deuxième partie. périodes dans l`évolution de la langue
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deuxième partie. périodes dans l`évolution de la langue
ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS DEUXIÈME PARTIE PÉRIODES DANS L’ÉVOLUTION DE LA LANGUE FRANÇAISE ANCIEN FRANÇAIS (IX-ième s. - XIII-ième s.) Le début de l‟ancien français est noté par l‟an 842 où, les deux petits-fils de Charlemagne, Louis le Germanique et Charles le Chauve, conclurent un pacte d‟alliance contre leur frère Lothaire. Connu sous le nom de Serments de Strasbourg, ce pacte présente un texte rédigé en latin, avec les paroles prononcées par Louis Germanique, en roman, et par Charles le Chauve, en germanique. Système phonétique de l’ancien français Le système phonétique de l‟ancien français est le fruit des transformations qui s‟étaient produites dans la période précédente. L‟analyse des formes permet de constater que ce sont des changements réguliers et irréguliers. Les changements réguliers ont un caractère absolu et ne souffrent pas d‟exception pour une période donnée et un territoire donné. Voilà un tableau chronologique des changements phonétiques chez P. Guiraud I. La Gaule romaine et le roman commun (200-500) 1. L‟accent mélodique passe à l‟accent tonique ; 2. Quantité vocalique passe à l‟aperture : ī > i, ǐ > é, ē > é, ĕ > e ; 3. Réduction des diphtongues : ae et oe > è et é ; 4. Allongement des toniques libres : a ; 5. Amuïssement de h ; 6. Palatalisation des vélaires : k + i, e, i > tj ; g + j, ei > dj ; 7. Palatalisation des dentales : t + j > tj ; l, n + j > lj, nj. II. La Gaule franque (500-850) VIe siècle 1. Mutation de é et ó (prési > prisi, totti > tutti) ; 2. Palatalisation de a ; 3. Effacement de la pénultième atone : calidus > caldus ; 4. Vocalisation de k intervocalique : pacare > payer ; 5. Assimilation des occlusives : subtilen > sotil ; 6. Diphtongaison des è et ò accentués libres : mĕl > miel, nǒve > neuf ; 7. Fracture de è et ò devant palatale : oclu > oujl ; VIIe siècle : 1. Palatalisation de k, g devant a ; 2. Déplacement en avant des palatales : ‘tj, ‘dj, ‘kj, ‘gj > ts, dz ; 3. Aperture de l‟intervocalique : audire > auθire ; 80 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS 4. Sonorisation de p, t intervocalique : vita > vida ; 5. Aperture de t, d finals derrière voyelle ; 6. Fermeture de j, w initiaux : werra > gwera, djurnu > dzurn ; 7. Effacement complet des pénultièmes atones ; 8. Réduction des voyelles finales et intervocaliques a, e ; 9. Diphtongaison de é et ó accentués libres : tēla > tėila ; et de a ae : ala > aele ; 10. Diphtongaison de a derrière palatale : caru > chier. VIIIe siècle : 1. Effacement des voyelles finales et intervocaliques ; 2. Le a final passe en e : vida > vide ; 3. Assourdissement des consonnes finales : grand > grant ; 4. Palatalisation de s final derrière une palatale : filius > filjs filts; 5. Réduction de au > o ; 6. Réduction de ae > è : aele > ele ; 7. Réduction des groupes consonantiques ; 8. Résolution de l, n palatal final en in : bagn > bain. Le français archaïque (850 - 1190 environ) 1. Palatalisation de ū > ü : mūr > mür ; 2. Fermeture de ó > u : tot > tut ; 3. Passage de ųo > ųe : cųor > cųer ; ei > oi, ou > eu ; 4. Réduction de é initial à e ; 5. Nasalisation de ã, ẽ, ãi, ẽi ; 6. Effacement de θ : viθa > vie ; 7. Vélarisation et vocalisation de l devant consonne : palma paume. XIIe siècle : 1. Amuïssement de l, s devant consonne : izle > île ; La diphtongaison des voyelles consistait en allongement dédoublement de la voyelle. Il existe deux types de diphtongaison : La I-ère diphtongaison a formé les diphtongues suivantes : > > > et Ue < uo < o ie < ę Buef < buove < bove piet < pęde Nuef < nuove < nove fier < feru (m) Suer < suor < soror miel < męl La seconde diphtongaison a donné les diphtongues ci - dessous : Eu < ou < ō, ǔ ei < ē, ǐ Neveut < nevout < nepote mei < mē Gueule < goule < gola < gǔla meis < męse < mense Ainsi la diphtongaison a donné au système vocalique de l‟ancien français 4 diphtongues : ue / uo, ie, eu / ou, ei. 81 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS La diphtongaison de a est conditionnée par la consonne précédente ou suivante (a + n, m > iẽn, aĩn). La vocalisation totale est la réalisation vocalique d‟une consonne : l > u : alba > aube ; g > u : smaragdu > esmeraude > emaraude ; v > u : avica > auca > oca > oie ; b > u : tabula > tabla > taula > tole. D‟autres cas de vocalisation : au < a + l : talpa > taupe, calǐdu > chaud ; eau < e + l : castellos > chateaux ; eu < ǐ, ē + l entravés : capillos > cheveux ; ou < ǒ + l entravés : solidu > sou ; mous > mollis ; etc. La sonorisation des consonnes sourdes en position intervocalique a transformé les sourdes latines p, t, k, s en sonores b, d, g, z : ripa > riba, vita > vida, pacare > pagare, rosa > roza. La palatalisation a enrichi le consonantisme de l‟ancien français de consonnes suivantes : t∫ (chose), dj (gent), n’ (vigne), j (fille) : On comprend par palatalisation une articulation complémentaire à l‟articulation de base, un relèvement de la partie médiane de la langue vers le palais dur : c + e, i > k’ > t’ > ts : centu > cent ; devant -a la consonne c passait en t∫ : cantare > chanter, arca > arche > art∫e ; g + i : argilla > argile > ardjile; g + e: gente > gent > djent. Grammaire : le nombre et le cas. La catégorie du nombre est représentée dans l‟opposition des formes du singulier et du pluriel qui est marquée par la flexion -s : si le singulier est marqué par l‟absence du -s, le pluriel est marqué par la présence du -s (le cas sujet) ; si le singulier est marqué par la présence du -s, le pluriel en est privé (opposition des nombres au cas sujet). Li chevaliers a donc penssoit a une amor vaillant et belle (Le chevalier pensait donc à un amour précieux et beau) ; Li dui chevalier ancien… L’article c‟est une innovation romane, il remonte au démonstratif latin ille (article défini) et au numéral unus (article indéfini). L‟article défini garde longtemps la valeur démonstrative et déterminante, l‟article indéfini s‟emploie le plus souvent dans sa valeur numérique : Tresqu’en la mer cunquist la terre altaigne (Rol., 3) = Jusqu’à la mer il conquit la terre hautaine. L‟article indéfini masculin, singulier, cas sujet : uns ; féminin : une cas régulier : un masculin pluriel, cas sujet : un ; féminin : unes cas régulier : uns L‟article défini 82 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS a) Formes normales : masculin, cas sujet : li cas sujet : li singulier, cas régulier (XIe siècle) puis le puis les féminin : la, les masculin, pluriel, cas régulier : los, b) Formes contractées : singulier : a + le > al, au ; de + le > del, deu au XIIe siècle, puis du ; en + le > enl avant le XIe siècle, puis eu, ou ; pluriel : a+ les > as, aus, aux ; de + les > des, dels ; en + les > es, els par analogie de les L‟article partitif L‟ancien français ne connaît pas d‟article partitif. Comme forme il apparaît au XIII e siècle jusqu‟alors la valeur du partitif s‟exprimait à l‟aide de la préposition de : mangier de pain, mangier del (du) pain. Pronoms personnels cas sujet : jo, gié, je < ēgo (je dès le XIIe siècle) Formes atones cas régulier : mei, moi < mĕ me < mĕ Pluriel cas sujet nos, nous < nos ; nos, nous (XIIIe siècle) cas régulier cas sujet : tu, tū cas régulier : tei, toi < tē tu te < tē cas sujet : il < illi ; féminin : illa ; neutre : el < illum cas régulier : I. (datif - génitif) lui < illui ; féminin : lui et lei < illei II. (accusatif) lui < illui ; féminin li et lei < illei Pluriel IIIe personne cas sujet : illi ; féminin : eles, illas cas régulier : I. (datif - génitif) lor < illōrum ; féminin : lor < illōrum II. (accusatif) els, eux < illos ; eles < illas Le pluriel dure jusqu‟à la fin du XIIIe siècle. MOYEN FRANÇAIS La formation du français littéraire et écrit aux XIVe - Xve siècles a pour base le dialecte francien. Du patois de l‟Ile - de - France, domaine 83 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS royal, le francien devient langue commune supprimant graduellement les autres dialectes, pour s‟établir, au XVIe siècle, comme langue de l‟Etat. Le dialecte central s‟emploie comme forme littéraire écrite dans différents genres de littérature médiévale : dans les chroniques (Jean Froissart) et dans des mémoires (Filippe de Commynes), dans la poésie (Guillaume de Machaut), et dans la prose (Antoine de la Sale), dans les théâtres, etc. Le francien sert également (XVIe siècle) de langue technique rivalisant ainsi avec le latin dans la correspondance officielle et dans les sciences. Dans des ordonnances, la chancellerie royale se sert déjà du français face au latin, à partir du XIVe siècle. Le français devient objet d‟étude. Ce sont les besoins techniques de l‟imprimerie qui attirent l‟attention sur le problème de réforme en orthographe - recomplètement de l‟alphabet par des signes (accents) et caractères. Parmi les imprimeurs se trouvaient des philologues et des grammairiens comme Geofroy Tory, les Estienne (père et