Télécharger - Le Beaufortain

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l e M a g a z i n e d u b e a u f o rta i n
N°1 ~ Gratuit
ROSELEND,
50 ans
d'odyssée
entre la terre
et l'eau
m
p.18
De l'herbe au Beaufort
toute une histoire
m
p.25
poudreuse à gogo
et saute vallons
m
p.43
Marie Bochet
chercheuse d'or
m
p.47
Sommaire
une nature préservée
Hélène durand, “la marche est un art de vivre”
La haute route des vagabonds
Le versant du soleil, Roger Frison-Roche
Refuge de Presset, Un rêve d’enfant
La blague de Samivel
Tourbière des Saisies,
Les archives de la nature
UNE NATURE PARTAGÉE
Jean-françois lyon-caen, "architecture
de montagne, inventer l’habitat de demain" Le passé a de l’avenir !
Charlie et l’ébénisterie
Je vous en mets combien ?
zoom sur l'eau en beaufortain
Roselend, 50 ans d’odyssée
entre la terre et l’eau
Le mouvement magique de l'eau
UNE NATURE EN MOUVEMENT
florent perrier, "naître et travailler dans
le Beaufortain est un privilège"
De l’herbe au Beaufort, toute une histoire
La double vie de Louis Gachet
Le grataron, une spécialité locale très prisée
La fibre naturelle fait son grand retour
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07
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09
Versants cuisine & jardin
UNE MONTAGNE D'ACTIVITÉS
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jacques bos, “l’homme qui murmure à
l’oreille des truites”
Portfolio
L’échappée belle
Le pays d’en haut
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Un art de vivre ancestral
Les jardins s’invitent à table
JEUX D'HIVER
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christophe hagenmuller,
“le photographe vagabond” Poudreuse a gogo et saute-vallons,
les joies du ski de rando portfolio
Franck Piccard,
La glisse dans tous ses états
Marie Bochet, chercheuse d’or
Pierra Menta, Une course inscrite
au patrimoine local
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Versants Livres
50
Massif du
Mont Blanc
Les Contamines
Montjoie
Chaîne des
Aravis
Flumet
Station
des saisies
Col du Joly
Hauteluce
Ugine
Col de la
Seigne
Villardsur-doron
Beaufort
Mont
Mirantin
Arêches
Le Planay
Queige
Albertville
Col de
la Bâthie
La Bâthie
VERSANTS ~ 2
Grand Mont
Cormet de
Roselend
Les Chapieux
Boudin
Roselend
Conchette
Cormet
d'Arêches
Aiguille du
Grand Font
Pierra
Menta
Bourg saintMaurice
Beaufortain
La vraie géographie, c'est le pays que l'on porte en soi.
Le pays que l'on porte en soi, c'est celui dont on a respiré les odeurs,
partagé les saisons, celui dont on a bu l'eau des sources et dont la lumière nous a,
parfois, appris ce que la terre pouvait offrir de ferveur.
Le pays que l'on porte en soi, ce sont les visages de ceux qui l'ont fait vivre,
à coups de patience, de douleurs, de volonté et d'amour simple.
Il faudrait dire tous les chemins de ce pays-là. Faire parler ses arbres,
ses fleurs ses oiseaux.
Beaufortain.
Au versant du soleil, j'y possède un chalet, comme un ventre chaud à flanc
de pâturages.
Imaginez la fin du printemps dans les hauts alpages : la couleur des gentianes,
pas plus que celle des campanules ne se dira jamais. Ni le sifflement
des marmottes, ni la course folle des chamois dans les pierres,
ni le museau d'une hermine venue boire près d'un lac de montagne.
Il est des choses qui ne s'apprennent pas dans les livres.
Il faudrait entendre le son des carons sur le chemin de l'alpage un matin d'été
vers le mont Rosset. Cette lente montée dans l'odeur de l'herbe encore humide.
Le passage dans la forêt de mélèzes, d'épicéas et de sapins.
Il semble alors que l'on assiste à quelque rituel qui remonte au temps
des premiers pasteurs, que l'on est le témoin de gestes transmis de générations
en générations, comme un repère dans le temps.
Immuable.
Un pays se parcourt. Il s'invite à nous. Au-delà des saisons.
Il nous invite à parler sa langue : celle de ses torrents, de ses forêts,
de sa neige et de sa pierre.
J'ai lu, il y a peu, ces vers de Mistral :
Parle à la pierre dans sa langue
et la montagne à ta parole,
dévalera dans la vallée.
Montagnard, poète, l’écrivain humaniste
Jean-Pierre Spilmont a longuement arpenté les
chemins de montagne.
Il partage sa vie entre son chalet de montagne
sur le Versant du soleil du Beaufortain et
Chambéry. Il écrit avec sensibilité, dépouillement,
pour dire l'essentiel, pour communiquer,
pour rencontrer...
Outre son œuvre poétique et romanesque,
il est l'auteur de nombreuses dramatiques pour la
radio et de pièces de théâtre.
Je fais miens ces mots-là venus de Provence. La crête des montagnes
n'a jamais fait barrage à l'amour que l'on porte à sa terre.
Il y a des lieux qui envoûtent. Des lieux qui enchantent.
Des lieux pour mieux vivre.
Des lieux pour planter sa vie, un temps, avant de reprendre la route.
Il faudrait imaginer un matin d'été du côté du refuge de Presset.
Un matin au lever du jour, lorsque tout reprend vie : les couleurs de l'herbe,
les langues de quelques névés accrochés encore sur les pentes.
En contrebas, ici ou là, la silhouette des arbres comme une longue
procession en marche vers on ne sait quel rendez-vous.
C'est l'heure où la montagne retrouve son visage.
Il ne reste plus qu'à marcher en quête de quelques signes.
A partir.
Le départ c'est le droit à l'avenir.
Jean-Pierre Spilmont
Quelques livres :
Lumières des mains (Cadex),
Jacques Balmat dit Mont-Blanc (Albin-Michel),
Petites variations (livre + CD, La main multiple),
La traversée des Terres froides (La fosse aux ours),
Sébastien (La fosse aux ours)...
3
Au-delà des images
Une nature préservée
Un port d’attache en montagne
Lorsqu’on imagine des
grands espaces, on pense
d’abord aux steppes
lointaines, aux déserts
ou à la mer. La montagne
des hauts sommets peut
aussi faire référence à
cette couture singulière
qui dessine des vagues et
des crêtes.
Le Beaufortain, c’est tout
cela à la fois. Avec l’avantage d’être à portée de
nos pas. Sans être de
ces grandes solitudes, ce
pays vous donne envie de
marcher, de monter pour
voir plus loin, de suivre
une arête pour dominer
VERSANTS ~ 4
les vallées et de redescendre le cœur léger pour
mieux imaginer, au tournant suivant, un nouveau
paysage. Alpages fleuris,
hameaux accrochés à
la pente, versants enneigés scintillants sous le
soleil de janvier, le sentiment de quiétude que
l’on ressent à la vue de
ces paysages, en fait l’endroit idéal pour retrouver
le sens de la marche. Et
redécouvrir le goût des
bonheurs simples avec
la sensation rassurante
d’avoir trouvé son port
d’attache.
5
Au-delà des images
Une nature préservée
Portrait
HélÈne durand
“La marche est
un art de vivre”
“J’ai toujours aimé marcher. Pas pour le sport mais
pour la nature.” A 41 ans, Hélène Durand, accompagnatrice
en montagne, a conservé de l’enfance cet émerveillement pour
l’observation. Ses clients savent qu’elle prendra son temps pour
approcher les bouquetins et les chamois, jouer à cache-cache avec l’hermine
espiègle ou simplement s’arrêter pour observer le vol tranquille du gypaète.
Comme Gulliver observant l’infiniment petit, le marcheur est invité à prendre
son temps, à plonger le nez dans l’herbe des alpages pour y respirer les
à laisser couler son regard
derrière un rocher ou sous une feuille. Et dans cet apprentissage
parfums des plantes de montagne,
du regard, Hélène transmet une autre façon d’avancer. Une façon de se
glisser dans cette nature généreuse pour y trouver sa juste place.
Ici, c’est aussi la lumière qui l’a séduite.
Dès le mois d’août, la montagne
est illuminée par cet éclairage
propre à l’automne.
C’est encore l’été mais il y a déjà quelque
chose d’indéfinissable qui sublime les
paysages. Tous les marcheurs vous le
diront, c’est dans le secteur du Plan de
la Lay que ces ambiances sont les plus
saisissantes. “Les reliefs semblent plus
doux. Tout est paisible et les couleurs ocre
et dorées réchauffent le cœur et l’esprit.”
Cette belle énergie venue de la lumière
se retrouve aussi sur la Tourbière des
Saisies, un vrai petit morceau de Laponie
posé au creux des montagnes. Dans
sa mission de “passeur d’émotions”,
Hélène n’oublie pas les hommes.
“Nous avons la chance de vivre dans
un paysage partagé où la nature, les
hommes et les animaux cohabitent
harmonieusement. Marcher dans le
Beaufortain, c’est aussi échanger,
découvrir cette culture paysanne
si forte, si présente et profiter des
paysages entretenus. Un vrai luxe pour
les randonneurs !”
Beaufort,
pas touche !
Le Beaufortain, c’est mon Himalaya
à moi, mon Graal, mon trésor
de Rackham le Rouge, mon morceau
préféré des Beatles et mon poster
de Samivel. Il est dans ma peau
comme il est dans mes gènes,
de ma première ampoule
à mon tout dernier sac à dos,
il est mon paquet entier
de madeleines de Proust,
au beurre. J’aime le Beaufortain
comme mes parents ont aimé
le Beaufortain et comme mes enfants
l’aimeront, tout pareil. Sinon,
je les déshérite, les excommunie,
leur tire la langue.
Le Beaufortain, c’est un peu
mon pays qui n’a jamais été le mien.
Sinon, le Beaufort, c’est aussi
un fromage, le fromage.
Comme un gros morceau
de beurre au goût de l’alpage.
Et sans trou.
Comme le beurre.
Extrait de “La randonnée de A à Z”
de Jean-Marc Aubry
Editions Guérin-Chamonix
VERSANTS ~ 6
La haute route des vagabonds
Connaissez-vous
le jeu du crocodile,
dans lequel on avance
avec les enfants de
pierre en pierre sans
jamais poser le pied
sur l’herbe sous
peine d’être dévoré
par un hypothétique
crocodile ?…
Il y a aussi celui de la trace directe :
aller toujours droit devant en gardant
la ligne de crête pour guide. Eh bien,
quand on s’aventure sur la Haute
route du Beaufortain, sans enfants
cette fois, c’est un peu à cela que l’on
joue : parcourir ce petit bijou alpin
par les crêtes. Mise au point par un
guide d’Arêches, Jacques Maurin,
on peut la parcourir telle quelle, ou
l’adoucir en évitant les passages les
plus techniques.
Dans un cas comme dans l’autre, on
se balade avec le sentiment d’être un
découvreur d’espaces sauvages. On
chemine alternativement sur des
sentiers et hors sentiers. On grimpe
d'un côté, puis on se retrouve sur l'autre
versant du Rocher du Vent, ayant
traversé un tunnel en pleine face
herbeuse, bien au-dessus de la vallée.
Ce vestige du projet de construction
de la grande route des Alpes nous
laisse à penser
que les anciens
n'étaient pas plus
sages que nous...
On parcourt des
crêtes surplombant les eaux bleutées
ou vert émeraude (tout dépend du
soleil à ce moment-là) de lacs dont
les noms sont autant de sollicitations
à l'imagination : lac d'Amour, lac de la
Tempête, lac Cornu... On s’efforce de
résister à la tentation de suivre des
sentes qui semblent évidentes mais
qui se finissent abruptement au milieu
de nulle part. On descend des pierriers
sans répit pour tomber subitement sur
des veines de quartz blanc dont on ne
peut s'empêcher de prendre un petit
morceau, pour le plaisir de le garder au
creux de la main et s'étonner de cette
blancheur. Et que dire de la curiosité
piquée par cette silhouette aperçue de
loin et qui se révèle être un abri monté
de bric et de broc au creux d'un rocher :
l'abri des trois moineaux ! A suivre cet
itinéraire encore peu fréquenté, on se
prend pour un vagabond aux
pieds légers, on en éprouve la
liberté et le sentiment de noble
errance. Une nuit passée à la belle
étoile sous la garde vigilante de la Pierra
Menta, au pied du col de Bresson nous
accorde d'être, un court instant, le
maître du monde.
“Dans un cas comme dans l’autre,
on se balade avec le sentiment d’être
un découvreur d’espaces sauvages.”
Le versant du soleil
Roger Frison-Roche
S’intéresser à la vie de Frison-Roche (1906-1999)
permet de répondre à la question “qu’est-ce
qu’être Savoyard ?”. Ce n’est pas forcément être
né en Savoie mais avoir une relation profonde
avec elle et, dans son cas, avec la montagne.
“Je suis savoyard à cent pour cent” se plaisait-il à dire. Car bien que né à Paris, très tôt,
Frison Roche est attiré par la montagne. Enfant, il ne supporte la vie parisienne qu’en rêvant
à ses vacances dans le Beaufortain. Là, il retrouve ses grands-parents, ses cousins, cousines,
tantes et oncles et reprend goût à la vie. C’est là qu’il développe très rapidement une
adoration pour les grands espaces et la haute montagne.
Les plus belles pages de cette enfance sont à lire dans
“Le Versant du Soleil”. Les gens de Beaufort, Arêches, les
alpages de Roselend et de la Gittaz, le versant d’Outray…
il parle de ces endroits et des personnes qui y vivent avec amour et passion. Tendresse
aussi, car c’est bien là qu’est née sa raison d’être et son attachement à la montagne qui le
mènera à Chamonix d’abord puis vers les grands espaces et les montagnes du monde.
Pour André Palluel, historien des Savoies, “cette montagne est réputée pour son équilibre :
humaine bien que haute, de pierre mais aussi de bois. Le Beaufortain fait partie de ces montagnes
qui officiellement rendent les gens meilleurs. La grande idée de Frison Roche est que l’amour de
la montagne élève l’âme, ce qui explique dans les années 30-40 toute cette école d’alpinistes
qui faisaient de la montagne par vocation et que les images représentent toujours le regard pur
tourné vers le ciel.. !”.
Relire Frison Roche avant de s’embarquer pour le versant du soleil, c’est donc ouvrir une
grande porte vers l’air pur, le mieux être physique et spirituel et toutes les valeurs portées
par le Beaufortain et ceux qui l’habitent.
