passage du Règlement qui dit : « l’engagement dans la communication sociale, car
elle est créatrice de culture et diffuse des modèles de vie parmi le peuple ».
« Don Bosco fit preuve de courage et le zèle apostolique en prenant des initiatives d’avant-garde
dans ce domaine. “La presse fut une des principales entreprises que me confia la Providence... Je
n'hésite pas à appeler divin ce moyen, parce que Dieu lui-même s’en est servi pour la restauration
de l’homme” [13]. Ce sont là des paroles de la Circulaire de Don Bosco aux salésiens en date du 19
mars 1885 ; elles résument la pensée et l’action de Don Bosco et elles sont comme la charte de
l’action salésienne en la matière. Son amour pour les jeunes conduisit Don Bosco à concevoir tous
les moyens possibles pour façonner un milieu favorable à leur formation intégrale. Il vit dans le
théâtre un élément de valeur pour la formation et de développement de la personnalité du jeune, et
dans la musique un canal d’idées saines et un moyen de susciter le climat de joie salubre.
« Au futur Pape Pie XI, le saint disait : “Dans ce domaine, Don Bosco veut toujours être à l’avantgarde du progrès” [14]. Cela signifiait qu’il voulait toujours être le premier à adopter les inventions
techniques les plus modernes pour intensifier l’apostolat de la bonne presse.
« Don Bosco avait affirmé que la bonne presse était “l’une des fins principales de la
Congrégation” [15]. Par là il stimulait les salésiens à produire et diffuser des livres et des
périodiques, surtout dans les secteurs des jeunes et dans les milieux populaires » [16].
Pour les Coopérateurs il écrivit dans leur Règlement : « Opposer la bonne presse à la presse
irréligieuse, par la diffusion de bons livres, brochures, tracts, imprimés de tout genre, en les
répandant dans les familles et partout où l’on juge pouvoir le faire prudemment » [17]. Pour tous
les groupes de la Famille salésienne il dit : « Je vous demande et supplie de ne pas négliger ce
secteur très important de notre mission » [18].
Le concile Vatican II a fait ressortir en divers documents et surtout dans le décret Inter mirifica
l’utilité et l’efficacité irremplaçable des moyens de la communication sociale (presse, cinéma, radio,
télévision, vidéo-cassettes). Pour répondre au désir du Concile, l’instruction Communio et
Progressio du 23 mai 1971, souligne le changement de perspective survenu dans l’Eglise : la crainte
et la réserve vis-à-vis des mass media a cédé la place à une vision chrétienne positive.
Le document du Chapitre général spécial consacré à ce thème [19] engage les salésiens à la
promotion et à l’usage pédagogique de ces moyens ; il trace les lignes d’une action éducative à jour
qui libère des conditionnements négatifs des moyens de la communication sociale et suscite la
coresponsabilité créative dans leur utilisation ; il reconnaît le rôle fondamental des Coopérateurs qui
travaillent dans ce secteur : écrivains, journalistes, éditeurs, libraires, diffuseurs de presse, artistes et
imprésarios dans le monde de la chanson, de la musique, du théâtre, de la radio et de la télévision.
Les Chapitres généraux subséquents ont mis à jour cet enseignement et les indications concrètes à
ce sujet [20]. Le texte actuel des Constitutions, duquel s’inspire le présent article, dit entre autre :
« Nous travaillons dans le secteur de la communication sociale. C’est un champ d’action
significatif, qui relève des priorités apostoliques de la mission salésienne. Notre Fondateur a perçu
la valeur de cette école de masse qui crée une culture et diffuse des modèles de vie, et il s’est
engagé dans des entreprises apostoliques originales pour la défense et le soutien de la foi du
peuple » [21].
Sur ce terrain, nombreuses sont les formes sous lesquelles les Coopérateurs peuvent réaliser leur
engagement apostolique, dans les structures sociales comme dans les structures ecclésiales et
salésiennes consacrées à cette activité : circuits de presse, de cinéma, de radio et de télévision ;
centres d’édition pour la production et la diffusion de livres, de revues et de périodiques ; centres
d’émission et de production de programmes audio-visuels, radiophoniques et télévisés.
16.7. « La coopération à la pastorale des vocations » (art 16 § 1)
L’attention privilégiée « aux jeunes qui présentent des signes de vocation apostolique spécifique »,
comptés parmi les destinataires privilégiés de la mission salésienne des Coopérateurs (cf. art 13 §
1), trouve sa réalisation pratique dans « la coopération à la pastorale des vocations ».
Les Coopérateurs peuvent offrir leur collaboration personnelle de plusieurs façons :
– Sensibilisation individuelle et collective de leur milieu familial, de leur milieu de travail et de la
communauté ecclésiale où ils vivent et travaillent ;
– Elaboration de projets de pastorale des vocations au niveau de la communauté salésienne locale et
provinciale, de la paroisse et du diocèse ;
– Prise en charge de tâches d’animation des vocations et participation à des équipes d’animateurs
des vocations, composées de préférence de membres des différents groupes de la Famille
salésienne ;
– Discernement des vocations, en signalant et en dirigeant vers des centres d’orientation des
vocations des jeunes qui présentent des signes de vocation apostolique spécifique ;
– Accompagnement des vocations par différentes formes d’aide et de soutien offerts aux jeunes en
phase de recherche de leur vocation, de maturation d’une décision, de croissance dans l’option
prise...
Dans une pastorale des vocations éclairée, il faut prévoir certains moments de particulière intensité
pour une réflexion sérieuse. Ils sont ouverts à la collaboration des Coopérateurs. En voici qui
semblent plus importants et utiles :
– Retraites spirituelles centrées sur la recherche de Dieu dans la vie personnelle ;
– Rencontres de prières et de réflexion, surtout pour une initiation à la liturgie et à la méditation ;
– Rencontres « projets de vie », pour une aide spécifique dans l’évaluation des différentes
hypothèses de vocation chrétienne ;
– Camps d’orientation (de recherche, de proposition, etc.), réalisés sous les formes les mieux
adaptées au groupe des jeunes concernés ;
– Moments de contact avec le Centre des Coopérateurs, avec des communautés paroissiales et
religieuses et, en particulier, avec des communautés de salésiens et de salésiennes.
Il faut aussi tenir compte de certains lieux ou milieux où peut se réaliser une pastorale des
vocations :
– Milieux ecclésiaux où se réunissent et travaillent les jeunes de l’endroit ;
– Œuvres des salésiens, des salésiennes et, évidemment, les œuvres gérées par des Coopérateurs ou
des Coopératrices ;
– Séminaires et aspirandats rénovés selon les indications de Vatican II et du magistère salésien ;
– Communautés de référence pour les vocations, les clubs de vocations, l’incorporation de jeunes
dans des communautés salésiennes...
– Maisons de retraites et de prière dotées d’équipes qualifiées en vue d’une action systématique
d’orientation spirituelle.
Dans tous ces milieux il est fondamental d’impliquer les familles des jeunes et de travailler en
étroite collaboration avec elles pour créer un milieu favorable au développement de la
vocation [22].
16.8. « La promotion de l’Association elle-même » (art 16 § 1)
Nombreuses sont les activités que les Coopérateurs, seuls ou en groupe, les Centres et les différents
Conseils peuvent réaliser en vue de la promotion de l’Association.
Certaines concernent la croissance, en nombre et en qualité, de ses membres par l’admission de
nouveaux associés. C’est le but de la pastorale des vocations : repérer et former de nouveaux
Coopérateurs et Coopératrices,
D’autres activités concernent la diffusion de l’Association avec la création de nouveaux Centres
tant auprès des salésiens et des Filles de Marie Auxiliatrice qu’en dehors des œuvres salésiennes.
D’autres enfin concernent la vitalité interne de l’Association et son organisation plus fonctionnelle
et efficace : par exemple, participer activement à la vie du Centre ; assumer des charges de direction
et les exercer avec compétence et dévouement ; régulariser, là où c’est nécessaire, l’organisation de
l’Association au niveau local et provincial, ou la relancer en tenant compte, en tout cela, des normes
du Règlement : favoriser la liaison des Conseils provinciaux au niveau régional, national ou
international en participant aux activités organisées dans ce but (rencontres, réunions, journées
d’étude, semaines de la Famille salésienne).
16.9. « Le travail missionnaire » (art 16 § 1)
La formule générale « travail missionnaire » désigne l’ensemble des services et des activités en
faveur des « missions » et l’engagement direct de Coopérateurs, seuls ou en groupe, dans les lieux
de missions.
En ce qui concerne la coopération missionnaire voici quelques formes de collaboration concrète,
ouvertes à la générosité, à la disponibilité et à la possibilité des Coopérateurs et des Coopératrices :
– Coopérer dans les Conseils, les Procures et les Centres missionnaires établis au niveau provincial,
interprovincial ou diocésain ;
– Entretenir l’intérêt missionnaire parmi les membres de l’Association et parmi les personnes du
milieu social et ecclésial où l’on vit et travaille ;
– Promouvoir et soutenir les activités en faveur des vocations missionnaires ;
– Garder des contacts suivis avec les fidèles de la paroisse et avec les salésiens et les salésiennes de
la province partis en mission ;
– Collaborer avec le Dicastère salésien pour les missions, avec les diocèses et les autres Instituts
religieux ;
– Gérer des projet et chercher de l’aide auprès des organismes d’Etat, ecclésiaux ou privés en faveur
des missions.
En ce qui concerne le travail direct dans les lieux de missions, on peut mentionner ici toutes les
activités en vue de rechercher, de former et de soutenir, au point de vue spirituel et financier, un
laïcat missionnaire salésien. Il y a déjà eu diverses expériences de Coopérateurs et Coopératrices
qui, après une bonne préparation, ont effectué un travail salésien dans des lieux de « mission »
durant une période déterminée. Il est souhaitable que ce mouvement de Coopérateurs missionnaires,
promu par l’Association, puisse avoir un développement large, valide et durable [23].
16.10. « La collaboration au dialogue œcuménique « (art 16 § 1)
En bien des pays, les Coopérateurs côtoient chaque jour des chrétiens non catholiques. S’il est vrai
que dans un passé plus ou moins récent leurs rapports mutuels étaient inspirés par une attitude
apologétique de défense des positions confessionnelles respectives et par le prosélytisme, la
situation a beaucoup changé avec le Mouvement œcuménique et après les déclarations du Concile
dans le décret sur l’Œcuménisme.
Le nouveau climat de dialogue qui s’est progressivement instauré a stimulé plusieurs d’entre eux à
participer aux initiatives prises par les Eglises locales respectives, surtout dans les domaines qui
intéressent la mission salésienne. De plus, en plusieurs endroits s’est établie une collaboration
fructueuse entre Coopérateurs et chrétiens non catholiques en faveur de la jeunesse et des milieux
populaires.
Ces Coopérateurs ont demandé que ces activités œcuméniques, qu’ils réalisent non de façon
arbitraire mais en pleine communion avec leurs propres pasteurs et avec les Responsables salésiens,
soient envisagées de façon positive dans le Règlement destiné à orienter leur vie dans l’optique
salésienne,. C’est le motif essentiel qui a conduit à accepter cette requête dans le nouveau
Règlement de 1974. L’option prise à l’époque a été maintenue dans le Règlement actuel.
16.11. « Toute initiative nouvelle répondant à des urgences locales » (art 16 § 1)
Lors de la refonte du Règlement, on s’est trouvé en face d’un très vaste éventail d’activités
suggérées par la base attentive à sa propre situation locale, qui varie sensiblement d’un continent à
l’autre, d’une région à l’autre et d’un pays à l’autre. On a constaté, en outre, que de nombreuses
activités de type inédit correspondaient à des besoins immédiats de l’endroit. Il s’avère aussi que
l’accélération actuelle de l’histoire produit des changements sociaux très rapides. S’ils offrent des
avantages indéniables, ils créent souvent aussi par ailleurs de nouvelles situations de pauvreté et de
besoin auxquelles in faut trouver des solutions rapides.
Devant ce tableau, vouloir présenter une liste, même à simple titre indicatif, de ce que peuvent
concrètement faire les Coopérateurs pour faire face à ces situations, s’est révélé presque impossible.
Il a semblé préférable de donner une indication générale et de principe qui, d’un côté, apprécie ce
qui a été fait de positif et, de l’autre, oriente le travail futur.
Le texte sollicite la « disponibilité » des Coopérateurs à réaliser « toute initiative nouvelle » Ceci
s’accorde avec une caractéristique de l’esprit salésien : « Attentif au réel [...], dit l’article 30 § 2, [le
Coopérateur] a le sens du concret [...] et s’engage avec esprit d’initiative à donner une réponse aux
urgences qui se présentent ».
La phrase signale aussi de quelles activités il s’agit : toute initiative nouvelle « répondant à des
urgences locales », c’est-à-dire du milieu social où il vit et travaille.
Même si le texte ne le dit pas, parmi ces initiatives, il faut favoriser celles qui s’orientent vers les
destinataires privilégiés de la mission salésienne. C’est évident : ces « initiatives nouvelles », en
effet, sont placées dans le contexte des « activités typiques » par lesquelles les Coopérateurs
réalisent leur mission salésienne spécifique.
16.12. Autres formes d’engagement apostolique (art 16 § 2)
Les formes d’engagement apostolique salésien énumérées dans ce deuxième paragraphe sont
reprises du Règlement de Don Bosco. Quelques-unes d’entre elles (prière, aide matérielle,
implication d’autres personnes) ont pour elles une longue tradition. Il faudra tout faire pour les
remettre en valeur et les reprendre comme il se doit, surtout là où elles se seraient perdues ou
seraient tombées en désuétude. Tout autre commentaire est inutile.
Par contre, il semble utile et nécessaire de dire un mot à propos de ce qu’on appelle « apostolat de la
souffrance ». Dans un passé récent, il a été déprécié ou, pis encore, oublié, en particulier par ceux
qui exaltent de façon unilatérale l’engagement pour un apostolat actif.
Heureusement plusieurs facteurs ont réveillé l’attention sur la signification évangélique de la
souffrance et son incidence sur l’apostolat : l’expérience, souvent douloureuse, de ceux qui, dans
l’après-concile, ont cherché sincèrement à réaliser le renouveau promu par lui ; le contexte social et
ecclésial général de la dernière décennie au cours de laquelle s’est un peu estompé l’optimisme des
années 60 ; et d’autres circonstances dont il n’est pas nécessaire de parler ici.
Il est très significatif que Jean Paul II ait consacré à ce sujet la lettre apostolique Salvifici doloris
[Le sens chrétien de la souffrance]. La souffrance humaine y est considérée à la lumière du mystère
de la Croix du Seigneur ressuscité, où s’exprime avec le plus de force l’amour de Dieu pour
l’humanité.
Comme commentaire au texte du Règlement : « Le Coopérateur réalise encore valablement son
engagement apostolique [...] en offrant généreusement ses souffrances et infirmités personnelles »,
on peut reprendre quelques extraits de cette lettre, qui explique précisément la valeur salvifique de
la douleur humaine si elle se vit en communion de foi avec le Seigneur Jésus.
« La foi dans la participation aux souffrances du Christ porte en elle-même la certitude intérieure
que l’homme qui souffre “complète ce qui manque aux épreuves du Christ” et que, dans la
perspective spirituelle de l’œuvre de la Rédemption, il est utile, comme le Christ, au salut de ses
frères et sœurs. Non seulement il est utile aux autres, mais, en outre, il accomplit un service
irremplaçable.
« Dans le Corps du Christ, qui grandit sans cesse à partir de la Croix du Rédempteur, la souffrance,
imprégnée de l’esprit de sacrifice du Christ, est précisément, d’une manière irremplaçable, la
médiation et la source des bienfaits indispensables au salut du monde. Cette souffrance, plus que
toute autre chose, ouvre le chemin à la grâce qui transforme les âmes. C’est elle, plus que toute
autre chose, qui rend présentes dans l’histoire de l’humanité les forces de la Rédemption.
« Dans ce combat “cosmique” entre les forces spirituelles du bien et du mal, dont parle la lettre aux
Ephésiens, les souffrances humaines, unies à la souffrance rédemptrice du Christ, constituent un
soutien particulier pour les forces du bien, en ouvrant la route au triomphe de ces forces salvifiques.
« C’est pourquoi l’Eglise voit dans tous les frères et sœurs souffrants du Christ un sujet multiple de
sa force surnaturelle. Que de fois les pasteurs de l’Eglise ont recours à eux, précisément parce qu’ils
cherchent près d’eux aide et soutien !
« L’Evangile de la souffrance est écrit sans cesse, et il s’exprime sans cesse dans cet étrange
paradoxe : les sources de la force divine jaillissent vraiment au cœur de la faiblesse humaine. Ceux
qui participent aux souffrances du Christ conservent dans leurs propres souffrances une parcelle
tout à fait particulière du trésor infini de la Rédemption du monde, et ils peuvent partager ce trésor
avec les autres.
« Plus l’homme est menacé par le péché, plus sont lourdes les structures du péché que le monde
actuel porte en lui-même, et plus éloquente est de la souffrance humaine en elle-même. Et plus aussi
l’Eglise éprouve le besoin de recourir à la valeur des souffrances humaines pour le salut du
monde » [24].
Il vaut la peine de rappeler le mouvement séculier pour la souffrance animé par les Filles des
Sacrés-Cœurs du P. Variara [25].
[1] Const. SDB 1874 art. 3.
[2] RDB IV 1, 4.
[3] Cf. p. ex. MB XIV 541 s. ; XV 500 ; XVI 413 ; XVII 25, 463.
[4] GE 4 ; cf. LG 35 ; AA 10a ; GS 3, 10s, 62.
[5] Cf. SC 109 ; DV 24 ; AG 17c, 19b.
[6] Cf. CD 13a ; AG 39b ; GS 62.
[7] Cf. LG 41a ; AA 17 ; CD 30d.
[8] Cf. CGS 274-341 ; CG21 31-79.
[9] Cf. Jean-Paul II, La Catéchèse (Cité du Vatican, 1979).
[10] Cf. Tonelli Riccardo, Gruppi giovanili e esperienza di Chiesa (LAS, Rome 1983).
[11] Cf. n° 72.
[12] Voir les différentes reconstitutions de l’histoire des Coopérateurs reportées dans l’introduction
du présent commentaire à la note 10.
[13] Ep IV, 318-319.
[14] MB XIX 322.
[15] Ep IX 320.
[16] CGS 450-451.
[17] RDB IV 3.
[18] Ep IV 321.
[19] Cf. nos 442-459.
[20] Cf. CGS 442-462 ; CG21 148-153 ; CG22 75-77 ; pour une connaissance à jour des décisions
et des orientations officielles des SDB, voir le dicastère de la communication sociale, Linee
orientative per una politica della comunicazione sociale salesiana (Rome 1986) 56 p.
[21] Const SDB 1984 art. 43 ; Voir Règl. SDB 1984 art. 31-34.
[22] Cf. CG21 111-119.
[23] Cf. CG21 146 s.
[24] SD 27.
[25] Cf. Dicastère pour la Famille salésienne, La Famiglia salesiana di Don Bosco, (Rome 1999)
p. 88-93.
ARTICLE 17
Structures ouvertes À l'action des CoopÉrateurs
§ 1. Une grande partie des activités des Coopérateurs se déploie dans diverses structures où la
condition séculière permet plus facilement de s'insérer :
–
dans les structures civiles, culturelles, socio-économiques et politiques, surtout quand elles
ont de fortes incidences sur l'éducation des jeunes et sur la vie des familles ;
–
dans les structures ecclésiales, où ils peuvent offrir « aux évêques et aux curés » 1 une
collaboration responsable, notamment dans les communautés paroissiales ;
–
dans les structures animées par les Salésiens de Don Bosco, par les Filles de Marie
Auxiliatrice ou par d'autres groupes de la Famille salésienne, particulièrement dans les patronages,
les centres des jeunes, les écoles.
1. Cf. MB XVII, 25 ; cf. CIC can 305.
17.1 « Une grande partie des activités des Coopérateurs se déploie dans des structures ».
Dans des articles précédents, par exemple au sujet de l'apostolat dans la réalité sociale (art.11) et
des activités typiques (art. 16 § 1), le Règlement a déjà parlé de structures où le Coopérateur réalise
la mission salésienne. Dans cet article-ci, il aborde directement la question.
Sur ce point il suit un procédé adopté par les Constitutions des salésiens : après avoir parlé du
service éducatif et pastoral selon le Système préventif, ces Constitutions traitent des activités et des
« œuvres », c'est-à-dire des structures où ils réalisent leurs services [1].
Les activités d’apostolat salésien du Coopérateur ne s’exercent pas toutes dans des structures, mais
seulement « une grande partie », comme dit justement le texte du Règlement. En effet, le
Coopérateur et la Coopératrice font de l’apostolat dans leur famille, suscitent des activités
spontanées, souvent temporaires, participent de diverses façons à toutes sortes de formes de
volontariat qui ne se rattachent en général pas à des structures.
Cela dit, le texte reconnaît cependant que « une grande partie des activités des Coopérateurs se
déploie dans diverses structures ». Ce fait reflète une option de base facile à comprendre : l'action
apostolique doit s'adapter à la situation d’aujourd’hui : sociale, culturelle, politique et religieuse, qui
est très diversifiée et fortement structurée. Sans quoi, elle risque de n'avoir pas d'influence ni
d’efficacité [2].
Le texte fait encore une autre constatation : dans ce secteur des structures, le caractère séculier du
Coopérateur laïc lui donne, sans doute, des avantages, dans le sens qu'il « permet plus facilement de
s’insérer » et donc d'incarner le message et le service chrétien dans le vif de la réalité humaine et
ecclésiale.
Concrètement l'article prend en considération trois types importants de structures : séculières,
ecclésiales et salésiennes. La liste reflète évidemment la situation actuelle. L'article ne dit rien au
sujet d'œuvres créées et/ou gérées par des Coopérateurs, seuls ou en groupe. Mais nous en parlerons
à la fin du commentaire de cet article.
L'observation faite à propos des activités vaut aussi pour ces structures : l'insertion individuelle du
Coopérateur et de la Coopératrice dans l'une ou l'autre d'entre elles dépendra, entre autres, de sa
disponibilité et de sa préparation personnelles.
17.2. Structures civiles, culturelles, socio-économiques et politiques
À propos des structures séculières, le texte cite distinctement :
– Les structures civiles, telles que, par exemple, les conseils et administrations communaux,
provinciaux et régionaux ; les comités de quartier ; divers types d'associations publiques ou privées,
destinées à soutenir et à promouvoir le bien et les valeurs civiques etc.
– Les structures culturelles comme les écoles de tout ordre et degré, les maisons d'édition, les
centres de production et de diffusion de programmes radiophoniques et télévisés, les clubs et cercles
culturels etc.
– Les structures socio-économiques comme, par exemple, les structures industrielles,
commerciales, hospitalières, les services d'assistance etc.
–
Les structures politiques telles que les partis, les syndicats, les groupes d'opinions, les
associations de travailleurs, d’employés, de professeurs etc.
L'appartenance du Coopérateur et de la Coopératrice à de telles structures ne peut évidemment pas
faire fi des exigences de la mission ni de l'esprit salésiens, mais doit être animée par eux. C'est
pourquoi le texte précise que parmi les différentes structures séculières où prendre place, il faut
préférer (le texte dit « surtout ») celles qui « ont de fortes incidences sur l'éducation des jeunes et
sur la vie des familles ».
17.3. Structures ecclésiales
Pour les structures ecclésiales, le texte du Règlement cite explicitement la communauté paroissiale
comme lieu ecclésial privilégié de l'apostolat du Coopérateur et de la Coopératrice. La raison en est
claire : leur vie et leur activité apostolique se réfèrent en général à la paroisse, qu'elle soit dirigée
par le clergé séculier, les salésiens ou d'autres religieux.
Mais leur coopération ne se limite pas à ces communautés : elle peut – c’est même souhaitable –
s’étendre à des structures ecclésiales qui travaillent au niveau diocésain, inter-diocésain, national et
international, comme les conseils pastoraux diocésains, les organismes ecclésiaux (comités,
consultes, commissions etc.) qui, à ces niveaux, visent l'éducation de la jeunesse, la pastorale des
familles et des vocations, la coopération missionnaire, l'engagement pour la paix. À ces dernières
structures se réfère explicitement le § 2 de l'article 11.
Le texte du Règlement nous donne aussi une indication utile sur le genre de participation du
Coopérateur : « Dans les structures ecclésiales, dit l'article, ils peuvent offrir aux évêques et aux
curés une collaboration responsable ». Il faut bien souligner l'expression : « offrir une collaboration
responsable » : elle souligne le nouveau genre de rapport entre les fidèles laïcs et les ecclésiastiques,
prôné par Vatican II. Une relation non plus entre un sujet actif (les pasteurs) et un sujet passif et
purement réceptif (les fidèles), mais une relation de collaboration responsable entre sujets l’un et
l’autre actifs, tout en reconnaissant la différence des ministères et des postes : de présidence, ceux
des Évêques et des curés ; de collaboration responsable, en vertu des leurs compétences et de leurs
dons de l'Esprit, ceux des fidèles laïcs.
Tout ceci nous renvoie à une orientation précise de Don Bosco sur le rapport de l'Association avec
les évêques et les curés :elle est tout à fait dans cette ligne.
La note renvoie aussi au Canon 305 du Code de droit canonique rénové qui dit : « Toutes les
associations des fidèles sont soumises à la vigilance de l'autorité ecclésiastique compétente, à
laquelle il appartient d’avoir soin que l'intégrité de la foi et des mœurs y soit préservée, et de veiller
à ce que des abus ne se glissent pas dans la discipline ecclésiastique ; c’est donc le devoir et le droit
de l’autorité compétente d’exercer la vigilance selon le droit et les statuts [pour les Coopérateurs
c'est leur Règlement] ; les associations sont encore soumises au gouvernement de cette même
autorité selon les dispositions des canons suivants. » Pour ce qui concerne l'Association, il faut se
rappeler le deuxième paragraphe de ce même canon : « Les associations de tout genre sont soumises
à la vigilance du Saint-Siège. »
17.4. Structures salésiennes
« L'œuvre des Oratoires, entreprise en 1841, trouva dès son début, de pieux ecclésiastiques et des
laïcs pleins de zèle, qui lui vinrent en aide pour cultiver la moisson, dès lors abondante, de jeunes
gens exposés au danger de se perdre. Ces Collaborateurs ou Coopérateurs ont toujours été le soutien
des bonnes œuvres que la Divine Providence nous confiait » [3]. Ce sont les premiers mots du
Règlement écrits par Don Bosco pour expliquer au lecteur l'origine des Coopérateurs : ils sont,
avant tout des collaborateurs de l'Oratoire.
Pas besoin de longues phrases pour dire qu'en ce siècle d'histoire, les Coopérateurs ont exercé de
diverses manières leur activité sous le signe de la collaboration avec les œuvres et les activités des
deux Instituts religieux fondés par Don Bosco.
Le Chapitre général spécial des salésiens a voulu, non seulement rester fidèle à cette tradition, mais
aussi lui donner des contenus et des énoncés nouveaux, mieux en rapport avec les situations
d’aujourd’hui, mais aussi plus exigeants. Après avoir énuméré les terrains de la mission des
Coopérateurs, il déclare : « Toutes ces tâches, et d'autres qui surgiront certainement, au fur et à
mesure des besoins, dans les divers lieux et les divers moments, pourront être embrassées par vous
dans le champ des œuvres éducatives de la Congrégation [...]. Ce sera, en particulier, notre souci de
vous insérer plus pleinement selon vos possibilités et votre préparation, dans nos œuvres éducatives,
et d'étudier le moyen de vous confier d'autres tâches apostoliques plus en rapport avec votre
caractère laïc » [4] Il vaut la peine de rappeler ici que l'expérience de l’Oratoire primitif du
Valdocco demeure le critère permanent de renouvellement de toute œuvre salésienne [5].
Après avoir souligné la tâche prioritaire des salésiens de former des Coopérateurs, il avait ajouté :
« Un pas plus avant, en fidélité au projet génial si cher au fondateur, sera votre engagement, avec
toutes les conséquences qui en découlent, dans la programmation, la réalisation et la valorisation du
plan pastoral des communautés salésienne auxquelles vous appartenez » [6].
Cette option importante du Chapitre général spécial a été confirmée et approfondie, à la lumière de
l’exhortation apostolique Evangelii nuntandi de Paul VI, par le Chapitre général suivant, convoqué
pour évaluer la mise en pratique du Chapitre général spécial [7].
Cette orientation des salésiens a été partagée par les Filles de Marie Auxiliatrice. Le nouveau
Règlement en prenait déjà bonne note et citait dans la liste des lieux de la mission salésienne des
Coopérateurs, la « collaboration aux œuvres et activités [...] des Filles de Marie Auxiliatrice » [8].
Ces dernières années, plusieurs Instituts religieux féminins fondés par des salésiens, ont été
reconnus officiellement comme groupes de la Famille salésienne. Leurs structures d’activités sont,
elles aussi, ouvertes à la présence des Coopérateurs et des Coopératrices.
Le texte du Règlement prend acte de cette situation et exprime la disponibilité des Coopérateurs à
offrir leur collaboration à ces œuvres salésiennes, en particulier aux patronages, aux centres de
jeunesse et aux écoles.
À cet égard, il faut signaler une tentation qui se note çà et là, mais à éviter avec fermeté : de ne
considérer les Coopérateurs que comme un moyen de trouver des collaborateurs et suppléants de
confiance pour les œuvres des différents groupes de la Famille salésienne. Cette façon de voir est
certes valable dans la mesure où elle cherche à garantir une présence éducative salésienne dans les
œuvres grâce à ces collaborateurs laïcs, mais elle l’est beaucoup moins si l’on ne se garde pas de les
mettre en vases clos au détriment d’une vision ecclésiale plus large.
Pour échapper à cette tentation réelle, il faut que l'œuvre et son projet éducatif et pastoral prenne
une place active dans la pastorale d’ensemble de la paroisse et du diocèse.
17.5. Et les structures d’activité gérées par les Coopérateurs, seuls ou en groupe ?
L'élaboration du nouveau Règlement avait envisagé la possibilité que l'Associations puisse
intervenir dans le domaine social avec des œuvres propres ayant pour but la mission salésienne.
Après avoir considéré les nombreuses et sérieuses difficultés soulevées de différents points de vue,
cette hypothèse a été écartée.
Il a été jugé préférable que ce ne soit pas l'Association, mais d’éventuels « groupes de
Coopérateurs » qui créent leurs œuvres propres et en assument la responsabilité. La raison
fondamentale est que l'Association est un centre de référence et de développement de l'esprit
apostolique salésien. La formule proposée garantit en outre une plus grande liberté de mouvement
aux salésiens et aux Coopérateurs eux-mêmes. Par ailleurs, les expériences en cours allaient dans ce
sens [9].
Dans la révision du nouveau Règlement, la déclaration qui disait que l'Association « encourage des
groupes de Coopérateurs capables et disponibles à créer de nouvelles œuvres, et à en prendre
personnellement la responsabilité là où les exigences locales en montrent l'utilité » a disparu.
Mais cette suppression ne signifie pas l’interdiction pour les Coopérateurs, seuls ou en groupe,
capables et disponibles, de créer des œuvres particulières et de les gérer. Elle veut simplement dire
que l'Association n'entend pas assumer d’engagements à cet sujet. Mais elle laisse aux
Coopérateurs, seuls ou en groupes, la liberté de le faire. Cela évidemment aux conditions déjà
signalées dans le nouveau Règlement et en accord avec l'orientation du décret conciliaire
Apostolicam actuositatem qui reconnaît aux fidèles laïcs la responsabilité de pouvoir assumer des
initiatives apostoliques, et suggère aux Pasteurs des les aider dans ces initiatives, tout en leur
laissant la juste liberté que requiert leur dignité de fils de Dieu et d'apôtres séculiers [10].
[1] Cf. Const. SDB 1984, art. 31-43.
[2] Cette motivation s’exprime clairement à l’art. 11 § 1 qui dit : « Pour rendre ses interventions
plus efficaces il s’insère, selon ses capacités et ses possibilités, dans les structures culturelles,
syndicales et socio-politiques ».
[3] RDB, Au lecteur
[4] ACGS 736
[5] Cf. Const. SDB 1984, art. 40
[6] ACGS 735, ainsi que 744.
[7] ACG21, 69-75, 79, 140.
[8] NR, art. 8,8 ; voir à ce propos Midali Mario, Nella Chiesa et nella società con Don Bosco oggi
(LDC, Turin 1974) 123.
[9] Cf. ib. 147-149.
[10] Cf. AA, 24 ; LG, 37.
ARTICLE 18
EN SOLIDARITÉ AVEC LES ÉGLISES PARTICULIÈRES
§ 1. L’activité apostolique des Coopérateurs a une dimension ecclésiale. Par leur témoignage
personnel et leurs diverses activités apostoliques, ils contribuent à la vie de leur Eglise particulière,
diocèse et paroisse, qu’ils aident à se construire comme communautés de foi, de prière, d’amour
fraternel et d’engagement missionnaire.
§ 2. A l’exemple de Don Bosco, ils encouragent l’amour et la fidélité au Pape et aux évêques ; ils
favorisent l’adhésion à leur magistère et à leurs directives pastorales. Leurs relations avec les curés,
les prêtres, les religieux et les autres laïcs sont empreintes d’une solidarité cordiale et d’un esprit de
participation active aux plans pastoraux, surtout quand ils concernent les jeunes, les milieux
populaires et les vocations.
Le Coopérateur appelé par l’Eglise à un ministère l’exerce avec générosité et dévouement.
18.1 Préliminaires.
Vu que les Coopérateurs exercent leurs activités, en partie du moins, dans des œuvres salésiennes et
ont en outre des rapports particuliers de collaboration avec la Société de Saint François de Sales et
les autres groupes de la Famille fondée par Don Bosco, quelles conséquences ce fait peut-il avoir
vis-à-vis des Eglises particulières ? Eloigner les Coopérateurs et leur Association de la vie
paroissiale et diocésaine, malgré les déclarations contraires ?
En réponse à ces éventuelles objections et autres du même genre, le Règlement déclare
expressément que « l’activité apostolique des Coopérateurs a une dimension ecclésiale » et se situe
dans un contexte d’Eglise particulière ouverte à l’Eglise universelle entendue comme communion
des Eglises particulières, c’est-à-dire des diocèses. Il ne faut donc pas opposer, comme cela se fait
malheureusement parfois, la coopération aux œuvres de la Famille salésienne et la pastorale des
diocèses et des paroisses.
Cette opposition est manifestement contraire à la pensée et à la pratique de Don Bosco, à
l’enseignement de Vatican II et aux options du magistère salésien de l’après Concile, comme nous
allons le voir.
18.2. La pensée et la pratique de Don Bosco
Don Bosco a réservé, en fait, une place de premier plan aux Eglises qui ont à leur tête les évêques et
le clergé diocésain. Toutes les activités apostoliques et éducatives qu’il a mises sur pied de façon
stable, par exemple, les patronages, les écoles, les homes, la collaboration dans les séminaires,
constituaient un service complémentaire aux paroisses et aux diocèses. Il faut en dire autant des
coups de main occasionnels qu’il donnait, lui-même et les salésiens, aux différentes activités
paroissiales ou diocésaines.
En ce qui concerne plus particulièrement les Coopérateurs laïcs, il les a voulus étroitement unis
dans un commun esprit salésien. Par là, il n’a jamais voulu les éloigner de leurs évêques ni de leurs
curés, mais plutôt les mettre d’une façon nouvelle à leur service. Il semble que cette préoccupation
gagnait du terrain dans son esprit à fur et mesure qu’il avançait en âge. Il y a deux textes connus
qu’il vaut la peine de citer ici, sans pourtant en gonfler la signification histotique [1]. Le premier se
trouve dans le Règlement même de Don Bosco : « L’Association se recommande humblement à la
protection et à la bienveillance du Souverain Pontife, des Evêques, des Curés, desquels elle
dépendra absolument en tout ce qui a rapport à la religion » [2].
Le deuxième est rappelé par la note 21 de l’article 17 du Règlement actuel. Parlant avec Don
Lemoyne, le 16 février 1884, Don Bosco lui dit : « J’ai réfléchi longuement sur la façon de fonder
les coopérateurs salésiens. Leur vrai but direct n’est pas d’aider les salésiens, mais d’apporter leur
aide à l’Eglise, aux évêques et aux curés de paroisses, sous la haute direction des salésiens, pour des
œuvres de bienfaisance comme les catéchismes, l’éducation des enfants pauvres et choses
semblables. Aider les salésiens, c’est aider l’une seulement des œuvres si nombreuses qui se
trouvent dans l’Eglise catholique. Il est vrai que nous ferons appel à eux pour nos besoins urgents,
mais ils sont [d’abord] des instruments dans les mains de l’évêque [...]. Nous ne devons pas vouloir
jalousement [pour nous] les coopérateurs salésiens, car ils appartiennent au diocèse, et tous les curés
avec leurs paroissiens devraient être des coopérateurs » [3].
18.3. Le changement apporté par Vatican II
Le thème de l’Eglise locale et de l’Eglise particulière se présente aujourd’hui en des termes et avec
des accents nouveaux, au niveau de la pensée et de la vie. Par l’ensemble de sa doctrine et quelques
textes précis, le Concile a ouvert des perspectives doctrinales et donné des orientations pratiques qui
exigent de tous (évêques, prêtres, laïcs et religieux) un profond changement dans la façon de penser
et d’agir par rapport à un passé plus ou moins récent [4].
Dans un bref passage dense en doctrine, Lumen gentium déclare : « Les évêques sont, chacun pour
sa part, le principe et le fondement de l’unité dans leurs Eglises particulières : celles-ci sont formées
à l’image de l’Eglise universelle, c’est en elles et par elles qu’existe l’Eglise catholique une et
unique » [5].
Cela veut dire, en premier lieu, que l’Eglise universelle n’existe pas comme réalité à part et
indépendamment des Eglises particulières. Elle se réalise et se rend visibles « en elles ». En quel
sens ? Dans le fait que tous les biens du salut qui constituent le mystère de l’Eglise universelle
(Parole de Dieu, Eucharistie, sacrements, charismes, ministères, action de l’Esprit) sont présents et
actifs dans chaque Eglise particulière, et que les chrétiens ne rencontrent ces biens et ne les vivent
que dans une Eglise particulière. Et celle-ci, pour rester Eglise, doit être en communion avec les
autres Eglises.
Cela veut dire, en deuxième lieu, que l’Eglise universelle n’est pas la simple somme des Eglises
particulières, mais est le résultat de la communion entre les Eglises particulières. Elle n’est pas une
sorte de mosaïque formée d’autant de tesselles qu’il y a d’Eglises particulières, mais une sorte de
grappe de raisin composée d’autant de grains qu’il y a d’Eglises particulières. Les grains sont
pleinement des raisins, mais ils ne forment la grappe que s’ils ne sont unis entre eux. De même les
Eglises particulières par rapport à l’Eglise universelle : elles ont en elles l’élan vers la communion
et la mission universelle.
Puisque chaque Eglise particulière concrétise pour un groupe de chrétiens le mystère et la mission
de l’Eglise même, l’Eglise particulière est la responsable première et directe de la mission qu’elle
doit organiser pour tel groupe de fidèles. C’est pourquoi Vatican II recommande aux religieux
d’« apporter leur concours aux divers ministères pastoraux, compte tenu cependant du caractère
propre de chaque institut ». Et il ajoute : « Les supérieurs doivent selon leurs moyens favoriser la
prise en charge même temporaire de paroisses » [6].
L’exemption, en vertu de laquelle les religieux sont rattachés directement au Pape et soustraits à la
juridiction de l’évêque, en ce qui concerne la vie interne de l’Institut, leur permet d’être disponibles
pour un groupe d’Eglises particulières et d’assurer une présence charismatique originale. Ce qui
veut dire que dans une Eglise particulière il peut y avoir des franciscains, des jésuites, des salésiens,
des sœurs de la charité, des sœurs de Don Bosco, des V.D.B. etc., mais chaque Institut gardera sa
propre physionomie spirituelle et exercera sa mission spécifique, autrement dit sera fidèle à son
charisme, donné par de l’Esprit à l’Eglise pour le bien de la société.
Autre point à noter : le Chapitre général spécial nous dit : « Une Eglise locale n’existe pas
seulement pour des raisons d’organisation plus pratique de l’annonce de l’Evangile et de la vie
chrétienne, mais avant tout pour réaliser la catholicité [universalité] de l’Eglise. Elle a pour tâche
originale d’ordonner à Dieu les richesses humaines de tel peuple et de les faire servir à une
expression particulière de la grâce rédemptrice. Elle doit dans ce but adapter la pastorale générale
de l’Eglise au caractère concret et aux besoins spéciaux de ce peuple et organiser sa propre
pastorale locale » [7]. Ceci comprend la liturgie, la catéchèse, les différentes organisations, les
activités. Ils s’ensuit que les activités des divers Instituts religieux doivent prendre place dans cette
pastorale locale [8]. Les documents successifs du magistère pontifical expriment tout cela par la
formule : « Inculturation de l’Evangile et de l’Eglise » [9].
En ce qui concerne l’Association des Coopérateurs, le décret conciliaire sur les laïcs déclare : « Les
organisations [laïques] ne sont pas des fins en soi, mais elles doivent servir la mission de l’Eglise
envers le monde. Leur valeur apostolique dépend de leur conformité aux buts de l’Eglise ». « Dans
les communautés ecclésiales, l’action [des laïcs] est si nécessaire que sans elle l’apostolat des
Pasteurs ne peut, la plupart du temps, obtenir son plein effet. [...] Que les laïcs prennent l’habitude
de travailler dans la paroisse en étroite union avec leurs prêtres. [...] Ils développeront sans cesse le
sens du diocèse, [...] toujours prompts, à l’invitation de leur pasteur, à participer aux initiatives du
diocèse » [10].
Une troisième conséquence porte sur les rapports de fraternité, de solidarité, de collaboration et de
coresponsabilité à réaliser entre les membres de l’Eglise particulière et à partir d’elle avec les autres
Eglises particulières [11].
18.4. La doctrine et les options pratiques des récentes directives salésiennes
Le Chapitre général spécial a, pour sa part, repensé la mission des salésiens et des Coopérateurs
dans cette nouvelle optique, et adopté quelques décisions pratiques très significatives et exigeantes.
En voici le résumé. Ces idées et ces décisions se trouvent dans le texte des Constitutions de 1972
d’abord, puis, sans variations notables, dans leur rédaction définitive de 1984. Elles ont inspiré
l’élaboration du nouveau Règlement et sa révision définitive.
« L’Eglise locale est la première et immédiate responsable et organisatrice de la mission […]. Ceci
veut dire que notre service salésien doit s’insérer dans la pastorale de l’Eglise locale » [12]. Le texte
des constitutions de 1984 dit : « Nous nous insérons dans sa pastorale [de l’Eglise particulière] dont
l’évêque est le premier responsable et à laquelle les directives des conférences épiscopales donnent
des principes d’action à plus vaste échelle » [13].
« Ce service peut être rendu sous deux formes principales.
– « 1. Service pastoral dans les institutions pastorales de l’Eglise locale », par ex. par la présence
des salésiens, seuls ou en groupes. Sur ce terrain, les Coopérateurs ont un rôle primordial et
irremplaçable [14].
– « 2. Service salésien dans nos propres institutions, en réponse à des nécessités locales. C’est le cas
fréquent de nos œuvres actuelles. Il suffit de rappeler que notre relative autonomie (qui a ses
avantages) ne peut jamais signifier « autosuffisance pastorale », mais doit apparaître comme une
forme valable de service et de participation à la mission du diocèse ou de la région. Ceci commande
non seulement la nature même de l’œuvre, qui doit répondre à de réels besoins locaux, mais aussi la
façon de la conduire, c’est-à-dire en coordination avec la pastorale d’ensemble » [15].
C’est valable pour les Coopérateurs qui collaborent avec les salésiens dans le cadre de leurs œuvres
et communautés éducatives appartenant en fait à l’activité pastorale du diocèse : en outre, leur
caractéristique de « fidèles diocésains » à part entière est pour eux une raison de plus d’y participer,
en faisant volontiers partie, (s’ils sont invités ou choisis) des Conseils pastoraux ou d’autres
organismes paroissiaux ou diocésains [16].
Et la Famille salésienne dans tout cela ? Il faut rappeler ici ce qui s’est dit de la collaboration entre
les groupes qui la composent, mais en tant que présence organisée et coordonnée, dans la pastorale
de l’Eglise particulière. « C’est un autre aspect de la coresponsabilité et de la collaboration, et une
forme originale de travail à la fois salésien et diocésain. Les Filles de Marie Auxiliatrice et les
Volontaires de Don Bosco sont comme nous au service des diocèses ». Selon le Règlement de Don
Bosco, cela vaut à plus forte raison pour les Coopérateurs. Pour tous les groupes « se posera le
problème d’une coordination plus organique entre les diverses forces salésiennes d’une même zone
dans le contexte de la pastorale d’ensemble » [17]. « En vue d’établir des liens plus organiques,
disent les Constitutions de 1984, nous partageons nos initiatives avec les groupes de la Famille
salésienne et avec d’autres instituts religieux » [18].
18.5. Les directives du Règlement (art. 18)
L’article 18 et d’autres passages où le Règlement indique la place et le rôle des Coopérateurs dans
l’Eglise locale et diocésaine doivent se lire et se comprendre dans cette perspective du Concile et du
Chapitre. Autrement on en dénaturerait le sens.
Concrètement, cet article formule pour les Coopérateurs des affirmations doctrinales et des
orientations pratiques qui se trouvent aussi dans les Constitutions des salésiens.
18.5.1. Témoignage personnel et activités apostoliques pour l’édification de l’Eglise
particulière.(Art.18 § 1)
Le premier paragraphe de l’article dit : « Par leur témoignage personnel et leurs diverses activités
apostoliques, ils contribuent à la vie de leur Eglise particulière, diocèse et paroisse ». En quel sens ?
C’est simple. Il suffit de se rappeler les nombreuses affirmations du Règlement à ce propos. Nous
les énumérons en style télégraphique.
L’idéal que chaque Coopérateur et Coopératrice est invité à poursuivre est d’être un apôtre séculier
salésien. La volonté et la fidélité à le réaliser, au-delà des limites et des faiblesses humaines
(l’homme juste pèche sept fois, dit la Bible), constituent un témoignage qui est fondamental dans la
construction de la communauté chrétienne et dans sa mission d’évangélisation auprès du groupe
humain de l’endroit [19].
La vie familiale des Coopérateurs a ce but : former avec les membres de la famille une « église
domestique ». Elle est la première cellule de l’Eglise. De sa vitalité dépend celle de la communauté
plus large de la paroisse et du diocèse [20].
Toutes les activités des Coopérateurs sur les divers terrains de la mission salésienne, chacun selon
ses capacités et ses disponibilité, se situent dans un contexte ecclésial et doivent viser à « faire
Eglise » pour réaliser la mission. Plus précisément :
– Par les différentes formes de catéchèse, ils bâtissent la communauté ecclésiale locale comme
communauté de foi ;
– Par leurs activités liturgiques et de prières privée, ils la construisent comme communauté de prière
et surtout comme communauté qui persévère dans la conversion par la pratique du sacrement de
Pénitence et qui célèbre l’Eucharistie ;
– Par leurs activités de service (éducation chrétienne, promotion humaine et chrétienne des milieux
populaires, amitié joyeuse, engagement pour les pauvres, prières et mortifications pour les frères...),
ils la bâtissent comme communauté d’amour, qui veut vivre selon la seule loi nouvelle de JésusChrist.
– Par leur apostolat personnel dans la famille, le mariage, le milieu de vie et de travail, et dans la vie
sociale, par leurs activités cherchant à ouvrir les jeunes à l’action apostolique, par leur coopération
en faveur des missions et par leur travail sur les lieux de mission, ils la construisent comme
communauté missionnaire [21].
18.5.2. « Ils encouragent l’amour et la fidélité au Pape et aux évêques ». (art.18 § 2)
Vatican II a complété la doctrine de Vatican I en plaçant le Pape et les évêques dans la collégialité
épiscopale et la communion ecclésiale.
La collégialité instituée par le Christ par la création des douze Apôtres (institution de droit divin,
par conséquent) est une composante essentielle de la constitution des communautés chrétiennes et
elle fait que le Pape et les évêques sont strictement unis entre eux pour tout ce qui concerne le
ministère du magistère, du sacerdoce et de la pastorale.
Ce n’est pas uniquement le Pape seul qui est l’organe suprême de magistère et de guide officiel de
l’Eglise universelle, mais aussi le Collège épiscopal dans lequel le Pape est toujours inclus comme
son chef.
« Le Pontife romain, comme successeur de Pierre, est le principe perpétuel et visible et le
fondement de l’unité qui lie entre eux soit les évêques soit la multitude des fidèles. Les évêques
sont, chacun pour sa part, le principe et le fondement de l’unité, dans leurs Eglises
particulières » [22].
Cette doctrine du chapitre iii de la constitution dogmatique Lumen gentium donne une indication
pratique pour chaque catholique et en particulier pour les Coopérateurs : loin d’amoindrir la fidélité
salésienne au Pape, la collégialité la renforce, l’élargit aux évêques, l’éclaire et la rend plus
exigeante, puisque l’Eglise aura de plus en plus besoin de forces pour soutenir sa dynamique
collégiale et la communion entre les Eglises.
Il n’est à présent plus soutenable (bien que malheureusement le fait subsiste) de se réclamer de la
fidélité au Pape et de s’écarter en même temps de la vie de son Eglise particulière et de la
communion avec ses propres évêques. L’attachement et la fidélité au Pape passent à travers
l’attachement et la fidélité aux évêques, tout comme la communion avec l’Eglise universelle passe à
travers la communion des Eglises particulières entre elles.
C’est dans cette perspective élargie et approfondie que les Coopérateurs, « à l’exemple de Don
Bosco, encouragent l’amour et la fidélité au Pape et aux évêques » comme dit le Règlement.
« Encourager », c’est plus qu’une simple adhésion personnelle ; cela implique la tâche directe d’en
associer d’autres dans ce mouvement d’attachement et de fidélité.
18.5.3. « Ils favorisent l’adhésion à leur magistère et à leurs directives pastorales » (art. 18 § 2)
Pour bien comprendre la portée de cette tâche communautaire des Coopérateurs, il faudrait citer et
commenter au moins les numéros 25 et 37 de la constitution dogmatique sur l’Eglise (Lumen
gentium), les numéros 23-25 du décret sur l’apostolat des laïcs, (Apostolicam actuositatem), le
numéro 21 de celui sur l’activité missionnaire (Ad gentes) et les numéros 43 et 76 de la constitution
pastorale sur l’Eglise dans le monde (Gaudium et spes). Il n’est évidemment pas possible de le faire
ici, et nous devons nous limiter à des énoncés généraux. Ils pourront aider à dissiper des confusions
éventuelles et à corriger certaines attitudes purement émotives de soi-disant fidélité au Pape et aux
évêques, peu respectueuses de la doctrine de l’Eglise, souvent nuisibles, même si pour la plupart du
temps elles proviennent de l’ignorance et de la bonne foi.
À la lumière de l’Evangile et de Vatican II, il faut clairement distinguer, sans les opposer,
l’adhésion due au magistère du Pape et des évêques de celle qui se doit à leurs directives pastorales.
Dans le cas du magistère, sont en jeu la vérité révélée par Dieu (foi) ou la rectitude et la bonté d’un
comportement chrétien (charité), alors que, dans les directives pastorales, il s’agit le plus souvent de
la pertinence et de l’efficacité plus ou moins grandes de certaines orientations pratiques.
18.5.3.1. Adhésion au magistère (art.18 § 2)
D’abord quelques observations à propos du magistère. Quand ils exercent leur ministère de maîtres,
le Pape et les évêques peuvent enseigner une doctrine exempte d’erreurs, c’est-à-dire infaillible. Pas
toujours, cependant, mais seulement quand sont réunies certaines conditions bien définies par
Vatican I et Vatican II :
1) Quand ils proposent à tous les chrétiens, et donc pas à des individus ni à des groupes de baptisés,
2) de façon définitive et obligatoire, et donc pas de façon plus ou moins interlocutoire,
3) une doctrine révélée par Dieu ou en relation avec la Révélation divine, et donc pas d’autres
doctrines même vraies en soi,
4) portant uniquement sur la foi et la morale et donc pas les autres secteurs du savoir humain.
Cet enseignement exempt d’erreurs peut être donné par :
Le Pape, mais pas toujours : uniquement quand il parle ex cathedra, c’est-à-dire quand il entend
enseigner en tant que maître suprême de toute l’Eglise et aux conditions dont il vient d’être
question. Il ne le fait que rarement !
Les évêques aussi, lorsqu’ils sont en communion entre eux et avec le Pape. Cela se passe aussi bien
dans un Concile, que lorsqu’ils sont dispersés dans le monde et enseignent aux conditions
susmentionnées.
L’enseignement infaillible du Pape et des évêques doit recevoir une adhésion totale : elle sera de foi
divine (parce que fondée sur l’autorité de Dieu) si la vérité proposée est révélée par Dieu (p. ex : le
mystère du Christ) ; elle sera seulement de foi catholique (parce que fondée sur l’autorité que le
Pape et les évêques ont reçue de Dieu) si la vérité proposée n’est pas révélée par Dieu, mais est
cependant sûre et certaine. (p. ex. le fait que Don Bosco est saint a été défini de façon infaillible par
Pie XI, mais n’est pas une vérité révélée, mais simplement certaine).
Hors de ces cas formellement prévus par les deux Conciles du Vatican, le magistère n’est pas
qualifié d’« infaillible » mais d’« officiel », tant pour le Pape que pour les évêques dans leur
ensemble, ou en groupes (p. ex. les Conférences épiscopales) ou pour un évêque local isolément.
Quelle disposition le catholique doit-il assumer vis-à-vis de ce magistère officiel ? « Un respect
religieux » nous dit Vatican II. Ce qui veut dire : une adhésion non seulement extérieure, mais
intérieure ; pas seulement humaine, mais religieuse, fondée sur l’autorité que Dieu a donnée au
Pape et aux évêques, et sur l’assistance de l’Esprit Saint qui les accompagne dans leur délicat
ministère.
18.5.3.2. Les directives pastorales (art.18 § 2)
Les directives pastorales du Pape et des évêques sont généralement des indications pour l’action
concrète de la communauté chrétienne dans les situations contingentes où elle se trouve. Elles
comprennent une partie de la législation canonique, certaines normes liturgiques, les orientations
concernant le renouveau des structures paroissiales et diocésaines, la catéchèse, l’engagement pour
la justice [...].
La prudence, la prévoyance et l’efficacité pastorale des interventions du Pape et des évêques sont
impliquées dans tous ces secteurs. Leurs jugements moraux et pastoraux sur des situations
concrètes, leurs indications sur les options concrètes à faire, les moyens et les méthodes à adopter,
les collaborations à établir, etc. n’ont pas un caractère absolu.
Quelle est l’attitude du catholique en face des directives pastorales du Pape et de l’épiscopat,
comprises en ce sens ? En principe, c’est de les accepter avec générosité et d’y obéir promptement.
Mais cela ne suffit pas ! Vatican II exige en plus une attitude positive, qui respecte aussi bien la
tâche sérieuse des pasteurs que les responsabilités personnelles des fidèles.
Pour éviter tout malentendu, il est bon de retranscrire un texte du Concile : « Comme tous les
chrétiens, les laïcs ont le droit de recevoir en abondance des pasteurs sacrés les ressources qui
viennent des trésors spirituels de l’Eglise, en particulier les secours de la parole de Dieu et des
sacrements ; ils ont le droit de s’ouvrir à ces mêmes pasteurs de leurs besoins et de leurs vœux avec
toute la liberté et la confiance qui conviennent à des fils de Dieu et à des frères dans le Christ. Dans
la mesure de leurs connaissances, de leurs compétences et de leur situation, ils ont la faculté et
même parfois le devoir de manifester leur sentiment en ce qui concerne le bien de l’Eglise. Cela
doit se faire, le cas échéant, par le moyen des institutions que l’Eglise a établies pour cela, et
toujours dans la sincérité, le courage et la prudence, avec le respect et la charité qu’on doit à ceux
qui, en raison de leurs charges sacrées, tiennent la place du Christ.
« Comme tous les fidèles, les laïcs doivent embrasser, dans la promptitude de l’obéissance
chrétienne, ce que les pasteurs sacrés représentant le Christ décident au nom de leur magistère et de
leur autorité dans l’Eglise [...].
« Les pasteurs, de leur côté, doivent reconnaître et promouvoir la dignité et la responsabilité des
laïcs dans l’Eglise ; ayant volontiers recours à la prudence de leurs conseils, leur remettant avec
confiance des charges au service de l’Eglise, leur laissant la liberté et la marge d’action, stimulant
même leur courage pour entreprendre de leur propre mouvement. Qu’avec amour paternel ils
accordent attention et considération dans le Christ aux essais, vœux et désirs proposés par les laïcs,
qu’ils respectent et reconnaissent la juste liberté qui appartient à tous dans la cité terrestre.
« De ce commerce familier entre laïcs et pasteurs il faut attendre pour l’Eglise toutes sortes de
biens : par là en effet s’affirme chez les laïcs le sens de leur responsabilité propre, leur ardeur
s’entretient et les forces des laïcs viennent plus facilement s’associer à l’action des pasteurs. Ceuxci, avec l’aide de l’expérience des laïcs, sont mis en état de juger plus distinctement et plus
exactement en matière spirituelle aussi bien que temporelle, et c’est toute l’Eglise qui pourra ainsi,
renforcée par tous ses membres, remplir plus efficacement sa mission pour la vie du monde » [23].
18.6. « Relations avec les curés et les prêtres, les religieux et les autres laïcs. (art.18 § 2)
Le deuxième paragraphe de l’article explique les rapports des Coopérateurs avec leurs propres
pasteurs locaux et avec les forces apostoliques qui travaillent dans la communauté paroissiale ou
diocésaine à laquelle ils appartiennent.
Ce sont les dispositions de « solidarité » et de « participation » proposées par l’Evangile et
réinterprétées par Vatican II qui doivent qualifier toute l’action de la communauté chrétienne. En
effet :
– Elles constituent un principe pratique pour l’apostolat des laïcs, pour leurs rapports avec les
pasteurs, pour leur travail avec les chrétiens d’autres confessions et les croyants d’autres
religions [24] ;
– Elles soulignent les liens dynamiques des prêtres entre eux, avec les évêques, les laïcs et les
religieux [25] ;
– Elles intéressent directement les rapports des religieux entre eux, avec les prêtres diocésains et les
laïcs [26] ;
– Elles guident toute l’action œcuménique et missionnaire des individus et des différentes
communautés chrétiennes [27] ;
–
Elles s’ouvrent à une plus large collaboration avec tous les hommes de bonne volonté [28]
Dans le texte du Règlement il faut souligner deux adjectifs : la solidarité des Coopérateurs avec les
différents membres de la communauté paroissiale ou diocésaine ne sera pas froide, formelle ni
résignée, mais « cordiale ». Leur « participation » ne sera pas passive, de pure exécution ni
intéressée, mais « active » et donc compétente, créative, constante. Les formes concrètes de sa mise
en œuvre sont mentionnées à l’article 17 relatif aux structures ecclésiales où le Coopérateur exerce
son activité.
Le texte souligne encore un fait à ne jamais mettre en sourdine, mais à rappeler à ceux qui, dans le
cadre de l’Eglise particulière, pourraient l’oublier : il y a des secteurs auxquels les Coopérateurs
offrent de préférence leur participation active (le texte dit « surtout ») : la pastorale des jeunes, des
milieux populaires et des vocations. Cette préférence résulte de la fidélité à l’option salésienne.
18.7. Le Coopérateur appelé par l’Eglise à un ministère. (art.18 § 2)
La réflexion sur les ministères non ordonnés exercés par les Coopérateurs et les Coopératrices est
une nouveauté dans leur Règlement. Le texte du nouveau Règlement de 1974 n’en parlait pas. Le
fait des ministères non ordonnés exercés par des chrétiens laïcs s’est imposé après le Concile et
heureusement aussi parmi les Coopérateurs.
Le magistère pontifical actuel distingue entre les ministères ordonnés qui dérivent du sacrement de
l’Ordre, et les ministères non ordonnés, qui découlent des sacrements du Baptême et de la
Confirmation. Les premiers sont réservés aux seuls ministres sacrés : diacres, prêtres et évêques.
Les seconds peuvent être conférés par l’autorité ecclésiastique compétente aux fidèles laïcs.
Le Synode des évêques sur la « La vocation et la mission du fidèle laïc » de 1987 a accordé une
attention particulière au sujet. Il l’a estimé important et actuel, mais très complexe. C’est pourquoi il
en a confié l’étude à une commission de spécialistes pour donner ensuite des solutions concrètes à
l’autorité compétente. L’exhortation apostolique Christifideles laici de Jean Paul II a adopté cette
proposition [29].
Le Coopérateur envisage avec confiance cette possibilité. Son Règlement lui offre une précieuse
indication pratique « Le Coopérateur appelé par l’Eglise à un ministère l’exerce avec générosité et
dévouement ». Ce comportement correspond à une caractéristique de l’esprit salésien : l’amour
apostolique, centre de cet esprit, doit se traduire en zèle apostolique et en générosité [30].
[1]. Voir à ce sujet les observations de Desramaut Francis, Da Associati alla Congregazione
salesiana del 1873 a Cooperatori del 1876, in Desramaut F. – Midali M. (dirigé par), Il Cooperatore
nella società contemporanea (LDC, Turin 1976) 32-50.
[2]. RDB V 2.
[3]. MB XVII 25 repris en ACGS 153.
[4]. Cf. auteurs divers, Linee di rinnovamento (LDC, Turin 1971) 79-83.
[5]. LG 23a.
[6]. Christus Dominus 35,1, ainsi que ACGS 79.
[7]. ACGS 80.
[8]. Cf. ACGS 80.