fille). En 1529, Geofroy Tory reforme les caractères d‟écriture, dans son Champfleury et propose l‟idée de soumettre la langue à une culture. Les premières grammaires françaises sont celle de Palsgrave destinée aux Anglais (1530) et celle de Jacques Dubois (Silvius) composée en latin et sur le modèle latin (1531). Suivant l‟idée restauratrice des humanistes, Dubois voit dans le français du latin corrompu par le mauvais usage, « un latin dégénéré par l‟état d‟inculture où il a été abandonné ». Le travail de restauration de la langue consistait en latinisation du français : calquer la grammaire française sur la grammaire latine en établissant en français les mêmes catégories qu‟en latin. La grammaire qui la première est orientée sur la langue française contemporaine, est celle de Louis Meigret (Le treté de la grammaire françoise, 1550). Pierre de la Ramée (Ramus) reprend les idées de Meigret concernant la réforme de l‟orthographe et la normalisation de la langue : il met l‟accent sur les sources populaires du langage : « le peuple est souverain seigneur de sa langue, dit Ramus, et la tient comme un fie à franc aleu et non doit recognaissance à aulcun seigneur. L‟escolle de cette doctrine n‟est point es auditoires des professeurs Hebreux, Grecs et Latins en l‟Université de Paris comme pensent ces beaux étymologiseurs. » Parue en 1549, la célèbre Deffence et Illustration de la Langue Française fut un ouvrage théorique où étaient exposées : « les idées de l‟égalité et de l‟opposition du français au latin, les droits dont le français jouissait comme langue écrite et littéraire, et d‟autre part, l‟auteur Joachim Du Bellay, expose le programme poétique et linguistique qui préconise l‟enrichissement de la langue littéraire. » Les poètes doivent écrire en français. Vocabulaire du Moyen Français. Les événements politiques et économiques, l‟évolution de la société féodale, le développement des sciences, arts et métiers, ainsi que l‟épanouissement de la culture et de la 84 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS littérature, tout cela a trouvé son incarnation dans le lexique des XIVe XVIe siècles. L‟enrichissement du vocabulaire français se fait par le moyen de formation des mots nouveaux et par les emprunts. Dérivation : suffixes, préfixes et des radicaux latins. A cette époque l‟influence du latin est encore forte. Il se forme plusieurs doublets étymologiques dans les suffixes : -aire, -ier : contraire, adversaire (mots savants) et aversier (mot populaire) ; -al / -el : natal, capital et noël, châtel (mot populaire) ; -at / -é : avocat / avoué ; -tion, -ation / -aison : supposition, nomination et combinaison. Les préfixes latins : ab- : abstiner, abstraction ; dis- : discerner, disgrâce (préfixe populaire des- : desculper, disculper) ; in- : imprimer (empreindre préfixe populaire) ; pro- : promener, produire (préfixe populaire pourmener). Les suffixes populaires sont d‟une extrême fécondité : -age, -aille, ois, -al, -aud, -ard, -ement, -esse, -erie, -eron, -oire, -able, etc. Changements dans la chaîne parlée : L‟influence de l‟accent. L‟accent rythmique est l‟acquisition du moyen français. Oxytonique déjà en ancien français et attaché au mot, l‟accent n‟était pourtant très marqué. Au moyen français il devient l‟accent du groupe de mots, accent rythmique ou accent de phrase. Les voyelles atones se réduisent et tombent en hiatus : meër (matūru) tombent ensuite (mür). La voyelle e à l‟initial dans la syllabe libre, se réduit en ə : devoir < debēre, peser < pesāre, mener < mināre, menu < minutum. La voyelle atone e se réduit dans toutes les positions : à la finale, à la pénultième, à la contrefinale. La réduction de au et de eau > o. Le procédé commence au XIIIe siècle et ne s‟achève qu‟au XVIe siècle, par l‟intermédiaire du ao. Nom. Les catégories du nom en ancien français étaient : 1) Catégorie du genre ; 2) Du nombre ; 3) Du cas. Pour exprimer ces catégories, le nom en ancien français possédait 2 moyens essentiels : 1) la flexion - moyen morphologique, hérité du latin ; 2) les mots - outils (articles, prépositions - moyens syntaxiques et innovations romanes. La flexion du nom était chargée de 3 fonctions : celle d‟exprimer le genre, le nombre, le cas : la flexion -s exprimait le cas, le nombre et le genre à la fois. L‟absence ou la présence du -s constituait la déclinaison à 2 cas (sujet et région) et à 2 nombres (masculin) ; l‟absence ou la présence du -s opposait le singulier / pluriel dans les noms féminins. Pour la catégorie du nombre, elle est exprimée : zéro flexion / flexion - s, commune à tous les noms féminins. 