“Je suis savoyard
à cent pour cent…”
7
Au-delà des images
Une nature préservée
Refuge de Presset
Un rêve d’enfant
Au centre du tableau, il y a le
refuge de Presset, cabane en
bois posée là comme un rêve
d’enfant qui fut celui du gardien
des lieux. Car ce petit refuge est fait
L’endroit ressemble à un
dessin de Samivel. On y
retrouve l’espace vierge,
marqué par la face
arrière de la Pierra Menta
jaillissant du paysage
comme un immense
menhir, dominé par
l'Aiguille de la Nova et la
Pointe de Presset, adouci
par le miroir du lac du
même nom et plus loin,
les bouquetins paissant
paisiblement sur les
contreforts de
la montagne.
VERSANTS ~ 8
pour rêver, pour s’endormir la tête
dans les étoiles, se réveiller avec le
soleil réchauffant l’air et dissipant
les brumes matinales qui voilent les
sommets alentour.
Au-devant, la terrasse s’offre comme
une halte pleine de douceur pour
les randonneurs, marcheurs et
autres baladeurs que Nicolas, le
gardien, accueille de juin à octobre
avec bienveillance et gentillesse. Ça
ressemble au paradis.
Corse d’origine, Nicolas Leroy est le
gardien du Refuge de Presset depuis
15 ans. Avec son expérience précédente
à la Croix du Bonhomme, il connaît
le coin comme sa poche ! Son “spot”
comme il dit, il n’a pas vraiment le loisir
d’en faire le tour, accaparé en pleine
saison par la gestion du refuge et de ses
22 places. Levé avec le soleil, il prend
le temps de vérifier que tout son petit
monde est bien là : marmottes, bouquetins (il reconnaît Paulo et Balthazar…),
lagopèdes, gypaètes… Depuis l’été dernier, une dizaine de
vautours-fauves tournent dans le ciel
signant le retour d’une espèce à la
recherche d’espaces calmes et secrets.
Encore un coup d’œil pour admirer le
lever du soleil sur les sommets de la
Vanoise et il est déjà aux fourneaux pour
les petits déjeuners de ses pensionnaires en route pour le Tour du Beaufortain. Il se prépare aussi à l’accueil
des visiteurs du jour, attirés par une promenade facile qui les projette dans un
“Pour faire ce métier, il ne suffit pas
d’aimer la nature. Il faut aimer partager
son temps, ses connaissances
avec les hommes…”
univers de haute-montagne absolument
étonnant. Pour faire ce métier, il ne suffit pas d’aimer la nature. Il faut aimer
partager son temps, ses connaissances
avec les hommes, les conseiller, les
accompagner dans leur découverte de
l’environnement et surtout passer des
messages de prudence, de respect et
de modestie face à la montagne.
Ce jour de juin, la Pierra Menta se
reflète dans le lac, les myosotis roses
et bleus dessinent des taches sur
les alpages, les fleurs de montagne
se balancent au gré du vent et il
flotte dans l’air comme un parfum
d’insouciance. “Dans un mois, les
troupeaux de moutons seront là, au
dessus du lac, lâchés en estive. Si je
trouve un peu de temps, j’irai rendre
visite à Adrien, alpagiste à Conchette.
J’aime ce pays. J’aime vivre ainsi.”
En hiver, le Refuge reste ouvert. Non
gardé, il est cependant surveillé de
près par son gardien qui monte tous les
15 jours à skis par le Refuge de Balme
vérifier que tout est en ordre…
Et certainement aussi pour entretenir
cette flamme étrange qui unit le
gardien à son refuge.
La blague de Samivel
La nature en sort toujours grandie, ce
qui dénote chez Samivel un amour
profond pour les paysages d’altitude
et la montagne.
Dans cet esprit plaisant, il s’était
amusé à ré-écrire, un texte de
Rabelais racontant une colère du
géant. Ou comment Gargantua donne
un formidable coup de pied dans la
montagne, envoyant un morceau des
Aravis directement sur les hauteurs
du Beaufortain. La légende de la Pierra
Menta était née…
La farce littéraire fut dévoilée par
Samivel au cours d’une rencontre
amicale avec Frison-Roche et Hubert
Favre, l’historien du Beaufortain.
Il n’en reste pas moins vrai que le
style parfaitement imité de Rabelais
donne toute sa saveur à l’histoire et
que, très certainement, quelque part
au paradis des mécréants, Rabelais
s’est bien amusé de cette adaptation
talentueuse de son texte.
“La légende
de la Pierra Menta
était née…”
"Or donc, l’illustre et bon géant
Gargantua, badaudant, bavardant,
badinant, bafouillant, barbouillant,
bambochant, baratiant, ballotant,
barbottant et regardant les mites
voler, s’en vint dans le pays de Savoie,
portant sa botte et le nez en l’air, ce
qui n’est point recommandé dans ces
régions, vu qu’elles sont pleines de
haut et de bas et tout juste bonnes
aux chèvres, boucs de rocher et
autres bêtes capricornes et sauvages
qui sautent d’abîmes en abîmes, ce à
quoi un honnête chrétien ne saurait
se risquer....
Illustration : Pascal Finjean
Le célèbre écrivain, poète et aquarelliste de montagne avait
un sens de l’humour très développé qu’on retrouve d’ailleurs
dans ses dessins et peintures croquant avec malice pratiques
ubuesques et vaines de certains montagnards, alpinistes,
skieurs et autres fanatiques de la montagne.
Ainsi, ce qui devait arriver arriva, et
quand il parvint en un lieu hérissé
nommé Aravis, toujours baguenaudant
et regardant de tous côtés sauf où
il était bon de le faire, il s’en vînt
donner en plein du pied droit dans une
montagne fort épaisse ; et cependant,
tant étaient grandes la force et la
puissance du bon géant, ne s’y fit à
lui même aucun mal, mais seulement
un fort grand trou à travers la dite
montagne dont le morceau vola en
éclats parmi les airs et s’alla planter
avec un épouvantable fracas et gros
tourbillons de poussière à plus de
dix lieues vers le sud, dans une terre
nommée Beaufortain, où il écrasa, en
tombant, trois sauterelles et un rat.
Ce gros morceau de roche y est
toujours demeuré depuis, planté
tout droit comme un piquet et fort
inaccessible, auquel les bergers du lieu
donnent à présent le nom de Pierra
Menta.”
9
Au-delà des images
Une nature préservée
Tourbière des Saisies
Les archives de la nature
Véritable îlot de vie boréale,
la Tourbière des Saisies est un lieu
unique en son genre. Avec 500 hectares
dont 300 protégés, cet ensemble
de tourbières, accessible par le sentier
des Arpelières et le sentier nature
des Saisies, fascine autant
qu’il nous interroge sur l’histoire
de notre terre.
Ces zones humides, où la matière
végétale s’accumule avec le temps,
sont les vestiges d’époques pouvant
remonter à la dernière glaciation.
En libérant les espaces naturels
ensevelis sous la glace, la remontée
des glaciers du sud vers le nord a
permis l’installation progressive d’une
multitude d’espèces végétales qui sont
celles que l’on trouve aujourd’hui :
noisetiers, bouleaux, pins, sapins,
VERSANTS ~ 10
hêtres, aulnes… L’accumulation des
couches de tourbes, véritables coffresforts biologiques, et tout ce qu’elles
contiennent (spores, graines, pollens…)
sont donc de précieux indicateurs
des évolutions du climat et de la
végétation. Et pour les scientifiques,
quelques mètres de bonheur pour
7000 années d’enfouissement !
Cet intérêt écologique se double d’un
intérêt paysager. L’ambiance très
Découvrir
la Tourbière
des Sa isies
En 1h30, depuis le Col des Saisies, le sentier
nature des Saisies permet une approche facile
de la tourbière. Avec le livret de découverte
édité par l’ONF et disponible à l'Office de
Tourisme des Saisies, laissez-vous guider au
fil des 14 stations de cette balade instructive
et amusante. Vous pouvez aussi découvrir la
faune des tourbières en empruntant le Sentier
des Arpelières, accessible entre Crest-Voland
et les Saisies. Il est conseillé toutefois de se
faire accompagner par des spécialistes pour
en découvrir tous les secrets. A la lecture du
paysage, les accompagnateurs en montagne
ajoutent une connaissance pointue de la
faune, de la flore et de l’histoire des lieux.
Pendant l’été, des étudiants en BTS “Gestion
et protection de la nature” sont également
disponibles pour vous accompagner
dans votre découverte.
particulière de la Tourbière
des Saisies en fait un lieu de
promenade original, à découvrir
seul ou en famille. Le soleil est
levé depuis quelques heures
mais la tourbière vit encore
au rythme de la nuit. La lumière n’a
pas encore percé à travers les grands
sapins et seuls quelques rayons
plongent à travers les épicéas sur les
taches jaunes et vertes des mousses
et des sphaignes. L’ambiance est
fraîche malgré les premières chaleurs
de ce début d’été. Nous avançons
prudemment sur les rondins de bois
disposés sur le chemin de façon
à éviter de marcher sur les zones
humides. De temps en temps, des
pontons de bois permettent de
s’arrêter pour écouter, observer et
s’imprégner de cette ambiance très
particulière. Pour un peu, on se
croirait dans le Grand Nord, à mille
lieues de toute civilisation. Ici et
là, traînent quelques écharpes de
brouillard qui donnent aux épinettes
des airs étranges. Ces vieux arbres
tordus, aux formes bizarres campent
une ambiance paticulière. Pourtant,
cette promenade matinale a tout
d’une “régénération”. Plonger aux
racines de la terre a quelque chose de
réjouissant, et la sérénité des lieux y
est sans doute pour beaucoup.
François Drillat, l’agent de l’Office
National des Forêts qui nous accompagne est passionné par cette tourbière
et a en charge sa protection et sa
surveillance. Car ici, même si tout est
fait pour faciliter la découverte des
lieux, il n’est pas question d’aller n’importe où. “Il y a des plantes très rares
comme la “trientale” une petite
primevère blanche et des champignons
qui n’existent nulle part ailleurs.” Tous
les amoureux des tourbières connaissent aussi la célèbre “drosera”, une
minuscule plante carnivore ourlée de
jolies perles brillantes. Quand l’insecte
se pose sur ces goutellettes, s’en est
fini de lui. Ces fausses perles de rosée
sont en fait un piège mortel. Il suffira
d’une demi-heure à la “rosée du soleil” pour digérer l’imprudent ! Marcher sur les itinéraires balisés permet
donc de ne pas écraser les sphaignes
et toutes ces petites merveilles.
Ce monde en perpétuel et invisible
mouvement est aussi le paradis des
photographes. Car là où se mêlent
les lumières du soleil et les reflets
de l’eau, les couleurs éclatent.
Omniprésence du vert et du jaune,
reflets ocre des eaux, nuage blanc
des linaigrettes et minuscules points
carmin, vermeil ou violet des droseras,
canneberges, orchis tachetés et
airelles des marais, la beauté des
lieux se mérite, agenouillée, les yeux
au ras du sol !
Les habitants des lieux participent à
ce festival de sons et de couleurs !
Espace protégé
Amphibiens de toutes
sortes, libellules, papillons
C’est en 1989 qu’un arrêté préfectoral
très rares, oiseaux et tétrasde biotope a permis de mettre sous haute
lyre jouent à cache-cache
protection les 300 hectares de la tourbière.
dans les jolies lumières de
Cette mesure était destinée à compenser
la tourbière. On y trouve
les aménagements prévus pour les Jeux
aussi une petite merveille,
Olympiques de 1992, le site étant en partie
la chouette chevêchette
occupé pour les épreuves nordiques.
appelée aussi Chouette
Dans les années 2000, le site est entré
de Tegmalm. Originaire de
dans le réseau européen Natura 2000.
Sibérie et caractéristique
Ces différentes mesures, loin de mettre
des zones très froides, cette
la tourbière “sous cloche” sont
petite chouette au plumage
des éléments essentiels de la
brun moucheté de blanc,
complémentarité entre préservation
grosse comme le poing, est
et ouverture au public.
le plus petit rapace nocturne d’Europe. Une petite
bombe très rapide et très nerveuse qui Symboles de la vie de la tourbière,
chasse en début de soirée. “Elle est entre obscurité et illumination,
très difficile à surprendre. Je ne me entre mouvement et immobilité,
suis retrouvé qu’une seule fois face à les observations étonnantes qui
cet oiseau, posé sur un jeune épicéa. attendent le marcheur sur ces lieux
Son regard perçant et sa beauté m’ont préservés sont des invitations au voyage…
immédiatement attiré. Depuis, j’y dans le temps.
pense souvent.”
“Un monde perpétuel et invisible...”
Ambiance nordique à proximité des Saisies
11
Au-delà des images Une nature partagée
La patine
du temps
Dès qu’un Beaufortain
vous parle de son village,
de son hameau ou de
son chalet d’alpage, on
peut lire dans ses yeux
un attachement profond
à ce qui fut, à ce qui est
et sa certitude qu’il sera
toujours bon, demain,
de poursuivre le même
chemin. Il n’y a, ici, rien
de passéiste dans ce
sentiment très fort qui lie
les gens à leur histoire.
Plutôt la conscience très
profonde du privilège de
vivre et de travailler au
pays.
Le chalet d’alpage, restauré
avec amour par ceux qui y
vécurent une partie de leur
enfance, réunit le passé et
le présent. S’y retrouvent
régulièrement deux ou
VERSANTS ~ 12
trois générations, autour
du farçon de tante Simone
ou du pormonier, celui du
mois de novembre préparé
avec les légumes du jardin.
Certes, on n’y respire plus
l’odeur entêtante des bêtes
à l’étable ou du lait caillé.
Mais dans la fragrance
épicée des vieilles planches de bois mêlée à celle
plus acide du foin sous le
soleil de juillet, le propriétaire des lieux plonge
dans ses racines. Année
après année, génération
après génération, il ne se
lasse jamais d’observer le
travail du vent, de la pluie,
de la neige et du soleil,
artisans d’art d’une patine
incomparable et si chère
au cœur des beaufortains.
Entretien
Jean-françois
lyon-caen
“Architecture de montagne,
inventer l’habitat de demain”
S’interroger sur la valeur de l’architecture du Beaufortain revient à
s’interroger sur l’avenir de l’architecture de montagne. Pour JeanFrançois Lyon-Caen, architecte, enseignant et responsable de l’équipe
“architecture-paysage-montagne” à l’Ecole d’Architecture de Grenoble,
“les territoires alpins ont l’immense privilège d’être des paysages où se
côtoient les mutations du monde contemporain.” Il se plait à imaginer
une architecture de montagne décomplexée, n’ayant rien oublié de ses
fondamentaux mais résolument tournée vers la modernité.