[9]. Cf. EN 61-65; Message du Synode des évêques de 1977 n°5.
[10]. AA 19b ; 10abc. Cf. CfL 25-27.
[11]. Voir les références dans un index des Documents conciliaires aux mots fraternité, solidarité,
collaboration et coresponsabilité.
[12]. ACGS 79.
[13]. Const SDB 1984, 48a.
[14]. ACGS 81, 751. Le Règlement en tient compte à l’article 17 à propos des structures ecclésiales.
[15]. ACGS 82. Cf. Const SDB 1984 art. 157 et Règl. SDB 1984 art. 2, 13, 25 et 35.
[16]. Cf. ACGS 83. Le Règlement le prévoit à l’article 17.
[17]. ACGS 83.
[18]. Const. SDB 1984 art. 48c.
[19]. Voir le mot « témoignage » dans l’index analytique du Règlement.
[20]. Voir commentaire de l’article 8.
[21]. Voir le commentaire des articles 8-16.
[22]. LG 23a.
[23]. LG 37 ; cf. aussi GS 43bc.
[24]. LG 30, 32c, 37d ; AA 18, 23, 26, 33.
[25]. Cf. LG 28 41c ; OT 2a ; PO 7-9.
[26]. Cf. AG 23c ; CD 33-35 ; PC 22s.
[27]. Cf. UR 12 ; AA 27; AG 15, 35-41.
[28]. Cf. LG 13; GS 40-45.
[29] Cf. CfL 21-23
[30]. Cf. RVA art. 28 et 30 § 1.
CHAPITRE III
EN COMMUNION ET COLLABORATION.
« Je vous encourage à suivre fidèlement l’appel que vous avez reçu de Dieu ; ayez beaucoup
d’humilité, de douceur et de patience, ayez à cœur de garder l’unité dans l’Esprit par le lien de la
paix ».(Ep 4, 1-3)
Le texte biblique est tiré de la deuxième partie de la lettre de Paul aux fidèles d’Ephèse, où l’Apôtre
leur adresse diverses exhortations. Les premières s’adressent à la communauté et visent à lui assurer
l’unité et la concorde, menacées par ceux qui, au lieu de s’intégrer à l’ensemble comme membres,
se considèrent comme le centre de tout.
Paul les invite donc tous à « suivre fidèlement l’appel qu’ils ont reçu » en devenant chrétiens.
Comment ? En adoptant les dispositions d’humilité devant Dieu et de douceur envers les frères :
deux vertus qui requièrent la longanimité et la mansuétude. Même après être devenu chrétien on
reste plein de faiblesses. Il vaut donc la peine que chacun supporte celles d’autrui avec cette charité
qui supporte tout et ne laisse pas se dégrader les situations (1 Co 13, 5.7).
La communauté chrétienne doit tout faire pour maintenir « l’unité de l’esprit », pour être, comme
les premiers fidèles à Jérusalem, « un seul cœur et une seule âme » (Ac 4, 32). Cette disposition
d’esprit est l’œuvre de l’Esprit de Dieu, et les membres de la communauté doivent, consciemment,
la maintenir et la cultiver, pour qu’elle porte du fruit : cette « paix » qui nous lie tous comme un lien
sacré.
Cette exhortation à l’union et à la concorde, à la longanimité et à la douceur, à l’humilité et à la
paix, introduisent très bien le thème proposé dans ce troisième chapitre, consacré à la présentation
des rapports de communion et collaboration des Coopérateurs entre eux et avec les autres groupes
de la Famille salésienne.
PRELIMINAIRES
1. Valeurs évangéliques des relations salésiennes
Ce chapitre cherche à présenter et à approfondir, dans le cadre de la théologie de l’Eglise offerte par
Vatican II, les genres de relations voulues par notre Fondateur entre les groupes de sa Famille
apostolique.. Les différents articles de ce chapitre sont traversés par quelques thèmes dominants :
l’« union », la « coopération », le « sentiment d’être tous fils d’un même Père et tous frères en Jésus
Christ », l’union de tous « en un seul cœur et une seule âme », à l’imitation des chrétiens de l’Eglise
primitive [1].
Comme il est facile de le constater, ce sont toutes des valeurs profondément enracinées dans
l’Evangile, et il n’en aurait pas pu en être autrement. Mais il ne faut pas oublier une donnée qui
caractérise notre vie et notre pratique quotidiennes : Don Bosco et les membres de sa Famille
apostolique ont accentué certains aspects plus que d’autres, et leur ont ainsi donné une physionomie
« à la Don Bosco » : la « fraternité » salésienne, qui entretient la « collaboration », favorise la
« communication », fonde la « coresponsabilité » et stimule la « solidarité ». Toutes dimensions de
l’Eglise que le Concile a soulignées.
Une lecture correcte et éclairante de ce chapitre demande peut-être de montrer au préalable les
grandes lignes de la signification chrétienne qui le sous-tend, à partir des textes bibliques et de
Vatican II.
1.1. Fraternité chrétienne
« "Frères » est le terme habituel par lequel, dans le Nouveau Testament, les chrétiens s’appellent
entre eux. Il ne s’agit pas d’une fraternité de sang ni fondée sur l’amitié, mais du don de Dieu que le
Christ nous a offert.
Par sa mort, Jésus est devenu « l’aîné d’une multitude de frères ».(Rm. 8, 29). Après sa résurrection,
le Christ peut appeler les disciples « frères ». (Jn 20, 17 ; Mt 28, 10). C’est la nouveauté : tous ceux
qui l’accueillent dans la foi et avec l’engagement de réaliser la volonté du Père (Mt 12, 46-50),
deviennent « fils de Dieu » (Jn 1, 12), en vertu d’une « nouvelle naissance » opérée par l’Esprit
Saint. (Jn 3, 3). Nés de Dieu, ils ont la même origine que le Christ qui les a sanctifiés et « n’a pas
honte de les appeler ses frères ». (He 2, 11), car Lui-même est devenu en tout semblable à nous pour
nous faire devenir fils avec Lui (He 2, 10-17). Nous pouvons donc nous adresser à Dieu et l’appeler
« Abba » c’est-à-dire « Père » ; nous sommes devenus les cohéritiers du Christ, parce que nous
sommes ses frères, beaucoup plus unis à Lui que nous ne pourrions l’être à des frères selon la chair.
(Rm 8, 14-17).
De son vivant, le Christ a fait de ses disciples une « communauté fraternelle », perfectionné les
commandements concernant les relations entre frères (Mt 5, 21-26) et donné une grande place à la
correction fraternelle. (Mt 18, 15 ss).
Après la résurrection, les disciples forment entre eux une « communauté de frères » (1 P 5, 9), selon
la vie et l’enseignement du Maître. Dans la communauté locale du Nouveau Testament s’établit
ainsi une égalité radicale de tous les chrétiens, et toutes les différences d’ordre naturel ou social, si
typiques sur terre, deviennent caduques : « Car en Jésus Christ vous êtes tous fils de Dieu par la foi.
En effet, vous tous que le baptême a unis au Christ, vous avez revêtu le Christ ; il n’y a plus ni juif
ni païen [distinction de peuple et de religion], il n’y a plus ni esclave ni homme libre [distinction de
rang social], il n’y a plus l’homme et la femme [distinction de sexe], car tous, vous ne faites plus
qu’un dans le Christ Jésus » (Ga 3, 26-29). Dans la communauté de Jésus, chacun est pour l’autre
un frère précieux « pour qui le Christ est mort » (Rm 14, 15) ; personne ne pourra plus mépriser le
prochain ni être son juge : « Alors toi, pourquoi juger ton frère ? Toi, pourquoi mépriser ton frère ?
Tous nous comparaîtrons devant le tribunal de Dieu » (Rm 14, 10). Personne ne pourra désormais
s’attribuer de privilèges discriminatoires : « Pour vous, ne vous faites pas donner le titre de Rabbi,
car vous n’avez qu’un seul enseignant et vous êtes tous frères » (Mt 23, 8). Saint Matthieu a été le
grand promoteur de cette fraternité chrétienne fruit d’un don divin : la filiation divine dans
l’Esprit [2].
1.2 Communion
L’idée de « communion » de tous les chrétiens avec Dieu et entre eux fait partie de la vraie
fraternité évangélique. La « communion », au sens biblique, qualifie la manière d’être et d’agir, la
relation avec Dieu et avec les hommes, qui caractérise la communauté chrétienne. Elle consiste en
une union mystérieuse mais réelle, intime et vitale avec le Christ, créée par l’Esprit Saint, Amour
même de Dieu. Donné au Baptême aux chrétiens, Il établit entre eux et avec le Christ des rapports
de concorde et de fraternité. La communion se réalise concrètement en faisant participer les autres
et en recevant d’eux, mais dans le respect de la personnalité chrétienne de chacun. De cette manière,
tous les membres de l’Eglise sont, par l’Esprit, en communion avec le Christ, participent de sa
plénitude et, toujours par ce même Esprit, sont en communion avec tous les frères et forment avec
eux une « communauté », l’Eglise [3].
La communion eucharistique est une des plus hautes manifestations de cette « communion »
chrétienne : par la communion avec le Christ eucharistique, tous ceux qui y participent deviennent
une seule réalité, son Corps mystique [4].
1.3. Collaboration et solidarité.
Cette « communion » est une réalité intérieure et sublime ; elle n’est pas statique, mais
essentiellement dynamique ; elle est destinée à se transformer, sur le plan de l’action, en
collaboration et en « service ». Lequel ? Celui que les chrétiens doivent se prêter les uns aux autres,
comme membres du même Corps qui a le Christ comme Tête [5].
Quand il dit, dans les Actes, que les Chrétiens « étaient fidèles à écouter l’enseignement des
Apôtres, à rompre le pain et à participer aux prières », saint Luc dit aussi qu’ils « vivaient en
communion ». Il parlait d’une communauté bien concrète qui exprimait sa profonde communion
dans des rapports interpersonnels : « ils avaient un seul cœur et une seule âme ». (Ac 4, 32). Aucun
dualisme donc ! C’était une communauté unie par la présence victorieuse du Ressuscité et la
puissance de son Esprit ; elle était donc spirituelle, mais elle manifestait cette fraternité par des
signes tangibles. Elle se modelait sur l’exemple des Douze avec le Christ : comme eux, ils avaient
tout quitté pour vivre en pleine communion avec le Maître ; de la même façon la communauté de
Jérusalem, née de la Pentecôte, mettait en commun tous ses biens pour exprimer sa fraternité
radicale. La communion des biens n’était pas perçue comme un refus de la propriété ni comme une
exigence d’un idéal ascétique de pauvreté. Elle venait d’un idéal d’égalité fraternelle qui devient
solidarité : les inégalités et la pauvreté de quelques membres apparaissaient comme un scandale
pour des gens qui vivaient la même expérience chrétienne. Sans doute saint Luc était-il conscient de
ce que ce modèle de comportement chrétien était idéal et se heurtait à des faits concrets de la vie
(l’épisode d’Ananie et de Saphire) ; il n’en a cependant pas moins voulu nous le présenter, pour
qu’il inspire tout le comportement des chrétiens et soutienne leur esprit de solidarité [6].
Il faut encore ajouter que cette communion ecclésiale ne se vit pas seulement à l’intérieur de la
communauté particulière, mais définit aussi les relations entre les Eglises locales. Celles-ci
l’expriment dans la reconnaissance et l’acceptation mutuelles ; elles la réalisent par l’échange de
biens spirituels, les visites, l’envoi de travailleurs apostoliques, et en plus, par des « signes
concrets » de solidarité. Pensons par exemple à la collecte organisée par saint Paul pour aider les
pauvres de Jérusalem et recommandée par lui comme signe de « communion »[7].
1.4. La coresponsabilité
Un dernier point est à relever : la communion fraternelle s’oppose tout à fait au comportement de
Caïn qui se désintéresse de son frère. Elle exige au contraire une attitude de responsabilité active
envers les autres [8]. Dans le Nouveau Testament, quand naissent de nouvelles communautés
locales, l’Eglise de Jérusalem se sent responsable à leur égard [9]. À leur tour, ces communautés
sentent la nécessité de vivre en communion avec l’Eglise mère. Cette communion, source de
coresponsabilité, joue donc dans les deux sens ! Pour citer des exemples : ce fait a trouvé une
manifestation importante au Concile de Jérusalem, (Ac, 15), où les Apôtres, les presbytes et les
frères, réunis dans l’Esprit, ont pris ensemble des décisions pour le bien des Eglises. Autre
exemple : dans la visite de Paul à Pierre pour faire accepter son Evangile et pour se mettre d’accord
sur la répartition des responsabilités dans le travail d’évangélisation. (Ga 2, 2 et 9) [10].
1.5. L’enseignement de Vatican II
Les documents de Vatican II ont réservé beaucoup de place à ce message évangélique. Ils
présentent la « fraternité » comme la composante la plus fondamentale de l’existence chrétienne et
de l’Eglise. Celle-ci, en effet, est par définition une « communauté de frères », puisque tous ses
membres ont reçu le même Esprit du Seigneur [11]. La fraternité chrétienne doit présider et animer
toutes les relations dans l’Eglise : celles des fidèles entre eux et avec leurs Pasteurs [12], celles des
prêtres entre eux et avec les laïcs [13], celles des évêques entre eux et avec les prêtres [14], celles de
tous les membres des Instituts Religieux [15]. C’est la seule manière pour l’Eglise locale et
universelle de devenir signe et témoin de fraternité pour tous les hommes [16].
Le Concile a adopté non pas le modèle concret de la communauté primitive, mais ses valeurs et ses
exigences, et il les a appliquées à la situation actuelle. Il a défini l’Eglise locale et universelle
comme une « communion » [17], reflet et participation de la communion mystérieuse qui unit, en
Dieu, le Père, le Fils et l’Esprit [18].
Cette dynamique divine de « communion », en effet, imprègne toute la constitution de l’Eglise
locale et universelle, et l’anime de l’intérieur. C’est pourquoi l’Eglise est communion de foi [19],
d’espérance [20] et de charité [21] ; elle est une communauté qui participe au sacerdoce commun du
Christ et à sa tâche de témoigner et d’animer chrétiennement l’ordre temporel [22].
Tous les ministères ordonnés dans l’Eglise sont conférés à des personnes individuelles (Pape,
évêques, prêtres, diacres), mais ils sont exercés dans la « communion hiérarchique » [23]. Les dons
ou charismes, que l’Esprit Saint distribue à chacun comme il veut, sont eux aussi, par leur nature,
liés à la « communion ecclésiale » et destinés à la construction de la communauté [24] Les rapports
entre les Eglises locales doivent être animés de cette même « communion » en vertu de laquelle
l’Eglise universelle est une « communion d’Eglises » [25].
Le fruit de cette « communion ecclésiale » est l’égalité chrétienne radicale, fortement soulignée par
Vatican II à propos des laïcs : « Même si certains, par la volonté du Christ, sont institués docteurs,
dispensateurs des mystères et pasteurs pour le bien des autres, [on ne dit pas “au-dessus de” ni “des”
mais “pour” les autres, pour indiquer la communion], cependant, quant à la dignité et à l’activité
commune à tous les fidèles dans l’édification du Corps du Christ, il règne entre eux une véritable
égalité » [26].
Cette dynamique de la « communion » implique en plus, que toute l’activité de l’Eglise locale et
universelle s’exerce à l’enseigne de la coopération, de la collaboration et de la solidarité.
C’est un principe pratique pour l’apostolat des laïcs, pour leurs rapports avec les pasteurs, pour leur
travail avec les non-catholiques et les incroyants [27]. Il marque les liens dynamiques des prêtres
entre eux et avec les évêques, les laïcs et les religieux [28]. Il caractérise les relations des évêques
entre eux et avec le Pape et les prêtres [29]. Il intéresse directement, à tous les niveaux, les rapports
des religieux entre eux, avec les évêques, les prêtres diocésains et les laïcs [30]. Il guide toute
l’action œcuménique et missionnaire de chacun et des différentes communautés chrétiennes [31]. Il
s’ouvre à une plus large collaboration et coopération avec tous les hommes de bonne volonté [32].
Enfin il fait que, dans la communauté chrétienne, tous soient liés les uns aux autres par une
responsabilité commune, que l’on ne peut décharger sur d’autres ni demander à d’autres. En tant
que membres actifs du Corps mystique du Christ, tous sont appelés à collaborer dans la
responsabilité à l’action apostolique. Puisque chacun a reçu son propre don de l’Esprit, chacun a le
droit et le devoir de le mettre à profit pour le bien des frères [33]. D’après l’enseignement du
Concile, l’obéissance passive à l’autorité ne suffit plus aujourd’hui ; il faut la collaboration
volontaire et créatrice ; tous doivent prendre une part active et responsable aux initiatives que
l’Esprit du Seigneur suscite parmi les membres du peuple de Dieu [34].
Tout le chapitre iii du Règlement se développe dans cet ordre d’idées et ne fait que monnayer pour
les Coopérateurs ces valeurs évangéliques, si fortement soulignées par Vatican II. Les points
indiqués ont pour but, dans les intentions du Concile, de créer un « nouveau » modèle d’évêque, de
prêtre, de laïc et de religieux, plus fidèle à l’Evangile et aux exigences des signes des temps. Aussi
tout ce que diront les articles 19-25 aura comme but d’imprimer un « nouveau » style de vraie
fraternité aux rapports des Coopérateurs entre eux et avec les autres membres de la Famille
salésienne ; et vice versa, de ceux-ci avec les Coopérateurs, afin que nous soyons tous plus fidèles
aujourd’hui à Don Bosco et à l’Eglise.
2. Organisation du Chapitre
Le chapitre s’organise en deux parties qui correspondent à deux terrains distincts de la communion
et de la collaboration :
1. Au sein de l’Association (art.19-21) :
– Communion entre frères et sœurs en Don Bosco :
art.19
– Collaboration coresponsables dans l’action :
art.20
–
2.
–
–
–
–
Cela implique la solidarité financière :
Au sein de la Famille salésienne (art.22-25) :
Participation à la vie de la Famille :
Le ministère du Recteur majeur :
Les liens particuliers avec la Congrégation salésienne :
Les liens avec les autres groupes de la Famille :
art.21
art.22
art.23
art.24
art.25
[1]. Cf. RDB I, II, IV, V, VI ; Const. SDB 1972 art. 33-39.
[2]. Cf. A. Négrier – X. Léon Dufour, Frère, in Vocabulaire de théologie biblique, Paris, Cerf 1970,
col. 491-495.
[3]. Cf. 2 Co 13, 13 ; Ph 2, 1 ; 1Jn 1, 3 ; 2, 14.
[4]. Cf. 1 Co 10, 16-17.
[5]. Cf. 1 Co 12, 1 ss ; Rm 12, 4 ss.
[6]. Cf. Ac 2, 42 ; 4, 32.
[7].Cf. Ga 2, 9 ; Rm 15, 25-27 ; Ac 11, 29 ; 24, 27 ; 1 Co 16, 1-4.
[8]. 1 Jn 3, 12-16.
[9]. Cf. Ac 8, 14.
[10]. Cf. B. Maggioni, La Chiesa locale nelle Scrittura, in Vita e Pensiero 44 (1971) 241-247.
[11]. Cf. GS 32d ; PO 6a.
[12]. Cf. PO 9a ; AA 23b.
[13]. Cf LG 28 ; PO 8-9.
[14]. Cf. LG 28 ; CD 7, 36a ; PO 7b.
[15]. Cf. PC 15ab.
[16]. Cf. GS 92a ; AA 14c ; UR 5, 7c ; AG 8.
[17]. À ce propos, voir p. ex. Auteurs divers : Linee di rinnovamento. I Salesiani di Don Bosco oggi
(Turin-Leumann, LDC 1971) 62-66.
[18]. Cf. p. ex. LG 4a ; DV 10a ; UR 2f ; GS 1, 32e.
[19]. Cf. SC 33 ; LG 13 ; PO 4.
[20]. Cf. LG 5, 9, 48-51.
[21]. Cf. LG 7, 8, 10 ; GS 24, 32c.
[22]. Cf. LG 10-12, 34-36 ; AA 2, 6-8.
[23]. Cf. LG 23-24, 28 ; UR 2cd ; CD 4-7 ; PO 7-8.
[24]. Cf. LG 12b ; AA 3cd ; PO 9b.
[25]. Cf. LG 13c, 23, 28bcd ; AG 19-20, 35ss. Voir aussi Auteurs divers, Linee di rinnovamento …,
79-83.
[26]. LG 32c.
[27]. Cf. LG 30, 32c, 37d ; AA 18, 23, 26, 33.
[28]. Cf. LG 28, 41c ; CD 30 ; OT 2a ; PO 7-9.
[29]. Cf. LG 19, 22s ; CD 6, 37, 39 ; AG 31.
[30]. Cf. AG 23c ; CD 33-35 ; PC 22-23.
[31]. Cf. UR 12 ; AA 27 ; AG 15, 35-41.
[32]. Cf. LG 13 ; GS 40-45.
[33]. Cf. LG 12b, 30, 32 ; AA 2-3.
[34]. Cf. LG 30, 37 ; AA 3, 24 ; PO 7b, 9b ; PC 14bc. Voir aussi Auteurs divers, Linee di
rinnovamento …, 74-78.
ARTICLE 19
FRERES ET SŒURS EN DON BOSCO.
§ 1. La commune vocation et l’appartenance à une même Association font des Coopérateurs autant
de frères et de sœurs spirituels. « N’ayant qu’un cœur et qu’une âme » 1, ils vivent dans la
communion fraternelle, unis par les liens caractéristiques de l’esprit de Don Bosco.
§ 2. Tous participent avec joie à la « vie de famille » de l’Association, pour mieux se connaître,
partager expériences et projets apostoliques et grandir ensemble.
§ 3. Ils s’aident mutuellement aussi par l’échange de biens spirituels, en particulier par la prière. Ils
demeurent unis à leurs frères et sœurs défunts ; ils prient pour eux et continuent leur mission en
esprit de fidélité 2.
1. Cf. RDB I.
2. Cf. RDB V, 7 et VII, 4-5.
Cet article s’ouvre par une affirmation de grande valeur : Coopérateurs et Coopératrices sont entre
eux « frères et sœurs spirituels » ou « en Don Bosco », et il invite les Coopérateurs à adopter
certains comportements qui sont des expressions authentiques de cette fraternité.
19.1. « Frères et sœurs en Don Bosco » (art 19 § 1)
Nous venons de rappeler le message biblique et conciliaire sur la fraternité chrétienne. Les
Coopérateurs et les Coopératrices sont avant tout des frères et des sœurs dans le Christ. En vertu des
sacrements de l’initiation chrétienne, ils sont devenus « fils de Dieu dans le Fils », par l’Esprit du
Seigneur ressuscité. Don Bosco l’a affirmé clairement dans son Règlement : « Tous les associés
[sont] enfants du même Père céleste et frères en Jésus Christ … » [1].
Mais cette fraternité chrétienne se réalise d’une façon plus stricte et enrichissante en vertu de la
vocation salésienne commune et par le fait d’appartenir ainsi à la même Association. La fraternité
chrétienne est de nature sacramentelle, parce qu’elle tire son origine des sacrements ; la fraternité
salésienne est de nature charismatique, parce qu’elle se rattache à une vocation spécifique de suivre
Don Bosco, vocation due à un don ou charisme de l’Esprit, dont parle l’article 2 du Règlement.
Il faut comprendre cette fraternité salésienne à la lumière de la mission spécifique de Don Bosco
fondateur. Dans l’univers de l’Eglise, les fondateurs charismatiques forment avec leurs disciples,
hommes et femmes, une sorte de constellation spirituelle ; l’Eglise donne le nom de pères aux
Fondateurs, parce qu’ils sont destinés à avoir une descendance.
Comme le dit l’article 1er, l’Esprit Saint a suscité Don Bosco dans l’Eglise et l’a destiné à avoir des
disciples séculiers, hommes et femmes, qui, en vivant dans le monde, pourraient continuer sa
mission et faire vivre son esprit. Comme Fondateur charismatique et, par dessus le marché,
proclamé officiellement saint par l’Eglise, il est au centre de la constellation charismatique formée
par ceux qui ont reçu la vocation salésienne. Les groupes de sa Famille apostolique et tous leurs
membres, l’appellent « père » en raison de la vocation salésienne dont ils ont été gratifiés par
l’Esprit du Christ. Par ce don divin, les Coopérateurs et les Coopératrices sont « frères et sœurs en
Don Bosco », leur père spirituel !
Il est clair que pour eux, l’appellation de « père » donnée à Don Bosco n'est pas une simple image
ni une belle métaphore: la paternité spirituelle de Don Bosco est réelle, et réelle par conséquent la
fraternité salésienne qui unit entre eux Coopérateurs et Coopératrices [2].
Tout cela risque de ne rester qu’un idéal, beau mais abstrait, s’il ne favorise pas chez le Coopérateur
et la Coopératrice un profond sentiment d’appartenance à l’Association, s’il ne suscite ni ne nourrit
pas en eux la conviction d’être partie vivante d’une communion de personnes engagées dans une
mission commune.
Quand dans un groupe le sens de l’appartenance est fort, le groupe est en bonne santé, il y a
participation, solidarité et enthousiasme. Mais quand le sens de l’appartenance est faible, la
participation et la coresponsabilité à la vie du groupe sont compromises. Concrètement, pour le
Coopérateur et la Coopératrice, être « frères et sœurs en Don Bosco », c’est considérer
l’Association comme un bien propre et se sentir poussés à s’y engager sérieusement. C’est ce que
va souligner la suite de l’article.
19.2. « Ils vivent dans la communion fraternelle » (art 19 § 1)
Reconnaître, dans la joie et en esprit de foi, qu’on est frères et sœurs spirituels, ce n’est pas le
réaliser automatiquement dans la vie concrète. Don Bosco lui-même invitait les Coopérateurs à ne
former « qu’un cœur et une âme » à l’exemple de la communauté chrétienne primitive et à se
« considérer tous comme des frères » [3]. L’article que nous étudions reprend cette exhortation de
Don Bosco.
Il faut rappeler, à cet égard, les valeurs évangéliques citées dans les préliminaires de cet article : la
fraternité et la communion prêchées et mises en pratique par le Seigneur Jésus ont leurs racines dans
la paternité de Dieu qui appelle tous les hommes à la fraternité universelle et, par son Esprit, la
réalise sous différentes formes dans l’histoire. Etre Coopérateur et Coopératrice, c’est vivre une de
ces formes de communion fraternelle à la suite de Don Bosco. Ce n'est donc pas une option
quelconque, mais une exigence de l’appel particulier de Dieu : vivre en communion avec Lui et en
communion avec tous ceux qui sont ses fils et filles.
Les Coopérateurs et Coopératrices sont frères et sœurs, unis entre eux au titre de la vocation
salésienne ; mais ils doivent rendre ces liens toujours plus étroits et profonds au niveau des
personnes. La fraternité salésienne est un don reçu et, en même temps, un engagement à mettre en
pratique ou un objectif à atteindre.
De quelle manière ? En imprégnant ses relations personnelles avec chaque frère et sœur de
sentiments d’estime, de respect et d’affection sincère. En manifestant effectivement ces sentiments
dans sa manière d’agir. Par conséquent le partage et l’échange des valeurs spirituelles telles que les
idées, les expériences et les projets, le partage des joies et des souffrances, l’aide réciproque
également sous son aspect financier. Tout cela fait partie de l’esprit salésien.
19.3. Participation aux manifestations de la vie de famille (Art 19 § 2)
Vivre la communion fraternelle signifie assumer une disposition de communion permanente. Cela
peut se réaliser toujours et partout, même si l’on vit et travaille loin les uns des autres. Les
Coopérateurs et les Coopératrices sont invités à vivre la communion fraternelle dans leur quotidien,
en restant justement en communion de pensée, d’affection et de prière avec les autres Coopérateurs
et Coopératrices. Ils peuvent manifester cette communion fraternelle par des rencontres informelles
entre eux, spontanées ou en fonction des circonstances, suivant des rythmes et des modalités selon
les possibilités.
Un paragraphe approprié précise en outre qu’à différents niveaux (local, provincial, national,
international), l’Association comme telle prévoit des moments de « vie de famille » : rencontres,
journées, fêtes, semaines...
Il souligne aussi l’importance de ces moments : il suppose que « tous » les Coopérateurs ont si bien
le sens de leur appartenance à l’Association qu’ils comprennent l’importance de ces manifestations
de communion fraternelle et y participent « avec joie ». Ceci, bien sûr, dans la mesure du possible et
même au prix de quelques efforts et sacrifices.
C’est un fait que la vie de communion d’un groupe se mesure à la participation aux différentes
manifestations ou activités de toute sorte, organisées par le groupe en tant que groupe. Cette
participation est le signe du respect et de l’amour réciproques entre les membres. L’absentéisme
systématique demandera toujours d’évaluer le sens de l’appartenance.
Il signale enfin les objectifs à atteindre :
– Se connaître : la connaissance réciproque, dans un climat de sérénité et de joie salésiennes, en tête
à tête ou en groupe et assemblée, est un premier pas vers la communion et la fraternité ;
– Echanger les expériences et les projets apostoliques : l’échange peut s’accompagner de partage et
d’approbation, de suggestions et d’encouragements, de promesse d’appui, d’aide et de réconfort ;
cela fait découvrir les possibilités créatives de chacun, jeunes ou adultes, dans chaque secteur
d’apostolat, modeste ou important ; cela stimule l’imitation et l’émulation ;
– Grandir ensemble : améliorer la connaissance réciproque, échanger des expériences et des projets,
cela favorise inévitablement la croissance individuelle et collective, la maturation personnelle, un
apostolat salésien plus courageux et mieux éclairé, des liens plus solides entre les membres de
l’Association à divers les niveaux.
La participation à ces rencontres de « vie de Famille » est certainement un moment privilégié dans
la formation permanente du Coopérateur et de la Coopératrice.
19.4. Aide mutuelle et échange de biens spirituels (art. 9 § 3)
Ce qui frappe dans le chapitre vii du Règlement de Don Bosco, c’est qu’il croyait à la communion
des biens spirituels entre les membres de sa Famille apostolique et au sein de chaque groupe qui la
composait.
Il était convaincu que les mérites, les bonnes œuvres, les prières, les pénitences, les souffrances
offertes ne profitent pas seulement à celui qui les accomplit, mais, en vertu des liens particuliers de
Famille, ils se transforment mystérieusement en bénédiction pour les frères et les sœurs, surtout
ceux et celles qui sont expressément recommandés à la miséricorde de Dieu.
Fidèle à cette orientation, le Règlement de vie apostolique invite les Coopérateurs à s’entraider les
uns les autres par l’échange de biens spirituels : la foi, la parole de Dieu, l’amour de Dieu et du
prochain, le désir de sainteté, le zèle pour le Royaume et, en particulier, la prière. Prier pour
quelqu’un, c’est l’aimer devant Dieu
19.5. La communion de prière pour les Coopérateurs défunts (art. 19 § 3)
Cet admirable mystère de la communion des saints qui se réalise déjà ici-bas par l’action de l’Esprit
qui crée la communication entre tous les membres du Peuple de Dieu, se vérifie en particulier dans
les relations avec les Coopérateurs défunts. Don Bosco a toujours eu le souci de prier et de faire
prier pour eux, comme en témoignent de nombreux passages de son Règlement [4].
Fidèles à cette orientation du Fondateur, chaque année, le 5 novembre, dans toutes les maisons des
Salésiens et des Filles de Marie Auxiliatrice, se célèbre une messe « pour les Coopérateurs et
bienfaiteurs décédés ». Le paragraphe que nous étudions invite les Coopérateurs à prier pour « leurs
frères et sœurs défunts ». Mais la communion avec eux va bien plus loin : le souvenir reste vivant,
les personnes « demeurent unies », et le travail que les défunts ont fait ne disparaît pas avec eux ; il
est continué avec fidélité par les frères et les sœurs, pèlerins sur cette terre, mais protégés par leurs
prédécesseurs dans le ciel.
Il est éclairant de noter ici un passage de la constitution dogmatique Lumen gentium au sujet de cet
admirable mystère de la communion des saints : « En attendant que le Seigneur soit venu dans sa
majesté [...], les uns parmi ses disciples continuent sur terre leur pèlerinage ; d’autres, ayant achevé
leur vie se purifient encore ; d’autres enfin sont dans la gloire contemplant “dans la pleine lumière
tel qu’il est, le Dieu un en trois Personnes”. Tous cependant, à des degrés et sous des formes
diverses, nous communions dans la même charité envers Dieu et envers le prochain, chantant à
notre Dieu le même hymne de gloire. En effet, tous ceux qui sont du Christ et possèdent son Esprit,
constituent une seule Eglise et se tiennent mutuellement comme un tout dans le Christ (cf. Ep 4,
16). Donc, l’union de ceux qui sont encore en chemin, avec leurs frères qui se sont endormis dans la
paix du Christ, ne connaît pas la moindre intermittence ; au contraire, selon la foi constante de
l’Eglise, cette union est renforcée par l’échange des biens spirituels. [...] Ainsi leur sollicitude
fraternelle est du plus grand secours pour notre infirmité » [5].
[1]. RDB VI 2.
[2]. Cf. ACGS 171 ; cf. Vigano Egidio, La Famille salésienne, p. 11-13 (in ACS n° 304, avril-juin
1982).
[3]. RDB I, VI 1.
[4]. RDB V 7 et VII 4.5.
[5]. LG 49.
ARTICLE 20
CORESPONSABLES DANS L’ACTION.
§ 1. Chaque Coopérateur se sent responsable de la mission commune et il l’accomplit dans la
mesures de ses capacités et possibilités. Il participe dès lors avec esprit d’initiative aux réunions de
programmation, à l’exécution et à l’évaluation des diverses activités et aux choix des dirigeants.
§ 2. Les charges, à tous niveaux, s’exercent comme un service fraternel conformément aux
principes de communion et de coresponsabilité.
§ 3. Dans la diversité des situations et des tâches, chacun apporte à l’Association une contribution
personnelle de valeur :
–
les Coopérateurs adultes et âgés apportent la richesse d’une mûre expérience et d’une
longue fidélité ;
–
les jeunes Coopérateurs, porteurs du dynamisme des générations nouvelles, concourent à la
mission commune par leur dévouement et leur sensibilité propres ;
–
les Coopérateurs plongés dans l’épreuve ou dans l’impossibilité d’agir, fécondent l’apostolat
de tous les autres en offrant leurs souffrances et leur prière ;
–
les Coopérateurs prêtres et diacres dont la présence est très utile, offrent le service de leur
ministère spécialement pour la formation et l’animation.
Les titres de l’article 19 et de l’article 20 se correspondent : les Coopérateurs et les Coopératrices
sont frères et sœurs au niveau des relations interpersonnelles (art. 19) ; ils sont coresponsables entre
eux dans le cadre de l’action (art. 20).
La coresponsabilité au sein d’un groupe implique que tous les membres du groupe se sentent
responsables de tout ce qui se rapporte au groupe. Cela doit conduire au partage des responsabilités
entre les différents membres du groupe. L’article examine successivement la coresponsabilité de
chacun, de ceux qui ont une responsabilité, de différentes catégories de Coopérateurs.
20.1. « Chaque Coopérateur se sent responsable de la mission commune » (art. 20 § 1)
En présentant le profil du Coopérateur, l’article 3 déclare que le Coopérateur « s’engage dans la
même mission auprès de la jeunesse et du peuple, sous une forme associée et fraternelle », c’est-àdire en communion avec les autres Coopérateurs et comme membre de l’Association.
En décrivant la place et le rôle de l’Association dans la Famille salésienne, l’article 5 dit que, avec
les autres groupes de vocations, « elle est coresponsable de la vitalité du projet de Don Bosco dans
le monde » et que cette vitalité dépend en partie d’elle.
Notre article 20 dit que « chaque Coopérateur se sent responsable de la mission commune ».
L’Association assume cette mission et chaque Coopérateur en est un sujet actif puisqu’il appartient
à l’Association elle-même. La mission est commune mais elle est réalisée par des individus, qui
sont tenus d’agir non de façon individualiste mais en communion, c’est-à-dire en tant que
coresponsables de cette mission.
En cohérence avec l’orientation générale du Règlement, l’article précise à bon droit pour chaque
Coopérateur et l Coopératrice les façons dont il accomplit la mission commune : « dans la mesure
de ses capacités et possibilités ». L’impossible n’est demandé à personne, mais chacun doit faire ce
qu’il peut. Aucune mesure ni modalité détaillée ; les unes et les autres sont laissées à l’inventivité et
à la généreuse disponibilité de chacun.
L’article indique encore deux secteurs où chacun offre sa collaboration responsable : il parle de
« participer avec esprit d’initiative », c’est bien différent de la non-participation ou de l’absentéisme
et d’une simple présence résignée et passive. Il s’agit dans le concret :
1) de la participation aux « réunions de programmation, à l’exécution et à l’évaluation des diverses
activités » ;
2) de la participation « au choix des dirigeants » selon ce qui est prévu à l’article 43.
Ce sont deux secteurs stratégiques pour la bonne marche de l’Association aux différents niveaux ;
pour la formation solide et à jour de ses membres et pour un engagement apostolique salésien plus
large et plus efficace.
20.2. Ceux qui exercent une charge (art 20 § 2)
Un paragraphe est consacré à ceux qui ont été choisis pour exercer une charge aux différents
niveaux : coordinateur, conseiller, chargé de secteur ou d’une activité spécifique, parce qu’ils ont
une responsabilité particulière : c’est de la façon dont ils s’en acquittent que dépendent, en bonne
partie, la vie et l’efficacité de l’Association.
À cet égard il faut noter une option importante prise dans l’élaboration du Règlement de vie
apostolique : l’Association a refusé l’appellation de « Président », mais a accepté celle de
« Coordinateur », parce qu’en elle il n'y a pas de « fonctions » ni de places honorifiques ni de
« fauteuils », si souvent recherchés dans le monde politique ou civil, mais seulement des
« charges », c’est-à-dire des tâches différenciées à remplir de façon responsable.
Il indique les principes qui doivent guider l’exercice de ces tâches : ce sont la « communion et la
coresponsabilité ». L’Association a choisi une direction « collégiale », aux différents niveaux,
justement sur la base du principe de communion et de coresponsabilité. Cela implique que chaque
charge doit s’exercer « comme un service fraternel ».
Ces principes sont évangéliques. Voici quelques textes parmi bien d’autres. Le Seigneur Jésus
« n’est pas venu pour être servi, mais pour servir » (Mt 20, 28). « Mettez-vous, par amour, au
service les uns des autres ». (Ga 5, 13) Le Christ « a fait des dons aux hommes […] De cette
manière, le peuple saint est organisé pour que les tâches du ministère soient accomplies » (Ep 4,
11s). « Je m’adresse à ceux qui exercent parmi vous la fonction d’Anciens [...] Ne commandez pas
en maîtres à ceux dont vous avez reçu la charge, mais devenez les modèles du troupeau ». (1 P 5, 13). « Mettez-vous, chacun selon le don qu’il a reçu, au service les uns des autres, comme de bons
administrateurs de la grâce de Dieu en sa diversité ». (1 P 4, 10). Cette dernière citation a été avec
bonheur placée en exergue du chapitre vi du Règlement consacré à l’organisation et donc à tous
ceux qui y exercent une charge de responsabilité.
Ces principes évangéliques ont été plusieurs fois rappelés par le concile Vatican II à propos du
ministère ordonné des Evêques, des prêtres, des diacres et de ceux qui ont une charge dans l’Eglise :
les ministères ordonnés sont à exercer dans la « communion hiérarchique » et comme un service
officiel et qualifié du peuple de Dieu [1]. Toute autre tâche ou charge doit s’effectuer dans la
« communion ecclésiale » et comme service diversifié rendu aux autres. Voici un texte indiscutable
du Concile qui résume le tout : « Par le don de son Esprit, [le Christ] a institué, entre tous ceux qui
L’accueillent par la foi et la charité, une nouvelle communion fraternelle : elle se réalise en son
propre Corps, qui est l’Eglise. En ce Corps, tous, membres les uns des autres, doivent s’entraider
mutuellement, selon la diversité des dons reçus » [2].
Il va sans dire que ce sont des principes profondément conformes à l’esprit de Don Bosco, à cet
« esprit de famille » qui requiert justement un sens vif et sincère de communion, de coresponsabilité
et de service fraternel réciproque.
20.3. Contribution complémentaire des différentes catégories (art. 20 § 3)
Un aspect sympathique et significatif de l’Association, en sa catholicité, est la grande diversité de
ses membres, due à la diversité de leurs situations et de leurs tâches : hommes et femmes, jeunes,
adultes et personnes âgées ; célibataires ou mariés et couple de parents ; laïcs et membres du
clergé ; personnes avec une culture académique (universitaires, chercheurs, enseignants et
professeurs de toutes catégories et de tous niveaux) et personnes avec une culture populaire ou
propre au monde du travail (ménagères, ouvriers et ouvrières, employés, cultivateurs) ; personnes
avec d’importantes responsabilités sociales ou politiques (éducateurs, assistants sociaux, médecins
et infirmiers, avocats, maires et gouverneurs, syndicalistes et militaires, membres de conseils, de
comités, d’organismes, de commissions, experts et opérateurs dans le secteur de la communication
sociale …) et simples gens du peuple ; personnes en bonne santé ou malades ; personnes de races
différentes et de très nombreux pays ; personnes appartenant à des cultures, des contextes sociopolitiques et religieux très divers entre eux.
Il est clair que le Règlement ne pouvait pas considérer en détail toutes ces situations. Il en a tenu
compte de façon générale, parce que c’est un point enrichissant pour la mission salésienne exercée
par l’Association. De quelle manière ? Par la déclaration suivante de portée générale et qui englobe
toutes les diversités signalées pour en valoriser les différences : « Dans la diversité des situations et
des tâches, chacun apporte à l’Association une contribution personnelle de valeur ». (§ 3). Comme
dans une grande famille, dans l’Association chacun est accueilli, respecté, reconnu, aimé, parce
qu’il est capable d’apporter une « contribution de valeur ». Dans l’Association il n'y a pas de place
pour des « privilégiés ». Ceux qui y entrent savent cependant que leur apport est apprécié.
Dans le cadre de cette reconnaissance paritaire des diversités, le Règlement a voulu citer quelques
catégories, parce qu’elles apportent à l’Association une contribution différenciée et
complémentaire. Pratiquement dans ces catégories se retrouvent, à des titres divers, tous les
Coopérateurs : les adultes et les personnes âgées, les jeunes, les malades, les membres du clergé.
20.4. Coopérateurs adultes et âgés (art. 20 § 3)
Il faut reconnaître avec réalisme que la majorité des membres sont, aujourd’hui comme dans le
passé, des adultes et des personnes âgées. Un bon nombre d’entre eux est entré dans l’Association
dans les années 50, quand se renforçaient les structures de l’Association, et se clarifiait la différence
entre les bienfaiteurs et les Coopérateurs.
Un autre grand nombre y est entré dans la période post-conciliaire, quand apparurent les jeunes
Coopérateurs, se retravailla le Nouveau Règlement « ad experimentum » (1972-1974) et à
l’occasion du congrès mondial pour le centenaire du Règlement (1976). Le tout dans un climat de
renouveau large et sérieux.
Cette histoire récente a suggéré de mettre en lumière ce que les Coopérateurs et Coopératrices
adultes et âgés peuvent vraiment apporter, en particulier aux jeunes générations de Coopérateurs, en
vertu de leur « mûre expérience » et de leur « longue fidélité ». On sait qu’une association vit et se
développe grâce au courage fidèle de ses membres.
Conscients de cette juste reconnaissance de la part de l’Association, les Coopérateurs et
Coopératrice adultes et âgés résisteront à la tentation, facile et compréhensible, de se considérer
comme un poids inutile et de négliger ainsi les activités compatibles avec leur âge et leur
disponibilité. Leur sagesse mûrie avec l’expérience, leur fidélité confirmée par un long
militantisme, sont des valeurs sur lesquelles l’Association doit pouvoir compter !
20.5. Les jeunes Coopérateurs (art 20 § 3)
Dans l’élaboration du Nouveau Règlement on avait introduit un paragraphe spécial sur les jeunes
Coopérateurs, certes pas pour suivre la mode du moment ni par paternalisme, mais pour des raisons
sérieuses et réfléchies.
Cette option a été maintenue dans le Règlement de vie apostolique actuel pour deux motifs
principaux : l’un est dû aux caractéristiques propres des jeunes : « porteurs du dynamisme des
générations nouvelles » ; l’autre à l’apport spécifique que leur dynamisme peut amener à la
réalisation de la mission salésienne : ils « concourent à la mission commune par leur dévouement et
leur sensibilité propres ».
Nous avons ainsi accueilli l’appel du concile Vatican II : « Le saint Concile adjure avec force au
nom du Seigneur, tous les laïcs de répondre volontiers avec élan et générosité à l’appel du Christ
[...]. Que les jeunes réalisent bien que cet appel s’adresse très particulièrement à eux, qu’il le
reçoivent avec joie et de grand cœur » [3]. Cela met aussi en valeur l’enseignement du même
Concile : « Les jeunes doivent devenir les premiers apôtres des jeunes, en contact direct avec eux,
exerçant l’apostolat par eux-mêmes et entre eux, compte tenu du milieu social où ils vivent » [4].
C’était aussi conforme aux Constitutions rénovées des Salésiens de Don Bosco, qui contiennent un
article consacré spécifiquement aux jeunes Salésiens [5].
Cette option reconnaît tout ce que les jeunes Coopérateurs ont fait et continuent à faire avec élan et
générosité dans le service salésien, et elle veut encourager la pastorale des vocations parmi les
jeunes disposés à devenir Coopérateurs.
20.6. Les Coopérateurs dans l’épreuve ou dans l’impossibilité d’agir (art 20 § 3)
L’article 12 affirme que le Coopérateur « croit à la fécondité de la souffrance ». Et l’article 16 § 2
déclare : « Le Coopérateur réalise encore valablement son engagement apostolique par la prière, [...]
et en offrant généreusement ses souffrances et infirmités personnelles ».
En syntonie avec ces déclarations, notre article met en lumière ce que les Coopérateurs éprouvés par
la souffrance et dans l’impossibilité d’agir peuvent apporter de spécifique. Ils « fécondent
l’apostolat des tous les autres en offrant leurs souffrances et leur prière ».
Le Christ a accompli la mission que lui a confiée le Père à travers le mystère de la souffrance, de
l’abandon, de l’impuissance et de la Croix. La vie de tout disciple du Christ est traversée, au moins
temporairement, par ce mystère qui est une loi inéluctable de tout agir chrétien. Le fait que bien des
Coopérateurs et des Coopératrices le vivent dans leur chair et leur esprit, souffrant et priant,
représente une forme efficace de coopération et produit sûrement des effets bénéfiques sur toute
l’activité promue par les Coopérateurs.
Des exemples ordinaires et extraordinaires l’ont amplement montré : rappelons-nous la
Coopératrice, à présent Servante de Dieu, Alexandrina da Costa qui, sur son lit de douleurs,
rayonnait une lumière de vérité et un sel de sagesse sur ceux qui l’approchaient.
20.7. Les Coopérateurs prêtres et diacres (art 20 § 3)
Au cours des rectorats de Don Rua et du P. Rinaldi en particulier, il y eut beaucoup de prêtres
diocésains qui travaillèrent parmi les Coopérateurs : directeurs diocésains, codirecteurs, décurions.
Beaucoup d’activités locales et diocésaines furent dirigées par eux et furent animées par eux [6].
Après en avoir tracé la présence et le profil spécifiques dans l’Association à l’article 4, le
Règlement les cite expressément ici pour deux raisons. D’abord pour soutenir le mouvement de
collaboration entre prêtres, chrétiens laïcs et religieux promu par le Concile Vatican II. Ensuite pour
l’aide précieuse qu’ils peuvent apporter à la vie spirituelle, à la formation et à l’apostolat dans les
groupes locaux de Coopérateurs et surtout aux Coopérateurs individuellement. « Ils offrent le
service de leur ministère, spécialement pour la formation et l’animation ».
À cela s’ajoute aussi l’espoir de relancer l’Association dans ce secteur.
Avec la réintroduction du diaconat permanent par le concile Vatican II, quelques diacres mariés
sont entrés dans l’Association et contribuent valablement à la promotion et à l’animation, en
particulier des groupes constitués en dehors des maisons salésiennes et dans les lieux de missions.
Le Règlement a voulu reconnaître expressément ce nouvel apport et l’encourager.
[1]. Cf. LG 10b, 18, 24a et 32a.
[2]. GS. 32 § 4.
[3]. AA 33.
[4]. AA 12b.
[5]. Cf. Const. SDB 1984 art. 46.
[6]. Cf. Ceria Eugenio, I Cooperatori 91 ; En outre id. Annali I 252.
ARTICLE 21
SOLIDARITÉ FINANCIÈRE.
Le sens de l’appartenance et de la coresponsabilité comprend aussi concrètement le domaine
économique.
Chaque Coopérateur soutient l’Association par de libres contributions. Chaque Centre envoie aussi,
par l’intermédiaire du Conseil provincial, des offrandes au Recteur majeur pour subvenir aux
besoins les plus urgents du vaste champ d’engagement salésien 1.
1. Cf. RDB VI, 2, 3, 4.
Toute association a besoin d’une organisation financière propre. Celle des Coopérateurs n'échappe
pas à cette loi concrète Elle a aussi une administration propre autonome. Ce principe a été affirmé
par le Chapitre général spécial pour chaque groupe de la Famille salésienne [1], et reçu par le
Règlement en cet article et à l’article 49.
L’Association est soutenue, aux différents niveaux, par de « libres contributions ». On sait que dans
la rédaction des différentes ébauches du Règlement, Don Bosco s’est demandé s’il fallait demander
des quotes-parts obligatoires à verser à des moments fixés, ou bien inviter à donner des
contributions libres de préférence, mais pas obligatoirement, à certaines dates. À la fin il opta pour
cette dernière solution [2]. La même chose s’est produite lors de la consultation pour l’élaboration
du nouveau Règlement et dans sa révision. Le nouveau Règlement garde les « libres contributions »
qui s’appelaient « offrandes libres » [3].
Cette solution est significative et les raisons pour l’appuyer sont nombreuses et importantes.
L’article en indique explicitement trois :
– le sentiment d’appartenir à l’Association,
– le sens de la coresponsabilité et de la participation de chaque Coopérateur, souligné par l’article
21 § 1,
– le sens de la solidarité exprimé par le titre de l’article : « Solidarité financière ». Celui qui aime et
veut l’Association, contribue à la faire vivre également sous cet aspect.
Mais la consultation et le débat en ont indiqué beaucoup d’autres, qu’il vaut la peine de rappeler :
– Eviter d’introduire une institution destinée à devenir odieuse pour les dirigeants qui n'auraient pas
réussi à faire rentrer des fonds suffisants.
– Compter sur la générosité des Coopérateurs qui se trouvent en condition de donner de plus et plus
fréquemment.
– Imiter la solidarité de l’Eglise primitive : rappel toujours stimulant et persuasif [4]. Don Bosco
rappelait en effet volontiers aux Coopérateurs les gestes de solidarité des Chrétiens de
Jérusalem [5].
– Enfin rester en concordance avec la pratique introduite par notre Fondateur et conservée par la
tradition salésienne ultérieure.
Les offrandes et les autres formes de financement (en vertu de sa personnalité juridique,
l’Association peut acquérir et posséder des biens temporels) [6] ne constituent pas des fins en soi et
moins encore sont employées ou administrées dans un but lucratif. Elles n'ont d’autres objectifs que
ceux qui rentrent dans la mission salésienne : elles servent à financer :
– les Conseils, dont le fonctionnement comporte toujours des dépenses courantes ;
– les diverses activités aux divers niveaux : camps-écoles, participation à des congrès,
Documents, organes de liaison...
– les activités de solidarité de la Famille salésienne, dont parle l’article 22.
Contrairement à ce qui avait été suggéré au cours de la consultation pour la révision du nouveau
Règlement et noté dans quelques ébauches [7], l’article n'indique pas de modalités particulières et
uniformes pour toute l’Association, à suivre pour le versement des « libres contributions » : sur la
base du principe de subsidiarité dont parle l’article 41 § 1, il laisse la liberté aux Conseils des divers
niveaux de donner des indications en la matière.
La disposition : « Chaque Centre envoie, par l’intermédiaire du Conseil provincial, des offrandes au
Recteur majeur pour subvenir aux besoins les plus urgents du vaste champ d’engagement salésien »,
reprend officiellement une disposition du Règlement de Don Bosco : « Les Coopérateurs […] feront
[…] telle aumône que leur suggérera leur cœur charitable. Ces offrandes seront envoyées au
Supérieur (de l’Association) pour soutenir les œuvres dont s’occupe l’Association » [8]. Le « vaste
engagement salésien » ne fait que croître : la générosité des Coopérateurs doit le faire également !
La façon de recueillir ces offrandes (par le Conseil provincial) est suggérée par le fait que « les
centres s’organisent au plan provincial, en s’appuyant sur la structure de la Province salésienne »,
selon l’article 42 § 1 du Règlement.
[1]. Cf. ACGS 176.
[2]. Cf. RDB VI 2, 3, 4.
[3]. Cf. Midali Mario, Nella Chiesa e nella Società con don Bosco oggi 298
[4]. Voir les nos 1.3 et 1.5 de ce commentaire au chapitre iii.
[5]. Cf. RDB IV 5.
[6]. Cf. RVA art. 49 § 1.
[7] Cf. Atti e Documenti del 2° Congresso mondiale des Coopératori (Rome 1985) 95.
[8]. RDB VI 3.
ARTICLE 22
PARTICIPATION À LA VIE DE LA FAMILLE SALÉSIENNE.
§ 1. Le Coopérateur entretient la communion fraternelle et collabore avec les groupes et les
membres de la Famille salésienne par l’information, la connaissance réciproque, l’aide mutuelle au
plan spirituel et de la formation, et la participation aux tâches apostoliques communes 1. Dans ce
but il stimule la recherche d’initiatives diverses, soit pour des activités d’intérêt salésien, soit pour
un meilleur service des Eglises.
§ 2. Il est disponible pour participer, aux divers niveaux et dans les formes les plus opportunes, à
des structures de communication et de collaboration créées d’un commun accord entre les
responsables des différents groupes de la Famille salésienne.
1 Cf. RDB VI, I
Cet article élargit les horizons : nous passons de l’Association à la Famille salésienne pour nous
pencher sur la façon dont le Coopérateur et son Association ont à vivre la communion, la
collaboration et la coresponsabilité dans le cadre de la Famille apostolique fondée par Don Bosco.
L’article 22 se rattache à l’article 5 et en explique les conséquences au niveau de la fraternité
salésienne et de la collaboration concrète.
22.1. « Il entretient la communion fraternelle et collabore avec les autres groupes ». (art. 22 § 1.)
À chaque don de Dieu correspond un engagement à le rendre profitable aux autres. À la grande
grâce d’appartenir en vertu de la « vocation » à la Famille salésienne (affirmée à l’article 5),
correspond l’engagement à vivre en communion et à collaborer de façon coresponsable avec les
autres groupes. Le premier paragraphe de notre article dit : « Le Coopérateur entretient la
communion fraternelle et collabore avec les groupe et les membres de la Famille salésienne ».
Il faut noter qu’il s’agit de communion et de collaboration « avec les autres groupes », donc avec
tous et pas seulement quelques-uns. Mais il est clair que ces liens sont et doivent être plus étroits,
plus exigeants et plus engageants avec les groupes de vocations et spécialement ceux qui furent
fondés par Don Bosco lui-même. L’article 24 parle en effet de « liens particuliers » avec la
Congrégation salésienne, et l’article 25 § 1 de « relations spéciales » avec les Filles de Marie
Auxiliatrice. Avec tout ce monde les Coopérateurs sont « coresponsables de la vitalité du projet de
Don Bosco » en tant que « porteurs de la vocation salésienne commune », comme l’explique le
commentaire de l’article 5.
Cette communion et cette collaboration doivent s’étendre à toutes les catégories de personnes unies
à l’unique Famille par d’autres liens. C’est une exigence de la fraternité et de la collaboration
chrétienne et salésienne qui dépassent celles qui naissent de la vocation spécifique commune.
L’article 25 § 2 dit que les Coopérateurs sont proches des autres groupes autres que les salésiens et
les Filles de Marie Auxiliatrice. Evidemment ces liens seront moins intenses qu’avec les groupes
salésiens de vocation et différents.
Comme ce fut dit plus haut [1], la collaboration et la coresponsabilité impliquent un mouvement de
rencontre réciproque des parties intéressées avec mise en commun de son travail et de ses
responsabilités. Elle ne peuvent s’imposer. Il est permis et même nécessaire d’en souligner la
nécessité, l’importance et parfois même le caractère indispensable.
Il n'est pas inutile de redire avec le Chapitre Général spécial des salésiens que « intercommunication
et collaboration ne sont pas à identifier avec une dépendance des divers groupes par rapport à la
Congrégation salésienne. Nous réaffirmons au contraire leur autonomie, d’ailleurs diversement
réalisable, aussi bien dans la conduite interne du groupe que dans le secteur administratif » [2].
L’article indique ce que comptent faire les Coopérateurs, à la suite de l’effort de convergence
entrepris par les autres groupes, en particulier les salésiens et les Filles de Marie Auxiliatrice. Il se
divise en deux paragraphes qui correspondent à deux sortes de disponibilité : au niveau des
personnes ou des groupes, et au niveau des structures.
22.2. Valeurs à promouvoir ensemble (art. 22 § 1)
Au niveau de la communication et de la collaboration interpersonnelles, notre article énumère trois
sortes de valeurs à promouvoir ensemble : « l’information et la connaissance réciproques, l’aide
mutuelle au plan spirituel et de la formation, la participation aux tâches apostoliques communes ».
22.2.1. « La connaissance et l’information réciproques ».
C’est la condition de base pour toute collaboration qui se veut étroite, sincère et durable. Les formes
variées de rencontres expérimentées au cours des dernières années (journées de la Famille, semaines
de spiritualité, colloques salésiens internationaux...) entre les différents groupes ont montré d’une
part combien l’information et la connaissance réciproques comptaient souvent des lacunes et de
vides. Elles ont aussi fait constater toutes les limites d’une information indirecte et impersonnelle,
faites par les personnes non proposées aux travaux. Mais elles ont démontré, par contre, combien
les rencontres directes sont riches et exaltantes, et les informations données personnellement plus
complètes et plus stimulantes. La richesse humaine et chrétienne des personnes, les activités
apostoliques des groupes, leurs joies et leurs attentes, leurs épreuves et leurs souffrances, leur
doutes et leurs angoisses sont portés à la connaissance des autres dans un climat salésien de
simplicité et de franchise : tout cela fait « famille », au profit du travail en faveur des jeunes [3].
22.2.2. « L’aide mutuelle au plan spirituel et de la formation »
Le sentiment profond d’appartenir à une seule Famille doit « nécessairement inviter chaque groupe
à communiquer ses richesses afin qu’elles puissent devenir les richesses de tous. C’est là une forme
de fidélité dynamique à l’Esprit et à ses dons : l’originalité inventive de chacun aidera à réaliser la
“cause commune” de la Famille salésienne. Cette intercommunication nous permettra à tous d’être
mieux éclairés sur la vérité actuelle et sur l’authenticité du don fait par l’Esprit à Don Bosco et des
dons qu’il nous fait à nous aussi dans le même sens. Elle nous aidera à mieux percevoir la force et
la fécondité apostolique de notre mission et de la méthode à adopter. Elle nous fera vivre une
expérience d’évangile qui, à travers l’échange et la collaboration active, nous enrichira
mutuellement » [4].
Le même Chapitre général indique quels peuvent être ces enrichissements pour la spiritualité et
pour la formation. Les salésiens apportent aux Coopérateurs leur témoignage personnel de religieux
totalement consacrés et disponibles pour la mission [5]. De leur côté, les Coopérateurs apportent
aux salésiens et aux Filles de Marie Auxiliatrice leurs exemples stimulants et leurs exigences, « une
vision plus réaliste en ce qui concerne l’efficacité du travail pastoral à réaliser » [6], leur sensibilité
et leur expérience de laïcs, de pères et de mères de famille, d’hommes plongés dans les problèmes
sociaux et politiques. Don Bosco disait déjà : « Tout Coopérateur, suivant les circonstances qui se
présentent, peut exposer au Supérieur les choses qu’il juge devoir être prises en considération » [7].
Ils aident en somme leurs frères et sœurs religieux à être fidèles à cette « créativité et souplesse
devant les urgences » [8], qui caractérise l’esprit salésien.
Dans sa lettre sur la « Famille salésienne », le Recteur majeur a souligné avec vigueur les valeurs
spécifiques que chaque groupe peut apporter à la Famille commune : « Il est beau et enrichissant de
se savoir membre d’une “Famille spirituelle” où les bigarrures des différences contribuent à la
netteté de l’identité et à la beauté de l’ensemble : non pas en confondant tout ou en nivelant les
individus les uns sur les autres, mais en suscitant l’émulation de chacun pour répondre à sa propre
identité » [9].
Au cours de leur Chapitre général spécial, les salésiens se sont à plusieurs reprises formellement
« engagés à promouvoir, en esprit de service, des échanges fraternels […] pour un enrichissement
mutuel » [10]. Le même engagement est pris par les Coopérateurs dans cet article de leur
Règlement de vie active.
22.2.3. La participation aux tâches apostoliques communes
C’est très probablement le secteur où la communion et la collaboration fraternelles peuvent avoir
une portée et une incidence difficiles à calculer, mais particulièrement urgentes aujourd’hui, vu la
complexité des problèmes éducatifs et le rôle assumé par l’Eglise locale.
Le texte du Règlement prévoit la mise en œuvre de cette participation à l’apostolat avec des
activités orientées vers deux buts possibles :
– « Pour des activités d’intérêt salésien », comme des rencontres pour approfondir ensemble le
Système préventif, célébrer ensemble les fêtes salésiennes, collaborer dans les missions...)