85 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS Dans les composés nominaux, la postposition d‟un substantif à un autre marque la fonction de déterminant : professeur - stagiaire, vente signature, bateau - mouche, bateau -pilote. La juxtaposition de deux adjectifs est répandue dans les terminologies spéciales, techniques et politiques : social - démocrate, radio - actif, photorésistant. - Composés à terme verbal suivi d‟un nom : compte - gouttes, gratte - ciel, brise - glace, par - brise, porte - plume ; - Composés d‟origine technique à partir des éléments grecs : télégraphe, téléphone, télépathie, télescope, etc. ; - Particulièrement productifs sont les composés dûs à la substantivisation d‟un groupe syntaxique : un va et vient, le qu’en dira - t on, un va - nu - pieds, le je - m’en fichisme, etc. ; - En tant que langue analytique le français marque une préférence nette pour les tours périphrastiques : faire peur (= effrayer), prendre peur, prendre feu, prendre la fuite (= s’enfuir), mettre en œuvre, mettre au point ; - Les adverbes préfèrent également les formations analytiques à côté du suffixe -ment assez vivant : tout à tout, tout d’un coup, tout à fait, tout de suite, etc. ; - Le transfert d‟une catégorie grammaticale à une autre : un rapide (train), un documentaire, un militant, un agrégé. LE FRANÇAIS CLASSIQUE Le XVIIe siècle en France est caractérisé par le renforcement du pouvoir royal. Le règne de Henri IV (1589 - 1610) a apaisé les esprits et réorganisé l‟Etat, mais il est suivi par une période de désordre, la noblesse et le clergé s‟opposant au pouvoir royal (1610 - 1621). Soutenu par la bourgeoisie et les villes, le pouvoir royal se montre assez fort pour briser la résistance de l‟aristocratie. Les insurrections des années 1643 - 1654 contre le joug insupportable des impôts sont suivies de la guerre civile de la Fronde - révolte conte l‟absolutisme, mais la Fronde s‟achève par le triomphe de l‟absolutisme. Le renforcement définitif de l‟absolutisme est lié au nom du Ier ministre de Louis XIII, le duc de Richelieu. Age de l‟absolutisme, le XVIIIe siècle, est aussi l‟âge ou s‟achève la consolidation et la centralisation du pays. La formation de la nation française s‟achève ; la politique linguistique est orientée à l‟établissement des normes de la langue française en tant que littéraire écrite. Le grand rôle dans le processus de normalisation de la langue française appartient aux grammairiens et aux théoriciens de la langue française, à l‟Académie française et aux salons. En 1606, François Malherbe (1555 - 1628) commente et critique devant ses disciples les œuvres de Desportes. Dans ses commentaires 86 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS Malherbe expose les idées sur la langue poétique : « il détermine les caractères que devra avoir la langue littéraire : ce sera une langue de choix, d‟où seront exclus les parlers provinciaux, le parler du peuple, les vocabulaires des techniciens, professeurs, médecins, juristes. La bonne langue est celle des gens du monde ; la règle commande à tous les écrivains (Brunot et Bruneau, HLF, p. XV). Ses remarques et critiques constituent une théorie d‟épuration de la langue d‟où naît un mouvement de purisme. Cette doctrine sera généralisée et appliquée à la langue littéraire ; Poète assez médiocre, Malherbe est hautement apprécié comme critique littéraire et théoricien de la langue. Dans ses déclarations, Malherbe s‟appuyait sur ses connaissances de l‟usage, il étudiait la langue littéraire parlée dans les couches les plus cultivées de la société parisienne, mais il ne dédaignait pas le langage populaire. L‟Académie française fondée par Richelieu en 1635, continue l‟œuvre de Malherbe : les premiers académiciens Conrart, Chapelin, Malleville, sont ses disciples. L‟Académie avait pour tâche d‟élaborer un Dictionnaire et une Grammaire sur des principes de purisme ; elle était aussi chargée d‟élaborer une Rhétorique et une Poétique (œuvre, style poétique). De toutes ces tâches que l‟Académie devait donner à la langue, elle n‟a réussi à faire qu‟un dictionnaire. La Grammaire apparaît dans sa première édition, en 1932 - 1934 (3 siècles plus tard). La Ière édition du dictionnaire de l‟Académie française n‟a paru qu‟en 1694. Œuvre très imparfaite (Brunot et Bruneau HLF), ce Dictionnaire ne contenait qu‟une partie du vocabulaire composé sur des principes puristes. C‟étaient des mots employés dans un style