Marqué par l’occupation de la pente, le paysage du Beaufortain a orienté
une architecture adaptée à sa configuration et au quotidien de ses habitants.
Quelles en sont les particularités ?
Dans chaque région de montagne, l’homme s’est adapté, à sa manière, à son
environnement. Mais les fondements de l’architecture sont assez comparables.
L’architecture rurale est une architecture qui s’est faite sans architectes. Elle
répondait directement aux besoins des gens. Ils ont construit leur habitat avec
des matériaux du lieu et des savoir-faire traditionnels, guidés par des artisans.
Ce qu’il en reste aujourd’hui est le fruit d’une évolution permanente liée à
l’histoire des familles et des pratiques agricoles, engendrant des extensions,
des surélévations et même parfois des reconstructions suite aux incendies ou
aux avalanches.
Construire dans la pente a donné lieu à une structure très particulière. La
maison est encastrée dans le terrain que les hommes creusent à la pelle ou à
la pioche. Le niveau inférieur de la maison accueille les bêtes et les hommes.
On y accède de plain-pied, à l’aval, en bas de la pente. Il n’y a bien souvent
pas d’escalier à l’intérieur. Seulement des échelles. La circulation se fait par
l’extérieur et on accède à la grange, à l’étage supérieur, par l’arrière de la
maison situé sur le haut de la pente. C’est là que sont stockés le fourrage et
les récoltes.
Cette disposition repose sur
plusieurs principes de construction : le niveau inférieur est en
maçonnerie de pierres pour
contenir la pression des terres
et le dessus est en charpente
bois. La charpente est faite
de colonnes en bois, série de
gros piliers en bois formant
des “fermes” qui constituent
la structure, supportent les
planchers et la couverture. Et
ramènent les efforts de la toiture au sol. Ces bases donnent
une volumétrie unique.
Existe-t-il des codes de
cette architecture rurale qui
puissent être utiles dans
l’architecture moderne ?
Dire qu’on va faire la même
chose aujourd’hui serait une
aberration culturelle. Ces maisons sont contemporaines de
leur époque mais aujourd’hui
nous avons des exigences et des
contraintes bien différentes. Sous
le toit, l’habitat des hommes a
L'art de construire dans la pente
13
Au-delà des images Une nature partagée
Boudin ou l'habitat solidaire
dans les mantelages de bois en forme de
cœur ou de losanges suffisaient pour laisser
entrer l’air dans la grange. Aujourd’hui les
gens souhaitent de grandes baies ouvertes
sur le paysage. On habite partout, même
sous le toit, ce qui complexifie la construction.
Pour autant, à l’heure d’un habitat performant
du point de vue de l’énergie, il y a quelques
règles anciennes qui sont toujours d’actualité
et qui peuvent accompagner les réflexions
des professionnels. Ces constructions et
ces hameaux étaient conçus en lien avec
une économie des déplacements. Groupées
dans la pente, les maisons ont été bâties
serrées les unes contre les autres, laissant
disponibles les terres moins pentues pour les
cultures. Malgré la proximité des maisons,
du fait de la pente, elles ne se portaient pas
ombre les unes sur les autres ; la maison
du dessus ne faisait pas écran à celle du
dessous et vice versa. Malgré parfois des
volumes imposants, cette architecture est à
l’échelle de l’homme.
Une architecture dédiée
à la vie rurale
“Dans chaque région de montagne,
l’homme s’est adapté, à sa manière,
à son environnement…”
pris la place des récoltes. En conséquence, nos besoins en termes d’étanchéité,
de confort sont sans comparaison. A l’époque, la neige “folle” pouvait entrer
sous le toit, elle ne mettait en péril ni le fourrage, ni les récoltes. Le volume
restant en partie ouvert à tous les vents, le séchage était garanti.
Aujourd’hui nous en sommes à imaginer des maisons “passives” qui
ne nécessiteraient même plus d’être chauffées à 1500 mètres d’altitude
tant elles seraient parfaitement isolées sur le plan thermique ?
Autrefois le rythme de vie des gens était lié à la vie agricole et se déroulait
pour l’essentiel dehors. Les cultures, les fourrages, l’alpage, la forêt, le jardin
se trouvaient en contrebas de la maison. À l’intérieur de l’habitation, c’était
essentiellement le temps des repas et du sommeil ; les besoins en lumière
étaient donc différents. Des fenêtres aux dimensions réduites, des découpes
VERSANTS ~ 14
Imiter n’est pas créer
L’observation des paysages alpins est révélatrice des mutations qui ont fait
l’architecture de montagne actuelle. Pour autant, faut-il copier l’architecture
rurale ? Aujourd’hui, la montagne regorge d’exemples de réalisations récentes
reflétant ce goût pour la “folklorisation” de la construction. Imiter la forme, c’est
être sûr de faire du “toc”. Parfois, des responsables de programmes d’habitat
avancent comme argument qu’il s’agirait de satisfaire l’attente des gens qui
s’installent en montagne. Est-ce si sûr ? Pourquoi n’aimeraient-ils pas une
architecture moderne, respectueuse des préoccupations de l’environnement et
du paysage, utilisant des matériaux du lieu mais dans un esprit contemporain et
n’oubliant pas les quelques règles de volumétrie et d’occupation liées au climat
et à la topographie ? Il existe des réponses architecturales fondées sur ces
formes d’“intelligence”, ancrées dans leur environnement et capables comme
les anciennes maisons de jouer avec la pente sans dénaturer le paysage.
Sans doute, le Beaufortain a-t-il la chance d’être resté à l’écart des grands
programmes de développement touristique du siècle dernier. L’architecture
paysanne est toujours présente. Le massif a de nombreux atouts pour faire
émerger de ses paysages, une architecture contemporaine tout en s’inspirant
des fondations de son histoire patrimoniale.
Le passé a de l’avenir !
Avec l’art de “la remue”, les chalets
d’alpage se sont posés à tous les
niveaux du paysage. Ces vieilles
fermes sont toujours là, sentinelles
immuables veillant sur le passage des
troupeaux. Certaines d’entre elles sont
utilisées par les alpagistes, d’autres
ont fait l’objet de rénovation réussies.
Mais qu’est-ce qu’une “rénovation
réussie” ?
C’est sans doute celle qui, sans
renier la cohérence de la construction
initiale, patiemment élaborée
pour répondre à des exigences
quotidiennes et des contraintes
climatiques, a su s’adapter aux
besoins d’aujourd’hui sans faire
perdre son âme à la maison. C’est
aussi celle qui a réussi l’exploit
de ne pas sombrer dans le triste
décor de théâtre, le pastiche
d’architecture de montagne. Une
des clés du succès est sans doute
de pouvoir faire le lien entre le
bâti, l’architecture intérieure, les
éléments de décor et sa propre
histoire. Ou comment les souvenirs
d’enfance, de l’ouverture sur le
paysage aux objets du quotidien,
retrouvent logiquement leur place
dans une maison très actuelle.
Aquarelle :
Marie-Thérèse Masson
Les Quéfins sur la route
du Grand Mont-Arêches-Beaufort
Charlie et l’ébénisterie
Pour rendre visite à l'ébéniste
Charlie Berthod, on traverse Villardsur-Doron, puis on s'engage sur une
petite route sinueuse qui monte à flanc.
Soudain, surplombant la route, une vieille maison se dresse ; la maison
de son enfance. Elle est flanquée d'un petit chalet tout en bois flammé,
le domaine de Charlie. Surprenant par sa jeunesse, il nous accueille
en souriant même s'il se demande un peu ce qu'on lui veut. Il parle
de ses années d'enfance passées à regarder son beau-père et sa
mère travailler le bois dans ce même atelier. Sans le savoir, ses jeux
avaient déjà le sérieux de l'apprentissage et son chemin s'est tracé
d'évidence.
“C'est le geste,
et la patience qui
font le bois lisse”
Sa poya n'est pas faite de vaches, mais d'une quantité de rabots
qu’il a accrochés le long d'une poutre. Car il aime les outils, ciseaux,
maillets, planes, qu’il considère à juste titre comme les garants de la
qualité de son travail. Avec un petit sourire malin, il sort la lame d’une
énorme hache de son fourreau et nous rassure, cette hache, appelée
“détraz” et digne d’un bourreau est en fait utilisée pour travailler les
poutres, “comme les anciens”. Il affectionne particulièrement le bois de mélèze, d’arolle ou d’épicéa et quand on
s'étonne de la douceur d'une planche, il prend un rabot et nous fait sentir l’affûtage. “C'est le geste, dit-il, et la
patience qui font le bois lisse”. Il nous fait visiter la minuscule forge à côté du chalet. “Pour faire, comme avant,
les serrures des meubles que je fabrique”. Il ne comprend pas notre ravissement de voir que tout est fait à la
main, que chaque geste prend du temps. Il nous regarde et dit simplement : “mais c'est du travail traditionnel et
il faut du temps. Ça ne se fait qu'à la main, pas à la machine !” Et l'on repart en se disant qu'il a raison et qu’il
va sûrement faire du beau travail.
15
Au-delà des images Une nature partagée
L'utilisation de l'espace a marqué les paysages du Beaufortain
Un art populaire du quotidien
Les outils du fromager toujours à leur place
VERSANTS ~ 16
Je vous en mets combien ?
“L’épicerie du village”. Cette expression
déclenche souvent une bouffée de nostalgie
un peu béate, les épiceries ayant été pour
la plupart remplacées par des centres
commerciaux sans âme, éloignés
du cœur du village.
“Nous avons très vite compris
qu’il suffisait d’être ce que nous
étions, travailleurs, disponibles
et ouverts, pour que l’on
nous accepte.»
Pourtant, rappelez-vous
la petite pièce gagnée
en échange de menus
travaux ou offerte par
l’oncle de passage. Cette
piécette bien serrée au
creux de la main, souvenez-vous de l’entrée ravie et timide
dans l’épicerie pour demander un
roudoudou, un mistral gagnant ou un
chewing-gum... Et les gens
du village en profitant pour
échanger des nouvelles ou
des commentaires sur tel ou
tel évènement. Toute une vie
sociale, tout autant, voire,
plus efficace que les réseaux
sur la toile. S’il en disparaît
beaucoup, il s’en ouvre ou
s’en maintient malgré tout
quelques-unes, et c’est un
luxe pour les habitants et les
vacanciers.
A Hauteluce, l’épicerie était à
vendre. A Maubeuge, Bénédicte, la maman, déjà mère
de trois ados et enceinte
du petit dernier, avait envie
d’aventure, de changement.
Elle passait pas mal de
temps sur le Web et un jour,
le clocher à bulbe d’Hauteluce apparaît sur l’écran de
l’ordinateur avec l’annonce
de cette vente. Ni une, ni
deux, elle décide que toute
la famille ira passer ses
vacances de février dans le
Beaufortain ! Jean-Philippe,
le papa, travaillait dans un
bureau d’étude en charge de
l’Airbus A380. Son travail était
prenant, il voyait les enfants
grandir et sentait monter en
lui l’envie d’autre chose. Des
vacances impromptues à la
montagne ? Pourquoi pas !
Ce qu’ils ne savaient pas
encore c’est qu’ils allaient
tomber sous le charme de
ce village et qu’à la fin de
la semaine, une nouvelle vie
s’ouvrirait à eux.
Depuis plusieurs années les
nouveaux épiciers de Hau-
teluce s’appellent donc Jean-Philippe
et Bénédicte Sémery. Cela étant, il ne
s’agit pas d‘un conte de fées et ce ne
fut pas si facile pour les 3 ados habitués à la vie urbaine qui sont d’ailleurs
repartis, une fois leurs études terminées.
Théo, le petit dernier, en CM1 à Hauteluce
se souvient en riant de la tête sidérée
de sa citadine de sœur racontant que
pendant la récré certains garçons
regardaient des catalogues de
tracteurs ! Pas évident non plus pour
les parents apprentis-épiciers : “Quand
le premier client est arrivé, nous n’en
menions pas large. Il avait les sourcils
en bataille et son regard de montagnard nous questionnait ; il devait se
demander ce que nous étions venus
faire ici”. Puis les choses se sont
gentiment posées et la flagrante bonne
volonté de ces nouveaux venus ainsi
que leur gentillesse ont fait effet.
“Nous avons très vite compris qu’il
suffisait d’être ce que nous étions,
travailleurs, disponibles et ouverts,
pour que l’on nous accepte.”
Maintenant, même si les effets de
l’absence de boulangerie qui mène les
habitants à “descendre” plus bas, et
donc à moins fréquenter l’épicerie, se
font sentir, celle-ci est bien implantée.
Toute jolie avec ses tons miel et rouge,
elle respire le bon goût et la créativité car Bénédicte et Jean-Philippe ont
su s’adapter aux clientèles à la fois
locale et touristique. “Dans ce genre
de commerce, il faut être capable de
vendre les pâtes, le lait et le fromage
mais aussi de conseiller le vacancier
sur le petit cadeau à rapporter à la
maison.”
Assis sur le banc devant la façade, ils
sirotent leur café, plaisantent avec
les passants et même s’ils n’ont pas,
selon l’expression consacrée “trois
générations au cimetière du coin”, ils
s’autorisent à se sentir “chez eux”.
17
ZOOM sur ...
l'eau en Beaufortain
ROSELEND
50 ans d’odyssée
entre la terre et l'eau
S’intéresser aux barrages du Beaufortain, c’est d’abord se pencher sur
le lien singulier qui lie le montagnard à l’eau. Il a dû, de tout temps,
apprendre à l’apprivoiser et à vivre avec elle. Tout comme avec la pente,
qui est aussi le chemin de vie de l’eau. Les hommes ont ainsi imaginé
des constructions, des conduites, des systèmes capables de dompter la
chute de l’eau et de la transformer en énergie.
VERSANTS ~ 18
L'alpage de Roselend va bientôt disparaître
Un chantier pharaonique
L'histoire de l'hydroélectricité en
Beaufortain remonte à la fin du
XIXème siècle, époque à laquelle les
départements savoyards se lancent dans
l'exploitation de la "houille blanche".
Au premier plan de cette révolution,
les barrages. Ce sont d’abord de petits
barrages qui permettent de produire
de l’hydroélectricité. Puis, après la
Seconde Guerre mondiale, les besoins en
électricité augmentent considérablement.
Industrialisation, relance de la
consommation, "la houille blanche"
est au cœur de l’économie du pays.
Dès 1947, des études sont engagées
pour trouver une solution qui permettrait de créer, dans la cuvette de Roselend, une réserve d'eau, et de profiter
de la chute de 1200 m obtenue par la
différence d'altitude avec la vallée de
la Tarentaise.