– « Pour un meilleur service des Eglises », par exemple qu’un groupe formé de salésiens, de Filles
de Marie Auxiliatrice, de Coopérateurs, de Volontaires de Don Bosco et d’anciens élèves se mette à
la disposition d’un évêque pour la pastorale des jeunes du diocèse ou pour faire fonctionner une
radio-télévision catholique locale.
Dans les deux cas il s’agit d’initiatives suggérées par la base, puisqu’elles sont déjà mises sur pied
avec succès dans divers pays.
Dans sa lettre sur la Famille salésienne, le Père Viganò dit : « En avant tous ensemble » et indique
quatre objectifs concrets à atteindre « ensemble » et à réaliser en allant « de l’avant » :
1. « Approfondir notre connaissance de Don Bosco et, par conséquent, notre charité pastorale » ;
2. « L’évangélisation de la jeunesse par l’éducation » ;
3. « Privilégier la formation spécifique de chaque groupe et y associer les laïcs » ;
4.
« Une pastorale unitaire des vocations » [11].
Un sain réalisme salésien fait prévoir que toutes ces formes de collaboration créeront des difficultés
et des risques, parfois même des échecs et produiront des effets négatifs contre lesquels il faudra se
prémunir et tout faire pour les éviter. Cependant le courage du bien ne doit pas se laisser vaincre par
la peur du mal. La confiance dans les ressources positives des personnes ne doit pas se laisser
enrayer par la prévision des limites et des faiblesses humaines. L’Esprit du Seigneur, qui donne ses
dons inestimables avec beaucoup de générosité, tout en en prévoyant la profanation ou l’usage
dévié ou pervers, doit être pour tous un exemple et un encouragement.
22.3 Disponibilité à participer à des structures de la Famille. (art. 22 § 1)
Une certaine spontanéité de création est une précieuse valeur de famille que nous a laissée Don
Bosco. Mais ici entrent en jeu des réalités trop importantes pour les laisser à l’improvisation et à la
spontanéité entières de chacun ou de petits groupes. Il est donc bon et important de mettre sur pied
des structures qui favorisent une communion et une collaboration harmonieuses et efficaces.
Quelques structures de communication et d’aide existent déjà entre un groupe et l’autre, et en
particulier celle des Délégués et Déléguées des Coopérateurs. Le Bulletin salésien est lui aussi une
structure importante d’intercommunication entre tous les groupes de la Famille. Mais ce qui existe
est certainement insuffisant. Il faut des structures officielles « d’intercommunication et de
collaboration aux différents niveaux ». Dans quelques Provinces et quelques villes fonctionne déjà
un « Conseil de la Famille »avec de fort bons résultats.
En ce qui concerne les Coopérateurs, le paragraphe 2 de notre article contient une déclaration de
disponibilité à participer à de nouvelles structures de ce genre. Il s’inspire d’une déclaration
analogue du Chapitre général spécial des salésiens [12]. La formule du texte : le Coopérateur « est
disponible pour participer » n'exprime pas un pieux désir ou une simple attente à être formellement
invité, mais une volonté positive de participer et d’éventuellement prendre l’initiative.
Notre paragraphe précise les types de structures : celles d’intercommunication et de collaboration
relatives à des activités apostoliques et de formation. Il signale aussi les niveaux où elles peuvent se
réaliser : « aux divers niveaux » : local, provincial, national, régional, mondial. Il définit les formes
de participation : celles qui sont jugées « les plus opportunes » par les groupes intéressés. Il fixe les
personnes qui peuvent les créer : « les responsables des différents groupes de la Famille
salésienne » ; pour les Coopérateurs, ce sont les Conseils selon l’art. 44 § 1.Il détermine la
procédure à suivre : « d’un commun accord ». Toutes ces précisions ont pour but de garantir au
mieux la communion entre les groupes dans le respect de leur autonomie.
Il faut souhaiter que cette disponibilité, déjà réalisée en certains endroits, puisse se réaliser au plus
tôt et dans toutes les situations possibles pour rendre plus authentique et plus efficace le projet
apostolique confié par notre Fondateur à sa Famille spirituelle !
[1]. Voir présentation générale du chapitre iii du RVA au n° 1.3
[2]. ACGS 176.
[3]. Voir les Actes des semaines de spiritualité, disponibles à la Direction générale des SDB et les
volumes des Colloques internationaux sur la vie salésienne, édités par LDC de Turin Leuman.
[4]. ACGS 174.
[5]. Ib. 740
[6]. Ib. 741
[7]. RDB V 6.
[8]. Cf. Const. SDB 1984 art. 19.
[9]. Viganò Egidio, La Famille salésienne in ACS 304 (avril-juin 1982) p. 25.
[10]. ACGS 189 et Const. SDB 1984 art. 5.
[11]. Cf. Viganò Egidio, La Famille salésienne, p. 40-46.
[12]. Cf. ACGS 189.
ARTICLE 23
LE MINISTÈRE DU RECTEUR MAJEUR
§ 1.Le Recteur majeur de la Société de saint François de Sales est le successeur de Don Bosco. De
par la volonté formelle du Fondateur 1, il est le supérieur de l’Association et il y exerce les
fonctions de Modérateur suprême. Il en garantit la fidélité au Projet du Fondateur, et en favorise la
croissance. Aidé du conseiller pour la Famille salésienne, il veille à sauvegarder l’unité interne de
l’Association et assure sa communion et sa collaboration avec les autres groupes de la Famille
salésienne.
§ 2. Dans l’exercice de son ministère, il se sert de la Consulte mondiale des Coopérateurs, surtout
pour animer l’ensemble de l’Association et coordonner ses initiatives de formation et d’apostolat.
§ 3. Les Provinciaux salésiens, dans le contexte de leurs responsabilités propres à l’intérieur de la
Société de saint François de Sales, rendent présent sur leur territoire, le ministère du Recteur
majeur. Avec la collaboration des directeurs, ils garantissent, avant tout, les liens de l’unité et de la
communion. Ils pourvoient à l’assistance spirituelle des Centres et engagent leurs propres
communautés dans l’accomplissement généreux de ce service d’animation 2.
1. « Le Supérieur de la Congrégation salésienne est aussi le Supérieur de cette Association » (RDB
V, 3).
2. Cf Règlements SDB, 36.
L’article consacré au Recteur majeur prend une place significative entre celui qui parle de la
Famille tout entière (art. 22), dans laquelle il est « père et centre d’unité », et celui qui traite de ses
liens avec la Congrégation salésienne (art. 24) dont il est le supérieur.
23.1. Successeur de Don Bosco, père et centre d’unité de la Famille (art. 23 § 1)
En sa qualité de Successeur de Don Bosco et de représentant de sa paternité charismatique, le
Recteur majeur a un lien identique d’ordre à la fois spirituel et charismatique avec tous les
différents groupes de la Famille salésienne. Il exerce envers eux la fonction de promoteur,
d’animateur et de garant charismatique de l’unité de cette Famille, et de sa fidélité au projet
apostolique et à l’esprit du Fondateur. Les Constitutions de chacun de ses groupes se réfèrent à cette
paternité et au rôle qui en résulte. Voici quelques textes :
« Le Recteur majeur [...] est le successeur de Don Bosco, le père et le centre d’unité de la Famille
salésienne. Son souci principal est de promouvoir [...] la fidélité constante des confrères au
charisme salésien pour l’accomplissement de la mission que le Seigneur a confiée à notre
Société » [1].
« Le Recteur majeur de la Société de saint François de Sales, en tant que successeur de Don Bosco,
est l’animateur et le centre d’unité [de la Famille salésienne] » [2] ; « Il contribue, grâce aussi à la
faculté que lui a déléguée le Saint-Siège, à garder vivante notre fidélité à Don Bosco » [3].
« L’Institut reconnaît dans le Recteur majeur des salésiens, successeur de Don Bosco, le Père de
toute la Famille, celui qui est appelé à promouvoir entre les différents groupes et les membres
l’unité d’esprit et la fidélité à la mission commune. » [4].
23.2 Supérieur de l’Association. (art. 23 § 1)
Du point de vue juridique, son rôle varie selon les groupes. Il est « visiteur apostolique » pour les
Filles de Marie Auxiliatrice [5]. Pour les salésiens et les Coopérateur il est beaucoup plus : le
supérieur à plein titre ou « Modérateur suprême ».
Ceci reflète « la volonté formelle du Fondateur », comme dit notre article, qui cite le texte du
Règlement de Don Bosco, qui dit : « Le supérieur de la Congrégation salésienne est aussi le
supérieur de cette Association » [6].
La fonction du supérieur est exprimée par le titre de « Modérateur suprême » employé par le Code
de droit canonique à propos de celui qui a la « haute direction » d’une association catholique
assimilée à un tiers ordre [7]. En tant que Modérateur suprême de l’Association, le Recteur majeur a
un pouvoir ordinaire de gouvernement qu’il exerce, conformément au droit, sur toute l’Association,
sur ses Conseils, ses Centres et ses membres [8].
Cette fonction juridique de supérieur souligne en pratique son rôle charismatique de père et de
centre de la Famille spirituelle de Don Bosco. Le Règlement unit ces deux aspects de son ministère
envers les Coopérateurs.
Evidemment, il est lui-même le premier à savoir qu’il est le supérieur des salésiens religieux et des
Coopérateurs laïcs ou prêtres séculiers : il gouverne les deux groupes en tenant compte de leur
nature très différente, à la lumière de la doctrine du Concile et en respectant la part d’autorité que le
Règlement reconnaît à certains Coopérateurs, par exemple aux Conseils et au Coordinateur aux
divers niveaux.
Mais au-delà de cette mise au point théologique et juridique, impérieuse et nécessaire, il faut saisir
la signification profondément évangélique et salésienne du rôle du Recteur majeur en tant que
supérieur. La « paternité » que le Fondateur a laissée comme précieux héritage à ses successeurs
donne à son autorité un visage salésien caractéristique, fait d’animation et de bonté ; il est tout
entier au service de la vocation personnelle et de la vitalité de l’Associations. Ce n’est pas pour rien
qu’elle est qualifiée de « ministère » (= service), et que l’article 23 s’intitule « Le ministère du
Recteur majeur ».
L’article indique au Recteur majeur trois façons d’exercer ce ministère charismatique et juridique
envers l’Association :
1. Personnellement ou en collaboration avec le conseiller pour la Famille salésienne (§ 1) ;
2. Avec l’aide de la Consulte mondiale des Coopérateurs (§ 2) ;
3. En le rendant présent, au niveau local, dans le ministère des Provinciaux (§ 3).
23.3. Fonctions et préoccupations du Recteur majeur (art. 23 § 1)
L’article détaille aussi les fonctions et les préoccupations du Recteur majeur envers les
Coopérateurs. Il y en a quatre :
– « Garantir la fidélité de l’Association au projet du Fondateur » : ce projet concerne la nature
de l’Association sous tous ses aspects, tels qu’ils sont présentés dans les différents chapitres du
Règlement de vie apostolique ;
– « Favoriser la croissance » en qualité et en nombre, l’animer et la stimuler, par exemple par
des orientations doctrinales et des indications concrètes, par des contacts personnels avec les
responsables, les Conseils et les Centres, et avec les Coopérateurs individuellement ;
– « Sauvegarder l’unité interne » vu le caractère international de l’Association et sa
physionomie fortement catholique, comme on l’explique le commentaire de l’article 20 § 3 ;
– « Assurer sa communion et sa collaboration avec les autres groupes de la Famille
salésienne ». Le Chapitre général spécial des salésiens déclare : « En ce mouvement d’unité,
préoccupation lancinante de l’esprit de Don Bosco, il y a un élément vraiment fondamental qui
garantit particulièrement notre union entre tous et l’efficacité apostolique qui en découle : c’est le
Recteur majeur [...]. En lui, en tant que successeur de Don Bosco, nous trouvons le lien extérieur le
plus stable, la garantie la plus sûre d’une unité organique et efficace » [9].
23.4. Le conseiller pour la Famille salésienne (art. 23 § 1)
Pour ces deux dernières fonctions en particulier, le Recteur majeur agit « avec la collaboration du
conseiller pour la Famille salésienne » ; ceci en conformité aux Constitutions salésiennes qui
prévoient justement un conseiller pour la Famille salésienne avec la « tâche d’animer la
Congrégation » dans ce secteur.
« Conformément à l’article 5 des Constitutions [SDB], il s’emploie à promouvoir la communion des
divers groupes, dans le respect de leur spécificité et de leur autonomie. En outre, il oriente et aide
les provinces, afin que se développe sur leur territoire et selon les statuts respectifs, l’Association
des Coopérateurs salésiens et le mouvement des Anciens élèves » [10].
En vertu de sa charge, il « collabore avec le Recteur majeur » en particulier dans les deux secteurs
cités par l’article du Règlement. Il jouit d’une autorité morale dans l’Association (autorité juridique
aussi si le Recteur majeur la lui délègue). Dans le concret, ses interventions auprès des
Coopérateurs ont une grande importance [11].
23.5. La Consulte mondiale (art. 23 § 2)
Cet organisme a été constitué comme groupe provisoire en 1974 avec l’approbation ad
experimentum du nouveau Règlement [12]. En 1977, il a été maintenu à titre de structure
temporaire, mais avec une physionomie juridique nouvelle : il était composé de membres de droit et
de membres élus et nommés ; il avait pour tâche d’assister le Recteur majeur dans le gouvernement
et l’animation mondiale des Coopérateurs. À la fin du mandat de six ans de cette deuxième
Consulte, on en constitua une troisième, formée d’un nombre restreint de consulteurs, chargée de
préparer le iie congrès mondial et de s’occuper, par des commissions spéciales, de la révision du
Nouveau Règlement.
Désormais, le Règlement en fait une structure non plus provisoire et expérimentale, mais définitive
et permanente de l’Association avec une configuration juridique propre. Ce n'est pas un organisme
collégial de gouvernement, comme le sont les Conseils locaux et provinciaux (cf. art 43 § 1). C’est
un organisme d’aide directe du Recteur majeur pour l’animation et le gouvernement de
l’Association à l’échelle mondiale.
Son rôle est double :
1. « Animer toute l’Association »
2. « Coordonner les activités de formation et d’apostolat ».
Deux tâches importantes qui méritent un petit commentaire.
Par animation il faut comprendre une activité destinée à renforcer de l’intérieur la participation. Elle
se présente donc comme une suggestion, une motivation, une persuasion, et non comme une
imposition de l’extérieur, fût-elle de simple ordre moral. Elle consiste à promouvoir le renforcement
de la coresponsabilité comme expression d’une conscience mûre. Elle se base sur une attitude de
docilité à l’Esprit, premier Animateur de tout le peuple de Dieu. Cela exige de savoir dialoguer,
écouter, communiquer et discerner. L’animation salésienne est essentiellement spirituelle, et se
présente à la fois comme un appel et comme une pastorale [13].
En ce qui concerne l’importance et les modalités de la coordination, il faut se rappeler les
indications de la constitution pastorale Gaudium et spes : « Les diverses associations catholiques
internationales peuvent rendre des multiples services pour l’édification d’une communauté
mondiale pacifique et fraternelle. Il faut les consolider, en les dotant d’un personnel plus nombreux
et bien formé, en augmentant les moyens matériels dont elles ont besoin, et en coordonnant
harmonieusement leurs forces. De nos jours, en effet, l’efficacité de l’action et les nécessités du
dialogue réclament des initiatives collectives. De plus, de telles associations contribuent largement à
accroître le sens de l’universel, qui convient sans nul doute aux catholiques, et à donner naissance à
la conscience d’une solidarité et d’une responsabilité vraiment mondiales » [14]. Coordonner à
l’échelle mondiale, ce n’est pas se substituer aux forces apostoliques qui travaillent à des niveaux
inférieurs ni niveler les initiatives, mais faire en sorte que ces forces convergent pour réaliser plus
efficacement les buts de l’Association.
Il est clair qu’une telle Consulte a un rôle important et de grand poids, puisqu’elle est appelée à
apporter au Recteur majeur la voix directe des Coopérateurs des diverses régions du monde, et à
l’aider dans la responsabilité complexe et délicate de l’animation et de la coordination de toute
l’Association. Pour sa configuration juridique, voir le commentaire de l’article 48.
23.6. Les Provinciaux salésiens (art. 23 § 3)
Nombreux sont les textes du Règlement qui parlent des rapports du Provincial salésien avec
l’Association [15]. C’est dire l’importance de sa fonction. Le texte principal est certainement le
paragraphe 3 de notre article qui indique :
1. Le rapport du Provincial avec le Recteur majeur en ce qui concerne les Coopérateurs ;
2. Les deux tâches essentielles du Provincial vis-à-vis des Coopérateurs ;
3. L’action du Provincial auprès des directeurs de maisons salésiennes à propos de l’animation de
l’Association.
D’après le Règlement, les Provinciaux salésiens « rendent présent sur leur territoire le ministère du
Recteur majeur » ; en d’autres termes, « ils participent de son ministère » (art 42 § 2). Cela entre
deux limites précises : « dans le contexte de leurs responsabilités propres à l’intérieur de la Société
de saint François de Sales » dont parlent les articles 5 et 24 du Règlement, et « conformément au
présent Règlement » (art 42 § 2).
Dans certains domaines (par exemple l’érection d’un centre, la constitution d’une conférence
nationale ou régionale), il jouit de l’autorité juridique que lui reconnaît le Règlement. (voir les
articles sur l’organisation).
On peut dire que, sur son territoire, le Provincial représente au premier chef la responsabilité de la
Congrégation salésienne vis-à-vis des Coopérateurs : il rend concrète et effective la communion
avec l’Association, en assumant la responsabilité de son animation et de sa croissance, et en
favorisant le sens de l’appartenance et l’approfondissement de la vocation commune [16].
Il exerce cette tâche avec une sollicitude paternelle et fraternelle, en deux directions :
– Assurer l’unité charismatique et la communion, tant au sein de l’Association que de celle-ci vis-àvis des autres groupes de la Famille salésienne ;
– Animer et, selon l’article 42 § 2, guider et promouvoir. Sur ce terrain, son intervention spécifique
prend deux formes principales :
- Pourvoir les centres d’une assistance spirituelle par la nomination de délégués valables (cf. art. 46)
- Inciter les communautés salésiennes à assumer sérieusement les engagements envers les
Coopérateurs [17].
Pour porter à bien cette tâche, il s’appuie sur la « collaboration des directeurs », qui sont les
responsables directs de leurs communautés salésiennes.
Il est très important que le Provincial et les directeurs (et les Directrices des FMA) se sentent
vraiment impliqués dans la vitalité spirituelle et apostolique de l’Association.
[1]. Const. SDB 1984 art. 126.
[2]. Const. FMA 1982 art. 3.
[3]. Ib. art 111.
[4]. Const. VDB 1991 art. 71.
[5]. Const. FMA 1982 art. 111.
[6]. RDB V 3.
[7]. Voir le commentaire de l’article 6.
[8]. Cf. CIC can. 622 et Const. SDB 1984 art. 127.
[9]. ACGS 731.
[10]. Const. SDB 1984 art. 137.
[11]. Voir le commentaire de l’article 48 § 1 et 5.
[12]. Cf. NR art 34 § 1.
[13]. Cf. ACG21 46.
[14]. GS 90 §1.
[15]. Cf. RVA art. 42 § 2, 44 § 1, 45 § 2 et 3, 47 § 1 et 3.
[16]. Cf. Règl. SDB 1984 art 147.
[17]. L’article 36 de ces Règlements dit ceci : « En accord avec les responsables des divers groupes
[de la Famille salésienne], la communauté, en esprit de service et dans le respect de leur autonomie,
leur offre une assistance spirituelle, suscite des rencontres, favorise la collaboration au plan éducatif
et pastoral et participe à l’effort commun pour les vocations ». Le contenu essentiel de l’article 38
des mêmes Règlements est repris à l’article 24 § 1 du RVA.
ARTICLE 24
LIENS PARTICULIERS AVEC LA CONGRÉGATION SALÉSIENNE
§ 1. L’Association trouve dans la Congrégation salésienne « un lien d’unité stable et sûr » 1 ; ses
relations avec elle se déroulent dans un climat de confiance fraternelle réciproque 2. Chaque
communauté salésienne, tant provinciale que locale, se sent impliquée dans le devoir de « soutenir
et développer » l’Association, de contribuer à la formation de ses membres, de faire connaître leur
projet de vie et de le promouvoir 3.
§ 2. C’est la volonté précise des Coopérateurs de conserver et de développer les rapports qui les
lient à la Congrégation salésienne. En particulier ils nourrissent à l’endroit du Recteur majeur des
sentiments d’affection sincère et de fidélité à ses orientations.
[1]. RDB II ; V, 3.
2. RDB V, 6 ; VI, 1.
3. Cf. Règlements SDB 38.
Cet article se rattache évidemment au précédent, qui a déjà parlé du Recteur majeur, des
Provinciaux, des directeurs et des communautés salésiennes. Il se rattache aussi à l’article 1 § 1 à
propos de Don Bosco Fondateur, et aux articles 5 et 6 § 1 sur le visage de l’Association dans la
Famille salésienne et par rapport à la Société de saint François de Sales.
Il fait valoir que l’Association comme telle a des « liens particuliers avec la Congrégation
salésienne » prise dans son ensemble, comme dit justement le titre.
Il se situe après l’article qui traite de la participation des Coopérateurs à la vie de la Famille
salésienne (art 22) dans un but bien précis : pour placer la Congrégation salésienne non pas « audessus » des autres groupes, comme au sommet d’une pyramide, mais « à l’intérieur » de la Famille,
comme le centre d’un cercle. Cette conception est en effet plus fidèle à la pensée de Don Bosco,
reprise officiellement par le Chapitre général spécial des salésiens [1].
24.1. La Congrégation salésienne « lien d’unité stable et sûr » (art. 24 § 1)
« L’Association des Coopérateurs, dit l’article 5, […] vit en relation particulière de communion
avec la Société salésienne ». Comme Association publique de fidèles (art. 6 § 1), elle « participe au
patrimoine spirituel de la Société de saint François de Sales » et « ses membres sont en union avec
la Congrégation salésienne sous l’autorité du Recteur majeur ».
Notre article spécifie en outre ces liens particuliers de l’Association avec les salésiens de Don
Bosco : « L’Association trouve dans la Congrégation salésienne un lien d’unité stable et sûr » (§ 1).
Ceci reflète la volonté précise et incontestable du Fondateur. Dans son Règlement, il insiste avec
force sur l’idée d’« association », d’« union », d’« uniformité d’esprit », de « fraternité » dans les
rapports interpersonnels [2]. Il a traduit cette volonté aux plans structurel et juridique en statuant
que le Recteur majeur des salésiens serait aussi le supérieur de l’Association, avec toutes les
conséquences pratiques, au niveau institutionnel, prévues par l’article 23. En outre, selon Don
Bosco, tous les supérieurs salésiens (en plus des Provinciaux et des directeurs), toutes les
communautés salésiennes et même chaque salésien participent, pour leur part, aux responsabilités et
aux sollicitudes du Recteur majeur vis-à-vis des Coopérateurs [3].
Cette volonté du Fondateur a été officiellement interprétée par le Chapitre général spécial des
salésiens : « a) Nous estimons être le lien sûr et stable voulu expressément par Don Bosco comme
garantie d’unité dans le même esprit, d’efficacité apostolique dans la mission commune, de vitalité
durable dans l’œuvre qu’il a fondée ; de force, d’enthousiasme et d’élan au sein d’un mouvement
« b) Nous estimons que nous devons être toujours davantage le centre de propulsion de ce vaste et
organique qui se propose le salut de la jeunesse pauvre et en danger [4]. mouvement apostolique des
baptisés qui, dans l’esprit de Don Bosco, se mettent complètement au service de l’Eglise pour le
salut de la jeunesse » [5].
Pour les salésiens (faut-il le dire ?), tout cela constitue non pas un sujet d’honneur, de prestige ni de
puissance, mais plutôt et essentiellement de grave responsabilité. « Par la volonté de notre
Fondateur, dit l’article 5 des Constitutions SDB, [la Société salésienne] a, dans cette Famille, des
responsabilités particulières : maintenir l’unité de l’esprit, stimuler le dialogue et la collaboration
fraternelle pour un enrichissement mutuel et une plus grande fécondité apostolique ».
Pour toutes ces raisons, cette responsabilité envers tous les groupes prend des caractéristiques
spéciales vis-à-vis des Coopérateurs : elle est plus immédiate, plus étroite et plus impliquante, tant
pour les rapports interpersonnels entre salésiens et Coopérateurs, que pour le ministère institué du
Recteur majeur à l’égard de l’Association, comme l’a exposé l’article précédent.
24.2. Relation de « confiance fraternelle réciproque » (art. 24 § 1)
N'oublions pas qu’une longue histoire et une tradition déjà centenaires ont montré le fait et le
bienfait de cette étroite « association » entre la Congrégation salésienne et les Coopérateurs. La
vérité historique oblige à dire qu’il y a eu des carences et des désengagements des deux côtés, avec
des répercussions négatives sur la vitalité de l’Associations. Mais c’est en quelque sorte la contreépreuve de l’importance de cette étroite communion.
Il serait également faux de concevoir les responsabilités entre salésiens et Coopérateurs à sens
unique. Les deux interlocuteurs donnent et reçoivent. Don Bosco l’a bien souligné dans son
Règlement : « Tout Coopérateurs, suivant les circonstances qui se présentent, peut exposer au
Supérieur les choses qu’il juge devoir être prises en considération ». « Les membres de la
Congrégation Salésienne considèrent tous les Coopérateurs comme des frères en Jésus-Christ, et
s’adressent à eux chaque fois que leur concours peut être utile à la plus grande gloire de Dieu et au
bien des âmes. Les Coopérateurs, s’il en est besoin, recourront avec la même liberté aux membres
de la Congrégation salésienne » [6].
Fidèle à la pensée du Fondateur, le Chapitre général spécial des salésiens a adopté la fameuse
déclaration adressée aux Coopérateurs par le Recteur majeur de l’époque, le P. Ricceri : Vous
pouvez « devenir des collaborateurs conscients et à part entière, à nos côtés et non pas au-dessous
de nous ; et donc non pas de simples exécutants fidèles et dociles, mais des collaborateurs capables
de responsabilités apostoliques » [7]. « Ces obligations nous permettront d’“instaurer à tous les
niveaux une relation de vraie fraternité, qui puisse constituer dorénavant le nouveau style de vie
salésienne à l’intérieur comme à l’extérieur des communautés éducatives” » [8].
C’est dans cet ordre d’idées que l’article précise : « Les relations(de l’Association avec la
Congrégation salésienne) se déroulent dans un climat de confiance fraternelle réciproque ».
24.3. Tâches de chaque communauté salésienne (art. 23 § 1)
Quand il précise les responsabilités des communautés salésiennes vis-à-vis des Coopérateurs,
l’article reprend la substance de l’article 38 des Règlements des salésiens qui dit : « Chaque
communauté se fera un devoir de soutenir et de développer, pour le bien de l’Eglise, l’Association
des Coopérateurs salésiens. Elle contribuera à la formation de ses membres, fera connaître cette
vocation et s’attachera à la promouvoir, surtout parmi les jeunes les plus engagés et les
collaborateurs laïcs ».
Par conséquent, les Coopérateurs ne comptent pas seulement sur le ministère du Recteur majeur,
des Provinciaux, des directeurs et des Délégués, mais sur tous les salésiens. Et, de leur côté, ils sont
disposés à collaborer avec eux, sous des formes variées (comme le font déjà un grand nombre)
spécialement dans les œuvres et les activités à l’avantage de la jeunesse nécessiteuse.
24.4. Volonté de développer les rapports avec la Congrégation salésienne (art. 24 § 2)
Les rapports particuliers d’union (et par conséquent de collaboration, de solidarité et de
coresponsabilité) qui lient les salésiens et les Coopérateurs constituent un point essentiel de la
vocation des Coopérateurs. Il n'est donc pas possible d’être Coopérateurs sans une profonde
adhésion d’esprit et de cœur à cette relation qui reflète, on l’a vu, la pensée constante et manifeste
de Don Bosco.
À vrai dire, dans la période post-conciliaire, on aurait pu penser que la nouvelle perspective du
laïcat ouverte par le concile Vatican II appelait l’Association à se rendre non seulement
légitimement autonome, mais totalement indépendante de la Congrégation salésienne, pour ne
garder qu’une référence idéale au Fondateur et au charisme communs.
Mais cette suggestion n'a pas été suivie par les Coopérateurs, conscients qu’ici étaient en jeu la
vraie fidélité au Fondateur et la vitalité effective de leur Association : l’union, même
institutionnelle, avec la Congrégation salésienne développe des types de solidarité, de communion,
de collaboration et de coresponsabilité largement bénéfiques aux uns et aux autres.
Dans cette conviction, ils ont voulu le déclarer officiellement dans leur Règlement : « C’est la
volonté précise des Coopérateurs de conserver et de développer les rapports qui les lient à la
Congrégation salésienne ». (§ 2). Le chapitre consacré à l’organisation indiquera les formes
concrètes et effectives sous lesquelles l’Association maintient et développe ces liens particuliers.
Pour finir, l’article indique une des dispositions certainement les plus marquantes, qu’entendent
maintenir les Coopérateurs : leur sentiment « d’affection sincère », en esprit de famille, « à l’endroit
du Recteur majeur », et leur volonté de « fidélité à ses orientations ».
En conclusion, les articles 23 et 24, pris ensemble, codifient cette union intime, dans l’autonomie,
des Coopérateurs avec leurs frères religieux, union à laquelle tenait tant Don Bosco.
[1]. Le texte est reporté au commentaire de l’article 5 au numéro 5.5.
[2]. Cf. RDB Au lecteur et I-II et VI-VII.
[3]. Cf. RDB VI. 1.
[4]. Cf. MB V 692 ; VII 622 ; X 663 ; XI 85. Cité par ACGS 732.
[5]. ACGS 732. Voir aussi le n° 742.
[6]. RDB, respectivement V 6 et VI 1.
[7].ACGS 743.
[8]. Ib.
ARTICLE. 25.
LIENS AVEC LES AUTRES GROUPES DE LA FAMILLE SALÉSIENNE
§ 1. Des relations spéciales unissent les Coopérateurs aux Filles de Marie Auxiliatrice dont les
Déléguées animent des Centres établis auprès de leurs œuvres. Cette animation, analogue à celle des
Délégués salésiens, est réglée par une convention passée entre le Recteur majeur et la Mère générale
des FMA.
§ 2. Les Coopérateurs se sentent proches aussi des autres groupes de la Famille, spécialement des
Volontaires de Don Bosco et des Anciens et Anciennes élèves des œuvres salésiennes. Ils sont
ouverts à toute forme de collaboration avec eux.
Ce dernier article du chapitre iii est consacré aux « liens avec les autres groupes de la Famille
salésienne ». Il ne les prend pas un à un en considération, ce qui serait pratiquement impossible
dans un Règlement. Il en nomme expressément trois : les Filles de Marie Auxiliatrice, les Anciens
et Anciennes élèves, et les Volontaires de Don Bosco. Il indique les autres globalement.
25.1. Relations spéciales avec les Filles de Marie Auxiliatrice (art. 25 § 1)
Il y a entre les Filles de Marie Auxiliatrice et l’Association des Coopérateurs « des relations
spéciales », dues à une complémentarité profonde et vitale. Elles ont une caractéristique que,
jusqu’à présent du moins, les autres groupes féminins ne possèdent pas : leurs « Déléguées animent
des Centres établis auprès de leurs œuvres » ; « Cette animation [est] analogue à celle des Délégués
salésiens ». Ce point est important, car il fait entrer directement l’Institut des Filles de Marie
Auxiliatrice dans la vie et dans les activités de beaucoup de Centres et dans l’organisation de
l’Association aux divers niveaux, avec la participation des leurs Déléguées.
« Cette animation, dit l’article, est réglée par une convention passée entre le Recteur majeur et la
Mère générale des Filles de Marie Auxiliatrice ». Ce fait mérite une note historique et un mot de
présentation.
Depuis 1953, les Filles de Marie Auxiliatrice exercent une activité d’animation directe dans les
Centres des Coopérateurs établis auprès de leurs œuvres. Dans certains pays, par ex en Italie, ces
centres se sont fortement développés. Les rapports entre supérieurs salésiens et responsables de
l’Institut auprès des Coopérateurs ont été guidés par un esprit de fraternité salésienne et par
certaines règles contenues dans le Manuel des dirigeants. À partir de 1970, on a jugé bon de rédiger
une véritable convention pour trois ans, signée par la Mère générale et le Recteur majeur.
L’initiative s’est révélée positive et fonctionnelle et le Nouveau Règlement la codifia [1]. Le texte
rédigé en conformité avec ce nouveau Règlement fut ensuite retravaillé après l’approbation du
Règlement de vie apostolique et approuvé respectivement par le Recteur majeur et la Mère
générale. Il est constitué d’un avant-propos et de la Convention proprement dite.
L’avant-propos rappelle quelques articles du Règlement des Coopérateurs sur leur identité dans
l’Eglise et dans la Famille salésienne, et leur rapport avec les salésiens et les Filles de Marie
Auxiliatrice. La convention tient compte des points suivants :
– L’engagement des deux Instituts à observer, en ce qui les concerne, le Règlement de vie
apostolique des Coopérateurs (art 1) ;
– La vie des Centres : leur fusion ou suppression, l’entente et la collaboration entre centres voisins,
leur appartenance à leur regroupement provincial (art. 2-8) ;
– Les Délégués et Déléguées : nomination, relations réciproques vis-à-vis des Centres et des
Conseils (art 9-10) ;
– Les rapports entre le Conseiller pour la Famille salésienne et la Vicaire générale des Filles de
Marie Auxiliatrice (art 11) ;
– La Déléguée Fille de Marie Auxiliatrice à la Consulte mondiale(art 12) ;
– La compétence du Recteur majeur et de la Mère générale dans la mise en pratique et
l’interprétation de la convention (art 13).
25.2. Proximité particulière des Anciens et Anciennes élèves (art. 25 § 2)
Les Anciens et Anciennes élèves forment, dans la Famille salésienne, un groupe original (dont le
profil est commenté à l’article 5 du Règlement).
Don Bosco déjà invitait les Anciens qui le désiraient, à entrer dans l’Association des Coopérateurs,
et beaucoup l’ont fait. Le Chapitre général spécial des salésiens et les documents récents du Recteur
majeur se situent dans cette perspective [2]. On trouve les mêmes orientations dans les documents
officiels des Filles de Marie Auxiliatrice [3].
Un certain nombre d’Anciens et Anciennes élèves sont aussi, par libre choix, devenus Coopérateurs
et coopératrices, et dans leurs Unions, ils promeuvent des activités souvent de type salésien. Dans
leurs statuts ils se déclarent prêts à collaborer avec les Coopérateurs [4]. Ils ont donc beaucoup de
traits communs avec les Coopérateurs. En particulier la qualification de « séculiers », qui leur est
commune, fait que les Coopérateurs « se sentent proches » d’une manière spéciale des Anciens et
Anciennes élèves, comme dit le §2 de l’article.
25.3. Proximité particulière des Volontaires de Don Bosco (art. 25 § 2)
Pour les Volontaires de Don Bosco aussi, c’est la qualification commune de « séculiers » qui fait
que les Coopérateurs se sentent spécialement proches d’elles.
Les Volontaires de Don Bosco sont en quelques sorte la « pointe avancée » des Coopératrices : dans
leur acte de fondation en 1919 ; elles ont déclaré vouloir observer leur Règlement [5]. En 1959 elles
prirent le nom – changé depuis – de « Coopératrices Oblates de saint Jean Bosco ». En effet elles
sont des salésiennes séculières comme les Coopératrices, mais consacrées en plein monde, par la
profession des trois vœux. Le Recteur majeur, le P. E. Viganò, leur a dit : « Vous, Volontaires de
Don Bosco ; ne vous situez pas sur le versant “religieux” de l’Eglise : vous n'êtes pas du tout des
“religieuses”, vous ne vous appuyez pas sur la forme de vie des Filles de Marie Auxiliatrice. Votre
place exacte se trouve sur le versant “laïque” ; vous êtes des “laïques” et vous devez à ce titre vous
situer plutôt à côté des Coopératrices salésiennes » [6].
Actuellement beaucoup de Volontaires proviennent des rangs des Coopératrices. Elles ont vécu
intensément l’idéal salésien et, tout en suivant une vocation séculière spécifique, elle ont décidé de
le réaliser dans la consécration apostolique séculière.
En devenant Volontaires, elles n'ont pas renoncé à être Coopératrices : elles le sont restées et
beaucoup d’entre elles continuent à travailler dans les Centres des Coopérateurs en y apportant les
valeurs de leur consécration apostolique séculière et salésienne.
Pour tous ces motifs, les Coopérateurs « se sentent proches […] spécialement des Volontaires de
Don Bosco », comme le dit l’article (§ 2).
25.4. Proches des autres groupes et ouverts à toute forme de collaboration avec eux (art. 25 § 2)
« Les Coopérateurs se sentent proches aussi des autres groupes de la Famille » salésienne : les
groupes déjà reconnus [7] et ceux qui seront reconnus, et cela en raison de la vocation salésienne
commune et par le fait qu’ils partagent le projet apostolique de Don Bosco.
Avec eux et en particulier avec les Anciens et Anciennes élèves et les Volontaires, « ils sont ouverts
à toute forme de collaboration avec eux ». Le choix des formes de collaboration dépendra des
milieux dans lesquels travaillent les différents groupes. Il est facile de prévoir des activités
communes concernant la vie de la Famille salésienne (fêtes, journées, semaines de spiritualité,
congrès...) ou l’approfondissement de quelques aspects communs de la mission salésienne et de
l’esprit du Fondateur. Entre les groupes séculiers il peut y avoir diverses formes de collaboration
surtout pour des activités d’animation chrétienne et salésienne des réalités temporelles, par exemple
dans le milieu de travail ou dans la vie sociale et politique (voir articles 10 et 11), ou bien pour des
activités communes dans l’Eglise locale (cf. article 23).
Tous les groupes ont exprimé leur disponibilité positive à collaborer efficacement avec les autres ; il
ne devrait donc pas être difficile de réaliser ensemble des activités conformes au projet apostolique
de Don Bosco.
[1]. Cf. NR 25 § 2.
[2]. ACGS 157 et 757, 5 ; Viganò Egidio, La Famille salésienne 39 ; id. Les Anciens élèves de Don
Bosco 25-26
[3]. Cf. p. ex. ACG XVI 152.
[4]. Cf. Statuts des Anciens et Anciennes Elèves, art. 9-27.
[5]. Cf. Quaderno Carpanera, in Istituto Secolare Volontarie di don Bosco, Documenti e Testi V
(Rome 1980) 80.
[6]. E. Viganò, Lettre du Recteur majeur aux Volontaires de Don Bosco, in ACS 295 (janvier-mars
1980) p. 66.
[7]. En voir la liste dans le commentaire de l’art. 5.2.
CHAPITRE IV
L’ESPRIT SALESIEN.
« Ce que vous avez appris et reçu, ce que vous avez vu et entendu de moi, mettez-le en pratique. Et
le Dieu de la paix sera avec vous. » (Ph 4, 9)
Quand Paul écrit à ses chrétiens, il livre volontiers des traits autobiographiques : Il montre ainsi
l’affection dont il veut imprégner ses relations interpersonnelles (paternité)et qu’il a conscience du
besoin de modèles concrets et crédibles pour des chrétiens exposés à des confusions et à des
ambiguïtés (cf. 1 Th 4, 1 ; 1 Co 4, 16).
Dans le cas de la communauté de Philippes, Paul, authentique apôtre du Christ, le fait parce que les
adversaires égarent la communauté en diffusant un Evangile et un esprit qui n'est pas le sien. D’où,
avant tout, sa dénonciation vigoureuse (3, 15-21), sur un ton polémique accompagné d’un sérieux
avertissement où il s’implique personnellement. Pratiquement, en quatre verbes directs qui
indiquent d’une part l’autorité de son témoignage et de son magistère, et de l’autre, l’expérience
vitale et intime qu’en ont fait les disciples, il souligne qu’il est indispensable d’accueillir la
« tradition » dont il est un médiateur, pour marcher à la suite du Dieu de Jésus Christ. Ce n’est
qu’ainsi que sa paix, la plénitude des biens messianiques, entourera la communauté (cf. Rom. 15,
33 ; 1 Co 14, 33).
Ce texte est évidemment un appel affectueux et senti à rester fidèles à Don Bosco : il est la source
première et authentique de l’esprit salésien, puisqu’il est lui-même en premier lieu, comme Paul, un
imitateur authentique de l’Evangile du Christ, et donc un modèle sûr et, pour les Coopérateurs,
incontournable. C’est pour cela que presque tous les articles – sauf trois – mettent au premier plan
la figure de Don Bosco, comme celui qui transmet, de père en fils et en filles, les valeurs de son
esprit.
Avant-propos
1. Inspiration fondamentale
Le concile Vatican II avait invité les laïcs « qui se sont agrégés à des associations ou instituts
approuvés par l’Eglise, [à] s’efforcer de toujours mieux réaliser les caractères de la spiritualité qui
leur est propre » [1]. En réponse à cette invitation et suivant l’exemple de leurs frères religieux, les
Coopérateurs ont voulu que leur Nouveau Règlement porte un chapitre consacré à l’esprit salésien,
qui prenne bien en considération leur qualification d’apôtres séculiers salésiens. Un travail long et
ardu a donné alors son chapitre v [2].
L’esprit salésien est une valeur commune de toute la Famille et les salésiens ont la responsabilité
d’en garantir l’unité de l’esprit. C’est pourquoi le texte de leurs Constitutions (et leur commentaire)
constitue pour les Coopérateurs le texte de référence le plus officiel. En fait, il a inspiré les
rédacteurs du Règlement de vie apostolique à propos de tous les points essentiels de l’esprit salésien
communs à tous les groupes de l’unique Famille, mais évidemment pas à propos de la façon
séculière dont doivent les vivre les Coopérateurs et les Coopératrice. Le chapitre iv de ce Règlement
de vie apostolique est profondément salésien, mais non moins profondément séculier. Il est dû en
bonne partie, aux suggestions envoyées par les Coopérateurs eux-mêmes de 1983 à 1985 en vue de
sa révision définitive [3].
Dans sa Lettre aux Coopérateurs salésiens du 6 juin 1986, le Recteur majeur, le P. E. Viganò,
consacre toute la deuxième partie à faire ressortir ces deux aspects inséparables de la vocation du
Coopérateur : sa sécularité et sa salésianité. C’est ce qui l’inspire dans son bref commentaire de ce
chapitre iv du Règlement précisément, qui traite de L’esprit salésien. Ce sont des pages éclairantes
et vigoureuses à méditer [4].
2. Division du Chapitre
Composé de 10 articles, le chapitre se divise en quatre parties :
1.
L’article 26 sert d’introduction : il explique ce qu’est l’esprit salésien transmis par Don Bosco.
2.
Les articles 27-28 en décrivent les valeurs spirituelles fondamentales : vivre l’esprit salésien,
c’est participer à « l’expérience de l’Esprit » de notre Fondateur :
– à sa perception du mystère chrétien : « coopérer avec Dieu »,
art 27
– et à sa charité pastorale dans l’Esprit
art 28
3. Les articles 29-32 décrivent l’esprit salésien en tant que style de vie et d’action, et comme il
est vécu par des salésiens « séculiers » :
– Style de présence dans le monde (optimisme et réalisme)
art 29
– Style d’action (esprit d’entreprise, de souplesse et de courage)
art 30
– Style de relations (joie et esprit de famille)
art 31
– Style de prière (simple et vivante) qui fait le pont avec les articles suivants.
art 32
4.
Les articles 33-35 enfin décrivent la vie de prière « salésienne » du Coopérateur :
– Parole et Sacrements
art 33
– Moments forts de discernement et de relance
art 34
– Dévotions salésiennes privilégiées
art 35
3. Chapitre particulièrement salésien
Chapitre très riche, comme on le voit, à méditer peut-être plus longuement que les précédents : il
touche les profondeurs du cœur du Coopérateur, décrit ce qui donne forme, chaleur, originalité et
parfum salésiens à ses divers comportements même les plus quotidiens. Les Coopérateurs ne
peuvent pas tous s’engager dans les nombreuses activités décrites aux chapitres ii et iii, mais ils
peuvent et doivent tous vivre et agir selon le style décrit ici, les Coopérateurs âgés, en pleines forces
de l’âge ou jeunes : ce style les rendra « rayonnants » de salésianité, chacun avec sa propre nuance.
Notons que ce chapitre, beaucoup plus que les autres, contient des citations typiques de Don Bosco
ou des références explicites à lui (au moins 13 fois) : car c’est à lui que se rattachent les traits de
l’esprit salésien, vu que c’est lui qui l’a vécu « à la source » de façon authentique, sous l’inspiration
du Saint Esprit, comme le dira précisément le premier article et le suggère d’emblée la citation
biblique qui ouvre ce chapitre.
Soulignons cependant aussi une formulation linguistique qui a son importance. Il y a une différence
entre « l’esprit de Don Bosco » (dont parle l’art 19 § 1), c’est-à-dire l’esprit de notre Fondateur, tel
qu’il l’a vécu lui-même, et « l’esprit salésien » dont il est question dans ce chapitre : l’esprit
salésien comprend, certes, l’esprit « de Don Bosco », mais il est plus large, et en quelque sorte plus
riche, parce que c’est l’esprit de Don Bosco évalué, vivifié et rendu fécond par des milliers de
disciples, hommes et femmes, pendant plus d’un siècle de tradition salésienne. Leur expérience
globale a permis de discerner les traits évangéliques les plus décisifs de l’esprit de notre Fondateur.
[1]. AA 4h.
[2]. Cf. Midali Mario, Nella Chiesa e nella sociétà con Don Bosco oggi (LDC, Turin 1974 193).
[3]. Cf. Atti e Documenti del 2° Congresso mondiale Cooperatori Salesiani 78-80.
[4]. Viganò Egidio, L’Association des Coopérateurs salésiens, in ACG 318 (juillet-septembre
1986), p. 13-45. Gardent encore toute leur valeur les écrits de Aubry Joseph, L’esprit salésien.
Esquisse. Rome, éd. CC, 1972, 170 pages ; Midali Mario, Dimensione « secolare » dello spirito
salesiano (collection Idee 3), Rome ed. SDB, 1981, 72 pages.
ARTICLE. 26 : PRÉCIEUX HÉRITAGE
Guidé par l’Esprit Saint, Don Bosco a vécu et transmis aux membres de sa Famille un style
particulier de vie et d’action : l’esprit salésien.
C’est une expérience évangélique originale. Elle donne un caractère et une allure concrète aussi
bien à la présence et à l’action dans le monde, qu’aux relations avec le prochain et aux rapports
avec Dieu. Elle trouve sa source dans le cœur même du Christ, et se nourrit dans l’engagement
apostolique et dans la prière. Elle imprègne toute la vie et la transforme en témoignage d’amour.
Le Coopérateur accueille cet esprit comme un don du Seigneur à l’Eglise, et il le fait fructifier selon
la condition séculière qui lui propre.
Cet article est une introduction générale, qui s’inspire en partie des Constitutions des salésiens (art
10-11). « Nous trouvons dans cet article, dit le Recteur majeur, l’idéal que doit poursuivre votre
effort de formation salésienne » [1].
26.1. L’esprit salésien est le fruit de l’action de l’Esprit en Don Bosco
Le premier article du Règlement a affirmé que l’Esprit Saint « forma en lui [Don Bosco] un cœur de
père et de maître, capable de se donner totalement, et il lui inspira une méthode d’éducation tout
imprégnée de la charité du Bon Pasteur ». Ici se retrouve le même discours, qui met en lumière le
« fruit » le plus précieux de cette action de l’Esprit en Don Bosco Fondateur : l’esprit salésien.
Don Bosco a été le premier à « vivre » l’esprit salésien non seulement en réalisant ses idées et ses
vertus d’homme génial, mais en se laissant « guider par l’Esprit Saint », comme dit le texte. En
effet, ce fut l’Esprit du Seigneur Jésus qui envoya Don Bosco évangéliser les jeunes et qui, grâce à
sa docilité, suscita en lui des attitudes et comportements qui font l’esprit salésien. Ces attitudes
rentrent toutes dans la liste des « fruits » de l’Esprit dressée par saint Paul dans sa lettre aux
Galates : « Voici ce que produit l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, foi,
humilité et maîtrise de soi ». (Ga 5, 22).
L’origine de l’esprit salésien est donc de l’ordre de la nature, parce qu’il est fait de dispositions
spirituelles et de comportements humains et, en même temps ; de l’ordre de la grâce, parce qu’il est
le fruit de l’action puissante et douce de l’Esprit de Dieu.
Il est une partie essentielle du patrimoine spirituel de Don Bosco. En tant que Fondateur, il l’a
transmis à tous ses disciples en « précieux héritage », dit le titre de l’article. C’est un héritage
précieux parce qu’il est imprégné de sa sainteté et « trouve sa source dans l’Evangile et dans le
cœur même du Christ ».
Il est frappant de constater comment, dans les dernières années de sa vie surtout, Don Bosco a
insisté sur la fidélité à l’esprit salésien comme fidélité à la volonté de Dieu. Il suffit de rappeler ici
la fameuse Lettre de Rome de 1884 [2], et les lettres envoyées l’année suivante aux chefs
missionnaires, en particulier à Mgr Costamagna : « Je voudrais vous faire personnellement à tous un
sermon, ou mieux, une conférence sur l’esprit salésien qui doit animer et guider nos paroles et nos
actions » [3].
26.2. L’esprit salésien est « un style particulier de vie et d’action »
La première partie de l’article essaie de définir l’esprit salésien. Il se présente d’emblée comme une
réalité vaste et profonde, car il est de l’ordre de la vie et non pas des concepts.
La formule « esprit salésien » peut se comprendre de façon globale, en référence aux expressions
courantes : « esprit évangélique », « esprit chrétien », « esprit religieux », et, dans le domaine
culturel, « esprit français », « esprit italien », « esprit bourgeois »...
Don Bosco l’a souvent employée quand il exhortait les salésiens à garder « le bon esprit », « l’unité
de l’esprit », « l’esprit des Règles » [4], ou quand il disait que les Coopérateurs devaient pratiquer,
dans leur milieu séculier, « tout l’esprit des salésiens » [5]. Le concile Vatican II a ensuite parlé de
« l’esprit des fondateurs » et de « l’esprit d’un Institut » [6].
Le Chapitre général spécial des salésiens en a donné cette description : « De façon sommaire on
peut définir l’esprit salésien “notre style particulier de pensée et de sentiment, de vie et d’action,
dans la mise en œuvre de la vocation et de la mission spécifiques que l’Esprit-Saint ne cesse de
nous donner”. Ou de façon plus détaillée : “l’esprit salésien est cet ensemble d’aspects et de valeurs
du monde humain et du mystère chrétien (Evangile surtout, Eglise, Règne de Dieu...) auxquels les
fils de Don Bosco, dociles à l’inspiration de l’Esprit-Saint et en vertu de leur mission, sont
particulièrement sensibles, aussi bien dans leurs attitudes intérieures que dans leurs comportements
extérieurs” » [7].
La formule synthétique « style de vie et d’action » forgée par le Chapitre général spécial est entrée
dans les Constitutions des salésiens de 1972 (art. 40) et ensuite dans les Constitutions définitives de
1984, retouchée comme suit : « style original de vie et d’action » (art 10), d’où l’article. 26 du
Règlement actuel des Coopérateurs.
26.3. L’esprit salésien « est une expérience évangélique originale »
L’article complète cette brève description en y ajoutant que l’esprit salésien « est une expérience
évangélique originale [...] qui trouve sa source dans le cœur même du Christ ».
En effet, « expérience évangélique » indique, globalement, le fait qu’un Fondateur et ses disciples,
sur la base du témoignage du Seigneur ressuscité et des Apôtres, se situent vis-à-vis du mystère de
Dieu, qui opère dans l’histoire, et l’intériorisent. Le mystère divin devient ainsi l’horizon où se voit,
se comprend et se vit notre relation avec la réalité cosmique et toute l’histoire humaine, considérée
dans son évolution et saisie comme une succession d’événements issus de décisions et de choix
humains avec l’intervention de Dieu.
Vivre l’esprit salésien, c’est épouser les manières de voir, de sentir et d’agir du Seigneur Jésus : il
« trouve sa source dans le cœur même du Christ », dit notre texte. C’est donc assumer une manière
de travailler dans le monde et de se situer par rapport aux autres et devant Dieu, qui caractérisa
Jésus de Nazareth. L’esprit salésien, déclare le texte, « donne un caractère et une allure concrète
aussi bien à la présence et à l’action [des Coopérateurs] dans le monde, qu’à [leurs] relations avec le
prochain et à [leurs] rapports avec Dieu ».
26.4. L’esprit salésien « imprègne toute la vie »
L’esprit salésien intéresse la totalité de la personne et de sa vie. Ce n'est pas un habit qu’on peut
mettre et enlever suivant les saisons : il doit s’assimiler de façon vitale de façon à faire partie de la
personne. Il ne se vit pas par moments ni dans certaines circonstances : il « imprègne toute la vie »,
affirme notre texte, pour donner « une allure concrète » caractéristique à notre présence et à notre
action.
Ici s’annoncent les articles suivants qui traiteront des principaux aspects ou secteurs de la vie qui
assument ce ton salésien.
Bref, le Coopérateur ne fait pas seulement des choses bonnes, belles et utiles qui correspondent à
l’idéal salésien, mais il est salésien au plus profond de son être, de la tête aux pieds. Et cela se sent,
se voit et « s’irradie » : dans les petites choses et les gestes quotidiens comme dans les grandes
décisions. Cela se constate et s’expérimente davantage lors des réunions des Coopérateurs pour une
expérience de vie et de travail communs : sans effort particulier se crée d’emblée un climat, une
ambiance... Et, une fois rentré chez lui, chacun dit : « J'ai respiré un air salésien, j'étais à mon aise.
Ailleurs c’est beau et bien aussi, mais il manque « quelque chose » : justement l’esprit salésien ! »
Cela se sent aussi à la profondeur avec laquelle l’esprit salésien ne cesse d’unir et de garder unis
entre eux tous les membres de l’Association et tous ceux de la Famille. L’article 19 en a déjà parlé.
Un même sang donne une union physique et biologique aux membres d’une même famille humaine.
Le même esprit salésien unit les frères et les sœurs salésiens : il est le signe et le critère d’une sainte
parenté. Là où il n'existe pas manque l’appartenance « vitale » à l’Association ; l’appartenance
officielle et la « promesse » ont alors bien peu de signification et d’efficacité.
26.5. L’esprit salésien est « un don du Seigneur à l’Eglise »
L’esprit salésien est une expérience évangélique qui caractérise tous les disciples de Don Bosco. Ils
ne doivent pas le vivre « portes closes », pour eux-mêmes, pour seule la satisfaction de se sentir
enrichis des ses valeurs et d’en jouir ensemble. L’esprit salésien « est un don du Seigneur à
l’Eglise », affirme notre Règlement.
Il y a dans l’Eglise l’esprit franciscain, l’esprit dominicain, l’esprit de saint Ignace, l’esprit salésien
etc. Ce sont des richesses suscitées par Dieu pour le bien du Corps mystique, dont les membres ont
des exigences et des sensibilités diverses et complémentaires. Ils reflètent la catholicité de l’Eglise
sous ses nombreuses formes : ils sont comme autant d’instruments et de sons avec lesquels la
communauté chrétienne chante à Dieu la symphonie évangélique de l’amour.
Les disciples de Don Bosco, hommes et femmes, ont donc la responsabilité de connaître, de vivre et
de rayonner pour le bien de l’Eglise, l’esprit salésien (notre article dit : « le fait fructifier ») sans
vanité ni jalousie, avec une ouverture joyeuse à toutes les autres valeurs qui sont en elle, avec
l’unique préoccupation de la fidélité à ce que Dieu, l’Eglise et les jeunes attendent d’eux. Une
déclaration du Chapitre général spécial des salésiens vient ici à point : « Nous ne pouvons enfin
oublier le contenu pédagogique de ces divers éléments de l’esprit salésien. Sa richesse, don de
l’unique Esprit, doit se diffuser parmi les destinataires de notre mission pour y devenir activement
féconde » [8].
26.6. L’esprit salésien est vécu par le Coopérateur « selon la condition séculière »
Dernière précision générale très importante. L’esprit salésien est vécu dans l’Eglise par tous les
membres de la Famille apostolique de Don Bosco et en est un facteur caractéristique et original visà-vis des autres chrétiens. Mais si, dans la Famille, tous vivent les valeurs communes salésiennes,
ils ne les vivent pas tous de la même manière. Elle varie selon qu’on est homme ou femme, selon
les différentes formes de vie, le ministère ecclésial spécifique et les différents contextes sociaux et
religieux où l’on vit et travaille.
Dans le concret, le salésien vit ces valeurs communes comme homme et comme membre d’une
communauté religieuse composée de prêtres, de diacres et de coadjuteurs. La Fille de Marie
Auxiliatrice les vit comme femme qui a fait la profession religieuse et exerce des fonctions laïques
relatives à l’éducation chrétienne. La Volontaires de Don Bosco les vit comme laïque séculière
consacrée. Le Coopérateur et la Coopératrice les vivent comme homme et femme dans le monde
« selon la condition séculière qui lui est propre », dans l’exercice de son ministère ordonné
(Coopérateur prêtre et diacre, art. 4 § 3) ou dans l’exercice de son activité laïque dans le cas de la
très grande majorité (art. 4 § 2).
L’esprit salésien revêt des formes concrètes très diversifiées et très riches, et chaque groupe doit se
soucier de le vivre selon sa condition humaine ou ecclésiale particulière. L’article 5 déclare :
L’Association « apporte à la Famille salésienne les valeurs spécifiques de sa condition séculière,
dans le respect de l’identité et de l’autonomie de chacun des autres groupes ». Par conséquent, un
Coopérateur pourra s’inspirer de la façon de faire d’un salésien religieux, une Coopératrice de celle
d’une Fille de Marie Auxiliatrice : mais ni l’un ni l’autre ne devront les « copier » matériellement ;
ils devront, au contraire, trouver dans l’esprit salésien des occasion et des moyens d’être plus fidèles
à eux-mêmes et à leur vocation providentielle de laïcs ou de prêtres et de diacres séculiers, pour
enrichir ainsi la Famille tout entière. C’est un point sur lequel le P. Viganò a beaucoup insisté dans
sa lettre sur la Famille salésienne (1982) et sa lettre aux Coopérateurs (1986) [9].
C’est précisément ce que feront voir les articles suivants. Ils ont été rédigés dans une perspective
nettement séculière. Il y a beaucoup d’affinités entre le chapitre ii des Constitutions des SDB et ce
chapitre iv du Règlement des Coopérateurs sur le même sujet de l’esprit salésien. Mais les
insistances, les nuances, la perspective et le ton même sont différents, et certains contenus sont
propres aux Coopérateurs. Eclairés et poussés par l’Esprit, ils doivent eux-mêmes inventer leur
manière concrète de vivre l’esprit salésien.
[1]. Viganò Egidio, L’Association des Coopérateurs salésiens, in AGG n° 318 p. 30.
[2]. Cf. Braido Pietro, La lettera di Don Bosco da Roma del 10 maggio 1884 (LAS, Rome 1984)
[3]. Ep. IV 333.
[4]. Cf. p. ex. MB V 881 ; IX 565, 573s ; XII 77, 80, 255, 300, 301 …
[5]. Progetto di deliberato per il Capitolo Generale I, 1877, manuscrit de Don Bosco reporté en MB
XIII 606 et repris par ACGS 164.
[6]. LG 45a ; PC 2b, 20, 21, 22.
[7]. ACGS 86.
[8]. ACGS 105.
[9]. Cf. Viganò Egidio, La Famille salésienne, in ACG 304, p. 28-32 ; id. L’Association des
Coopérateurs salésiens in ACG 318, p. 27-30.
ARTICLE. 27
EXPÉRIENCE DE FOI AGISSANTE
§ 1. Le Coopérateur participe à l’expérience spirituelle de Don Bosco, vécue avec une particulière
intensité parmi les jeunes du premier « Oratoire » du Valdocco.
§ 2. Il perçoit Dieu comme Père et comme Amour qui sauve. Dans le Christ Jésus il rencontre le
Fils unique et l’Apôtre parfait du Père, le Bon Pasteur plein de sollicitude pour les petits et les
malheureux, le Ressuscité qui est avec nous « tous les jours » 1 comme Seigneur de l’histoire. Il vit
dans l’intimité de l’Esprit Saint, l’Animateur du Peuple de Dieu dans le monde 2. En Marie il
vénère celle « qui a coopéré d’une manière absolument unique à l’œuvre du Sauveur » 3 et ne cesse
d’apporter sa coopération de Mère et d’Auxiliatrice du peuple chrétien 4. Il se sent membre vivant
de l’Eglise, Corps du Christ, centre de communion de toutes les forces qui travaillent au salut du
monde.
§ 3. Ainsi peut-il découvrir l’aspect plus profond de sa vocation : être en toute vérité un
« coopérateur de Dieu » dans la réalisation de son dessein de salut 5 : « Des choses divines, la plus
divine est de coopérer avec Dieu au salut des âmes » 6.
[1]. Cf. Mt 28, 20.