noble, généralisés pour toute la langue littéraire. Certains archaïsmes ont été interdits tels que : chaloir, choir, férir, ire, seoir, usance, etc. ; toutefois certains archaïsmes ont survécu : actif, allégresse, angoisse, anxiété, condoléance, effectif, élaborer, gratitude, etc. ; ont été interdits, desconsidérés indécents ou vulgaires : conception, enceinte, barbier, cadavre, estomac, gueule, pouls, ulcère, ventre, vomir, etc. Contre cet idéal de fixité et contre ce royaume des mots (qui a mis le peuple hors de la belle langue, dite langue noble), s‟est élevé un des membres de l‟Académie française, Antoine Furetère (1619 - 1688). Ecrivain, auteur du fameux Roman Bourgeois (1666), il s‟est opposé au travail trop lent de l‟Académie et à ses principes trop sévères de choix des mots. Il a composé son plan de dictionnaire et a entamé l‟élaboration d‟un Dictionnaire universel, contenant généralement tous les mots français tant vieux, que modernes. Cela le fit exclure de l‟Académie son Dictionnaire ne fut publié qu‟à la mort de Furetière, comme œuvre posthume (1690). Le Dictionnaire de l‟Académie française, même par sa 2 e édition n‟a su le surpasser en richesse. 87 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS Claude Vaugelas (1595 - 1650) a été un autre grand théoricien de la langue française ; successeur de Malherbe, Vaugelas développe les idées de purisme dans ses remarques sur la langue française. Il y voit « le bel Usage (le bon usage) défini comme la façon de parler de la plus saine partie de la Cour, conformément à la façon d‟écrire de la plus saine partie des Auteurs de temps. » S‟orientant à la langue parlée, Vaugelas voit sa tâche en la fixation des formes en usage et se montre moins puriste : « Poitrine, est condamné dans la prose, comme dans les vers, pour une raison aussi injuste que ridicule », écrit-il dans ses Remarques. Mais observant « le bel Usage » comme l‟usage de la Cour et de la haute société parisienne, Vaugelas rétrécit (rend plus étroit, diminue l‟ampleur) l‟horizon, comme l‟a dit Nyrop: « ce qu‟il recherche, c‟est un parler noble, relevé et épuré, et pour lui, l‟ennemi c‟est le peuple et la contagion des provinces. Ainsi la langue d‟un grand peuple sera réduite au vocabulaire de quelques centaines de courtisans oisifs et souvent peu instruits : les provinces et le peuple ne compte plus : « le greffier - fonctionnaire qui assiste le greffier en chef ; le greffier en chef - qui dirige et assiste les magistrats à l‟audience. Le greffier du bel Usage a singulièrement rétréci l‟horizon » (Nyrop, I, p. 76). L‟épuration du langage est appuyée par les salons où se réunissent des poètes et des gens du monde : on s‟y distrait, on y organise des jeux de société, des bals, des représentations théâtrales ; on y discute des questions de littérature et de langue (le salon de Mme de Rambouillet, 1620 - 1648 ; de Mme de Scudéry, 1654 - 1660) qui ramène l‟épuration de la langue à l‟absurde, on y crée toute une série de périphrases remplaçant des mots ordinaires, « bas », familiers : les cheveux - la petite oye de la teste ; la chemise - la compagne perpétuelle des morts et des vivants ; les dents l‟ameublement de bouche ; etc. Les écrivains du XVIIe siècle ont élaboré une langue souple, précise et claire, capable de traduire les plus fines nuances de la pensée. La clarté et la précision des mots, dès cette époque, resteront des règles essentielles de l‟art français de bien écrire. Les plus beaux exemples de la langue française du XVIIe siècle sont donnés dans les œuvres de Pierre Corneille (1606 - 1684) et de Jean Racine (1639 - 1699), de Molière (1622 - 1673) et de la Fontaine (1621 - 1695), représentants du classicisme français, dont les principes esthétiques sont exposés par Boileau (1636 - 1711) dans son Art poétique (1674). La langue latine élimine définitivement le latin dans le domaine des sciences. Les œuvres philosophiques (Descartes et Malherbe), les ouvrages scientifiques (Pascal) sont déjà écrits en français. 