Homélie du Jeudi Saint année C, Calvisson, 28 mars 2013, Serge

Transcription

Homélie du Jeudi Saint année C, Calvisson, 28 mars 2013, Serge
Serge Ortega, Jeudi saint, 28 mars 2013, Calvisson
Homélie du Jeudi Saint Année C
En ce Jeudi-Saint, nous nous souvenons avec toute l’Eglise de la dernière Cène du Seigneur. Pour
nous y préparer nous avons lu le récit de l’exode, cette première lecture nous présente les
consignes données par Dieu pour célébrer la Pâques. Peu avant la sortie d’Egypte, où le peuple
hébreu était esclave victime de l’oppression de pharaon, YAHVE, ayant entendu les cris de son
peuple, s’adresse à Moïse et à son frère Aaron pour délivrer le message du rituel que les hébreux
devaient observer en souvenir de ce passage vers la Terre Promise.
« Ce jour là sera pour vous un mémorial. Vous en ferez pour le Seigneur une fête de
pèlerinage. C’est une loi perpétuelle : d’âge en âge vous la fêterez. ». Depuis, tous les ans, la
famille ou le voisinage devaient se réunir pour le repas pascal en souvenir de la nuit de délivrance
d’Egypte. La Pâques est un repas que l’on prend debout, en tenue de voyage, pour gagner le pays
où l’on va vivre libre.
Jésus a célébré la Pâques au cours de cette fête des hébreux. Comme pour celle du peuple d’Israël,
la Pâques des chrétiens est un témoignage communautaire. Avec toute l’Eglise nous avons à
témoigner de notre foi dans le monde. Nombreux sont celles et ceux qui ne croient pas ou sont
indifférents. Nous ne sommes pas envoyés pour « faire croire mais pour dire » c’est là une
participation active à cette communauté de foi. Le Dieu que nous célébrons continue à vouloir libérer
son peuple.
Dans la seconde lecture, Saint Paul nous rappelle dans quelles conditions doit être célébré le repas
Pascal. L’auteur cite les paroles de Jésus « ceci est mon corps, qui est pour vous. Faites cela en
mémoire de moi ». Sans doute pouvons-nous voir là… l’Agapè de Dieu ; un appel à la charité, à la
réconciliation. Sans la charité, la communion ne serait-elle pas incomplète ou factice ?
Comprenons bien : nous sommes rassemblés pour proclamer la mort du Seigneur, célébrer sa
résurrection et lui dire que nous attendons sa venue. C’est la nouvelle alliance entre Dieu et le
monde dans l’Amour infini de Dieu pour l’humanité ; cela dépasse tout ce que nous pouvons
imaginer ; il est donc important que notre vie et nos rapports entre nous soient en accord avec cet
Amour de Dieu.
Pour nous le Jeudi-Saint c’est l’Eucharistie. Or dans son évangile, Saint Jean ne parle pas de
l’Eucharistie. A la place du récit de l’institution, Jean nous parle apparemment de tout autre chose : le
lavement des pieds.
Jésus et ses disciples sont là, même celui qui doit bientôt le renier et celui qui doit le trahir. Ils sont
réunis pour célébrer la Pâques par un repas. Nous nous trouvons bien dans l’ambiance de la
dernière Cène. Les douze sont les disciples, Jésus est le Maître, comme ils disaient. Or voici que le
Maître se lève de table, prend la tenue de serviteur, « il prend un linge qu’il noue à la ceinture, il
verse de l’eau dans un bassin et se met à laver les pieds des disciples ». C’est le monde à
l’envers ! Pierre le comprend bien ainsi puisqu’il refuse que Jésus lui lave les pieds. Mais Jésus
insiste. Pierre doit se laisser laver les pieds, sous peine de ne pas avoir part avec Jésus. Que signifie
les paroles de ce récit, la première est cette parole intérieure de Jésus : « Sachant que l’heure était
venue de passer de ce monde à son Père, ayant aimé les siens il les aima jusqu’au bout ».
Nous sommes en présence de la véritable grandeur de Jésus. Le rappel de l’immense amour qu’il
porte aux siens nous situe immédiatement dans la Trinité : le Père, le Fils et l’Esprit d’Amour.
Quelque chose de cela a touché Pierre puisque la deuxième parole rapportée vient de lui : « Tu ne
me laveras pas les pieds, non, jamais ! » Pierre ressent une grande confusion. Ceci nous indique
en quel sens nous devons orienter notre vie spirituelle si nous voulons être chrétiens.
Nous devons retrouver le sens du baptême que le lavement des pieds n’est pas sans rappeler. L’eau
du baptême comme l’eau du lavement des pieds est comme la source de la démarche chrétienne, la
prise de conscience que nous sommes sauvés du péché. Alors que la culpabilisation tente toujours
de nous ramener à notre péché pour nous y enfermer dans le remord suicidaire ; la foi chrétienne
nous ouvre à la libération. Elle ne nie pas le péché, elle en donne même une vive conscience, mais
comme un point de départ. Voilà ce que je suis sans Dieu ! Elle n’en donne conscience que
comme contraste avec le salut qui est offert et la libération qui est proposée. Jésus n’a pas d’autre
intention que de nous révéler la miséricorde divine. Pécheurs, il sait bien que nous le sommes, et
c’est parce que nous le sommes et parce qu’il le sait qu’il lave les pieds de ses disciples, tous les
disciples même Judas, les disciples que nous sommes tous, la multitude des disciples que nous
formons. Dieu a revêtu la tenue de serviteur. Il noue le tablier à la ceinture et se met à genoux devant
chacun de nous. La position grandiose que toutes les religions ont donnée à Dieu, croyant ainsi
respecter sa grandeur et sa transcendance, Jésus n’en a pas voulu pour lui. Le paradoxe est
incroyable. Ce n’est plus l’homme qui est à genoux devant Dieu, c’est Dieu qui se met à genoux
devant chacun de nous. C’est là le sens profond du geste que le Père Christophe va signifier avec
nous tout à l’heure, méditons à ce moment là l’infini Amour de Dieu que ce geste signifie.
Si nous suivons Pierre et demeurons dans son premier mouvement de refus offusqué, même si ce
refus se fonde sur la grande estime que nous portons au Maître, le salut ne peut plus nous atteindre.
Acceptons, comme Pierre, que Jésus nous lave les pieds, et ensuite, comme Jésus a fait pour nous,
faisons nous aussi pour les autres.
Dans la démarche de l’année de la foi et de diaconia 2013, dans la simplicité et l’humilité signifiées
par le saint Père François (****), mettons nous au service de la diaconie de l’Eglise auprès de tous et
surtout des plus pauvres. « L’homme est un pauvre qui doit tout demander à Dieu » nous dit sainte
Thérèse d’Avila. Serons-nous assez pauvres pour demander humblement et avec confiance la grâce
d’aimer vraiment Dieu et les autres ? ….. Amen.