2. Cf. Vat. II, LG 4, AG 4.
3. Cf. Vat. II, LG 61.
4. Cf. Vat. II, LG 62.
5. Cf. 1 Co 3, 9.
6. Frontispice du Bollettino Salesiano à partir de 1878.
27.1. Etroite correspondance entre les articles 27 et 28.
Les articles 27 et 28 sont peut-être parmi les plus importants de tout le Règlement, du moins au plan
de la vie spirituelle du Coopérateur. Leur relation réciproque est évidente. L’article 27 parle de foi
agissante, l’article 28 d’amour vécu ; dans les deux cas, en référence directe à l’expérience de Don
Bosco.
art 27 Foi agissante
« Le Coopérateur participe à l’expérience spirituelle de Don Bosco vécue avec une
particulière intensité parmi les jeunes du Valdocco. Il perçoit Dieu comme Père et Amour. Il
rencontre le Christ [...] Bon Pasteur. Il vit dans l’intimité de l’Esprit [...]. En Marie il vénère celle
qui coopère. comme Mère et Auxiliatrice ».
art 28 Amour apostolique
« Le centre et la synthèse de l’esprit salésien est la charité pastorale que Don Bosco a vécue en
plénitude, rendant présent parmi les jeunes l’amour miséricordieux de Dieu le Père, la charité
salvifique du Christ Pasteur et le feu de l’Esprit […]
§ 3 Elle est encore une imitation de la sollicitude maternelle de Marie.
Nous sommes ici devant les dispositions fondamentales et l’expérience spirituelle la plus
intense de Don Bosco, sa vision de foi et son comportement de charité, sa façon particulière de se
mettre en relation avec Dieu et de se laisser inspirer et conduire par Lui pour suivre sa vocation
providentielle. La correspondance des mots et des phrases entre les deux articles n’est pas une
répétition ! Elle nous fait voir comment, chez Don Bosco, sa façon de percevoir et de contempler
Dieu et son mystère de salut a son pendant dans sa manière d’agir et de remplir sa tâche parmi les
jeunes.
C’est ainsi qu’il doit en être aussi pour chacun de ses disciples : « Dis-moi quel est ton Dieu,
quelles sont tes convictions de foi, et je te dirai ce que vaut ton action, et si ta charité est efficace et
de qualité ou bien pas ! ». Sans doute le Coopérateur est-il appelé à professer toute la foi
chrétienne : son Credo est celui de toute l’Eglise. Mais dans l’insondable richesse des mystères
chrétiens, l’Esprit Saint lui-même l’amène à se placer à un certain point de vue, à privilégier
certains aspects, de sorte qu’à sa vision des choses corresponde un type cohérent de comportements
effectifs. À telle vue mystique ou contemplative correspond telle attitude pratique ou concrète.
Don Bosco n'a pas élaboré une théologie de la mystique à laquelle s’inspirait son action pratique ; il
s’est contenté de les exprimer l’une et l’autre dans la devise « Da mihi animas ». Il utile aujourd’hui
de se rendre clairement compte de ce que Don Bosco a vécu intensément sans l’élaborer par écrit.
27.2. Le Coopérateur participe à l’expérience spirituelle de Don Bosco. (art. 27 § 1)
Notre paragraphe contient une déclaration générale plutôt audacieuse, mais profondément vraie :
l’action cachée mais réelle de l’Esprit fait que « le Coopérateur participe à l’expérience spirituelle
de Don Bosco ». En d’autres termes, ce que l’Esprit a fait avec puissance en Don Bosco voici un
siècle, il le fait encore aujourd’hui, plus modestement mais selon la même logique, dans les
disciples qu’il suscite le long de l’histoire et dans le monde entier.
Grâce à l’Esprit, principe vital de communion et de diversification dans l’Eglise [1], le Coopérateur
peut vivre aujourd’hui quelque chose des perceptions de foi de Don Bosco, de ses dispositions
spirituelles, de ses désirs et de sa passion pour les jeunes, à condition d’être attentif et disponible à
l’action de l’Esprit. Participer à l’expérience spirituelle de Don Bosco, c’est, pour le Coopérateur et
la Coopératrice, être lié d’une manière vitale et profonde (celle de l’Esprit) au Fondateur et aux
autres Coopérateurs et Coopératrice, pour former une vraie parenté spirituelle : c’est la fraternité
salésienne dont parle l’article 19.
Il faut à ce propos apporter une précision de poids. Quand et comment Don Bosco a-t-il vécu cette
expérience de la manière la plus originale et la plus intense ? Au Valdocco, durant les années d’or
de la fondation de l’œuvre salésienne et de la Congrégation salésienne : entre 1846 et 1864, quand
Don Bosco était intensément présent parmi ses jeunes (ensuite il sera pris par bien d’autres
occupations et d’engagements !) et quand l’aidaient des « salésiens » de premier ordre : Maman
Marguerite, le futur saint Joseph Cafasso, le futur bienheureux Michel Rua, le futur saint
Dominique Savio... En ces années-là, le Valdocco fut le berceau de l’esprit salésien, et Don Bosco
lui-même le rappela avec nostalgie dans sa lettre de Rome de 1884. Déjà alors des prêtres et des
laïcs venaient « coopérer » et partager son expérience, par exemple les époux Fassati...
Aujourd’hui, les Coopérateurs partagent cette expérience spirituelle, du moins dans la mesure où ils
prennent au sérieux leur vocation salésienne et la suivent avec fidélité : eux aussi peuvent se
façonner peu à peu un « cœur oratorien » !
27.3. Perspective trinitaire de la vie spirituelle du Coopérateur. (art. 27 § 2)
Don Bosco a vécu l’expérience typique du Valdocco dans un certain cadre de foi chrétienne et
ecclésiale, renforcée de convictions et de rencontres privilégiées avec la réalité divine. Le
Coopérateur partage aujourd’hui cette façon de voir exprimée au paragraphe 2 de l’article, dans un
langage biblique et conciliaire.
Ce paragraphe a été rédigé à la lumière de l’impressionnante vision panoramique de saint Paul dans
sa lettre aux Ephésiens : merveilleuse et sublime synthèse, sommet aux accents inimitables sur
l’infinie sagesse du Père qui se déploie dans le « mystère » et sur l’insondable charité du Christ qui
s’y « révèle » [2].
27.3.1. Référence à Dieu le Père
Dans les chapitres 1, 3-14 et 3, 3-21, Paul décrit le « dessin de salut universel » du Père qui se
réalise par étapes d’une éternité à l’autre, couvrant la totalité de l’histoire, mais centré et récapitulé
dans le « mystère » du Christ rédempteur de tous, juifs et païens, devenu l’époux de l’humanité
sauvée, qui est son Eglise (5, 22-32) :
« Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ [...]
En lui, il nous a choisis avant la création du monde, [...]
Il nous a d’avance destinés à devenir pour lui des fils [...].
Il nous a dévoilé le mystère de sa volonté, [...]
Réunir tout sous un seul chef, le Christ. [...]
En Lui vous avez reçu la marque de l’Esprit Saint,
c’est la première avance qu’il nous a faite sur notre héritage ». (Ep. 1, 3-14, passim) »
« J'ai reçu la grâce d’annoncer aux nations païennes
la richesse insondable du Christ,
et de mettre en lumière le contenu du mystère
tenu caché depuis toujours en Dieu, le créateur de toutes choses ;
ainsi, désormais, […] seront connus, grâce à l’Eglise,
les multiples aspects de la sagesse de Dieu.
C’est le projet éternel que Dieu a réalisé dans le Christ Jésus notre Seigneur ». (Ep 3, 8-11).
Telle est la « toile de fond » divine de la foi du Coopérateur qui éclaire et motive son intense action
apostolique. En conséquence et selon notre paragraphe, « il perçoit Dieu comme Père et comme
Amour qui sauve », comme auteur ou « animateur » généreux de l’immense dessein de salut, dans
lequel entre en particulier la foule des jeunes.
27.3.2. Référence à Jésus Christ
Au centre et au sommet du projet historique du Père de sauver les hommes, Paul place le Christ,
réalisateur de ce projet. Obéissant à la volonté du Père, Il est son « coopérateur » dans l’histoire
humaine, comme nous le lisons dans l’Evangile de saint Jean : « Mon Père, jusqu’à maintenant, est
toujours à l’œuvre, et moi aussi je suis à l’œuvre » (5, 17) ; « J'ai accompli l’œuvre que tu m'avais
confiée ». (17, 4).
Le Coopérateur certes regarde vers Jésus de Nazareth, le Christ, et l’accepte dans la totalité de son
mystère, en particulier dans son identité divine de « Fils unique ». Mais, comme dit notre article, il
« rencontre » en Lui de façon plus spéciale :
– « l’Apôtre parfait du Père », son envoyé par excellence, qui s’est mis à sa disposition totale :
c’est la qualification globale du Christ historique dans sa mission de salut ;
– « le Bon Pasteur plein de sollicitude pour les petits et les malheureux », en particulier les jeunes :
c’est la qualification du Christ historique dans sa vie publique et dans ses dispositions et
comportements ;
– le « Ressuscité qui est avec nous “tous les jours” comme Seigneur de l’histoire » : c’est la
qualification globale du Christ actuel dans sa présence victorieuse au cœur des événements humains
tout au long des siècles.
27.3.3. Référence à l’Esprit Saint
La réalisation du dessein de salut est une œuvre divine, qui requiert de façon absolue la force
divine. En Jésus de Nazareth, comme dans l’Eglise, l’Esprit du Christ ressuscité et du Père est à
l’œuvre : il inspire et anime, en secret mais avec force le peuple de Dieu dans l’histoire.
Le texte du Règlement se réfère aux textes du Concile et en particulier, au numéro 4 du décret Ad
gentes, qui mérite d’être retranscrit en entier : « Pour réaliser pleinement [ce plan], le Christ a
envoyé d’auprès du Père le Saint-Esprit, qui accomplirait son œuvre porteuse de salut à l’intérieur
des âmes, et pousserait l’Eglise à s’étendre. Sans l’ombre d’un doute, le Saint-Esprit était déjà à
l’œuvre avant la glorification du Fils. Pourtant, le jour de la Pentecôte, il descendit sur les disciples
pour demeurer avec eux à jamais ; l’Eglise se manifesta publiquement devant la multitude, la
diffusion de l’Evangile commença avec la prédication ; enfin fut préfigurée l’union des peuples
dans la catholicité de la foi, par l’Eglise de la Nouvelle Alliance, qui parle toutes les langues,
comprend et embrasse dans sa charité toutes les langues, et triomphe ainsi de la dispersion de Babel.
« Car c’est à la Pentecôte que commencèrent “les actes des Apôtres”, tout comme c’est lorsque le
Saint-Esprit vint sur la Vierge Marie que le Christ fut conçu, et lorsque le même Esprit Saint
descendit sur le Christ pendant sa prière, que le Christ fut poussé à commencer son ministère. Le
Christ Jésus lui-même, avant de donner librement sa vie pour le monde, a de telle sorte organisé le
ministère apostolique et promis d’envoyer le Saint-Esprit, que ce ministère et cette mission sont
tous deux associés pour mener à bien, toujours et partout, l’œuvre du salut.
« À travers toutes les époques, c’est le Saint-Esprit qui “unifie l’Eglise tout entière dans la
communion et le ministère, qui la munit des divers dons hiérarchiques et charismatiques” (LG 4),
vivifiant, à la façon d’une âme [d’où son nom d’Animateur], les institutions ecclésiastiques, et
insinuant dans les cœurs des fidèles le même esprit missionnaire qui avait poussé le Christ luimême. Parfois même, il prévient visiblement l’action apostolique, tout comme il ne cesse de
l’accompagner et de la diriger de diverses manières ».
Dans la mesure où il se considère partie vivante et active de l’Eglise, le Coopérateur sent donc
l’exigence absolue de « vivre en intimité » avec l’Esprit et de l’invoquer souvent et avec insistance,
le sachant présent, de façon mystérieuse mais réelle, dans son cœur [3], comme Celui qui le soutient
dans son engagement apostolique salésien.
27.3.4. Référence à Marie
Dans son œuvre salvifique le Christ a eu comme « Coopératrice » de premier ordre, sa propre Mère,
Marie de Nazareth, prédestinée à ce rôle par la sagesse insondable du Père, soutenue par la présence
amoureuse de son Esprit. Le concile Vatican II lui a reconnu ce titre, en particulier aux numéros 61
et 62 de la constitution dogmatique sur l’Eglise, à laquelle renvoie le paragraphe que nous
commentons.
Le Coopérateur voit et « vénère » en Marie Celle qui,
– « Servante » parfaite du Père, à l’imitation de son Fils,
– a coopéré [dans le passé] et d’une manière toute unique à l’œuvre du Sauveur, comme Mère de
Jésus et Corédemptrice avec Lui,
– et qui, dans le présent également, désormais dans la gloire avec son Fils, « ne cesse d’apporter sa
coopération de Mère et d’Auxiliatrice du peuple chrétien ». Nous savons que le titre d’Auxiliatrice a
été introduit dans la Constitution sur l’Eglise à la suite d’une suggestion précise, avec quelques
autres, du Cardinal salésien Raúl Silva Henríquez, qui participait au Concile. Il n’est pas difficile
d’y reconnaître la Madone de Don Bosco et de ses disciples.
27.4 L’Eglise, coopératrice de Dieu dans l’histoire
Par l’œuvre du Christ et l’envoi de son Esprit, Dieu a suscité l’Eglise pour qu’elle fût, par la
collaboration de tous ses membres, fidèles et pasteurs, la coopératrice visible de son plan le long des
siècles. Le concile Vatican II a adopté cette grandiose vision de foi dès les premières lignes de la
constitution dogmatique Lumen gentium, quand il qualifie l’Eglise de « sacrement universel du
salut » c’est-à-dire « à la fois signe et moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le
genre humain » [4].
Aussi le Coopérateur voit-il dans l’Eglise, le « Corps (visible et organique) du Christ », animé de
façon invisible par son Esprit d’Amour : il s’agit d’une des expressions les plus réalistes de Paul
pour désigner l’Eglise. Le Coopérateur « se sent membre vivant de l’Eglise », parce que, en vertu
des sacrements de l’initiation chrétienne et de sa vocation spécifique salésienne, il en est devenu un
sujet actif et coresponsable [5]. Il voit en elle le « centre de communion de toutes les forces qui
travaillent au salut du monde », suivant le concile Vatican II : L’Eglise, « ce peuple messianique,
bien qu’il ne comprenne pas encore effectivement l’universalité des hommes et qu’il garde souvent
les apparences d’un petit troupeau, constitue cependant pour tout l’ensemble du genre humain le
germe le plus fort d’unité, d’espérance et de salut. Etabli par le Christ pour communier à la vie, à la
charité et à la vérité, il est entre ses mains l’instrument de la rédemption de tous les hommes, au
monde entier il est envoyé comme lumière du monde et sel de la terre (cf. Mt 5, 13-16) » [6]. Parmi
ces forces figure la Famille salésienne et donc l’Association de Coopérateurs, dont la
reconnaissance officielle comme « Association publique de fidèles » garantit l’authenticité et la
validité de sa contribution à l’immense effort déployé pour réaliser le projet du Père.
27.5. Conscience rénovée d’« être en vérité un “Coopérateur de Dieu” » (art 27 § 3)
La contemplation de ces mystères jette une nouvelle lumière sur les aspects les plus profonds de la
vocation du Coopérateur salésien. S’il se comporte comme apôtre séculier salésien, aujourd’hui, à la
place où il vit et travaille au jour le jour, il est vraiment un « “Coopérateur de Dieu” dans la
réalisation de son dessein de salut ». Par sa vie et son apostolat quotidien, dans la mesure où ils sont
authentiques, il travaille pour la réussite définitive de l’histoire, pour la seule chose qui compte
vraiment et ne passera jamais, parce qu’elle s’accroche à l’éternité !
Si le Coopérateur veille à rester attaché sur cette vision merveilleuse, il restera enthousiaste et
courageux dans son travail apostolique. Il partagera la stupeur et la joie de Paul appelé à être
collaborateur de Dieu dans son champ, pour la maison que Dieu construit (cf. 1 Co 3, 1) : « Moi qui
suis le dernier de tous les fidèles, j'ai reçu la grâce d’annoncer aux nations païennes la richesse
insondable du Christ [...]. Je tombe à genoux devant le Père […] : qu’il vous donne la puissance par
son Esprit [...]. Ainsi vous serez capables de comprendre avec tous les fidèles quelle est la largeur,
la longueur, la hauteur, la profondeur... Vous connaîtrez l’amour du Christ qui surpasse tout ce
qu’on peut connaître ». (Ep 3, 8-19, passim).
C’est Don Bosco lui-même qui propose explicitement au Coopérateur cette vision croyante du
dessein divin qui se réalise dans l’histoire. Et cela parce que c’était la sienne, parce qu’il avait du
travail apostolique une conception très élevée et très vive qui nourrissait son zèle : un travail plus
qu’humain, intensément divin ; servir directement les intérêts de Dieu envers l’humanité.
L’article suivant montrera comment il traduisait cette perception globale de sa devise : « Da mihi
animas ». Et cela dans la ligne de saint Paul que nous avons cité. Il est frappant qu’à partir de 1878
il fit imprimer au frontispice de la revue destinée aux Coopérateurs, le Bulletin salésien (fondé
l’année précédente), cette phrase attribuée à saint Denis l’Aréopagite, et reprise avec bonheur par
notre paragraphe du Règlement : « Des choses divines, la plus divine est de coopérer avec Dieu au
salut des âmes ». C’est à cette hauteur qu’il situait le travail de ses Coopérateurs ! Une autre phrase
imprimée au frontispice de la même revue révèle en Don Bosco le souci de donner au verbe
« coopérer » un contenu évangélique encourageant : « Nous devons aider nos frères afin de
coopérer à la diffusion de la vérité». (cf. 3 Jn 8). Pour saint Jean, la « vérité » est la réalité profonde
de Dieu qui s’est manifestée dans le Seigneur Jésus et continue à être révélée aux fidèles par
l’Esprit qui agit dans leur cœur.
Son nom même doit donc rappeler en permanence au Coopérateur l’extraordinaire grandeur de sa
vocation et de son engagement apostolique salésien dans le monde.
[1]. Cf. LG 4, 7c, 12b, 13bc …
[2]. Cf. Bible de Jérusalem, introduction à la lettre aux Ephésiens.
[3]. Rm 5, 5 et LG 4.
[4]. LG 1, ainsi que 9bc et 48b.
[5]. Cf. LG 9-13, 30a, 32b ; AA 2-4.
[6]. LG 9b.
ARTICLE 28
PLACE CENTRALE DE L’AMOUR APOSTOLIQUE
§ 1. Le centre et la synthèse de l’esprit salésien, c’est cette « charité pastorale » que Don Bosco a
vécue en plénitude, rendant présent parmi les jeunes l’amour miséricordieux de Dieu père, la charité
salvifique du Christ Pasteur et le feu de l’Esprit qui renouvelle la face de la terre. Il l’a exprimée
dans sa devise : « Da mihi animas, cœtera tolle ». Il l’a signifiée dans le nom de « Salésiens », en
choisissant comme patron saint François de Sales, modèle d’amabilité, de zèle apostolique et
d’humanisme véritable.
§ 2. Cette charité est, dans le Coopérateur, don qui l’unit dans un même mouvement à Dieu, qu’il
veut servir avec humilité et joie, et aux jeunes qu’il veut sauver avec un amour de prédilection. Elle
est encore une imitation de la sollicitude maternelle de Marie qui intercède pour le Coopérateur et
l’aide à porter chaque jour son témoignage.
Nous avons déjà noté plus haut [1], que cet article fait un tout avec le précédent. L’article 27 a
situé la vocation et la vie spirituelle du Coopérateur dans l’ensemble du dessein de salut : il est
« coopérateur » de Dieu Trinité contemplé et expérimenté comme agissant dans l’histoire. L’article
28 approfondit cette perspective : il indique quelle sera la force et l’attitude spirituelle de fond, la
valeur centrale et globale, qui soutiendra la réalisation de sa vocation de « coopérateur de Dieu » :
c’est « l’amour apostolique », comme le dit le titre, ou la « charité pastorale », dont traite l’article.
Rien d’étonnant à cela : c’est l’amour apostolique qui a animé et anime tous ceux qui travaillent au
plan salvifique de Dieu : le Christ lui-même, Bon Pasteur, son Esprit d’Amour, Marie mère de
l’Amour, l’Eglise communauté d’amour, Don Bosco... Il a sa source dans le Père lui-même, appelé
Amour à l’article 27, et son dynamisme intérieur dans l’Esprit Saint envoyé par le Père et le
Seigneur ressuscité. En acceptant de s’associer à ce grand courant de la « charité » salvifique, le
Coopérateur est immédiatement plongé dans l’expérience vivante de ses relations vitales avec le
Dieu Trinité révélé par le Christ.
Rappelons brièvement que les mots « amour », « charité » (agapè, charitas) sont les noms de
l’amour tel qu’il est pratiqué par Dieu, transmis par Lui à ses fils, l’objet du commandement
« nouveau » que le Christ a réalisé de façon sublime [2]: c’est un amour oblatif et créatif, prêt à se
donner, tellement différent du pauvre amour humain !
Ses qualificatifs « apostolique » ou « pastoral » renvoient au type d’amour-charité qui anime celui
qui est « envoyé » pour servir le prochain : en premier place Jésus Christ, Apôtre par excellence du
Père et Bon Pasteur de l’humanité, et à sa suite tous ses fidèles. C’est un amour-charité qui le met
en contact permanent avec ceux qui, dans l’Eglise, sont « Pasteurs » à un titre particulier en vue
d’un service officiel à leurs frères.
L’article compte deux paragraphes : le premier affirme la place centrale de la charité pastorale
« salésienne » ; le second précise qu’elle est un don et une présence de l’Esprit qui unit à Dieu et
aux jeunes.
28.1. La charité pastorale centre et synthèse de l’esprit salésien (art. 28 § 1)
Il est relativement facile de présenter l’esprit salésien en énumérant, l’une après l’autre, toute
une série de caractéristiques : « le salésien est travailleur, généreux, audacieux, joyeux etc ».
« Saisir un esprit, dit le Chapitre général spécial des salésiens, c’est saisir une “inspiration”
organisatrice, un peu comme l’âme qui envahit le corps entier et le constitue en son unité
complexe » [3].
Comprendre « l’esprit de Don Bosco » c’est s’efforcer d’enter dans son âme et d’en saisir
l’élément le mieux adapté pour expliquer l’homme, son œuvre et son style de vie et d’action. Quel
est le centre vital autour duquel se sont organisées toute la vie et l’action de Don Bosco ? Le
Chapitre général spécial l’a reconnu dans « l’amour apostolique » ou « charité pastorale » du
Fondateur.
« Le type de charité qui donne vie au charisme de Don Bosco, nous dit le P. Viganò, est une
charité “pastorale” caractérisée par une note particulière que nous qualifions de “salésienne”. La
force unifiante de notre Famille doit se chercher dans le type d’amour sacerdotal qui a caractérisé
Don Bosco, une passion irrésistible d’apostolat parmi les jeunes, une façon de sentir, de vivre et de
communiquer les valeurs de l’Evangile. [...] Il avait lui-même résumé ce genre de charité dans la
devise qui est comme le mot d’ordre salésien : “Da mihi animas, cœtera tolle” » [4].
Le Règlement accepte cette relecture de l’expérience de Don Bosco : « Le centre et la
synthèse de l’esprit salésien, c’est cette “charité pastorale” que Don Bosco a vécue en plénitude ».
28.1.1. « Dynamisme juvénile » de la charité chez Don Bosco
La charité pastorale « salésienne » présente donc les insistances, les nuances et le style
caractéristiques de notre Fondateur. L’article 10 des Constitutions des salésiens dont s’inspire notre
article 28 synthétise ce style de charité dans la formule « dynamisme juvénile » : « La charité
pastorale est le centre et la synthèse [de l’esprit salésien] ; elle est marquée par le dynamisme
juvénile qui se manifestait avec tant de force dans notre Fondateur et aux origines de notre Société.
C’est un élan apostolique qui nous fait chercher les âmes et ne servir que Dieu seul ». Nous voici
renvoyés à « l’expérience intense » du premier « Oratoire » dont parle l’article 27 § 1.
Ces expressions font penser à une charité en mouvement, qui a besoin d’agir et de réaliser :
c’est la passion apostolique, toute animée d’ardeur, de générosité, de joie juvénile. La charité
pastorale salésienne n'est pas seulement en faveur des jeunes, elle est « jeune » elle aussi : ce n'est
pas une question d’âge, mais de disposition spirituelle et de comportement effectif.
Cette charité salésienne a sa Source en Dieu et présente Don Bosco comme celui qui la rend
crédible et séduisante pour les jeunes, comme pour dire que la Charité divine s’est faite « juvénile »
à travers Don Bosco. Tout cela, le texte du Règlement l’exprime de façon fort riche en se référant à
l’amour de Dieu-Trinité : « Don Bosco a rendu présent parmi les jeunes :
– l’amour miséricordieux du Père (cf. art. 27 § 1) ;
– la charité salvifique du Christ Pasteur (cf. art. 1 § 1) ;
– et le feu de l’Esprit qui renouvelle la face de la terre (§1).
Il est facile alors de comprendre comment Don Bosco, vivant en étroite communion avec les
Personnes divines, docile et disponible à leur influence, a pu manifester un amour bien au-delà des
possibilités du simple amour humain. En effet, l’amour de Don Bosco a été un amour « de feu » qui
éclaire et brûle, consume et dévore, purifie et « renouvelle », s’émeut et a pitié (est
« miséricordieux »), est empressé et sauve (sollicitude pour le « salut »). C’est la charité chantée par
saint Paul dans sa première lettre aux Corinthiens, et exprimée par Don Bosco dans son opuscule
sur le Système préventif : « La charité est longanime et patiente ; elle souffre tout, mais espère tout
et supporte toutes les contrariétés ». (1Co 13, 4. 7)
28.1.2. Charité exprimée par la devise « Da mihi animas »
Quand un Fondateur choisit une devise pour lui-même et pour ses disciples, il exprime dans une
formule brève et vigoureuse son intention fondamentale et sa disposition spirituelle la plus décisive.
C’est le cas de Don Bosco. Il a choisi la phrase biblique : « Da mihi animas, cœtera tolle » :
[Seigneur] donne-moi les âmes et rien que cela », comme devise personnelle au début de son
sacerdoce [5]. Il la garda bien visible sous ses yeux, écrite sur un carton, qui se voit encore
aujourd’hui dans une des chambrettes du Valdocco. Il en expliqua la signification à Dominique
Savio en lui disant que c’était « une formule familière à saint François de Sales » [6]. En septembre
1884, il voulut qu’elle devint aussi la devise de la Congrégation salésienne [7].
C’est une interprétation accommodatice de Gn 14, 21 : « Le roi de Sodome dit à Abram : “Donnemoi les personnes, et reprends tes biens” ». Faisons deux remarques sur les deux parties de la
devise, pour dire en quel sens elles expriment la charité pastorale de Don Bosco Fondateur.
La formule « Da mihi animas » n'est pas une constatation ni une intention, mais un appel, une
demande faite par Don Bosco au Dieu sauveur. « C’est son invocation jaculatoire, en plus de son
option fondamentale » [8]. (Stella). Elle nous fait penser au « Envoie-moi » du prophète Isaïe (Is 6,
8). Elle laisse entrevoir la conviction que le salut intégral (âme signifie tout l’homme, mais
considéré dans son être le plus profond) est ce qu’il y a de plus important pour la personne
humaine : « Quel avantage un homme aura-t-il à gagner le monde entier, s’il le paie de sa vie ? »
(Mt 16, 26). Elle révèle clairement le zèle ardent du prêtre Jean Bosco qui veut entrer au Paradis
accompagné d’une foule immense de jeunes et de peuple, après les avoir entretenus et nourris au
sein de l’Eglise. Elle exprime la conscience que le travail à faire est au service du plan d’un Autre et
que tout dépend de sa grâce : « Toi Seigneur, donne-moi les âmes, que je puisse te les rendre ! ».
L’expression « cœtera tolle » est la partie antithétique : « da mihi / tolle ! » Elle caractérise la valeur
radicale de l’option de Don Bosco : « Les âmes des jeunes ! Le reste ne m'intéresse pas ! ». En
réalité « Don Bosco veut beaucoup de ces cœtera [9], mais seulement en vue des âmes : argent,
structures éducatives, appui des puissants et des riches. Mais avec un total détachement ; tout est au
service des jeunes : l’apôtre ne doit rien garder pour lui. C’est comme l’écho de la parole de saint
Paul dans son hymne à la charité : si j'avais tous les dons et tous les biens, « mais s’il me manque
l’amour, je ne suis rien ». (1 Co 13, 1-3)
Cette devise de Don Bosco et des salésiens est devenue aussi celle de toute le Famille
salésienne, et donc aussi des Coopérateurs. Elle exprime la volonté ardente de « coopérer avec Dieu
au salut des âmes ».
28.1.3. Charité signifiée dans le nom de « salésiens »
L’appellation « Coopérateur » rappelle au disciple de Don Bosco sa vocation à « coopérer avec
Dieu ». Son nom complet de « Coopérateur salésien » lui rappelle qu’il doit le faire « à la
salésienne », comme un « véritable salésien dans le monde » (art 3), en référence donc à Don
Bosco, mais aussi au saint choisi par lui comme modèle et patron : saint François de Sales.
Les deux choix faits par Don Bosco : la devise « Da mihi animas » et le patron saint François
de Sales sont inséparables. Il choisit le saint genevois comme patron et modèle :
– pour lui-même (troisième résolution de son ordination sacerdotale en 1841),
– pour le premier petit groupe des futurs salésiens (26 janvier 1854),
– pour la « Pieuse Société » fondée le 18 décembre 1859
– et pour l’Association des Coopérateurs que, dans son premier projet de Règlement, il avait
appelée « Pieuse Association de saint François de Sales » (1874).
Il dédia à ce saint son premier Oratoire du Valdocco (1841-1846), sa première église (1853), la
revue destinée aux Coopérateurs, le Bulletin salésien (1877). Dans l’écusson de la Congrégation
salésienne il introduisit le buste de saint François de Sales, docteur éclairé par l’Esprit (1884) [10].
Deux traits de la physionomie morale et de la sainteté de saint François ont séduit Don Bosco et
expliquent son choix :
– l’énergie apostolique, son zèle pour les âmes, pour la défense de la vérité contre l’erreur,
pour la fidélité à l’Eglise catholique ;
– la douceur ou bonté évangélique dans la façon d’exercer ce zèle : « Charité, douceur, bonnes
manières, grand calme, extraordinaire mansuétude » [11].
Le Coopérateur conscient d’être « salésien » regarde donc saint François de Sales comme un autre
révélateur extraordinaire de l’amour de Dieu pour les hommes à sauver. Il veut, nous dit le texte,
imiter son « zèle apostolique ». L’étymologie du mot zèle rappelle l’ardeur du feu qui flambe et le
blason salésien porte à côté du buste de François de Sales un cœur qui dégage des flammes. Il veut
en outre imiter son « amabilité » et son « véritable humanisme ». L’ardente charité salésienne
« cherche à gagner le cœur et s’applique à se faire aimer » (art 15), car il a un sens exquis de la
personne : « Non, Philothée, la dévotion [c’est-à-dire la charité laborieuse et diligente] ne gâte rien
quand elle est vraie, et même elle perfectionne tout [...] ; avec elle toutes les affaires sont expédiées
de la manière la plus suave et la plus aimable » [12].
Il faut souligner le retentissement très personnel de ce paragraphe : il indique Don Bosco
comme modèle inimitable de « charité pastorale salésienne » et, à partir de lui, il renvoie d’une part
à chacune des trois Personnes divines, et de l’autre à la suave figure de saint François de Sales. Ces
modèles sont très élevés ou même divins ! Mais le paragraphe suivant explique au Coopérateur
pourquoi il ne doit pas se décourager devant eux, mais plutôt les invoquer et les suivre.
28.2. Charité, don divin qui unit les deux pôles de la vocation salésienne. (art 28 § 2)
Le premier paragraphe était consacré à Don Bosco et à ses modèles. Le second s’adresse au
Coopérateur pour lui rappeler un principe fondamental de la vie chrétienne et apostolique : une
pareille charité n'est évidemment pas un talent naturel. Il faut la recevoir pour ensuite la rendre
active dans le concret. C’est un don divin, un don de l’Esprit Saint selon la déclaration exaltante de
saint Paul aux Romains : « L’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui
nous a été donné ». (Rm 5, 5), texte cité par le Concile à propos de la charité que doivent pratiquer
les fidèles laïcs [13].
Le Coopérateur ne peut pratiquer une charité « divine » qu’avec la force divine de l’Esprit
d’Amour : ce n’est que si, dans la foi et la prière, il se rend disponible à la grâce, que le Seigneur
ressuscité, au nom du Père, lui envoie son Esprit de Pentecôte, cet Esprit « qui habite dans l’Eglise
et dans le cœur des fidèles comme dans un temple » [14] ; cet Esprit qui l’a poussé vers Don Bosco.
(cf. art 2 § 1). Aucun Coopérateur ne doit désespérer de pouvoir pratiquer cette charité pastorale
exigeante : « il s’appuie sur la fidélité de Celui qui l’a appelé ». (art 2 § 2).
L’amour-charité est unique, mais a deux pôles inséparables, tout comme sont indisssociables
les deux commandements majeurs de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain (Mt 22, 34-40).
L’Esprit qui est dans le cœur du Coopérateur, « l’unit dans un même mouvement à Dieu […] et aux
jeunes », dit notre paragraphe. Il lui greffe un cœur de fils et de serviteur et, à l’imitation de Don
Bosco, « un cœur de père et de maître, capable de se donner totalement » aux jeunes [15]. Celui qui
aime Dieu d’un cœur salésien se sent envoyé pour aimer et sauver les jeunes ; et celui qui aime les
jeunes d’un cœur salésien sent le besoin de trouver en Dieu la force et la façon de les aimer. Son
chemin de sanctification est celui d’une sanctification apostolique, déclare le préambule du
Règlement (§ 3).
La dernière phrase de l’article 28 est là pour donner un nouvel encouragement au
Coopérateur : non seulement l’Esprit d’Amour le soutient et le guide, mais Marie Auxiliatrice, elle
aussi, est à ses côtés. En effet la pratique de l’amour apostolique « est encore imitation de la
sollicitude maternelle de Marie qui intercède pour le Coopérateur et l’aide à porter chaque jour son
témoignage » c’est-à-dire dans sa tâche difficile d’être, partout et toujours, un témoin de l’Amour
infini de Dieu.
[1]. Voir commentaire de l’article 27 au n° 27.1.
[2]. Cf. Jn 13, 34 ; 15, 12s.
[3] ACGS 88.
[4]. Viganò Egidio, La Famille salésienne, in ACG 304, p. 24.
[5]. Ce fut durant ses études au « Convitto » : cf MB XVII 566.
[6]. Saint Jean Bosco, Saint Dominique Savio, chap. VIII. Introduit et traduit par Francis
Desramaut, SDB. Apostolat des Editions, 1978, p. 54.
[7]. Cf. MB II 530 ; XVII 365.
[8]. Stella Pietro, Don Bosco e le trasformazioni sociali e religiose del suo tempo, in Brocardo P. –
Midali M. (dirigé par), La Famiglia salesiana riflette sulla sua vocazione (LDC, Turin 1973) p. 159
et 159-166.
[9]. Stella Pietro, Don Bosco e le trasformazioni sociali … p. 165.
[10]. Cf. MB II 252-254 ; V 9 ; VI 334-337 ; XVII 365. Cf. Stella Pietro, Don Bosco e S. Francesco
di Sales, in Picca J. – Struś J. (dirigé par), San Franceso di Sales e i Salesiani di Don Bosco (LAS,
Rome 1986) 139-160.
[11]. Cf. Jean Bosco, Ecrits spirituels. Textes présentés par Joseph Aubry (Nouvelle cité, Paris,
1979) p. 97-98. Un fait intéressant : en janvier 1890, le P. F. Dalmazzo, sur le désir explicite de Don
Bosco, publia dans la collection des Letture Cattoliche, un opuscule intitulé : Divoto esercizio
proposto ai Cooperatori Salesiani in Apparecchio [préparation] della festa del glorioso loro Patrono
S. Francesco di Sales, 103 pp.
[12]. François de Sales, Introduction à la vie dévote, I, ch. 3.
[13]. Cf. AA 3b et 4fg.
[14]. LG 4 ; AG 4 ; cf. Jn 14, 16-17.
[15]. Cf. RVA art. 1 § 1.
ARTICLE 29
PRÉSENCE SALÉSIENNE DANS LE MONDE
§ 1. Le Coopérateur se sent « intimement solidaire » 1 du monde où il vit et où il est appelé à être
lumière et levain. Il croit aux ressources intérieures de l’homme ; il accueille les valeurs de sa
propre culture ; il accepte les nouveautés avec un sens critique chrétien et intègre dans sa vie « tout
ce qui est bon » 2, surtout si cela plaît aux jeunes.
§ 2. Affronté au mal, il garde confiance, ne se lamente pas inutilement et ne se laisse pas gagner par
la critique négative. Il cherche plutôt à prévenir le mal et le combat avec courage et constance, en
s’ingéniant à multiplier le bien, surtout pour venir en aide aux plus faibles.
1.
2.
Cf. Vat. II, GS 1.
1 Th 5, 21.
Dans le chapitre II consacré à l’engagement apostolique dans la famille, le mariage, le milieu
de vie et de travail, la réalité sociale et culturelle (art 7-12), nous avons vu les engagements concrets
et les finalités majeures que se fixe le Coopérateur.
Il s’agit ici de préciser comment il agit, quelles convictions et quels sentiments intérieurs
l’animent et quels comportements extérieurs typiquement salésiens il révèle. L’article 12 consacré
au témoignage des Béatitudes entre déjà dans cet ordre de considérations.
Comment réagit le Coopérateur en face du monde dans lequel sa vocation salésienne l’appelle
à vivre et à travailler pour y être « lumière et levain » ? Cet article l’explique à deux points de vue :
– face au bien, il se montre optimiste ;
– face au mal, il pratique le courage réaliste.
29.1. Optimisme devant le bien (art. 29 § 1)
La charité pastorale salésienne dicte au Coopérateur qui vit dans le monde une disposition
fondamentale éminemment positive : la « solidarité ». Il n’a pas l’orgueil de se mettre au-dessus ni à
part, pour juger et maudire, se croyant meilleur que les « autres ». Comme chrétien « il se sent
membre vivant de l’Eglise » (art 27). Comme chrétien laïc il se sent partie vivante du monde,
« citoyen » à part entière et coresponsable dans la réalité temporelle.
Il le regarde donc avec amour et veut travailler à le faire progresser en s’y faisant « lumière et
levain ». En cela il imite et représente Dieu lui-même qui « a tant aimé le monde qu’il a envoyé son
Fils unique pour qu’il soit sauvé » (Cf. Jn 3, 16-17). Il imite et représente l’Eglise conciliaire qui
« se reconnaît réellement et intimement solidaire du genre humain et de son histoire » et partage
« les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout
et de tous ceux qui souffrent » [1]. Il imite et représente Don Bosco qui par ses Anciens élèves et
ses Coopérateurs voulait contribuer à améliorer l’avenir de la société : le Coopérateur « travaille
pour le bien de l’Eglise et de la société », dit l’article 3.
Dans cette disposition globale d’estime et de solidarité, le Coopérateur développe en lui trois
dispositions plus précises.
29.1.1. « Il croit aux ressources intérieures de l’homme »
Il croit que, dans sa providence, Dieu créateur et rédempteur a déposé en chacun des ressources
naturelles et des grâces surnaturelles, et l’homme d’action ou l’éducateur peut toujours s’y fier et y
trouver des raisons valables d’espérer.
C’était la conviction de saint François de Sales, « modèle d’humanisme véritable » (art 28 § 1).
C’était celle de Don Bosco, adversaire du jansénisme de son temps : « Un jeune, disait-il, même le
plus mal loti, a toujours un point accessible au bien, une corde sensible » à faire vibrer [2].
Nous avons vu à propos de l’article 15 que tout le Système préventif consistait à « faire appel aux
ressources intérieures de la personne ». Dans les divers milieux où il vit, formés de jeunes ou
d’adultes ou des deux à la fois, le Coopérateur cherche à donner confiance, à confier des
responsabilités, à faire croître les personnes et à répandre l’optimisme.
29.1.2. « Il accueille les valeurs de sa propre culture »
Dans les situations et les événements de ce monde, l’optimisme salésien porte le Coopérateur à voir
davantage le bon côté que les points négatifs, mais sans fermer les yeux sur ces derniers. Bien plus,
il cherche par instinct à découvrir tout ce qui se fait de bien, et dont on parle peu puisque l’opinion
publique ne souligne en général que les tragédies et les scandales : malheureusement « un arbre qui
tombe fait plus de bruit que toute une forêt qui pousse », dit un proverbe chinois.
Il accueille et apprécie tout ce qui est vraiment humain et qui correspond à un aspect de la vocation
et de la dignité de l’homme, en particulier « les valeurs de sa propre culture ». « Il partage avec les
jeunes le goût des valeurs authentiques ». (art 14 § 2). Il écoute donc volontiers l’invitation de saint
Paul aux Philippiens : « Frères, tout ce qui est vrai et noble, tout ce qui est juste et pur, tout ce qui
est digne d’être aimé et honoré, tout ce qui s’appelle vertu et qui mérite des éloges, tout cela,
prenez-le à votre compte. [...] Et le Dieu de la paix sera avec vous ». (Ph 4, 8-9). C’est le texte que
la liturgie du 31 janvier, applique à Don Bosco. C’est aussi le texte que le concile Vatican II a pris
comme orientation générale du dialogue au sein de l’Eglise et avec les non-catholiques, les nonchrétiens et le monde contemporain [3].
L’Association est heureuse de compter parmi ses membres des gens de cultures très diverses,
légitimement fiers de leur propre culture et prêts à la développer dans le sens Chrétien et
salésien [4].
29.1.3. « Il accepte les nouveautés avec un sens critique chrétien »
Le Coopérateur apprécie tous les progrès authentiques : prise en main des choses, dignité et
liberté de toute personne et de tout peuple, égale dignité de l’homme et de la femme, solidarité
toujours plus étroite au niveau interpersonnel, social, national et international.
En face des nouveautés, il n'oppose pas de préjugé négatif ou méfiant. Il est même porté à les
considérer avec faveur, « surtout si cela plaît aux jeunes », puisqu’ils sont par nature attentifs à
l’inédit et qu’un certain nombre sont les antennes sensibles de l’avenir.
Don Bosco aimait ce qui plaisait aux jeunes, sans peur aucune ; dans ses maisons ils se trouvaient
bien et sans inhibitions. Ils pouvaient s’y adonner au sport, à la musique, au théâtre, au tourisme...
Il est clair que tout cela exige du discernement, le « sens critique chrétien » : les nouveautés ne
constituent pas toujours un progrès ; elles sont parfois futiles et même nuisibles, parce que les
marchands de nouveautés manipulent sournoisement les consciences et exploitent la soif naturelle
de changement. C’est pourquoi le Coopérateur suit la règle d’or de saint Paul : « Discernez la valeur
de toute chose. Ce qui est bien, gardez-le » (1 Th 5, 21). L’Apôtre la suggère pour l’évaluation du
don de prophétie, qui est justement un regard sur l’avenir nouveau qui nous vient de Dieu. Celui qui
refuse le présent et ne vise pas l’avenir montre son inaptitude à être éducateur des jeunes !
29.2. Courage réaliste face au mal (art. 29 § 2)
Le Coopérateur n'est pas un naïf. Il ouvre volontiers les yeux sur le bien, mais il voit aussi le mal du
monde et de son époque, cette partie du monde qui est imprégnée de mal et assujettie au Mauvais
dont parle saint Jean dans sa première lettre (1 Jn 2, 15-17 ; 5, 19) : sous bien des formes le mal se
répand dans la réalité d’aujourd’hui. Mais là aussi le Coopérateur a une réaction positive et
courageuse.
En premier lieu « il garde confiance » : l’observation de la nature, la compréhension de l’histoire, et
surtout sa foi lui assurent que la vie finit toujours par triompher des forces de mort. Le projet de
Dieu va de l’avant. Notre monde est un monde définitivement sauvé par la Pâque du Christ ; dans la
patience et même dans la souffrance, cette Pâque ne cesse d’opérer. Même en face des situations les
plus tragiques, le Coopérateur ne peut désespérer ni se décourager. Il écoute l’invitation que Don
Bosco adresse à chaque directeur salésien comme premier « souvenir », le mot d’ordre de sainte
Thérèse, répété par le P. Cafasso : « Que rien ne te trouble ! » [5]. C’est l’écho de la parole de Jésus
aux Apôtres : « Ne soyez pas bouleversés. […] Croyez ce que je vous dis. [...] Ayez confiance :
moi, je suis vainqueur du monde ! ». (Jn 14, 1... 27 ; 16, 33)
« Il ne se lamente pas inutilement et ne se laisse pas gagner par la critique négative », poursuit le
texte. Le Coopérateur refuse de céder à la tendance naturelle de nombreux adultes de louer avec
nostalgie le passé et de gémir sur son temps avec amertume et agressivité. « Celui qui est toujours
prêt à se plaindre n'a pas un véritable esprit salésien », affirme le P. Caviglia [6].
Certes, il n'a pas peur de contester tout ce qui va à l’encontre de la vraie vocation humaine et
spécialement ce qui démolit l’espérance des jeunes. Mais il le fait de façon lucide, loyale, efficace
et courageuse : « Il s’engage à assainir et à rénover... » dit l’article 11 § 1. Il est trop facile de faire
de grands discours le dimanche et puis de se croiser les bras. Le Coopérateur préfère les faits aux
paroles : « il combat le mal avec courage et constance » et n'abandonne pas le terrain aux mauvais
ou aux profiteurs. Don Bosco estimait qu’une bonne partie du mal en ce monde provient davantage
de la paresse des fils de la lumière qui laissent faire, que de la malice des fils des ténèbres ; luimême avait un tempérament de lutteur loyal.
Par conséquent, le Coopérateur « s’ingénie à multiplier le bien ». Plus les mauvais se démènent,
plus le mal se répand et plus le disciple de Don Bosco se sent provoqué à se retrousser les manches
pour agir sur l’opinion publique et chercher des solutions nouvelles pour le bien, surtout quand est
en jeu la situation de faiblesse des jeunes. N'est-ce pas pour cela que l’Association a été fondée ?
« Moyen pratique de se rendre utile à la société et de favoriser les bonnes mœurs ». (Titre du
Règlement 1876). Et l’article 50 cite cette phrase bien significative de notre Fondateur :
« L’Association des Coopérateurs est faite pour secouer de nombreux chrétiens en les tirant de la
langueur où ils gisent, et pour répandre l’énergie de la charité » [7].
[1]. GS 1.
[2]. MB V 367.
[3]. Cf. LG 13b, 16, 17 ; UR 3b, 4hi ; NÆ 2b, 3a, 4b ; AG 9, 22a ; GS 11b, 36b. Ailleurs, le Concile
parle des valeurs « humaines, naturelles, éternelles, positives, morales, socio-culturelles » du monde
que le chrétien reconnaît volontiers et s’applique à développer : cf. GE 1, 2, 5 ; NÆ 2 ; AA 27, 29 ;
PO 17 ; GS 4, 11, 36, 37, 53, 57, 61.
[4]. Voir aussi le commentaire de l’article 12 sur l’évangélisation des cultures.
[5]. MB VII 524.
[6]. Caviglia Alberto, Conferenze sullo spirito salesiano (Turin PAS 1949, stencilé) 14.
[7]. MB XVIII 161.
ARTICLE 30
STYLE D’ACTION
§ 1. Don Bosco fut un homme pratique et entreprenant, un travailleur infatigable et créatif, animé
d’une vie intérieure profonde et ininterrompue. Le Coopérateur, convaincu de la valeur de l’action,
l’enracine dans l’union à Dieu et remplit ses diverses tâches avec décision et zèle ; il est disponible
et généreux.
§ 2. Attentif au réel et aux signes des temps 1, il a le sens du concret, sait discerner les desseins du
Seigneur et s’engage avec esprit d’initiative à donner une réponse aux urgences qui se présentent,
restant prêt à vérifier et à réadapter sans cesse son action.
§ 3. « Travail et tempérance ! » recommandait Don Bosco. Le Coopérateur affronte avec sérénité
les fatigues et les difficultés de la vie. Il accepte la croix qui marque inévitablement le travail de
l’apôtre.
1. Cf. Vat. II, GS 4. 1
La dernière réflexion nous a déjà introduits dans le sujet de cet article. Il ne s’agit pas ici du
« travail professionnel » du Coopérateur : l’article 10 en a déjà parlé pour dire qu’il s’y applique
avec toute sa compétence et son sérieux. Il s’agit plus largement de son « action » ou, mieux encore
peut-être, de l’aspect actif et efficace de sa vie sur tous les terrains et en particulier celui de
l’apostolat. « Le premier point dominant de l’esprit salésien, écrit le P. Ceria, est la prodigieuse
activité tant collective qu’individuelle » [1]. Le commentaire de l’article 28 a souligné comment la
charité pastorale salésienne se caractérise par le dynamisme juvénile et par un zèle ardent « qui a
besoin d’agir et de réaliser ». C’est justement de ce style dynamique qu’il va être question ici.
L’article se divise en trois paragraphes. Le premier présente le style global de l’action du
Coopérateur (« travail »). Les deux autres en présentent quelques caractéristiques propres : le
réalisme souple et le courage prêt au sacrifice (« tempérance »). Le P. Rinaldi le synthétisa dans une
formule magnifique : « Considérée dans son activité, la vie salésienne est travail et tempérance
vivifiés par la charité du cœur » [2].
30.1. Style global d’action animée par le zèle (art. 30 § 1)
30.1.1. Don Bosco est un saint de l’action
L’article commence par parler de notre Fondateur. Don Bosco est sans conteste un des saints qui a
le plus travaillé pour le Royaume et a le plus exalté le travail fait pour le Royaume, la « coopération
avec Dieu pour réaliser son dessein de salut ». C’est fantastique ce que cet homme a réalisé au cours
de ses 73 ans de vie : œuvres de jeunesse (patronages, écoles pour étudiants et pour artisans, centres
pour les vocations), œuvres populaires (en particulier la presse), œuvres missionnaires (onze
expéditions) ; fondation de trois groupes apostoliques (dans l’incompréhension de beaucoup) ;
construction de quatre églises (dont deux sont aujourd’hui des basiliques) ; direction spirituelle (en
particulier par la confession) ; travail d’écrivain populaire (une centaine de livres et opuscules) ;
médiation entre le Saint-Siège et le nouvel Etat Italien ; nombreux voyages (certains très longs :
Paris, Barcelone)... Il est mort de fatigue, « usé ».
Et il insista avec une force extraordinaire auprès de ses fils sur le travail, en leur promettant « du
pain, du travail et le paradis » [3]. Voilà le scandale d’un saint, note le P. Caviglia : il dit plus
souvent « travaillons » que « prions » [4]. « Ne restez jamais sans rien faire : si vous ne travaillez
pas, le diable travaille » [5]; « Celui qui ne sait pas travailler n'est pas salésien » [6]. Sur son lit de
mort, par deux fois, il dit à don Rua : « Je te recommande de dire à tous les salésiens qu’ils
travaillent avec zèle et ardeur. Travail ! Travail ! » [7]
Mais nous voyons que notre texte ajoute : « animé d’une vie intérieure profonde et
ininterrompue » : il ne s’agit donc pas d’un simple travail matériel, même bien fait, mais d’un
travail qui a une « âme », la charité pastorale, la conviction de coopérer avec Dieu créateur et
rédempteur pour son Royaume.
30.2. Le Coopérateur est un homme d’action
Comme son Fondateur, le Coopérateur est « convaincu de la valeur de l’action » : c’est
l’affirmation centrale du paragraphe. Il ne dit jamais « Il n'y a rien à faire ! ». Non : il y a tellement
à faire, toujours ! Nous retrouvons ici la perspective de fond de l’article 27 : les besoins de l’Eglise,
du monde, des jeunes, de mon village, de ma ville, de mon quartier sont nombreux, et nombreux les
besoins ; Dieu m’a invité à agir et m’en a donné la capacité : réaliser, changer ou faire avancer les
choses, à tous les niveaux. Le Coopérateur personnellement ou les Coopérateurs dans leur ensemble
sont appelés par Dieu à « coopérer » à la réussite de son dessein. Et Jésus disait : « Mon Père est
toujours à l’œuvre » (J. 5, 17). Alors, dans ces tâches variées, comment ne pas être « décidé,
disponible, généreux » ? Ou avec un mot peut-être plus typiquement salésien, appliqué aussi à saint
François de Sales (art. 28 § 1) : « zélé » ? Le « zèle », y disait-on, est l’activité ardente, passionnée,
« de feu ».
Il suffira de relever que cette activité n'est pas l’agitation, ni le pur besoin de se remuer, ni la simple
expression d’un tempérament dynamique, et moins encore la démangeaison de réaliser quelque
chose pour s’attirer l’attention ou la louange des autres : c’est une action motivée et animée
intérieurement, « enracinée dans l’union à Dieu » pour qui en définitive il l’accomplit. Le P. Rinaldi
a trouvé, une fois de plus, la formule heureuse de synthèse : il faut acquérir « cette activité
infatigable sanctifiée par la prière et l’union avec Dieu, qui doit être la caractéristique des fils de
Don Bosco » [8].
Activité inspirée d’un amour authentique : « Mes enfants, nous devons aimer non pas avec des
paroles et des discours, mais par des acte et en vérité » (1 Jn 3, 18).
30.3. Sens du concret, créativité, souplesse (art. 30 § 2)
Cette activité intense a des caractéristiques nettement salésiennes, dont notre Fondateur a laissé des
exemples éclairants. Le second paragraphe en signale trois reliées entre elles.
30.3.1. Attention au réel
Celui qui lit la vie de Don Bosco se rend compte que toutes les œuvres qu’il a successivement
fondées n'ont jamais été décidées d’abord en chambre, sur papier, mais au contact de la réalité
vécue, lorsqu’il découvrait les besoins ou les urgences du moment et du lieu, en y discernant un
appel de Dieu : « Je suis toujours allé de l’avant comme le Seigneur m'inspirait et les circonstances
l’exigeaient », a-t-il dit à la fin de sa vie [9].
De même pour tout disciple de Don Bosco, « attentif au réel et aux signes des temps », dans un
contexte de rapides changements socio-culturels et de situations historiques nouvelles et en
évolution. Le Coopérateur ouvre les yeux et les oreilles, il est sensible non seulement au
développement des idées, mais plus encore au concret immédiat des personnes et des événements.
L’appel angoissé d’un curé ou la rencontre d’un groupe de jeunes abandonnés suffira pour
provoquer une action catéchistique ou la fondation d’un patronage à la façon du Valdocco.
30.3.2. Initiative et créativité
Peut-être devra-t-il inventer autre chose qu’une catéchèse ou une école, plus adaptée à la situation...
Don Bosco a été « créatif » (§ 1), plein d’imagination pastorale, non pour le plaisir de lancer des
nouveautés, mais pour essayer des solutions efficaces pour répondre aux besoins. Et plus d’une fois
il a dû risquer et subir les critiques et les incompréhensions d’autrui. Il écrivit un jour à un
Coopérateur, pour l’encourager dans la fondation d’une œuvre salésienne, cette phrase
extraordinaire : « Dans les choses qui sont à l’avantage de la jeunesse en péril ou qui servent à
gagner les âmes à Dieu, je cours de l’avant jusqu’à la témérité ! » [10]. C’est comme saint Paul :
« Ce n'est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné, mais un esprit de force ». (2 Tm 1, 7).
De même chacun de ses disciples « s’engage dans un esprit d’initiative ». Il n'attend pas les
conditions idéales pour commencer. Si des œuvres ou méthodes du passé se révèlent encore
valables, il ne se fait pas scrupule de les utiliser encore. Mais il crée quelque chose de nouveau et
d’adapté (œuvre ou méthode) là où s’en fait sentir la nécessité.
30.3.3. Souplesse fonctionnelle
Toutefois il convient de se méfier du poids de l’habitude et du manque d’attention au réel... La
fidélité à la vie et à son évolution, plus qu’à certaines lois ou structures : voilà le dernier trait
caractéristique de ce comportement en réponse aux besoins. Les personnes et les milieux évoluent,
en particulier aujourd’hui et surtout chez les jeunes, qui sont en outre sensibles à l’avenir. D’où le
double engagement signalé : évaluer périodiquement son action pour en juger l’efficacité réelle ; la
réadapter sans cesse pour lui garder son efficacité selon le rythme de la vie. Le Concile Vatican II
note que la tâche de l’éducateur exige, entre autres qualités humaines, « une aptitude continuelle à
se renouveler et à s’adapter » [11].
Il est clair qu’en tout cela le Coopérateur manifeste son équilibre et refuse de tomber dans la manie
du changement : s’il se réadapte sans cesse, ce n’est pas par fantaisie ni par inconstance personnelle,
mais pour obéir au réalisme apostolique. Il vise des résultats positifs, non pour le plaisir d’une
réussite vaniteuse, mais parce qu’il s’agit du bien des personnes et de la venue du Royaume de
Dieu. Le critère « oratorien » de Don Bosco ne substitue pas les institutions, mais est lié à leur
origine et à leur vitalité.
30.4 Acceptation de la Croix et des fatigues : tempérance (art. 30 § 3)
D’autre part, les réussites ne s’obtiennent pas toujours ! Qui n'a pas ses échecs, ses moments
d’épreuve physique ou morale, de vraie fatigue, d’incompréhension ou de conflit avec autrui ? Don
Bosco n'a certes pas eu une vie facile et pacifique : il fut persécuté par les vaudois, les autorités
civiles anticléricales, et plus grave, par son propre archevêque ! En plus il a souffert beaucoup dans
son corps, il n'a pas « vidé de son sens la croix du Christ ». (1 Co 1, 17 ; cf. Lc 9, 23 ; 14, 27). Il l’a
portée avec un courage serein, en offrant tout pour les jeunes et l’avenir de son œuvre.
30.4.1. Travail et tempérance
Don Bosco a beaucoup parlé de « tempérance ». Il faut bien la comprendre, et saisir pourquoi il
l’a liée à un autre mot, de sorte que la formule « travail et tempérance » est devenue la seconde
devise de ses fils ; elle correspond au « Da mihi animas, cœtera tolle ».
Comme tel, le binôme a sa valeur et les deux points sont inséparable. La deuxième partie de la
devise ne désigne pas une chose à part avec sa propre consistance, ni non plus une chose parallèle à
la première : c’est la première elle-même, mais vue sous l’aspect de ses exigences évidentes.
Comment imaginer une charité pastorale salésienne sans sacrifice ? Le vrai « travail » et la
recherche des commodités personnelles sont inconciliables ! Don Bosco en a averti les salésiens :
« Quand commenceront parmi nous les commodités et les aises, notre Société aura fini son
temps » [12], tandis que « le travail et la tempérance feront fleurir la Congrégation » [13].
30.4.2. Acceptation de la croix
Le salésien, ainsi que le Coopérateur, ne privilégie pas une sorte de mortification plutôt
artificielle : jeûnes, privations douloureuses, flagellations... (même si plusieurs fils de Don Bosco
ont porté le cilice). Sans négliger la mortification à certains moments, il fait en sorte que toute sa vie
soit mortifiée et pénitente, parce que c’est une vie donnée. Dans le concret, sa pénitence c’est :
accepter d’être dérangé, s’ouvrir aux besoins, savoir dire oui au service demandé, renoncer à ce qui
serait plus facile, accepter les fatigues, être patient et sourire au milieu des difficultés quotidiennes...
Voilà la croix la plus habituelle du Coopérateur, et elle est capable de le conduire à la sainteté.
D’autant plus que, peut-être, le Seigneur fera peser à un certain moment sur ses épaules une croix
plus explicite, comme un grand deuil, l’incompréhension de qui aurait dû l’aider, une maladie,
l’échec soudain d’une activité apostolique entreprise avec générosité...
Le plus souvent, la mortification dans la vie du Coopérateur ne se voit pas : elle se mêle à son
activité quotidienne, se cache sous un visage souriant et joyeux, comme les épines dans la tonnelle
de roses [14]. Ce fut bien le cas pour Don Bosco. Mais ce n'est pas pour cela qu’elle n'existe pas. Si
bien que la fameuse « tempérance » est, chez lui, une réalité éminemment positive et un facteur de
maturation, d’équilibre, de sérénité. « Plus qu’une vertu en soi, la tempérance est une disposition
existentielle de fond englobant plusieurs vertus modératrices qui conduisent à la domination de soi,
à la maîtrise du cœur et des passions » [15], au comportement équilibré dans les relations, à
l’humilité et à la simplicité. En particulier elle entre en jeu pour faire du Coopérateur ce témoin des
Béatitudes (cf. art 12), qui obéit au plan de Dieu, refuse la richesse et le luxe, vit sa propre sexualité
avec délicatesse et oblativité, et « croit en la fécondité de la souffrance » et de la non-violence.
[1]. Ceria Eugenio, Annali della Società salesiana I (SEI, Turin 1941)
[2]. In ACS 56 (26 avril 1931) 934.
[3]. MB XII 598.
[4]. Caviglia Alberto, Conferenze sullo spirito salesiano 110.
[5]. MB XIII 433.
[6]. MB XIX 152.
[7]. MB XVIII 493.
[8]. Chapitre général de 1922 ; cette formule est passée dans les Règlements, au chapitre sur la
formation des novices salésiens (éd. 1966, n° 280 § 4). Sur le travail comme collaboration à l’œuvre
de Dieu créateur et rédempteur, le Coopérateur peut lire l’encyclique de Jean Paul II, Laborem
exercens (Rome, 1981).
[9]. MB XVII 127.
[10]. Ep. iii 166 ; MB XIV 602.
[11]. GE 5.
[12]. Du Testament spirituel de 1886, en MB XVII 272.
[13]. MB XII 466 ; XIV 124 ; XV 183.
[14]. MB III 32.
[15]. Viganò Egidio, La temperanza, in Un progetto evangelico di vita attiva (LDC, Turin 1982)
119s. Tout le chapitre est à lire. Voir aussi son commentaire de l’étrenne de 1982, Travail et
tempérance. (ACG 303, p. 55-62).
ARTICLE 31
AFFABILITÉ DANS LES RELATIONS.