Après plusieurs années d'études et de
reconnaissances, la construction de
Roselend, un des plus hauts barrages
de France, démarre véritablement
en 1956. Sa conception, très originale, combine un barrage voûte, pour
barrer la gorge, et un barrage poids
avec contreforts, pour le prolonger
sur l'éperon rocheux du Méraillet.
Le remplissage d'une cuvette d'une
telle dimension (187 millions de m3)
nécessite la construction de plus de
40 km de galeries souterraines, afin de
collecter 28 torrents sur 10 communes
différentes.
Simultanément, la centrale souterraine
de La Bâthie est construite dans une
caverne de très grande dimension :
135 m de long, 35 m de haut et 25 m
de large. Sa salle des machines est
équipée de 6 turbines, géantes pour
l'époque, qui permettent une puissance de 550 MW.
"roselend, mémoires
d'un barrage"
"Roselend, mémoires d'un barrage"
Grace à des images d’archives et les paroles des
témoins de cette aventure, Michel Garnier a fait
revivre l’ancien Roselend avant les chantiers
titanesques à la source des paysages et du grand
lac de barrage que nous connaissons aujourd’hui.
Un DVD à visionner pour mieux comprendre
l’histoire et le rôle essentiel de ce barrage à
l’architecture exceptionnelle, géré par l'unité de
production Alpes et produisant l’équivalent de la
consommation domestique de 450 000 habitants
(la Savoie en compte 400 000).
Une aventure humaine au service du progrès
19
les perles
Le Beaufortain sert
d’écrin à quatre
barrages.
L’énergie hydraulique, première
énergie renouvelable au monde
Grâce à la pente et aux barrages, nos
montagnes sont les championnes pour
la production d’énergie hydraulique. Pour
Pierre Blancher, Directeur de Projet Energie
Hydroélectrique Beaufortain-Val d’Arly, “cette
énergie est même la seule (par comparaison
aux autres énergies renouvelables, le soleil,
le vent, les vagues…), capable de stocker un
potentiel d'énergie électrique pour l’utiliser
au meilleur moment. Pour les autres, il faut
forcément consommer l'énergie au moment
où elle se présente.
En retenant l'eau dans les grands réservoirs
créés par les barrages, on constitue une
réserve d’énergie potentielle. Lors d’une
pointe de consommation, les centrales
hydroélectriques peuvent être démarrées
en quelques minutes pour alimenter le
réseau”. A cette souplesse s’ajoute un
autre atout écologique de poids : en
n’émettant pas de CO2, cette énergie est
une manière efficace de lutter contre le
réchauffement climatique. Ainsi l’aménagement EDF de Roselend – La Bâthie
permet à lui seul d’économiser 890 000
tonnes de CO2 par an.
Roselend, mais aussi La Girotte
(au nord de Roselend), La Gittaz (construit en même
temps que Roselend, à 1557 m d’altitude, dans la vallée
du torrent du Poncellamont) et Saint Guérin. Plus petits,
ils sont toutefois des éléments essentiels de l’ensemble
du dispositif hydroélectrique du Beaufortain. Ils offrent
des buts de promenades et des panoramas tout à fait
exceptionnels !
Par conséquent, en plus d’être de magnifiques ouvrages couturant de façon très
singulière le paysage de montagne, les
barrages du Beaufortain sont de véritables
trésors pour notre avenir énergétique et la
protection de notre terre.
www.50-ans-roselend.com
Ce chantier et toute l’histoire liée à l’installation de ce magnifique barrage ont
définitivement marqué le paysage et la vie des gens du Beaufortain. A l’occasion
du cinquantième anniversaire de l’ouvrage, de nombreux rendez-vous, conférences,
visites, expositions et fêtes, sont organisés tout au long de l’année 2011.
VERSANTS ~ 20
“Du torrent au courant, des barrages et
des hommes en Savoie”
Publié à l’occasion du 50ème
anniversaire du complexe RoselendLa-Bathie, ce livre propose un nouveau
regard sur la formidable aventure
technique et humaine que sont les
installations hydroélectriques d’EDF en
Savoie. Les photographies de Céline Clanet
sont une invitation à découvrir la beauté
surprenante des formes et des machines,
de même que la relation intime qui lie les
hommes et leur création.
La majesté des cathédrales de béton - les
barrages -, mais aussi d’autres éléments
moins visibles, est magnifiée par le parti pris
artistique de la photographe tout en offrant
une lecture documentaire. De plus, des
portraits sensibles de quelques témoins de
cette grande épopée laissent transparaître
l’incroyable attachement des hommes à ce
qu’ils ont collectivement réalisé.
Une coédition Actes-Sud / Fondation Facim
Le mouvement magique de l’eau
En montagne, on ne trouve pas de moulins à vent…
et pour cause ! L’eau, omniprésente, a toujours
fait tourner les roues des moulins ou les turbines
et accompagné les montagnards dans leurs
tâches quotidiennes.
L’énergie hydraulique est la plus
ancienne technologie connue. En
Savoie, à la fin du XIXème siècle, on ne
comptait pas moins de 1200 barrages
à force hydraulique et la plupart
d‘entre eux ont fonctionné jusqu’à la
fin de la Première Guerre mondiale et
même parfois après. Après la Seconde
Guerre mondiale, les grands projets
de reconstruction ont donné lieu à la
naissance d’une véritable industrie
de l’électricité dont les fleurons de
l’époque sont les grands barrages
encore en service aujourd’hui. Les
petits moulins se sont éteints les uns
après les autres…
Aujourd’hui, grâce à des propriétaires
respectueux du patrimoine familial
ou passionnés par ces mécanismes
ingénieux, il en reste quelques-uns en
état de marche.
“…Revivre, le temps
d’une journée, au rythme
du mouvement magique
de l’eau.”
André Molliex-Donjon
est l’un d’entre eux
et sa micro-centrale,
située au dessus de
Molliessoulaz à Queige,
est un modèle du genre.
Son père, Daniel, était
scieur et travaillait les
bois de charpente. Le
premier équipement
fut une “battante” qui
fonctionnait grâce à une
roue à aube. La conduite
d’eau forcée de 100
mètres installée par la
suite au dessus du ruisseau date de 1925. Elle
permettait d’alimenter
une dynamo et de produire de l’électricité. Ce
système permettait de
scier les grumes et de
préparer les poutres.
Avec le banc de circulaire, toujours en
état de marche, on délignait les planches. Certaines attendent toujours,
empilées dans un coin de la scierie.
Les outils pour déplacer les billes de
bois et conduire le passage du tronc
sous la scie alternative sont toujours
là, prêts à reprendre du service.
Parallèlement au travail de sciage, la
centrale permettait de faire fonctionner
un moulin à farine. Magnifique
mécanique de pierre et de bois, le
moulin est toujours là, entretenu avec
amour par André. Témoin d’un savoirfaire ancestral, le vieux moulin et ses
meules en pierre semblent n’attendre
qu’un geste pour recommencer à
tourner.
Le ruisseau chante et l’odeur de
bois, toujours présente dans la vieille
scierie, nous rappelle qu’il n’y a pas si
longtemps, l’indispensable autonomie
des montagnards les rendait très
ingénieux.
André a travaillé durant toute sa carrière
comme “métallo” à Ugine. Comme
beaucoup d'habitants du Beaufortain
qui n’étaient pas agriculteurs, le choix
était vite fait. Il a gardé de ces années
une nostalgie du monde ouvrier mais
n’a jamais oublié son enfance passée
aux champs et aux travaux du bois. Car
tout petit, il a appris aux côtés de son
père à faire fonctionner la scierie et le
moulin. Et sans s’en rendre compte,
intégré la complexité du travail des
poulies de bois, la démultiplication
des forces et l’entretien des pièces… Le
temps de la retraite venue, il est tout
naturellement revenu à Molliessoulaz
entretenir son trésor et le faire
fonctionner pour les besoins familiaux.
Certains propriétaires renvoient sur le
réseau l’énergie produite mais, lui, ça
ne l’intéresse pas. Le moteur d’André,
c’est plutôt la passion et l’affection,
deux manières bien à lui de rendre
hommage à son père Daniel. Rien à
voir avec l’idée de produire sa propre
énergie à bon compte !
La seule concession qu’il s’est autorisé
a été de faire fonctionner le moulin
pour les écoliers de la vallée. Histoire
de leur apprendre que le savoir-faire
des anciens est une belle leçon de
vie. Et d’admirer une fois de plus la
simplicité des mécanismes et revivre,
le temps d’une journée, au rythme du
mouvement magique de l’eau.
Dessins de Bernard Auregan
Association des amis des moulins savoyards – Annecy
21
Au-delà des images Une nature en mouvement
Un jardin
A ciel
ouvert
Chaque année, quand
les beaux jours arrivent,
les “montagnards” entament une drôle de pérégrination au rythme de
la montée des troupeaux
et de l’arrivée de l’herbe.
Inscrit depuis des siècles
dans l’histoire du Beaufortain, l’art de la “remue” n’a rien perdu de
son intérêt. Mieux, c’est
aujourd’hui une des garanties de la valeur de ce
pays et de son terroir. Ici,
l’agriculture a façonné et
entretenu les paysages.
La douceur des alpages,
les troupeaux faisant
VERSANTS ~ 22
résonner leurs sonnailles
au cœur de l’été font écho
à l’esprit de solidarité et
de partage qui anime les
producteurs de ce pays.
Ce sont autant de signes
forts qui montrent qu’en
s’inscrivant dans l’économie d’aujourd’hui, le
mode de vie traditionnel
n’a rien perdu de son
sens profond. Grâce à leur
bon sens de “terriens”,
les paysans continuent à
faire le tri pour ne garder
du passé ou du présent
que ce qu’ils estiment
être le meilleur.
23
Au-delà des images Une nature en mouvement
Portrait
Florent Perrier
“Naître et travailler
dans le Beaufortain est
un privilège”
Il faut montrer patte blanche pour rencontrer Florent Perrier,
fromager à la Coopérative de Beaufort depuis 1994, hygiène
oblige. Ils sont trois, ce jour-là, à s’activer entre les énormes
cuves où se transforme le lait et les étagères où s’empilent les
meules pressées. Les rayons du soleil traversant la pièce humide
donnent un air de peinture hollandaise à l’ambiance. Les toiles
de lin blanc jouent avec la transparence de la lumière et les hommes sont très
concentrés. Nous sommes pourtant au cœur d’une réalité économique très bien
ancrée dans la modernité.
Florent est un des quatre fromagers de l’entreprise.
Ce sont eux qui transforment le lait en Beaufort.
Il nous accueille avec un large sourire, heureux et fier de partager sa passion
pour une histoire locale particulière et un fromage élevé aujourd’hui au rang
des meilleurs. Tout en racontant, il plonge son bras dans la cuve et “vérifie la
transformation du lait en grains”. Cette opération s’appelle le coupage du caillé
et la cohérence du geste donnera au fromage son caractère.
Florent a fait ses études de fromager à Poligny dans le Jura. Un choix librement
consenti, passionné depuis tout petit par l’agriculture et les alpages. “C’est un
véritable privilège d’être né et de pouvoir travailler ici. C’est grâce à une
poignée d’hommes qui se sont organisés pour mettre en place
l’AOC qu’on appelle aujourd’hui l’AOP. Sans eux, je pense qu’il n’y
aurait plus d’agriculture aujourd’hui dans le Beaufortain.” Quand on lui parle de
son métier, Florent jubile, conscient d’être le maillon d’une chaîne locale
très solidaire. Aujourd’hui la fabrication du Beaufort se fait avec des
moyens très modernes rendant les tâches moins pénibles qu’autrefois.
Mais curieusement Florent garde une vraie nostalgie
des gestes d’antan : soutirer la toile ou retourner les meules
manuellement… Cette dernière tâche se fait encore dans 10 des
30 caves, trop petites pour faire passer le robot. C’est là que
s’exprime toute la force physique de cet homme à l’allure sportive.
Car sous le calot blanc et la douceur du regard se cache une force
de la nature. Champion du monde de ski-alpinisme en individuel en
2008, Florent est le tout nouveau recordman de dénivelé à ski avec
18 260 mètres avalés en 24 heures sur les
pentes du Planay. Une élégante façon de
tirer sa révérence à la compétition pour
se consacrer exclusivement à son métier
Le saviez-vous ?
et à ses montagnes.
Le Beaufort Eté tient son goût
fruité de sa fabrication avec du
lait produit de juin à octobre et
donc en grande partie du lait
d’alpage. Le Beaufort fabriqué en
hiver est plus doux, produit avec
le lait tiré quand les vaches sont
à l’étable de novembre à mai.
18 000 meules attendent le
jour J dans une trentaine de
caves d’affinage sous
la coopérative. Les autres
chiffres : 10 856 000 litres de lait
collectés par an, 25 000 meules
fabriquées par an, soit en
période de pointe, plus de
100 meules par jour.
Placées sur le tablard en épicéa dans les
caves fraîches et humides, les meules d’or
sont salées, frottées à la toile et retournées
2 fois par semaine. Après 7 mois de cave,
elles sont prêtes à être consommées.
VERSANTS ~ 24
De l’herbe au Beaufort,
toute une histoire
A 27 ans, Adrien Gachet fait partie de la nouvelle génération
d’agriculteurs du Beaufortain. Il a délibérément choisi
cette vie avec la fierté de poursuivre la voie ouverte par
ses aînés qui ont transmis un patrimoine paysager
et économique d’une très grande richesse.
Et en toile de fond, une passion intacte pour son pays.
“Nous avons la chance d’avoir grandi
dans un système solidaire. Nos anciens
ont créé la coopérative de Beaufort.
Cinquante ans plus tard, nous sommes toujours attentifs à la maîtrise de
notre travail, “de l’herbe au client”.”
Du fourrage au fromage, tout est
contrôlé par les agriculteurs et c’est
dans ce suivi de l’ensemble de la chaîne que se trouve la recette de la qualité. Ils ont une conscience très aiguë
de ce qui est bon pour les troupeaux,
pour l’AOP* et donc pour les visiteurs
et les consommateurs. C’est une certitude, sans cette
agriculture soignée et moderne, il n’y
aurait plus de paysages verdoyants
depuis longtemps. La nature ayant
horreur du vide, la déprise agricole
laisse trop souvent le champ libre aux
forêts et aux friches.
“Ici, les alpages sont restés plus
naturels que dans d’autres massifs et,
grâce à eux, le paysage du Beaufortain,
avec ses pelouses et ses chalets d’alpage, est notre marque de fabrique.
Les touristes ne s’y trompent pas.”
