le traitement des demandeurs d`asile en bulgarie
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le traitement des demandeurs d`asile en bulgarie
60 La réinstallation des réfugiés du Bhoutan ne leur soit demandé à présent de choisir entre un futur aux Etats-Unis et leur droit de retourner dans leur propre pays. Christer Laenkholm Des réfugiés bhoutanais distribuent des alimentations à d’autres réfugiés au camp du Timal, Nepal. Il est essentiel que le droit à l’autodétermination des réfugiés soit respecté et qu’ils soient en mesure de prendre des décisions informées sur les conséquences diverses des trois solutions durables. Ils seront peut-être forcés à prendre des décisions pragmatiques. En ce moment, le rapatriement n’est pas une perspective réaliste ; la situation en ce qui concerne les droits humains des Népalais ethniques au Bhoutan est extrêmement précaire malgré les annonces de démarches vers la démocratisation du Royaume Bouddhiste. En l’absence d’une présence du HCR au Bhoutan, et compte tenu de la répugnance du Bhoutan à accepter l’idée que le HCR facilite et suive le rapatriement volontaire ne les prive pas de leurs droits de retour au Bhoutan. En dépit de l’intransigeance du Bhoutan, les réfugiés n’ont pas perdu l’espoir d’être autorisés à rentrer chez eux un jour. Certains réfugiés craignent qu’il RMF 29 des réfugiés, il n’existe aucune garantie d’assurer un statut légal sécurisé aux réfugiés népalais ethniques qui retourne. Ainsi, pour beaucoup de réfugiés, le ‘deuxième meilleur choix’ serait la meilleure option pour leur futur et celui de leurs enfants. De manière réaliste, bon nombre des réfugiés risquent de finir dans des emplois sous-évalués et sous rémunérés, avec des difficultés à s’intégrer aux Etats-Unis – toutefois, ils auraient la possibilité de donner une meilleure éducation et des perspectives d’emploi à leurs enfants que s’ils restaient à languir dans les camps de réfugiés. Christer Lænkholm (chl@dca. dk) est Officier des Secours pour DanChurchAid (DCA www.dca.dk). DCA est un partenaire de long terme de la Fédération Luthérienne Mondiale (LWF www.lutheranworld.org) qui a œuvré pour les réfugiés bhoutanais au Népal depuis leur arrive en 1991. Pour des renseignements supplémentaires, voir le rapport de Human Rights Watch d’avril 2007, The Need for Durable Solutions for Bhutanese Refugees in Nepal and India (http:// hrw.org/reports/2007/bhutan0507). 1. Pour l’historique des déplacements bhoutanais, voir FMR7 (www.fmreview.org/FMRpdfs/FMR07/fmr7.7.pdf); FMR10 (http://www.fmreview.org/FMRpdfs/FMR10/ fmr10.18.pdf); FMR19 (www.fmreview.org/FMRpdfs/ FMR19/FMR19update.pdf) et FMR25 (www.fmreview. org/FMRpdfs/FMR25/FMR2545.pdf). Le traitement des demandeurs d’asile en Bulgarie par Valeria Ilareva Les demandeurs d’asile sont soumis à des traitements épouvantables dans le centre de détention des immigrants en Bulgarie. Traités comme des immigrants sans papiers, ils sont pénalisés et expulsés – en violation flagrante des lois bulgares et des obligations de la Convention sur les réfugiés. Alfred, âgé de seize ans et provenant de Kosovo, est un enfant non accompagné en quête d’asile. Apeuré et confus, il l’air bien plus jeune. Il a été détenu au centre de détention des immigrants à Sofia depuis mai 2007, sous le même régime de détention que les adultes. Il n’a reçu aucune visite des officiels de l’Agence d’Etat pour les Réfugiés1, qui sont venus au centre de détention pour mener des entrevues avec des demandeurs d’asiles. Je lui rends visite le 14 septembre 2007, après lui avoir conseillé la semaine précédente de faire une deuxième demande d’asile. Il dit qu’il ne peut pas le faire mais je lui donne une feuille de papier et je lui demande d’écrire sa demande devant moi dans sa propre langue, l’Albanais. Il l’écrit. J’accompagne Alfred pour trouver un officiel pour être témoin que sa demande est reçue. L’officiel se met à crier qu’Alfred a déjà fait une demande d’asile. Quand j’explique que selon les lois bulgares sur l’Asile et les réfugiés, les officiels d’état sont tenus de recevoir les demandes d’asile et de les transmettre pour évaluation aux autorités compétentes, elle me réprimande pour lui dire comment faire son travail. RMF 29 Nous sommes surpris par son hostilité et nous ne savons comment réagir. Je comprends maintenant pourquoi Alfred disait qu’il ne pouvait pas soumettre une autre demande. Mais que pouvons-nous faire ? Il existe un ordre d’expulsion contre lui, le produit de circonstances impossibles dans lesquelles Alfred était maintenu dans l’ignorance des date-limite pour les appels ainsi que du contenu de l’ordre lui-même. Ceci n’est qu’un exemple des traitements que subissent les demandeurs d’asile en Bulgarie, dont la plupart viennent de l’Afghanistan, de l’Iran ou de l’Irak et qui sont entrés en Bulgarie par la Turquie. Aux termes de l’Article 31(1) de la Convention de Genève sur le statut des réfugiés – que la Bulgarie a ratifiée et dont la Bulgarie est par conséquent tenue de respecter les dispositions – les réfugiés ne doivent pas être pénalisés pour entrer illégalement dans le pays s’ils proviennent d’un territoire où leur vie ou leur liberté sont sous la menace. La notion d’’entrée illégale’ n’existe pas aux termes du droit international en respect des demandeurs d’asile et des réfugiés. Il n’est pas illégal