§ 1. Le Coopérateur nourrit en son for intérieur une joie profonde et sereine. Il la répand pour
témoigner que le Seigneur l’accompagne de son amour à chaque instant : « Servons le Seigneur
dans une sainte allégresse ! » 1
§ 2. Dans ses relations, il pratique cette bonté affectueuse (amorevolezza) voulue par Don Bosco : il
s’efforce d’être ouvert et cordial, prêt à faire le premier pas et à accueillir toujours avec bonté,
respect et patience. Il tend à susciter des rapports de confiance et d’amitié pour créer autour de lui
un climat de famille fait de simplicité et d’affection. Artisan de paix, il cherche, dans le dialogue,
clarté et bonne entente.
1. Don Bosco, La jeunesse instruite, Prologue (extrait du psaume 100, 2) ; cf. aussi Ph 4, 4 :
lecture de la messe du 31 janvier.
Après le style d’action, le style des relations, toujours sous le signe et l’impulsion de la « charité
pastorale salésienne ». Il est présenté sous les deux aspects de la joie et de l’esprit de famille.
31.1. Joie « profonde et sereine » (art. 31 § 1)
C’est une caractéristique incontestable de l’esprit salésien. Tout vrai salésien est gai, c’est bien
connu. Mais attention ! Notre texte utilise des formules précises et significatives. La joie salésienne
n'est pas seulement la « bonne humeur », ni le « bruit », ni non plus la simple expression d’un
tempérament heureux et peut-être un peu superficiel. C’est une réalité « profonde » que le
Coopérateur « nourrit en son for intérieur » de façon permanente : c’est l’état d’âme de quelqu’un
qui, dans la foi, remet sa propre vie et ses préoccupations personnelles dans les mains d’un Père
infiniment bon : il a conscience de la grandeur de sa vocation, de l’utilité de son travail et de la
fécondité de ses épreuves mêmes.
La joie salésienne est donc une joie sereine, tranquille installée dans le cœur, qui a sa source dans la
« paix » du Ressuscité. Elle est le refus de l’amertume et de l’agressivité ; elle se lit sur le visage et
dans les gestes d’amabilité. Mais elle a besoin de se « nourrir ». De quelle manière ? Par la certitude
de la présence permanente en nous de la vie du Ressuscité avec qui on travaille au grand projet du
Père, et par la fidélité aux inspirations de son Esprit. « Soyez toujours dans la joie du Seigneur ;
laissez-moi vous le redire : soyez dans la joie. […] Le Seigneur est proche » (Ph 4, 4), nous dit saint
Paul le jour de la fête de Don Bosco. C’est un fruit de la vie de grâce !
Mais la joie fait aussi partie de la mission salésienne. Les jeunes attendent de tout disciple de Don
Bosco le témoignage de la joie. Celui qui est souvent de mauvaise humeur quelle image offre-t-il du
Dieu qu’il sert ? Comment peut-il se montrer porteur d’une « Bonne Nouvelle » ? D’un Dieu qui
aime la vie et la liberté ? C’est pourquoi le Coopérateur « répand » la joie, il est porteur de gaieté et
de fête. Comme les jeunes et avec eux, il aime le chant, la musique, les récréations bruyantes, le
théâtre, les promenades...
Il travaille à créer autour de lui ce climat où ils peuvent plus facilement expérimenter
l’efficacité libératrice de la grâce de Dieu.
31.2. Bonté affectueuse et esprit de famille (art. 31 § 2)
Le très riche deuxième paragraphe mériterait un long commentaire : il présente la bonté affectueuse
(amorevolezza) spécifique salésienne, attitude de bonté tout à la fois intérieure et extérieure qui
caractérise les relations du Coopérateur non seulement avec les jeunes mais avec tout le monde :
frères, amis, compagnons de travail et de loisirs, frères et sœurs salésiens, personnes rencontrées
occasionnellement... Nous en avons dit quelque chose quand, à l’article 15, nous avons expliqué le
Système préventif, dont elle constitue le troisième élément (raison, religion, cœur). Nous
connaissons aussi la fameuse Lettre de Rome du 10 mai1884, où Don Bosco présente lui-même
cette bonté affectueuse dans son contexte privilégié : le premier Oratoire du Valdocco. Notre bref
commentaire voudrait souligner quatre points de « l’affabilité dans les relations » (titre),
expressions parmi les plus typiques de la charité pastorale salésienne.
31.2.1. L’accueil
« Le Coopérateur s’efforce d’être ouvert et cordial, prêt à faire le premier pas et à accueillir ».
Le Coopérateur salésien n'est pas fermé sur lui-même, misanthrope, mais un « homme de
relations », car il n’est pas possible d’imaginer un chrétien apôtre avec les traits d’un ermite. Il
assume donc les dispositions qui favorisent le contact. « Ouvert et cordial » évoque le visage
souriant et les mains tendues. Les deux expressions qui suivent sont complémentaires : aller vers
l’autre, recevoir l’autre qui vient. Faire le premier pas vers celui qui est timide ou craintif, vers celui
qu’un sens exagéré de respect tient muet et à l’écart ; supprimer les distances, s’approcher avec
sympathie, « descendre de sa chaire », « se faire petit avec les petits » : Don Bosco ne cessait de
recommander ces attitudes aux siens. Et quand c’est l’autre qui s’approche, il faut l’accueillir
« toujours », lui ouvrir sa porte et son cœur, l’écouter, entrer dans ses intérêts.
Tout cela met en jeu un bon ensemble de dispositions : la bonté, qui cherche le bien de l’autre ;
l’estime et le respect, qui refusent de se l’approprier et reconnaissent, même derrière ses défauts, la
dignité personnelle unique d’autrui ; la patience, qui n'est autre que l’amour constant et
persévérant : « L’amour prend patience » dit saint Paul, et Don Bosco lui fait écho. Tout cela se
résume dans « le sens de la personne » : s’efforcer de considérer chacun à la manière de Dieu, qui
connaît et aime chacun personnellement, sans discrimination (Mt 5, 45), comme le Christ Bon
Pasteur, qui connaît ses brebis et les appelle par leur nom (Jn 10), comme Don Bosco, qui regardait
et aimait de cette façon tous ceux qu’il rencontrait ou qui l’entouraient. Chaque personne est un
univers, un mystère, un frère pour qui le Christ s’est sacrifié (Rm 14, 15).
31.2.2. La bonté affectueuse. La familiarité
La phrase suivante développe les contenus de l’adjectif « cordial » et se termine par le mot
« affection ». Dans les écrits de Don Bosco se trouvent les deux mots « familiarité » et « amorevo
lezza » (bonté affectueuse) qui sont typiquement salésiens. Ils sont équivalents parce que tous deux
indiquent une affection visible, le premier insistant peut-être davantage sur le comportement
extérieur et le second, sur la disposition intérieure du cœur qui aime. Ils évoquent spontanément les
phrases de la lettre de Rome du 10 mai 1884 : « Que non seulement les jeunes soient aimés, mais
qu’ils se sachent aimés » [...]. Sans familiarité, l’affection ne se prouve pas, et sans cette preuve il
ne peut y avoir de confiance. Celui qui veut être aimé doit montrer qu’il aime. Jésus Christ se fit
petit avec les petits et porta nos faiblesses. Voilà le maître de la familiarité ! [...] Que le supérieur
soit tout cœur pour rechercher le bien spirituel et temporel de ceux que la Providence lui a
confiés » [1].
Le salésien est un « homme de cœur », signe visible (au moins un peu) de la tendresse du Père
céleste, de la charité du Bon Pasteur, de la sollicitude maternelle de Marie, comme a dit l’article 28.
C’est un homme sensible, qui ne croit pas devoir être austère et froid pour garder sa « dignité » ou
son « autorité ». Il aime personnellement, comme un frère et un ami : « il cherche à gagner le cœur
et s’applique à se faire aimer » (art. 15). Son affection vraie et personnelle est riche de sentiments :
bonheur et joie dans les rencontres et dans la communion, peine et tristesse dans l’absence ou dans
le partage d’une souffrance.
Pour éviter tout malentendu, il faut se rappeler ici la fin de l’article 15 : « il s’applique à se faire
aimer dans la transparence et la maturité ». Deux mots en or ! En effet la vraie bonté affectueuse
(« amorevolezza ») est aux antipodes de la sensiblerie : « vouloir du bien » à l’autre c’est le vouloir
vraiment, dans le renoncement : à toute recherche égoïste, à tout désir de s’approprier les cœurs
pour sa satisfaction à soi, à toute parole ou geste qui pourraient mal s’interpréter ou troubler, à toute
intimité qui empêcherait de rester ouvert à tous. « Une vision évangélique de la chasteté inspire au
Coopérateur des comportements de délicatesse » (cf. art. 12). La tempérance intervient ici pour
garder la bonté affectueuse dans son authenticité.
Par conséquent, le Coopérateur a un cœur spontané et simple, mais délicat, un cœur tendre mais
ni faible ni mou, une sensibilité réelle mais maîtresse d’elle-même. C’est comme un miracle
d’équilibre, en réalité c’est un don de la grâce de Dieu, par la présence de l’Esprit de charité. Grâce
à lui la bonté affectueuse salésienne a le naturel des fils et filles de Dieu.
31.2.3. Le climat de famille
Ce paragraphe très riche parle aussi du « climat de famille ». En effet, quand le Coopérateur
réussit à « susciter des rapports de confiance et d’amitié », l’affection qu’il manifeste se paie de
retour, et il se crée alors un climat, un milieu, une atmosphère qui caractérise justement une famille.
L’esprit salésien est un « esprit de famille » : il fait que chacun se sent « chez lui », « à son aise »,
mais responsable aussi d’un bien commun.
Il se caractérise par la confiance mutuelle, qui s’exprime surtout à travers deux attitudes :
1) L’intense intercommunication : on éprouve le besoin et la joie de tout partager, comme dans
une vraie famille : opinions, intérêts, projets, joies et peines, expériences et initiatives, et même les
biens matériels. Chacun enrichit tous les autres et s’enrichit lui-même par les autres : les personnes
grandissent ainsi que leur communion.
2) Les rapports actifs se règlent en faisant le moins possible recours à la loi et à l’autorité, aux
règlements et aux convenances, et le plus possible appel aux puissances intérieures de la raison, de
la liberté, du cœur et de la foi. On compte plus sur la persuasion que sur l’imposition, sur l’initiative
et la coresponsabilité que sur le devoir et l’obéissance, plus sur l’amour libre et joyeux que sur la
discipline précise et austère. Cela répond au cri de Don Bosco dans sa Lettre de Rome : « Pourquoi
vouloir remplacer la charité par la froideur d’un règlement ? » [2]
Un des signes les plus sûrs de l’esprit salésien est cet air de aisance, de liberté, de fantaisie, de
joie qui circulent parmi les disciples de Don Bosco et dans les milieux où ils travaillent. Pas de
contrainte ni de peur, on dit ce qu’on pense, on apporte sa contribution personnelle et généreuse, on
invente... Don Bosco lui-même disait : « Les choses faites par obligation ne plaisent pas à Dieu.
Etant lui-même un Dieu d’amour, il veut que tout se fasse par amour » [3].
31.2.4. Les situations possibles de conflit
Une dernière phrase évoque les situations possibles de conflit. Comment être fidèle à « l’esprit
de famille » salésien quand il y a divergence de vues, incompréhension ou heurt avec ceux à qui on
a affaire ? La situation actuelle est marquée par un fait conflictuel très répandu, qui n'épargne aucun
milieu : il suffit d’évoquer la famille, l’école, le milieu de travail, et même la communauté
ecclésiale...
Don Bosco aussi s’est trouvé dans de telles situations tragiques. Il gardait son calme et n'était pas
porté au découragement. Il évitait le choc frontal. Il veillait à prévenir les oppositions possibles. S’il
ne pouvait pas les éviter, il les contournait. Il savait prier, attendre avec fermeté. Mais il n'était pas
porté à abandonner ses projets quand il les savait voulus par Dieu.
En cas de conflit, le premier mouvement du Coopérateur est de chercher à clarifier les choses par un
dialogue sincère et serein. Puis il fait son possible pour trouver un point de convergence et un
accord. Il évite la critique destructrice et la contestation stérile [4]. Selon l’article 12, « Il est
convaincu que la non-violence est un levain de paix et que le pardon construit la fraternité ».
Souvent, il lui faudra cette attitude de force chrétienne qui s’appelle la « patience », mais la patience
qui s’entoure de prière, de pardon et d’espérance : « La charité trouve sa joie dans ce qui est vrai,
supporte tout, […] espère tout ». (1 Co 13, 7).
[1]. MB XVIII 111s.
[2]. MB XVIII 111.
[3] MB VI 15.
[4]. Voir le commentaire de l’article 29 § 2.
ARTICLE 32
PRIERE SIMPLE ET VITALE.
§ 1. Les exigences de l’appel évangélique et l’expérience personnelle enseignent au Coopérateur
que, sans l’union au Christ Jésus, il ne peut rien faire 1. De Lui il reçoit l’Esprit qui l’éclaire et le
fortifie jour après jour.
§ 2. Marquée de l’esprit salésien, sa prière est simple et confiante, joyeuse et inventive, imprégnée
d’une intense ardeur apostolique. Surtout, elle adhère à la vie et se prolonge en elle.
§ 3. Le Coopérateur transforme sa vie en une liturgie de louange : travail et détente, initiatives
apostoliques, joies et souffrances, tout est vécu dans le Seigneur et devient une offrande qui lui est
agréable et une « hymne à sa gloire » 2.
1. Cf. Jn 15, 5 et Vat. II, AA 4.
2. Cf. Vat. II, LG 34 ; et les oraisons de la messe du 31 janvier.
Centré sur l’ardente charité pastorale, qui le résume d’ailleurs, l’esprit salésien imprègne aussi la
prière du Coopérateur. Mais avant de décrire les caractéristiques salésiennes de cette prière (§ 2),
l’article en souligne la nécessité (§ 1), puis il en dégage le sens de louange et de glorification de
Dieu qui traverse toute sa vie (§ 3).
32.1. Nécessité de l’union à Jésus Christ (art. 32 § 1)
A dire vrai ce n'est pas directement la nécessité de la prière qui est soulignée dans le premier
paragraphe, mais plus largement et profondément, celle de « l’union à Jésus Christ ». Celle-ci
s’exprime certainement dans les gestes de la prière et des sacrements, mais aussi dans la disposition
du cœur uni à Jésus vivant dans une communion de foi et d’amour. Cette communion peut se vivre
à tout instant, à travers toutes les activités et les situations. C’est la réalité et la qualité de cette foi et
de cet amour qu’il faut évaluer !
32.1.1. Chrétien uni à son Seigneur
Il est évident que le Coopérateur doit être uni au Seigneur Jésus, pour peu qu’il ait compris sa
vocation chrétienne et salésienne. Comme chrétien appelé à l’apostolat, il accueille la parole que
Jésus a adressée à tous ses disciples : « Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. De même que le
sarment ne peut pas porter du fruit par lui-même s’il ne demeure pas sur la vigne, de même vous
non plus, si vous ne demeurez pas en moi. […] Celui qui demeure en moi, et en qui je demeure,
celui-là donne beaucoup de fruit, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire ». (cf. Jn, 15, 56). L’union vitale au Christ est une nécessité absolue pour qui veut porter des fruits de sainteté
personnelle et de fécondité apostolique.
Le Concile l’a rappelé à tous les laïcs : « Le Christ envoyé par le Père étant la source et l’origine de
tout l’apostolat de l’Eglise, il est évident que la fécondité de l’apostolat des laïcs dépend de leur
union vitale avec le Christ, selon cette parole du Seigneur : “Celui qui demeure en moi [...]” » [1]
Après avoir dit que cette vie d’intime union avec le Christ se nourrit des aides spirituelles que lui
donne l’Eglise, s’expérimente dans le quotidien de la vie, « en remplissant parfaitement les
obligations du monde », et se développe aussi dans la mesure où ils exercent leur activité selon la
volonté de Dieu, il ajoute : « Ni le soin de leur famille ni les affaires temporelles ne doivent être
étrangers à leur spiritualité, selon ce mot de l’Apôtre : “Tout ce que vous faites, en paroles ou en
œuvres, faites-le au nom du Seigneur Jésus-Christ, rendant grâces par Lui à Dieu le Père” (Col. 3,
17) » [2].
Donc une profonde communion avec le Seigneur Jésus, vécue dans l’ordinaire de la vie. Le Concile
précise ensuite qu’« une telle vie exige un continuel exercice de la foi, de l’espérance et de la
charité » :
– foi : pour reconnaître Dieu présent « toujours et partout », pour discerner le Christ présent
dans l’Eucharistie, dans les sacrements, dans les petits et les pauvres ; pour « juger sainement du
vrai sens et de la valeurs des réalités temporelles » ;
– espérance : pour refuser « la servitude des richesses », pour s’adonner aux tâches terrestres
sans cesser de tendre vers les biens éternels, pour être forts dans l’adversité ;
– Charité : pour faire du bien à tous avec droiture ; pour s’aider les uns les autres, pour vivre
réellement l’esprit des béatitudes, y compris la persécution pour la justice [3].
Le moins qu’on puisse dire est qu’il ne s’agit pas d’une « communion avec le Christ » superficielle
ou sentimentale ! C’est la vie elle-même, « cachée avec le Christ en Dieu », c’est-à-dire orientée,
animée et transformée par la vision chrétienne des choses et par la charité chrétienne, dans l’Esprit
Saint. Et cela vaut pour le Coopérateur en y ajoutant les précisions propres à la vision salésienne de
la foi et de la charité pastorale.
32.1.2. Coopérateur chrétien uni à son Seigneur
Comme chrétien, appelé sur la route salésienne, le Coopérateur perçoit davantage encore la
nécessité de sa communion de foi et d’amour avec le Christ et, par son intermédiaire, avec le Père,
dans l’Esprit Saint. Il suffit de se rappeler les articles 2 (Chrétien appelé) et 7 (Apostolat séculier) et
surtout les articles 27, 28 et 30 § 1 : il serait insensé et ridicule de prétendre « suivre le Christ
Jésus ; Homme parfait » (art. 7), être « Coopérateur de Dieu », faire « la plus divine des choses
divines » (art. 27), mettre au centre de sa vie la charité pastorale pour être signe et porteur de
l’amour du Bon Pasteur pour les jeunes (art. 28)... sans vivre uni à Jésus, « le Ressuscité qui est
avec nous tous les jours » (art. 27). D’autant plus que c’est de Lui seul qu’il peut recevoir l’Esprit,
qui, jour après jour, lui communique la lumière et la force divines dont il a radicalement besoin.
C’est donc un problème de fond pour le Coopérateur que d’avoir une foi vivante réelle : adhérer
totalement au Christ, communier avec Lui, fixer sur Lui son regard et son esprit fixés ! Il doit
souvent l’évaluer, et prendre les moyens pour la maintenir et la développer, en se rappelant que
notre Fondateur, Don Bosco, a été défini « l’union avec Dieu ». Le reste de l’article et les articles
33, 34 et 35 en indiquent les moyens principaux.
32.2. Les caractéristiques salésiennes de la prière (art 32 § 2)
Pour entrer maintenant dans le sujet de la prière explicite, il faut tout d’abord dire qu’il n'existe pas
de « prière salésienne », mais qu’il y a certainement un style salésien de la prière chrétienne et
ecclésiale, tant personnelle qu’en groupe. Ce paragraphe 2 en décrit quelques traits, qui peuvent se
répartir en quatre séries.
32.2.1. Simplicité et confiance
La prière du salésien Coopérateur est « simple » dans son inspiration évangélique, sa quantité et sa
forme extérieure. Il sent Dieu proche de lui et fait l’expérience vivante de sa paternité toujours
accueillante.
Il n’aime pas les prières longues et fatiguantes (naturellement celui qui, spontanément, veut prier
davantage peut le faire), les formules recherchées, les rites compliqués, les démonstrations trop
extérieures ou émotives : sa prière n'est pas aristocratique, mais d’un membre du « peuple de
Dieu ». D’autres Fondateurs ont prescrit, aux membres de leur tiers ordre une série d’exercices ou
de formules particuliers. Don Bosco est beaucoup plus sobre : à ses Coopérateurs il ne demande
rien d’autre que les pratiques du « bon chrétien » : l’approche des sacrements, la récollection
mensuelle, et comme pratique spéciale quotidienne un Notre Père et un Je vous salue Marie pour le
Pape [4].
32.2.2. Vivacité et joie
Mais simple ne veut pas dire passive. Don Bosco a toujours voulu des liturgies belles, « de bon
goût » avec des chants et de la musique, avec une variété équilibrée qui maintient en éveil
l’attention du cœur, rénove la joie intérieure et fait expérimenter comme il est beau d’être avec
Dieu : « Servons le Seigneur dans une sainte allégresse ! » (art. 31 § 1).
Il peut arriver qu’un Coopérateur traverse une période d’aridité spirituelle : un supplément de foi le
conduira alors à une prière plus humble et plus suppliante, mais jamais « ennuyée ».
32.2.3. Ardeur apostolique et présence des jeunes
La prière du Coopérateur est celle d’un serviteur du Royaume de Dieu, d’un « missionnaire des
jeunes » animé de la charité pastorale salésienne. Elle est toute traversée d’un souffle apostolique
qui se fait l’appel insistant du « Da mihi animas ! » et du « Que ton règne vienne ! ». Elle est pleine
des intérêts de l’Eglise universelle et particulière, de la Famille salésienne, de l’Association et du
Centre.
Elle est une prière pour les jeunes en particulier, pour que l’effort consenti pour leur salut porte du
fruit et, quand c’est possible, avec les jeunes en style jeune. Voici un témoignage : une Coopératrice
entrait, de temps en temps, dans la chapelle salésienne avec en main la liste de tous les garçons et
filles de son patronage et de son catéchisme, et elle faisait défiler devant le Seigneur ou devant la
Vierge Marie chacun de leurs noms, chacun de leurs visages : elle ne priait pas seulement pour eux,
mais en leur nom. Elle disait : « C’est une prière durant laquelle je ne me suis jamais ennuyée ».
32.2.4. Avant tout elle colle à la vie et se prolonge en elle
Le Coopérateur veille à ce qu’il n'y ait pas de barrières ni de parallélisme entre sa prière et sa vie. Il
prie d’un cœur sincère, refuse le conformisme et le formalisme, veut des paroles authentiques, des
gestes dignes, des célébrations qui marquent la vie pratique, pour la transformer peu à peu en
liturgie et en culte spirituel, selon le paragraphe 3. Il vaut la peine d’y réfléchir, parce qu’il s’agit de
ce que notre tradition appelle la « piété salésienne ». L’article 31 § 1 en a déjà dit quelque chose à
propos de l’union à Dieu dans l’action quotidienne.
32.2.5. La vie, lieu de prière diffuse
La piété salésienne ne s’identifie pas avec les « exercices de piété », même si elle les aime et les
pratique. La piété salésienne est une disposition du cœur : c’est la manière théologale d’accomplir
les différentes activités de la journée, avec foi et amour, avec Dieu et pour Lui.
Chose difficile et exigeante ! C’est justement pour cela que la prière explicite se conçoit non comme
une activité refermée sur elle-même, mais comme une aide, une orientation, une éducation patiente
à cette vie de don de soi. Alors elle passe dans la vie même, « se prolonge en elle », et devient
« esprit de prière » : on retrouve dans l’action le Dieu vivant rencontré dans la prière explicite, et
l’action devient le lieu d’une « prière diffuse » très profonde.
Une rédaction précédente, qui a disparu par souci de simplification, l’exprimait comme suit : « En
imitant Don Bosco, ouvert au monde concret et en même temps toujours uni à Dieu, le Coopérateur
s’efforce de transformer son travail même en prière et en dialogue profond avec Lui. Il découvre
dans la foi sa présence continuelle en lui-même, en ses frères et dans les événements, et il fait tout
par amour de Dieu » [5].
Il arrive alors que, pendant le travail même, une prière spontanée et informelle envahit son cœur et
monte souvent aussi à ses lèvres, sous forme d’une oraison jaculatoire, explicitement recommandée
par Don Bosco selon l’enseignement de saint François de Sales. Ces humbles appels sont, pour ainsi
dire, la prière « de la vie », le dialogue simple, cordial, spontané, rapide, avec le Christ, avec le
Père, avec l’Esprit, avec Marie. Ce sont les circonstances mêmes de la vie qui provoquent et
nourrissent ce dialogue : elles portent le Coopérateur à remercier Dieu des belles et bonnes choses
qu’il voit, à crier au secours devant la souffrance, à lui demander pardon pour tout péché qu’il
rencontre, à le supplier de soutenir et de féconder son effort. Et ainsi, s’il est toujours vrai que la
prière porte à donner sa vie, il est tout aussi vrai, pour le Coopérateur, que la vie donnée porte à la
prière et à une profonde communion d’amour avec Dieu.
32.3. Le sens de la louange et de la gloire de Dieu. (art 32 § 3)
Le dernier paragraphe est dans la ligne de cette dernière réflexion, mais souligne un élément typique
de la spiritualité de Don Bosco : le sens vif de la louange et de l’action de grâce, et le sens vif de la
gloire de Dieu. En effet Don Bosco employait très souvent l’expression : « travailler pour la gloire
de Dieu et le salut des âmes ». Conscient de tout ce qu’il reçoit de Dieu, le Coopérateur salésien
répond par un Magnificat vibrant et une louange non seulement des lèvres, mais de la vie même
avec toutes ses composantes : vécue « dans le Seigneur », c’est-à-dire en fidélité à sa volonté, avec
foi et amour, elle peut s’offrir comme un don. C’est exactement ce que saint Paul appelle le « culte
spirituel » (Rm 12, 1), l’exercice intense du sacerdoce baptismal, si magnifiquement expliqué par le
Concile pour les laïcs dans la constitution dogmatique Lumen gentium : « [Aux laïcs] qu’il s’unit
intimement dans sa vie et dans sa mission, [le Christ] accorde en outre une part dans sa charge
sacerdotale pour l’exercice du culte spirituel en vue de la glorification de Dieu et le salut des
hommes. C’est pourquoi les laïcs reçoivent, en vertu de leur consécration au Christ et de l’onction
de l’Esprit-Saint, la vocation admirable et les moyens qui permettent à l’Esprit de produire en eux
des fruits toujours plus abondants. En effet, toutes leurs activités, leurs prières et leurs entreprises
apostoliques, leur vie conjugale et familiale, leurs labeurs quotidiens, leurs détentes d’esprit et de
corps, si elles sont vécues dans l’Esprit de Dieu, et même les épreuves de la vie, pourvu qu’elles
soient patiemment supportées, tout cela devient “offrandes spirituelles, agréables à Dieu par Jésus
Christ” (1 P. 2, 5) ; et dans la célébration Eucharistique ces offrandes rejoignent l’oblation du Corps
du Seigneur pour être offertes en toute piété au Père. C’est ainsi que les laïcs consacrent à Dieu le
monde lui-même, rendant partout à Dieu dans la sainteté de leur vie un culte d’adoration » [6].
Mais pour arriver à cela il faut éduquer le cœur à la contemplation de Dieu.
[1]. AA 4a.
[2]. AA 4a.
[3]. AA 4bcdef.
[4]. Cf. RDB VIII 2, 3, 4.
[5]. Elle peut se lire dans Atti e Documenti del 2° Congresso mondiale Cooperatori Salesiani (Rome
1985) 84.
[6]. LG 34.
ARTICLE 33
PAROLE ET SACREMENTS
§ 1. Pour alimenter sa vie de prière, le Coopérateur a recours aux sources spirituelles que lui offrent
l’Eglise et l’Association. Il prend une part active à la liturgie ; il valorise aussi les formes de piété
populaire qui peuvent enrichir sa vie spirituelle.
§ 2. Chaque jour il se réserve un certain temps pour le dialogue personnel avec le Seigneur. Par la
lecture et la méditation si possible quotidiennes de la Parole de Dieu, il apprend à voir et à juger
toute chose à la lumière de Dieu.
§ 3. Fidèle aux enseignements de Don Bosco, il s’approche souvent et avec foi des Sacrements 1.
Dans l’Eucharistie il puise la charité pastorale à sa Source. Dans le sacrement de la Réconciliation,
il rencontre la miséricorde du Père et il imprime à sa vie une dynamique de conversion continue qui
le fait grandir dans l’amour.
1.
Cf. RDB VIII, 4.
L’article 33 passe aux moyens « pour alimenter la vie de prière » du Coopérateur : de façon globale
(§ 1), puis plus en détail : la Parole (§ 2) et les Sacrements (§ 3).
33.1. La liturgie et la piété populaire (art. 33 § 1)
33.1.1. La liturgie
Ce paragraphe s’inspire de près du décret de Vatican II sur l’apostolat des laïcs (Apostolicam
actuositatem) : « Cette vie d’intime union avec le Christ dans l’Eglise est alimentée par des
nourritures spirituelles communes à tous les fidèles, en particulier par la participation active à la
sainte liturgie » (4a). Le Coopérateur est évidemment ouvert au renouveau liturgique promu par le
concile Vatican II, tant pour lui-même que pour l’animation de la liturgie dans sa famille, dans sa
paroisse et auprès des jeunes. Il entre volontiers dans les trois rythmes selon lesquels l’Eglise
sanctifie le temps et la vie de ses membres.
– Le rythme journalier : quand il le peut, le Coopérateur prend volontiers en mains le livre des
Heures pour offrir à Dieu la prière des Laudes ou des Vêpres ou des Complies, car cette liturgie
n'est pas réservée aux prêtres ou aux sœurs : elle est vraiment la prière officielle publique de tout le
peuple de Dieu, elle est sa prière ; elle est donc proposée à tous, même si certains reçoivent le
mandat de la prier au nom de tous (non à leur place) [1].
« Les laudes, comme prière du matin, et les vêpres, comme prière du soir, qui d’après la vénérable
tradition de l’Eglise universelle, constituent les deux pôles de l’office quotidien, doivent être tenues
pour les heures principales et elles être célébrées en conséquence » [2].
– Le rythme hebdomadaire : le Coopérateur célèbre avec ferveur le dimanche, jour de la
résurrection du Christ et de l’assemblée Chrétienne [3], jour « salésien » aussi parce que dans bien
des cas il réalise la trilogie typiquement salésienne : « travail (apostolique), piété et joie ». Il veille à
ne pas céder, comme trop de gens aujourd’hui, à la tentation de banaliser et de laïciser le dimanche :
à peine une petite heure pour Dieu (pour ceux qu’y pensent encore !), et tout le reste pour l’égoïsme
personnel ! Après quoi on reprendra avec dégoût, le travail habituel.
Le vrai dimanche, au contraire, donne du courage pour toute la nouvelle semaine, car la
construction du Royaume du Père continuera et son projet ira de l’avant !
– Le rythme annuel : le Coopérateur « prend une part active » à l’année liturgique [4], avec ses
fêtes si belles et rénovatrices, que Don Bosco prenait soin de bien préparer : grâce à elle, les
mystères du salut du Christ pénètrent progressivement dans la vie personnelle et celle-ci devient peu
à peu un « mystère » de joie, de douleur et de gloire secrète dans le Christ. Le Coopérateur possède
un missel chez lui et il trouve le temps d’en lire quelques pages, pour respirer l’air pur du dimanche
et des saisons chrétiennes.
33.1.2. La piété populaire
Le Concile approuve les « pieux exercices du peuple chrétien », du moment qu’ils sont conformes
aux lois et aux normes de l’Eglise [5]. La « piété populaire », louée par Paul VI dans son
exhortation apostolique Evangelii nuntiandi n° 48, va encore plus loin. Le Coopérateur, n'est pas un
aristocrate spirituel, mais un chrétien à l’âme simple ; il apprécie ces formes de piété et les utilise
pour lui-même et pour les autres, avec un sens pédagogique et pastoral salésien, comme faisait Don
Bosco, sans tomber dans le « bigoterie ». L’expérience lui dit tout le bien que peuvent faire le
Chemin de Croix, le chapelet, le mois de Marie, les neuvaines préparatoires aux fêtes, une
procession, un pèlerinage... et, à plus forte raison, le culte du Saint Sacrement, selon les normes
liturgiques. Don Bosco a toujours chaudement recommandé à tous, en particulier la visite au Saint
Sacrement, rencontre facile, cordiale et encourageante avec le Seigneur vivant parmi nous.
33.2. La prière personnelle et l’écoute de la Parole (art. 33 § 2)
33.2.1. La prière personnelle quotidienne
Il ne faut pas sauter cette petite phrase si précieuse : « Chaque jour, [le Coopérateur] se réserve un
certain temps pour le dialogue personnel avec le Seigneur ». « Se réserve un certain temps » : cela
va de soi. Et pourtant… La vie moderne nous entraîne dans un tourbillon d’occupations et de
préoccupations ! Reste-t-il un peu de temps pour rencontrer le Seigneur « face à face » et dialoguer
avec Lui dans l’humilité, la joie et la simplicité ? Celui qui aime trouve ce temps, le matin ou le
soir, au moment qu’il choisit à sa convenance. Il le trouve, celui qui veut maintenir vivante cette
indispensable communion de foi et d’amour avec Lui (voir le commentaire de l’article. 32).
Mais c’est peut-être un problème d’attention intérieure plus que de temps, d’espace psychologique
plus que d’espace chronologique. Il y a des Coopérateurs et des Coopératrices qui font
régulièrement une fervente prière du matin dans leur voiture ou dans le bus, en allant au travail. Et
nous avons aussi parlé de la « prière diffuse » mêlée au travail tout le long de la journée. Il reste
qu’un moment, même bref, donné à une prière explicite, dans le recueillement et « dans le secret »
(Mt 6, 6), offre d’habitude plus de capacité de renouveler la communion avec le Seigneur.
Quand aux contenus et aux formes de ce dialogue, le livre Cooperatori di Dio en parle
amplement [6].
33.2.2. L’écoute de la parole
La seconde phrase invite le Coopérateur à la « lecture et à la méditation si possible quotidiennes de
la Parole de Dieu ». C’est en liaison étroite avec ce qui précède : peut-il y avoir « dialogue » si les
interlocuteurs parlent tous les deux en même temps ? Le chrétien bien éduqué, conscient d’être fils
et serviteur appelé par grâce, commence toujours le dialogue dans le silence ; il laisse Dieu prendre
la parole le premier, il écoute et médite... Alors lui vient la réponse, plus facile et plus juste !
Le mouvement biblique, le Concile et la Liturgie rénovée ont donné une grande importance à la
place que la Parole de Dieu (surtout l’Evangile) a et doit avoir dans la vie de l’Eglise et de ses
membres, en particulier des laïcs : « Le saint Concile exhorte de façon insistante et spéciale tous les
chrétiens […] à apprendre, par la lecture fréquente des divines Ecritures, “la science éminente de
Jésus-Christ” (Ph 3, 8) » [7]. Et le Synode extraordinaire de décembre 1985 a appelé la Parole et la
liturgie « les sources dont vit l’Eglise ».
Sur ce point peut-être l’Association devrait aider et encourager davantage ses membres, comme le
font beaucoup d’autres Mouvements laïcs. Le Coopérateur devrait trouver chaque jour un court
moment pour méditer quelque passage ou phrase de l’Evangile : « lecture et méditation si possible
quotidiennes », dit l’article : c’est à combiner avec la prière personnelle. Si vraiment ce lui est
impossible, il peut chercher autre chose : préparer un soir par semaine les textes liturgiques du
dimanche... L’Association devrait fournir des moyens et de l’aide pour la formation biblique de ses
membres, par exemple des cours d’été...
En plus de la valeur irremplaçable du contact avec Dieu à travers sa Parole, le fruit principal est
bien indiqué : il s’agit d’acquérir une mentalité chrétienne, la capacité d’exercer le « sens critique
chrétien » (art. 29 § 1) sur le monde et sur les événements, la force de faire des choix opportuns, et
surtout un amour croissant pour le Seigneur et pour son Règne.
33.3. Eucharistie et Réconciliation (art. 33 § 3)
Tout membre de la Famille salésienne sait très bien comme Don Bosco a insisté sur ces deux
sacrements auprès de tous : salésiens, Filles de Marie Auxiliatrice, jeunes gens, Coopérateurs et
fidèles des paroisses. Il recommandait surtout de s’en approcher avec vérité, c’est-à-dire avec foi,
en étant vigilant contre la terrible tentation de l’habitude formaliste, et avec fréquence (« avec la
plus grande fréquence ») [8] : à cause des immenses bienfaits qu’en retirent ceux qui s’en
approchent avec foi. La doctrine du Concile et le renouveau liturgique offrent de précieux
approfondissements à la « piété salésienne sacramentelle » et la complètent bien. Ce n'est pas ici le
lieu d’en parler : Voir l’exposé abondant qu’en fait la troisième partie de « Cooperatori di Dio : la
gioia di ricevere e di offrire » [9]. Il suffira ici de relever l’aspect précis sous lequel le RVA
recommande les deux sacrements.
33.3.1. L’Eucharistie
« Dans l’Eucharistie [le Coopérateur] puise la charité pastorale à sa Source » : le S majuscule
indique qu’il s’agit de la personne même du Christ. De fait, l’Eucharistie célèbre, en le rendant
présent sous les signes sacramentels, tout le mystère insondable de l’Amour sauveur du Christ, le
mystère de son Cœur transpercé « source de l’Esprit salésien » (cf. art. 26), son offrande au Père
dans laquelle prend place et valeur l’offrande de la vie du Coopérateur dont parle l’article 32 §
3 [10].
Et la « communion » permet au Coopérateur d’assimiler peu à peu cette charité du Bon Pasteur.
Pour désirer ce mystère et y participer, il suffit d’un peu de foi éclairée, d’un peu de la conviction
que le Concile a essayé de communiquer à tous : « La sainte Eucharistie contient tout le trésor
spirituel de l’Eglise, c’est-à-dire le Christ lui-même, lui notre Pâque, lui le pain vivant [...]
L’Eucharistie est bien la source et le sommet de toute l’évangélisation [...] » [11].
33.3.2. La réconciliation
Cooperatori di Dio résume la signification de ce grand sacrement en ces termes : « C’est la
célébration de la Miséricorde sans limites du Père pour ses enfants faibles et pécheurs. Ils viennent
pour être réconciliés avec le Père et avec leurs frères dans l’Eglise : ils reçoivent le pardon de leurs
péchés, ils sont décidés à mieux aimer et rendus capables de le faire » [12]. L’essentiel de ces
affirmations se trouve dans notre paragraphe. Il faut souligner en particulier la considération que ce
sacrement reçu « souvent et avec foi » empêche le Coopérateur de s’endormir spirituellement, le
convertit chaque fois un peu plus et lui offre une grâce spéciale de croissance chrétienne et
salésienne. C’est la pratique de ce sacrement qui fournira à l’Association des membres forts,
persévérants et toujours plus généreusement engagés.
Que signifie concrètement « avec fréquence » ? Pour Don Bosco cela signifie « chaque mois » : en
effet il demande au Coopérateur d’insérer la confession dans l’exercice mensuel de la « bonne
mort » (récollection mensuelle) [13]. C’est une indication : elle permet au Coopérateur de se
comporter en toute liberté, comme il le croit mieux.
Autre indication utile : se souvenir que Don Bosco établissait un lien entre la « direction
spirituelle » et la confession, (même s’il s’agit en soi de deux choses différentes). Le confesseur qui
reçoit régulièrement les aveux de son pénitent devient aussi son père spirituel : il est en bonne
position pour juger, donner des conseils opportuns, encourager... [14]
[1]. Cf. SC 84, 100.
[2]. SC 89.
[3]. SC 106.
[4]. SC 102.
[5]. SC 13.
[6]. Voir les pages 288-294 et 322, (prier en fils de Dieu responsable ; les quatre chants de l’âme
chrétienne ; les quatre horizons de la prière universelle ; et les pages 350-401 (rythmes de ma
prière : matin et soir).
[7]. DV 25a ; cf. AA 4c ; GS 4a, 11a, 44b.
[8]. RDB VIII 4.
[9]. Cooperatori di Dio 203-279.
[10]. Cf. LG 34 qui est cité dans le commentaire de l’article 32 § 3 : la « liturgie de la vie » devient
possible par la liturgie de la messe.
[11]. PO 5b.
[12]. Cooperatori di Dio 253.
[13]. RDB VIII 2.
[14]. Cf. Cooperatori di Dio 276-279.
ARTICLE 34
MOMENTS FORTS DE DISCERNEMENT
§ 1. Chaque mois le Coopérateur se réserve un temps d’arrêt et de recueillement pour assurer la
croissance de sa vie spirituelle et l’efficacité de son apostolat 1.
§ 2. Chaque année l’Association lui offre, dans les Exercices spirituels, une occasion privilégiée de
conversion et de reprise. Confrontant sa vie avec l’Evangile et avec le présent Règlement, il se rend
disponible pour un témoignage renouvelé et un service plus généreux 2.
1.
2.
Cf. RDB VIII, 4
Cf. RDB VIII, 2.
34.1. Une insistance typiquement salésienne et toujours valable (art. 34 § 1 et 2)
« Il est conseillé de faire chaque année au moins quelques jours de retraite spirituelle. Le dernier
jour de chaque mois, ou un autre jour qui convient mieux, les Coopérateurs feront l’exercice de la
bonne mort [récollection mensuelle], en se confessant et en communiant comme si c’était
réellement la dernière fois de leur vie ». C’est ce qu’écrit Don Bosco dans son Règlement [1] : il
« conseille » de faire la retraite spirituelle chaque année. Il demande explicitement (ils « feront ») la
récollection chaque mois. Cette nuance est restée dans le texte actuel : « Le Coopérateur se
réserve... » « L’Association offre aux Coopérateurs une occasion... ».
Don Bosco demandait la même chose à ses salésiens religieux et à ses jeunes. Il disait par exemple
aux salésiens : « La partie fondamentale des pratiques de piété, celle qui, en une certaine manière,
les résume toutes, consiste à faire chaque mois l’Exercice de la bonne mort et chaque année les
Exercices spirituels » [2]. Il n'y a pas de doute : il y a ici un point typique et essentiel de la vie
spirituelle salésienne. Et les conditions actuelles de la vie ne le rendent pas moins urgent ! Au
contraire !...
La vie aujourd’hui est une course : travail quotidien, préoccupations financières, relations, visites et
réunions, stimulations externes continuelles... Le Coopérateur ajoute généreusement à tout cela des
activités salésiennes diverses ! Survient alors le risque de suffoquer spirituellement, d’agir en
perdant de vue les raisons et la signification de son action, de vivre sans plus d’horizon ni de
profondeur. L’action devient agitation, toujours moins efficace et toujours plus vulnérable aux mille
tentations du monde, à la dispersion et à la division intérieure. Celui qui est « vide » spirituellement,
que peut-il donner aux autres ?
Pour remédier à ce risque de dégradation de l’énergie apostolique, il a certes les points examinés à
l’article précédent. Mais on sent le besoin de moments plus larges de respiration, de pauses plus
longues : quel automobiliste ne s’arrête pas régulièrement et tout le temps qu’il faut pour un
contrôle du moteur et des pneus, une réparation éventuelle, le plein d’essence, l’étude de la carte
routière pour choisir les meilleures routes ? Selon une comparaison plus évangélique, la récollection
mensuelle ou annuelle correspond à cette pause à laquelle Jésus a invité ses apôtres après une
période d’intense activité : « 'Venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu (auprès
de moi) ». (Mc 6, 3I)
34.2. Modalité et fruits de la récollection et de la retraite (art. 34 § 1-2)
C’est justement ici que se trouve la grande sagesse de Don Bosco : il propose un arrêt mensuel, d’au
moins quelques heures, puis un arrêt annuel de quelques jours dans une maison de retraite.
À travers ses principaux responsables, chaque centre doit compter parmi ses tâches les plus
importantes celle d’organiser sérieusement la récollection mensuelle : trouver un milieu recueilli,
prévoir une brève conférence spirituelle et la présence d’un confesseur... S’il arrive que le Centre
n'organise rien ou si le Coopérateur se trouve empêché de participer à la rencontre prévue, il
organisera pour son propre compte sa pause mensuelle, au moment et de la façon la plus opportune
(« le jour à meilleure convenance », disait Don Bosco), prévoyant en particulier sa confession et sa
communion, ces moments clefs de la récollection puisqu’ils sont des moments de rencontre plus
profonde avec le Seigneur.
La retraite annuelle, par contre, est organisée au niveau provincial. Mais s’il n'a pas la possibilité
d’y participer, le Coopérateur peut aller la faire dans un autre endroit, même non salésien :
l’important, c’est de la faire !
Aux deux sortes de pauses, Don Bosco donne le même but d’évaluation et de conversion, plus
rapide lors de la récollection, plus approfondi lors de la retraite. C’est-à-dire :
– de clarification sur sa propre vie de foi pour en découvrir le positif et le négatif à la lumière de
l’Evangile et du Règlement de Vie apostolique, de façon à discerner les appels de l’Esprit Saint [3] ;
– de purification et de nouvelle option d’un engagement plus authentique d’amour de Dieu et des
autres à partir d’une rencontre forte avec le Christ dans les deux sacrements de la Réconciliation et
de l’Eucharistie, rencontre soigneusement préparée.
Chaque Coopérateur est personnellement le premier bénéficiaire de ces expériences : « croissance
de sa vie spirituelle [...], témoignage renouvelé [...] ». Mais il est clair que le Centre et bien d’autres
personnes y sont également intéressées : « efficacité de son apostolat [...], service plus généreux
[...] ». Quand les membres « fonctionnent » intérieurement bien, le Centre et les activités qu’il
exerce fonctionnent à merveille ! Mais si les personnes ne fonctionnent pas bien... ! [4]
[1]. RDB VIII 2.
[2]. Bosco Giovanni, Introduction aux Constitutions. Pratiques de piété, in Appendice aux
Constitutions SDB de 1984 p. 229.
[3]. Voir le titre de cet article.
[4]. Des suggestions pratiques se trouvent dans Cooperatori di Dio 404-409, (récollection
mensuelle) et 410-433 (retraite annuelle).
ARTICLE 35
DÉVOTIONS PRIVILÉGIÉES
§ 1. Comme Don Bosco, le Coopérateur nourrit une dévotion filiale et forte envers Marie
Immaculée, « Mère de l’Eglise et Secours des Chrétiens » 1, guide spéciale de la Famille
salésienne. Convaincu de sa présence vivante ; il l’invoque fréquemment, célèbre ses fêtes dans la
ferveur, la fait connaître et aimer.
§ 2. Il se tourne avec une particulière affection vers saint Joseph, Patron de l’Eglise universelle. Il
recourt avec confiance à l’intercession de saint Jean Bosco, père et maître, protecteur spécial des
jeunes. Il est aussi persuadé qu’une manière de l’honorer consiste à approfondir la connaissance de
sa vie et de sa sainteté.
§ 3. Parmi les saints, modèles de vie apostolique, il vénère avec prédilection saint François de
Sales 2, sainte Marie Dominique Mazzarello, saint Dominique Savio et les autres saints et
Bienheureux de la Famille salésienne.
1. DB, Merveilles de la Mère de Dieu, Turin 1868 (OE xx 237),
2. Cf. RDB V, 8.
35.1. Dévotion à Marie. (art 35 § 1)
35.1.1. Dévotion ? oui, mais dans son sens théologique plein
C’est la quatrième fois que le Règlement parle de Marie. Ce fait doit attirer l’attention du
Coopérateur et lui éviter de comprendre sa dévotion envers Elle comme un fait intermittent,
superficiel ou sentimental. Il faut donc interpréter le titre de l’article sans atténuation. Les articles 1
§ 1, 27 et 28 § 2 ont successivement présenté l’intervention de Marie :
– dans la vocation et la vie de Don Bosco Fondateur ;
– dans l’œuvre du Christ et dans la vie de l’Eglise (Marie exceptionnelle « Coopératrice de Dieu »),
– dans la vie quotidienne du Coopérateur (ce sera repris dans l’article 40).
Notre article 35 § 1 reprend tout cela pour en faire la base et la motivation de notre dévotion
« filiale et forte » à Marie, à l’imitation de la dévotion si ardente de Don Bosco. Marie
« Immaculée » (la parfaite servante de Dieu, modèle de tout chrétien), puis, « Mère de l’Eglise et
Secours des Chrétiens », enfin « guide spécial (de Don Bosco et) de la Famille salésienne » : tels
sont les titres qui justifient et réclament la dévotion du Coopérateur. À la « présence vivante » et
permanente de Marie doit répondre un type de dévotion qui, tout en ayant des moments
d’expression intense, et en réalité une attitude continuelle : Marie est « chez nous » et nous la
sentons tous comme une présence « familière » de Mère très active. Cette dévotion se caractérise
comme « filiale et forte » : deux adjectifs qui incluent à la fois la tendresse envers Celle qui est une
« Mère » aimable et présente, et le courage d’obéir à Celle qui est une Mère exigeante.
35.1.2. Trois dispositions particulières
Par conséquent, sur fond d’un amour « filial et fort » permanent, le Coopérateur est invité à trois
attitudes particulières :
– invoquer fréquemment Marie, en bien des occasions, mais surtout quand il y a une grâce ou une
protection spéciales à obtenir ; beaucoup de Coopérateurs on adopté la pratique vécue dans les
communautés salésiennes : ajouter à la fin des prières ou des célébrations, l’invocation « Marie,
Secours des chrétiens, priez pour nous » : elle est la Vierge des heures et des temps difficiles !
– célébrer ses fêtes avec ferveur, en particulier le 8 décembre et le 24 mai, avec la neuvaine
préparatoire ; beaucoup de Coopérateurs célèbrent aussi « l’écho mensuel » du 24 mai : le 24 de
chaque mois ;
– enfin, la faire connaître et aimer : connaître la grandeur du mystère de Marie, l’importance de ses
interventions dans l’Eglise comme dans la Famille salésienne, la douceur de sa présence, voilà qui
porte spontanément le Coopérateur à répandre sa dévotion, mais avec intelligence (la faire
connaître) et sincérité (la faire aimer), surtout parmi les jeunes, que dans le songe de Don Bosco à
neuf ans, Marie elle-même a appelés « mes fils ».
35.1.3. Trois documents inspirateurs à connaître.
Au sujet de Marie et de son rôle dans l’Eglise et dans la Famille salésienne, chaque Coopérateur
doit prendre à cœur de lire et d’étudier trois documents de très grande valeur et de vif intérêt :
– un texte du Concile : le dernier chapitre de la constitution dogmatique Lumen gentium
intitulé : La bienheureuse Vierge Marie Mère de Dieu dans le mystère du Christ et de l’Eglise. C’est
une parfaite synthèse théologique de la foi chrétienne sur Marie, présentée en particulier comme
exceptionnelle « Coopératrice de Dieu » dans le passé et dans le présent [1] ;
– un texte de Paul VI : l’exhortation apostolique Marialis cultus [Le culte de la Vierge Marie]
(2 février 1974) : dans un moment de crise de ce culte, le Pape offre, de façon sûre et magistrale,
des « orientations pour le renouveau de la piété mariale » (toute la deuxième partie) et de précieuses
« indications sur les pieux exercices de l’Angelus et du chapelet » (toute la troisième partie) : il
souligne la beauté et l’importance du chapelet qui en en même temps contemplation, louange et
supplication : il débouche dans l’imitation convaincue des vertus de Marie associée à son Fils
sauveur ;
– un texte du Père Egidio Viganò : la lettre « Marie renouvelle la Famille salésienne de Don
Bosco » [2] : après avoir expliqué avec clarté « le choix marial de Don Bosco », le Recteur majeur
nous invite tous à « prendre Marie chez nous », et il propose quatre grands terrains du renouveau
marial : la doctrine, la dévotion, l’Eglise et les vocations [3]. Au 21e Chapitre général, il dit aux
salésiens : « La Congrégation est née et a grandi par l’intervention de Marie, et elle se rénovera
dans la mesure où la Vierge retrouvera la place qu’elle doit avoir dans notre charisme » [4].
35.2. Saint Joseph et saint Jean Bosco. (art 35 § 2)
Au ciel, à côté de Vierge Marie, nous avons beaucoup de frères et de sœurs qui ont collaboré à bâtir
l’Eglise et notre Famille (art 19 § 3) ; nous maintenons vivante la communion qui unit l’Eglise
« pèlerine et militante » à l’Eglise « triomphante » du ciel : les saints peuvent encore intervenir dans
notre histoire pour nous aider à être persévérants et efficaces dans le Royaume de Dieu [5].
Notre paragraphe mentionne avec raison deux saints : saint Joseph et saint Jean Bosco. Pourquoi ?
35.2.1. Saint Joseph
Il est « Patron de l’Eglise universelle », et a été placé par Don Bosco parmi les patrons des deux
Congrégations : des salésiens [6] et des Filles de Marie Auxiliatrice [7], et de sa Famille tout
entière. Dans chaque église qu’il a bâtie, Don Bosco a dédié un autel à saint Joseph. Après un mois
de préparation, il célébrait sa fête à l’Oratoire, en jour chômé complet, le 19 mars, alors qu’en
Piémont elle était supprimée des jours fériés. Il le présentait comme modèle et patron des
travailleurs, modèle de confiance dans la Providence, patron de l’Eglise et protecteur pour obtenir
une bonne mort. C’est un saint bien sympathique et puissant, qui nous fait aimer la Vierge et
l’Eglise.
35.2.2. Saint François de Sales
Marie Auxiliatrice est la « patronne principale » de la Famille salésienne. À ses côtés se trouvent
comme « patrons » saint Joseph et saint François de Sales, qui méritait donc de prendre place dans
ce paragraphe. Il est patron et « titulaire » : c’est de lui que nous tenons notre nom de « salésiens »,
comme l’explique l’article 28 § 1 ; il est un modèle, lui aussi bien sympathique, de douceur et de
zèle pastoral [8]. Sa fête du 24 janvier est malheureusement trop proche du 31 janvier pour être
solennisée comme elle le devrait. Le Coopérateur compensera cette situation en trouvant d’autres
bonnes occasions pour contempler et prier saint François.
35.2.3. Saint Jean Bosco
Saint Jean Bosco n'est pas « patron », mais « père fondateur et maître » (les deux expressions déjà
présentes dans l’article 1 § 1) et « protecteur spécial des jeunes ». Au ciel il jouit sans conteste
d’une puissance particulière d’intercession en faveur des membres de sa Famille comme des jeunes.
Il va de soi que tout Coopérateur le prie, et non seulement à l’occasion du 31 janvier (et de son
« écho » le dernier jour de chaque mois). Mais notre texte prend soin de préciser que la dévotion à
Don Bosco ne peut se limiter à le prier ! Il faut approfondir sans cesse la « connaissance de sa vie et
de sa sainteté », ce qu’il a fait et le type de saint qu’il a été. L’expérience enseigne que la
connaissance meilleure renforce l’admiration et la confiance, ainsi qu’un engagement apostolique
plus décidé. Les articles 36 § 1 et 37 § 1 indiqueront cette connaissance comme moyen de formation
initiale et permanente.
35.3. Les autres saints et Bienheureux de la Famille (art. 35 § 3)
Deux saints de la Famille sont cités comme « modèles de vie apostolique », parce leur figure est
d’une richesse extraordinaire : sainte Marie Dominique Mazzarello, qui intercède certainement de
façon spéciale pour les Coopérateurs et les Coopératrices des Centres rattachés à une œuvre FMA ;
et saint Dominique Savio, signe des merveilles de la grâce chez les adolescents, chef d’œuvre de
Don Bosco, le plus jeune saint non martyr, exemple de zèle apostolique et de contemplation : il est
pour tout éducateur salésien un motif d’espérance, une lumière pour un travail d’éducation qui
conduit à une sainteté simple et joyeuse. Les Coopérateurs qui animent des groupes « d’Amis de
Dominique Savio » le savent particulièrement bien.
« Les saints et les bienheureux de la Famille salésienne » forment un impressionnant
patrimoine de sainteté salésienne, qui devient un courant spirituel stimulant. Ils constituent la
preuve de la bénédiction de Dieu sur elle et de la validité de la vocation salésienne comme chemin
de sainteté [9].
[1]. Cf. LG 52-69.
[2]. Dans ACS 289 (janvier-juin 1978) 3-36.
[3]. Un prolongement de cette lettre a été le symposium marial salésien d’Europe à Rome (janvier
1979) ; cf. les Actes très riches : La Vierge des temps difficiles, dirigés par A. Pedrini, Rome LAS
1980) 308 p. Sur le plan pratique, Cooperatori di Dio fournit d’abondantes suggestions : voir p.
436-463.
[4]. ACG21 589.
[5]. Cf. le très beau texte de LG 49s.
[6]. Const. SDB 1984 art. 9.
[7]. Const. FMA 1982 art. 45.
[8]. Cf. RDB V 8.
[9] On trouve la liste et la présentation de chaque figure dans Cooperatori di Dio 65-105 et 466-481.
CHAPITRE V
APPARTENANCE ET FORMATION
« Que le Seigneur fasse croître et abonder l’amour que vous avez les uns pour les autres et pour
tous. Qu’il affermisse ainsi vous cœurs dans une sainteté irréprochable devant Dieu notre Père ».
(1 Th 3, 12-13)
Le texte biblique est tiré de la conclusion de la première partie de la lettre de saint Paul aux
Thessaloniciens et c’est une prière pour la communauté adressée à Jésus Christ qui y reçoit le titre
de « Seigneur » (du grec Kyrios) qui indique la seigneurie totale et absolue du Christ ressuscité sur
l’Eglise et sur l’humanité.
En priant pour la communauté, l’Apôtre demande qu’elle croisse et soit comblée de la richesse
de l’amour pour les frères dans la foi et pour tous les autres. En conformité avec le commandement
du Seigneur, qui nous impose d’aimer même nos ennemis (Mt 3, 44 ; Lc 6, 35), les chrétiens ne
doivent exclure de leur amour ni les infidèles ni les persécuteurs. L’amour désintéressé de Paul leur
est proposé comme un exemple éclairant et stimulant.
L’Apôtre prie aussi pour que l’amour fraternel associé à l’effusion abondante de la grâce
« établissent fermement [les fidèles] dans une sainteté sans reproche devant Dieu notre Père ».
Situé au début du chapitre dédié à l’appartenance et à la formation, le texte veut souligner un double
engagement de tout Coopérateur : croître et abonder dans l’amour au sein de l’Association et de la
Famille salésienne, et étendre son apostolat salésien dans le monde (appartenance) ; être persévérant
sur le chemin de la sainteté entrepris en entrant dans l’Association (fidélité). Les deux engagements
comportent un itinéraire de formation.
PRELIMINAIRES
1. Place et organisation du chapitre
Ce chapitre décrit l’itinéraire que chaque Coopérateur doit parcourir personnellement dans sa
vocation, pour que son identité d’apôtre séculier salésien arrive à maturité et jouisse d’une bonne
santé.
Cet itinéraire prévoit trois étapes successives :
1
Une préparation initiale convenable ;
2
L’entrée dans l’Association par la promesse ;
3.
La fidélité quotidienne et progressive à sa vocation et aux engagements qu’elle comporte.
Cet itinéraire est soutenu et nourri par une formation adéquate et opportune, et il est animé
d’un sentiment vif et profond d’appartenance à l’Association.
La division du chapitre est limpide et suit à peu de chose près les étapes de cet itinéraire de
formation :
– Formation initiale et entrée dans l’Association :
art. 36
– Contenus de la formation :
art. 37
– Responsabilités et activités pour cette formation : art. 38
–Fidélité et éventuelle sortie de l’Association :
art. 39
–Formule de la Promesse :
art. 40
2. Nécessité d’une formation spéciale
Être appelé du Seigneur à être Coopérateur salésien ne veut pas dire en soi que l’on possède dès le
début toutes les conditions requises : cela ne veut pas dire non plus que l’on vit déjà suffisamment
les exigences qu’elle comporte.
La vocation à être Coopérateur est une invitation à se mettre en route pour développer peu à peu sa
vie baptismale en s’engageant dans la réalisation de la mission salésienne et en vivant l’esprit de
Don Bosco. La vocation de « Coopérateur » est de nature originale, a de riches contenus et de fortes
exigences. Comment croire qu’il soit possible d’être Coopérateur « automatiquement » et de
s’improviser tel, sans une préparation et un effort continu de croissance et de maturation ?
Une formation s’impose donc, à réaliser en deux étapes :
– La première s’appelle formation initiale : elle précède la promesse et permet au candidat
Coopérateur d’acquérir les connaissances et les aptitudes salésienne de base. Sa durée varie selon
l’âge et les ressources de l’aspirant.
– La deuxième s’appelle formation permanente, dure toute la vie, et aide le Coopérateur à se garder
fidèle à sa vocation spécifique séculière et salésienne dans l’évolution de sa situation personnelle,
de l’Association, de l’Eglise et de la société.
Les exigences inhérentes un engagement chrétien valable dans le monde actuel ont amené tous les
groupes et mouvements ecclésiaux à insister, beaucoup plus que par le passé, sur l’importance
d’une solide formation et sur la nécessité, pour l’apôtre, de se maintenir dynamique et à jour.
Le Concile Vatican II a jugé opportun de confirmer officiellement ce fait : le décret sur L’apostolat
des laïcs consacre un chapitre entier à la formation et un numéro entier à leur spiritualité
séculière [1].
C’est à cette lumière que le Chapitre général spécial des salésiens a pris un engagement formel
prioritaire vis-à-vis des Coopérateurs : « Notre première urgence pastorale sera la formation
salésienne des hommes, tant spirituelle qu’apostolique, au-dessus de tout souci d’organisation » [2].
Devant toutes ces requêtes, ainsi que celles des Coopérateurs eux-mêmes, le Règlement ne pouvait
pas ne pas envisager un chapitre explicite sur la formation, pour approfondir et élargir une
orientation déjà présente dans le Règlement même de Don Bosco [3].
Le Règlement laisse de la place à l’initiative locale, de façon que le programme de formation puisse
mieux répondre à la grande diversité des situations des personnes comme de l’Association.