“J’aime cette vie
parce qu’elle a du sens…”
Adrien pratique la “remue” (nom de la
montée progressive vers les alpages)
et il n’hésite pas dès le mois de juin à
remonter les troupeaux vers les terres
d’altitude, conscient de la modernité
de ce mode de travail ancestral. “J’ai
repris l’ancien système où les alpagis-
tes, qu’on appelait “les montagnards”,
mettaient en commun les troupeaux.
Je monte mes 60 vaches laitières mais
aussi 70 bêtes venues de Tarentaise.”
Les “pensionnaires” arrivent mi-juin
et le troupeau progresse sur les alpages au fur et à mesure de l’arrivée de
25
Au-delà des images Une nature en mouvement
la végétation. Partant de 1000 mètres
d’altitude, ils arrivent à 2400 vers miaoût, quand l’herbe est à maturité. Là
haut, ils occupent les grands alpages
d’altitude de Conchette, de l’Ecot et
de Presset dans le secteur de la Pierra
Menta.
“J’aime cette vie parce qu’elle a du
sens. Les journées commencent à 3h30
du matin avec la première traite et se
finissent à 17h00. Mais quel bonheur
d’être là, d’observer la nature, les animaux, les panoramas, le Mont Blanc.
Et surtout de donner le meilleur à nos
troupeaux et d’être réellement acteurs
de la protection de notre AOP.”
Avant l’arrivée de l’automne, les troupeaux redescendent progressivement
et profitent des dernières pousses
avant le froid.
Cet art de “la remue” fait partie du
patrimoine beaufortain et a définitivement marqué le paysage et les
hommes. Les jeunes agriculteurs
d’aujourd’hui assurent la relève sans
nostalgie. Mais plutôt avec le sentiment d’être dans la construction d’un
avenir moderne, juste et solidaire.
AOP* : l’Appellation d’Origine Contrôlée
(AOC) est aujourd’hui étendue à l’Europe
et devient l’AOP (Appellation d’Origine Protégée)
VERSANTS ~ 26
La double vie de Louis Gachet
En été, pendant que son frère
Adrien monte vers les alpages,
Louis reste en bas, à Arêches.
Il s’occupe de la fenaison et
de l’élevage. Membre du Conseil d'administration du Syndicat de défense
du Beaufort, il est un fervent
défenseur de l’agriculture beaufortaine, de la qualité de son terroir et de la protection de l’AOC
Beaufort. Pour autant, il a fait un
autre choix de vie en apprenant
très jeune un second métier, celui
de moniteur de ski. C’est sur les
pistes de Courchevel que vous
pouvez croiser ce grand gaillard
au regard déterminé. “La double
activité fait rentrer un peu plus
“Notre défi est
de continuer à fédérer
toutes les forces vives…”
d’argent dans la famille.
C’est aussi une ouverture
vers les autres. J’ai choisi ma
bi-activité dès l’école. C’était
plus dur autrefois quand les
paysans-ouvriers descendaient à
Ugine pour travailler à l’usine.”
Parfaitement à l’aise dans ses
deux vies, Louis est très investi
dans le Syndicat de défense
du Beaufort mais aussi dans
la transmission des valeurs de
son pays auprès de ses clients.
“Notre défi est de continuer à
fédérer toutes les forces vives
et de poursuivre l’esprit coopératif de nos anciens. Et ça,
on peut le faire sur les alpages
mais aussi sur les pistes !”
Louis et Adrien Gachet
Avec un sourire complice,
ils donnent le secret de
leur vocation… “Tout
petits, nous aimions jouer
avec les pommes de pin.
Dans notre imagination,
elles représentaient les
tarines de nos parents.
On faisait des piquets
et des parcs avec
de la laine. Notre monde
s’est construit comme ça,
tout naturellement !”
L'alpage en quelques mots
Seille : seau de bois
Séracière ou sérachire : domestique
qui aidait le fruitier sur l’alpage. C’est elle qui
nettoyait les ustensiles et s’occupait du ménage
Fruitier : domestique qui faisait
le fromage en alpage
Pachon : piquet de sapin
auquel on attachait les vaches
En savoir plus
Les alpages et la vie d’une communauté
montagnarde : Beaufort du Moyen-Age
au XVIIIe siècle, Hélène Viallet – Centre alpin
et rhodanien d’ethnologie
Grenoble 1993
Le grataron, une spécialité locale très prisée
La fibre naturelle fait son grand retour
Le soir tombe sur les pistes enneigées
du Planay. Denis Joguet observe de loin
les quelques irréductibles skieurs
qui se pressent pour la dernière descente
de la journée.
Des Avinières où est installée sa
ferme, il profite du paysage dans
une tranquillité absolue. D’ici on
peut facilement oublier cette autre
vie sur le versant d’en face.
Le secteur est pourtant très habité
par un groupe de demoiselles plutôt racées. Communales, Sandines
ou Chamoisées, elles se bousculent
à l’arrivée du géant aux boucles
blondes.
Car les 80 chèvres laitières de son
troupeau sont encore à l’étable pour
quelques semaines, avant l’arrivée
des beaux jours et la montée vers
les pâtures du Col de La Bâthie. Avec
le lait de ses chèvres, il produit un
fromage typique du Beaufortain, le
Grataron. Ce fromage était autrefois
produit pour un usage domestique
et donc réservé à la consommation
familiale. Il avait une couleur rouge
due à l’utilisation de la cochenille au
moment du lavage de la croûte.
Si on lui demande sa recette, Denis
reste énigmatique : “C’est une
histoire de famille et le secret de
sa fabrication nous vient d’Octavie,
notre mère. Chaque producteur a son
tour de main particulier.” Impossible
d’en savoir plus, Denis Joguet reste
muet comme une carpe. Seule
certitude, ce fromage de chèvre,
à pâte molle, est très goûteux.
Les meilleurs fromagers d’Annecy
viennent le chercher directement ici
ou chez les trois autres producteurs
du Beaufortain.
Au fait d’où vient ce nom ? Là
encore, mystère : “Je ne me suis
jamais posé la question” répond
Denis en rigolant… Selon certains,
l’explication serait à trouver du côté
de sa croûte, le grataron étant un
des rares fromages à croûte lavée
et frottée.
“C’est une histoire
de famille et le secret
de sa fabrication
nous vient d’Octavie,
notre mère.”
En cherchant bien, vous
trouverez peut-être au
fond d’une malle un
vieil ours en peluche
tout doux et tout bouclé. Ce petit trésor, s’il
date du début du XXème
siècle, est certainement
fabriqué en laine mohair. Car cette douce
m a t i è re a d ’ a b o r d
acquis ses lettres de
noblesse avec la création d’objets destinés
aux enfants. Réservé
aux plus fortunés, le
mohair était à l’époque
une fibre naturelle très utilisée à l’image des sièges des trains en 1ère classe,
recouverts de cette douce matière. Marie-Hélène et Marlène sont installées à
“L’Eipeich”, au-dessus de Queige, depuis 20 ans. Le GAEC “La Ferme des Sapins”
est un petit paradis pour 80 chèvres angora, blanches et bouclées, gambadant
et caracolant joyeusement autour de la vieille bâtisse. Un élevage qu’elles
dirigent dans le plus pur esprit local : autonomes en fourrage et attachées à
produire une laine mohair de grande qualité.
Là aussi, comme pour les autres producteurs, impossible de travailler sans un
système solidaire, ces chèvres n’étant élevées que pour leur toison qu’il faut
ensuite transformer. Elles organisent deux tontes annuelles. La laine est ensuite
triée, lavée et filée au sein d’un réseau national très structuré. Les produits
finis reviennent à la ferme où ils sont vendus en direct. C’est seulement à ce
moment-là qu’elles perçoivent le fruit de leur travail. Il a fallu toute la détermination d’éleveurs de chèvres angora pour maintenir cette activité en France et
aboutir aujourd’hui à un réseau d’une cinquantaine de producteurs, organisés,
appliqués à transmettre leur savoir-faire et à créer des produits accessibles
et de très grande qualité. Difficile de ne
pas succomber à la douceur des belles
chevrettes à bouclette mais aussi aux
jolis pullovers, étoles, écharpes, bonnets,
chaussons et autres créations.
27
Versants cuisine
& jardin…
Un art de vivre ancestral
La Savoie a toujours été un carrefour d’échanges culinaires.
La proximité de l’Italie et de la Suisse, la pratique ancienne
des échanges entre régions et vallées, le commerce des épices
et surtout le système de production et de transformation laitières
ont créé une tradition culinaire très particulière. La cuisine
de montagne est faite de peu d’ingrédients. Provenant des jardins
et de la transformation du lait, ce fut pendant longtemps une cuisine
de subsistance, marquée par la dureté de la vie pour les habitants.
Pour autant, chacun a eu à cœur, depuis longtemps, de sublimer
les produits de la nature. On la croyait austère… elle se révèle joyeuse
et pleine de ressources ! Nous avons rencontré des “gardiens” de ces
recettes presques oubliées et des chefs convaincus que c’est dans
le partage de valeurs très actuelles que se trouvent les lignes d’une
nouvelle cuisine saine, faite de produits naturels, locaux et simples.
VERSANTS ~ 28
Le roi du
Pormonier
Notre tournée des recettes
familiales s’est arrêtée
à Villard-sur-Doron
où Gaston Tardy nous a livré
le secret de son “pormonier”.
A 74 ans, cet homme paisible
a vécu plusieurs vies. Charpentier, métallurgiste à Ugine
quand il fallait bien aller chercher le travail là où il y en avait
- "des fois, je rentrais à l’usine à
reculons pour avoir l’impression
de sortir" -, il n’a jamais perdu les ha- alcool” annonce-t-il. Pas si sûr, vu
bitudes héritées de son père. Tuer le la douce chaleur qui nous envahit
cochon, faire un potager, cultiver les fugitivement. Sur la table, il a découpé
fruitiers et les petits fruits et surtout quelques tranches de pormonier. “Son
pormonier” car là aussi, les recettes
savoir transformer ces produits.
Avec Gilberte, sa femme, ils ont su varient. “Nous mélangeons du gorgeon
maintenir une belle tradition qui et de la poitrine de porc avec des
fait plus référence à la solidarité bettes, des poireaux et de la salade
et au partage, toujours utiles par d’hiver. C’est en novembre qu’on
les temps qui courent, qu’à une fabrique le pormonier, juste avant
nostalgie d’un passé qui n’a plus que les légumes ne gèlent.” Le goût
lieu d’être. Chez eux, rien ne se incomparable vient de la cuisson faite
perd et tout se transforme. Gaston dans un grand chaudron sur un feu de
nous sert une liqueur de pissenlit, bois et surtout d’un art partagé, celui
d’une belle couleur dorée et au goût de la patience.
parfaitement équilibré. “Un
vin qui ne dépareillerait “il n’a jamais perdu
pas sur une grande table
les habitudes héritées
en accompagnement d’un
foie gras ! Garanti sans de son père.”
Sucré salé
“Chaque village a sa recette. A Beaufort,
c’est un entremet sucré et donc un dessert. Il
fallait utiliser tout ce qui poussait dans le jardin
et selon nos moyens, on ajoutait des épices et
des fruits secs. Notre “plus”, c’est le “résiné”
qui est une confiture sans sucre. C’est une
réduction de jus et de morceaux de poires qui
doit cuire sur le feu de bois pendant 24 heures
sans attacher.” Gilberte Tardy
“Chez nous, notre “plus”, c’était les myrtilles
séchées. On en mettait aussi dans les “gourres”,
de grosses boules de pommes de terre râpées
mélangées avec du sel, de la muscade et cuites
dans le bouillon de chèvre ou de mouton.
La cuisine de montagne était une cuisine de
“pauvres”. Il fallait faire avec ce que nous
avions.” Annie Viallet
Le farçon de Beaufort
✦ Cuire 1 kg de pommes
de terre en robe des champs.
Peler et réduire en purée.
✦ Dans une grande cocotte,
couper 2 kilos de pommes,
100 g de pain sec, 400 g de figues séchées,
ajouter un zeste d’orange en lamelles,
250 g de raisins secs, 500 g de “résiné”,
200 g de sucre, 2 bâtons de cannelle,
un peu de sel, 50 g de beurre
et 4 verres d’eau.
✦ Faire cuire et laisser réduire
en remuant de temps en temps.
✦ Rajouter les pommes de terre,
500 g de “résiné”.
✦ Laisser cuire en rectifiant l’assaisonnement
et en ajoutant environ un verre d’huile.
Après une heure de cuisson, ajouter quelques biscuits
secs émiettés. Disposer dans un ou plusieurs plats.
Avant de servir, faire dorer à four chaud.
29
Versants cuisine
& jardin…
Les jardins s’invitent à table
Ils conjuguent admirablement le passé et le présent,
travaillent à partir des produits frais et naturels et s’inspirent
de la nature environnante pour sublimer la cuisine de montagne.
De Hauteluce à Arêches, des Saisies à Beaufort, les grands chefs
vous proposent une gastronomie naturelle et très actuelle.
Pour les trouver, laissez-vous guider par vos envies…
Le retour des anciens
Didier Vidal est un amoureux des
produits de terroir. Quand on lui
demande de parler de la cuisine de
montagne qu’il fait découvrir dans
un grand hôtel des Saisies, il évoque
d’abord la truite, la féra, l’omble,
les écrevisses, le veau et l’agneau…
Il enchaîne sur les légumes-racines
qu’on appelle aujourd’hui les légumes
oubliés mais qui n’ont jamais vraiment
déserté les tables des habitants de ces
pays d’en haut. Après avoir cueilli des
fleurs aux odeurs surprenantes dans
les alpages, on passe par le jardin
ramasser quelques bettes, un chou et
des salades croquantes. Il nous raconte
des petits bouillons, des fumets de
volaille ou d’écrevisses et on se prend
à rêver à cette subtile alchimie qui
transforme des produits de terroir
en merveilles pour les papilles. Cette
cuisine pleine de poésie et de couleurs
donne envie de filer dans notre cuisine
pour tenter l’aventure.
Cyril Suet, installé au cœur de
Beaufort, est de ces jeunes chefs qui
se passionnent pour la cuisine de leur
terroir. Et surtout pour les produits
de montagne et les producteurs qui
les subliment. “Pour faire une bonne
cuisine, le producteur est aussi
important que le cuisinier. L’un ne
va pas sans l’autre. A partir de là,
une fois la sélection des produits de
saison faite, je fais ce que j’ai envie.”
Et comme nous en étions à parler
de jardins, de légumes et de fleurs,
à rêver sur le croquant des salades
et la douceur des tomates fraîches,
à s’extasier devant la délicatesse des
fleurs de pimprenelle et les premiers
coucous, Cyril a proposé de nous
concocter une recette rien que pour
nous… Sa “raviole” est un hymne à
l’alpage, au jardin et au grand air. Une
pure merveille !
de d'herbes
Raviole de légumes cuits et crus, sala
et jambon de pays.
