L`ABANDON DE POSTE
Transcription
L`ABANDON DE POSTE
Statut texte en tête taille 16 Déroulement de carrière – Discipline – n°4 Août 2016 L’ABANDON DE POSTE La théorie de l’abandon de poste est une construction jurisprudentielle, corollaire du principe de service fait selon lequel l’agent qui n’a pas accompli son service n’a pas droit à son salaire. Cette absence correspond à une volonté de l’agent territorial (stagiaire, titulaire, contractuel de droit public et droit privé) de cesser son travail sans y avoir été autorisé. Bien qu’étant un manquement à l’obligation de servir, cette faute disciplinaire entraîne la suppression des garanties disciplinaires. Le fonctionnaire est considéré comme ayant sciemment « rompu le lien qui l’unissait à l’administration et renonçant délibérément aux garanties qu’il tient de son statut ». Dès lors, cela autorise l’autorité territoriale à l’exclure définitivement du service et donc à le radier des cadres, après avoir respecté une procédure préalable de mise en demeure, sans procédure disciplinaire ni respect des droits de la défense. Le juge administratif a défini l'abandon de poste de la façon suivante : "lorsque l'agent ne s'est ni présenté ni n'a fait connaître à l'administration aucune intention avant l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l'absence de toute justification d'ordre matériel ou médical, présentée par l'agent, de nature à expliquer le retard qu'il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé" (CE du 10 octobre 2007, req. n° 271020) Service : Statuts - Rémunération – 26/08/2016 Village des Collectivités Territoriales - 1 avenue de Tizé - CS 13600 - 35236 THORIGNÉ-FOUILLARD CEDEX www.cdg35.fr LE DÉCLENCHEMENT DE LA PROCEDURE D’ABANDON DE POSTE : L’ABSENCE INJUSTIFIÉE L'abandon de poste couvre 2 hypothèses. L’application de la notion d’abandon de poste suppose que l’agent soit physiquement absent du service. 1/ l'abandon pur et simple des fonctions : une cessation de travail sans autorisation et motif valable Exemples d’abandon de poste et de maladie : - la non-reprise de fonctions de la part d'un agent reconnu apte par le comité médical et destinataire d'une mise en demeure, qui se contente de produire un nouveau certificat médical n'apportant aucun élément nouveau sur son état de santé (CE du 21 juin 1995, req. n° 116935) - l'agent, placé en congé de maladie, reconnu apte à l'issue d'une contre-visite et mis en demeure de reprendre ses fonctions ; la mise en demeure met implicitement fin au congé de maladie ; aucune décision expresse préalable n'est donc requise (CAA Nancy du 17 novembre 2008, req. n° 08NC00397) - le fait de se soustraire sans justification à une contre-visite pendant un congé maladie. L’administration est alors en droit d’engager une procédure de radiation des cadres pour abandon de poste ; la lettre de mise en demeure peut être notifiée à l’agent alors que le congé est en cours (CE du 11 décembre 2015, req. n° 375736) Autres exemples d’abandon de poste : - le fait de s'absenter sans avoir obtenu ni même sollicité un congé annuel (CE du 25 septembre 1987 n° 64774) une démission refusée (CE du 19 mars 1997, M. Desmoineaux, req. n° 134197 et 134209) A l’inverse, ne constituent pas un abandon de poste : - la non-reprise de fonctions de la part d'un agent malgré un avis favorable du comité médical suivi d'une mise en demeure, dès lors que l'agent produit un nouveau certificat médical qui apporte un élément nouveau sur son état de santé (CAA Lyon du 11 mai 2004, req. n° 00LY02023) - le fait pour un fonctionnaire de cesser ses fonctions tout en venant sur les lieux de son travail pour y passer un certain temps (CE du 27 février 1981, req. n° 14959) La grève étant un droit constitutionnel, l’agent public en grève ne peut faire l’objet d’une procédure pour abandon de poste. En conséquence, toute procédure d’abandon de poste engagée est illégale. 2/ le refus de rejoindre son poste ou une absence de reprise après une absence régulière (expiration d’un congé, d’une période de disponibilité, de mutation ou de nomination) Exemples d’abandon de poste : - le refus d’une concierge d’école d’occuper le nouveau poste qui lui a été assigné (CE du 27 février 1959, Dame Maiza, req. n° 270269) - le refus d'un agent de rejoindre ses nouvelles fonctions sur un poste aménagé au motif qu'il n'avait pas été préalablement informé des tâches que comportait cet emploi, dès lors que cette insuffisance de précisions ne l'empêchait pas de se rendre sur son lieu de travail (CE du 19 novembre 2007, req. n° 296115) - l’intention clairement manifestée de ne pas se rendre au bureau où il avait été nouvellement affecté (CE 8 décembre 1982, req. n° 17002) Service : Statuts - Rémunération – 26/08/2016 Village des Collectivités Territoriales - 1 avenue de Tizé - CS 13600 - 35236 THORIGNÉ-FOUILLARD CEDEX 2 www.cdg35.fr - même si la nouvelle affectation est illégale, dès lors qu’elle ne compromet pas gravement un intérêt public et n’est pas manifestement illégale, l’agent est tenu de s’y soumettre (CE du 29 mars 1993, req. n° 99929) A l’inverse, ne constituent pas un abandon de poste : - le refus d’un agent de rejoindre sa nouvelle affectation dès lors qu’il maintient le « lien au service » en continuant à se rendre à son ancien poste de travail (CAA Douai du 20 décembre 2001, Commune d’Hautmont, req. n° 98DA01163). - le