L’Association a publié dans le passé un Guide pour la formation (1977) : ce document officiel devra
être adapté à la nouvelle situation de l’Association et au nouveau Règlement de vie apostolique ; il
devra aussi tenir compte des expériences faites. En effet, diverses Provinces ou groupes de
Provinces sont déjà en train d’expérimenter un programme de formation très sérieux adapté aux
exigences locales.
En conclusion, la formation est une affaire personnelle : chacun prend sur soi la responsabilité de se
former selon ses possibilités. L’article 2 § 3 précise que l’Association est ouverte à « tout chrétien,
quelle que soit sa condition culturelle ou sociale ». Avec réalisme, on n'exigera pas, en fait de
formation, plus que ce que chacun est en mesure de s’engager à faire avec générosité.
[1]. Cf. AA 28-32 et 4.
[2]. ACGS 744 ; cf. 735s.
[3]. Cf. Midali Mario, Nella Chiesa e nella società con Don Bosco oggi, 237.
ARTICLE 36
ENTRÉE DANS L’ASSOCIATION
§ 1. S’engager parmi les Coopérateurs exige un choix libre, dûment motivé et progressivement mûri
sous l’action de l’Esprit Saint. En conséquence, celui qui désire entrer dans l’Association accepte un
programme adapté de préparation, qui dure tout le temps nécessaire à la vérification de son appel
personnel. Ce programme comprend : prière et approfondissement de la vie de foi, réflexion et
étude de Don Bosco et du présent Règlement, participation à la vie et aux activités d’un Centre
local.
§ 2. Quand l’aspirant, âgé de 18 ans au moins, a atteint une suffisante maturité, il présente sa
demande d’admission aux responsables du Centre dont il relève.
§ 3. L’entrée officielle dans l’Association a lieu lors de la « Promesse » personnelle, par laquelle
l’aspirant exprime sa volonté de vivre son option baptismale selon le présent Règlement. Il reçoit
alors l’attestation de son appartenance à l’Association.
Cet article présente la formation initiale que doit entreprendre le Coopérateur en vue de son
entrée dans l’Association. Il est divisé en trois paragraphes :
§ 1 : Motif profond qui justifie le travail de formation avant la promesse, et ses contenus ;
§ 2 : Modalités d’entrée dans l’Association par la promesse ;
§ 3 : Signification de cette promesse.
36.1. « Choix libre, motivé et mûri » (art. 36 § 1)
La phrase qui ouvre cet article est d’une très grande importance, car elle exprime la motivation
théologique qui justifie l’exigence d’un processus de formation initiale. Il dit : « S’engager parmi
les Coopérateurs exige un choix libre, dûment motivé et progressivement mûri sous l’action de
l’Esprit Saint ». Chaque mot est à mettre en valeur.
L’indication est claire : on devient Coopérateur par libre choix, ce qui signifie qu’il faut éviter toute
pression indue sur qui que ce soit pour le faire entrer dans l’Association. C’est le Seigneur qui
appelle, habituellement par des relations de vie et une attirance intérieure, un goût profond ou une
sympathie spirituelle pour Don Bosco et son idéal [1]. Il se sert généralement de médiations
humaines qui rendent proche et simple ce qui est un don gratuit de sa part.
L’option d’être Coopérateur est donc motivée : celui qui entre dans l’Association sait et doit
pouvoir dire pourquoi il a veut faire cette démarche. En fait, il s’agit de donner une expression
concrète son propre Baptême dans l’Eglise : collaborer à réaliser le projet apostolique de Don
Bosco [2].
De plus elle est mûrie : non que le candidat doive voir clair d’emblée, ni accepter d’un coup tous les
engagements du Règlement. Mais s’il réfléchit, prie et commence s’engager, il se met, par le fait
même, « sous l’action de l’Esprit Saint », comme dit l’article. C’est une invitation pratique et facile
à traduire dans sa vie son initiation chrétienne.
36.2. Nécessité d’un programme adapté de formation (art. 36 § 1)
Cette maturation se fait travers une connaissance suffisante et une préparation acceptée. « Celui qui
désire entrer dans l’Association, dit l’article, accepte un programme adapté de préparation ».
La vocation chrétienne est à la fois un don et un engagement. Elle est un don, parce que chacun
reçoit de Dieu une invitation personnelle à se réaliser lui-même en mettant sa vie au service du
Royaume : au cours de son existence il rencontre un ensemble de possibilités qui lui permettent de
concrétiser et de mûrir cet appel ; sans exclure l’initiative personnelle, elles sont le fruit de la
Providence et de la grâce de Dieu qui nous aime et facilite notre loyauté dans la foi,.
Mais ce don comporte aussi un engagement, parce que Dieu n'agit jamais sans le concours de la
personne ; celle-ci est appelée à s’ouvrir et à coopérer à cette action transformante de Dieu, de façon
que toute sa vie soit guidée par l’Esprit. Cette coopération suppose un travail de préparation, sans
lequel, même s’il est simple et adapté à aux possibilités personnelles, elle resterait un pieux désir
inefficace.
Dans la même ligne, la vocation salésienne est un don et un engagement : « C’est tout la fois un don
et un libre choix qui qualifient l’existence », dit l’article 2 § 2. C’est un don de l’Esprit qui attire
quelques chrétiens à « vivre la foi de leur Baptême et l’engagement de leur Confirmation » la suite
de Don Bosco [3]. C’est un engagement qui s’acquitte en exerçant l’apostolat séculier salésien dans
le monde, en communion et en collaboration avec Don Bosco et selon son esprit [4].
Cela requiert un travail de formation initiale et permanente destiné à rendre possible la fidélité à la
vocation choisie.
Répondre à la voix du Seigneur Jésus qui appelle à être Coopérateur, c’est réaliser dans sa propre
vie les valeurs évangéliques décrites dans le Règlement [5]. On devient vraiment Coopérateur
quand ces valeurs, propres au bon chrétien, façonnent sa mentalité, ses motivations profondes, ses
dispositions et son comportement ; bref, quand le profil idéal exprimé dans le Règlement, devient
un profil réel vécu avec humilié et sincérité.
Cela suppose un travail lent et continu (mais non difficile), qui aide à passer peu à peu de la
sympathie et de l’acceptation générique à une adhésion toujours plus vitale, à intérioriser ces
valeurs pour qu’elles deviennent des dispositions et des façons de faire personnalisées.
Telles sont, en synthèse, les bases sur lesquelles bâtir une manière libre, motivée et mûre de vivre
en Coopérateur. L’importance de l’enjeu a été soulignée par le Recteur majeur : « Le chemin à
parcourir pour assurer ce regain de vitalité (du charisme de Don Bosco), écrit-il, passe d’abord et
avant tout par le cœur de chacune de vos personnes : le don de l’Esprit Saint va à l’homme intérieur.
Les valeurs évangéliques contenues dans le nouveau Règlement ont besoin d’être “personnalisées”.
Les porteurs d’un charisme dans l’Eglise sont toujours des “personnes” que le Seigneur a appelées
“par leur nom” et qui ont entendu ce “tu” de prédilection, début d’une alliance à vivre dans l’amitié,
la joie et la fidélité. Chaque personne ressent alors la vive responsabilité de faire fructifier dans
l’Eglise le don reçu. Le cœur de chaque Coopérateur et de chaque Coopératrice est dépositaire
d’une alliance de salut, enrichi d’une grâce spéciale qui le fait participer à la puissance de l’Esprit
du Seigneur, le pousse et l’habilite à lancer son action dans le courant de l’histoire, collaborant à
l’importante mission ecclésiale assignée à Don Bosco. Il s’agit donc de raviver et de revigorer vos
personnes » [6]. Ce qu’il dit ici à propos de ceux qui sont déjà Coopérateurs et Coopératrices vaut à
plus forte raison pour ceux qui désirent le devenir [7].
Cette exigence prioritaire et fondamentale de la formation a été soulignée par le Concile Vatican II
à propos des fidèles laïcs, et par le Chapitre général spécial des salésiens en réponse des questions
précises des Coopérateurs.
Elle a été confirmée par les jeunes Coopérateurs lors de leur rencontre européenne en juillet 1982 :
« L’analyse de la situation des jeunes d’aujourd’hui, déclare le document final, fait apparaître la
forte nécessité d’une meilleure préparation tant spirituelle que pastorale des Coopérateurs. L’option
d’un Coopérateur doit être l’aboutissement d’un itinéraire de maturation dans la foi chrétienne et
dans la vie salésienne. Il est donc de la plus haute importance de ne pas brûler les étapes pour
arriver la promesse de Coopérateur. Il y a aussi la nécessité d’une préparation spécifique pour
aborder les problèmes des jeunes sur les nouveaux terrains de mission qui se sont ouverts dans le
monde pour tous les salésiens » [8].
36.3. « Vérification de son appel personnel » :
objectif de la formation initiale (art 36 § 1)
La période de la formation initiale est prévue et programmée pour atteindre un objectif général : que
le candidat puisse « vérifier son appel personnel » comme dit l’article (§ 1).
Il ne s’agit pas d’une simple vérification extérieure, hâtive et superficielle, mais d’une vérification
intérieure, qui dure le temps nécessaire au processus de maturation de la personne et s’approfondit
selon les possibilités de chaque candidat.
Quand le Christ, par son Esprit, appelle une personne à se mettre au service de son projet, il la
pousse à orienter ses capacités intellectuelles, affectives et d’action vers l’obtention de ce but : cela
favorise la construction de sa propre personne et suscite une joie authentique.
Le travail de la formation tend à aider le candidat à orienter ces capacités et ces possibilités
personnelles et, en plus, à vérifier si des résultats s’obtiennent et comment : c’est-à-dire s’il marche
sur le chemin tracé par son appel et à quel point il en est. Ce travail d’évaluation comprend
l’analyse qualitative de trois aspects importants de la vie du candidat Coopérateur.
– Il vise tout d’abord à l’aider à discerner avec clarté les signes qui l’invitent à entrer dans
l’Association des Coopérateurs. Le Seigneur appelle au moyen de toutes sortes de médiations : dons
naturels ou dons gratuits, circonstance de la vie, invitations d’amis, situation grave de la jeunesse et
du peuple, besoins concrets de l’Eglise... [9] Dans notre cas concret, il faut voir des signes
privilégiés dans sa sensibilité à l’égard des jeunes et du peuple unie à la disponibilité de vivre les
valeurs de l’esprit de Don Bosco [10]. Durant la préparation initiale, le candidat est aidé à identifier
les signes de sa vocation, à les interpréter et à en tirer parti, pour percevoir avec toujours plus de
clarté si son appel est bien réel.
– En deuxième lieu il cherche à l’aider à évaluer si et comment il personnalise les valeurs qui
l’attirent. Il se sent invité à se mettre personnellement au service du projet apostolique de Don
Bosco et à s’engager tout entier pour le réaliser. Cela demande que sa propre manière de voir la
réalité, ses propres sentiments et ses dispositions, sa façon de se comporter et d’agir, soient en
syntonie avec les exigences des signes examinés. Quand le candidat a évalué tout cela, il peut
s’engager de manière responsable par la promesse, car il a vu clairement alors que sa personne, ses
qualités et ses ressources s’orientent en fait vers la réalisation du projet de Don Bosco en suivant
son esprit [11].
– Il vise enfin à favoriser sa participation à l’Association, en particulier par une confrontation
graduelle de ses idées avec la vie et l’activité du Centre. La vocation n'est pas un fait exclusivement
personnel ; elle rentre dans la dynamique de la communion ecclésiale et, dans le cas du
Coopérateur, dans la fraternité salésienne : devenir Coopérateur, c’est se sentir disposé à travailler
en communion et en collaboration avec les forces apostoliques suscitées par L’Esprit Saint dans
l’Eglise travers Don Bosco. La préparation initiale vise à aider le candidat à évaluer si et jusqu’à
quel point il assume le projet apostolique de Don Bosco, et quel type d’appartenance à l’Association
il peut réaliser dans la pratique [12].
36.4. Caractéristiques de la formation initiale (art. 36 § 1)
Pour atteindre ces finalités générales d’évaluation de sa vocation, la période préalable de
préparation doit avoir certaines caractéristiques indiquées expressément par le Règlement : elle est
programmée, comporte trois engagements précis, et dure le temps nécessaire.
36.4.1. Programme adapté
La phase de préparation qui précède la promesse est programmée : « Celui qui désire entrer dans
l’Association accepte un programme adapté de préparation », nous dit l’article. Cela veut dire que
cette préparation est définie par l’Association aux différents niveaux avec un programme
« adapté ».
Adapté à quoi ? À trois exigences incontournables au moins.
1. À l’importance de l’objectif propre de cette période, qui est d’évaluer son choix personnel en
vue d’entrer dans l’Association : À ce propos l’article 37 § 1 précise que « la formation (est)
particulièrement intense et exigeante au cours de la période initiale ».
2. Aux situations d’âge, de maturité, de qualification professionnelle et ecclésiale des candidats :
ce programme doit donc considérer si les candidats sont jeunes et en phase d’approfondissement des
options fondamentales de leur vie, ou bien s’ils sont des adultes qui ont déjà choisi leur propre
forme de vie (par exemple des Coopérateurs mariés ou fiancés) ; il doit aussi tenir compte du niveau
de maturité humaine, chrétienne et salésienne qu’ils ont déjà atteint, ainsi que de leur état : fidèles
laïcs, prêtres, diacres ou aspirants au ministère sacerdotal ou diaconal.
3. Aux situations culturelles et ecclésiales du lieu : le programme doit donc tenir compte des
formes d’apostolat en faveur des jeunes et du peuple que l’Association exerce sur le lieu, de la
situation socio-religieuse locale, des indications des Eglises particulières en fait de formation des
fidèles laïcs et des candidats au ministère ordonné.
Le Règlement indique aussi, aux différents niveaux, les compétences chargées du programme de
formation. La Consulte mondiale a la charge de « promouvoir et coordonner les initiatives de
formation » au niveau mondial (art 23 § 2) ; une des tâches principales des Conseils est de
« promouvoir et coordonner les initiatives portant sur la formation », à leur niveau local et
provincial (art 44 § 1) ; il revient aux l’éventuelles conférences nationales ou régionales de faire un
travail de « coordination et de stimulation » (art 47 § 2).
36.4.2. Trois sortes d’engagements
Cette première phase de préparation programmée comprend trois sortes de tâches, proposées de
façon distincte dans le paragraphe : elles correspondent aux trois qualifications propres du
Coopérateur : apôtre, séculier, salésien.
La première tâche : « prière et approfondissement de la vie de foi ». Il faut que le candidat oriente
sa vie pour la mettre au service du projet salvifique de Dieu sur l’humanité : il doit donc vivre
sérieusement les exigences de la foi chrétienne et prier intensément pour approfondir et renforcer sa
vie spirituelle et apostolique chrétienne. Les contenus de cette vie sont exposés par le Règlement, en
particulier aux chapitres ii et iv [13].
La deuxième tâche : « réflexion et étude de Don Bosco et du présent Règlement ». Il est nécessaire
que le candidat sache comprendre le vrai profil du Coopérateur : il doit donc connaître Don Bosco,
sa personne, sa vie, son œuvre, son projet apostolique et son système éducatif ; il doit en outre
étudier l’idéal de vie apostolique proposé dans le Règlement des Coopérateurs. Il s’agit
d’approfondir une adéquate formation salésienne.
La troisième tâche : « participation la vie et aux activités d’un Centre local ». Il faut que le candidat
se rende capable d’agir comme coresponsable à l’intérieur de l’Association : il doit donc acquérir
des aptitudes concrètes et pratiques et savoir exercer des types d’activités qui rentrent dans le projet
de l’Association, en travaillant surtout au niveau d’un Centre, qui est « le noyau fondamental de la
vie de l’Association » des Coopérateurs. (art. 41 § 2).
36.4.3. Durée
Si l’on tient compte des exigences fondamentales et des tâches citées, il est facile de comprendre
l’indication essentielle du Règlement à propos de la durée de cette période initiale : le programme
« dure tout le temps nécessaire à la vérification de son appel personnel ». Elle souligne cette
orientation de principe : dans ce secteur essentiel pour le bien de la personne, l’efficacité de leur
apostolat et la vitalité de l’Association, il est nécessaire de procéder sans hâte, mais aussi sans
ajournement ; il faut soigner la qualité plus que la quantité, qui n’est pourtant pas à négliger !
Concrètement la durée programmée du cycle de formation initiale devra prévoir certaines limites
dans le temps pas faciles délimiter. En pratique, elle peut varier de région à région et devra bien
tenir compte de la situation personnelle de chaque candidat. Par ailleurs il ne faut pas oublier que la
promesse ne marque pas la fin de la formation, mais pousse (avec le soutien de grâces spéciales du
Seigneur) à la développer sans cesse avec réalisme.
36.5. Conditions pour l’admission dans l’Association (art. 36 § 2)
Pour l’entrée officielle du candidat dans l’Association, le Règlement prévoit quelques conditions.
1. Avoir « atteint une suffisante maturité », c’est-à-dire avoir accompli l’essentiel des principales
tâches qui viennent d’être décrites, et qui lui ont permis une évaluation sérieuse de son option
chrétienne.
2. Être « âgé de 18 ans au moins » ; le Règlement exprime ici une conviction qui s’est certainement
renforcée avec l’expérience de l’Association obligée de se confronter avec des contextes
déchristianisés : en dessous de cette limite minimum d’âge il n'y a pas, du moins dans la majorité
des cas, de maturité suffisante pour prendre une décision aussi concrète sur l’orientation spirituelle
et apostolique de sa vie personnelle. On sait que Don Bosco travaillait dans un contexte de
chrétienté différent d’aujourd’hui, qui lui permettait de requérir l’âge minimum de 16 ans [14].
3. La présentation de « sa demande d’admission aux responsables du Centre dont il relève » : c’est
un signe de la liberté de choix par lequel le candidat déclare la sincérité de son intention. Cet acte
suppose que le candidat ait accomplit le chemin de formation qui lui a permis de comprendre la
valeur et les exigences du projet de vie apostolique et, qu’avec l’aide des frères et des sœurs du
Centre, il ait commencé à le vivre et à l’expérimenter comme répondant ses aspirations et comme
valable pour lui, puisqu’il le met au service du Seigneur et de son Eglise.
Cette demande est adressée aux responsables du Centre (art. 36 § 2), qui représentent l’Association.
Le plus souvent, ils l’ont accompagné dans l’itinéraire de sa formation et l’ont aidé à discerner les
signes de sa vocation [15]. C’est donc eux qui peuvent le mieux l’accueillir, et accepter sa promesse
au nom de l’Association [16].
La demande et l’admission sont des gestes importants qui doivent se faire dans un climat de prière,
d’ouverture à la manifestation de la volonté divine et de confiance mutuelle.
36.6. La promesse (art. 36 § 3)
L’entrée officielle dans l’Association se fait par la promesse. Cette promesse est la prière d’un bon
chrétien qui veut s’engager, l’expression priante, libre et publique d’un candidat qui « exprime sa
volonté de vivre » en Coopérateur.
Elle n'est pas un « vœu » ; c’est un simple engagement de conscience pris en dialogue avec Dieu le
Père, dans la communion de l’Eglise pour appartenir personnellement à l’Association. Par cet acte,
le Coopérateur s’engage librement à parcourir le chemin choisi et il se sent accompagné par
beaucoup de frères et de sœurs, et surtout fortifié par la médiation de l’Eglise et la puissance de
l’Esprit.
Elle est avant tout l’arrivée joyeuse à un but pour celui qui, par son travail de formation, est arrivé à
approfondir son Baptême selon le projet apostolique de Don Bosco et, en même temps, elle est le
point de départ d’une vie donnée au Christ pour les jeunes et les milieux populaires.
Elle est aussi l’expression d’une volonté de fidélité à Dieu qui l’a appelé à vivre l’Evangile sous une
forme concrète dans la Famille salésienne, et a fait naître en lui la charité pastorale ; le candidat
reconnaît ce don et, avec reconnaissance, s’engage à le faire fructifier pour que sa vie soit un
témoignage d’amour actif.
Elle est encore un engagement de fidélité l’Eglise qui l’a accueilli parmi ses membres, a nourri sa
vie chrétienne et l’invite à participer de façon coresponsable à sa mission de salut : avec sa
« promesse » faite devant la communauté, le nouveau Coopérateur accepte avec joie de développer
son expérience salésienne, considérée comme « une manière spécifique de vivre l’Evangile et de
participer la mission de l’Eglise » (art 2 § 2).
Elle est enfin la volonté d’appartenir fidèlement à l’Association dans laquelle il entre librement,
parce qu’elle lui offre un itinéraire concret de vie chrétienne et d’apostolat dans le contexte de la
Famille salésienne fondée par Don Bosco.
L’Association répond à cette offre du candidat par son accueil fraternel et son engagement de
l’accompagner dans son travail de formation apostolique et de fidélité aux engagements pris [17].
C’est la signification de « l’attestation de son appartenance à l’Association » dont parle le
paragraphe.
L’idée de la promesse remonte Don Bosco lui-même. Dans le fameux chapitre sur « les membres
externes », qui se lit dans ses premiers projets de Constitution, il avait établi ceci : « L’associé fera
au moins une promesse au Recteur de s’employer dans ce qu’il jugera tourner à la plus grande
gloire de Dieu » [18]. Dans le projet intitulé Association de bonnes œuvres (1875), puis dans les
premières éditions du Règlement définitif de 1876, Don Bosco inséra en appendice deux
déclarations qui correspondent à la promesse actuelle et à l’attestation [19].
L’entrée d’un nouveau Coopérateur dans l’Association, et par conséquent dans la Famille
salésienne, est un motif de grande joie pour tous. Dans la tradition salésienne, elle constitue
l’occasion d’une belle fête de Famille !
Puisque s’engager comme Coopérateur est « un libre choix qui qualifie l’existence » (art. 2 § 2), la
promesse ne doit se prononcer qu’après la sérieuse préparation dont il vient d’être question. Il s’agit
d’un acte qui ne peut s’improviser ni se réaliser à la légère ou pour des motifs inadéquats, ni non
plus s’ajourner indéfiniment sans raisons sérieuses.
[1]. Cf. RVA art. 2 § 1.
[2]. Cf. RVA art. 2 et 3.
[3]. RVA art. 2 § 1 et 2.
[4]. Les chapitres ii, iii et iv du Règlement présentent précisément cet engagement du Coopérateur.
[5]. Voir le commentaire du chapitre i n°2.
[6]. Viganò Egidio, L’Association des Coopérateurs salésiens, in ACG n° 318 (Juillet-septembre
1986), p. 23-24.
[7]. Voir le commentaire du chapitre v au n° 1.
[8]. Actes du iie congrès des jeunes Coopérateurs salésiens, in Cooperatores (déc. 1982) 769.
[9]. Voir le commentaire de l’article 2 au n° 2.6.
[10]. Cf. RVA art. 13 et 15.
[11]. Les chapitres ii, iii et iv du RVA décrivent tout cela.
[12]. Le chap. iii du RVA est consacré en particulier à la présentation de ce point.
[13]. Ce sont les articles 12, 14, 18, 32 et 33 du RVA qui décrivent les contenus de cette formation
humaine, chrétienne et apostolique
[14]. Cf. RDB V 1.
[15]. Cf. RVA art. 38 § 2.
[16]. Cf. RVA art. 45 § 1.
[17]. Cf. RVA, art. 19-20, 38 § 2, 39 § 1, 45 § 1 et 46 § 1.
[18]. MB VII, 885.
[19]. Cf. MB XI, 545.
ARTICLE 37
CONTENUS DE LA FORMATION
§ 1. La formation, particulièrement intense et exigeante au cours de la période initiale, se poursuit
encore après l’admission, car le Seigneur ne cesse jamais d’appeler à travers l’évolution des
situations personnelles et les changements de milieu.
§ 2. Le Coopérateur, conscient des exigences de la formation permanente :
– développe ses qualités humaines pour pouvoir assumer toujours mieux ses responsabilités
familiales, professionnelles et civiles ;
– mûrit sa foi et sa charité grandissant dans l’union à Dieu pour rendre sa vie toujours plus
évangélique et plus salésienne ;
– consacre du temps à la réflexion et à l’étude, pour approfondir l’Ecriture sainte, la doctrine de
l’Eglise et la connaissance de Don Bosco ;
– se perfectionne pour l’apostolat et le service auquel il est appelé.
La vocation chrétienne n'est jamais un fait statique : elle est dynamique et suppose une croissance
continuelle. Pour devenir salésienne, il lui faut un travail de formation, présenté dans l’article
précédent ; et pour se développer, elle doit sans cesse s’ouvrir et se rénover.
Quand on parle de « formation continue » ou de « formation permanente », il s’agit d’une
disposition et d’un comportement de base destinés à caractériser toute la vie du fidèle, afin qu’elle
soit authentique et constante.
L’article 37 en indique la nécessité et la finalité, et les motive par la nécessité d’être fidèle à la voix
de Dieu (§ 1) ; il en souligne aussi quatre grands axes : la formation humaine et professionnelle, la
formation chrétienne (foi et charité), la formation doctrinale et salésienne, et la formation
apostolique concrète. (§ 2).
37.1. Nécessité de la formation permanente (art. 37 § 1)
La formation permanente est un travail qui implique le développement de tous les aspects
fondamentaux de la personne, de son être et de son agir. Elle ne peut se réduire à de simples
moments de mise jour, qu’il ne faut pas sous-estimer, ni à un renouveau sectoriel.
Elle englobe tout le développement de la vocation personnelle et en devient même un critère
organisateur. En effet, la formation permanente se voit aujourd’hui comme la capacité d’apprendre
à partir de la vie et de rester en dialogue avec Dieu : elle est indispensable pour le développement
de la personne et de son orientation avec et pour les autres.
37.1.1. Nécessité
La nécessité de cette formation continue a été nettement soulignée par le concile Vatican II dans le
décret sur l’apostolat des laïcs. Après avoir indiqué les contenus de leur formation, il ajoute :
« Cette formation est sans cesse à perfectionner à cause du développement progressif de la personne
humaine et de l’évolution même des problèmes ; elle requiert une connaissance toujours plus
profonde et une adaptation constante de l’action » [1].
La déclaration sur l’éducation chrétienne en donne aussi les raisons et les nouvelles possibilités
offertes par la réalité contemporaine : « Les conditions d’existence d’aujourd’hui rendent à la fois
plus aisées et plus urgentes la formation des jeunes ainsi que l’éducation permanente des adultes.
Les hommes, en effet, dans une conscience plus aiguë de leur dignité et de leur responsabilité,
souhaitent participer chaque jour plus activement à la vie sociale, surtout à la vie économique et
politique. Les merveilleux progrès de la technique et de la recherche scientifique, les nouveaux
moyens de communication sociale, leur donnent la possibilité dans le moment où ils jouissent de
loisirs accrus, d’accéder plus aisément au patrimoine culturel et spirituel de l’humanité, et de
s’enrichir mutuellement grâce aux relations plus étroites qui existent entre les groupes et entre les
peuples eux-mêmes » [2].
37.1.2. Motivations
Il y a donc au moins trois motifs principaux qui, d’après les textes cités, exigent que tous les
membres du peuple de Dieu, et donc le Coopérateur, perfectionnent toujours leur formation.
Le premier motif se rattache au caractère évolutif de la personne. Celle-ci est dynamique, ouverte et
en croissance. Elle n'est jamais terminée ; elle se construit sans cesse travers son rapport avec son
environnement, en se laissant influencer par lui, en réagissant à ses appels et en le transformant
selon les valeurs auxquelles elle croit et les objectifs qu’elle se propose. En effet, la personne se
développe et mûrit dans la mesure où elle est capable d’apprendre à partir de la vie et de répondre
de façon créative aux nouvelles situations qu’elle lui présente.
Un deuxième motif est lié à la croissance continue qui caractérise la vie chrétienne. Pour le chrétien,
croire n'est pas quelque chose de statique, acquis une fois pour toutes, comme s’il s’agissait d’une
simple connaissance ou de l’acceptation passive de quelques vérités ; mais c’est une adhésion
renouvelée à la personne du Seigneur Jésus et au mystère divin qu’il a révélé, c’est une marche à sa
suite, c’est l’écoute persévérante des appels qu’Il adresse « à travers l’évolution des situations
personnelles et les changements de milieu », comme dit notre paragraphe ; c’est l’attention vigilante
à l’Esprit qui manifeste la volonté de Dieu travers les événements. « Mû par la foi, déclare la
constitution pastorale Gaudium et spes, se sachant conduit par l’Esprit du Seigneur qui remplit
l’univers, le Peuple de Dieu s’efforce de discerner dans les événements, les exigences et les
requêtes de notre temps, auxquels il participe avec les autres hommes, quels sont les signes
véritables de la présence ou du dessein de Dieu » [3]. On le sait, le concile Vatican II a été un
concile de renouveau de tout l’être et de l’agir de l’Eglise et de ses membres. Il a conçu le
renouveau ecclésial non comme un fait momentané, réalisé une fois pour toutes, mais comme une
loi permanente, parce que ce n’est qu’en se rénovant que l’Eglise et les chrétiens peuvent être
fidèles leur mission envers l’humanité en marche.
Un troisième motif se trouve dans le dynamisme de la jeunesse. Il présente toujours des aspects
inédits et imprévisibles de l’humanité, ce qui constitue un défi constant pour celui qui, comme le
Coopérateur, veut assumer des tâches d’éducation en faveur des jeunes. Saisir les aspirations
profondes des jeunes, percevoir les valeurs qui les accrochent et leurs nouvelles possibilités, se
laisser interpeller, élargir leurs horizons pour les rendre disponibles accepter les valeurs et les
messages des adultes... tout cela demande des éducateurs une capacité constante de se rénover.
Cette nécessité d’une formation continue s’avère impérative aujourd’hui. En premier lieu à cause du
rythme accéléré des transformations sociales : un tel changement constitue un défi, qui décourage
souvent, et soulève des questions qui exigent des réponses adéquates. Et cela non seulement dans
certains secteurs de la vie sociale, mais dans tous les milieux de la vie moderne : famille, travail,
loisirs, culture, science, technique, finances, politique... Sur tous ces terrains, pour ne pas s’exposer
au rejet et à la frustration, il faut sans cesse se tenir bien informé et travailler à se renouveler.
En deuxième lieu cause du pluralisme social et culturel qui caractérise beaucoup de sociétés
aujourd’hui et qui, avec une rapidité et une continuité extraordinaires, est mis à la portée de tous par
les moyens de la communication sociale : celui qui veut donner un témoignage lisible et significatif,
et exercer un service apostolique efficace, ne peut se passer de confronter sans cesse son projet
personnel de vie avec ces sollicitations sociales et culturelles.
37.2. Objectifs de la formation permanente (art. 37 § 1)
Compte tenu de ce qui vient de se dire, les objectifs de la formation permanente sont les suivants :
– Accompagner toute la croissance personnelle et rénover son activité dans la société et dans
l’Eglise ;
– Nourrir l’effort personnel pour répondre avec une fidélité, une fécondité et une efficacité
renouvelées aux besoins sans cesse nouveaux de la condition des jeunes et du peuple ;
– Favoriser le renforcement de la vocation, ce qui suppose un effort continuel pour se conformer
toujours plus profondément au Christ, et répondre aux inspirations toujours nouvelles de son Esprit
qui se lisent, à la lumière de la foi, dans les événements personnels et sociaux.
Comprise en ces termes, la formation permanente ne peut se réaliser par le simple recours à
quelques moments spécifiques, nécessaires par ailleurs ; elle comporte un engagement constant
pour développer sa vocation personnelle et exige d’adopter un style et un rythme de vie qui
facilitent le disposition évangélique à se convertir sans cesse pour arriver à se sanctifier.
Concrètement, dans l’organisation de sa vie, avec ses tâches familiales, professionnelle et
apostoliques..., il est important de prévoir des moments adaptés pour la prière, la réflexion, la
lecture et l’étude, pour établir des rapports interpersonnels qualifiés, sans parler de quelques
moments forts comme les retraites, les cours de recyclage etc.
37.3. Contenus de la formation permanente.(art. 37 § 2)
La seconde partie de l’article 37 présente, en quatre petits paragraphes, les principaux contenus de
la formation permanente. En substance, ce sont ceux de la formation initiale avec quelques
particularités, puisqu’il s’agit de perfectionner une formation déjà commencée ou même solide. Le
décret conciliaire sur les fidèles laïcs, dont s’inspire le Règlement, cite expressément la formation
humaine et sociale, la formation spirituelle et ecclésiale, la formation théorique ou doctrinale et
pratique ou concrète. À cause de leur autorité, ces indications conciliaires méritent d’être citées
textuellement.
37.3.1. Indications officielles du concile
La formation humaine : « La formation l’apostolat suppose une formation humaine conforme
la personnalité et aux conditions de la vie de chacun. Le laïc, en effet, grâce à une bonne
connaissance du monde actuel, doit être un membre bien inséré dans son groupe social et dans la
culture qui est la sienne » [4].
La formation sociale : « En vue de faciliter au mieux les “relations humaines”, il convient
aussi de favoriser le développement des valeurs authentiquement humaines, en particulier celles qui
concernent l’art de vivre en esprit fraternel, de collaborer ainsi que de dialoguer avec les
autres » [5]. Un autre texte conciliaire expose de façon plus longue ce même contenu : « Qu’ils [les
laïcs] estiment beaucoup la compétence professionnelle, le sens familial et civique, et les vertus qui
regardent la vie sociale telles que la probité, l’esprit de justice, la sincérité, la délicatesse, la force
d’âme : sans elles il n'y a pas de vraie vie chrétienne » [6].
La formation spirituelle et ecclésiale : « Le laïc apprendra à accomplir la mission du Christ et
de l’Eglise en vivant par la foi le mystère divin de la création et de la rédemption sous la motion de
l’Esprit-Saint qui anime le peuple de Dieu et qui sollicite tous les hommes à aimer Dieu comme un
Père et à aimer en Lui le monde et les hommes. Cette formation doit être considérée comme le
fondement et la condition même de tout apostolat fécond » [7]. À ce sujet le même décret déclare en
outre : « Il est évident que la fécondité de l’apostolat des laïcs dépend de leur union vitale avec le
Christ [...], dans les conditions ordinaires de l’existence [...]. Une telle vie exige un continuel
exercice de la foi, de l’espérance et de la charité » [8].
La préparation doctrinale : « Outre la formation spirituelle, une solide connaissance doctrinale
est requise en matière théologique, morale et philosophique ; cette connaissance devra être adaptée
à l’âge, aux conditions de vie ainsi qu’aux aptitudes de chacun. De plus, il ne faut aucunement
oublier l’importance d’une culture générale appropriée jointe à une formation pratique et
technique » [9].
La formation pratique : « Parce que la formation à l’apostolat ne peut consister dans la seule
instruction théorique, il faut apprendre graduellement et prudemment, dès le début de cette
formation, à voir toutes choses, à juger, à agir à la lumière de la foi, à se former et à se perfectionner
soi-même avec les autres par l’action » [10].
Une dernière note conciliaire importante : « Tout en cherchant à répondre aux multiples
exigences [de la formation], on aura le souci constant de respecter l’unité et l’intégrité totale de la
personne humaine afin d’en préserver et d’en intensifier l’harmonieux équilibre » [11].
Si elle est bien organisée, la formation permanente permet au Coopérateur de développer
l’ensemble de sa personnalité humaine, ecclésiale et salésienne !
37.3.2. Les indications du Règlement
Suivant ces indications du concile, le Règlement demande au Coopérateur d’orienter son effort dans
quatre sens convergents pour se maintenir dans un rythme constant de formation qui prolongera et
complétera naturellement la formation initiale.
Au plan humain : il « développe ses qualités humaines pour pouvoir assumer toujours mieux ses
responsabilités familiales, professionnelles et civiles », décrites par le Règlement aux articles 8
(apostolat séculier en famille), 9 (dans le mariage), 10 (dans le milieu de vie et de travail) et 11
(dans la réalité sociale).
Au niveau spirituel : il « mûrit sa foi et sa charité grandissant dans l’union à Dieu pour rendre sa vie
toujours plus évangélique et plus salésienne », suivant les articles 27 (expérience de foi agissante),
28 (amour apostolique), 31 (affabilité dans les relations), 32 (prière simple et vitale) et 33 (Parole et
sacrements).
Au point de vue doctrinal et culturel : il « consacre du temps à la réflexion et à l’étude, pour
approfondir l’Ecriture sainte, la doctrine de l’Eglise et la connaissance de Don Bosco », dans le sens
du Règlement aux articles 33 § 2 (méditation de la Parole de Dieu), 11 § 1 (fidélité aux orientations
de l’Eglise) et 33 § 1 (il a recours aux sources spirituelles que lui offre l’Eglise).
Par rapport à l’action concrète : il « se perfectionne pour l’apostolat et le service auquel il est
appelé », selon ce qu’indique le Règlement surtout aux articles 14 (tâche de l’éducation chrétienne),
15 (méthode de la bonté), 16 (activités typiques) et 17 (structures ouvertes à l’action).
Le tout selon les exigences de l’esprit de Don Bosco. En particulier, à propos de la formation
théorique et pratique, il est utile de rappeler ici un principe de pédagogie salésienne amplement
reconnu par les recherches des sciences anthropologiques modernes : Don Bosco s’est toujours
méfié d’une formation trop théorique qui ne serait pas confrontée à la vie. Il voulait une doctrine qui
éclaire la pratique et une pratique qui stimule la réflexion, en vue d’une action plus proche de la
réalité de la réalité et plus efficace pour l’apostolat : c’est le sens du concret caractéristique de son
esprit. Par conséquent, pas de doctrine détachée de la vie, ni non plus « une pratique aveugle » ou
de toute façon non éclairée par la théorie ; il voulait plutôt un dialogue constant et profond entre la
théorie et la pratique, entre la réflexion et la vie, entre l’étude et l’action. La rupture de ce dialogue
a de graves conséquences : l’éloignement des personnes et l’inefficacité apostolique.
L’expérience quotidienne offre sans cesse des points pour cette formation permanente. Mais il y a
des moments forts destinés à la favoriser de façon particulière : la récollection mensuelle et la
retraite annuelle pour la partie spirituelle [12] ; des journées ou des semaines de réflexion, des cours
de recyclage ; des camps-écoles, en particulier durant les vacances, pour la partie doctrinale et
apostolique. Celui qui a conscience de la nécessité de sa croissance personnelle acceptera de
sacrifier bien des choses moins utiles pour participer ces rencontres organisées par l’Association ou
par l’Eglise locale et destinées à maintenir élevé le potentiel de sa propre vie apostolique.
[1]. AA, 29f.
[2]. GE, préambule, ainsi que AA, 30a..
[3]. GS, 11a.
[4]. AA, 29b.
[5]. AA, 29e.
[6]. AA, 4i.
[7]. AA, 29c.
[8]. AA, 4ab.
[9]. AA, 29d.
[10]. AA 29f.
[11]. Ib.
[12]. Cf. RVA, art. 34.
ARTICLE 38
RESPONSABILITES ET INITIATIVES POUR LA FORMATION.
§ 1. Le Coopérateur est le premier et principal responsable de sa formation. Sachant combien elle
exige de docilité l’Esprit Saint, il attache de l’importance à la vie de prière et à la direction
spirituelle.
§ 2. L’Association promeut et soutient la formation personnelle et de groupe de ses membres grâce
l’intervention de Coopérateurs qualifiés et du Délégué ou de la Déléguée qui agissent en
coresponsabilité.
§ 3. Les initiatives particulièrement utiles à la formation sont :
– les réunions, au moins mensuelles, et les conférences annuelles, – déjà instituées par Don Bosco 1
– ou d’autres formes de rencontres ;
– les temps forts de prière et de discernement ;
– les contacts fréquents avec les Groupes de la Famille salésienne à tous les niveaux ;
– l’usage de la littérature salésienne et des documents pratiques de la Famille, notamment du
Bulletin salésien.
1.
Cf. RDB VI, 4.
Le titre indique que cet article clarifie à qui revient la responsabilité de la formation des
Coopérateurs (§ 1 et 2) et énumère quelques activités dans ce but (§ 3).
38.1. Chaque Coopérateur est le premier et principal responsable (art. 38 § 1)
Le premier paragraphe s’ouvre par l’affirmation décisive suivante : « Le Coopérateur est le premier
et principal responsable de sa formation ». Seule la personne intéressée peut se former elle-même.
Selon son projet personnel de vie, elle tirera donc parti avec sagesse des contenus et des aides de
formation qui lui viennent de l’extérieur : la famille, le milieu de travail et de loisirs, les institutions
ecclésiales et civiles...
Chaque Coopérateur est responsable de sa propre vie, de ses possibilités personnelles et de sa
fidélité à la vocation salésienne ; comme tel il ne peut donc pas déférer à d’autres la responsabilité
de sa formation ; il doit l’assumer personnellement. Tout comme il lui revient de choisir un style de
vie dynamique, intelligent et généreux, et le type de tâche apostolique pour lequel il se sent le
mieux préparé, c’est également lui qui doit trouver la façon personnelle de se former et recourir, de
manière responsable, à ceux qui peuvent lui offrir les aides nécessaires.
La « docilité l’Esprit Saint » est une condition indispensable pour réaliser de façon cohérente la
tâche personnelle de se former : hôte divin de chaque Coopérateur, l’Esprit du Seigneur Jésus
l’éclaire et le guide tant par des suggestions intérieures et que par des signes ou médiations
extérieurs : les faits quotidiens de la vie et les événements sont des signes de la transparence de
Dieu dans les attentes et les aspirations de l’humanité de notre temps [1] ;.
Le paragraphe signale, en particulier, deux médiations importantes de formation : la « vie de
prière » et la « direction spirituelle ». La méditation personnelle et la participation à la
Réconciliation et à l’Eucharistie, sacrements de la croissance [2], sont pour chaque Coopérateur les
moyens indispensables pour être docile à l’action de l’Esprit.
La direction spirituelle est un autre moyen pour l’éclairer, le guider et le soutenir dans la recherche
de la volonté de Dieu sur lui. La croissance humaine et spirituelle du Coopérateur se réalise à partir
d’un projet personnel de vie, qui, compte tenu de ses conditions naturelles et de son histoire
personnelle, peut lui signaler la route suivre dans les événements quotidiens de l’existence. Cela se
réalise à travers un jeu d’interaction et de dialogue, tant sous la forme traditionnelle de rencontres
personnelles avec un directeur spirituel, que sous les formes plus récentes de la vie de groupe [3].
38.2. L’Association : deuxième responsable (art. 38 § 2)
« L’Association, dit le paragraphe, promeut et soutient la formation personnelle et de groupe de ses
membres ». Cette affirmation s’inspire manifestement du décret conciliaire sur les fidèles laïcs :
« Les groupements et associations diverses de laïcs qui se consacrent à l’apostolat ou à toute autre
fin spirituelle doivent soigneusement et assidûment favoriser, selon leurs objectifs et leurs propres
modalités, cette formation à l’apostolat. Ces organismes constituent d’ailleurs souvent la voie
ordinaire de cette formation à l’apostolat. On y trouve, en effet, la formation doctrinale, spirituelle
et pratique. Leurs membres réunis en petits groupes avec leurs compagnons ou leurs amis,
examinent les méthodes et les résultats de leur action apostolique et cherchent ensemble dans
l’Evangile à juger leur vie quotidienne » [4].
Le futur Coopérateur ou le Coopérateur effectif appartiennent toujours à un Centre et à une
Province. Comme communauté de personnes animées du même idéal apostolique, le Centre (mais
aussi la Province) constitue un milieu précieux pour la formation : il est le lieu de rencontre de tous
ceux qui partagent le même projet ; il est le lieu où l’on grandit ensemble en participant à la vie de
Famille [5] : l’exemple entraîne, l’amitié encourage, l’expérience de l’autre enrichit, les activités
faites ensemble stimulent. Chaque Centre devrait être le noyau dynamique qui soutient, stimule et
oriente et qui, de cette façon, contribue de manière efficace à la formation tant personnelle que de
groupe de ses membres. Pour arriver cela il faut que le Centre soit capable de créer un climat de
confiance et d’acceptation entre les membres.
Parmi les tâches principales des Conseils provinciaux et locaux, l’article 44 § 1 signale celle de
« promouvoir et coordonner les initiatives portant sur la formation » des Coopérateurs.
Dans le contexte du Centre et de la Province, l’article confie des responsabilités particulières de
formation à des Coopérateurs qualifiés et au Délégué et/ou à la Déléguée. Vu la qualification
séculière du Coopérateur, l’apport de Coopérateurs qualifiés à la formation des autres membres de
l’Association est indispensable et, en fait, c’est une possibilité concrète à exploiter au maximum. Il
ne faut pas oublier qu’il y a des prêtres et des diacres séculiers qui font partie de l’Association, et
qu’ils ont des tâches de formation [6]. Avec eux il y a le Délégué et/ou la Déléguée qui selon l’art.
46 § 1, « sont les animateurs spirituels des Coopérateurs, responsables surtout de leur formation
salésienne apostolique ».
L’apport des uns et des autres ne doit évidemment pas se considérer comme concurrentiel ni, pis
encore, comme différent, mais comme complémentaire : les premiers avec leur note séculière, les
seconds avec un caractère de compétence radicale et, dans le cas des Délégués, de ministère
sacerdotal. L’un ne diminue ni n’élimine pas l’autre, mais il le stimule et l’intègre. Notre article (§
2) affirme que les « Coopérateurs qualifiés et le Délégué ou la Déléguée agissent en
coresponsabilité » sur bases d’un « programme de formation » adapté aux nécessités locales [7].
Une tâche spécifique des uns et des autres envers les membres de l’Association sera de se
préoccuper de leur fidélité au projet, de stimuler la responsabilité personnelle dans la formation, de
favoriser les activités de formation (voir paragraphe suivant), en faisant en sorte que la
programmation de la formation personnelle et de groupe se réalise graduellement et de façon
cohérente. Ils ont aussi la tâche de veiller à la préparation spécifique des dirigeants, pour les aider à
être des personnes riches en humanité, capables d’accueil et de dialogue, dotés d’une solide
formation doctrinale, chrétienne et salésienne, d’une vision claire de leur propre identité de
Coopérateurs et pleins d’enthousiasme pour leur mission en faveur des jeunes et du peuple.
L’article 24 § 1 du Règlement étend à toute communauté salésienne, provinciale et locale la
responsabilité de « contribuer à la formation des membres de l’Association ».
38.3. Activités particulièrement utiles à la formation (art. 38 § 3)
La liste des activités utiles à la formation proposée par le troisième paragraphe n'entend pas être
exhaustive, car elle ne peut citer toutes les activités qui s’exercent aujourd’hui dans l’Association,
ni fermer la porte à d’autres possibilités souhaitables selon les exigences locales. Elle se limite en
signaler quelques unes « particulièrement utiles à la formation ».
Les réunions, au moins mensuelles, sont le minimum indispensable à exiger des membres pour que
leur groupe puisse fonctionner et favoriser effectivement la formation selon un rythme de
croissance périodique et progressif. Il n'est pas exclu que, pour favoriser cette croissance, les
rencontres soient plus fréquentes. En fait, bien des Centres prévoient des réunions à des cadences
plus rapprochées. Mais il faut être réalistes et considérer les possibilités concrètes des membres.
De telles réunions peuvent avoir lieu, parfois, pour approfondir un sujet ; d’autres fois, pour
célébrer la foi et sa vie personnelle ; en d’autres circonstances, pour un discernement de situations
concrètes à la lumière de l’Evangile, du Règlement, des documents ecclésiaux ou de la réalité qui
nous entoure ; parfois enfin, pour une révision de la vie, de la fidélité à la vocation personnelle, de
la manière de réaliser le projet apostolique salésien.
La participation aux conférences annuelles ou à d’autres formes de rencontres favorisent sans aucun
doute la formation du Coopérateur, parce qu’elle lui propose des contenus doctrinaux et peut l’aider
à renforcer son sentiment d’appartenir à l’Association et à faire l’expérience plus directe de la
Famille salésienne.
Dans certains pays, les deux conférences traditionnelles qui remontent Don Bosco [8] sont toujours
en vigueur ; ailleurs, par contre, ou bien elles sont tombées en désuétude, ou elles sont jugées moins
adaptées aux situations qui ont changé, du moins dans la manière traditionnelle de les faire. Pour
laisser une large place aux nécessités et à la créativité locales, le Règlement adopte une formule
pluraliste et parle « d’autres formes de rencontres ».
Les temps forts de prière et de discernement nous renvoient à la récollection mensuelle et à la
retraite annuelle (exercices spirituels) de l’article 34. Ce sont des moments privilégiés qui aident à
faire l’expérience de la présence de Dieu dans sa vie personnelle, à pénétrer à fond dans sa propre
vie quotidienne et à intérioriser davantage les valeurs vécues spontanément. La force intérieure qui
naît de ces moments se manifeste bientôt dans les relations avec les autres et donne un sens à
l’engagement apostolique. Ce ne sont pas seulement des moyens de sanctification personnelle, mais
aussi des moments de recharge spirituelle pour faire face, avec un zèle renouvelé, à ses propres
responsabilités humaines, chrétiennes et salésiennes [9].
Don Bosco non seulement parle de deux conférences annuelles, mais il les associe à la célébration
des deux grandes fêtes de saint François de Sales et de Marie Auxiliatrice : il y voyait un facteur
précieux de formation permanente salésienne et d’encouragement « pour persévérer dans les bonnes
œuvres entreprises » [10].
Les contacts fréquents avec les groupes de la Famille salésienne à tous les niveaux. Avec la relance
de la Famille salésienne promue par le Chapitre général spécial, de nombreuses initiatives de
réflexion, d’animation et de collaboration ont vu le jour. Les grands moments de la Famille
salésienne ont augmenté, surtout à l’occasion de célébrations centenaires ou cinquantenaires, de
semaines de spiritualité pour la Famille salésienne, de réunions ou de congrès au niveau régional ou
international. La collaboration au niveau de l’étude et de l’approfondissement de la vocation
salésienne s’est multipliée. Nous nous trouvons ainsi devant un éventail d’activités qui favorisent la
formation permanente des membres des différents groupes : elles aident à comprendre toujours
mieux l’authenticité du don fait par Dieu à Don Bosco, à vivre intensément la totalité des valeurs du
charisme salésien, à découvrir avec plus de clarté la fécondité du projet apostolique et de la
méthode de la bonté, à partager avec générosité l’expérience évangélique de communion et de
collaboration, et à rivaliser les uns avec les autres dans l’accomplissement de sa propre
mission [11].
L’utilisation de la littérature salésienne et des documents de la Famille salésienne : les liens de
communion et de collaboration entre les différents groupes de la Famille requièrent la connaissance
réciproque et l’échange d’informations, d’expériences, de témoignages et d’activités : tous éléments
qui stimulent la croissance spirituelle et apostolique de tous. Nous disposons aujourd’hui de
nombreuses publications et documents de la Famille salésienne. Parmi eux, le Bulletin salésien joue
un rôle particulier : s’il est lu avec assiduité, il devient « un instrument de formation et un lien
d’unité pour les différents groupes de la Famille salésienne » [12].
[1]. GS 4a, 11a.
[2]. Cf. RVA art. 33 § 3.
[3]. Il est utile à ce sujet de lire les volumes de Desramaut F. et Midali Mario (sous la direction de),
La direzione spirituale (LDC, Turin Leumann 1983) ; Direction générale des œuvres de Don Bosco,
La direzione spirituale (Rome 1983).
[4]. AA 30e.
[5]. Cf. RVA art. 19 § 2.
[6]. Cf. RVA art. 20 § 3.
[7]. Cf. RVA, art. 36 § 1.
[8]. Cf. RDB, VI 4.
[9]. Cf. ACGS, 535.
[10]. RDB, V 8.
[11]. Cf. Viganò Egidio, La Famille salésienne, p. 37-39.
[12]. Règl. SDB 1984, art. 41.
ART. 39 FIDÉLITÉ AUX ENGAGEMENTS PRIS.
§ 1. Etre Coopérateur constitue un engagement qui dure toute la vie, même à travers la succession
des événements et la diversité des situations. Avec un sentiment profond d’appartenance, le
Coopérateur saura adapter, au fur et à mesure des circonstances, son témoignage, son apostolat et
les formes de son service dans l’Association.
Sa fidélité est soutenue par l’affection et la solidarité de ses frères Coopérateurs et de ses sœurs
Coopératrices ainsi que des autres membres de la Famille salésienne.
§ 2. L’appartenance à l’Association peut prendre fin, soit par une décision personnelle du
Coopérateur, – mûrement réfléchie et communiquée au Conseil local –, soit par une décision du
Conseil provincial, prise en esprit de charité et dans la clarté, après avoir constaté une teneur de vie
en opposition avec les devoirs fondamentaux exprimés dans ce Règlements.
Cet article dédié à la fidélité traite du dynamisme qui soutient tout le processus de la formation
initiale et de la formation permanente dont il vient d’être question. En deux paragraphes il parle de
la fidélité du Coopérateur aux engagements pris, avec le soutien de l’Association et de la Famille
salésienne (§ 1), et ensuite de la sortie éventuelle de l’Association. (§ 2).
39.1. L’engagement personnel de fidélité (art. 39 § 1)
Pour comprendre le sens de ce paragraphe, il faut se rappeler une donnée fondamentale de la foi
chrétienne : chaque vocation chrétienne est toujours en même temps, une grâce et un engagement,
un don de Dieu et une responsabilité humaine de l’accepter et d’être fidèle aux exigences
évangéliques qu’il impose.
L’article 2 § 2 déclare que « s’engager comme Coopérateur, […] c’est tout à la fois un don et un
libre choix ». Ici nous allons approfondir cette idée avec la déclaration selon laquelle « être
Coopérateur constitue un engagement qui dure toute la vie » (§ 1).
Et puisque suivre la vocation salésienne est une de voies possibles pour vivre les engagements du
Baptême et de la Confirmation [1], la fidélité à la vocation salésienne est une manière spécifique
d’être fidèle à la vocation chrétienne.
C’est pourquoi on n'entre pas dans l’Association comme dans un groupe à terme ou dans un
mouvement d’intérêt momentané : se faire Coopérateur , c’est choisir une longue marche, celle de
la vie même, avec la conviction qu’une telle vocation est suffisamment simple et ouverte sur
l’avenir pour pouvoir se vivre « même à travers la succession des événements et la diversité des
situations ». (§ 1).
Elle est une fidélité :
– à Dieu, qui, par son Esprit, appelle, inspire la décision et la soutient sans cesse ;
– à soi-même, par cohérence au choix fait, « motivé et progressivement mûri » [2] ;
– aux frères et aux sœurs de l’Association et de la Famille salésienne devant qui s’est faite la
Promesse [3] ;
– aux jeunes et aux milieux populaires qu’on veut toujours servir en collaborant à la réalisation du
projet apostolique de Don Bosco [4].
L’article fait entrevoir une vision de l’homme, où il est non seulement possible mais aussi
humainement gratifiant de prendre des décisions qui lient définitivement devant Dieu et autrui.
C’est une vision radicalement positive de l’existence humaine et de sa liberté. La grandeur d’une
liberté se mesure à la constance dans les décisions prises.
Cela dit, il ne faut pas négliger les nombreuses questions que soulève aujourd’hui la fidélité : que
peut réserver l’avenir ? Sera-t-on à la hauteur de l’engagement pris ? Il y aura certes des moments
d’épreuve, de difficulté, d’égarement, de découragement : et alors ?
Avec réalisme le Règlement prévoit tout cela et donne une vision dynamique de la vie humaine du
Coopérateur : il sait qu’au cours de son existence se succèdent différentes étapes chronologiques
(jeunesse, âge adulte, vieillesse), différentes situations existentielles (célibat, fiançailles, mariage,
paternité-maternité, veuvage, bonne santé ou maladie), diverses conditions professionnelles (travail,
loisirs, chômage, mise à la retraite) ainsi que des changements socioculturels, religieux et ecclésiaux
plus ou moins profonds et rapides [5]. Il y a aussi le malheur de l’égarement.
Conscient de tout cela, il rappelle d’abord au Coopérateur la nécessité de l’adaptation : « Avec un
sentiment profond d’appartenance, le Coopérateur saura adapter, au fur et à mesure des
circonstances, son témoignage, son apostolat et les formes de son service dans l’Association » (§ 1).
Les formes concrètes de participation, d’apostolat et de service peuvent changer. Les manquements
peuvent être pardonnés sans limites par le Christ. L’engagement global doit se maintenir avec
fidélité ! Il ne faut pas confondre fidélité et fixisme. Dans la vie sociale et ecclésiale actuelle
marquée par des changements profonds et rapides, la fidélité doit se vivre dans l’engagement
continuel de se renouveler sans cesse, soi-même et son action, avec la force de la « dignité de
pénitent » [6].
39.2. Effort de l’Association pour soutenir la fidélité de chacun (art 39 § 1)
Pour encourager le Coopérateur, le Règlement rappelle aussi que l’engagement personnel de chacun
à être fidèle à sa vocation implique aussi un engagement des autres Coopérateurs et de la Famille
salésienne.
Le paragraphe suggère que, quoi qu’il puisse lui arriver dans la vie, le Coopérateur ne se trouvera
jamais seul devant ses responsabilités. Il trouvera toujours des « frères Coopérateurs » et des
« sœurs Coopératrices » prêts et disposés à le soutenir et à l’aider de leur « affection et [de leur]
solidarité ». Tout le chapitre iii « En communion et collaboration » l’affirme. Si l’on veut que cette
assurance ne reste pas lettre morte, mais se traduise dans la vie, il faut que chaque Coopérateur,
chaque Centre, chaque Conseil soit conscient de cette responsabilité et la renouvelle sans cesse. Il
faut que le sens de la fraternité soit fort et que l’affection réciproque soit réelle.
En cohérence avec ce que Don Bosco voulait de sa Famille apostolique, les salésiens comme les
Filles de Marie Auxiliatrice doivent être conscients de leur tâche, s’intéresser effectivement à leurs
frères Coopérateurs et à leurs sœurs Coopératrices et les soutenir efficacement dans leur
cheminement de fidélité à leur vocation [7].
Il ne faut pas oublier non plus la déclaration de l’article 2 § 2, selon lequel « pour réaliser ce projet,
le Coopérateur s’appuie sur la fidélité de Celui qui l’a appelé ». C’est cette fidélité éternelle de Dieu
qui rend possible la fidélité du Coopérateur à ses engagements.
39.3. La sortie de l’Association (art. 39 § 2)
Les réflexions précédentes font comprendre que l’appartenance à l’Association ne peut cesser que
pour des motifs graves, essentiellement deux : un choix personnel du Coopérateur ou une décision
du Conseil provincial.
Dans le premier cas, il se peut que le Coopérateur, avec ou sans faute de sa part, ne se sente plus en
accord profond avec l’idéal choisi dans le passé, et que, pour clarifier sa situation, il veuille se
libérer des engagements pris, ainsi que (et peut-être surtout) de ses engagements extérieurs. Vu
qu’avec la promesse il s’est engagé devant Dieu et les autres Coopérateurs et qu’il est entré dans
une Association ecclésiale publique, il est plus que normal que le Règlement lui demande de faire
cette démarche avec mûre réflexion :
– approfondir avec sérieux sa décision, compte tenu que son choix précédent n'est pas rien ;
– et communiquer explicitement sa nouvelle décision aux responsables provinciaux, en sorte que
l’Association soit mise officiellement au courant de la nouvelle situation.
L’autre genre de sortie est plus grave et très délicat. Il s’agit du cas d’un Coopérateur qui, non
seulement ne participe plus à la vie et aux activités d’un Centre (il peut toujours y revenir !), mais
qui vit en nette opposition avec les engagements librement pris. Et cela non pour une faute cachée
que Dieu seul peut juger, mais pour des comportements clairs, notoires et bien établis qui
constituent un scandale public, et compromettent sérieusement le témoignage de l’Association, et,
finalement, jettent le discrédit sur l’Eglise elle-même. Il faut prier Dieu d’en préserver
l’Association ! Evidemment, en prenant cette décision, les membres du Conseil se laisseront guider
par deux attitudes, que leur suggère le Règlement : d’un côté, traiter avec « charité » le frère ou la
sœur, ce qui suppose le respect, la compréhension et le dialogue ; de l’autre côté, examiner le
problème avec « clarté », c’est-à-dire avec réalisme, sans tergiversations, en regardant le bien de
l’Association et comme une douloureuse nécessité.
[1]. Cf. RVA, art. 2 § 1.
[2]. RVA, art 36 § 1.
[3]. Cf. RVA, art. 36 § 3.
[4]. Cf. RVA, art. 3.
[5]. Cf. RVA, art. 20 § 3 et notre art. 39.
[6]. Voir le commentaire de l’article 37 n° 37.1 ainsi que 33, § 3.
[7]. Cf. Const SDB 1984, art. 5 et 47 ; Règl. SDB 1984 art. 36, 38 ; Const. FMA 1982, art. 73 ;
Règl. FMA 1982, art. 67.
ARTICLE 40
LA PROMESSE
« Je cours sur la voie de tes commandements, car tu as mis mon cœur au large ». (Ps 119, 32).
La formule de la promesse est la suivante :
« O Père, je T'adore parce que Tu es bon et que Tu nous aime tous.
Je Te remercie de m'avoir créé et racheté,
de m'avoir appelé à faire partie de ton Eglise,
et de m'avoir fait connaître, en elle, la Famille apostolique de Don Bosco.
Elle vit pour Toi au service des jeunes
et des milieux populaires.
Attiré par ton Amour miséricordieux,
je veux te rendre amour pour amour
en accomplissant le bien.
C’est pourquoi, après m'être préparé,
JE PROMETS
de m'engager à vivre le Projet évangélique de l’Association des Coopérateurs salésiens,
à savoir :
– à être un fidèle disciple du Christ
dans l’Eglise catholique ;
– à travailler à ton Règne,
spécialement pour la promotion et le salut des jeunes ;
– à approfondir et à témoigner de l’esprit salésien ;
– à collaborer, en communion de Famille salésienne,
aux initiatives apostoliques de l’Eglise particulière.
Donne-moi, ô Père, la force de ton Esprit,
pour rester fidèle à ce projet de vie.