Filet de truite, topinambours,
rutabagas et purée de
panais. Sauce à l’aspérule
et au lait d’alpage.
✦ Après les avoir soigneusement
épluchés, couper en petits morceaux
les rutabagas, topinambours
et panais. Les cuire séparément
environ 15 mn dans un bouillon
de volaille. Réserver.
✦ Avec les panais, faire une fine
purée montée au beurre et à la
crème épaisse. Assaisonner.
✦ Faire bouillir un litre de lait entier.
✦ Ajouter un peu de fumet de
poisson.
✦ Réduire de 3/4 - Assaisonner.
✦ Hors du feu ajouter 1 cuillère
à soupe d’aspérule séchée.
Laisser infuser en couvrant 10 mn.
✦ Faire revenir les filets de truite
au beurre 5 mn de chaque côté.
VERSANTS ~ 30
“Autour
du jardin”,
une cuisine
croquante
et craquante !
Dresser l’assiette en déposant
de part et d’autre les filets,
les légumes et la purée.
Entourer d’un filet de sauce.
les ingrédients utilisés
Pour 4 personnes : (nous donnons ici
r selon ses goûts)
varie
les
peut
on
mais
te,
dans notre recet
✦ Légumes : échalote grise, céleri rave,
le
chou pomme, carottes, brocolis et moël
es.
ceris
tes
toma
rges,
de brocolis, aspe
✦ Herbes : pissenlit, plantain, achillée
le,
millefeuille, fleur d'origan, pimprenel
rule
aspé
lamier pourpre,
✦ 4 tranches de jambon cru
✦ Raviole : 500 g de farine, 2 œufs
entiers, 3 jaunes d'œufs, 3 cuillères à
e
soupe d'huile d'olive, 3 cuillères à soup
d'eau froide, q.s. sel.
✦ Dans une sauteuse, faire chauffer un
peu d'huile d'olive et saisir les tranches
ite.
de jambon cru que l'on réservera ensu
✦ Faire revenir la mirepoix dans la
sauteuse avec une gousse d'ail en
'à
chemise. Saler et cuire à couvert jusqu
.
une cuisson al dente
✦ Réserver au frigo.
✦ Abaisser finement la pâte à raviole
et y découper 8 carrés de 20 cm.
Sur 4 morceaux, disposer environ 100 g
de légumes cuits refroidis. Coller les
Pâte à raviole :
2èmes morceaux de pâte par-dessus en
au
pour
s
dient
ingré
humidifiant le pourtour avec un pince
✦ mélanger tous les
et
r
Filme
.
gène
.
homo
l'eau
pâte
dans
une
pé
ir
trem
obten
laisser reposer 1h au frigo.
✦ Disposer les ravioles dans une
ent
✦ Eplucher les légumes, couper finem
sauteuse, couvrir d'eau à hauteur.
ue
chaq
de
hes
tranc
2
oline
mand
la
à
Ajouter une pincée de gros sel,
légume par personne, les réserver dans
une noix de beurre et une feuille
e
salad
la
avec
frigo
au
e
glacé
l'eau
de sauge. Porter à ébullition
d'herbes rincée.
et cuire 5 minutes.
✦ Tailler le reste des légumes en petite
mirepoix.
s
assaisonner les légumes crus et les herbe
Disposer les ravioles sur une assiette,
on.
jamb
de
he
tranc
la
avec
le
ravio
nt sur la
égouttés, les disposer harmonieuseme
Servir sans attendre.
Le jardin,
un ami qui
nous veut
du bien
Passer l’été dans les alpages nécessitait
autrefois de s’organiser. Car côté
ravitaillement, seuls les trajets à dos
d’hommes ou de mulets étaient possibles.
De cette époque est née la tradition des
cortils, les petits jardins cultivés autour des
chalets d’alpage. Ces potagers d’altitude
offraient aux alpagistes un complément de
nourriture indispensable. Dès l’arrivée dans
les alpages en juin, les hommes plantaient
des légumes. Ils les choisissaient résistants
et faciles à conserver. Carottes, choux,
poireaux, pommes de terre… il fallait faire
vite pour pouvoir profiter des récoltes avant
de redescendre avant l’automne.
Ce jardinage d’altitude est resté une tradition
de montagne et il est fréquent de trouver
autour des maisons ces petits carrés de
potager bien sages, protégés par de jolies
clôtures en bois. On y trouve des légumes
mais aussi beaucoup de fleurs et de plantes
aromatiques.
Une tradition qui vit aujourd’hui une seconde
jeunesse avec l’engouement des consommateurs pour une nourriture saine et naturelle.
Les citadins visitent les potagers comme
ils visitent des expositions de peinture,
s’extasient devant les lignes de haricots ou
de salades, s’amusent à faire pousser des
tomates et de la roquette sur leurs balcons
et s’intéressent aux fleurs comestibles. C’est
tout bénéfice pour la mise
en place d’une meilleure
façon de consommer et “On y trouve des
donc de se nourrir. Après légumes mais aussi
avoir oublié le bon sens des
anciens, nous revenons à beaucoup de fleurs
une alimentation simple et et de plantes
variée. Et les jardins, lieux
de calme et de lenteur, sont aromatiques.”
nos sources.
31
Au-delà des images
Une montagne d'activités
Confidences
Dans nos souvenirs
d’enfance montagnarde,
on trouve pêle-mêle les
courses folles dans les
grandes herbes fleuries
à la fureur du père qui
voyait son fourrage se
coucher sous nos pas
insouciants… les heures
passées à rêvasser devant
les cimes étincelantes
avec l’envie, plus tard,
quand nous serions
grands et forts comme
Maximin, devenu guide
de haute-montagne,
de nous confronter à la
VERSANTS ~ 32
verticalité, à la glace et
aux grandes courses… les
jeux de construction dans
les torrents où, soulevant
des pierres trop lourdes
pour nos petits bras, nous
construisions des barrages
et des viviers, heureux
d’arrêter pour quelques
minutes la course de
l’eau, frissonnants à la
vue d’une couleuvre
glissant sur l’herbe
humide, bien plus effrayée
que nous par nos cris et
nos gesticulations... et
bien d’autres souvenirs
d’étés à la montagne.
Sont venues s’y ajouter
aujourd’hui mille et
une façons de profiter
des airs, de l’eau, des
pentes et de l’air pur.
Mais ces enchantements
de l’enfance n’ont pas
disparu. Il suffit de laisser
aller son imagination et de
ne pas résister à l’envie
de plonger ses pieds dans
l’eau glacée du torrent
ou de profiter du souffle
magique d’une brise de
pente. C’est gratuit et
pour longtemps encore !
33
Au-delà des images Une montagne d'activités
Portrait
Jacques bos
“L’homme qui murmure
à l’oreille des truites”
“Pêcher, c’est avant tout une façon d’aborder le milieu aquatique.
Il n’est pas systématiquement question d’attraper du poisson
mais plutôt de prendre connaissance des lieux, d’apprivoiser la
rivière. Et quand au final j’ai attrapé une belle truite, je la regarde,
je mouille mes mains pour ne pas l’abîmer et je la décroche
doucement sans la blesser. Allez, ma belle, je te laisse la vie !”.
Jacques Bos, garde-pêche de l’AAPPMA de Beaufort (Association
Agréée pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique) est avant tout un
passionné de la pêche et, comme les truites du Doron, un fervent défenseur
de l’art de se fondre dans le milieu !
Ce Drômois de souche a appris l’art de la pêche sur les bords
de Loire et en Bretagne, dans les grandes rivières du Scorff et de l’Ellé,
là où vivent en abondance truites et saumons. Mais depuis 30 ans qu’il vit
dans le Beaufortain, il a appris
à se mesurer aux poissons de
montagne. Et pour rien au
monde il ne quitterait
désormais les eaux
froides du Doron ou des
lacs d’altitude. Et à ceux
qui pensent qu’il n’y a pas de
poissons ici, il réplique qu’il
suffit simplement de savoir les
attraper. Et à ce jeu là, inutile de
faire le malin. “La truite, tapie
au fond de l’eau en attente d’un
éphémère qui passerait par là,
vous sent arriver. Elle perçoit
les ondes, les changements
de lumière et en un quart de
seconde, elle n’est déjà plus là
où vous la pensiez être !” C’est
pour cette raison que le bon
pêcheur ne s’installe jamais sans
avoir au préalable marché le
long de la rivière, repéré de loin
le bon coin et décidé alors de
son heure de pêche en fonction
du soleil et de l’orientation.
La technique est alors de
remonter le courant pour
surprendre la belle. “Il faut
penser comme elle, se mettre
à sa place et alors, on a une
chance de l’attraper.”
VERSANTS ~ 34
“… en un quart de seconde,
elle n’est déjà plus là où
vous la pensiez être !”
La pêche en lac, un loisir d'été facile à apprivoiser
Côté technique, Jacques Bos a découvert “la pêche au toc” en arrivant en
Savoie. C‘est simple, il faut une ligne, un plomb et un appât et dès que ça
bouge, on ferre et le plomb fait “toc-toc” ! D’où le nom de cette pêche pas
toujours miraculeuse sauf si on la pratique sur le plan d’eau de Marcot où
chaque année sont organisés des lâchers de poissons de rivière. Jacques préfère
largement la pêche en wadding, ultra légère et caractéristique de ces étranges
sportifs qui remontent les rivières avec des bottes de sept lieux (les wadders).
Une pêche sportive très adaptée à la montagne et aux eaux tumultueuses du
“Une pêche sportive très adaptée
à la montagne et aux eaux
tumultueuses du Doron…”
Doron et très apparentée au jeu du chat et de la souris... Quant à la pêche à la
mouche, elle est réservée aux lacs de montagne, à Saint-Guérin ou à La Gittaz.
“Il faut une étendue d’eau plane suffisamment grande pour que la mouche se
pose doucement comme un insecte sur la surface de l’eau. La truite fonce et
gobe la mouche ! Si vous essayez le lancer au bord du Doron, il y a de fortes
chances pour que votre ligne finisse sa course dans les arbres !”
Aujourd’hui, Jacques Bos transmet sa passion aux plus jeunes et, avec son comparse
Gaston Molliex, encadre chaque été des stages de pêche pour les 8-12 ans
organisés par l’Association d’Animation du Beaufortain. Ils transmettent avec
plaisir les émotions de leur sport favori à des enfants qui découvrent que
chez eux vivent des truites sauvages et des écrevisses à pattes rouges. Et si
la pêche de ces dernières reste interdite, ils peuvent toutefois démarrer leur
apprentissage sur le plan d’eau de Marcot où se laissent attraper facilement
de nombreuses espèces surdensitaires. Avant de filer vers des endroits plus
sauvages sur les traces de Jacques Bos, qui leur apprend que ce milieu fragile
doit aussi être entretenu et protégé.
35
Portfolio
Courants ascendants
Randonnée équestre
au pied du Mont-Blanc
VERSANTS ~ 36
Découvrir la montagne en marchant...
VTT de descente, "dré dans l'pentu"
37
Au-delà des images Une montagne d'activités
L’échappée belle
Avec le retour des beaux jours, de drôles de touristes
sillonnent les routes de notre pays. Le nez au vent,
penchés sur leur guidon et très concentrés sur les courbes
des virages, ils filent, rapides comme l’éclair,
dans les longues descentes du Col du Pré.
Mais ne vous y fiez pas, pour en arriver
à cet instant de bonheur absolu, ils en
ont mis sous le pied ! C’est d’ailleurs
l’essence même de ce sport.
A en croire Jean-Jacques Berthod, un
des fondateurs du très sympathique
club local de cyclistes, le Beaufortain
est même un modèle du genre.
Avec ses grands cols classiques, ses
montées mythiques et ses kilomètres
de petites routes qui serpentent d’un
versant à l’autre hors des grands axes
routiers, le cyclisme a trouvé son
Eldorado !
Depuis 15 ans qu’ils roulent ensemble, Jean-Jacques et ses copains ont eu
tout loisir de décortiquer les avantages
du vélo pour sillonner les vallées du
Beaufortain. “On roule tout le temps
dans la nature. Qu’il s’agisse des boucles autour des hameaux, des étapes
de montagnes, des passages de forêts,
on est toujours face à de merveilleux
VERSANTS ~ 38
panoramas ou à d’incroyables contreplongées sur les alpages. Nous venons
des quatre villages et nous sommes
fiers d’avoir dépassé les traditionnelles
“querelles de clocher”. Quand on roule,
on oublie tout.”
Eloge de l’effort
Mais attention, ces moments de pure
contemplation se méritent. La montée
Beaufort-Arêches-Col du Pré par
Boudin peut se transformer en épreuve
pour tout cycliste qui se lancerait à
l’assaut de cette pente à 14% sans un
minimum d’entraînement ! Le Grand
Tour du Beaufortain, c’est 155 km en
passant par les cols des Saisies, de
Méraillet et du Pré et cela promet
quelques crampes à l’innocent qui
penserait qu’il suffit d’avoir le moral
pour avaler les 3850 mètres de
dénivelée de ce circuit réputé !
Pour comprendre ce qui se passe dans
le cerveau d’un grimpeur, essayez de
conserver le rythme dans la montée
mythique du Signal de Bisanne et ses
1212 mètres de grimpette !
Malgré les nombreux troupeaux qui
vous regardent passer, pas de doute,
le Beaufortain n’est pas qu’une
montagne à vaches !
Heureusement, un peu plus bas, le
parcours dans les bois reliant Beaufort
à Queige est un beau moment de
fraîcheur. Pour un peu, on oublierait
qu’on est à la montagne !
au service de tous en créant 13 cyclofiches recensant les circuits sportifs
balisés depuis le centre de Beaufort.
Dénivelés, longueur, pente moyenne,
parcours de liaison, tout y est.
C’est un outil précieux pour les
visiteurs qui sont les bienvenus :
“aujourd’hui, nous intégrons à notre
groupe de “locaux” des habitués du
Beaufortain. Quand on y séjourne
régulièrement, il est quasiment
impossible de résister à l’appel de la
route !”
Ce n’est donc pas un hasard si la
Route des Grandes Alpes (qui fête
son centenaire en 2011) bien connue
de tous les aficionados de la “petite
reine” passe par le Beaufortain.
A force de pédaler sur toutes les routes
du pays, Jean-Jacques Berthod et ses
acolytes ont mis leurs connaissances
Cimes et hameaux - Le Beaufortain à vélo
En vente dans les Offices de Tourisme
Le pays d’en haut
“Lâchez tout !” s’écria le docteur. Et le Victoria s’éleva
rapidement dans les airs, tandis que les quatre caronades
du Resolute tonnaient en son honneur.