88 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS LE FRANÇAIS CONTEMPORAIN (XIXe - XXe siècles) 1. Conditions historiques du fonctionnement du français actuel. Français littéraire et français parlé. Le début du XIXe siècle est marqué par la bataille des romantiques contre les classiques, par une espèce de « révolution littéraire et artistique ». Ainsi, la poésie lyrique et sentimentale inaugure le XIXe siècle en France par les œuvres de Lamartine « Méditations », poèmes d‟Alfred de Vigny, « Odes » de V. Hugo. Mme de Staël et Stendhal se dressent contre « la pompe des alexandrins » qui est le plus grand obstacle « à tout changement dans la forme et le fond des tragédies françaises ». Le vrai manifeste du romantisme est donné cependant par V. Hugo dans sa préface de Cromwell (1827) dans lequel le poète proteste contre la rigidité de la grammaire classique. Les romantiques protestent contre la distance qui sépare les mots nobles des mots ordinaires. Ils optent pour les mots techniques, populaires, voire argotiques et certains dialectismes. Par cela même, les romantiques mettent à l‟usage poétique les richesses du vocabulaire français. 2. Vocabulaire. Particularités et tendances. Au cours des siècles il y a eu lieu une fusion quasi-totale du fond primitif (mots populaires) et des mots savants. Il s‟ensuit que le lexique contemporain dispose d‟une grande diversité de racines : animal vétérinaire ; viande - boucher ; jardin - horticulture ; œil - oculiste ; eau aquarium. Depuis le XIXe siècle, le lexique s‟enrichit de plus en plus avec le développement des sciences et des techniques ; elles sont propagées par l‟enseignement, la presse, la TV et le cinéma. La dérivation est toujours le mode principal de formation des mots nouveaux. Nombreux sont les suffixes et les préfixes qui sont sortis de l‟usage (-esse, -té, -ie, -oir ; mé-(mes-), mal- (mau-), par-, pour-, etc.) ; d‟autres ne sont plus courants ou bien réservés à la terminologie (-ure, ance, etc.). Cependant on doit attester les affixes d‟origine savante : -iste et -isme sont fréquents, entre les années 1948 - 1960 ils ont servi à former 174 mots nouveaux. Dans les noms et les adjectifs sont toujours productifs les suffixes suivants : -eur, -ateur, -iste (perforateur, réalisateur, adapteur, populiste, marxiste) ; -er, -ier (postier, saisonnier, liftier, etc.) ; -age, -isme (lynchage, amateurisme) ; -able, -igne (analysable, analytique, symptomatique). Ce qui est à signaler dans la formation des adjectifs, c‟est l‟apparition d‟un grand nombre d‟adjectifs de relation qui assument les fonctions de complément déterminatif ou de complément de nom, marqué en français par un substantif avec préposition : -de fer, en bois, de passage : production betteravière, industrie sucrière, code routier, visite présidentielle, accord 89 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS pétrolier, pensée pascalienne, etc. Bien que le français ait formé ces espèces d‟adjectifs à toutes les époques, ils n‟appartenaient pas au fond essentiel du vocabulaire. Le français se servait de préférence de constructions prépositionnelles (cabinet de ministres, décision du gouvernement, industrie du sucre). Les adjectifs de relation restaient en marge de la langue littéraire, ils étaient d‟un rendement minime ; leur emploi ne s‟étend que grâce à la fusion des deux couches lexicales, populaire et savante. Certains suffixes reçoivent un sens spécialisé : -ment qui exprime le résultat d‟une action - fusionnement à côté de fusion. Dans le verbe seul -er reste toujours vivant ; il se rejoint aux radicaux des noms et des adjectifs : stopper, militer, finasser, chouchouter, bétonner, villégiaturer. Les verbes du Ier groupe tendent à remplacer leurs synonymes appartenant à la conjugaison archaïque : clôturer < clore, solutionner < résoudre, émotionner < émouvoir, réceptionner < recevoir. Par l‟intermédiaire du langage des sciences, les verbes à suffixes -iser, -fier pénètrent dans la langue commune : électrifier, codifier, planifier, dramatiser, etc. Le langage parlé et populaire fournissent quantité de verbes à suffixes affectifs -ail, -ler, -aiser, -onner, -oter, -eter, -eler, -oiller : écrivailler, rêvasser, traînasser, chantonner, ovationner, toussoter, pianoter, voleter, craqueler, sauteler, etc. Quant aux préfixes populaires, il est à noter que la productivité du préfixe re- est limitée (recaler, raccompagner, réenrouler, etc.). Tout productif : dé- (dés) : défroissable, déshabiller, déshériter, déshuiler, désinfectant, auxquels viennent s‟ajouter les préfixes savants: dis-, es-, pro-, sub-, super-, extra-, archi-, hyper-, ultra- : disjoncteur, subconscience, subventionné, superfin, hypertension, archifou, extra-fort, ultraviolet. 