Que Marie Auxiliatrice, Mère de l’Eglise,
m'assiste et soit mon guide.
Amen ».
NB. Cette formule pourra être adaptée aux diverses situations pour autant que son contenu soit
respecté.
Quand on renouvelle la promesse, au lieu de : « après m'être préparé, je promets », on dit : « je
renouvelle la promesse de... ».
L’article 36 § 3 du Règlement explique le sens et le but de la promesse : par elle le Coopérateur
« exprime sa volonté de vivre son option baptismale selon le présent Règlement ». En cohérence
avec cette orientation, la formule de la promesse proposée à l’article 40 contient comme en synthèse
tout le projet du Règlement de vie apostolique.
La formule comprend trois parties, dont chacune décrit une attitude de fond : une prière d’adoration
et d’action de grâces pour l’amour miséricordieux du Père ; une réponse de générosité apostolique
avec les contenus des engagements pris ; une demande d’aide d’en haut faite avec humilité et
confiance.
40.1. Adoration et action de grâces adressées Père pour les dons reçus
La première partie contient une prière d’adoration et d’action de grâces à Dieu le Père pour ses
nombreux dons.
40.1.1. Prière d’adoration
Tout don provient de Dieu et tout engagement important pour la vie on se prend et se réalise devant
Lui. La formule de la promesse commence par une simple prière d’adoration et d’honneur rendu à
Dieu, et de reconnaissance du mystère infini de son amour et de ce qu’il fait pour sauver
l’humanité. Pour que cette disposition d’adoration soit authentiquement chrétienne, elle doit naître
d’une foi vive, d’une espérance pleine de confiance et d’une charité ardente envers Dieu Trinité,
Père, Fils et Esprit Saint.
L’adoration s’adresse à Dieu comme Père. Ce titre souligne le visage de Dieu le plus original et le
plus caractéristique que Jésus Christ nous a révélé : Il a vécu sa relation avec Dieu justement
comme le Fils bien-aimé du Père. C’est aussi le visage de Dieu que Don Bosco a aimé et a voulu
faire aimer de ses disciples [1].
L’adoration n'est pas une simple disposition spontanée qui vient du cœur : elle est plutôt un acte
motivé par Dieu lui-même, par sa bonté : « Je T'adore parce que Tu es bon », et par son amour pour
toute l’humanité : « et que Tu nous aimes tous ». Le Coopérateur est conscient d’être infiniment
aimé par Dieu d’un amour éternel, personnel et gratuit, et il y répond par un acte d’adoration
profond et sincère. Regarder vers Dieu comme vers l’Amour, c’est saisir le message central de
l’Evangile : « Dieu est amour » (1 Jn 4, 8), et mettre au premier plan l’image de Dieu la plus aimée
de Don Bosco, parce que le mieux en accord, entre autres, avec la charité pastorale qui anime sa
mission et avec « la bonté affectueuse » qui caractérise son esprit [2].
40.1.2. Prière d’action de grâces
La reconnaissance est l’attitude normale de celui qui reconnaît avoir reçu de Dieu des dons
particuliers d’amour. C’est pourquoi l’adoration s’accompagne d’une prière d’action de grâces.
Devenir Coopérateur est le fruit d’un appel libre et gratuit du Père et du Seigneur ressuscité par
l’action de son Esprit. Il faut se référer à cette initiative pour remercier Dieu le Père, d’autant plus
que cette grâce singulière se situe dans une longue chaîne d’autres bienfaits divins : la vie, la
rédemption en Jésus Christ, la rencontre providentielle de la Famille salésienne.
Avec cette prière d’action de grâces, le Coopérateur adopte les sentiments du Seigneur Jésus Christ
qui priait ainsi : « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange : ce que tu as caché
aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. » (Mt 11, 25).
Suit en outre l’exemple de Don Bosco qui enseignait à s’adresser chaque jour à Dieu avec la prière
en usage parmi le peuple chrétien : « Je vous adore, ô mon Dieu, et je vous aime de tout cœur ; je
vous remercie de m'avoir créé, de m'avoir fait chrétien et de m'avoir gardé pendant ce jour » [3].
40.2. Réponse de générosité apostolique et engagée
La deuxième partie de la promesse contient une réponse concrète à l’amour du Père ; elle exprime
les engagements que le Coopérateur assume librement.
40.2.1. Réponse de générosité apostolique
L’adoration de Dieu pour sa bonté et son grand amour de l’humanité, et l’action de grâces qui Lui
est adressée pour tous les bienfaits reçus, éveillent le besoin spontané de répondre à la bonté divine.
Après avoir fait l’expérience de l’amour infini de Dieu, le Coopérateur ne peut pas ne pas y
répondre : « Attiré par ton Amour miséricordieux, je veux te rendre amour pour amour. »
Un telle réponse de générosité apostolique n’est pas le fruit d’un simple effort humain, mais aussi
de l’Amour miséricordieux de Dieu qui « attire ».
La promesse exprime ainsi l’échange mutuel d’amour entre Dieu et le Coopérateur, en continuation
du dialogue d’amour commencé entre eux au Baptême. Et ceci fait partie du grand dialogue
religieux entre Dieu et l’humanité qu’est l’histoire du salut, où l’intervention amoureuse et
salvatrice de Dieu continue à susciter et à solliciter une réponse généreuse de la part de l’humanité.
Loin de se réduire à de simples paroles, la réponse du Coopérateur prend corps dans des œuvres,
dans l’engagement à faire le bien selon ses capacités et sa disponibilité : « Je veux te rendre amour
pour amour en accomplissant le bien », dit la formule. C’est la foi vivante et efficace dont parle
saint Jacques : « Celui qui n’agit pas, sa foi est bel et bien morte » (Jc 2, 17). C’est la charité
recommandée par saint Jean : « nous devons aimer non pas avec des paroles et des discours, mais
par des actes et en vérité » (1 Jn 3, 18). C’est l’amour apostolique ou charité pastorale qui unifie et
stimule l’esprit salésien [4].
40.2.2. « Je promets »
L’acte de promettre à Dieu quelque chose qui Lui plaît fait partie de la vertu de « religion » : vertu
qui fait en sorte que les rapports du Coopérateur avec Lui s’inspirent de sa condition de créature et
de fils et y correspondent. Elle s’enracine dans les vertus théologales et s’exprime par des actes
extérieurs individuels et sociaux, comme justement Lui faire une promesse.
Par cette promesse, le Coopérateur manifeste son ferme propos de s’efforcer de répondre fidèlement
à son appel reçu d’en haut. Elle ne constitue pas un nouvel état de vie pour le Coopérateur. Elle
exprime simplement devant Dieu et devant les frères et sœurs de l’Association, qu’il entend
assumer le projet salésien et remplir les engagements qui lui sont inhérents : c’est un acte d’amour,
de docilité à Dieu et de joie.
40.2.3. Les engagements
Globalement il s’agit de « vivre le Projet évangélique de l’Association des Coopérateurs salésiens »
comme il est présenté dans le Règlement de vie apostolique.
Cet engagement est détaillé dans ses aspects principaux, chacun présentant en synthèse les contenus
des différents chapitres du Règlement.
– « Etre un fidèle disciple du Christ dans l’Eglise catholique », comme chrétien appelé (art. 2)
à être un véritable salésien dans le monde (art. 3) en qualité de laïc, de prêtre ou de diacre (art. 4),
dans une Association publique de fidèles (art. 5) qui fait partie de l’Eglise (art. 6).
– « Travailler à ton Règne, spécialement pour la promotion et le salut des jeunes », dans un
apostolat séculier (art. 7) selon son propre ministère (art. 4 § 3 ; 20 § 3), en famille (art. 8), dans le
mariage (art. 9), dans son milieu de vie et de travail (art. 10), dans la réalité sociale (art. 11) et
culturelle (art. 12), par un service d’éducation chrétienne (art. 14) pour des destinataires privilégiés,
les jeunes (art. 13), avec des activités typiques (art. 16) réalisées dans diverses structures (art. 17).
– « Approfondir l’esprit salésien et en témoigner », précieux héritage de notre Fondateur et
don du Seigneur à l’Eglise (chap. IV).
– « Collaborer, en communion de Famille salésienne, aux initiatives apostolique de l’Eglise
particulière », conscient d’avoir des frères et sœurs en Don Bosco (art. 19), coresponsables dans
l’action (art. 20 et 21), qui participent à la vie de la Famille salésienne (art. 22) ; avec l’appui du
ministère du Recteur majeur (art. 23), en entretenant des liens particuliers avec la Congrégation
salésienne (art. 24) et avec les autres groupes de l’unique Famille (art. 25) ; et tout cela en solidarité
avec les Eglises particulières (art. 18).
40.3. Demande de l’aide divine pour être fidèles
La formule se termine par une prière adressée au Père et une invocation à Marie.
On demande au Père la force de l’Esprit qui seul, remarque l’article 2 § 1, donne la garantie d’être
fidèle à l’engagement pris. Par cette prière, le Coopérateur manifeste avec humilité son incapacité
de s’acquitter, avec ses seules forces, des engagements promis, et exprime en même temps son
espérance en l’abondance de l’aide divine qu’il demande avec une confiance filiale. Il déclare en
outre son propos généreux de rester fidèle au projet de vie qu’il a librement choisi.
Ici vient bien à propos le texte biblique placé en exergue de la formule de la promesse : « Je cours
sur la voie de tes commandements, car tu as mis mon cœur au large ». Tiré de l’admirable psaume
119, le plus long de tout le Psautier, psaume de « l’amoureux de la Loi », qui répète 176 fois à
Dieu : « J'aime ta Loi, si belle et porteuse de bonheur ». Dans cette vision de foi, la mise en pratique
du projet apostolique de Don Bosco est, pour le Coopérateur, une tâche exigeante mais gratifiante !
Le Coopérateur demande ensuite l’aide particulière de Marie, Mère de l’Eglise et patronne
principale de l’Association et de la Famille salésienne : elle est la Vierge Auxiliatrice qui fut
présente de façon particulière dans la vie et la mission de Don Bosco (art. 1 § 1). Le Coopérateur est
plus que convaincu d’avoir besoin de la compagnie maternelle de Marie et de son aide constante
pour être joyeusement fidèle [5].
Même si la formule ne le dit pas, il y aura encore l’intercession des autres Protecteurs de
l’Association (art. 35 § 2 et 3) et l’aide immédiate de nos frères et de nos sœurs (art. 39 § 1).
40.4. Variations dans la formule de la promesse
La note mise au pied de l’article envisage la possibilité d’adapter la formule de la promesse aux
différentes situations de culture, de langue et de milieu... Mais ces adaptations doivent respecter les
contenus de la formule « officielle », présentée par le Règlement et approuvée par le Saint-Siège.
La vocation commune du Coopérateur salésien, la communion de tous les Coopérateurs dans le
cadre de l’Association et le fait que la promesse exprime le « oui » au projet évangélique contenu
dans le Règlement justifient et exigent, en quelque sorte, l’adoption d’une formule de promesse
commune à tous les Coopérateurs du monde. Cela signifie que les adaptations possibles devront
exprimer les mêmes contenus.
[1]. Cf. RDB, VI 2.
[2]. Cf. RVA, art. 27 §2, 28 § 1, 31 § 2, 33 § 3.
[3]. Bosco Jean, La jeunesse instruite, Prières du soir.
[4]. Cf. RVA, art. 28.
[5]. Cf. RVA, art. 27 § 2, 28 § 2, 35 § 1.
CHAPITRE VI
ORGANISATION
« Mettez-vous, chacun selon le don qu’il a reçu, au service les uns des
autres, comme de bons administrateurs de la grâce de Dieu en sa diversité » (1P 4, 10).
Le texte biblique est tiré de la première lettre de Pierre qui contient l’invitation pressante à
envisager la venue du Seigneur : « La fin de toutes choses est proche ». (4, 7) C’est un appel destiné
à susciter le désir du juste jugement en même temps que du réconfort de la récompense. C’est le
fondement dogmatique de la parénèse répétée aux premiers chrétiens, mais qui a perdu de son
impact aujourd’hui.
Encouragée aussi par cette vision de l’avenir, la communauté chrétienne à qui s’adresse Pierre
intensifie sa vie de prière (4, 7) et de charité fraternelle « car la charité couvre la multitude des
péchés » (4, 8). La charité fixe un but et donne un style à l’exercice des relations dans la vie
communautaire, et donc aussi à l’exercice des responsabilités de direction.
C’est à ce style que se réfère le Règlement quand il parle de coresponsabilité dans l’action (art. 20).
Coresponsabilité due au fait de la pluralité des différents charismes qui s’y trouvent, si bien que
chacun met ceux qu’il a au service d’autrui. Pierre avertit chacun de ne pas méconnaître son
charisme personnel, mais de le mettre au service de tous, puisqu’il s’agit d’une grâce et non d’une
propriété ; nous n’en sommes que des administrateurs, et non des maîtres (4, 10).
Ce passage de Pierre donne une excellente synthèse de la coresponsabilité communautaire, où la
spécificité des dons spirituels, et donc aussi de ceux qui ont des charges de direction, ne diminue
pas la réciprocité de l’amour, mais la renforce. En effet l’amour chrétien est un amour qui fait
grandir, puisqu’il vient de Dieu et qu’il prend de Lui sa consistance et sa valeur.
PRELIMINAIRES
1. Place du chapitre
Dans le Nouveau Règlement (1974), les articles consacrés à l’organisation se groupaient dans une
deuxième partie intitulée « Comment ils sont organisés », bien distincte de la première partie
consacrée à décrire l’identité du Coopérateur.
Dans le travail de révision de ce Règlement, on s’est rendu compte de ce que l’organisation n’est
pas une chose à part, détachée du Règlement, mais que, sous certains aspects, elle entre dans
l’identité même du Coopérateur. En effet l’article 3 qui lui est consacré déclare que le Coopérateur
s’engage à collaborer à la réalisation du projet apostolique de Don Bosco, non individuellement,
mais « sous une forme associée et fraternelle ».
À partir de cette idée, au cours de la révision du Nouveau Règlement, on avait introduit les articles
essentiels sur l’organisation dans le chapitre intitulé « En communion et collaboration ».
Cette option n’a pas été partagée, parce qu’elle alourdissait trop ce chapitre sur la communion et la
collaboration, et surtout parce qu’on estimait nécessaire de réserver un chapitre particulier à la
présentation, simple et essentielle, des principes constitutifs de l’organisation de l’Association, à
placer à la fin de l’ensemble. C’est justement ce chapitre vi [1].
2. L’organisation de l’Association à la lumière de Vatican II
Il n’est pas possible aujourd’hui de parler des associations catholiques sans tenir compte des
orientations de Vatican II contenues dans le décret Apostolicam actuositatem. En voici les grandes
lignes.
2.1 Nécessité de l’apostolat organisé dans l’Eglise
Selon le décret sur les fidèles laïcs, l’apostolat organisé a ses racines dans la nature même de
l’Eglise, peuple de Dieu, Corps du Christ, temple de l’Esprit Saint. « L’apostolat organisé
correspond bien à la condition humaine et chrétienne des fidèles ; il présente en même temps le
signe de la communion et de l’unité de l’Eglise dans le Christ qui dit : “Là où deux ou trois sont
réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux” (Mt 18, 20) » [2].
Un tel apostolat a des répercussions très positives sur les membres de l’association et sur les
bénéficiaires de leur action. « L’apostolat organisé est aussi très important parce que souvent, soit
dans les communautés ecclésiales, soit dans les divers milieux de vie l’apostolat requiert une action
d’ensemble. Les organisations créées pour un apostolat collectif soutiennent leurs membres, les
forment à l’apostolat, ordonnent et dirigent leur action apostolique de telle sorte qu’on puisse en
espérer des résultats beaucoup plus importants que si chacun agissait isolément » [3].
Dans les situations actuelles, l’apostolat organisé se présente, à beaucoup de points de vue, comme
l’unique façon d’avoir un impact chrétien sur les divers milieux. « Dans la conjoncture actuelle il
est souverainement nécessaire que là où s’exerce l’activité des laïcs se développe l’apostolat sous sa
forme collective et organisée ; seule en effet cette étroite conjonction des efforts peut permettre
d’atteindre complètement tous les buts de l’apostolat d’aujourd’hui et d’en protéger efficacement
les fruits. Dans cette perspective il est particulièrement important que l’apostolat atteigne les
mentalités collectives et les conditions sociales de ceux dont il se préoccupe, sinon ceux-ci seront
souvent incapables de résister à la pression de l’opinion publique ou des institutions » [4].
Parmi les nombreuses formes d’apostolat organisé, le Concile donne une importance particulière à
quelques unes : les Coopérateurs en font certainement partie. « Parmi ces groupements, il faut en
premier lieu considérer ceux qui favorisent et mettent en valeur une union plus intime entre la vie
concrète de leurs membres et leur foi » [5].
Enfin, Vatican II souligne le rôle unique que peuvent jouer dans la mission universelle de l’Eglise,
les associations qui travaillent à l’échelle internationale, comme justement l’Association des
Coopérateurs. « La mission universelle de l’Eglise, étant donné la mise en place progressive des
structures et l’évolution de la société actuelle, requiert de plus en plus le développement des
associations apostoliques des catholiques au plan international » [6].
2.2. Principes qui règlent l’organisation de l’Association
Après le Concile, toutes les associations ont traversé une crise plus ou moins profonde et ont fait
des efforts remarquables pour se réorganiser et se revitaliser dans le but d’appliquer les directives
conciliaires et de mieux répondre aux défis lancés par les rapides changements sociaux et
ecclésiaux.
L’Association des Coopérateurs a participé largement et avec sérieux à ce travail de renouveau. La
rédaction actuelle du chapitre vi reflète ce travail de longue haleine, fruit mûr d’une décennie
d’expérimentation des structures présentées par le « Nouveau Règlement ».
Ce chapitre garde les principes incontournables de Don Bosco, que le Chapitre général spécial des
salésiens a d’ailleurs une nouvelle fois proposés, par : par exemple le principe de l’unité, de la
souplesse, de l’adaptation (art. 41 § 1) ; en outre il réaffirme l’importance du Centre local, comme
fondamental pour l’organisation de l’Association (art. 41 § 2), et s’appuie davantage sur la Province
que sur le pays. (art. 42 et 47).
Il a suivi les directives du Concile, par exemple à propos du principe de subsidiarité, qui débarrasse
l’Association d’un aspect rigide et pyramidal et organise avec bonheur les responsabilités aux
divers niveaux : local, provincial et mondial, pour laisser un vaste champs de manœuvre aux
Centres et en favoriser ainsi la vitalité et la créativité.
Enfin il a introduit les recommandations expresses du nouveau Code de droit canonique, à propos
surtout de surtout de la composition et de la compétence des Conseils, de l’érection des Centres, de
la figure juridique du Délégué et de la Déléguée, et de l’administrations des biens de l’Association.
La lecture de ce chapitre devra tenir compte de ces critères. En particulier il ne faudra pas assimiler
les côtés juridiques et canoniques à de simples aspects techniques d’organisation, ni les confondre
avec les points de vue juridiques et civils. Les premiers se rapportent en effet à la réglementation de
l’Eglise, présidée par des principes ecclésiologiques, théologiques et spirituels : ils définissent le
but, la nature, les personnes et la constitution de son organisation et de ses organismes. Les autres
aspects regardent en principe les modalités, les temps, les formes… nécessaires au but.
3. Division du chapitre
La division du chapitre est dictée par les options de fond qui viennent d’être indiquées et elle se
présente avec cohérence et clarté : elle suit une ligne ascendante à partir du Centre local qui en est
la base, pour remonter jusqu’à la Consulte mondiale :
Le Centre, noyau de base de l’organisation :
Insertion dans la réalité provinciale :
Conseil local et Conseil provincial :
Tâches principales des Conseils :
Tâches spécifiques des Conseils :
Délégués et Déléguées :
Coordination au plan national ou régional :
La Consulte mondiale :
L’administration des biens de l’Association :
art. 41
art. 42
art. 43
art. 44
art. 45
art. 46
art. 47
art. 48
art. 49
[1]. Cf. Atti e Documenti del 2° Congresso mondiale Cooperatori Salesiani 105 s.
[2]. AA, 18a.
[3]. AA, 18c.
[4]. AA, 18d.
[5]. AA, 19b.
[6]. AA, 19c.
ARTICLE 41
LE CENTRE, NOYAU DE BASE DE L’ORGANISATION.
§ 1. Pour que la communion soit effective et la collaboration efficace, l’Association, de par la
volonté du Fondateur, est dotée d’une organisation souple, pouvant s’adapter aux diverses situations
culturelle est ecclésiales.
§ 2. Le Centre est le noyau fondamental de la vie de l’Association. Il regroupe les Coopérateurs
œuvrant dans un territoire déterminé. Il est établi auprès d’une œuvre des Salésiens, des Filles de
Marie Auxiliatrice, ou en dehors de ces œuvres. Il anime et coordonne les activités locales.
§ 3. Les Coopérateurs qui résident là où il n'y a pas de Centre, restent toujours rattachés au Centre le
plus proche. Celui-ci maintient les contacts avec eux et les aide à participer à la vie et aux activités
du Centre.
En trois paragraphes distincts, l’article présente d’abord les principes généraux qui règlent
l’organisation ; ensuite il donne la configuration du Centre local, et enfin la situation des
Coopérateurs qui résident loin d’un Centre.
41.1. L’organisation en général (art. 41 § 1)
Dans son ensemble, l’organisation de l’Association veut rester fidèle à la volonté de son Fondateur
Don Bosco.
41.1.1. La volonté du Fondateur
Une des grandes préoccupations de Don Bosco était de réunir les forces du bien pour les rendre plus
efficaces. En homme zélé mais réaliste, il a donc voulu, dès le début, que les Coopérateurs forment
une Association « organisée ». De cette organisation, son esprit souple et pratique a tracé les
grandes lignes qui se trouvent au chapitre v de son Règlement de 1876.
Il a voulu qu’elle s’organise de façon à pouvoir s’adapter aux situations locales, très diverses, et au
service des Eglises locales. Mais conscient de l’importance pour l’Eglise universelle d’une
organisation de niveau international, il a donné aux Coopérateurs, grâce à la Congrégation
travaillant à présent dans divers pays, le même souffle international et une organisation plus large
que celle du groupe local. Cette organisation était essentiellement constituée des « décurions » et
des directeurs salésiens, qui étaient les représentants, au niveau local, du seul supérieur central, Don
Bosco en personne.
Ce n'est pas ici le lieu pour reconstruire l’histoire successive de l’Association avec toutes ses
modifications de structure introduites peu à peu. Le Règlement se limite à indiquer l’esprit et la
finalité de l’organisation actuelle, ainsi que sa configuration.
41.1.2. Esprit et finalité de l’organisation actuelle
« Pour que la communion soit effective et la collaboration efficace, l’Association [...] est dotée
d’une organisation souple, pouvant s’adapter aux diverses situations culturelles et ecclésiales » (§
1). Cette déclaration de base laisse entrevoir l’esprit qui anime tout le chapitre caractérisé par un ton
plus nettement juridique et positif.
Il indique clairement le double but de l’organisation : rendre effective la collaboration ; donner une
efficacité concrète à la collaboration des Coopérateurs entre eux et avec les autres forces
apostoliques de la Famille salésienne et de l’Eglise.
Ce chapitre ne contient donc pas de normes positives froides, de type bureaucratique ; il présente
plutôt la structure indispensable à l’Association pour qu’elle puisse atteindre son but aux deux
points de vue personnel et communautaire.
La communion, en effet, lie les Coopérateurs entre eux en tout ce qui concerne la vie de
l’Association, y compris donc les normes fixant certains points fondamentaux par lesquels le
Coopérateur réalise, avec les moyens et les structures fournis par l’Association, sa formation
personnelle, initiale et permanente, et la communion fraternelle avec les autres Coopérateurs [1].
La collaboration exige aussi nécessairement l’organisation : sans quoi elle ne pourrait pas avoir
d’efficacité concrète. Les structures d’une Association comme celle des Coopérateurs ne sont pas
des fins en soi, mais sont justement établies pour faciliter la réalisation des buts de l’Association.
Non pas sous la forme de groupe spontané, mais comme un ensemble de personnes animées par le
même esprit et engagées vers un objectif commun avec les mêmes moyens. Loin de la supprimer,
cela facilite et renforce l’initiative personnelle ou de groupe, en l’intégrant harmonieusement dans
l’action organisée.
Dans le concret, ce qui manifeste cette communion et cette collaboration, c’est la disponibilité
essentielle à vivre avec les autres frères et sœurs certains moments indispensables prévus par le
Règlement, et la disponibilité que permet la condition personnelle de travail et de famille pour les
tâches apostoliques. L’organisme doit donc stimuler, coordonner et appuyer la « disponibilité » de
ses membres.
41.1.3. Configuration de l’Association
L’Association, dit le paragraphe, est dotée d’une organisation souple, pouvant s’adapter... Cette
caractéristique tient au fait que la vocation spécifique du fidèle laïc l’engage dans des situations
sociales, culturelles et religieuses variées ; elle tient en outre à la dimension internationale de
l’Association qui travaille dans des contextes religieux et culturels très différents.
Il faut donc pas voir dans la souplesse et l’adaptabilité une sorte d’approximation et de
superficialité, mais « ce qui est possible et réalisable » même dans les situations précaires et
difficiles.
Le paragraphe répète en d’autres mots le respect des personnes qui, se trouvant dans ces situations
variées de culture, de milieu, de systèmes politiques et de structures ecclésiales, peuvent trouver une
façon de réaliser le projet apostolique de Don Bosco avec un minimum de formes organisées et
d’organismes représentatifs.
C’est la raison pour laquelle l’organisation de l’Association prévoit dans son ensemble quatre
cadres différents. Deux d’entre eux sont indispensables : le Centre local (art. 41 § 1) et l’organisme
mondial, la Consulte (art. 48) ; un troisième est proposé comme important en fait et à réaliser « dès
que possible », c’est-à-dire quand il n'y a pas d’empêchements : le regroupement provincial des
Centres (art. 42 § 1) ; le quatrième est envisagé comme possible : la Conférence nationale ou
régionale (art. 47). C’est aussi pourquoi les organismes de direction et d’animation prévoient un
nombre différent de membres, justement pour tenir compte des possibilités locales. (art. 43 § 2 et 3).
41.2. Le Centre (art. 41 § 2)
41.2.1. Noyau de base
Le Centre est le point le plus important du fait que c’est de lui que dépend la vitalité de
l’Association. L’article le définit comme « le noyau fondamental de la vie de l’Association. Il
regroupe les Coopérateurs œuvrant dans un territoire déterminé » (§ 2).
Le Centre est en effet une structure indispensable : il est la cellule vitale pour réaliser les buts de
l’Association, il est le noyau et le fondement en tant qu’il donne énergie et soutien à l’Association,
il est l’unité fondamentale de l’action. Les autres organismes au niveau supérieur (provincial,
régional ou national et mondial) sont à son service : ils le stimulent, le renforcent et l’aident sur sa
route, dans le respect de son autonomie (à ne pas confondre avec l’indépendance) et ils favorisent sa
communion avec toute l’Association, avec les autres groupes de la Famille salésienne et avec son
modérateur suprême et supérieur, le Recteur majeur.
41.2.2. Sa constitution
Le Centre se constitue par un acte triple : l’autorisation, l’acte collégial du Conseil provincial, le
décret du Coordinateur provincial.
L’autorisation pour la constitution d’un Centre, c’est-à-dire l’acceptation formelle pour cet acte
juridique et canonique spécifique, est donnée par le Provincial, si le Centre est situé près d’une
œuvre des salésiens. Elle est nécessaire pour que la constitution du Centre même soit valide. À
l’autorisation du Provincial doit s’ajouter celle de la Provinciale, si le Centre est situé près d’une
œuvre des Filles de Marie Auxiliatrice ; ou bien celle de l’évêque diocésain, si le Centre est
constitué ailleurs qu’auprès des œuvres tenues par les salésiens ou les Filles de Marie Auxiliatrice :
cela en conformité au Canon 381 du Code de droit canonique.
Comme il s’agit d’un acte juridique formel, l’autorisation doit être donnée par écrit. Cela par la
nature même de l’acte d’autorisation dans le cas du Provincial et de la Provinciale, selon le canon
37 ; et en vertu du canon 312 § 2 dans le cas de l’évêque diocésain.
L’acte collégial du Conseil provincial est la deuxième condition requise pour la constitution d’un
Centre : vu que le Règlement ne donne aucune disposition différente, cet acte doit se faire selon le
Canon 119 n° 2 du Code de droit canonique qui dit : « A force de droit ce qui, la majorité des
personnes qui doivent être convoquées étant présente, a recueilli les suffrages de la majorité absolue
[moitié plus un] des présents ; si après deux scrutins, les suffrages demeurent égaux, le président
[coordinateur], par son vote, peut dirimer l’égalité ».
3) Le décret du coordinateur du Conseil provincial doit être produit par écrit selon le canon 51
du Code, avec la mention des actes précédents [2].
41.2.3. Composition et finalité
Selon l’article 41 § 2, le Centre « regroupe les Coopérateurs œuvrant dans un territoire déterminé. Il
est établi auprès d’une œuvre des salésiens, des Filles de Marie Auxiliatrice, ou en dehors de ces
œuvres ».
Il est important, pour toute une série de raisons, comme la formation reçue, la tradition ou d’autres,
qu’il y ait un lien personnel du Coopérateur à un Centre donné. Mais il faut surtout se retrouver sur
le territoire où travaille la communauté religieuse des salésiens ou des Filles de Marie Auxiliatrice :
c’est important pour la vie de communion et de collaboration avec eux, ainsi que pour la solidarité
du Coopérateur avec les Eglises locales [3].
Les finalités du Centre sont l’animation et la coordination des activités locales, selon les directives
tracées par le Règlement, en rapport surtout avec l’apostolat dans le milieu social (art. 11 § 2), les
activités typiques salésiennes (art. 16), la vie de famille (art. 19 § 2 et 3), la coresponsabilité dans
l’action (art. 20) et la solidarité financière (art. 21), la participation à la vie de la Famille salésienne
(art. 22, 24 et 25), la formation initiale et permanente (art. 36 et 38).
Cette double finalité d’animation et de coordination des activités locales est évidemment à rejoindre
selon les rôles et les compétences des structures de service propres à chaque Centre.
41.3. Coopérateurs résidant loin du Centre (art. 41 § 3)
L’article 41 § 3 tient compte du cas particulier des Coopérateurs résidant géographiquement loin
d’un Centre ou résidant dans une localité où n’est pas encore constitué de Centre. Il résout l’aspect
juridique en déclarant que ces Coopérateurs « restent toujours rattachés au Centre le plus proche ».
Il souligne donc les devoirs de ce Centre à leur égard : il « maintient les contacts avec eux et les
aide à participer à la vie et aux activités du Centre ».
Cela implique en pratique que le Centre connaisse la résidence de ces Coopérateurs et leur adresse,
qu’il les visite au moins de temps en temps, les informe à temps sur les activités du Centre, et toute
une série de contacts que les principes de communion et collaboration sauront suggérer tant au
Coopérateur éloigné qu’aux membres du Centre le plus proche, en particulier aux membres du
Conseil local.
[1]. Cf. RVA art.19, 36 et 38.
[2]. Cf. RVA, art. 45 § 2.
[3]. Cf. RVA, art. 18 § 1.
ARTICLE 42
INSERTION CONCRÈTE DANS LA PROVINCE.
§ 1. Les centres s’organisent, dès que possible, sur le plan provincial, en s’appuyant sur la structure
de la Province salésienne. Ce lien leur permet de se développer et de travailler plus concrètement et
sur une plus large échelle.
§ 2. C’est pourquoi le Provincial, en union avec le Recteur majeur et participant de son ministère, a
la responsabilité particulière d’animer, de guider et de promouvoir l’Association, conformément au
présent Règlement.
Les deux paragraphes de l’article traitent respectivement du regroupement provincial des Centres,
puis du genre de présence et de responsabilité du Provincial salésien sur ce point.
42.1. Le regroupement provincial (art. 42 § 1)
Un point très important pour l’organisation est le regroupement des Centres au niveau provincial. Il
s’appuie sur la « structure de la Province salésienne » et s’effectue par les Centres constitués dans le
cadre de cette même Province.
Le texte du paragraphe fait clairement comprendre que ce regroupement est à considérer comme
nécessaire. Cependant, vu les différentes situations de l’Association dans les divers pays, là où il
n’est pas encore réalisé, le texte demande de le faire, non pas immédiatement, mais « dès que
possible ». C’est un exemple où s’applique le principe qui veut que l’organisation de l’Association
soit souple et sache s’adapter (cf. art. 41 § 1).
Le but du regroupement des Centres est de « leur permettre de se développer » par l’accroissement
du nombre des Coopérateurs et des Centres ; et de leur permettre aussi « de travailler plus
concrètement et sur une plus large échelle ». Tout cela grâce aux rapports de communion et de
collaboration établis précisément au niveau provincial.
La décision de se constituer ou non en structure provinciale, ou la détermination du nombre
suffisant de Centres pour la mettre sur pied découle des buts dont il vient d’être question.
La procédure pour s’organiser en structure provinciale pourrait être la suivante : par l’intermédiaire
de son Délégué pour la Famille salésienne, le Provincial convoque les Conseils locaux des centres
qui ont déjà des rapports entre eux ; ceux-ci examinent la possibilité d’un regroupement sur le plan
provincial. Si la majorité absolue des Conseils est favorable, on peut procéder à l’élection du
Conseil provincial.
42.2. Le genre de présence et de responsabilité du Provincial (art. 42 § 2)
Ce deuxième paragraphe doit se lire et comprendre à la lumière de deux principes généraux relatifs
à l’organisation de l’Association :
– Une juste autonomie, qui découle de la nature même de la vocation laïque des Coopérateurs :
l’Association est d’un intérêt premier pour les Coopérateurs, « c’est leur maison », dirait Don
Bosco ; c’est pourquoi les responsables sont élus par la base et non imposés ni même simplement
proposés par d’autres instances ;
Une communion nécessaire et spécifique avec la Congrégation salésienne, à cause des liens
particuliers de l’Association avec le Recteur majeur et la Congrégation elle-même. (Voir
commentaire des articles 5, 23 et 24).
42.2.1. Responsabilités du Provincial
Vu le lien étroit du regroupement des Centres avec la structure de la Province des salésiens, le
Provincial a « une responsabilité particulière » vis-à-vis de l’Association des Coopérateurs. Cette
responsabilité tient au fait que le Provincial participe à ce sujet aux tâches fondamentales du
Recteur majeur lui-même, selon le commentaire de l’article 23 § 3.
Cette responsabilité du Provincial s’étend non seulement à la circonscription des salésiens au niveau
provincial, mais aussi à chaque Centre, puisqu’il se situe dans une structure provinciale qui s’appuie
sur la Province des salésiens.
Le ministère pastoral du Provincial s’exerce dans trois directions :
– Animer, c’est-à-dire aider l’Association, personnellement ou par les Délégués compétents, pour
qu’elle soit capable de donner une réponse prophétique aux besoins sociaux et culturels de l’époque
et du lieu, à partir du patrimoine spirituel laissé par Don Bosco [1] ;
– Guider, c’est-à-dire éclairer l’Association dans ses options, pour qu’elle soit toujours fidèle au
projet de Don Bosco de vivre en communion et en collaboration avec les autres groupes de la
Famille salésienne [2] ;
– Promouvoir, c’est-à-dire créer les conditions nécessaires qui dépendent des salésiens, pour le
développement en nombre et en qualité des Centres et du regroupement provincial.
42.2.2 Tâches du Provincial
Pour compléter le commentaire de l’article 23 § 3, il est bon d’indiquer ici les différentes tâches du
Provincial vis-à-vis de l’Association.
Ce sont d’abord des tâches personnelles, c’est-à-dire confiées à sa charge pastorale directe, à
savoir :
– Donner son consentement pour l’érection d’un Centre auprès d’une œuvre des salésiens ou des
Filles de Marie Auxiliatrice, selon l’article 45 § 2 ;
Pourvoir à « l’assistance spirituelle des Centres » (art 23 § 3) par la nomination du Délégué de
chaque Centre local et du Délégué du regroupement provincial des Centres, selon les conditions
posées par l’article 46 § 2 du Règlement et « sans retards injustifiés » selon la Convention (art 9) ;
Associer les communautés salésiennes de la Province et leurs Directeurs, selon les dispositions
de l’art. 23 § 3 du RVA.
Il y a des tâches que le Provincial exerce en collaboration avec les autres Provinciaux :
Approuver, avec les autres Provinciaux intéressés, la constitution éventuelle d’une Conférence
nationale ou régionale, selon l’article 47 § 1 ;
Désigner, avec les Provinciaux et les Provinciales des Provinces intéressées, le Délégué national
et/ou régional, selon l’article 46 § 3 ;
Désigner, avec les Provinciaux et les Provinciales intéressés, les Délégué(e)s provinciaux (ales)
des salésiens et des Filles de Marie Auxiliatrice pour l’assemblée élective du représentant de la
région à la Consulte mondiale, selon les dispositions de l’article 48 § 2.
Le Règlement fixe aussi les limites de la compétence des Provinciaux par rapport à
l’Association. En effet ils agissent « dans le contexte de leurs responsabilités propres à l’intérieur de
la Société de saint François de Sales » (art 23 § 3), en ce qui regarde l’action particulière des
confrères salésiens par rapport aux Coopérateurs. En outre, en matière d’animation, de guidance et
de promotion de l’Association, ils doivent agir « conformément au présent Règlement » comme le
dit cet article 42 § 2, et « dans les limites fixées par le Règlement », comme précise l’article 1 § 1 de
la Convention.
42.2.3. Tâches spécifiques des Provinciales
Rappelons d’abord ce que disent les Règlements des Filles de Marie Auxiliatrice par rapport à
l’Association des Coopérateurs : « Sachant que Don Bosco a voulu que les Coopérateurs salésiens
soient des forces vives dans l’Eglise, nous favoriserons le développement de cette Association. Là
où ce sera possible, nous veillerons à promouvoir la constitution de "Centres de Coopérateurs"
auprès de nos maisons. Nous ferons connaître cette vocation aux jeunes et à nos divers
collaborateurs » [3].
D’après la Convention, les Provinciales ont les devoirs spécifiques suivants :
Donner leur consentement, avec le Provincial salésien intéressé, pour l’érection, la fusion, le
transfert ou la suppression d’un Centre situé auprès d’une œuvre des Filles de Marie Auxiliatrice,
selon l’article 45 § 2 du Règlement et des articles 2-4 de la Convention ;
Nommer la Déléguée du Centre et la Déléguée du regroupement provincial des Centres, selon les
conditions posées par l’article 46 § 2 du Règlement et « sans retards injustifiés », selon la
Convention (art 9) ;
Désigner, avec les Provinciaux et les Provinciales intéressés, le Délégué(e) national(e) et/ou
régional(e), selon les dispositions de l’article 47 § 3 ;
Désigner, avec les Provinciaux et les Provinciales intéressés, les Délégué(e)s provinciaux(ales)
des salésiens et des Filles de Marie Auxiliatrice pour l’assemblée élective du Représentant de la
Région à la Consulte mondiale, selon les normes de l’article 48 § 2.
[1]. Viganò E. L’Association des Coopérateurs salésiens, 24 s.
[2]. Cf. Conv. 1 § 1.
[3]. Règl. FMA 1982, art 67.
ARTICLE 43
CONSEIL LOCAL ET CONSEIL PROVINCIAL
§ 1. L’Association est dirigée collégialement par un Conseil au niveau local comme au niveau
provincial.
§ 2. Le Conseil local est constitué de membres élus par les Coopérateurs du Centre. Il comprend un
nombre convenable de Conseillers de trois à sept et le Délégué ou la Déléguée locale.
§ 3. Le Conseil provincial est constitué de membres élus par les Conseillers des Centres. Il
comprend un nombre convenable de Conseillers de trois à douze , le Délégué provincial SDB,
la Déléguée provinciale FMA et, éventuellement, quelques Délégués ou Déléguées locaux.
§ 4. Les Conseillers élus demeurent en charge trois ans et peuvent être réélus pour un second
mandat de trois ans.
§ 5. Les salésiens de Don Bosco et les Filles de Marie Auxiliatrice ne peuvent pas dépasser le tiers
du nombre des membres du Conseil.
Cet article traite de la façon de conduire ou de diriger l’Association, ainsi que de la structure des
Conseils local et provincial. En fait il définit la forme d’autonomie propre de l’Association des
Coopérateurs.
Avant d’en souligner les contenus, il est bon de dédier un peu de place à ce sujet longuement étudié
et largement discuté au cours de la rédaction du « Nouveau Règlement » (1973-1974), de la période
d’essai qui a suivi et de la révision définitive de l’actuel Règlement de vie apostolique.
43.1. L’autonomie de l’Association (art. 43 § 1-3, 5)
Les notes qui suivent complètent les commentaires des articles sur le ministère du Recteur majeur
(art. 23), les liens particuliers avec la Congrégation salésienne (art. 24), le ministère du Provincial
(art. 42 § 2), et celui qui se fera au sujet des Délégué(e)s (art. 46). Par conséquent, elles ne doivent
pas se prendre à part, mais se situer dans la réflexion sur l’autonomie de l’Association dans son
union particulière avec la Congrégation salésienne.
Il faut avant tout se rappeler deux principes de Vatican II qui figurent dans le nouveau Code de droit
canonique au sujet des « association des fidèles » [1]. « Les laïcs tiennent de leur union même avec
le Christ Chef le devoir et le droit d’être apôtres. Insérés qu’ils sont par le baptême dans le Corps
mystique du Christ, fortifiés grâce à la confirmation par la puissance du Saint-Esprit, c’est le
Seigneur lui-même qui les députe à l’apostolat » [2]. Etant donné ensuite l’étroite relation de
l’apostolat organisé avec la nature de l’Eglise-communion, il en ressort un deuxième principe : « Le
lien nécessaire avec l’autorité ecclésiastique étant assuré, les laïcs ont le droit de fonder des
associations, de les diriger et de leur donner un nom » [3].
Le Chapitre général spécial des salésiens a tenu compte de ce principe (même si dans l’Association
il n'y a pas que des fidèles laïcs) et, en même temps, de la pensée de Don Bosco. Il a ainsi formulé
un double principe : la juste autonomie des Coopérateurs, à ne pas confondre avec séparatisme, et
leur nécessaire union institutionnelle avec la Congrégation salésienne. Voici les déclarations
indiscutables :
« L’autonomie de chaque groupe [de la Famille] est à garantir afin que chacun puisse exprimer
intégralement ses propres richesses. Mais il faut également réaffirmer le lien extérieur et fonctionnel
des groupes afin que soit aussi exprimée leur vocation salésienne commune » [4].
« Intercommunication et collaboration ne sont pas à identifier avec une dépendance des divers
groupes par rapport à la congrégation salésienne. Réaffirmons au contraire leur autonomie,
d’ailleurs diversement réalisable, aussi bien dans la conduite interne du groupe que dans le secteur
administratif » [5].
Selon la volonté du Chapitre général [6], le « Nouveau Règlement » devait préciser quel degré
d’autonomie, parmi tous ceux qui sont possibles, les Coopérateurs pouvaient avoir à la lumière de la
pensée de Don Bosco et de Vatican II, et quelle forme d’unité institutionnelle, parmi celles qui sont
possibles, ils devaient avoir avec la Congrégation salésienne.
À propos d’autonomie, le « Nouveau Règlement » a pris en considération plusieurs modèles [7]. Il a
expressément exclu tant l’autonomie absolue que l’absence d’autonomie, pour les raisons qu’on
vient de voir. Le modèle choisi est celui qui a obtenu de la base le plus grand nombre de suffrages.
Il a été expérimenté dans la phase d’essai, puis mis au point et confirmé officiellement dans le
Règlement actuel.
Il est décrit substantiellement au premier paragraphe de l’article 43 : « L’Association est dirigée
collégialement par un Conseil au niveau local comme au niveau provincial ». Le Règlement
explicite la constitution, la composition, les tâches et le fonctionnement de ces Conseils, et garantit
une large place de décision aux Coopérateurs.
43.2. Direction collégiale (art. 43 § 1)
Cette direction ou conduite autonome est de type collégial en conformité aux principes de Vatican
II sur l’apostolat associé. C’est pourquoi l’organe directif au niveau local et provincial est un
Conseil qui travaille collégialement, selon les dispositions du premier paragraphe de cet article.
Ce mode de direction est réglé par le canon 119 du nouveau Code, qui établit les normes pour les
actes collégiaux, tant pour les élections (can. 119, 1), que pour les autres affaires qui rentrent dans
la compétence des deux Conseils (can. 119, 2).
Pour réaliser un acte collégial, le canon 119 exige trois conditions préalables :
1) La convocation de tous les membres du Conseil faite selon le canon 166 ;
2) La présence de la majorité absolue des membres du Conseil ;
3) Le calcul de la majorité absolue se fait sur le nombre des membres effectivement présents à
l’acte collégial.
La majorité est absolue quand elle dépasse même d’une simple demi-unité le nombre des membres
présents, c’est-à-dire : la moitié arithmétique du nombre total des membres présents, plus un.
Si ensuite l’acte collégial est l’élection, par exemple du Coordinateur du Conseil [8] :
1) La majorité absolue est nécessaire pour le premier et le deuxième vote ;
2) Si le premier et le deuxième vote ne donnent pas de résultat, restent éligibles pour le troisième
vote les seuls deux candidats qui, au deuxième vote, ont obtenu la majorité relative ; ou bien, si les
candidats sont plus de deux, sont éligibles uniquement les deux plus âgés, tant en cas d’égalité des
voix pour tous les candidats qu’en cas d’inégalité de voix entre un candidat avec majorité relative et
d’autres candidats ayant égalité de voix ; parmi ces derniers n’est éligible que le plus âgé ;
3) Après le troisième vote est élu celui des deux candidats qui a obtenu la majorité des voix ou, en
cas d’égalité, le plus âgé ;
4) Le troisième vote est définitif dans tous les cas et donc, une fois effectué, l’opération de vote ne
se prolonge pas.
Si par contre l’acte collégial porte sur une autre matière, par exemple « décider la convocation de
réunions, d’assemblées et de congrès » (art. 44 § 1) :
1) La majorité absolue est nécessaire pour le premier vote ;
2) Si le premier vote n'obtient pas le résultat escompté, on procède à un deuxième vote, toujours à
majorité absolue ;
3) Si ce deuxième vote ne donne pas de majorité, la décision en question n'est pas approuvée ; s’il y
a égalité de voix, le Coordinateur, qui préside le Conseil selon l’article 44 § 2, peut (non pas
« doit ») ajouter sa voix publiquement pour trancher la question.
Ces questions juridiques ne doivent pas faire oublier l’importance vitale pour l’Association, de ces
personnes qui posent l’acte collégial, , justement parce que ce sont elles qui régissent l’Association.
D’où la nécessité d’élire des dirigeants dotés des qualités appropriées à leur responsabilité et en
mesure de rendre ce service.
43.3. Composition du Conseil local (art. 43 § 2)
Pour procéder à l’élection des membres du Conseil local, les Coopérateurs salésiens, y compris
« les Coopérateurs qui résident là où il n'y a pas de Centre », (art. 41 § 3) mais sont reliés au Centre
le plus proche qui doit procéder à l’élection, doivent être convoqués selon le canon 166, pour
procéder à cet acte collégial ; et à cette assemblée doit être présente la majorité absolue des
Coopérateurs du Centre. Ils se réunissent sur convocation :
du Coordinateur provincial, s’il s’agit de la première constitution du Conseil local à partir du
moment où est publié le décret d’érection du Centre, selon l’article 45 § 2 ;
du Coordinateur local, pour les renouvellements successifs du Conseil local, selon l’article 44 §
2.
Le nombre des membres élus doit être « convenable », non inférieur à trois ni supérieur à sept, selon
la pratique habituelle de ce Centre local.
Aux membres élus s’ajoute, même dans le cas dont parle l’article 46 § 3, le membre de droit, c’està-dire :
- le Délégué local SDB, si le Centre est constitué auprès d’une œuvre des salésiens,
- ou bien la Déléguée locale des FMA si c’est auprès d’une œuvre des Filles de Marie Auxiliatrice,
- ou bien le Coopérateur éventuellement nommé Délégué si le Centre est hors des œuvres SDB ou
FMA.
Le Délégué(e) dans le Conseil local est toujours unique ; dans ce cas, l’article 43 § 5 ne s’applique
pas.
Il faut aussi savoir que le prêtre, salésien ou pas, chargé uniquement de la vie de piété du Centre
local, ne fait pas partie du Conseil local, et n'a donc pas le droit de vote dans les réunions du
Conseil (Convention, art. 5)..
Le nombre maximal des membres du Conseil local est donc de huit.
43.4. Composition du Conseil provincial (art. 43 § 3)
Pour procéder à l’élection des membres du Conseil provincial, tous les Conseillers qui font partie
des Conseils locaux doivent être convoqués selon le canon 166, et la majorité absolue du nombre
total des Conseillers de tous les Centres doit être présente à cette assemblée élective. Ils se
réunissent sur convocation :
– du Provincial salésien, s’il s’agit de la première constitution,
– du Conseil provincial, et par analogie avec la compétence qui lui est attribuée par l’article 45,
même si l’initiative doit partir de la proposition de l’ensemble des Conseils selon l’article 44 §
1 [9] ;
– du Coordinateur provincial, s’il s’agit par contre de renouveler les membres du Conseil déjà
constitué, suivant l’article 44 § 2.
Le nombre des membres élus doit être « convenable », non inférieur à trois ni supérieur à douze ;
selon la disposition de l’article 43 § 3, il est établi fois par fois dans la réunion pour l’élection des
Conseillers des Centres. Cette disposition est possible tant à cause du principe fondamental dont il
est question dans l’article 41 § 1, que parce que le Règlement lui-même ne donne aucune norme
précise à ce sujet : surtout dans le cas du renouvellement du Conseil, il sera opportun de suivre la
pratique habituellement adoptée.
Parmi les membres élus peuvent figurer aussi « quelques Délégués et Déléguées locaux », toujours
sans dépasser le nombre fixé.
Aux membres élus s’ajoutent les membres de droit : le Délégué provincial SDB et la Déléguée
provinciale FMA [10]. Notons que si « dans le cadre de sa propre Province FMA il y a plusieurs
Conseils provinciaux, la Déléguée provinciale est membre de droit de chacun d’eux » [11].
On peut donc en conclure que le nombre maximum des membres du Conseil provincial, membres
élus et membres de droit, est de quatorze.
43.5. Nombre de salésiens et salésiennes appartenant au Conseil (art. 43 § 5)
L’article 43 § 5 fixe encore une norme sur la proportion à garder dans la composition du Conseil
provincial : « Les salésiens de Don Bosco et les Filles de Marie Auxiliatrice ne peuvent pas
dépasser le tiers du nombre des membres du Conseil ». Ainsi la conduite du Centre ou du
regroupement provincial de Centres reste toujours et à juste titre, sous la responsabilité directe des
Coopérateurs eux-mêmes.
43.6. Durée de la charge de Conseiller (art. 43 § 4)
L’article 43 § 4 ne précise la durée de la charge que des membres élus de deux Conseils : trois ans,
avec possibilité de réélection pour un second mandat de trois ans. En conséquence la période
maximale de la durée en charge du Conseiller est de six ans consécutifs, si naturellement, il est
réélu pour un second triennat.
Pour un troisième triennat immédiatement consécutif, il faut recourir à l’institut de la postulation,
selon le droit universel [12], avec la dispense correspondante de la part du Recteur majeur.
43.7. Exercice des charges et principe d’élection
En conclusion de ces quelques notes de commentaire de cet article, il est opportun de se rappeler
avant tout l’article 20 § 2 à propos de l’exercice des différentes charges : « Les charges, à tous
niveaux, s’exercent comme un service fraternel conformément aux principes de communion et de
coresponsabilité ».
Il faut aussi remarquer la raison pour laquelle a été adopté le principe de l’élection en vue de la
composition du Conseil local et provincial : c’est pour responsabiliser au maximum les membres de
l’Association selon l’article 20 § 1 : « Chaque Coopérateur se sent responsable de la mission
commune [...]. Il participe dès lors, [...] au choix des dirigeants ».
[1]. Cf. CIC can. 299.
[2]. AA, 3a.
[3]. AA, 19d.
[4]. ACGS, 172.
[5]. ACGS, 176.
[6]. Cf. ACGS, 190.
[7]. Cf. Midali Mario, Nella Chiesa e nella società con Don Bosco oggi, 278.
[8]. Cf. RVA, art. 44 § 2.
[9]. Voir aussi Conv., art. 1, § 2.
[10]. Cf. RVA, art. 46 § 1.
[11]. Conv., art. 10
[12]. Cf. CIC, can. 180-183.
ARTICLE 44
TÂCHES PRINCIPALES DES CONSEILS.
§ 1. Les tâches principales des Conseils sont les suivantes :
– assurer, avec l’accord du Provincial salésien, la bonne marche de l’Association en vue de la
réalisation de ses objectifs ;
– promouvoir et coordonner les initiatives portant sur la formation et l’apostolat des Coopérateurs ;
– favoriser les liens d’union des Coopérateurs avec la Congrégation salésienne et avec les autres
groupes de la Famille ;
décider la convocation de réunions, d’assemblées et de congrès ;
pourvoir à l’administration des biens de l’Association.
§ 2. Chaque Conseil élit parmi ses membres laïcs son propre « Coordinateur » auquel incombent les
charges suivantes :
convoquer les réunions, les présider, coordonner les travaux, veiller à l’exécution des décisions ;
informer les organes supérieurs sur la vie et les activités de l’Association ;
représenter l’Association ;
entretenir les rapports, au nom du Conseil, avec les organismes laïques et ecclésiaux et avec les
autres Groupes de la Famille salésienne ;
prendre des décisions en cas d’urgence, dans les limites des compétences du Conseil, et en rendre
compte par la suite.
L’article consacre le premier paragraphe à la liste des tâches qui reviennent tant au Conseil local
que provincial, et il présente dans le second les responsabilités spécifiques du Coordinateur de
chacun de ces Conseils.
44.1. Tâches principales des Conseils (art. 44 § 1)
La liste des tâches s’est voulue détaillée pour éviter les incertitudes sur les compétences et préciser
les limites de l’autonomie de l’Association. Elle ne spécifie pas la tâche de se donner
éventuellement des normes particulières, parce que ce principe ressort de tout le contexte de ce
chapitre consacré à l’organisation. Elle ne parle pas de la tâche de l’assistance spirituelle (mais bien
de son organisation), parce qu’elle est du ressort du Délégué.
Les tâches énumérées sont communes à tous les Conseils, mais elles auront des modalités
différentes selon les niveaux. Et précisément, les Conseils provinciaux exerceront ces tâches, mais
par rapport aux objectifs à atteindre au niveau provincial, sans donc s’ingérer dans ce qui est de la
compétence des Conseils locaux.
Certaines tâches sont communes à celles des Provinciaux, des Délégués et des Déléguées. Elles
concernent : la formation apostolique et salésienne ; la communion avec les groupes de la Famille
de Don Bosco ; les liens particuliers avec la Congrégation salésienne. Cela tient au fait que la nature
même de ces tâches qui exige qu’elles soient effectuées par les deux parties intéressées. Cette
considération devrait aider à dépasser les éventuels conflits de compétence.
Et voici quelques mots de commentaire pour chacune des tâches dont il est question.
« Assurer, avec l’accord du Provincial salésien, la bonne marche de l’Association en vue de la
réalisation de ses objectifs ». Cette première tâche a justement pour but de faire rejoindre les
objectifs pour lesquels existe et travaille l’Association. Par conséquent elle se propose de mettre en
œuvre toutes les conditions nécessaires au bon fonctionnement du Centre ou du regroupement
provincial des Centres, en veillant à la vie personnelle et spirituelle des Coopérateurs, à leur
formation, à l’aspect apostolique ainsi qu’à l’ensemble de la pastorale ecclésiale.
Par fidélité au charisme du Fondateur et en rapport avec la responsabilité particulière du Provincial
salésien envers l’Association, l’accord des Coopérateurs avec leur Provincial caractérise l’exercice
du pouvoir des Conseils, même en ce qui concerne le fonctionnement effectif de l’Association. Ceci
dans le cadre des compétences et dans les limites fixées par le Règlement, comme cela a été spécifié
plus haut [1].
En pratique, pour que cette tâche se traduise dans les faits et ne reste pas lettre morte, il faut
probablement valoriser davantage le rôle du Délégué qui agit au nom du Provincial. Ce qui suppose
un dialogue constant entre le Provincial et le Délégué.
« Promouvoir et coordonner les initiatives portant sur la formation et l’apostolat des
Coopérateurs ». Cette deuxième tâche découle de la première et vise à donner toute leur valeur aux
forces disponibles et à en éviter la dispersion. Elle vise en outre à mieux faire entrer l’apostolat des
Coopérateurs dans la pastorale organisée des Eglises locales, comme l’indique l’article 18.
« Favoriser les liens d’union des Coopérateurs avec la Congrégation salésienne et avec les autres
groupes de la Famille ». Cette troisième tâche concrétise celles qui sont exposées aux articles 24-26
du Règlement et confiées à la responsabilité spécifique des Conseils aux divers niveaux.
Les deux dernières tâches, à savoir « décider la convocation de réunions, d’assemblées et de
congrès » et « pourvoir à l’administration des biens de l’Association », exigent non seulement une
collaboration collégiale, commune à toutes les tâches basées sur la direction collégiale, mais aussi la
formalité de l’acte collégial, prévue par le canon 119 et décrite dans le commentaire de l’article 43 §
1.
44.2. Le Coordinateur (art. 44 § 2)
Le nom choisi pour celui qui dans le Conseil a des tâches particulières de coordination, de
représentation et d’autres, a changé plusieurs fois au cours de l’élaboration et de la révision du
Règlement [2] : ce fut d’abord simplement « président », puis « président ou secrétaire ou
coordinateur », ensuite « secrétaire-coordinateur », adoptée par le Nouveau Règlement [3] et enfin
« Coordinateur », définitivement choisi par le Règlement actuel. Les mots ont leur histoire et leur
importance, et portent une charge émotive qui varie suivant les lieux. Il faut certes tenir compte de
tout cela, mais ce qui compte surtout, ce sont les charges qu’ils désignent et les capacités de la
personne qui en porte la responsabilité.
44.2.1. Election
Le Coordinateur est élu par l’assemblée des membres de son Conseil, local ou provincial, selon le
canon 119, 1.
En outre il doit être choisi parmi les Coopérateurs laïcs du Conseil, comme précise le paragraphe.
Sont exclus de l’élection, avec une seule voix active et non passive, c’est-à-dire avec le droit de
voter mais non d’être élus, les prêtres et les diacres et tous les Délégué(e)s, salésiens et Filles de
Marie Auxiliatrice, qu’ils soient membres du Conseil local et/ou provincial. Notons que les Filles
de Marie Auxiliatrice ou les Coadjuteurs salésiens ne sont pas à proprement parler des « laïcs »
dans le droit canon, mais des « religieux », c’est-à-dire « profès avec vœux publics » [4].
Il y a une exception pour le cas prévu par l’article 46 § 3 du Règlement, qui prévoit comme Délégué
un coopérateur laïc, nommé par le Provincial pour un Centre autonome : celui-ci peut être élu par
les Conseillers de ce Centre comme Coordinateur, justement parce qu’il est laïc.
44.2.2. Tâches
Le Coordinateur, local et provincial, dans le cadre de sa compétence, a des tâches très importantes
et astreignantes. C’est pourquoi une des conditions condition non écrite mais très valable pour son
éligibilité, est sa disponibilité : peut-être pas à temps plein, mais au moins une bonne partie de son
temps.
La convocation des réunions du Conseil, c’est-à-dire l’appel légitime de tous les membres du
Conseil à la réunion collégiale, doit se faire selon le canon 166. Ce canon ne précise pas la manière
de convoquer, sauf qu’il faut le minimum nécessaire pour que la convocation soit personnelle.
Donc, toutes les façons sont bonnes : une communication, un coup de téléphone, un avis écrit...
L’important est qu’elle rejoigne tous les Conseillers.
En fait, la convocation non faite et l’absence qui s’en suit d’un ou de plusieurs membres ayant droit,
en nombre inférieur au tiers des Conseillers, n'invalide pas l’acte collégial déjà fait et
éventuellement confirmé ; mais cet acte doit être rescindé (déclaré sans effets) par l’autorité
compétente, si les quatre conditions suivantes se vérifient en même temps :
L’intéressé absent (et pas d’autres) en fait la demande ;
Le recours est introduit avant le terme utile de trois jours après la nouvelle que l’acte collégial a
eu lieu, même si en pratique il est difficile de le constater juridiquement ;
Il est prouvé que le Coordinateur, ou celui qui préside, a omis volontairement de convoquer
l’intéressé ;
Il est prouvé que l’intéressé a été absent de l’acte collégial, justement parce qu’il n'a pas été
convoqué.
La convocation non faite et l’absence qui s’en suit de plus d’un tiers des Conseillers a comme effet
juridique la nullité de l’acte collégial selon le droit. Dans le cas contraire de convocation non faite
mais de présence effective des Conseillers, l’acte collégial est valide, même si l’éventualité du cas
précèdent subsiste toujours.
La présidence des réunions du Conseil suit la pratique normale de la présidence des assemblées,
avec les caractéristiques propres de l’esprit salésien, empreint de sérieux en même temps que de
familiarité.
Particulièrement importante est la tâche de faire exécuter les délibérations du Conseil, en ce qui est
de sa compétence. Il est opportun de rappeler que toute l’action de l’Association des Coopérateurs
se fait « au nom de l’Eglise » et donc aussi les décisions du Conseil et leur exécution.
Il revient au Coordinateur de donner des informations sur la vie et les activités du Centre ou du
regroupement provincial de Centres. Elles doivent se donner aux organes supérieurs par les moyens
les plus opportuns et selon la pratique habituellement employée, avec fidélité et précision, justement
parce que l’Association dans son ensemble, tout en étant articulée en différents organismes locaux,
constitue une personne juridique unique.