Nous avions tous en mémoire les
descriptions colorées de Jules Verne
dans son roman “Cinq semaines en
ballon” quand la montgolfière monta
doucement et que routes, forêts et
n’est pas rare, très tôt le matin ou au
soleil couchant, de pouvoir admirer
ces drôles de points colorés avançant
nonchalamment au gré du vent.
Ici, il existe une vraie tradition héritée
de la passion d’une
poignée de pilotes
talentueux, adeptes
du vol en montagne
et regroupés au sein
du Montgolfières
Club de Savoie. La
station a d’ailleurs
été la première à proposer des stages
montagne dans les années 80. Depuis,
tous les ans, les Jeux Aériens regroupent
des dizaines de montgolfières venues
de partout et sont maintenant un
rendez-vous incontournable pour les
meilleurs pilotes européens.
De la préparation du ballon à son envol,
le spectacle est vraiment magique
et nous propulse rapidement dans
“Les brûleurs chauffent l’air,
un homme tient la corde
de couronne et doucement
l’enveloppe se redresse…”
maisons finissaient par ressembler à
de jolies petites maquettes. Ce n’était
pas l’île de Zanzibar qui s’offrait à nos
yeux émerveillés mais le plateau des
Saisies, le Mont Blanc étincelant et
les sommets du Beaufortain à portée
de main.
L’expérience mérite d’être vécue et le
vol très particulier des montgolfières
fait partie du ciel du Beaufortain. Il
l’imaginaire des grands aventuriers.
Tout est nouveau pour nous et nous
devons peu à peu nous glisser dans
la peau des aéronautes. Les brûleurs
chauffent l’air, un homme tient la
corde de couronne et doucement
l’enveloppe se redresse. Il ne reste
plus aux passagers qu’à rejoindre
le pilote dans la grande nacelle en
osier. La montgolfière prend son envol
lentement. Nous nous retrouvons
bientôt au dessus des montagnes. Le
ballon prend le vent Nord-Nord/Ouest
et se dirige en direction de Hauteluce
et des Aiguilles Croches. Le clocher du
village semble tout petit, lui qui, vu de
terre, domine le village de son bulbe
brillant. Nous survolons les alpages
et les troupeaux. Le pilote prend un
peu de hauteur pour ne pas effrayer
les animaux avec le bruit du brûleur.
L’ambiance est douce et paisible. Le
paysage défile et vu d’en haut, on en
comprend toutes les subtilités. Ici un
torrent, là un joli chemin creux, des
hameaux regroupés dans la pente, des
chalets d’alpage isolés, des marcheurs
sur les flancs de la montagne… Nous
frôlons les crêtes avec le sentiment de
nous fondre dans ce paysage d’altitude.
L’impression de glisser sur l’air est très
douce. Le pilote utilise le moindre petit
courant d’air pour progresser et nous
sommes parmi les anges !
Après une heure de vol, Megève est
en vue. Nous nous dirigeons tranquillement vers l’altiport. La manœuvre
réclame de la concentration et du silence. Le pilote ralentit la descente, la
nacelle se pose et l’atterrissage nous
fait sortir du rêve. Nous revenons à la
réalité, un peu déboussolés de marcher sur terre et conscients d’avoir
vécu des moments rares et privilégiés.
L’apprentissage du “lâcher-prise” en
quelque sorte !
39
Au-delà des images
Jeux d'hiver
les secrets de l'hiver
Dès l’automne, elle
arrive. D’abord en fines
particules sur les hauts.
“Ça a poudré cette nuit”
disent-ils. Cette neigelà en prédit une autre.
Plus lourde, plus dense.
Celle qui en tombant
ressemble à de petits
papiers déchirés et vous
anesthésie l’esprit. Celle
qu’on reconnait du fond
de son lit, avant même
que le jour pointe son
nez. Rien qu’au silence
ouaté du dehors. Elle
arrive d’un seul coup et
tout le paysage se met
VERSANTS ~ 40
à respirer au ralenti… Il
faut attendre le soleil de
janvier pour qu’une autre
neige, poudre blanche
mate et légère, adoucisse
les reliefs. Les plus hauts
sommets virent au bleu.
La glace brille, inquiétante et attirante. Et plus
le printemps approche,
plus la neige change de
consistance. Aux premières étoiles aériennes de
novembre succèdent les
lourdes plaques prêtes
à dévaler les pentes aux
premières chaleurs. Les
montagnards les connais-
sent bien. Ils savent depuis
très longtemps choisir les
meilleurs endroits pour
les éviter. Ce savoir, hérité
d’une pratique quotidienne
où la nature n’a jamais fait
de cadeaux, est plus que
jamais utile. Les professionnels de la montagne,
qui restent toujours attentifs aux signes du temps :
température, vent, soleil,
orientation… le savent bien.
Tout en gardant à l’esprit
que la neige ne se livre
jamais complètement.
41
Au-delà des images Jeux d'hiver
Portrait
Christophe Hagenmuller le photographe vagabond
Les plus belles traces
du Beaufortain
Christophe Hagenmuller
2006
Christophe Hagenmuller aime la montagne vivante, c’est pour cette raison qu’il
a fait du Beaufortain le sujet du premier livre de sa collection Naturalpes dédiée
aux plus beaux itinéraires de découverte à s’offrir durant l’hiver.
A skis ou en raquettes, il n’est ici question que de plaisirs,
d’émotion et de partage.
C’est dans les Vosges que Christophe a découvert les joies de la randonnée,
aux côtés de son père et de son frère Jean-François, autre photographe très
talentueux, devenu guide de haute-montagne. Et des Vosges aux Alpes, le
chemin était tout tracé !
De cette enfance montagnarde, Christophe a conservé un goût prononcé pour
les paysages d’altitude. Il a bourlingué dans beaucoup de massifs, s’est offert
de mythiques sommets devenant un pratiquant averti de la haute-montagne.
Mais au-delà d’éventuelles prouesses sportives et d’histoires de dénivelés, ce
qu’il aime par-dessus tout c’est le vagabondage. Et le Beaufortain est pour lui
le terrain idéal pour se promener, observer, prendre le temps d’échanger.
Par son travail photographique, il restitue bien plus qu’une
image. A la lecture de ses clichés, on ressent de vives émotions et
l’impression fugitive de plonger dans un instant fragile, éphémère, aux lumières
VERSANTS ~ 42
Ce tour d’horizon des plus
belles randonnées à ski du
Beaufortain n’est pas réservé
aux initiés ; il se feuillette aussi
comme un beau livre d’images
sur les sommets et les vallons
de cette île d’altitude. Le
Mirantin, la Pointe de la Grande
Journée, celle de Presset et les
balades hivernales au dessus de
Roselend ou autour des alpages
enfouis sous la neige, tous les
itinéraires se vivent à skis ou
en raquettes pour une superbe
vision à 360° de la montagne
beaufortaine.
particulières. Ce travail d’artiste va bien
au-delà d’une technique parfaitement
maîtrisée. Les images de Christophe
Hagenmuller semblent saisies sur le vif.
C’est le résultat d’un très long travail
de préparation où la connaissance du
Beaufortain, de la montagne et de la neige est essentielle. Pour
des raisons de sécurité bien-sûr, mais surtout de composition et
d’éclairage. C’est là que sa connaissance de la montagne fait toute
la différence. “Je sais que dans certains endroits, telle lumière,
tels nuages ne vont se retrouver que trois ou quatre fois durant
l’hiver. Il faut être patient, savoir attendre et surtout se préparer.
Aucune image n’est prise par hasard. Bien choisir l’instant, la
neige, l’orientation… La combinaison de ces paramètres permet
d’être là au bon moment. Il y a de temps en temps de belles
surprises comme le passage inattendu d’un troupeau de chamois.
Mais si je fais une seule et unique photo dont je sois content
pendant une sortie sur le terrain, c’est déjà beaucoup.”
Poudreuse a gogo et saute-vallons les joies du ski de rando Il faut se lever tôt pour profiter des joies
de la randonnée à skis. Choisir son itinéraire,
vérifier la météo, trouver la bonne exposition
pour une belle poudre bien légère et se lancer
à l’assaut de la montagne, cherchant déjà
les petits passages sympas encore vierges
de toute trace pour une descente sur mesure.
Ce sport qui demande un peu d’engagement physique est une des plus
belles manières de se rapprocher de
la nature.
A ce jeu, le Beaufortain est champion
du monde. Les raisons en sont
multiples : un paysage pratiquement
exempt de remontées mécaniques,
un enneigement exceptionnel,
une géographie composée d’une
succession de vallées pas trop larges
ni trop profondes et une variété
d’itinéraires des plus faciles aux
plus techniques. Le ski “nature” est
inscrit dans les gènes de tous les
Beaufortains, conscients de bénéficier
d’un espace de liberté unique. Quant
au néophyte, il peut être certain de
profiter d’un panorama à tous les
coups bluffant dès qu’il aura atteint
son but, théoriquement un sommet
même s’il s’agit d’une balade facile.
“Je dis souvent qu’ici
on joue à "saute-vallons"…”
“Je dis souvent qu’ici on
joue à “saute-vallons.”. Il y
a une multitude de circuits,
de boucles et d’itinéraires
qui permettent de passer
assez vite d’une vallée à
l’autre. Il y a peu d’endroits
infranchissables et on trouve
toujours un passage sur les
crêtes pour basculer sur
l’autre côté. On peut même
parfois démarrer la rando à
2000/2300 mètres d’altitude
grâce aux remontées mécaniques d’Arêches-Beaufort
ou de Hauteluce qui proposent un ticket “spécial
rando”. On est alors encore
plus vite sur les espaces
vierges.”
Enneigement
Une position privilégiée
Pourquoi neige-t-il ici plus qu’ailleurs ? Selon
Philippe Yvrande de Météo-France, rien que
de très logique. Les perturbations qui frappent
les Alpes, majoritairement de composante
Ouest/Nord-Ouest, viennent buter contre les
hauts-reliefs. En effet, le Massif du Mont
Blanc, dressé comme une barrière, bloque
les dépressions et permet au Beaufortain de
recevoir cette manne neigeuse tombée du ciel.
Ajoutez à cela le fait qu’en s’arrêtant contre
les hauts reliefs, les perturbations gagnent
en intensité et vous aurez l’explication
scientifique de l’enneigement de qualité du
massif. Enfin, en raison de leur configuration
et de leur orientation, les vallées sont bien
protégées du redoux. Voilà pourquoi ici, la
“fraîche” du Beaufortain est réputée !
Christophe Hagenmuller a
testé tous les itinéraires et d’avis de
spécialiste, le plus sauvage reste celui
du Vallon de La Gittaz. Entre le Col du
Bonhomme et le hameau de La Gitte,
le paysage a des allures de Grand
Nord. S’imaginer qu’ici passaient
autrefois les contrebandiers donne un
peu de piment à cette balade qui par
ailleurs n’en manque pas. A l’image du
“chemin du curé”, un chemin que fit
creuser le curé au-dessus de la
gorge pour que les troupeaux
puissent se rendre plus facilement à l’Alpage de la Sauce.
Bref, on vous parle de sport de
montagne et on termine par
les petites histoires du pays.
Le Beaufortain, c’est tout cela
à la fois !
43
Portfolio
Hauteluce sous le soleil, même en hiver...
Ambiance nuit à Beaufort
VERSANTS ~ 44
Sur les pistes, je me suis fait un nouveau copain...
"Sous la neige, exactement !"
45
Au-delà des images Jeux d'hiver
Franck Piccard
La glisse dans tous ses états
Triple médaillé aux Jeux Olympiques en 1988 et 1992
en Super G et descente, Franck Piccard est bien
sûr un amoureux de la glisse.
Cet enfant des Saisies reconnaît volontiers que d’avoir parcouru la planète
dans tous les sens pendant ses années
de compétition l’a rendu encore plus
attaché à ce coin de montagne “à
dimension humaine”. Car, explique-til en spécialiste, ici, la glisse est variée
et adaptée à tous les profils. “Toutes
les manières de skier se retrouvent ici.
Certaines pistes des Saisies,
d'Hauteluce ou d’ArêchesBeaufort sont faciles et
accessibles aux débutants.
A Arêches-Beaufort, on peut
aussi pratiquer un ski plus
sportif et se lancer sur de
magnifiques hors-pistes. La
station des Saisies correspond quant à elle à une offre
dimensionnée pour répondre à une clientèle actuelle,
adepte du ski mais aussi de
tout ce que peut offrir une
station en matière de loisir
ou de bien-être pour toute
la tribu. Depuis le col du
Joly, la descente sur Hauteluce est un petit trésor en
matière de paysage et de
panorama.”
Après un tour d’horizon rapide des
grands pays de ski, Suisse, Autriche,
Australie Nouvelle-Zélande, Canada, le
constat est sans appel.
Si tous les paysages de montagne
méritent le détour, finalement dans
ses souvenirs, “il y a peu d’endroit
au monde comme celui-ci, avec ses
vallées qui se rejoignent pour former
un grand cirque qui n’a rien
d’une enclave, avec son ensoleillement et son enneigement
et surtout son esprit particulier. Car, même si, vu d’ici,
nous sommes différents selon
les villages, à l’extérieur, nous
sommes tous beaufortains !”
VERSANTS ~ 46
Pascal Meunier
La Fontaine de Siloe – 1999
Pascal Meunier connaît
bien Les Saisies. Il y a
enseigné l’art des virages
et du plié de genoux
pendant plus de 20 ans.
Il est aussi à l’origine du
développement des vols
en montgolfières sur la
station. Dans cet ouvrage, il a recueilli les
confidences de ceux qu’on a appelés les
pionniers de l’or blanc. Ces hommes et
ces femmes ont su faire des alpages du
col des Saisies, une station familiale qui
a porté les couleurs olympiques en 1992
en accueillant les épreuves de fond et de
biathlon. L’histoire commence en 1913 avec
le premier concours de ski organisé sur les
pentes de Bisanne. Elle se poursuit pendant
presque un siècle sans jamais oublier que
le tourisme doit tout à la nature et aux
paysages. On y découvre l’histoire de tous
les acteurs de cette aventure, des moniteurs
de ski aux artisans, des résistants aux
champions sans oublier tous les habitants
de ce pays décidément riche en émotions.
Arêches-Beaufort
Un siècle de tourisme,
50 ans de remontées
mécaniques
A l’entendre, on se dit
que la liste des bons
plans est longue et
mérite le détour !