90 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS SCHEMAS DE SYNTHESE On trouvera dans les schémas ci-dessous le développement de chaque son dans les principales positions. Ainsi pour les voyelles on a choisi les syllabes toniques et contretoniques (initiales), parce qu‟elles ont été plus profondément atteintes par les changements phonétiques. Seule la réduction ne se rencontre que fort rarement dans ces positions (surtout en position tonique), caractérisant plutôt les syllabes atones. En général on observe plus de disparité dans l‟évolution des syllabes toniques que dans l‟évolution des syllabes contretoniques. Dans le traitement des voyelles contretoniques initiales par rapport aux voyelles toniques il convient de noter les points suivants : a) Pour les voyelles initiales contretoniques le fait d‟être libres ou entravées a eu des conséquences bien moins importantes, que pour les voyelles toniques. b) Les nasales n‟ont pas eu d‟action durable sur ces voyelles, si ce n‟est qu‟elles les nasalisent toujours lorsqu‟elles se trouvent elles-mêmes devant une autre consonne. c) Les voyelles initiales n‟ont donné naissance à des diphtongues que par combinaison avec yod ou un l vocalisé. d) Dans cette position, les voyelles ont une tendance générale à s‟affaiblir. Certaines combinaisons de voyelles et de consonnes ne se rencontrent que rarement et dans des mots peu employés (par ex. j + ā + j dans la position tonique) ou ne se rencontrent pas du tout (par ex. j + ī + j). Quant aux consonnes, leur évolution est présentée dans la position (initiale) et dans la position faible (devant consonne, entre voyelles). 91 I. Voyelles Développement de a (l. cl. ā) position + nas. a syllabe libre Tonique mare > mer NB : cane > chien; Forme dialectale: meir (Est et Nord) contretonique marītu > mari NB: matūru > meur > mur entravé a l‟influence sous a + (l + cons.) libre parte > part „talpa > taupe a) amat > aime b) manu > main NB: cane > chien partīre > partir saltāre > sauter NB: calōre > chaleur famōsu > fameux entravé annu > an lanterna > lanterne yod a+j libre ou entravé baca > baie basiat> baise j a j+a+j libre entravé mandūcāre > mangier - libre ou entravé jacet > gît jactat > gite caballu > cheval placēre > plaisir adjutāre > aider d‟un + carbōne > charbon - ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS Développement de e ouvert (l. cl. ĕ, ae) en syllabe tonique libre entravé e + (l + cons.) (e libre pede > pied terra > terre forme dialectale: tierre (Est et Nord) castellos > chateau forme dialectale: castiau (Nord Ŕ Est) bene > bien formes dialectales: bin (Est); (Ouest) e sous l‟influence + nas.) entravé ben e+j d‟un yod j+e libre ou entravé libre dece > dix lĕctu > lit caelu > ciel ventu > vent forme dialectale: vẽ (norm., pic., wall.) Développement de e fermé en syllabe tonique (l. cl. ē, ĭ, oe) E libre entravé + e+(l + cons.) capĭllos > vĭr(i)de > NB : francĭscu > vert cheveux a) plēna > pleine b) plēnu > plein l‟influence e sous e libre mē > moi nas. + j+ē j entravé vendĕre> vendre forme dialectale : vẽdrð (norm., pic., wall.) français 93 d‟un yod libre libre entravé rēge > roi fēria > foire mercēde > merci ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS Développement de o ouvert (l. cl. ŏ) en syllabe tonique o libre entravé o sous l‟influence entravé o+j d‟un yod o + (l + cons.) libre cor > coeur + nas. porta > porte sol(i)dum > sou a) bŏna > bonne b) bonu > bon ponte > pont nŏcte > nuit ŏ+ (j + i) oc(u)lu > oeil Développement de o fermé (l. cl. ō, ǔ) en syllabe tonique o libre entravé l‟influence d‟un yod o+ j o+ (l + j) o + (n + j) angustia> angoisse fēnuc(u)lu > fenouille + nas. o sous entravé o + (l + cons.) libre hora > heure nōdu > gutta > ultrā goutte outre > a) corōna > couronne b) leōne > lion umbra ombre noeud 94 > a) cicōnia > cigogne b) cuneu > coin ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS Développement de o ouvert et de o fermé en syllabe contretonique (l. cl. ŏ, ŏ, ǔ) Libre entravé o + nas. o + j movēre > mouvoir NB: cotōneu > cooing > coing nūtrīre > nourrir libre entravé sonāre > sonner fontāna > fontaine pōtiōne > poison Développement de e ouvert et de e fermé en syllabe contretonique (l. cl. ĕ, ē, ĭ) Libre venīre > venir entravé firmāre > fermer e + nas e + j libre entravé ēmundāre > emonder inflāre > enfler NB : e init. donne a, surtout devant l, r : bilancea > balance pigritia > paresse 95 messiōne > moisson ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS Développement de i (ī du l. cl.) en syllabes toniques et contretoniques position libre entravé i + l + cons. i syllabe tonique libre venīre > venir ī(n)s(u)la > île argīlla > a) argile līma + nas. entravé > lime prīncipe> i sous l‟infl. (i + j) d‟un yod libre entravé amīcu > ami fīlia > fille prince b) vīnu > vin contretonique fīlāre > filer