pour un demandeur d’asile d’entrer dans un des pays signataires de la Convention, de quelque manière, avec ou sans papiers, etc., si son intention est de demander asile. Qui plus est, Le Code Pénal bulgare exonère les réfugiés de poursuites pour ‘entrée illégale’. En tant qu’état membre de l’Union Européenne, la Bulgarie a aussi transposé les directives de l’UE en respect des droits de demandeurs d’asile, dont la plus importante est le droit de demeurer sur le territoire du pays d’accueil pendant que la demande d’asile est sous examen. Aux termes des lois bulgares, les mineurs demandeurs d’asile doivent être automatiquement relâchés de détention. Les lois sont une chose ; leur mise en application en est toute une autre. Afin de bénéficier de la protection exigée par les lois, il faut d’abord que le statut de demandeur d’asile d’une personne soit reconnu. Cela se produit lors de l’enregistrement d’une demande d’asile. En Bulgarie, il n’existe aucune limite temporelle entre le moment de soumission d’une demande d’asile et son enregistrement, ce qui a pour résultat des épreuves intenables pour les demandeurs Le traitement des demandeurs d’asile en Bulgarie d’asile dont beaucoup doivent rester en détention indéfiniment sans recours légal en attendant leur ‘enregistrement’. La grande marge discrétionnaire accordée aux officiels en respect du temps requis pour enregistrer une demande d’asile a ouvert les portes à la corruption. de la Directive des conditions de réception de l’UE qui affirme que ‘Les Etats membres tiendront compte de la situation spécifique de personnes vulnérables telles que…les personnes qui ont été soumises à des torture…ou d’autres formes de violences psychologiques, physiques ou sexuelles’. Les demandeurs d’asile un peu plus fortunés qui ne sont pas sous détention sont forcés à se rendre à l’Agence d’état pour les réfugiés et de quémander une date, tout simplement pour entamer la procédure d’asile et pour recevoir la protection et l’aide essentielle dont ils ont tant besoin. Les personnes détenues pour être entrées ‘illégalement’ en Bulgarie passent des mois à attendre sous détention que leur demande soit enregistrée. Les demandes sont expédiées Khaled, un demandeur d’asile Tchéchène, a été détenu et torturé à deux reprises en Russie par les Services Fédéraux de Sécurité. Lors de la deuxième instance, il a ‘disparu’ pendant sept mois durant lesquels il était interrogé tous les jours et soumis à des chocs électriques, à des suffocations, à l’injection de substances ‘provoquant des paniques’, à l’écrasement de ses jambes dans des presses métalliques et à d’autres actes. Après être entré ‘illégalement’ en Bulgarie fin octobre 2006, il a été détenu. Il a soumis une demande d’asile écrite le 1er novembre 2006 (et l’a réexpédiée à plusieurs reprises par la suite) mais il n’a été enregistré que le 31 mai 2007, et ce, seulement après qu’il ait créé une scène auprès des officiels. Sa punition –comme celle de nombreux autres détenus- a été d’être mis en emprisonnement solitaire, dans une cellule appelée ‘l’isolateur’. L’isolateur est une cellule qui ne contient rien d’autre qu’une caméra. Après une entrevue bâclée à l’intérieur du bâtiment d’isolation, sa demande d’asile a été rejetée sans que ses allégations de torture soient examinées par un médecin. Son séjour prolongé en emprisonnement solitaire, qui se poursuit, constitue une torture selon la définition établie par la Convention contre la torture de 1984 des Nations Unies. régulièrement dans l’espoir de faire l’objet de l’attention officielle, mais elles ne sont pas prises en considération à moins d’être soumises personnellement par le directeur du centre de détention. La conséquence la plus dangereuse pour les demandeurs d’asile est le risque imminent d’expulsion (refoulement). Les demandeurs d’asile qui sont entrés en Bulgarie ‘illégalement’ reçoivent des ordres d’expulsion et leurs ambassades sont sollicitées pour aider à leur rapatriement. Les ordres d’expulsion sont normalement donnés avec une requête d’exécution préliminaire, ce qui signifie qu’un appel n’a aucun effet suspensif à moins qu’une demande d’asile ait été enregistrée. Par conséquent, l’Agence d’état pour les réfugiés peut venir au centre de détention en vue de mener une entrevue avec un demandeur d’asile et de l’enregistrer, pour constater que cet individu a déjà été expulsé comme ‘immigrant illégal’. Ceux qui ne sont pas sommairement expulsés font face à une détention longue et illimitée, sans égards aux exigences strictes En se servant de la bureaucratie pour différer la reconnaissance ‘officielle’ du statut des demandeurs d’asile, la Bulgarie applique à tort les lois domestiques en respect des immigrants sans papiers aux personnes qui devraient être exonérées de tels traitements. Les autorités bulgares accordent la priorité à la pratique administrative des officiels de L’Agence d’état pour les réfugiés plutôt qu’aux droits et à l’existence des demandeurs d’asile. Valeria Ilareva (valeria.ilareva@gmail. com) est juriste à la ‘Clinique légale pour réfugiés et immigrants (LCRI) www.lcri. hit.bg. Etablie à la Faculté de Droit de l’Université de Sofia, LCRI (lcribg@gmail. com) offre de l’assistance légale gratuite. 1. www.aref.government.bg/?cat=2 61 Le centre de détention Busmanci pour les immigrants sans-papiers à Sofia.