Pour terminer, Franck le
descendeur nous réserve
une surprise… Il est devenu
adepte du ski de fond ! “Depuis 3 ou 4 ans, j’ai redécouvert les joies du ski de
fond. Se balader, être en
connivence avec la nature
et les gens rencontrés au passage des
hameaux me permet de retrouver l’esprit du pays. Le ski de fond est une
activité ancienne ici où on a toujours
pensé la montagne autrement que le
“tout ski””.
La Saga des Sa isies
François Rieu – La Fontaine de Siloe – 1997
“Il y a peu d’endroit au monde
comme celui-ci…”
L’histoire du développement des sports
d’hiver à Arêches-Beaufort est liée à celle
d’un jeune alpagiste, Gaspard Blanc. Dès
les années 30, il skiait, randonnait avec
les moyens du bord. Jusqu’à devenir tout
naturellement chasseur alpin puis moniteur
de ski. Et avoir l’idée, après la guerre en
1947, d’installer le premier téléski. François
Rieu suit le fil de l’histoire avec beaucoup
de témoignages et d’images d’époque. Ces
50 années de mutations ont construit le
tourisme d’aujourd’hui.
Marie Bochet chercheuse d’or
Quelle est la recette du succès de cette jolie
brunette de 17 ans, au regard pétillant, qui a
cumulé en une saison, le maximum de titres
mondiaux en ski alpin-handisport ?
“Tout donner dans le sport
comme dans la vie…”
Dire que Marie Bochet est Beaufortaine
est certes intéressant mais une enfance passée à courir l’alpage familial
de Plan Mya ne suffit pas à en faire
une championne. Il faut plus et c’est
une histoire de rencontres, d’affection
et d’amitié qui a propulsé Marie au
top niveau mondial.
En 2011 donc, elle a décroché deux
titres de Championne du monde
individuel en Géant et par équipe et
remporté la première place au général
de la Coupe du Monde et de la Coupe
d’Europe. Sans oublier un titre de vicechampionne du monde de descente
et de Super G. Autant dire que c’est
du jamais vu dans le monde du ski
handisport.
“J’ai eu la chance de débuter la
compétition en étant toujours épaulée
par des entraîneurs qui ont cru en
moi. Je skie depuis toute petite et
j’ai commencé, avec mon frère Léo,
au Club des Saisies, encadrée par
Jean-Michel Berthod. En arrivant au
Collège de Beaufort, Bertrand Viallet,
le responsable de la section ski, a
commencé à me préparer à la compétition de haut niveau. Les choses se
sont accélérées depuis que je suis au
Lycée Jean Moulin d’Albertville.” Là,
Marie s’entraine tous les après-midi
d’avril à septembre en alternance avec
les cours. La préparation du bac se fait
en quatre ans pour ces jeunes de haut
niveau qui passent les 6 mois d’hiver
à courir aux quatre coins de la planète.
Ils sont 70 skieurs et snowboarders à
évoluer au rythme de ce régime qui ne
laisse que peu de place aux vacances.
Pour autant, Marie, qui est la première
skieuse handisport à entrer dans ce
lycée, n’est pas frustrée.
Elle aime profondément le ski et la
compétition et bénéficie du soutien
de son père Yvon Bochet qui la suit
dans sa progression en portant une
attention toute particulière à son
mental. “J’ai toujours vécu avec un seul
bras et je ne me suis jamais sentie très
différente des autres. C’est juste que
certaines choses demandent de bouger
autrement. La seule difficulté c’est de
garder les pieds sur terre quand on fait
de bons résultats au niveau mondial !”
dit-elle avec humour.
Entourée de ses entraîneurs et des
siens, Marie sait que sa carrière a
été rapide et qu’il va falloir tenir le
haut du classement. Mais elle y croit,
s’entraîne dur, donne le maximum
et n’oublie pas de penser à l’avenir.
“Dans tous les autres pays, la relève
est assurée. En France, le handisport
de haut niveau n’est pas encore
très populaire. Nous ne sommes
pas professionnels contrairement
aux autres pays et c’est difficile
de donner envie à d’autres. Nous
sommes pourtant disponibles pour
aller motiver de jeunes handicapés
à se lancer dans l’aventure. Au
niveau national, il y a beaucoup
de gentillesse et de solidarité entre
nous. En compétition, c’est un peu
différent, mais c’est une formidable
école de vie. Et pour rien au monde
je n’abandonnerais !”
Il suffit de la voir s’élancer au
départ des courses les plus
difficiles pour comprendre à quel
point Marie est généreuse.
Tout donner dans le sport comme
dans la vie lui permet de conserver
ce bel équilibre qui fait sa force.
Une force qu’elle entretient dès
qu’elle en a l’occasion en retrouvant
les siens dans le refuge familial sur
les hauteurs de Roselend.
47
Au-delà des images Jeux d'hiver
Pierra Menta
Une course inscrite au patrimoine local
Plus qu’une course, la célèbre épreuve de ski-alpinisme qui se déroule
chaque année en mars, est le rendez-vous incontournable
de tous les habitants du Beaufortain.
VERSANTS ~ 48
L’histoire débute avec la mobilisation,
bien avant la course, de 350 bénévoles.
Elle se poursuit pendant les quatre
jours de compétition avec un bon tiers
d’équipes composées de locaux. Elle
se prolonge, sur les pentes du Col
de La Forclaz, du Cormet d’Arêches
et au sommet du Grand Mont, par la
présence de centaines de supporters
venus de France, d’Italie, d’Espagne
et de Suisse. La Pierra Menta, pour
faire initié, prononcez Pierrâh Minte
en appuyant fortement sur le in,
est une des plus belles courses de
ski-alpinisme au monde. Elle est
désormais inscrite dans le
cœur et le corps de toute
une génération de skieurs
du massif.
C’est la semaine de la Pierra
Menta. En déambulant dans
les rues de Beaufort ou
d’Arêches, pas difficile de
reconnaître les équipiers.
Bronzés et sveltes, on les
retrouve à la caisse de la supérette les bras chargés de
pâtes. Bien sûr, on les croise
aussi à l’entraînement sur
les raidillons de la Pointe
de la Grande Journée ou du
Grand Mont. Collants moulants et pipettes sont leurs
signes de reconnaissance. Et
là où, à skis de rando, vous
vous arrêtez quelques minutes, histoire d’admirer le
paysage, ils vous dépassent,
le regard fixé sur la pointe
de leurs spatules. A peine
un déplacement d’air, juste
un léger souffle pendant que
vous reprenez difficilement
le vôtre...
L’autre histoire de la
Pierra Menta, c’est
celle du pays. C’est LA
course du territoire, avec
son ambiance unique. C’est
en partie ce qui en a fait
son succès mondial. Chaque
année, des skieurs basques
viennent prêter main forte
à l’organisation. Des bus
d’italiens se déplacent pour
soutenir leurs champions.
Un formidable
exploit sportif
pour toutes les
équipes engagées
Et tout ces gens joyeux et motivés se
mêlent aux supporters locaux investis
à tous les niveaux, traceurs, restaurateurs, responsables de la sécurité,
de la circulation et surtout de l’animation ! Car ici tout le monde se
connaît et des jeunes du ski-club aux
bergers, des pratiquants “nature” aux
fromagers de la Coopérative, tous se
retrouvent un jour ou l’autre à “faire la
Pierra Menta.” Clarines, trompettes,
accordéon, chants, youyous, tout est
permis à condition de faire le maximum
de bruit au passage des champions.
Une vraie fête d’altitude où tout le
monde gagne. Ce passage obligé parmi
une foule colorée, bigarrée et joyeuse
comme pas deux est le meilleur dopant
pour tous les sportifs engagés !
“C'est la course du territoire,
avec son ambiance unique…”
La Pierra Menta en famille
René le père, Arnaud, Xavier et Yvon les fistons,
Sylviane la maman… Chez les Gachet, la Pierra Menta
est une saga familiale.
Il faut dire que la maison familiale,
aux Efforces, est à quelques encablures des pentes où se déroule
la course. “Il y a même eu des années où le départ se situait juste
en contrebas.” Impossible donc de
résister à l’appel du large d’autant
que René est au rendez-vous depuis…1986. Il avale chaque année
entre 60 000 et 80 000 mètres de
dénivelé juste pour le plaisir. C’est
donc le regard porté vers les pentes
enneigées et la cime du Grand Mont
que les trois garçons ont grandi.
René est fromager à la Coopérative,
une entreprise qui tourne au ralenti
pendant la course tant l’investis-
sement des salariés dans cet évènement est important pour la vie locale.
Chaque année, Sylviane est à la vente
des T-Shirts, sa façon à elle d’être de
la partie.
Mais comment expliquer un tel engouement pour la Pierra Menta ? La
réponse de René fuse comme une
évidence dans ce pays de montagne :
“De toute façon, l’hiver, il n’y a pas
grand-chose d’autre à faire si on ne
veut pas rester enfermé !”
Et puis il y a cette fête, cette sensation
pour les coureurs d’être portés par
tout un pays. “Quand on voit tout ce
monde aux passages des cols et des
sommets malgré le mauvais temps,
on a envie d’aller encore plus vite.
On entend son nom, on reconnaît
ses amis, ses voisins et on donne le
maximum pour être de la fête !”
Une émotion qui vaut bien celle de la
victoire. Et chez les Gachet, la victoire,
on connait. Le buffet de la salle à
manger est recouvert de coupes. Une
“taupine” est remplie de médailles.
“Je ne sais même pas combien il y en a.
C’est Xavier, en Equipe de France
Espoirs, qui en a remporté le plus…”
Cette année, pour la première fois,
le père et ses fils se sont retrouvés
ensemble sur la course. La relève est
en préparation. Les petits des écoles
maternelles sont chaque année à
pied d’œuvre pour soutenir leurs
champions dans des endroits faciles
d’accès. Nul doute que ne germe déjà
en eux une envie qui les amènera plus
tard à aller se mesurer à leurs aînés.
La fête de la Pierra Menta a encore de
beaux jours devant elle !
49
Versants
livres
Inspiration
01
Le Beaufortain sert de toile de fond à des histoires,
des témoignages ou des créations les plus diverses.
Quelques exemples à retrouver à la médiathèque de Beaufort
ou chez les libraires et à déguster sans modération.
01~Hubert
02
04
du Beaufortain
03~La poule blanche
Randonnée littéraire en
Une école en Beaufortain
80 étapes sur le sentier de vie Bluette
L’edelweiss
d’Hubert Favre
06~Au temps des alpages
Philippe Mazure
et Roger Frison-Roche
La Fontaine de Siloe - 1992
Patrick Jagou
Editions Kahuna Vision - 2010
Ce livre est un véritable témoignage
d’amitié à Anastase Personnettaz,
alpagiste authentique. C’est aussi
un reportage photographique sur
la vie des montagnards dans les
années 90. Ceux que Frison-Roche
appellait “les hommes libres” ont su
transmettre à la génération actuelle
les valeurs qui les animaient et qui
se retrouvent dans ce beau livre
d’images, même si cette vision
passéiste du pastoralisme n’est plus
du tout d’actualité.
Partir explorer les contrées d’Hubert
Favre, c’est s’engager sur les
chemins du Beaufortain à travers
les virages, les pentes escarpées et
les balades d’une vie bien remplie.
On y retrouve les grands noms
de la montagne, Philippe Revil,
Frison-Roche, Maxime Viallet entre
autres… Et à travers les rencontres,
l’esprit d’un pays où souffle un
vent de créativité, d’optimisme,
d’engagement et de partage. Une
manière intelligente de s’y plonger
pour en comprendre les subtilités.
02~Octavie
– Une paysanne
en Beaufortain et ses treize
enfants
05
Laurence Fleury
L’histoire d’Octavie Joguet est un
témoignage poignant sur la vie des
habitants du Beaufortain durant le
siècle dernier. Dans l’histoire de leur
aïeule, les générations qui ont suivi
ont appris à reconnaître la richesse
du patrimoine humain de leur pays.
Ce livre raconte la vie de cette belle
montagnarde, née en 1925 aux VillesDessus en amont de Beaufort. Une
histoire passionnante qui se tisse au
fil des générations avec en toile de
fond un attachement profond pour
le Beaufortain.
06
07
VERSANTS ~ 50
L’histoire de l’école de Boudin est
liée à celle d’un homme, Pierre
Tissot, né en 1757. Une fessée
maternelle allait décider de sa
destinée et bien des années plus
tard, permettre aux enfants du
hameau d’apprendre à lire,
à écrire et à compter.
04~Doucement les basses
Jacques Ouvard
La Fontaine de Siloe - Février 2005
Un polar au pays des alpages, ça
mérite le détour. Cette nouvelle
enquête du Père Boileau, le célèbre
commissaire devenu curé, lui tombe
dessus alors qu’il est venu goûter
l’air pur du Beaufortain. Un petit livre
bourré d’humour et d’enchaînements
imprévus à déguster bien calé devant
les paysages de la Pierra Menta ou
du Grand Mont.
05~Orage sur la Pierra
Yann Teissier du Cros
Editions Thot - 2009
Menta
Une intrigue au cœur des montagnes,
cinq ans après le rattachement de
la Savoie à la France. Entre l’alpage
de Conchette, le Cormet de Roselend,
Boudin, Beaufort, Granier et BourgSaint-Maurice, Céline Mappaz piste
l’assassin de son mari Maxime.
Au-delà de l’histoire, c’est une belle
plongée au coeur des alpages, dans la
vie des “montagnards” du Beaufortain.
07~Ensemble dans
le Beaufortain
Revue trimestrielle de l’Association
d’Animation du Beaufortain
Une bonne entrée en matière pour
se plonger dans la vie locale. Depuis
bientôt 50 ans, en plus des articles
consacrés à l’actualité du pays, on
y trouve des dossiers thématiques
très riches et instructifs sur l’histoire,
le patrimoine, l’environnement et
les grands enjeux du territoire qu’ils
soient sociaux ou économiques.
Les deux derniers numéros ont été
consacrés aux modes de déplacement
(4ème trimestre 2010) et à l’engagement
(1er trimestre 2011).
AAB : 04 79 38 33 90
Carnet d'adresses
Beaufortain Tourisme
Communauté de Communes
du Beaufortain
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Magazine édité par Beaufortain Tourisme
Communauté de Communes
Directeur de publication : Dominique DOIX
Rédacteur en chef : Nicolas DESCHAMPS
Conception, coordination et rédaction : AXIUBA Communication
Rédaction : Catherine Claude et Pascale Debruères
Design graphique et réalisation : Studio TOUCAN •TOUCAN
Impression : Delta Color Imprimerie
Dépôt légal : juin 2011
ISSN : 1969-9514 – ©Versants Le magazine du Beaufortain 2011
Le contenu des articles n’engage que leurs auteurs.
Les manuscrits et documents publiés ne sont pas renvoyés.
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des Saisies
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Au-delà
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