vīllānu vilain > fīl(i)cella > fīnīta > finie ficelle cīnquanta > cinquante 96 - tītiōne tison > ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS Développement de u fermé (l. cl. ū) en syllabes toniques et contretoniques position libre entravé u + (l + u cons.) syllabe libre tonique a) plūma > mūru > mur pūrgat > purge contretonique pūl(i)ce > u sous l‟infl. + nas. d‟un yod entravé libre entravé - lūces > luis ūstiu > huis plume b) ūnu > un pouce dūrāre > lūmināria > pūlicella > mūnīre > lūn(ae)die lūcente > ustiāriu > durer lumière pucelle munir > lundi luisant huissier Développement de la diphtongue au après son passage à o position libre entravé auru > or claudere > clore o + nas. o+j syllabe tonique sagma > sauma > gaudia > joie somme habunt > aunt > ont contretonique auriculu > oreille claustūra > clôture 97 - aucellu > oiseau ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS Développement des voyelles accentuées (latin classique – français moderne) _________ ū ________ ׀ ׀ pūru > pur pūrgat > purge _______ i _______ ׀ ׀ fīlu > fil mīlle > mil ________ ē, ĭ ________ ׀ mē > moi (mē > mei > moi > mue > mwa) ׀ lĭttera > lettre (lĭttera > lẹtera > lettre) _________ ō, ǔ ________ ׀ ׀ sōla > seule bǔcca > bouche (sōla > soule > seule) _________ ĕ, ae _________ ׀ ׀ bĕne > bien caelu > ciel septe > sept (bĕne > bien > bién) __________ ŏ __________ ׀ ׀ nŏve > neuf sŏttu > sot (nŏve > nuove > neuf) _________ ā __________ ׀ ׀ mare > mer arbore > arbre (mare > mẹr > męr) ; mais pāne > pain cane > chien ad > à Légende: ___________ le son du l. cl. __________ ׀ ׀ en position en position libre 98 entravée ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS II. Consonnes Les postlinguales occlusives Position forte 1. k + ē, ī > ts > s : cervu > cerf 2. k + ā > tš > š: carru > char 3. k + ō, ū > k : corpus > corps 1. g + ē, ī > dj > j : gelāre > geler 2. g + ā > dj > j : gamba > jambe 3. g + o, u > g : gula > gueule Les Les perdere > perdre bonu > bon Position faible k 1. k + cons. > j ; fac(e)re > faire ; mais k + j > s : facia > face, lancea > lance 2. k intervoc. : a) voyelle + k + ē, ī > j + z : licēre > loisir, mais vōce > voix b) voyelle + k + ā > j : pācāre > payer c) dans l‟entourage de ō, ū > ↓ sēcūrum > seur > sûr locāre > louer g 1. g + cons. > j : flagrāre > flairer 2. g intervoc. : a) voyelle + g + ā, ē, ī > j : plaga > plaie l. p. page(n)se > pays b) dans l‟entourage de ō, ū > ↓ agustu > août rūga > rue labiales occlusives p, b 1. p, b + cons. > ↓ rupta > route 99 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS Les valēre > valoir fronte > front Les prélinguales terra > terre dente > dent mais : a) d + j > j diurnu > jour galb(i)nu > jaune mais a) p, b suivies de r > v : lepore > lièvre labra > lèvre b) pl > bl : duplu > double c) p + j > š : apiu > ache b+j >j: tibia > tige 2. p, b entre voyelles > v : ripa > rive faba > fève constrictives f, v 1. f, v + cons. > ↓ : forf(i)ces > forces vīvit > vit mais a) f, v suivies de r, l persistent : sulf(u)r > souffre sufflāre > souffler vīv(e)re > vivre b) v + j > j : cavea > cage 2. f, v entre voyelles : f↓ : refūsāre > reuser > ruser v persiste : lavāre > laver occlusives t, d 1. t, d + cons. > ↓ : test(i)mōniu > témoin advenīre > avenir mais : a) t, d + r précédés d‟une autre consonne restent intactes : mittere > mettre, vendere > vendre et se réduisent par assimilation à rr (r) dans une 100 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS b) t à l‟intérieur du mot derrière consonne, tantôt se conserve, tantôt se sonorise en d : dub(i)tat > doute, cub(i)tu > coude position intervocalique : petra > pierre, patre > père, hedera > lierre b) t + j précédé d‟une consonne aboutit à s : fortia > force, tandis que précédé d‟une voyelle t + j > z : pretiat > prise d + j précédé d‟une consonne, autre que n, aboutit à j : hordĕu > orge, tandis qu‟en position intervocalique d tombe : gaudia > joie 2. t, d intervoc. > ↓ : vīta > vie ; nūda > nue NB : Il n‟est pas donné de schémas pour les autres consonnes, parce que leur évolution est plus simple à retenir : s persiste en position forte, tombe devant consonne en position faible, excepté la position intervocalique où elle se sonorise ; l persiste ou se vocalise (devant consonne et après les voyelles de grande aperture ; l se palatalise devant j ; r persiste en position forte et en position faible (excepté la position finale) ; m, n persistent ou nasalisent la voyelle précédente n se palatalise devant j. 101 ESSAIS SUR L‟ANCIEN FRANCAIS 102