refus d’un fonctionnaire, pris en charge par un centre de gestion, d’assurer des missions à caractère temporaire (CAA Nantes du 12 avril 1995, CDG76, req. n° 94NT00654) - un simple retard (48 heures) pour reprendre son poste après des congés constitue une faute susceptible d’entraîner des poursuites disciplinaires mais pas un abandon de poste (CE n°85637 - 6 mars 1992 Hôpital rural de SMT) LA PROCEDURE DE L’ABANDON DE POSTE Mise en demeure préalable, écrite et notifiée Une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent a préalablement été mis en demeure, sous forme écrite et notifiée, de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai fixé par l'administration, sous peine d'encourir une radiation des cadres sans procédure disciplinaire (CE du 11 décembre 1998, req. n° 147511). La mise en demeure doit être écrite et notifiée à l’intéressé par lettre recommandée avec accusé de réception pour permettre la preuve de l’envoi et de la réception, ou par un agent assermenté. Dès lors, en cas d'envoi d'une lettre recommandée, la notification de la mise en demeure ne peut être considérée comme ayant été régulièrement effectuée qu'après l'expiration du délai pendant lequel l'intéressé peut en prendre connaissance, qui correspond à la date limite de garde par les services. L'envoi recommandé non distribué est conservé en instance pendant 15 jours calendaires (article R1-1-6 du code des postes et des communications électroniques). La présentation d’un pli recommandé à une adresse que le destinataire a quitté sans en aviser l’administration vaut notification (CAA Nantes du 22 novembre 2001, req. n°98NT02553). La lettre de mise en demeure peut être notifiée en cours de congé en cas de soustraction volontaire à une contre-visite (CE du 11 décembre 2015, req. n° 375736). Délais La mise en demeure doit comporter le délai dans lequel l’intéressé doit rejoindre son poste et l’information sur le risque encouru s’il n’obtempère pas, à savoir la radiation des cadres, sans procédure disciplinaire préalable. L’administration doit fixer, dans sa mise en demeure, une date au terme de laquelle, si l’agent ne se manifeste pas soit en reprenant son poste soit en justifiant d’un motif valable pour son absence, il sera considéré comme ayant abandonné son poste. Une mise en demeure, avec remise en mains propres, sommant l'agent de reprendre ses fonctions le lendemain matin de la notification a été jugée régulière (CE du 25 juin 2003, req. n° 233954). Service : Statuts - Rémunération – 26/08/2016 Village des Collectivités Territoriales - 1 avenue de Tizé - CS 13600 - 35236 THORIGNÉ-FOUILLARD CEDEX 3 www.cdg35.fr Information expresse sur les risques encourus L’information sur les risques de l’abandon de poste doit figurer dans la mise en demeure. Désormais le juge exige que la mise en demeure précise bien des risques encourus par l’agent s’il ne répond pas à celle-ci, c’est-à-dire d’être radié des cadres sans procédure disciplinaire, ni communication de son dossier individuel. Si ce n’est pas le cas, toute la procédure pour abandon de poste est viciée (CE du 11 décembre 1998, M. Casagranda, req. n° 147511). L’agent doit être mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai fixé par l'administration, et informer l'intéressé du fait qu'il encourt, à défaut, une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable (CE du 15 juin 2005, M. X., req. n° 259743). Seconde mise en demeure Il est préconisé une double mise en demeure espacée de 3 semaines pour tenir compte notamment des délais postaux, de surcroît lors des périodes de vacances scolaires. Cependant, il convient d’éviter les mises en demeure multiples : des lettres de mise en demeure successives signifient en effet que l’employeur a estimé que les mises en demeure antérieures n’avaient pas entraîné de rupture du lien entre le fonctionnaire et son service. Dans ce cas, le juge ne retient que la dernière mise en demeure. LES EFFETS DE L’ABANDON DE POSTE Radiation des cadres et perte de la qualité d’agent territorial La décision d’éviction qui doit être motivée intervient en cas de refus manifeste d’obtempérer, de silence de l’agent ou de présentation de justificatifs non retenus par l’administration. La décision de radiation des cadres intervient au terme du délai fixé par la mise en demeure, et ce, au plus tôt à compter de la date de notification de la mise en demeure. L’agent ne peut prétendre à bénéficier de ses congés annuels. L’agent est radié des effectifs de l’administration et perd le bénéfice de son concours le cas échéant. Effets pécuniaires L’agent radié des cadres ne peut prétendre : - à aucune allocation pour perte d’emploi de l’employeur public - ni indemnité de licenciement L’agent peut, le cas échéant, bénéficier du maintien de ses droits aux indemnités journalières du régime d’assurance maladie et maternité dans la limite maximum fixée par le code de la sécurité sociale. Une mise en demeure, avec remise en mains propres, sommant l'agent de reprendre ses fonctions le lendemain matin de la notification a été jugée régulière (CE du 25 juin 2003, req. n° 233954). Vous pouvez retrouver un modèle d’arrêté sur le site internet du CDG 35. Service : Statuts - Rémunération – 26/08/2016 Village des Collectivités Territoriales - 1 avenue de Tizé - CS 13600 - 35236 THORIGNÉ-FOUILLARD CEDEX 4 www.cdg35.fr