C’est aussi au Coordinateur qu’il incombe de représenter, de façon convenable et responsable,
l’Association, dans le cadre de sa compétence, locale ou provinciale.
Il a aussi la tâche ordinaire d’« entretenir les rapports, au nom du Conseil » avec les organismes
laïques et ecclésiaux, ainsi qu’avec la Congrégation salésienne et les autres groupes de la Famille.
La dernière tâche citée par le paragraphe exige vraiment beaucoup d’engagement et de
responsabilité : dans les cas de situations particulièrement importantes, et pour lesquelles s’impose
une solution immédiate, le Coordinateur prend personnellement des décisions officielles, qui
rentrent dans la compétence du Conseil. Il est donc normal que le paragraphe 2 lui demande
expressément de rendre compte au Conseil, lors de la première réunion qui se tient après cette
décision.
44.2.3. Autres tâches spécifiques du Coordinateur
Il est bon de compléter l’exposé par la présentation d’autres tâches spécifiques des Coordinateurs,
décrites dans le Règlement en d’autres articles.
En plus de celles qui sont communes, le Coordinateur d’un Centre a les tâches spécifiques
suivantes :
Recevoir la demande d’admission de l’aspirant Coopérateur : c’est implicitement suggéré par
l’article 36 § 2, en référence à l’article 44 § 2 ;
Recevoir l’éventuelle communication écrite d’abandon de l’Association de la part du
Coopérateur : l’article 39 § 2 le suggère implicitement en référence à l’article 44 § 2 ;
Transmettre les différents avis du Conseil local au Conseil provincial, quand il le lui demande,
comme il est dit immédiatement après : cela découle implicitement tant du Règlement que de la
Convention.
En plus de celles qui sont communes, le Coordinateur provincial, a les tâches précises suivantes.
Emettre le décret de démission d’un Coopérateur de l’Association : ceci se trouve implicitement
dans l’article 39 § 2 en référence à l’article 44 § 2 ;
Émettre le décret d’érection d’un Centre local, selon l’article 45 § 2 ;
Elire, avec les autres Coordinateurs provinciaux et les Délégué(e)s compétent(e)s, le représentant
de la Région, selon les dispositions de l’article 48 § 2 ;
Émettre les décrets relatifs à la fusion, le transfert, la déclaration de non-dépendance, la
suppression d’un Centre, selon les articles 2 ; 3 § 1 et 2 ; 4,de la Convention ;
Émettre le décret d’appartenance d’un Centre à son propre regroupement provincial : cela
découle de l’article 45 § 2.
[1]. Cf. RVA art. 23 § 3 et 42 § 2.
[2]. Cf. Midali Mario, Nella Chiesa e nella società con Don Bosco oggi, 281.
[3]. Cf. NR art. 26 § 4.
[4]. Cf. CIC, can. 654.
ARTICLE 45
TÂCHES SPECIFIQUES DES CONSEILS
§ 1. Il appartient au Conseil local d’accompagner le Coopérateur aspirant tout au long de sa
formation et de donner son avis en vue de son acceptation. Celle-ci devra être validée par le Conseil
provincial.
§ 2. Le Conseil provincial est compétent pour ériger des Centres, par décret signé par le
Coordinateur, avec le consentement du Provincial SDB, et le consentement de la Provinciale FMA
s’il s’agit d’un Centre établi auprès des FMA. Pour établir un Centre ailleurs qu’auprès des œuvres
SDB ou FMA, le consentement écrit de l’Evêque diocésain est requis 1.
1. CIC, can. 312, § 2.
Après les commentaires sur le Conseil local et provincial et leurs tâches en général, il reste à ajouter
quelques notes au sujet de leurs tâches spécifiques exposées dans cet article.
45.1. Tâches spécifiques du Conseil local (art. 45 § 1)
Le premier paragraphe de l’article souligne deux tâches spécifiques du Conseil local,
particulièrement importantes :
« Accompagner le Coopérateur aspirant tout au long de sa formation » : cela suppose de
connaître, autant que possible, l’aspirant Coopérateur et de lui donner une place dans le Centre en
ce qui concerne sa formation initiale et de le faire participer à la vie et aux activités apostoliques du
Centre ;
« Donner son avis en vue de son acceptation » : cette tâche ne peut s’exercer sans avoir effectué
d’abord la précédente ; c’est très important parce que c’est sur cet avis que se base ensuite la
confirmation du Conseil provincial pour l’admission du candidat comme Coopérateur ; cet avis
officiel et collégial [1] se fonde sur le profil du Coopérateur salésien, décrit dans ses traits essentiels
à l’article 3 et plus en détail aux chapitres II, III et IV du Règlement.
Voici encore ici, d’autres tâches spécifiques du Conseil local comme elles résultent du texte du
Règlement :
Récolter les offrandes « pour les besoins les plus urgents du vaste engagement salésien » à
envoyer au Recteur majeur par l’intermédiaire du Conseil provincial : ceci est dit implicitement à
l’article 21 ;
Vérifier l’accomplissement des conditions canoniques et statutaires pour l’admission d’un
aspirant Coopérateur, comme le suggère implicitement l’article 36 § 1 et 2 ;
Accepter l’acte d’abandon de l’Association de la part d’un Coopérateur, qui le fait « par une
décision personnelle », selon l’article 39 § 2 ;
Approuver le compte rendu de sa propre gestion financière, avant que l’administrateur le présente
au Conseil provincial ; (Voir art. 44 § 1) ;
Donner son avis pour la nomination de son Délégué ou de sa Déléguée local(e), selon l’article 46
§ 2. Dans ce cas, cet avis doit être exprimé par les « membres » du Conseil et pas nécessairement
par un acte collégial du Conseil ;
Donner son propre avis respectivement pour la fusion de son propre Centre, pour son transfert et
pour la déclaration de non-dépendance, selon les articles 2 et 3 de la Convention ;
« Etablir des relations d’entente et de collaboration, par un accord commun entre les Conseils
locaux » de Centres constitués auprès d’œuvres des salésiens ou des Filles de Marie Auxiliatrice
voisines entre elles, selon la disposition de l’article 6 de la Convention.
45.2. Tâches spécifiques du Conseil provincial. (art. 45 § 2)
Le deuxième paragraphe de l’article 45 souligne une seule tâche spécifique du Conseil provincial :
l’acte collégial de décision pour l’érection d’un nouveau Centre. Pour la validité de l’érection du
Centre, cet acte doit être accompli conformément au canon 119 n°2, dont le contenu a été rapporté
dans le commentaire de l’article 43 § 1.
Voici encore d’autres tâches spécifiques du Conseil provincial qui découlent du Règlement :
Envoyer les offrandes provenant des divers Centres « au Recteur majeur pour subvenir aux
besoins les plus urgents du vaste champ d’engagement salésien » selon les dispositions de l’article
21 ;
L’acte collégial [2] de révocation d’un Coopérateur, conformément à l’article 39 § 2 ;
Approuver le compte rendu financier de sa propre gestion financière, avant que l’administrateur
le présente à la Consulte mondiale : cela résulte implicitement de l’article 44 § 1 ;
Valider l’acceptation d’un aspirant Coopérateur, d’après l’avis donné par le Conseil local, selon
les dispositions de l’article 45 § 1 ;
Donner son avis pour la nomination de son propre Délégué ou Déléguée provinciaux, selon la
disposition de l’article 46 § 2 ; dans ce cas, cet avis doit être donné par « les membres » du Conseil
et pas nécessairement par un acte collégial du Conseil lui-même ;
Constituer « au cours d’une assemblée commune » avec les divers Conseils provinciaux des
Coopérateurs d’un « même pays ou une région de même langue et de même culture », une
Conférence nationale et/ou régionale, selon l’article 47 § 1 ;
Recevoir et examiner le compte rendu de la gestion financière des Centres, selon la disposition de
l’article 49 § 3.
À tout cela doivent s’ajouter les tâches fixées dans la Convention :
L’acte collégial de décision à propos de la « fusion d’un Centre situé auprès d’une œuvre des
FMA avec un Centre situé auprès d’une œuvre des SDB ou vice versa », « après avoir entendu les
Conseils locaux respectifs », selon l’article 2 ;
Le transfert d’un Centre, « après avoir entendu le Conseil local du Centre à transférer », selon
l’article 3 § 1 ;
Rendre un Centre indépendant, « aux mêmes conditions, après le consentement écrit de l’Evêque
diocésain », selon l’article 3 § 2 ;
Supprimer un Centre, aux conditions prévues par l’article 4 ;
Déterminer « l’appartenance de divers Centres érigés auprès d’une œuvre des FMA à son propre
regroupement provincial », selon l’article 7 ;
Favoriser la pastorale organique et l’organisation d’activités communes, surtout en ce qui
concerne la formation, « dans le regroupement provincial qui unit les Centres érigés auprès des
œuvres des FMA de diverses Provinces » : ceci est implicitement dit à l’article 8.
[1]. Pour les conditions requises pour un acte collégial, voir le commentaire de l’art. 43 § 1 du
RVA.
[2]. Les conditions requises pour un acte collégial, se trouvent dans le commentaire de l’article 43 §
1 du RVA.
ARTICLE 46
DÉLÉGUÉS ET DÉLÉGUÉES
§ 1. Chaque Centre et chaque regroupement de Centres au sein d’une Province possède son Délégué
ou sa Déléguée. Les Délégué(e)s sont les animateurs spirituels des Coopérateurs 1, responsables
surtout de leur formation salésienne apostolique. Aux termes du présent Règlement, ils sont
membres de droit des Conseils.
§ 2. Délégués et Déléguées sont nommés par leur Provincial ou leur Provinciale, après que ceux-ci
ont pris l’avis des membres du Conseil concerné, et compte tenu des nécessités des Centres.
§ 3. Si le Centre n'est pas établi près d’une œuvre SDB ou FMA, le Provincial peut nommer comme
Délégué local un Coopérateur dûment préparé 3.
1. CIC, can. 317, § 2.
2. RDB V, 5.
En trois paragraphes, l’article présente les principes généraux concernant la participation des
Délégués et des Déléguées à la vie de l’Association, leur nomination et le cas du Délégué
Coopérateur d’un Centre constitué en dehors des œuvres salésiennes.
46.1. Principes relatifs à la participation des Délégués et des Déléguées (art. 46 § 1)
46.1.1. Principes généraux de participation
L’article s’ouvre par une affirmation de principe : « Chaque Centre et chaque regroupement de
Centres au sein d’une Province possède son Délégué ou sa Déléguée » (§ 1).
La nécessité de la présence des Délégués découle de la finalité fondamentale de toute Association
unie d’une manière particulière, dans l’Eglise, à un Institut religieux : tendre à la perfection
chrétienne et mener une vie apostolique en partageant le patrimoine spirituel de l’Institut, comme
dit le canon 303, repris par l’article 6 du Règlement.
Pour atteindre cet objectif général est prévu l’apport qualifié de certaines personnes : les Délégués
et Déléguées, dont les profils sont décrits en référence aux tâches générales qu’ils ont à accomplir :
être « les animateurs spirituels des Coopérateurs, responsables surtout de leur formation salésienne
apostolique » (§ 1).
L’importance de la place des Délégués et Déléguées dans l’Association est présentée par les
premiers articles de la Convention en ces termes : « Dans le respect de leurs Constitutions et
Règlements propres, les salésiens et les Filles de Marie Auxiliatrice, conscients de leur
responsabilité, s’engagent à observer le Règlement de Vie apostolique de l’Association des
Coopérateurs salésiens, pour ce qui est de leur compétence respective et dans les limites posées par
le Règlement lui-même » (art.1). « Dans cette tâche ils se référeront en particulier aux Conseils
locaux et provinciaux des Coopérateurs, qui doivent diriger en collège l’Association » (art. 2).
Cette déclaration s’étend à tous les salésiens et à toutes les Filles de Marie Auxiliatrice ; mais elle
vaut surtout pour les Délégués et Déléguées, puisqu’ils ont une place dans l’Association avec une
tâche spécifique d’animateurs spirituels et qu’« ils sont membres de droit des Conseils », comme dit
notre paragraphe. En conséquence, dans leur cas il ne s’agit pas seulement d’une charge spirituelle,
mais d’une vraie participation aux tâches de direction collégiale de l’Association, sur les divers
terrains et selon leurs compétences respectives.
La disposition de l’article 24 § 1 sur les liens particuliers qui unissent la Congrégation salésienne
aux Coopérateurs vaut de façon spéciale pour les Délégués salésiens, du fait que ce sont eux qui
exercent, en vertu de leur charge, les tâches qu’il assigne aux communautés salésiennes au niveau
local et provincial.
En ce qui concerne les Déléguées, la précision de l’article 25 § 1 qui dit : « Des relations spéciales
unissent les Coopérateurs aux Filles de Marie Auxiliatrice dont les Déléguées animent des Centres
établis auprès de leurs œuvres », souligne clairement qu’elles ont, par la charge même qui leur est
confiée, toute une série de tâches spécifiques et incontournables à l’égard des Coopérateurs.
D’autant plus que l’animation qu’elles exercent dans les Centres constitués près de leurs œuvres est
« analogue à celle des Délégués salésiens » (art. 25 § 1).
Rappelons enfin que les Délégués et les Déléguées agissent en coresponsabilité avec des
Coopérateurs qualifiés dans la formation individuelle et de groupe, initiale et permanente, des
Coopérateurs, selon l’article 38 § 2 du Règlement.
46.1.2. Tâches spécifiques au niveau provincial
Au niveau du Conseil provincial, les tâches d’animation et de formation salésienne apostolique,
propres aux Délégués et aux Déléguées, incluent toutes les initiatives et les activités fixées par
l’ensemble du Règlement et toutes celles que l’inventivité de l’Esprit Saint et la créativité du
charisme salésien peuvent suggérer pour le bien spirituel des Coopérateurs.
Puisqu’il s’agit du cadre provincial, ces tâches sont plus spécialement de promotion et de
coordination des activités des différents Centres appartenant au regroupement provincial, selon
l’article 44 § 1.
Pour le Délégué provincial il faut ajouter ce que dit la Convention :
« Il exerce les tâches d’animation spirituelle et de responsabilité de la formation vis-à-vis de tous
les Centres du regroupement provincial pour lequel il a été nommé » (art. 11 § 1) ;
« Il travaille d’un commun accord avec la Déléguée provinciale FMA pour un travail apostolique
fécond et en vue de la pastorale d’ensemble » (art. 11 § 2) ; « Il visite les Centres érigés auprès des
œuvres des FMA », aux conditions indiquées, également pour « maintenir et développer les rapports
[...] qui unissent les Coopérateurs à la Congrégation salésienne » (art. 11 § 3).
Pour la Déléguée provinciale, la Convention précise les tâche suivantes :
Veiller à « avoir pour son Centre un prêtre salésien, nommé en accord avec le Provincial » (art.
5) ;
« Visiter les Centres érigés auprès des œuvres FMA » (art. 10) ; la formulation de l’article qui dit
« il est aussi de la compétence de la Déléguée provinciale » indique que cette tâche est en soi
réservée à la Provinciale ; cependant, elle est aussi de la compétence de la Déléguée provinciale ;
Travailler en accord avec le Délégué provincial « pour un travail apostolique fécond et en vue de
la pastorale d’ensemble » (art 11 § 2).
46.1.3. Tâches spécifiques au niveau du Centre
Dans le cadre du Conseil du Centre, les tâches d’animation spirituelle et de formation apostolique
salésienne sont exercées par les Déléguées et Déléguées locaux, non seulement au niveau de la
guidance spirituelle du Centre comme groupe qualifié de Coopérateurs, mais aussi et précisément
pour l’animation directe et la formation immédiate vis-à-vis de chaque aspirant et de chaque
Coopérateur : ce sont eux les premiers responsables de la formation initiale et permanente,
individuelle et de groupe, selon l’article 38 § 2.
Dans cet ordre d’idées, il faut rappeler les dispositions de la Convention : « Les Délégués locaux
non prêtres essaient, autant que possible, d’avoir, pour leur propre Centre, un prêtre salésien chargé,
en accord avec le Provincial, des moments forts de prière et de discernement et de la vie
sacramentelle et liturgique des Coopérateur » (art. 5).
46.1.4. Participation aux deux Conseils
Pour le Conseil provincial, il y a une double participation différenciée de la part des Délégué(e)s :
Participation de droit : le Délégué provincial SDB et la Déléguée provinciale FMA « sont
membres de droit » du Conseil provincial ; à noter que « si dans le cadre de sa Province FMA il y
avait plusieurs Conseils provinciaux, la Déléguée provinciale est membre de droit de chacun
d’eux », selon l’article 10 de la Convention ;
Participation de fait : parmi les membres élus peuvent figurer aussi « quelques Délégués et
Déléguées locaux » ; ils rentrent dans le nombre fixé de Conseillers [1] et à la condition que « Les
salésiens de Don Bosco et les Filles de Marie Auxiliatrice ne dépassent pas le tiers du nombre des
membres du Conseil » selon l’article 43 § 5.
Pour le Conseil local, le Délégué local SDB ou la Déléguée locale FMA ou le Délégué Coopérateur
dont parle l’article 46 § 3 est toujours une personne unique et y participe de droit.
Il faut aussi se rappeler que le prêtre salésien (ou non salésien) chargé, en accord avec le Provincial,
de certains moments forts de prière et de discernement, dont parle l’article 5 de la Convention, ne
fait pas partie du Conseil local et n'a pas de responsabilités dans l’organisation ».
46.2. Nomination des Délégués et Déléguées (art. 46 § 2)
Voici, en style télégraphique, les nominations selon les diverses compétences de responsabilité.
Le Délégué provincial est nommé par son Provincial « après que celui-ci a pris l’avis des
membres du Conseil » provincial des Coopérateurs, selon l’article 46 § 2 et « sans retards
injustifiés », d’après l’article 9 de la Convention. La même Convention apporte encore une
précision : étant donné son engagement envers tous les Centres du regroupement provincial, « il est
hautement convenable qu’il soit un prêtre salésien » (art. 11 § 1).
– La Déléguée provinciale des Filles de Marie Auxiliatrice est nommée par sa Provinciale « après
que celle-ci a pris l’avis des membres du Conseil » provincial des Coopérateurs, selon l’article 46 §
2 ; et « sans retards injustifiés », d’après l’article 9 de la Convention.
Le Délégué local du Centre situé près d’une œuvre des salésiens est nommé par son Provincial
« après que celui-ci a pris l’avis des membres du Conseil » local des Coopérateurs, et « compte tenu
des nécessités [spirituelles] du Centre » selon l’article 46 § 2 du Règlement ; et « sans retards
injustifiés », d’après l’article 9 de la Convention.
La Déléguée locale du Centre situé près d’une œuvre des FMA est nommée par sa Provinciale
après « que celle-ci a pris l’avis des membres du Conseil » local des Coopérateurs et « compte tenu
des nécessités [spirituelles] du Centre », selon l’article 46 § 2 du Règlement ; ainsi que « sans
retards injustifiés » selon l’article 9 de la Convention.
Le Délégué local du Centre indépendant est nommé par le Provincial de la Province où il se
trouve. Ce Délégué doit être « un Coopérateur dûment préparé », comme le souligne le paragraphe
3 de cet article. Le Provincial le nomme après « que celui-ci a pris l’avis des membres du Conseil »
local des Coopérateurs et « compte tenu des nécessités [spirituelles] du Centre », selon l’article 46 §
2 du Règlement ; ainsi que « sans retards injustifiés » selon l’article 9 de la Convention.
Il faut aussi rappeler que la consultation de la part du Provincial ou de la Provinciale pour la
nomination du Délégué ou de la Déléguée concerne « les membres du Conseil concerné », c’est-àdire chaque Conseiller, et pas nécessairement le Conseil provincial ou local comme tel. Ceci est
apparu plus faisable, tout au moins dans les situations actuelles, et plus conforme à l’importance de
la question.
Cette consultation favorisera un contact direct entre le (la) Provincial(e) et les Conseillers des
Coopérateurs et permettra aussi une prise en charge plus concrète des responsabilités respectives
pour le bien de l’Association en général et des Centres en particulier. Les modalités pour la mettre
en œuvre sont laissées à la discrétion du Provincial et de la Provinciale. Il faut rappeler que tous les
Conseillers concernés doivent être consultés : pour la validité de la nomination du Délégué ou de la
Déléguée, il est indispensable d’avoir entendu l’avis de tous
[1]. RVA, 43 § 3.
ARTICLE 47
COORDINATION AU PLAN NATIONAL OU RÉGIONAL
§ 1. Si, dans un même pays ou une région de même langue et de même culture, les divers Conseils
provinciaux le jugent opportun, ils pourront, au cours d’une assemblée [spécifique] commune,
constituer une « Conférence » nationale et/ou régionale. Cette assemblée établira elle-même les
critères de participation et les modalités d’élection des membres.
Toutefois pour que cet organe soit validement constitué, l’approbation des Provinciaux concernés
est requise.
§ 2. Ces conférences éventuelles, organes de coordination et de stimulation, ont pour but de rendre
plus efficaces la vitalité et la collaboration dans l’Association.
§ 3. La conduite de la Conférence est assurée par un Coopérateur élu parmi les membres de la
Conférence elle-même et par un(e) Délégué(e) national(e) et/ou régional(e) désigné(e) par les
Provinciaux et les Provinciales des Provinces concernées.
En trois paragraphes distincts, cet article présente les conditions requises pour pouvoir constituer
une Conférence nationale ou régionale, sa finalité et sa conduite.
47.1. Constitution de la conférence nationale ou régionale (art. 47 § 1)
Nous sommes ici en présence d’une structure intermédiaire, jugée non nécessaire mais seulement
« possible ». Elle est considérée comme un « organe de coordination et de stimulation » (§ 2) et est
constituée en vue d’atteindre les buts essentiels prévus par le Règlement : « rendre plus efficaces la
vitalité et la collaboration dans l’Association ». (§ 2).
Vu son caractère de structure possible mais non nécessaire, son organisation concrète n'est pas
précisée davantage par le Règlement : c’est un autre cas typique d’application du principe général
de souplesse et d’adaptation aux diverses situations culturelles et ecclésiales (art. 41 § 1), qui
caractérise la structure de l’Association des Coopérateurs.
Elle n’est en effet constituée que pour des raisons d’opportunité en vue d’atteindre les finalités
prévues. Il faut remarquer en outre que dans l’acte même de sa constitution, « l’assemblée établira
elle-même les critères de participation et les modalités d’élection des membres » (§ 1 ). Ces points
sont essentiels à son organisation interne.
Cet organisme intermédiaire s’appelle « Conférence » et peut se présenter comme une « Conférence
nationale » correspondant à la nation ou à l’Etat, ou bien comme une « Conférence régionale »
correspondant à la région, compte tenu de sa culture et de sa langue.
Sa constitution se réalise par un double acte juridique :
« Une assemblée commune spécifique » de tous les Conseils provinciaux concernés ; L’adjectif
« spécifique » [absent malheureusement de la traduction française] indique que cette réunion doit
avoir formellement pour but de constituer la Conférence ;
« L’approbation des Provinciaux concernés », par une délibération dont dépend la validité de la
constitution même, comme le dit clairement le paragraphe.
Et c’est justement à ce moment que « cette assemblée commune établira elle-même les critères de
participation et les modalités d’élection des membres ».
Il faut souligner ici l’importance fondamentale de cette assemblée commune, non seulement pour la
constitution de la Conférence, mais aussi pour l’aspect normatif indispensable qu’elle assume à son
sujet. C’est pourquoi il lui faut une préparation très soignée, de façon à avoir à l’avance des lignes
directrices bien claires, discutées au préalable par les Conseils provinciaux concernés. Il est en outre
opportun de demander l’avis qualifié de la Consulte mondiale, justement afin de donner des normes
sobres, mais suffisantes pour une conduite apostolique efficace.
47.2. Finalité (art. 47 § 2)
Le deuxième paragraphe de notre article présente les finalités de la Conférence nationale ou
régionale, en soulignant d’abord sa fonction de « service » à l’Association.
La Conférence, en effet, ne fait pas partie de la direction de l’Association, comme organe
supplémentaire ou supérieur de direction, destiné à remplacer les tâches précises d’animation et de
conduite propres aux Conseils locaux et provinciaux des Coopérateurs, dont parlent les articles 4345 du Règlement. Par sa structure même, elle doit plutôt se mettre au service des organes légitimes
de direction de l’Association, pour coordonner, au niveau national ou régional, leurs initiatives,
pour stimuler une action apostolique mieux insérée dans la pastorale de l’Eglise à rayon national ou
régional, pour promouvoir l’union des buts et les efforts communs des différents Conseils.
De cette manière la Conférence non seulement permet, mais favorise aussi réellement et rend plus
efficaces tant la vitalité interne des divers Conseils, surtout provinciaux, que la collaboration
nécessaire pour toute activité apostolique de poids dans le cadre des Eglises locales et particulières,
comme l’indique l’article 18 du Règlement.
On peut sans doute légitimement affirmer que, vu son caractère national ou régional précisément, la
Conférence manifeste publiquement la valeur ecclésiale et catholique de l’Association, et peut en
faire percevoir l’influence bénéfique dans l’Eglise et la société où elle opère.
47.3. Conduite (art. 47 § 3)
Le troisième paragraphe de cet article indique les charges statutaires pour la conduite de la
Conférence.
Il ne parle pas de Coordinateur national ou régional, mais dit seulement que « la conduite de la
Conférence est assurée par un Coopérateur élu parmi les membres de la Conférence elle-même ». Il
laisse ainsi aux membres qui constituent la Conférence la tâche de choisir la dénomination qu’ils
préfèrent. Du reste, l’élection de ce Coopérateur se fait selon les modalités fixées dans l’acte
constitutif de la Conférence, c’est-à-dire au cours de l’assemblée commune dont il est question au
premier paragraphe de l’article.
Au Coopérateur, à qui est confiée la conduite de la Conférence, est adjoint un seul Délégué (ou
Déléguée) de la Conférence « désigné(e) par les Provinciaux et Provinciales des Provinces
concernées ». Il n'est pas précisé si Provinciaux et les Provinciales doivent procéder à cette tâche
dans une assemblée commune ou par des accords pris de manière informelle : les deux modalités
sont donc possibles.
Les tâches propres du Coopérateur élu et du Délégué ou de la Déléguée au niveau de la Conférence
sont fixées ou modifiées au moment même de la constitution de la Conférence, selon le premier
paragraphe de l’article.
L’indication de la Conférence comme unique organisme statutaire de coordination au niveau
national ou régional exclut tout autre organisme du même niveau, parce que non prévu par le
Règlement. Par conséquent, avec l’entrée en vigueur du présent Règlement de Vie apostolique
cessent d’exister les « Conseils nationaux ou régionaux » qui existent actuellement selon le
précédent Règlement de 1974 (art. 31). Pour éventuellement les transformer en Conférences
nationales ou régionales, il est nécessaire de suivre les indications du premier paragraphe de notre
article.
ART 48 : LA CONSULTE MONDIALE
§ 1. La Consulte mondiale, dont fait partie le Conseiller général pour la Famille salésienne, est
constituée d’autant de membres élus qu’il existe de Régions de l’Association Coopérateurs salésiens
érigées par le Recteur majeur, et de cinq membres nommés par le Recteur majeur.
Le Recteur majeur nomme le Coordinateur général parmi les Coopérateurs de la Consulte mondiale
§ 2. Le représentant de la Région est élu par les Coordinateurs provinciaux et par un nombre de
Délégué(e)s provinciaux(ales) SDB et FMA désignés à cet effet par les Provinciaux et les
Provinciales concernés qui ne dépassent pas la moitié du nombre des Coordinateurs votants.
§ 3. La Consulte mondiale proposera elle-même au Recteur majeur les modalités d’élection du
représentant de la Région. L’élection pourra se faire aussi par correspondance.
§ 4. Les membres de la Consulte restent en charge sept ans.
§ 5. La Consulte mondiale, en accord avec le conseiller pour la Famille salésienne, détermine le
thème, le siège et les participants d’éventuels Congrès mondiaux ou de rencontres internationales.
Elle en assure l’organisation.
§ 6. Les directives de la Consulte mondiale ne peuvent être appliquées qu’après avoir été
approuvées par le Recteur majeur.
§ 7. Pour rendre son action plus souple et fonctionnelle, la Consulte mondiale peut se faire aider par
un Secrétariat exécutif central.
Cet article complète l’article 23 § 2, et présente, en des paragraphes distincts : la composition de la
Consulte et ses charges, l’élection des représentants, la modalité de cette élection, la durée du
mandat de ses membres, ses tâches, la valeur de ses directives, la possibilité de constituer un
Secrétariat exécutif central.
48.1. Composition et charges (art. 48 § 1)
48.1.1. Membres de la Consulte
La Consulte mondiale n’a qu’un seul membre de droit : « le conseiller général pour la Famille
salésienne » (§ 1).
À lui s’ajoutent « cinq membres nommés par le Recteur majeur », avec liberté de choix. Selon
l’article 13 de la Convention, parmi eux il y a une Fille de Marie Auxiliatrice, désignée à la suite de
« la présentation préalable de la part de la Supérieure générale des Filles de Marie Auxiliatrice ».
Elle est constituée ensuite « d’autant de membres élus qu’il y a de Régions de l’Association
Coopérateurs salésiens » et donc un élu pour chacune des régions suivantes :
Région Europe centrale, Nord et Est : Allemagne, Autriche, Belgique, Circonscription de l’Est
(Biélorussie, Géorgie, Lituanie, Russie, Ukraine), Croatie, France, Hollande, Hongrie, Pologne,
République tchèque Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse.
Région Italie-Moyen Orient : Italie, Moyen-Orient, Saint-Marin, Suisse canton italien.
Région Ibérique : Andorre, Espagne, Portugal.
Région Anglophone : Australie, Canada, Etats-Unis, Grande-Bretagne, Irlande, Malte.
Région Atlantique : Argentine, Chili, Paraguay, Uruguay.
Région Brésil.
Région Pacifique-Caraïbes Nord : Amérique Centrale, Antilles, Mexique.
Région Pacifique-Caraïbes Sud : Bolivie, Colombie, Equateur, Pérou, Venezuela.
Région Asiatique : Birmanie, Cambodge, Chine, Corée, Japon, Philippines, Thaïlande, Viêt-nam,
Région Inde.
Région Afrique, pays de langue anglaise : Afrique du Sud, Kenya, Lesotho, Liberia, Nigeria,
Ouganda, Sierra Leone, Soudan, Swaziland, Tanzanie, Zambie.
Région Afrique, pays de langue française ou ibérique : Angola, Bénin, Burundi, Cameroun, Cap
Vert, Congo Brazzaville, Congo R.D., Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée Conakry, Guinée Equatoriale,
Madagascar, Mali, Mozambique, Rwanda, Sénégal, Togo.
Les membres de la Consulte sont donc au nombre de dix-huit.
48.1.2. Charges au sein de la Consulte
Certaines charges spécifiques sont prévues au sein de la Consulte.
La première est celle du conseiller général pour la Famille salésienne, selon ce qui est établi à
l’article 23 § 1. Pour compléter le commentaire de cet article, il faut rappeler la tâche que le
conseiller pour la Famille salésienne exerce en relation nécessaire avec les Filles de Marie
Auxiliatrice, selon l’article 12 de la Convention : « Les rapports de collaboration et de
coresponsabilité entre SDB et FMA vis-à-vis de l’Association des Coopérateurs salésiens au niveau
international seront étudiés, de commun accord et périodiquement, par le conseiller pour la Famille
salésienne [...] et par la vicaire générale [...]. À cet effet, ils pourront l’un et l’autre faire appel à la
collaboration d’experts.
La deuxième charge prévue expressément comme nécessaire est celle du Coordinateur général. Il
est nommé par le Recteur majeur parmi les Coopérateurs membres, nommés ou élus, de la Consulte
mondiale, selon les dispositions de l’article 48 § 1. Sont exclus de cette nomination le conseiller
pour la Famille salésienne et la Fille de Marie Auxiliatrice, n'étant pas, à proprement parler, une
Coopératrice [1].
Nulle part le Règlement ne précise ses tâches. En tout cas, selon l’article 23 § 2, elles rentrent dans
l’exercice du ministère du Recteur majeur, surtout en ce qui concerne la conduite pratique de la
Consulte, qui doit être menée en étroite collaboration avec le conseiller général pour la Famille
salésienne.
Une troisième charge, elle aussi prévue comme nécessaire, est celle de l’administrateur. Il est un de
membres de la Consulte même, selon l’article 49 § 3.
L’unique tâche de l’administrateur est dictée par cet article : présenter le compte rendu financier à la
Consulte mondiale, pour qu’elle le présente à son tour, par le Coordinateur général, au Recteur
majeur pour l’approbation, selon ce qui est établi à l’article 48 § 6.
Il ne faut pas oublier d’autres tâches prévues par la législation universelle de l’Eglise pour les
administrateurs des biens ecclésiastiques considérés par le Code de droit canonique ; certaines
seront citées dans le commentaire de l’article 49.
48.2. Election des représentants (art. 48 § 2)
Le deuxième paragraphe de notre article fixe qui sont ceux qui élisent les représentants des Régions
énumérées : ce sont en premier lieu les Coordinateurs provinciaux.
À ceux-ci s’ajoutent les Délégués SDB et les Déléguées FMA désignés à cet effet par les
Provinciaux et les Provinciales concernés, de façon que leur nombre global ne dépasse pas la moitié
des Coordinateurs votants [2].
Il ne précise pas la manière de procéder pour s’acquitter de cette tâche. Toutes les possibilités sont
donc ouvertes, à condition de garantir une vraie représentativité au niveau de la Région et, en même
temps, d’assurer la disponibilité des électeurs à participer effectivement à l’élection du représentant.
48.3. Modalité de l’élection (art. 48 § 3)
Pour la modalité de l’élection des représentants, le Règlement prévoit l’intervention d’abord de la
Consulte mondiale, puis celle du Recteur majeur.
Il revient à la Consulte mondiale de proposer au Recteur majeur ces modalités. Il s’agit d’une tâche
importante du moment qu’il faut tenir compte des situations des différentes Régions salésiennes :
pour certaines, en effet, il est relativement facile de se réunir, alors que pour d’autres, les situations
géographiques ou les circonstances politiques peuvent imposer d’autres solutions mieux adaptées à
leur contexte.
C’est pourquoi, en plus de toutes les formalités éventuelles, il est prévu, et donc possible, de
pouvoir voter par correspondance, selon le canon 157 § 1. Pour la validité canonique du vote, il faut
naturellement garantir toutes les conditions essentielles pour la validité canonique du vote qui, en
tout cas, devra être libre, secret, certain, sans condition et déterminé, selon le canon 172.
Il rentre dans les compétences du Recteur majeur, en tant que Modérateur général de l’Association,
d’approuver les modalités proposées par la Consulte mondiale : c’est expressément envisagé au
paragraphe 6 de notre article, selon lequel « les directives de la Consulte mondiale ne peuvent être
appliquées qu’après avoir été approuvées par le Recteur majeur ».
48.4. Durée de la charge du représentant (art. 48 § 4)
À l’exception du membre de droit, le conseiller général pour la Famille salésienne, pour lequel il
faut suivre les Constitutions salésiennes [3], tous les membres nommés, désignés ou élus, « restent
en charge sept ans ».
Le choix de ce laps de temps a été suggéré par une sereine évaluation de l’expérience approfondie
durant la période d’expérimentation du Règlement : il s’agit d’une période qui permet à la Consulte,
d’un côté, de faire un bon travail d’animation et de coordination et, de l’autre, de pouvoir se
renouveler avec l’alternance de ses membres.
48.5. Tâches de la Consulte (art. 48 § 5)
L’article 23 § 2 détermine la sphère de compétence de la Consulte mondiale, et concerne
l’Association tout entière.
Il indique aussi ses tâches générales d’animation et de coordination des activités de formation et
d’apostolat [4].
Notre paragraphe 5 donne encore quelques précisions : « La Consulte mondiale, en accord avec le
conseiller pour la Famille salésienne, détermine le thème, le siège et les participants d’éventuels
Congrès mondiaux ou de rencontres internationales. Elle en assure l’organisation ». C’est ce qui
s’est fait avec l’organisation des 1er et 2e Congrès mondiaux des Coopérateurs salésiens,
respectivement en 1976 et en 1985 [5].
À ces tâches d’animation et d’organisation s’ajoutent les tâches administratives proprement dites,
définies par l’article 49 § 2.
En outre, la Consulte a aussi une fonction proprement judiciaire et administrative, puisqu’elle est
compétente pour résoudre les doutes et les litiges sur la détermination d’appartenance d’un Centre
érigé auprès d’une œuvre des FMA à son propre regroupement provincial, selon les dispositions de
l’article 7 de la Convention.
48.6. Valeur des directives de la Consulte (art. 48 § 6)
À propos des tâches de la Consulte, l’article précise une condition fondamentale pour son exercice :
« Les directives de la Consulte mondiale ne peuvent être appliquées qu’après avoir été approuvées
par le Recteur majeur » (§ 6).
Cela s’impose puisque le Recteur majeur « est le Supérieur de l’Association », et se sert de la
Consulte mondiale pour exercer son ministère pastoral auprès des Coopérateurs [6].
En conséquence, pour que les décisions prises de façon collégiale dans les réunions de la Consulte
puissent devenir effectives, il est nécessaire de les présenter à l’approbation préalable du Recteur
majeur. Cette tâche revient en soi au Coordinateur général.
48.7. Le Secrétariat exécutif général (art. 48 § 7)
Cet organisme n'est pas imposé, mais simplement conseillé : le texte dit que la Consulte « peut » se
faire aider par un Secrétariat exécutif central (§ 7). Il peut compter plusieurs personnes avec un
responsable. Le but de ce Secrétariat est « de rendre plus souple et fonctionnelle » l’action de la
Consulte.
Ce Secrétariat n’a que des tâches d’exécution, c’est-à-dire qu’il doit exécuter les délibérations que
lui la Consulte aura jugé bon de lui assigner. Il peut avoir un responsable de bureau en la personne
du secrétaire, qui travaille sous la dépendance directe du Coordinateur général.
Outre les tâches énumérées dans le commentaire du premier paragraphe de cet article, le Règlement
ne précise pas d’autres tâches pour la Consulte ; cela pour laisser une large place à la réalisation
effective d’un Secrétariat exécutif central qui réponde aux nombreux besoins de la Consulte ellemême.
[1]. Voir le commentaire de l’art. 44 § 2 du RVA.
[2]. Voir à l’art. 42 §2 la liste des tâches du Provincial et de la Provinciale.
[3]. Cf. Const. SDB 1984, art. 142.
[4]. Voir le commentaire de l’art. 23 § 2.
[5]. Cf. Cooperatori Salesiani, Forces vives. Actes du Congrès du centenaire 1876-1976 ; (Rome
1977) ; Id, Actes et documents du 2e Congrès mondial des Salésiens Coopérateurs (Rome 1985).
[6]. Cf. RVA, art. 23 § 1 et 2.
ARTICLE 49
L’ADMINISTRATION DES BIENS DE L’ASSOCIATION
§ 1. L’Association des Coopérateurs salésiens, en tant que personne de droit public ecclésiastique, a
la capacité d’acquérir, de posséder, d’administrer et d’aliéner des biens temporels, selon le droit ;
les biens possédés par l’Association comme telle sont des biens ecclésiastiques 1.
§ 2. La Consulte mondiale administre les biens de l’Association au niveau mondial. Elle est
l’autorité compétente pour accorder aux Conseils locaux et provinciaux les permissions requises
pour les actes d’administration extraordinaire et pour les aliénations qui ne requièrent pas
l’intervention du Siège Apostolique 2, les dispositions de l’art. 48 § 6 restant sauves. Pour établir
les actes dont il est question ci-dessus, et sauf privilèges particuliers, on devra suivre les indications
des Conférences épiscopales respectives 3.
§ 3. Les Conseils, à tous les niveaux, éliront un de leurs membres pour remplir la charge
d’administrateur. Il lui revient de présenter le compte rendu financier au Conseil de niveau
supérieur.
1. CIC, can. 1255 et 1257 § 1.
2. CIC, can. 1292, § 2.
3. CIC, can. 1277 et 1292 § 1.
Cet article présente, en trois paragraphes, le principe général qui règle l’administration des biens,
les organismes qui, aux différents niveaux, ont compétence en la matière, et le rôle spécifique de
l’administrateur.
49.1. Capacité de l’Association vis-à-vis de ses biens temporels (art. 49 § 1)
Le premier paragraphe de l’article énonce une déclaration de principe importante : « L’Association
des Coopérateurs salésiens, en tant que personne de droit public ecclésiastique, a la capacité
d’acquérir, de posséder, d’administrer et d’aliéner des biens temporels, selon le droit ; les biens
possédés par l’Association comme telle sont des biens ecclésiastiques ».
La déclaration se base sur les canons 1255 et 1257 § 1 du Code de droit canonique cités en note.
Nous avons déjà parlé de la personnalité juridique publique de l’Association à propos de l’article 6
du Règlement. Ici nous nous limitons à quelques considérations fondamentales en rapport avec
notre sujet.
En premier lieu, la possession et l’usage des biens temporels de l’Association, en tant que biens
ecclésiastiques, doivent se subordonner à l’obtention des buts propres de l’Association [1].
En deuxième lieu, pour le même motif, les biens temporels de l’Association en tant que telle sont
régis non seulement par les normes du Règlement, mais avant tout par les canons du Code de droit
canonique, sur la base du canon 1257 § 1. Par conséquent, les responsables des biens à n’importe
quel niveau doivent s’y conformer.
C’est pourquoi, pour se référer comme il se doit au Code de droit canonique et pour la clarté, le
commentaire du deuxième paragraphe de l’article 49 s’articule en trois points : l’acquisition,
l’administration, l’aliénation des biens de l’Association. C’est à ces trois opérations essentielles que
peuvent se ramener toutes les autres, par ex. la propriété, la possession et les contrats.
49.2. Acquisition, administration et aliénation des biens (art. 49 § 2)
49.2.1. L’acquisition des biens
Seul l’article 21 du Règlement touche le sujet, quand il dit : « Le Coopérateur soutient l’Association
par de libres contributions ».
Le Règlement ne spécifie pas de façon déterminée pour l’acquisition des biens temporels, sauf les
libres contributions des membres de l’Association même. Au niveau mondial en particulier, cet
article 21 parle de récolte par les Centres d’offrandes à envoyer au Recteur majeur. Mais il ne s’agit
pas là, à proprement parler, d’acquisition de biens temporels par l’Association.
Il ne faut cependant pas oublier que, en plus de ces libres contributions, l’Association, en tant que
personne de droit public ecclésiastique, « peut acquérir des bien temporels par tout moyen juste
selon le droit naturel ou positif, qui le permet aux autres personnes », selon la disposition du canon
1259, qui se réfère au canon 1258 pour l’acception du terme « Eglise » dans le livre v du Code.
Une forme particulière d’acquisition des biens temporels est prévue dans la Convention pour les
Centres et pour le Conseil provincial :
Dans la fusion de Centres, le nouveau Centre « succède dans les relations financières actives et
passives des deux Centres précédents, sauf disposition différente dans le décret de fusion » :
conformément à l’article 2 ;
Dans la suppression de Centres, « les biens temporels des Centres supprimés, y compris les
relations financières actives et passives, passent au Conseil provincial, sauf disposition différente
dans le décret de suppression » : conformément à l’article 4.
49.2.2. L’administration des biens
À ce sujet il est indispensable de se référer à la législation universelle de l’Eglise. Au canon
1279 § 1, le Code de droit canonique dit : « L’administration des biens ecclésiastiques revient à
celui qui dirige de façon immédiate la personne à qui ces biens appartiennent [...] restant sauf le
droit d’intervention de l’Ordinaire en cas de négligence de l’administrateur ». En appliquant ce
principe aux divers domaines, la compétence pour l’administration des biens de l’Association des
Coopérateurs revient :
Au Recteur majeur au niveau universel, en tant que « Supérieur de l’Association, [qui] y exerce
les fonctions de Modérateur suprême », selon la disposition de l’article 23 § 1 ;
Au Conseil provincial des Coopérateurs au niveau de son regroupement provincial des Centres,
selon l’article 44 § 1 ;
Au Conseil local des Coopérateurs, au niveau local, selon l’article 44 § 1.
Cependant si les Conseils provinciaux et locaux des Coopérateurs sont directement responsables de
cette tâche, le Recteur majeur, pour l’exercice de cette fonction aussi, « se sert de la Consulte
mondiale des Coopérateurs », comme le dit clairement le paragraphe 2 de notre article : « La
Consulte mondiale administre les biens de l’Association au niveau mondial ».
Rappelons que tous les organismes cités ont, en leur sein, un administrateur chargé de s’occuper
immédiatement de l’administration des biens temporels de l’Association dans le cadre de sa
compétence. Nous reviendrons sur le sujet dans le commentaire du paragraphe 3 de l’article 49.
En ce qui concerne l’Ordinaire qui a droit d’intervention directe dans l’administration des biens en
cas de négligence de l’administration, il faut savoir que, pour l’Association des Coopérateurs,
l’Ordinaire compétent en la matière est :
Le Recteur majeur à tous les niveaux, local, provincial et mondial ; pour exercer cette fonction,
vu qu’il n’est pas opportun qu’il intervienne directement, étant donné sa haute responsabilité
personnelle vis-à-vis de l’Association, il peut en charger son vicaire [2], ou bien, selon le canon
137 § 1, déléguer le Conseiller général pour la Famille salésienne [3] ;
Le Provincial salésien aux niveaux Provincial et local, vu que « les Provinciaux salésiens, dans le
contexte de leurs responsabilités propres à l’intérieur de la Société de saint François de Sales,
rendent présent sur leur territoire, le ministère du Recteur majeur », selon l’article 23 § 3. Est
cependant exclue de cette tâche la Provinciale des Filles de Marie Auxiliatrice, puisqu’elle n’est pas
« Ordinaire » en sens canonique.
Il est bon de noter que l’intervention des Provinciaux salésiens dans le cas spécifique de la
négligence, devra au moins recevoir la confirmation du Recteur majeur, vu qu’il n’y a pas de texte
clair en la matière.
Comme on l’a dit plus haut, l’administration des biens de l’Association au niveau mondial revient à
la Consulte mondiale. Elle assume aussi la fonction de « conseil pour les affaires économiques »
selon la prescription du canon 1280 pour toute personne juridique. Elle a en outre la compétence
importante d’« accorder aux Conseils locaux et provinciaux les permissions requises pour les actes
d’administration extraordinaire » (§ 2) qui, sans elles, seraient invalides, selon le canon 1281 § 1.
Le deuxième paragraphe du même canon dit : « Les statuts préciseront les actes qui dépassent les
limites et le mode de l’administration ordinaire », selon le canon 1277
Pour faciliter le renvoi aux dispositions analogues des différentes Conférences épiscopales dans le
cadre de leur compétence respective, il semble opportun d’indiquer ici les dispositions de la
Conférence épiscopale italienne (CEI). Pour cette Conférence sont des actes d’administration
extraordinaire :
Les actes d’aliénation, c’est-à-dire le transfert d’un droit à contenu patrimonial à un autre sujet
(comme la vente, l’échange, la donation), dont la valeur dépasse les cent millions de lires [50 000
euro (ndt)] ;
Les actes qui entraînent des charges pour le patrimoine et qui mettent en péril sa consistance
(comme les prêts, la constitution de dettes, l’hypothèque, la servitude, l’emphytéose, la fidéjussion,
la rente perpétuelle, la renonciation, l’acceptation de donations ou de legs conditionnés, l’usufruit,
la transaction), dont la valeur dépasse les cent millions de lires ;
Les actes de gestion qui, dans le contexte économique du moment, peuvent comporter un risque
par rapport aux critères d’une administration prudente et droite, même au point de vue pastoral, et
précisément :
1) Commencer des activités d’entreprise (industrielles ou considérées comme commerciales à de
fins fiscales), y succéder ou les assumer ;
2) Introduire des tiers dans la possession de biens immeubles en dehors des opérations dûment
approuvées ;
3) Investir pour des œuvres de construction, de restructuration ou de restauration ;
4) Changer la destination d’usage des immeubles [4].
La CEI a établi par ailleurs que « la somme minimale et la somme maximale pour les actes dont
parle le canon 1292 § 1 du Code de droit canonique sont respectivement de cent millions (50 000 €]
et de trois cents millions de lires [150 000 €] » [5].
La Consulte mondiale est compétente pour donner cette sorte de permission toujours « et seulement
après l’approbation du Recteur majeur », selon l’article 48 § 6 du Règlement. En pratique, la
Consulte mondiale doit examiner attentivement la requête et la présenter au Recteur majeur avec la
documentation nécessaire.
Quant aux « privilèges particuliers » dont parle le paragraphe 2 de notre article 49 et auquel il faut
se référer « pour établir la nature des actes d’administration extraordinaire », il s’agit de privilèges
concédés au Recteur majeur en vue de son ministère envers les Coopérateurs même dans cette
matière.
Compte tenu de tout cela, le Conseil provincial comme le Conseil local doivent avoir la permission
de la Consulte mondiale, selon les modalités qui viennent d’être décrites, pour poser des actes
d’administration extraordinaire.
49.2.3. L’aliénation des biens
Dans cette matière spécifique aussi il faut partir des dispositions du Code de droit canonique.
Par « aliénation » on entend le transfert du droit de propriété sur les biens de l’Association des
Coopérateurs salésiens, de l’Association elle-même à un autre sujet.
Selon le droit canonique, dans le concept d’aliénation est inclue aussi « toute affaire où la situation
patrimoniale de la personne juridique pourrait être amoindrie », selon le canon 1295.
La CEI a détaillé ces opérations, comme l’a exposé le point précédent.
Le canon 1291 établit que « pour aliéner validement les biens qui constituent, en vertu d’une
légitime attribution, le patrimoine stable d’une personne juridique publique et dont la valeur dépasse
la somme fixée par le droit, est requise la permission de l’autorité compétente selon le droit ».
L’objet de l’aliénation, comme des autres contrats désavantageux, est donc ce qui constitue, par
assignation faite selon la loi, civile ou canonique, ou par le RVA, le patrimoine stable de
l’Association en tant que telle.
Le patrimoine stable consiste aussi bien dans les éventuels biens immeubles en propriété de
l’Association, que dans les biens meubles destinés à former la dot permanente de l’Association, et
qui permettent directement et immédiatement à l’Association d’atteindre ses buts.
Enfin, l’objet de l’aliénation ne doit pas avoir une valeur supérieure à la somme fixée par la
Conférence épiscopale respective.
En appliquant les dispositions canoniques à l’Association Coopérateurs, selon l’article 49 § 2, le
Conseil provincial et le Conseil local, chacun dans le cadre de ses compétence, peuvent aliéner
validement des biens immeubles de l’Association à deux conditions :
Uniquement en dessous de la somme maximale fixée par la Conférence épiscopale respective,
qui, en pratique, est différente selon les situations économiques des diverses régions du monde ;
Et uniquement après avoir obtenu la permission préalable de la Consulte mondiale.
En plus de la permission préalable, le canon 1292, opportunément cité en note par le RVA, exige
aussi l’autorisation du Saint-Siège, toujours pour la validité de l’aliénation, dans les cas suivants :
quand il s’agit « de choses dont la valeur dépasse la somme maximale » établie,
« ou de choses données à l’Eglise en vertu d’un vœu », c’est-à-dire à l’Association des
Coopérateurs salésiens en tant que telle, selon le canon 1258,
« ou d’objets précieux à cause de leur valeur artistique ou historique ».
Pour la Consulte mondiale vaut, en la matière, uniquement l’approbation du Recteur majeur, selon
l’article 48 § 6 du Règlement.
Il est opportun de rappeler encore la prescription du canon 1290 à propos des normes du droit civil :
« Les dispositions du droit civil, en vigueur dans un territoire, en matière de contrats, tant en général
qu’en particulier, et de modes d’extinction des obligations, seront observées avec les mêmes effets
en droit canonique, pour les choses soumises au pouvoir de gouvernement de l’Eglise, à moins que
ces dispositions ne soient contraires au droit divin ou que le droit canonique n'en décide autrement,
restant sauves les dispositions du can. 1547 », relatif aux témoins dans les diverses causes.
49.3. L’administrateur (art. 49 § 3)
Le profil et la tâche de l’administrateur au niveau mondial ont déjà été présentés dans le
commentaire de l’article 48 § 1.
L’administrateur des biens du regroupement provincial des Centres est élu par le Conseil provincial
parmi les membres du Conseil lui-même, selon le paragraphe 3 de notre article.
La seule tâche qu’il souligne est de présenter le compte rendu financier à la Consulte mondiale,
pour son approbation. Mais il ne faut pas oublier les autres tâches prévues par le Code de droit
canonique pour les administrateurs des biens ecclésiastiques. En outre l’administrateur au niveau
provincial doit agir en étroite collaboration avec son Conseil, qui a comme tâche de « pourvoir à
l’administration des biens de l’Association », selon l’article 44 § 1 du Règlement. Par conséquent, il
revient à ce Conseil de donner son approbation préalable du compte rendu financier, avant que
l’administrateur le présente à la Consulte mondiale.
L’administrateur des biens du Centre est élu selon les mêmes modalités par les Conseillers membres
du Conseil local.
Sa tâche aussi est la même que celle de l’administrateur provincial et avec les mêmes formalités,
naturellement dans le cadre de sa compétence.
Pour les administrateurs à tous les niveaux, étant sauves les dispositions du Code de droit canonique
en la matière, c’est-à-dire en particulier le canon 1282 : « Quiconque, clerc ou laïc, participe à un
titre légitime à l’administration des biens ecclésiastiques, est tenu d’accomplir ses fonctions au nom
de l’Eglise, selon le droit ».
En fait, l’Association des Coopérateurs salésiens, en tant que personne juridique ecclésiastique
publique, tire son origine de l’autorité de l’Eglise (can. 301 § 3), agit en son nom (can. 116 § 1),
tient de l’Eglise sa capacité en fait d’administrer des biens (can. 1255) et poursuit les fins propres de
l’Eglise (can. 301 § 1).
[1]. Cf. CIC, can. 1254 § 1.
[2]. Cf. Const. SDB 1984, art. 134.
[3]. Cf. Const. SDB 1984, art. 137.
[4]. Ballestrero card. Anastasio, Décret. La Conferenza Episcopale, prot. n. 301/85 (Rome
18.04.1985) 1 Delibera di carattere normativo n. 37, in Notiziario CEI (1985) 48.
[5]. Ballestrero card. Anastasio, Décret. In piena comunione, prot. n. 800/84 (Rome 06.11.1984),
Delibera n. 20, in Notiziario CEI (1984) 204.
CONCLUSION
ARTICLE 50
UN CHEMIN QUI CONDUIT À LA SAINTETÉ.
§ 1. L’Association des Coopérateurs, nous dit Don Bosco, « est faite pour secouer de nombreux
chrétiens en les tirant de la langueur où ils gisent, et pour répandre l’énergie de la charité » 1.
Choisir ce Règlement de vie apostolique, c’est trouver une manière évangélique de se réaliser soimême en s’engageant sur un chemin qui conduit à la sainteté.
Le Seigneur accompagne de l’abondance de ses grâces tous ceux qui œuvrent dans l’esprit du « da
mihi animas », travaillant au bien des jeunes, et les aidant à devenir pour l’Eglise de bons chrétiens
et pour leur pays d’honnêtes citoyens 2.
1.
2.
DB 15 juillet 1886, MB XVIII, 161.
Cf. RDB, Introduction.
Cet article de conclusion présente en trois phrases concises le noyau essentiel du Règlement :
synthèse harmonieuse et éclairante d’un projet apostolique de vie et d’un cheminement de
perfection chrétienne issu de la charité pastorale de Don Bosco, sous l’inspiration de l’Esprit Saint
et la guidance maternelle de Marie Auxiliatrice.
Il figure avec bonheur en conclusion du Règlement non seulement pour terminer par une image non
technique de l’Association, mais surtout pour exprimer dans un langage vivant et évocateur le but
vers lequel nous tendons et le chemin sûr pour y arriver.
Cet article met en évidence le but de l’Association, la signification de la vocation salésienne de
Coopérateur et l’appui de la grâce de Dieu.
50.1. Le but de l’Association
Le but de l’Association est décrit par une affirmation bien connue de Don Bosco : l’Association des
Coopérateurs « est faite pour secouer de nombreux chrétiens en les tirant de la langueur où ils
gisent, et pour répandre l’énergie de la charité ».
Pour notre Fondateur, le but à atteindre par les Coopérateurs est simple et pratique : raviver et
répandre un idéal de vie chrétienne inspiré tout entier par l’amour de Dieu et du prochain, et cela
par le témoignage et l’engagement apostolique selon sa propre condition.
On a la nette impression de se trouver impliqué dans une merveilleuse mission ecclésiale pour que
se réalise le dessein salvifique de Dieu sur chacun et sur toute l’humanité, mission qui s’exprime en
termes simples et compréhensibles. C’est toute une vie qui devient, jour après jour, Evangile vécu.
50.2. La vocation salésienne de Coopérateur
Deux courtes phrases résument le contenu des différents chapitres du Règlement : le projet
apostolique du Coopérateur qu’il décrit est « une manière évangélique de se réaliser soi-même » et
« un chemin qui conduit à la sainteté ».
Elles rappellent clairement le point de référence incontournable de son choix personnel de vie :
l’Evangile, entendu comme message de salut adressé à chacun dans son « ici et maintenant » de
tous les jours. En d’autres mots, c’est un choix chrétien fait « d’apostolat », réalisé à travers une
grande variété d’activités et d’initiatives accomplies « sous la mouvance de l’Esprit du Seigneur
Jésus », et orienté tout entier vers la réalisation d’une meilleure qualité de vie humaine et chrétienne
pour soi et pour autrui, ou bien, selon une manière de s’exprimer chère à Don Bosco, « pour la
gloire de Dieu et le bien des âmes ».
Comme pour tout chrétien, et donc aussi pour le Coopérateur, suivre le projet de vie apostolique
« est une manière évangélique de se réaliser soi-même ». En effet, la vocation personnelle coïncide
avec le projet de vie le meilleur et effectivement réalisable qu’il soit possible d’imaginer pour soi et
de se souhaiter.
Toute vocation chrétienne libère et promeut. Elle est un appel à se réaliser pleinement soi-même : à
réaliser ses capacités, ses énergies, ses dispositions et ses possibilités personnelles dans sa propre
situation. Comment ? Par un amour total pour Dieu et pour autrui, qui grandit et s’approfondit
durant toute la vie.
Eliminer de son horizon ou obscurcir la profonde communion avec Dieu et avec les autres (à
concrétiser dynamiquement dans le service de Dieu et des frères et sœurs), c’est s’appauvrir soimême, se dessécher et se condamner. Au contraire, celui qui aime Dieu et les autres se met en
communion avec toute la réalité divine et humaine. Il devient pleinement et parfaitement humain à
l’image du Christ, l’Homme parfait.
Celui qui fait de grands projets irréalisables ou qui, au contraire, ne veut guère se déranger pour
« profiter de la vie », se voue inconsciemment à la frustration, à la médiocrité, voire à la
mesquinerie.
Par contre, celui qui suit avec fidélité et non sans sacrifice sa vocation, devient pleinement luimême, c’est-à-dire, vraiment « quelqu’un » devant Dieu et les autres, bien que dans la simplicité et
l’ordinaire de son histoire humaine personnelle.
C’est un message évangélique sûr proposé par les grands thèmes bibliques : la croissance, les
vertus, la justice, la sainteté, la perfection, la plénitude, les béatitudes [1]. Il a été proposé de façon
magistrale par Vatican II [2], et il peut se résumer par cette admirable affirmation d’un éminent
Père de l’Eglise, Saint Irénée : « La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant, et la vie de l’homme,
c’est la vue de Dieu ! » [3]. Suivre la vocation salésienne de Coopérateur est une option de vie qui
se plonge dans sa source infinie et éternelle et s’y nourrit : le Dieu de la vie, le Dieu Un et Trine
trois fois Saint. Voilà pourquoi c’est « un chemin qui conduit à la sainteté ».
50.3. L’appui de Dieu
« En dehors de moi, vous ne pouvez rien faire » (Jn 15, 5) : la nécessité de l’aide divine et la
certitude de recevoir sans cesse le soutien de la grâce du Père, sont deux convictions bien
soulignées dans ce dernier point de l’article.
Forts de la promesse divine exprimée dans l’Evangile et de l’intercession de notre Fondateur, nous
avons l’assurance que Dieu n'abandonne pas ceux qui offrent leur disponibilité à travailler pour la
jeunesse dans l’esprit de Don Bosco.
Parmi les nombreux passages de la Bible qu’il serait possible de citer, il suffit de rappeler celui-ci :
« Celui qui veut sauver sa vie [dans l’égoïsme et la médiocrité] la perdra ; mais celui qui perdra sa
vie pour moi [dans le don généreux de soi], la sauvera » (Lc 9, 24).
Voici ce que Don Bosco garantissait aux Coopérateurs fidèles à leur vocation salésienne : « Que le
Seigneur, notre Dieu, riche en grâces et en bénédictions spéciales, répande l’abondance de ses
faveurs célestes sur tous ceux qui s’emploient à gagner des âmes à Jésus notre Sauveur, à soutenir la
jeunesse chancelante, à former de bons chrétiens dans l’Eglise et d’honnêtes citoyens à leur pays,
afin que tous, nous puissions devenir un jour les bienheureux habitants du ciel » [4].
[1]. Voir à ce sujet un des nombreux dictionnaires bibliques.
[2]. Cf. GS 3b, 10b, 11a, 16a, 22c, 41, 55.
[3]. S. Irénée, Contre les hérésies, iv 20, 7, in PG vii 1037.
[4]. RDB Au lecteur, finale. Le texte est rappelé expressément en note par l’article 50 du RVA.

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